CA Basse-Terre, ch. soc., 12 octobre 1998, n° 9500944
BASSE-TERRE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Shell des Antilles et de la Guyane (SA)
Défendeur :
Aurelie
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Reoyo
Conseillers :
MM. Levet, Chevallier
Avocats :
Mes Courchinoux, Winter-Durennel, Leger
Exposé du litige
Vu le jugement du Conseil des prud'hommes de Fort-de-France en date du 12 juillet 1994 par lequel il s'est déclaré compétent pour juger du litige opposant les parties, et a ordonné avant dire droit une expertise ;
Vu l'arrêt rendu sur contredit le 18 mai 1995 par la Cour d'appel de Fort-de-France, confirmant le jugement entrepris en ce qu'il a dit l'article L. 781-1 du Code du travail applicable en l'espèce, déclaré nulle la clause attribuant compétence au Tribunal de commerce de Paris et a ordonné la saisine de la Cour d'appel de Basse-Terre sur le fondement de l'article 47 du nouveau Code de procédure civile ;
Vu l'arrêt rendu le 11 décembre 1995 par la Cour d'appel de Basse-Terre ordonnant une réouverture des débats ;
Vu les arrêts rendus le 6 mai 1996 et le 3 février 1997 par la Cour d'appel de Basse-Terre confirmant la mesure d'instruction ordonnée par les premiers juges et la complétant ;
Vu le rapport d'expertise déposé au greffe de la cour le 9 janvier 1998 ;
Vu les conclusions récapitulatives après rapport de la société Shell des Antilles et de la Guyane ;
Vu les conclusions récapitulatives après rapport de Monsieur Aurelie.
Monsieur Aurelie a exploité en qualité de locataire gérant un fonds de commerce de station-service, distribution de carburants, ventes diversifiées, situé à Fort-de-France ;
Le premier janvier 1984, pour l'exploitation de la station-service située à Fort-de-France dans l'enceinte du centre commercial de Cluny, il signait un contrat de location gérance avec la SAGF.
Le 29 juillet 1992, la SAGF notifiait à son gérant sa décision de résilier le contrat, avec préavis de trois mois, a compter du 1er août soit au 1er novembre 1992.
M. Aurelie saisissait le Conseil de prud'hommes de Fort-de-France sur le fondement de l'article L. 781-1 du Code du travail, le 6 avril 1993.
Demandes et prétentions des parties
La société Shell Antilles Guyane, appelante, demande à la cour de débouter Monsieur Aurelie de toutes ses demandes, de la dire bien-fondé en sa demande reconventionnelle, de condamner Monsieur Aurelie à lui payer la somme de 770 327,52 F avec intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 1992, à hauteur de 508 330,42 F ;
Subsidiairement d'ordonner la compensation entre les dettes et les créances respectives des parties ;
De condamner Monsieur Aurelie aux entiers dépens de première instance et d'appel y compris les frais de l'expertise;
Elle expose :
Sur les demandes de M. Aurelie :
Sur les rappels de salaire sollicités majorés des heures supplémentaires :
Monsieur Aurelie n'est pas en droit de réclamer un rappel de salaire ni des heures supplémentaires.
La détermination d'un rappel de rémunération nécessite de comparer les bénéfices commerciaux nets réalisés par le gérant et le salaire de base net augmenté le cas échéant des heures supplémentaires pour la période concernée ;
La convention collective nationale ne s'appliquant pas dans les entreprises des départements d'Outre-mer, la cour a demandé à l'expert de prendre en compte le coefficient de cette convention à titre de référence, correspondant à la qualification et à l'activité de M. Aurelie.
Cependant elle considère qu'une éventuelle créance salariale de M. Aurelie ne saurait être définie par rapport à un salaire de référence ne présentant aucun caractère obligatoire et ne pouvant donc lui être valablement opposé ;
Les calculs de l'expert doivent être écartés pour ce premier motif ;
Subsidiairement sous cette réserve de principe, elle reconnaît que le coefficient hiérarchique correspondant en métropole, pour les fonctions exercée par M. Aurelie, est bien le coefficient K 200 ayant servi de référence à l'expert ;
S'agissant des bénéfices commerciaux, Monsieur Aurelie a été incapable de justifier de leur réalité puisque l'expert indique dans son rapport que les comptes qui lui ont été présentés n'ont pas été audités et n'ont pas été établis par un cabinet d'expertise.
La cour ne saurait donc asseoir la moindre condamnation sur cette base ;
S'agissant des heures supplémentaires, elle indique que Monsieur Aurelie est incapable de justifier de leur réalité ;
Que le chiffre de 60 heures par semaine, correspondant à la durée légale maximum de dix heures par jour, retenu par l'expert, ne peut pas davantage être pris en considération que le chiffre de 99,5 heures alléguées par le demandeur, alors que la société n'imposait aucun horaire de présence, que le gérant était libre d'engager du personnel, ce qu'il a fait en embauchant deux salariés, que la station était en libre-service jusqu'en décembre 91 ce qui limitait les besoins en personnel et qu'elle n'était jamais ouverte le dimanche ;
Elle s'oppose au vu des dispositions de l'article 146 alinéa 2 du nouveau Code de procédure civile à la demande de complément d'expertise formulée sur ce point par l'intimé qui n'a pas fourni à l'expert précédemment désigné les éléments de preuve qui lui était demandés.
