Commission, 27 avril 2010, n° 2010-607
COMMISSION EUROPÉENNE
Décision
Concernant l'aide d'État mise à exécution par la Belgique en faveur de la restructuration de la criée d'Ostende
LA COMMISSION EUROPÉENNE,
Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et notamment son article 108, paragraphe 2, premier alinéa, vu l'accord sur l'Espace économique européen (1), et notamment son article 62, paragraphe 1, point a), vu le règlement (CE) n° 659-1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d'application de l'article 93 du traité CE (2), et notamment son article 7, paragraphe 5, et son article 14, après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations (3) conformément à l'article 108, paragraphe 2, premier alinéa, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ("TFUE") (4) et vu lesdites observations, considérant ce qui suit:
1. PROCÉDURE
(1) Par lettre du 16 février 2006, la Commission a reçu une plainte, enregistrée sous la référence CP 40/06, concernant une aide octroyée par les autorités belges à la criée d'Ostende. Le 31 juillet 2007, la Commission a reçu une nouvelle plainte concernant le même dossier.
(2) Par lettres des 13 mars 2006, 26 juin 2006 et 11 juillet 2007, la Commission a demandé des informations sur les mesures concernées aux autorités belges, qui ont répondu par lettres des 11 mai 2006, 20 octobre 2006 et 27 novembre 2007.
(3) Après examen des informations et des documents fournis par les autorités belges, la Commission a informé ces dernières, le 3 juillet 2008, de sa décision d'engager la procédure prévue à l'article 108, paragraphe 2, du TFUE et à l'article 6 du règlement (CE) n° 659-1999.
(4) Par lettre du 16 juillet 2008, les autorités belges ont transmis à la Commission certains documents relatifs à la privatisation de la criée d'Ostende envisagée par la ville.
(5) Par lettre du 25 juillet 2008, les autorités belges ont demandé une prorogation de délai jusqu'au 8 septembre 2008 pour présenter leurs observations; celui-ci leur a été accordé le 4 août 2008.
(6) Par lettre du 8 septembre 2008, les autorités belges ont présenté leurs observations sur la décision d'ouverture de la procédure formelle d'examen.
(7) La décision de la Commission d'ouvrir la procédure formelle d'examen a été publiée au Journal officiel de l'Union européenne (5). La Commission a invité les parties intéressées à présenter leurs observations dans un délai d'un mois à compter de la date de publication.
(8) La Commission a rencontré les autorités belges le 9 octobre 2008. Lors de cette réunion, les autorités belges ont fourni des informations sur la manière dont elles comptaient organiser la privatisation de la criée.
(9) La Commission a reçu les observations des tiers intéressés suivants: European Association of Fishing Ports and Auctions (EAFPA), Nationaal Overleg Visafslagen (NOVA), Flanders Ship Repair, Zeebrugse Vis Promotie vzw (ZVP), Grimsby Fish Market, Zeebrugse Visveiling (ZV), European Fish Centre (EFC) et l'entreprise de réparation navale Gardec.
(10) Par lettre du 4 novembre 2008, elle les a transmises à la Belgique, en lui donnant la possibilité de les commenter. La Belgique n'a formulé aucun commentaire à la suite des observations des tierces parties.
(11) Par lettre du 8 septembre 2009, portant la référence C(2009) 6907, la Commission a émis une injonction de fournir des informations conformément à l'article 10, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 659-1999, par laquelle elle exigeait une réponse complète aux questions soulevées dans ses lettres des 13 mars 2006, 26 juin 2006 et 11 juillet 2007 ainsi que dans la décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen.
(12) Par lettre du 7 octobre 2009, les autorités belges ont demandé une prorogation de délai jusqu'au 9 novembre 2009 pour fournir les informations requises. Celle-ci leur a été accordée le 9 octobre 2009. Dans leur lettre, les autorités belges ont également demandé à la Commission de leur transmettre les observations présentées par les tierces parties. La Commission a donc simultanément accordé la prorogation de délai demandée et retransmis les observations des tierces parties, ainsi qu'une copie de sa lettre du 4 novembre 2008.
(13) Par lettre du 22 octobre 2009, les autorités belges ont fait savoir à la Commission qu'elles n'avaient jamais reçu sa lettre du 4 novembre 2008. Pour cette raison, elles ont demandé un nouveau délai d'un mois pour formuler leurs commentaires à la suite des observations présentées par les tierces parties.
