Livv
Décisions

Cass. com., 28 septembre 2010, n° 09-69.272

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Décathlon (SA)

Défendeur :

Carrefour hypermarchés France (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

Mme Beaudonnet

Avocat général :

Mme Batut

Avocats :

SCP Delaporte, Briard, Trichet, Me Odent

Cass. com. n° 09-69.272

28 septembre 2010

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 juin 2009), que la société Carrefour, qui exploite des hypermarchés sous l'enseigne " Carrefour " a, à l'occasion d'une opération promotionnelle se déroulant du 5 au 17 juillet 2004 et intitulée "baisser les prix en France, c'est possible", diffusé dans la presse une publicité pour vanter les qualités d'un vélo tout terrain (VTT) " VTT 260 SX " (de marque Magis), vendu à un prix très attractif; que la société Décathlon, spécialisée dans la distribution d'articles de sport, et en particulier de VTT, reprochant à la société Carrefour d'avoir diffusé une publicité nationale comportant des allégations mensongères sur les qualités du VTT 260 SX, et invoquant la non-conformité dudit VTT aux exigences de sécurité édictées par le décret n° 95-937 du 24 août 1995, l'a assignée en concurrence déloyale afin d'obtenir des dommages-intérêts;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche : - Vu l'article 1382 du Code civil; - Attendu que, pour rejeter les demandes de la société Décathlon, l'arrêt, après avoir constaté que les indications figurant dans la publicité réalisée par voie de presse par la société Carrefour étaient erronées et susceptibles d'induire en erreur le consommateur sur deux éléments du VTT 260 SX, présenté comme équipé d'un dérailleur annoncé de marque "Shimano" alors que ledit dérailleur était d'une marque moins prestigieuse, et de freins en aluminium alors que ceux-ci étaient en acier, relève qu'au moment de la diffusion par la société Carrefour de cette campagne publicitaire, la société Décathlon commercialisait un VTT dont la différence de prix avec celui proposé par la société Carrefour s'expliquait par les caractéristiques supérieures du premier non substituable au second et retient que la société Décathlon ne démontre pas que les actes reprochés aient eu un effet sur ses ventes;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il s'infère nécessairement d'actes de publicité mensongère constitutifs de concurrence déloyale un trouble commercial générant un préjudice, fût-il seulement moral, la cour d'appel a violé le texte susvisé;

Et sur le moyen, pris en deuxième branche : - Vu l'article 1382 du Code civil; - Attendu que, pour écarter l'argumentation de la société Décathlon invoquant la non-conformité du VTT 280 SX sur lequel portait la publicité incriminée, aux exigences de sécurité exigées par le décret n° 95-937 du 24 août 1995 et précisées par la norme française NF R30-020 d'octobre 1998, l'arrêt retient que les actes reprochés n'ayant pas eu d'effet sur les ventes de la société Décathlon, il n'y a pas eu atteinte à son image de marque ni rupture d'égalité entre concurrents du fait du non-respect de la réglementation en vigueur;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si le non-respect par la société Carrefour de la réglementation en vigueur n'avait pas pour conséquence de perturber le marché en plaçant cette société dans une situation anormalement favorable par rapport à ses concurrents respectant ladite règlementation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 juin 2009, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.