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Décisions

Cass. com., 28 septembre 2010, n° 09-16.424

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Wallyn (ès qual.), Sodac (Sté)

Défendeur :

BMW France (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

Mme Michel-Amsellem

Avocat général :

Mme Batut

Avocats :

Me Copper-Royer, SCP Ghestin

Cass. com. n° 09-16.424

28 septembre 2010

LA COUR : - Joint les pourvois n° 09-16.424 formé par M. Wallyn, ès qualités et n° 09-19.753, formé par la société BMW France, qui attaquent le même arrêt ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 mai 2009), que le 12 septembre 2001, la société BMW France (la société BMW) a résilié le contrat du 1er octobre 1997, par lequel elle avait accordé à la société de distribution automobile du Cambrésis (la société Sodac) la concession exclusive de la distribution de véhicules de marque BMW et Mini sur la région de Cambrai et de Saint-Quentin, cette résiliation devant prendre effet au 12 septembre 2003 ; qu'invoquant l'application des dispositions du règlement CE 1400-2002, concernant l'application de l'article 81 §3 du traité à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile, la société Sodac a présenté sa candidature afin d'être agréée en qualité de réparateur et de distributeur BMW à l'échéance de son contrat en cours de résiliation ; qu'elle a été agréée en qualité de réparateur des marques BMW et Mini par la société BMW le 23 novembre 2003 ; que faisant valoir que la procédure d'agrément suivie n'avait été ni transparente ni impartiale et qu'elle avait été l'objet de pratiques discriminatoires, la société Sodac a assigné la société BMW en demandant, sur le fondement des articles L. 420-1 et L. 442-6 du Code de commerce, réparation de divers préjudices ; qu'en cours de procédure, elle a été mise en redressement puis liquidation judiciaires ; que son liquidateur, M. Wallyn, a repris la procédure et soutenant que la société BMW était directement à l'origine de la liquidation judiciaire a demandé la condamnation de celle-ci au paiement de dommages-intérêts ainsi que d'une autre somme indemnitaire pour le retard mis à agréer la société comme réparateur ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° 09-16.424 : - Attendu que M. Wallyn ès qualités fait grief à l'arrêt d'avoir jugé irrecevable sa demande de rejet de pièces communiquées par la société BMW, le jour de l'ordonnance de clôture, alors selon le moyen, qu'après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office ; que si, par exception, une partie est recevable à demander par conclusions le rejet des débats des conclusions ou des productions de dernière heure, cette demande peut aussi être formée par lettre dès lors qu'elle est portée à la connaissance de la partie adverse ; qu'en jugeant irrecevable une contestation résultant d'une lettre, la cour d'appel a violé les articles 15, 16 et 783 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme ;

Mais attendu que c'est à bon droit que la cour d'appel relevant que la demande de retrait des pièces présentée après l'ordonnance de clôture avait été formulée par lettre et non par conclusions, l'a déclarée irrecevable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi n° 09-16.424 : - Attendu que M. Wallyn ès qualités fait grief à l'arrêt d'avoir statué sur ses demandes en paiement de dommages-intérêts formées contre la société BMW, sans rejeter des débats les pièces communiquées par celle-ci le jour de l'ordonnance de clôture, alors selon le moyen, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en présence de pièces dont il constate qu'elles ont été communiquées par une partie le jour de l'ordonnance de clôture, le juge doit, au besoin d'office, s'interroger sur le caractère tardif de la communication de pièces et sur l'atteinte aux droits de la défense et à la loyauté des débats ; qu'en statuant sans procéder à ces recherches, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 15 et 16 du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant précisé que les pièces déposées le jour de l'ordonnance de clôture étaient recevables par principe, la cour d'appel appréciant souverainement le caractère non tardif de ce dépôt, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur les troisième, quatrième et cinquième moyens du pourvoi n° 09-16.424, réunis : - Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, du pourvoi n° 09-16.753 : - Vu l'article 1382 du Code civil, ensemble les articles 1.g et 2.1 du règlement CE n° 1400-2002, du 31 juillet 2002 ; - Attendu que pour condamner la société BMW à payer à M. Wallyn ès qualités la somme de 50 000 euro à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que la distribution sélective quantitative exige la définition de critères objectifs de qualité et également de quantité, que le fournisseur doit les donner à toute personne qui en fait la demande et que le refus à l'agrément doit reposer sur des critères précis ; que l'arrêt en déduit qu'en ne communiquant aucun renseignement sur ses critères de sélection qualitatifs à la société Sodac en réponse à sa demande d'informations sur les critères permettant d'être distributeur, alors qu'ils se trouvaient définis, et en refusant d'emblée la candidature de cette société indépendamment de tout critère quantitatif objectivement défini, la société BMW a commis une faute ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la demande d'agrément de la société Sodac, dont le contrat de concession avait été précédemment résilié, était présentée de façon anormale et, ou, de mauvaise foi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi n° 09-16.753 : Casse et annule, mais seulement en ce qu'infirmant le jugement rendu le 29 juin 2007 par le Tribunal de commerce de Versailles des chefs d'indemnisation pour la demande d'agrément en tant que distributeur des marques BMW et Mini et, statuant à nouveau, a condamné la société BMW à payer à M. Wallyn ès qualités la somme de 50 000 euro à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 28 mai 2009, entre les parties, par la Cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Versailles, autrement composée.