(14) Par lettre du 5 novembre 2009, la Commission a accordé aux autorités belges un délai supplémentaire expirant le 27 novembre 2009 pour leur permettre de réagir aux observations présentées par les tierces parties.
(15) Les autorités belges ont communiqué leurs réponses à l'injonction de fournir des informations, ainsi que des renseignements complémentaires sur la privatisation de la criée.
(16) Par lettre du 30 novembre 2009, la Belgique a transmis ses commentaires à la suite des observations présentées par les tierces parties.
2. RESTRUCTURATION DE LA CRIÉE D'OSTENDE EN 2001
(17) La criée d'Ostende, qui était à l'origine propriété de l'État, était très fragmentée et, de l'aveu même des autorités belges, mal gérée depuis des années. Elle fonctionnait mal. Entre 1991 et 2001, sa part des arrivées de poisson dans les ports belges avait chuté d'environ 37 % à 20 % (6). Entre 1997 et 2001, son chiffre d'affaires est tombé de 20 550 000 EUR à 13 440 000 EUR (7). Pendant de nombreuses années, la criée a occasionné à la ville d'Ostende (ci-après dénommée "la ville") des pertes annuelles s'élevant en moyenne à 1 850 000 EUR (y compris en 2001).
(18) En 2001, le choix qui se présentait à la ville était soit de fermer la criée, soit de la restructurer. Le 23 novembre 2001, la ville a décidé de restructurer la criée d'Ostende en en faisant une entreprise communale autonome de droit belge dont elle serait l'actionnaire unique.
(19) La décision de restructurer la criée était fondée sur un plan financier présentant une hypothèse unique (qualifiée de positive) et sur un plan commercial de deux pages établis par HAMA Consult NV. Ces documents indiquaient que la criée pouvait devenir rentable à l'issue d'une période de neuf ans, à condition de se transformer en une entité juridique distincte dotée d'un capital de départ de 250 millions BEF (soit environ 6,2 millions EUR) à verser intégralement en l'espace de cinq ans. Cette entreprise distincte a pris le nom d'"Autonoom Gemeentebedrijf Vismijn Oostende" (ci-après dénommée "AGVO"). AGVO a repris à son compte la charge financière liée au remboursement de divers emprunts bancaires en rapport avec l'ancienne criée d'Ostende.
2.1. STRUCTURE DE LA SOCIÉTÉ
2.1.1. AGVO
(20) Comme indiqué au considérant 18, en vue de restructurer la criée, la ville a fondé le 23 novembre 2001 (8) une entreprise communale autonome dénommée AGVO. Une entreprise communale autonome est une entité juridique distincte établie au titre de l'article 261 de la nouvelle loi communale en vue d'assurer la gestion des institutions et des services communaux autres que les services municipaux généraux; elle s'intéresse essentiellement aux institutions ou services à caractère commercial ou industriel et est gérée selon des méthodes industrielles et commerciales.
(21) La loi dispose que la ville, en tant qu'entité fondatrice de la société, doit être l'actionnaire majoritaire et détenir la majorité des voix au sein des organes de direction. De fait, la ville détient 100 % des actions d'AGVO et, conformément aux statuts de l'entreprise, elle désigne tous les membres de son conseil d'administration. La majorité des membres du conseil d'administration doit être constituée de conseillers communaux.
(22) AGVO compte actuellement deux filiales dont elle est entièrement propriétaire: NV Exploitatie Vismijn Oostende (ci-après dénommée "EVO") et NV Pakhuizen (ci-après dénommée "Pakhuizen").
2.1.2. EVO
(23) EVO a été fondée le 8 août 2002 pour gérer la criée et toutes les activités y afférentes. Elle a été dotée d'un capital initial de 371 840 EUR. Le capital a été réparti en 15 000 actions égales, sans valeur nominale, entre AGVO, propriétaire de 14 999 actions, et M. Miroir, membre du conseil communal, propriétaire d'une action.
(24) EVO est gérée par un conseil d'administration, dont les membres sont désignés par les actionnaires pour une période de six ans, avec possibilité de reconduction de leur mandat. La répartition des actions montre qu'EVO est entièrement contrôlée par AGVO.