Sur les congés payés :
Le droit à indemnité de congés payés est subordonné à la prise effective du congé par le salarié
Il incombe à Monsieur Aurelie de prouver qu'il a pris des congés qui ne lui ont pas été rémunérés, ou de démontrer qu'il a sollicité la prise de tels congés et que son employeur les lui a refusé de manière fautive ce qui lui permettrait de prétendre à une indemnité réparatrice ;
Or il ne démontre ni l'une ni l'autre de ces conditions. Il ne peut donc être fait droit à cette demande d'autant plus qu'il n'a pas travaillé entre le 10 février et le 10 mars 1992, et qu'il a cessé toute activité à compter du premier juillet 1992.
Sur le défaut d'immatriculation au régime général de la sécurité sociale :
S'agissant de l'assurance maladie et de la retraite de base l'expert n'a pas caractérisé un quelconque élément de préjudice ; aucune réclamation ne saurait donc être admise de ce chef.
S'agissant de la perte de points de retraite complémentaire, dont l'expert a retenu l'existence, il s'agit de la seule hypothèse susceptible d'être accueillie à partir des seules données certaines du dossier ; l'expert a calculé un chiffre de 65 849 F, correspondant à l'indemnité maximum susceptible d'être allouée à Monsieur Aurelie de ce chef.
Sur l'indemnisation du chômage :
La seule hypothèse pouvant être prise en compte est celle du salaire de base sans heures supplémentaires et tenant compte de l'absence de 1992, soit un maximum de 296 781 F chiffrée par l'expert ;
Toutefois rien ne permet de considérer, dans le dossier, que Monsieur Aurelie a subi avec certitude un préjudice de cette importance ;
Monsieur Aurelie ne justifie ni de ses conditions d'existence, ni des démarches qu'il aurait faites pour retrouver un emploi ; les pièces qu'il produit sont insuffisantes pour une période d'inactivité de 60 mois et sa demande devra donc être rejetée.
Sur l'indemnité de licenciement :
La convention collective nationale de l'industrie du pétrole ne s'appliquant pas au cas d'espèce, Monsieur Aurelie ne peut prétendre qu'à l'indemnité minimum légale prévue par les articles L. 122-9 et R. 122-2 du Code du travail soit un dixième de mois jusqu'à dix ans d'ancienneté et un dixième de mois plus un 15e de mois au-delà de dix ans ;
L'ancienneté de Monsieur Aurelie remonte au premier janvier 1984, date d'effet du premier contrat de location gérance, et non au premier juin 1977 comme indiqué par Monsieur Aurelie, cette dernière date étant celle du bail qui lui avait été consenti par le précédent propriétaire ainsi que la cour l'a retenu dans son arrêt du 11 décembre 1995 ;
La rupture des relations contractuelles étant intervenue le 1er novembre 1992, son ancienneté est donc de 8 ans et 10 mois ;
Le dernier salaire conventionnel étant de 8 612 F, l'indemnité de licenciement susceptible d'être allouée à Monsieur Aurelie s'élèverait à sept mille six cent huit francs, et en appliquant par pure hypothèse la convention collective nationale de l'industrie du pétrole la somme de 68 895 F.
Sur la demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
L'attribution à Monsieur Aurelie du statut d'assimilé salarié au sens de l'article L. 781-1 du Code du travail n'entache pas de nullité le contrat de location gérance par lui convenu avec la SAGF et ne lui fait pas perdre le statut de locataire commerçant ;
L'application du droit du travail ne saurait dans ces conditions interdire à la SAGF de faire jouer son droit de bailleur à recouvrer la libre disposition de son bien dans les conditions contractuelles ; l'article 2 du contrat du 1er janvier 1984 prévoyait expressément que chaque partie pourrait y mettre fin sous réserve d'un préavis de trois mois en résiliant le contrat qui liait les parties le 29 juillet 1992, avec effet au premier novembre suivant, la SAGF n'a fait qu'exercer l'une de ses prérogatives contractuelles.
Ces circonstances sont exclusives de l'absence de cause réelle et sérieuse ;
En toute hypothèse la résiliation du contrat de Monsieur Aurelie se justifie par les mauvais résultats de la station et par les retards réitérés des paiements de l'intéressé allant même jusqu'à la remise de chèques sans provision ;
Subsidiairement il ne justifie pas avoir recherché un emploi postérieurement à la résiliation litigieuse et il ne justifie pas de sa situation depuis le 1er novembre 1992 ; dans ces conditions il ne pourrait que bénéficier de l'article L. 122-14-4 du Code du travail c'est-à-dire d'une indemnité de six mois, soit sur la base de son dernier salaire 51 672 F (8 612 x 6).