2.1.3. Pakhuizen
(25) Pakhuizen a été fondée en 1988 par des armateurs pour assurer la gestion de biens meubles et immeubles. En 2005, AGVO a absorbé Pakhuizen, dont elle a racheté toutes les actions pour un montant de 350 000 EUR.
(26) Pakhuizen est gérée par un conseil d'administration, dont les membres sont désignés par les actionnaires pour une période de six ans, avec possibilité de reconduction de leur mandat. Depuis 2005, Pakhuizen est détenue et contrôlée par AGVO.
2.2. TÂCHES
2.2.1. AGVO
(27) Conformément à ses statuts, AGVO assume, selon la description donnée par les autorités belges, à la fois des tâches d'intérêt public et des tâches commerciales. Les "tâches d'intérêt public" sont exécutées par AGVO elle- même, tandis que les "tâches commerciales" sont accomplies par ses deux filiales à 100 % que sont EVO et, depuis 2005, Pakhuizen.
(28) Pour ce qui est des tâches d'intérêt public, les autorités belges ont indiqué qu'AGVO est chargée de la gestion du port de pêche d'Ostende (ce qui comprend la gestion et l'entretien du domaine public et des espaces privés situés dans l'enceinte du port), de l'inspection du poisson débarqué et destiné à la consommation, de la fixation de taxes sur les prix de la criée et du contrôle de l'application de la TVA sur le poisson débarqué, du service d'écluse entre le canal et le quai de pêche (qui n'est pas utilisé exclusivement par les navires de pêche), des relations publiques au nom des autorités locales, ainsi que de la rénovation et de la mise à disposition de bâtiments pour des institutions publiques ou semi-publiques telles que la Région flamande, la province de Flandre occidentale, etc.
2.2.2. EVO
(29) EVO assure la gestion de la criée d'Ostende. Il s'agit principalement de l'organisation et de la gestion des ventes, de la location des entrepôts et d'autres activités auxiliaires. En sa qualité de gestionnaire de la criée, EVO applique une taxe de criée de 6 % sur les prix. Les acheteurs qui font usage de la criée doivent acquitter une commission de 1 % à 3 % et assumer les frais de location des caisses à poisson. Le montant de ces derniers n'est pas connu.
(30) En outre, EVO octroie des prêts à ses clients armateurs. Certains des prêts accordés récemment ont été octroyés au taux Euro Interbank Offered Rate (Euribor) de + 2 %, selon des conditions qui, apparemment, ne s'appliquent pas à tous les prêts. En contrepartie de l'octroi du prêt, les armateurs ont l'obligation d'utiliser les services de la criée d'Ostende pour écouler leur poisson.
(31) EVO offre également aux armateurs certaines facilités, telles qu'une participation aux coûts du transport réfrigéré qui peut aller jusqu'à 100 %.
2.2.3. Pakhuizen
(32) Les activités de Pakhuizen concernent principalement la transformation, la rénovation, l'aménagement ou le réaménagement, la (re)construction et la démolition, l'exploitation, la gestion et la location de biens immeubles.
2.3. MESURES D'AIDE CONCERNÉES
2.3.1. CAPITAL INITIAL ET AUGMENTATIONS DE CAPITAL
(33) Lors de sa fondation, le 23 novembre 2001, AGVO disposait d'un capital de départ de 250 millions BEF (6 179 338,12 EUR) octroyé par la ville devant être versé sur une période de cinq ans, par tranches annuelles d'un montant identique. Depuis 2002, six tranches du capital initial ont été payées, ce qui représente un montant de 3 596 665,62 EUR: un versement de 619 734 EUR a été effectué le 28 juin 2002, un versement de 570 155 EUR le 26 juin 2003, un versement de 570 155 EUR le 25 juin 2004 et un versement de 570 155 EUR le 26 juin 2005. Dans ses observations consécutives à l'ouverture de la procédure formelle d'examen, la Belgique a indiqué que deux paiements de 619 734 EUR chacun ont encore été effectués en 2006 et 2007. À la connaissance de la Commission, le solde du capital de départ, soit 2 582 672,5 EUR, n'a pas encore été réclamé par AGVO.
(34) Les autorités belges ont indiqué qu'AGVO a utilisé le capital de départ en partie pour des "dépenses publiques" et pour le remboursement du capital et des intérêts d'emprunts en cours. Ce capital a aussi servi à acheter les actions de Pakhuizen. Enfin, il a été utilisé pour payer le capital initial d'EVO et pour lui octroyer des prêts qui ont été ultérieurement (les 31 décembre 2004, 31 décembre 2005 et 21 décembre 2007) convertis en capital au moyen de remises de dettes.
(35) Lors de sa fondation, le 8 août 2002, EVO a été dotée d'un capital initial de 371 840,29 EUR. AGVO a ensuite procédé à des augmentations du capital d'EVO sous la forme de remises de dettes. Le 31 décembre 2004, le capital a été augmenté de 1 387 044 EUR, le 31 décembre 2005, de 710 000,75 EUR et le 21 décembre 2007, de 1 500 114,96 EUR. Au total, le capital fourni par AGVO à EVO s'élève à 3 969 000 EUR.
(36) Bien que les autorités belges aient informé la Commission de l'augmentation du capital initial d'EVO et lui aient indiqué que celui-ci s'élevait à 2 468 885 EUR au 31 décembre 2006, elles ont omis de lui préciser la forme particulière de ces augmentations de capital. Ce sont les observations reçues des tierces parties qui ont attiré l'attention de la Commission sur l'augmentation de capital du 21 décembre 2007 et sur le fait que les augmentations de capital avaient été effectuées sous la forme de remises de dettes. La Belgique n'a formulé aucun commentaire sur cet aspect des observations des tierces parties.
2.3.2. GARANTIES POUR LES PRÊTS
(37) Outre l'apport de leur capital initial, la ville a aidé tant AGVO qu'EVO en leur accordant gratuitement des garanties pour l'obtention de prêts privés.
(38) En ce qui concerne AGVO, il s'agit de garanties pour trois prêts octroyés le 26 mars 2004 (pour un montant de 609 379,40 EUR), le 23 avril 2004 (pour un montant de 2 117 500 EUR) et le 22 avril 2005 (pour un montant de 550 000 EUR), ce qui représente une somme totale de 3 276 879 EUR (132 199 987 BEF).
(39) En ce qui concerne EVO, il s'agit de garanties pour des prêts, dont elle a bénéficié les 28 juin et 27 septembre 2002. Toutefois, selon les informations reçues des autorités belges, les emprunts concernés n'ont finalement pas été contractés. Les 23 avril 2004 et 22 avril 2005, la ville a de nouveau fourni à EVO à titre gracieux des garanties pour l'obtention de prêts, ce qui a permis à cette dernière de contracter des emprunts pour un montant de 145 505 820 BEF (soit 3 606 995 EUR). Les autorités belges ont également indiqué, sans mentionner de date, que la ville avait en outre garanti un emprunt supplémentaire de 78 000 EUR. Étant donné que cette information figurait dans les observations des autorités belges du 4 septembre 2008 et que les précédentes observations dataient du 23 novembre 2007, la Commission présume que ladite garantie supplémentaire a été octroyée entre ces deux dates.
(40) AGVO a également fourni à EVO des garanties à titre gracieux pour deux emprunts représentant un montant total de 600 000 EUR. Aucune information n'a été fournie quant à la date de la décision d'octroi des garanties à titre gracieux. Étant donné qu'EVO a été fondée le 22 août 2002 et que le document des autorités belges mentionnant les deux emprunts décrivait la situation au 3 août 2006, la Commission présume que la garantie a été octroyée entre ces deux dates.
2.3.3. TERRAINS ET CONSTRUCTIONS
(41) Conformément à l'article 30 de ses statuts du 23 novembre 2001, AGVO dispose de l'exclusivité des droits d'utilisation, à titre gracieux, des terrains et constructions du port de pêche d'Ostende (9).
(42) L'article 30 des statuts prévoit également que la ville peut ultérieurement transférer à AGVO la propriété des terrains et constructions en question (ou d'autres droits y afférents).