Sur la demande reconventionnelle de la société Shell Antilles Guyane :
La solution retenue par l'arrêt du 14 juin 1906 qui n'aurait admis que les factures de 122 160 F et 116 080 F, peut être remise en cause, cet arrêt ayant été rendu en matière de référé et ne bénéficiant donc pas de l'autorité de la chose jugée, les juges du fond étant compétents pour apprécier les chefs de demande qui se heurteraient à une contestation.
S'agissant du relevé de compte contractuel arrêté à la date du 5 février 1997 :
Il apparaît que ce relevé de compte, régulièrement versé aux débats, fait apparaître à la charge de Monsieur Aurelie une dette globale de 508 330,42 F, après imputation de crédits divers décomposés ainsi :
Premier poste : 11 130,19 F, constitué par des bons prépayés ; ces bons n'ont pu être honorés par Monsieur Aurelie en raison de la fermeture de la station ; présentés dans d'autres stations Shell, ils ont été honorés par ces dernières et la SAGF les leur a remboursés.
deuxième poste : cinq factures de livraisons de carburant restées impayées ; deux d'entre elles ayant été payées au moyen de chèques sans provision ont été admises par la Cour d'appel de Fort-de-France; les trois autres sont contestés par Monsieur Aurelie qui fait valoir son absence de signature sur les bons de prise en charge alors que les deux premières étaient également dépourvues de signature et pourtant reconnues par lui.
troisième poste : il s'agit du loyer contractuel pour la période de juillet à novembre 1992, qui se monte à 12 987,70 F, montant que Monsieur Aurelie n'a jamais contesté.
quatrième poste : il s'agit de factures de lubrifiant pour un montant de 29 004,10 F.
S'agissant des cartes Shell :
Monsieur Aurelie doit à la SAGF une somme de 261 997,10 F au titre de la répétition de l'indu ; lorsque le nouveau gérant a adressé à la SAGF les cartes établies par cette dernière et remises à ses clients institutionnels, les virements effectués par cette société au titre de ces cartes ont été faits sur le compte bancaire de Monsieur Aurelie, suite à une erreur des services bancaires ; ces virements sont intervenus de janvier à novembre 93 et résultent des relevés bancaires versés par Monsieur Aurelie lui-même aux débats ; ils doivent donc être restitués à la SAGF.
Le montant total de la créance de la SAGF est donc de 770 327,52 F. Elle sollicite que Monsieur Aurelie soit condamné à lui payer cette somme avec les intérêts de droit sur 508 330,42 F, à compter de la mise en demeure du 29 juillet 1992 et subsidiairement d'ordonner la compensation entre les dettes et les créances respectives des parties.
Monsieur Aurelie, intimé, demande à la cour :
De condamner la SAGF à lui payer :
- à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la non affiliation au régime général de la sécurité sociale du fait de la SAGF 127 455 F pour le risque vieillesse (retraite complémentaire) et pour le chômage 574 875 F ;
De dire et juger que la rupture des relations commerciales à l'initiative de la SAGF s'analyse en un licenciement dépourvu de motif réel et sérieux, en conséquence en application de l'article L. 122-14-4 du Code du travail condamner cette société à lui payer l'indemnité calculée sur deux ans de salaire soit 268 920 F ;
La condamner en outre au paiement de l'indemnité de congédiement prévue par l'article 6 de la convention collective nationale de l'industrie du pétrole due à l'employé licencié après un an d'ancienneté, sauf pour faute grave, soit pour l'intéressé qui présente près de quinze ans d'ancienneté 80 562 F ;
Dire et juger que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la demande ;
Ordonner le complément d'expertise destiné à chiffrer la créance en heures supplémentaires réellement accomplies par Monsieur Aurelie en prenant en compte outre l'horaire d'ouverture de la station, le litrage débité, la présence de salariés, critères totalement méconnus par l'expert, les frais de ce complément d'expertise étant à la charge de la SAGF ;
Donner acte à Monsieur Aurelie de ce qu'il ne se reconnaît débiteur envers la SAGF que des seules sommes retenues par l'arrêt de la Cour d'appel de Fort-de-France le 14 juin 1996 devenu définitif soit 228 240 F ;
Débouter la SAGF du surplus de sa demande du chef de la créance qu'elle prétend revendiquer ;
Condamner la SAGF en paiement de 30 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Condamner en outre cette société en tous les dépens notamment les frais de l'expertise déjà diligentée ;
Il expose que :
- s'agissant des bénéfices commerciaux.
Il ne peut être fait droit à l'argumentation de la SAGF, cette dernière disposant d'un droit de regard sur la comptabilité, droit qu'elle justifie par les contraintes de l'article 1684-3 du Code général des impôts, et qu'elle exerce par l'entremise de ses inspecteurs commerciaux effectuant sur pièce et sur place le contrôle permanent des recettes d'exploitation ;
Au surplus la qualité de fournisseur exclusif du gérant tenu de revendre les articles commercialisés par la SAGF sans possibilité d'une politique personnelle de prix, permet en fait à cette société d'exercer sur ses sources de revenus le double contrôle quantitatif et tarifaire, l'essentiel de l'activité déployée dans la station consistant à vendre des carburants et des lubrifiants fournis en exclusivité par la SAGF, ce qui n'est pas contesté.