(43) C'est ce qui s'est produit le 26 mars 2004, lorsque la ville a fait une contribution à AGVO en lui transférant la propriété immobilière de différents bâtiments situés dans la zone du port de pêche d'Ostende et représentant une superficie de 57 500 m 2. La valeur d'inventaire de cette contribution inscrite dans les comptes communaux s'élevait à 14 891 524 EUR. Le transfert ne portait que sur les bâtiments (criée, bureaux et entrepôts), à l'exclusion des terrains sur lesquels ils sont implantés. Ces terrains sont utilisés par la ville dans le cadre d'une concession à durée illimitée octroyée par la Région flamande, qui en a la propriété. AGVO a conservé l'exclusivité des droits d'utilisation des terrains, conformément à l'article 30 de ses statuts.
(44) Le transfert de propriété immobilière du 26 mars 2004 incluait 14 754 m 2 de bâtiments pour lesquels un bail à long terme avait été signé en 1989 entre la ville et Pakhuizen pour une durée de 45 ans. En vertu de ce bail, Pakhuizen est redevable d'un montant symbolique de 1 000 BEF (25 EUR) par an pour l'utilisation des bâtiments. En échange, elle a l'obligation contractuelle de rénover les entrepôts dont la liste figure dans le bail à long terme, à ses frais et sans aucun droit à compensation, afin de les mettre en conformité avec les réglementations futures. Par ailleurs, au terme de 27 années de location (soit en 2016), il est prévu que la ville obtienne chaque année une participation de 50 % aux bénéfices annuels nets de Pakhuizen. Les autorités belges ont indiqué que Pakhuizen ne s'était pas acquittée de ses obligations et que les entrepôts concernés n'avaient pas été rénovés, contrairement aux dispositions contractuelles, tout du moins pas avant 2005. Les autorités belges ont toutefois précisé qu'après l'achat des actions de Pakhuizen par AGVO, les sommes de 257 872 EUR et de 68 816 EUR avaient été consacrées en 2005 et en 2006, respectivement, à des travaux de rénovation et d'entretien. Le coût exact des travaux réalisés en 2007 n'est pas connu.
(45) À compter du 26 mars 2004, date à laquelle la ville a effectué le transfert de propriété du bâtiment à AGVO, AGVO s'est substituée à la ville en tant que partie contractante dans le bail à long terme conclu avec Pakhuizen. Ce faisant, AGVO a acquis le droit de percevoir les 25 EUR annuels et de bénéficier, après 27 années de location, de 50 % des bénéfices annuels nets de Pakhuizen.
(46) Selon les informations fournies par la Belgique, les 57 500 m 2 ainsi mis à la disposition d'AGVO se répartissent comme suit:
- 13 600 m 2 utilisés par sa filiale EVO pour abriter la criée, comme espaces de travail/hangars et comme bâtiments administratifs,
- 14 754 m 2 loués à Pakhuizen, dont 955 m 2 affectés à des activités portuaires,
- 2 700 m 2 d'entrepôts loués à des institutions (semi-)publiques,
- 8 156 m 2 de voies publiques,
- 2 488 m 2 affectés à des espaces de stationnement public gratuit,
- 2 400 m 2 affectés à un parc à conteneurs destiné aux activités de pêche,
- 13 402 m 2 de quais.
(47) EVO ne paie pas de loyer pour l'utilisation des bâtiments; en compensation, la Belgique a précisé qu'EVO prend à sa charge tous les frais d'entretien et de rénovation. Pakhuizen continue à payer 25 EUR par an.
(48) Les autorités belges ont indiqué qu'entre le 31 décembre 2002 et le 31 décembre 2007, EVO et Pakhuizen ont payé respectivement 182 377,31 EUR et 381 835,16 EUR au titre des frais de rénovation et d'infrastructure, ainsi que 193 255,70 EUR et 133 895,35 EUR au titre des frais d'entretien.
2.4. STRATÉGIE COMMERCIALE
(49) Au cours des années qui ont suivi la restructuration, tant AGVO qu'EVO ont enregistré des pertes, qui sont allées croissant malgré le léger bénéfice réalisé par AGVO en 2003/2004. À la fin de l'année 2006, AGVO avait accumulé quasiment 3 000 000 EUR de pertes, ainsi que des dettes à court et à long terme d'un montant supérieur à 4 000 000 EUR; quant à EVO, toujours à la fin de 2006, elle devait reporter des pertes supérieures à 3 400 000 EUR, des dettes à court et à long terme d'un montant supérieur à 5 800 000 EUR et un déficit sur le capital de presque 1 000 000 EUR.
(50) En dépit de ces pertes cumulées, AGVO et EVO se sont engagées dans des activités spéculatives et ont entrepris d'étendre leurs activités. Par exemple, en 2006, AGVO a pris une participation de 51 % dans une société établie en Islande dénommée HAF Holding BO et EVO s'est engagée dans un projet relatif au crabe royal (10) (société Polardrift, établie en Norvège). EVO s'est aussi impliquée dans la société islandaise HAF Holding. En outre, EVO a conclu en 2005 un contrat avec un agent de ventes dans le cadre duquel cet agent a été mandaté pour acheter du poisson de haute qualité dans les criées islandaises pour le revendre à la criée d'Ostende.
(51) La stratégie commerciale d'EVO a été qualifiée de concurrence déloyale par les différentes parties intéressées parce qu'elle consiste à offrir, entre autres, de prendre en charge tout ou partie des coûts de transport du poisson chargé dans les ports étrangers à destination d'Ostende, ainsi qu'à proposer aux armateurs des prêts à des conditions avantageuses à la condition qu'ils écoulent leurs prises à la criée d'Ostende.
(52) Ces projets ainsi que la stratégie commerciale décrite par les tierces parties semblent indiquer qu'EVO a entrepris d'augmenter sa part de marché et son chiffre d'affaires à n'importe quel prix. Dans tous les cas, il ressort des comptes annuels d'AGVO et d'EVO que si cette dernière a pu maintenir sa présence sur le marché en dépit de sa situation financière précaire, c'est uniquement grâce au soutien de la ville (11).
3. MOTIFS DE L'OUVERTURE DE LA PROCÉDURE FORMELLE D'EXAMEN
3.1. AVANTAGES ACCORDÉS À AGVO
(53) AGVO a reçu un capital initial de 250 millions BEF (6 179 338 EUR). Compte tenu des lourdes pertes accumulées, ainsi que du plan commercial, particulièrement bref et incomplet, la Commission est parvenue, dans sa décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen, à la conclusion qu'un investisseur privé n'aurait pas investi des montants aussi élevés dans la criée et que ce capital initial est donc à considérer comme une aide d'État. La Commission a exprimé des doutes quant à sa compatibilité avec le marché intérieur, étant donné que les conditions établies dans les lignes directrices communautaires concernant les aides au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté (ci-après dénommées "lignes directrices de 1999") (12), qui s'appliquaient au moment de l'octroi de l'aide, ne semblaient pas avoir été remplies.
(54) Par ailleurs, la ville a aussi mis ses bâtiments à la disposition d'AGVO sans exiger de compensation financière, ni lui imposer en retour des obligations d'une valeur équivalente. La Commission a estimé qu'un investisseur privé aurait exigé un prix raisonnable en contrepartie de cette contribution et qu'il y avait donc lieu de considérer la mise à disposition des bâtiments comme une aide d'État. Cette aide, qui semblait permettre de réduire les coûts d'exploitation d'AGVO, paraissait constituer une aide au fonctionnement. Que ce soit à l'article 107 du TFUE ou dans les lignes directrices pour l'examen des aides d'État dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture (ci-après dénommées "lignes directrices pour la pêche") (13), la Commission n'a trouvé aucune disposition lui permettant d'autoriser cette aide.
(55) La ville a également fourni les garanties nécessaires pour l'obtention de prêts au profit d'AGVO. Alors qu'un opérateur privé aurait exigé une prime pour cette garantie, la ville l'a accordée à titre gracieux. La Commission a donc conclu qu'il y avait lieu de considérer l'octroi des garanties en question comme une aide d'État. Une fois encore, l'aide semblait permettre de réduire les coûts d'exploitation d'AGVO et paraissait dès lors constituer une aide au fonctionnement. Que ce soit à l'article 107 du TFUE ou dans les lignes directrices pour la pêche, la Commission n'a trouvé aucune disposition lui permettant de considérer cette aide comme compatible avec le marché intérieur.