- s'agissant des heures supplémentaires.
L'expert a choisi de ne retenir que l'existence des heures travaillées dans le cadre du maximum légal déniant de ce fait l'existence des heures supplémentaires, en fait le principe même de ce chef de demande ;
En réalité, l'horaire d'ouverture conditionne l'exploitation ;
L'usage de la profession est celui d'une ouverture de quatorze heures par jour, six jours ou six jours et demi sur sept, comme en l'espèce.
L'arrêt du 18 mars 1995, définitif, retient que "Monsieur Aurelie ne pouvait fixer librement ses conditions d'exploitation et notamment ses horaires d'ouverture et de fermeture" ;
Le litrage débité a toujours été supérieur à 60 000 litres dans les deux stations exploitées par Monsieur Aurelie ; il résulte des normes professionnelles constantes que la vente de 60 000 litres de carburant constitue le débit moyen mensuel qu'est susceptible d'écouler un couple de gérants qui travaillent dans des conditions normales d'exploitation six jours par semaine 14 heures par jour ;
Compte tenu de la présence de deux salariés employés à temps partiel, de la présence de Monsieur Aurelie seul le dimanche matin, il est manifeste que l'horaire de travail effectif se situait bien au delà des 60 heures hebdomadaires avancées par l'expert ;
L'expert a tenu compte à tort des moyens avancés par la SAGF selon lequel Monsieur Aurelie n'aurait pas débité de carburant du 10 février au 10 mars 1992 ainsi qu'à compter du premier juillet 1992 si tel était le cas, on ne s'explique pas que la SAGF ait attendu 5 ans après la fin des relations contractuelles pour s'étonner de ce fait ; aucune mise en demeure au gérant de faire cesser ce trouble n'est produite aux débats ;
En outre, à l'examen du tableau émanant des services commerciaux de la SAGF, il apparaît qu'entre 1990 et 1992, le litrage est sensiblement le même;
Il convient donc de retenir les seuls calculs qui retiennent la rémunération de la totalité des heures effectivement travaillées par Monsieur Aurelie, soit pour la période soumise à l'expertise en heures normales et heures supplémentaires six cent quatre-vingt onze mille cinq cent soixante quinze francs.
- s'agissant des congés payés :
Il ne s'agit pas de savoir si le concluant a pris ou non des congés pendant la période de référence, mais de démontrer que, dans l'hypothèse où il les a pris, ils lui ont été payés par l'employeur comme l'exige sa qualité de " commerçant protégé " par les dispositions du Code du travail ;
La mission de l'expert étant "d'évaluer le montant de l'indemnité de congés payés qu'aurait due percevoir Monsieur Aurelie s'il avait pris le congé réglementaire", cette indemnité, en ne prenant en compte que la dernière période d'activité et en tenant compte des heures supplémentaires, atteint 23 750 F ;
- s'agissant du préjudice subi par Monsieur Aurelie par suite du défaut d'immatriculation au régime général de la sécurité sociale depuis le 1er janvier 1984 :
Monsieur Aurelie a sollicité lui-même son affiliation auprès de la caisse générale de sécurité sociale de la Martinique en 1992 afin de pallier à la carence de la SAGF ;
Cependant le fait de s'être affilié dès le début de son activité ne saurait exonérer la SAGF de ses obligations ; en l'espèce le calcul de l'expert a été effectué à partir de 1988 alors que le préjudice doit être évalué sur toute la période d'exploitation dans la mesure où dès le début des relations contractuelles il appartenait à la société de procéder à l'immatriculation de son gérant ;
Il convient de retenir à titre provisionnel le calcul de l'expert concernant le retentissement sur la perte des points de retraite, soit compte tenu du rappel de rémunération en heures normales et en heures supplémentaires cent vingt sept mille quatre cent cinquante cinq francs ; au titre des indemnités de chômage dont a été privé Monsieur Aurélie, calculées sur les mêmes bases, la somme de 574 875 F ;
S'agissant des sommes qui seraient dues à la SAGF
La SAGF entend remettre en cause par le biais de l'expertise des dispositions de l'arrêt de la Cour d'appel de Fort-de-France en date du 14 juin 1996, devenu définitif ;
Monsieur Aurelie persiste à contester le bien-fondé de la demande en paiement de la somme de 770 327,52 F ;
- s'agissant de l'indemnité due pour le licenciement dépourvu de motif réel et sérieux :
La décision de résilier le contrat de location gérance à durée indéterminée a été notifiée à Monsieur Aurelie le 29 juillet 1992 ;
Il s'agit d'une rupture de contrat, sans motif, au mépris des procédures prévues au Code du travail, constituant un abus réprimé par les articles 8 et 9 de l'ordonnance du premier décembre 1986 rendant nulle la lettre de rupture et ouvrant à l'intéressé le bénéfice des dispositions de l'article L. 122-14-4 du Code du travail qu'il revendique en sa qualité de "commerçant protégé", l'aspect commercial des relations contractuelles ne pouvant être seul retenu ainsi qu'il résulte de la jurisprudence selon laquelle les dispositions de la loi de 1956 ne sont pas incompatibles avec celles de la loi de 1941 (cassation sociale Rio/Shell Berre) ;
Du fait des relations contractuelles existant depuis le 17 juin 1977, de la brutalité de la rupture, de l'impossibilité pour Monsieur Aurelie âgé de 59 ans lors de cette rupture de contrat de retrouver du travail, du fait qu'il a été privé en outre de toute protection sociale, il doit lui être alloué une indemnité calculée sur deux ans du dernier salaire en heures supplémentaires, soit compte tenu des calculs de l'expert 268 920 F (134 460 x 2).
- s'agissant de l'indemnité de congédiement :
Monsieur Aurelie sollicite celle prévue par la convention collective nationale de l'industrie du pétrole, soit une indemnité de 80 562,72 F, en prenant pour base de calcul un dixième du dernier salaire net en heures normales retenues par l'expert.
Sur quoi la cour
Attendu qu'il doit tout d'abord être rappelé, ainsi que l'a indiqué l'arrêt du 6 mai 1996, que si la convention collective nationale de l'industrie du pétrole ne s'applique pas dans les départements d'Outre-mer, rien ne s'oppose à ce qu'elle puise servir de base pour la fixation de la créance sollicitée par Monsieur Aurelie, puisqu'il se trouvait dans ses rapports avec la SAGF dans une situation similaire à celle d'un locataire de station-service en France métropolitaine ;
Que la cour rejette donc le premier moyen de l'appelant, et fait droit au subsidiaire ;
Dit que la convention collective nationale de l'industrie du pétrole sert de base au calcul pour la fixation de la créance sollicitée par Monsieur Aurelie et constate que ses activités correspondent à l'indice K 200 ;
Sur les bénéfices commerciaux :
Attendu qu'il est acquis, et non contesté par les parties, que si les comptes de Monsieur Aurelie n'ont pas été établis par un cabinet d'expert comptable et n'ont pas été audités, cet état de fait n'est pas imputable à l'intimé, mais dû à une circonstance indépendante de sa volonté ;
Que l'expert a pu se fonder sur les déclarations fiscales, les bilans et comptes simplifiés produits par l'intimé ;
Que cette comptabilité pouvant être à tout moment vérifiée par les mandataires spécialisés de la SAGF, il n'était pas de l'intérêt du gérant salarié qu'elle soit inexacte ;
Qu'en outre la qualité de fournisseur exclusif de Monsieur Aurelie, tenu de revendre les articles commercialisés sans possibilité d'une politique personnelle de prix permet à la société d'exercer son contrôle sur ses sources de revenus ;
Que l'appelante ne démontre pas dans le passé avoir constaté des inexactitudes dans l'examen de ces comptes ;
Qu'elle n'établit pas en quoi les comptes produits par l'intimé pour le calcul du montant du bénéfice commercial et ayant servi aux calculs de l'expert seraient inexacts ;
Qu'il résulte de tout ce qui précède que la cour homologue le rapport de l'expert et fixe le montant des bénéfices commerciaux à la somme de 886 000 F.
Sur la durée de travail, les heures supplémentaires et les congés payés :
Sur la demande de complément d'expertise sollicitée par l'intimé :
Attendu que si l'intimé sollicite un complément d'expertise sur ce point il n'apporte à la cour aucun élément nouveau permettant de mettre en doute les calculs de l'expert qui a pris le soin de les effectuer selon les diverses hypothèses exposées par les parties sans en privilégier aucune, et a ainsi entouré ses opérations de toute l'objectivité requise ;
Qu'il n'appartient pas à la cour de suppléer la carence des parties dans l'administration de la preuve ;
Qu'en conséquence l'intimé doit être débouté de sa demande de complément d'expertise ;
Au fond :
Attendu qu'il est acquis aux débats que le statut de Monsieur Aurélie est celui de gérant salarié ;
Attendu qu'il convient en conséquence de faire application de l'article L. 212-1-1 du Code du travail ;
Attendu que selon ce texte, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ;
Que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné en cas de besoin toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;
Qu'en l'espèce les parties ont pu faire valoir leurs arguments devant l'expert ;
Que la convention collective prévoit que la durée du travail est fixée par la législation en vigueur, les éléments de salaire étant établis sur la base de 39 heures par semaine, qu'elle fixe les taux de majoration des heures supplémentaires ;
Qu'aucune durée d'heures de présence n'était imposée par l'employeur ;
Que pour démontrer la réalité de ses heures de travail supplémentaires, Monsieur Aurelie évoque un argument relatif au titrage débité par la station, et les usages de la profession ;
Mais attendu qu'il doit également être relevé que 2 salariés à temps partiel travaillaient dans cette station ;
Qu'il résulte de ce qui précède qu'on ne peut assimiler les heures de travail du gérant aux heures d'ouverture de la station ni au litrage du carburant débité ;
Que s'il a dû manifestement effectuer plus de 39 heures par semaine, la station étant ouverte le dimanche matin ainsi qu'il résulte des attestations versées aux débats, et ses salariés n'étant embauchés qu'à temps partiel, il ne peut demander le paiement d'une durée supérieure à celle du maximum légal autorisé soit 60 heures par semaine alors qu'il ne démontre nullement qu'il en aurait effectué davantage ;
Attendu d'autre part que le tableau des litrages versé à la procédure et produit devant l'expert atteste d'un arrêt du litrage à compter de juillet 1992 confirmant ainsi la cessation d'activité à compter du 1er juillet 1992 et accuse une baisse sensible en février 1992 et plus légère en mars 1992 ;
Attendu que bien que Monsieur Aurelie conteste avoir cessé ses activités sur ces périodes, la cour constate que l'appelante rapporte la preuve de la cessation d'activité temporaire pour le mois de février et totale à compter du 1er juillet 1992 ;