(56) Enfin, la ville a habilité AGVO à appliquer et à collecter des taxes communales et à en utiliser les recettes, avantage dont ne bénéficient généralement pas les entreprises privées. La Commission a considéré que les conditions de l'arrêt Altmark (14) n'étaient pas réunies et qu'il y avait lieu de considérer les avantages découlant du droit d'appliquer et de collecter les taxes communales comme une aide d'État. En l'absence de toute information sur la perception de ces taxes, la Commission a conclu qu'il convenait a priori de la classer comme une aide au fonctionnement et qu'aucune disposition de l'article 107 du TFUE ou des lignes directrices pour la pêche ne permettait de la considérer comme compatible avec le marché intérieur.
3.2. AVANTAGES ACCORDÉS À EVO
(57) La ville et AGVO ont fourni les garanties nécessaires pour l'obtention de prêts au profit d'EVO. Alors qu'un opérateur privé aurait exigé une prime pour ces garanties, la ville et AGVO les ont accordées à titre gracieux, ce qui a conduit la Commission à conclure qu'il y a lieu de considérer l'octroi des garanties en question comme une aide d'État. Cette aide, qui semblait permettre de réduire les coûts d'exploitation d'EVO, paraissait constituer une aide au fonctionnement. Que ce soit à l'article 107 du TFUE ou dans les lignes directrices pour la pêche, la Commission n'a trouvé aucune disposition lui permettant de considérer l'aide comme compatible avec le marché intérieur; elle a dès lors exprimé des doutes quant à la possibilité de considérer les mesures concernées comme compatibles avec le marché intérieur.
(58) AGVO a autorisé EVO à utiliser de façon continue et à titre gracieux 13 600 m 2 de bâtiments lui appartenant. La Commission a estimé qu'un investisseur privé aurait exigé en contrepartie un prix raisonnable et qu'il y avait donc lieu de considérer cette mise à disposition gratuite des bâtiments comme une aide d'État. Cette aide, qui semblait permettre de réduire les coûts d'exploitation d'EVO, paraissait constituer une aide au fonctionnement. Que ce soit à l'article 107 du TFUE ou dans les lignes directrices pour la pêche, la Commission n'a trouvé aucune disposition lui permettant de considérer l'aide comme compatible avec le marché intérieur; elle a dès lors exprimé des doutes quant à la possibilité de considérer les mesures concernées comme compatibles avec le marché intérieur.
3.3. AVANTAGE ACCORDÉ À PAKHUIZEN
(59) Les clauses du contrat de bail à long terme entre la ville et Pakhuizen ont eu pour effet que cette dernière a pu bénéficier d'une réduction annuelle de ses coûts d'exploitation. La Commission a conclu que cet avantage correspondait à une aide d'État, n'entrait dans le champ d'application d'aucune des mesures citées dans les lignes directrices pour la pêche et ne s'inscrivait pas non plus dans le cadre des objectifs d'autres lignes directrices horizontales ou particulières susceptibles de s'appliquer au type d'entreprise concerné. Tant au regard des lignes directrices pour la pêche en vigueur que des règles horizontales applicables aux aides d'État, il y aurait lieu de considérer ce type d'aide comme une aide au fonctionnement incompatible avec le marché intérieur. La Commission a donc exprimé des doutes quant à la possibilité de considérer la mesure concernée comme compatible avec le marché intérieur.
3.4. AVANTAGES ACCORDÉS AUX ENTREPRISES DE PÊCHE
(60) La Commission a constaté par ailleurs que les entreprises de pêche faisant usage de la criée d'Ostende bénéficiaient d'avantages octroyés par EVO, sous la forme de prestations de services à des tarifs inférieurs à ceux que facturerait un opérateur privé ordinaire, et par Pakhuizen, sous la forme de baux de location de bâtiments à des tarifs inférieurs à ceux que facturerait un opérateur privé ordinaire.
(61) La Commission a estimé que ces avantages constituaient une aide d'État; que ce soit à l'article 107 du TFUE ou dans les lignes directrices pour la pêche, elle n'a trouvé aucune disposition lui permettant de considérer l'aide comme compatible avec le marché intérieur et a dès lors exprimé des doutes quant à la possibilité de considérer les mesures concernées comme compatibles avec le marché intérieur.
3.5. CONCLUSION
(62) Compte tenu de ce qui précède et des informations dont elle dispose, la Commission a estimé qu'il y avait lieu de considérer toutes les mesures visées à la section 3 comme des aides d'État et a exprimé des doutes quant à la compatibilité de ces aides avec le marché intérieur.