Attendu en conséquence que la cour, homologuant le rapport d'expertise, dit que l'horaire hebdomadaire de Monsieur Aurelie doit être fixé à 60 heures et qu'il doit être tenu compte de l'absence de l'intimé du 10 février 1992 au 10 mars 1992 et de l'arrêt total d'activité à compter du 1er juillet 1992 ;
Qu'il lui est donc dû à ce titre selon le calcul expertal pour cette hypothèse soit pour la période non prescrite du 6 avril 1988 au 1er novembre 1992 la somme de 622 929 F ;
Sur les congés payés :
Attendu qu'en tant que gérant salarié, Monsieur Aurelie a droit à des congés payés, mais que l'indemnité représentative de ceux-ci ne peut être cumulée avec les salaires ;
Qu'il en résulte que pour la période de 1988 à 1991 les salaires déterminés ci-dessus comprennent la période de congés réglementaires ;
Que pour l'année 1992, ils doivent être calculés comme ci-dessus, en tenant compte des heures supplémentaires effectuées par le gérant salarié mais également en tenant compte de son absence du 10 février 1992 au 10 mars 1992 et de l'arrêt d'activité du premier juillet 1992 ;
Qu'il convient en conséquence d'allouer à Monsieur Aurelie une somme de seize mille six cent huit francs (16 608 F), conformément au calcul établi par l'expert.
Sur l'évaluation du montant du préjudice subi par Monsieur Aurelie du fait de la non affiliation au régime général de sécurité sociale :
Attendu qu'il est constant que dès le début de son activité, Monsieur Aurelie s'est affilié auprès de la caisse d'assurance maladie régionale Antilles-Guyane et de la mutuelle des travailleurs indépendants de la Martinique, qu'il a ainsi préservé ses droits en ce qui concerne la retraite vieillesse et qu'il ne justifie pas, au niveau du risque maladie avoir subi un préjudice particulier, qu'aucune demande ne saurait donc prospérer sur ce point.
Sur le régime obligatoire de retraite complémentaire
Attendu qu'en tant que gérant salarié, Monsieur Aurelie, devait bénéficier d'un régime obligatoire de retraite complémentaire ;
Qu'en l'espèce en n'en bénéficiant pas, il a subi un préjudice ;
Que l'existence de ce préjudice est admis' par l'appelant dans ses écritures ;
Que ce dernier se réfère pour le calcul de son quantum au calcul de l'expert soit à la somme de 65 849 F, que de son côté l'intimé se référant également au calcul de l'expert demande l'attribution de la somme de 127 455 F ;
Que la différence de quantum entre ces demandes résulte de l'inclusion ou non des heures supplémentaires dans la base de calcul ;
Que la cour a retenu plus haut que Monsieur Aurelie avait bien droit au bénéfice des heures supplémentaires mais avec déduction des absences de 1992 et des congés payés modifiés pour 1992 ;
Que le quantum devant être versé à l'intimé, et calculé sur ces bases par l'expert est de 120 540 F ;
Qu'il s'en suit que la cour rejette la demande principale et la demande incidente et dit que la SAGF devra verser à l'intimé, au titre de ce préjudice, la somme de 120 540 F ;
Sur le préjudice résultant du défaut d'affiliation à l'assurance chômage :
Attendu que l'appelant conclut au rejet de cette demande, un tel préjudice n'étant pas établi avec certitude ;
Mais attendu que lors de la rupture du contrat, l'intimé était âgé de 59 ans ;
Que les difficultés pour retrouver un emploi sur le marché du travail à cet âge sont incontestables et que l'appelant ne produit aucune pièce susceptible de faire douter du fait que Monsieur Aurelie n'ait pas retrouvé du travail comme il l'affirme ;
Que la cour rejette donc cette demande mal fondée ;
Attendu que subsidiairement l'appelant demandait qu'il soit alloué à Monsieur Aurelie une somme de 296 781 F alors que l'intimé sollicitait 574 875 F, les deux parties se basant sur les calculs de l'expert ;
Attendu que la base de calcul à retenir est la même qu'exposée au paragraphe ci-dessus, soit en incluant les heures supplémentaires mais en déduisant les absences en 1992, que de ce fait la cour homologuant le rapport de l'expert rejette la demande principale et l'appel incident et dit qu'il est dû à l'intimé à ce titre la somme de 519 584 F ;
Sur la qualification de la rupture des relations contractuelles, la demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'indemnité de licenciement :
Sur la qualification de la rupture des relations contractuelles
Attendu que l'arrêt du 6 mai 1996 de la Cour d'appel de Basse-Terre énonce en son dispositif : "confirme le jugement du Conseil de prud'hommes de Fort-de-France en date du 12 juillet 1994 en ce qu'il a ordonné une expertise, et a dit que les indemnités dues à Monsieur Aurelie au titre de l'article L. 122-14-4 et L. 122-9 du Code du travail seraient fixées après cette expertise" ;
Attendu en conséquence qu'il a déjà été jugé par le Conseil des prud'hommes et confirmé par cet arrêt de la cour d'appel que la rupture des relations contractuelles s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. 122-14-4 du Code du travail ;
Que seul le quantum du préjudice résultant de l'inobservation de ces dispositions restait à calculer en fonction des éléments de l'expertise ;
Qu'il en est de même pour l'indemnité de licenciement dont seul le quantum reste à déterminer sur les mêmes bases.
Sur le préjudice résultant de la rupture des relations contractuelles :
Attendu qu'il résulte de l'article 1er de la convention collective nationale de l'industrie du pétrole que celle-ci ne s'applique que dans les entreprises de la France métropolitaine ainsi qu'il a été rappelé dans l'arrêt précité du 6 mai 1996 ;
Que seules les dispositions légales sont donc applicables en ce qui concerne l'application des articles L. 122-14-4 et L. 122-9 du Code du travail.
Attendu que par appel incident l'intimé sollicite 268 920 F soit l'équivalent de 2 ans de salaire calculé sur le salaire en heures supplémentaires, alors que l'appelant estime subsidiairement, si la cour devait retenir un licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'il ne peut bénéficier que de 6 mois calculés sur la base de son dernier salaire mensuel de 8 612 F soit 51 672 F ;
Mais attendu que Monsieur Aurelie qui a travaillé pour l'appelante depuis le 01/01/1984 et était âgé de 59 ans lors de son licenciement a subi du fait de cette rupture un préjudice certain ;
Que la cour estime, d'après les éléments de l'espèce, justement évalué ce préjudice à la somme de 268 920 F ;
Que la cour rejette en conséquence l'appel principal et fait droit à l'appel incident ;
Sur l'indemnité de licenciement :
Attendu qu'il résulte du contrat de location gérance produit aux débats par l'appelant que cet acte a été passé entre les parties en date du 01/01/1984 ;
Que le contrat visé aux écritures de l'intimé en date du 10/06/1987 n'a pas été passé avec la SAGF ;
Que l'ancienneté de Monsieur Aurélie doit donc remonter au moment de la signature de son contrat avec cette société soit le 1er janvier 1984 ;
Que son ancienneté est donc de 8 ans et 10 mois ainsi que l'a justement évaluée l'appelant ;
Que compte tenu de la reconstitution expertale des salaires avec heures supplémentaires, salaire retenu par la cour comme devant être celui de l'intimé, le salaire de base servant au calcul de cette indemnité est constitué par la moyenne des 3 derniers mois de salaire de 1992 soit la somme mensuelle de 14 012 F ;
Qu'il est donc dû à Monsieur Aurelie la somme de :
pour 8 ans : 14 012 F x 0,8 = 11 209,60 F
pour 10 mois : 14 012 F x (1/10 x 10/12) = 1 167,60 F
soit un total de 12 377,20 F
Sur la demande d'assortir les créances du salarié du taux légal :
Attendu que la présente décision étant attributive de droit, les sommes allouées relatives aux différentes indemnités et préjudices fixés ci-dessus porteront intérêt au taux légal à compter de la signification du présent arrêt et non à compter de la date de la demande, ainsi que le sollicitait l'intimé, que la cour le déboute de sa demande sur ce point.
Sur la créance de la SAGF :
Sur les factures de livraison de carburants et de lubrifiants :
Attendu que Monsieur Aurelie ne se reconnaît débiteur selon ses écritures que des seules sommes retenues par l'arrêt de la Cour d'appel de Fort de France du 14 juin 1996 devenu définitif, soit 228 240 F correspondant à des livraisons de carburant ;
Qu'il doit donc être condamné au paiement des factures correspondant à une livraison du 11/06/1992 pour un montant de 112 160 F et à une livraison du 24/06/1992 pour un montant de 116 080 F ;
Mais attendu que cet arrêt a statué en matière de référé et alloué une indemnité provisionnelle ;
Que la cour reste compétente pour apprécier de l'ensemble du litige, qu'il résulte des pièce versées respectivement aux débats par les parties qu'outre les 2 factures impayées reconnues par l'intimé, et les bordereaux relatifs à ces 2 factures, l'appelant verse un 3e bordereau établi le 21/02/92 par la BNP pour provision insuffisante et mentionnant un débit de 164 900 F correspondant au chèque N° 3580383 de ce même montant, (pièce annexée à la pièce n° 4-3 du dossier de l'appelant) ;
Mais attendu que ce montant ne correspond pas à la facture à laquelle il est joint, cette facture n° 119 482 mentionnant une somme différente, soit 164 960 F ;
Qu'il ne saurait donc rapporter la preuve du non paiement de cette facture ;
Attendu enfin pour les autres livraisons qui n'auraient pas été réglées, que la cour constate qu'en exécution du contrat de location gérance signé entre les parties, les livraisons devaient être payées comptant ;
Qu'il s'en suit qu'en l'absence de preuve contraire elles doivent donc être réputées réglées en application des obligations contractuelles ;
Que l'appelant ne démontrant pas, pour le poste "carburant", l'existence de ses autres créances contestées par l'intimé, la cour dit son appel incident mal fondé sur ce point ;
Qu'en ce qui concerne la créance relative aux lubrifiants, également contestée, la cour constate qu'elle n'est pas certaine en ce que l'appelante produit exclusivement des factures de janvier, février, mai et juin 1992 à l'exclusion de tout autre document comptable ou toute mise en demeure ;
Que la cour dit donc cette demande mal fondée et en déboute la SAGF ;
Sur la dette de loyers
Attendu, ainsi qu'il a été relevé précédemment, que l'exploitation de la station par Monsieur Aurelie a cessé le 01/07/1992 ;
Que la SAGF sollicite le paiement des loyers de juillet, août, septembre, octobre et novembre 1992, soit jusqu'à la rupture du contrat, préavis inclus ;
Que le locataire dans ses écritures conteste la créance de la SAGF dans sa globalité mais ne fournit aucune explication sur le paiement des loyers, alors qu'il lui appartient, en tant que locataire, de démontrer qu'il les a acquittés ;
Qu'en conséquence il convient de faire droit sur ce point à la demande de l'appelant, que la cour condamne en conséquence Monsieur Aurelie au paiement des termes des loyers soit à la somme de 2 597,54 F x 5 = 12 987,70 F ;
Sur les cartes Shell
Attendu que Monsieur Aurelie ne peut sérieusement contester cette dette au profit de la SAGF;
Qu'en effet il résulte des éléments du dossier, qui avaient d'ailleurs déjà été discutés devant l'expert, et spécialement des virements figurant sur les photocopies du compte BNP de Monsieur Aurélie n° 1070026, que ces cartes ont bien été créditées à son profit à compter de mai 1993, pour le montant réclamé par l'appelante ;
Qu'en conséquence la cour le condamne à payer à la SAGF la somme de 261 997,10 F à ce titre.
Sur les bons prépayés
Attendu que la SAGF ne justifie pas de la présentation de ces bons dans d'autres stations-services et du paiement qu'elle aurait effectué corrélativement ;
Qu'elle doit donc être déboutée de cette demande mal fondée ;
Sur les intérêts légaux et la compensation des sommes dues
Attendu que rien ne justifie au dossier de faire droit à la demande principale tendant à voir la créance de la SAGF assorti des intérêts légaux à compter du 29/07/1992 ;
Que la cour la déboute de cette demande, mais fait droit à la demande subsidiaire et ordonne la compensation entre les dettes et les créances respectives des parties ;
Sur l'article 700 du NCPC et les dépens
Attendu que l'appelante qui succombe dans l'essentiel de ses prétentions sera condamnée à verser à Monsieur Aurelie la somme de 8 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise.
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement en matière sociale et en dernier ressort, Reçoit la SAGF et M. Aurelie en leur appel principal et appel incident, - dit que la convention collective nationale de l'industrie du pétrole sert de base au calcul pour la fixation de la créance salariale de M. Aurelie, sur la base de l'indice K 200, - homologue le rapport d'expertise et déboute l'intimé de sa demande de complément d'expertise, - condamne la SAGF à payer à M. Aurelie les sommes de : - 622 929 F au titre des créances salariales, 16 603 F au titre des congés payés, - 120 540 F au titre du régime obligatoire de retraite complémentaire, - 519 584 F au titre du préjudice pour non affiliation à l'assurance chômage, - 268 920 F au titre de l'article L. 122-14-4 du Code du travail, - 12 377,20 F au titre de l'indemnité de licenciement, Condamne M. Aurelie à payer à la SAGF : - les livraisons de carburant du 11 juin 1992 pour un montant de 112 160 F et du 24 juin 1992 pour un montant de 116 080 F - 12 987,70 F au titre des loyers impayés, - 261 997,10 F au titre des cartes Shell, Ordonne la compensation des dettes et créances des parties ; Dit que les sommes restant dues seront assorties d'un intérêt à taux légal à compter de la signification du présent arrêt ; Déboute les parties de leurs autres demandes respectives, Condamne la SAGF à payer à M. Aurelie la somme de 8 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens y compris les frais d'expertise.