4. OBSERVATIONS PRÉSENTÉES PAR LES TIERCES PARTIES INTÉRESSÉES
(63) Toutes les tierces parties intéressées qui ont formulé des observations sur la décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen ont exprimé leur accord avec les arguments avancés dans ladite décision. Indiquant en outre avoir subi un préjudice en raison de l'aide illégale octroyée à AGVO, EVO et Pakhuizen (perte de clientèle et manque à gagner), elles ont vivement encouragé la Commission à prendre les mesures nécessaires pour interdire l'aide incriminée et en demander le recouvrement.
4.1. EAFPA
(64) L'EAFPA souligne que les mesures d'aide en cause faussent le marché; elle invite la Commission à les interdire et à en demander le recouvrement.
4.2. NOVA
(65) En sa qualité de plaignante, NOVA soutient la décision de la Commission d'ouvrir une procédure formelle d'examen. Elle est d'avis qu'il importe que la criée fonctionne dans la transparence et que l'équité des règles du jeu soit garantie. Elle invite en outre la Commission à prendre les mesures appropriées pour assurer le recouvrement de l'aide éventuellement incompatible.
4.3. FLANDERS SHIP REPAIR
(66) Flanders Ship Repair explique que l'aide d'État a eu pour effet d'attirer les chargeurs à Ostende; elle estime que cela lui a causé un manque à gagner puisque les chargeurs partis à Ostende ne faisaient plus réparer leurs navires à Zeebrugge. Flanders Ship Repair demande une interdiction assortie d'une obligation de recouvrement, mais aussi des mesures provisoires.
4.4. ZVP
(67) ZVP, association regroupant des acheteurs et des transformateurs de poisson du segment Est de la côte belge, déclare que l'aide d'État illégale a permis à la criée d'Ostende, entre autres avantages, d'attirer artificiellement à la fois les navires étrangers et ceux de Zeebrugge. En outre, de nombreux communiqués de presse et interviews de politiciens locaux et de membres du conseil d'administration d'EVO (déclarant en particulier qu'il n'y aurait place en Belgique que pour une seule criée, à savoir celle d'Ostende), auraient eu pour effet de semer le doute sur l'avenir de la criée de Zeebrugge et, partant, de la zone d'activité attenante. Cela aurait provoqué un manque à gagner lié à la baisse, à la suspension ou au retrait d'investissements et d'activités commerciales.
(68) ZVP déclare aussi avoir tenté en pure perte de sensibiliser les autorités locales au problème.
(69) Enfin, ZVP indique qu'EVO a créé, par le truchement d'un prête-nom et à l'aide de fonds public, une entreprise de filetage du poisson dénommée Ostend Filleting Factory dont les pratiques relèvent également de la concurrence déloyale.
4.5. GRIMSBY FISH MARKET
(70) Grimsby Fish Market, une criée britannique, indique que vers 2005/2006, EVO a commencé à acheter du poisson directement à des pêcheurs islandais, à des prix forfaitaires (élevés), et à vendre ce poisson au cadran à Ostende, souvent à des prix inférieurs; Grimsby Fish Market en conclut que les pertes correspondantes ont été épongées avec de l'argent public. Grimsby Fish Market demande que soit effectué un audit des comptes financiers d'EVO afin d'analyser les méthodes de financement de la filière islandaise d'approvisionnement en poisson, ainsi que les pertes subies par EVO en raison de ses méthodes de vente.
4.6. ZV ET EFC
(71) ZV et EFC ont attiré l'attention de la Commission sur l'existence possible d'autres mesures d'aide d'État et pratiques déloyales, à savoir le recours par AGVO/EVO, à titre gracieux, à du personnel communal, ainsi que l'octroi par EVO de garanties de prix fixées sur la base des prix à la criée de Zeebrugge (Zeebrugse Visveiling).
(72) Elles poursuivent en expliquant en quoi elles considèrent qu'il y a distorsion de la concurrence et que les échanges entre États membres sont affectés.
(73) Par ailleurs, elles attirent l'attention de la Commission sur une injection supplémentaire de capital dans AGVO et EVO (réalisée au moyen d'une remise de dettes).
(74) Enfin, elles notent que l'aide n'a pas été suspendue par les autorités belges.
4.7. GARDEC
(75) Gardec est une entreprise de réparation navale implantée à Zeebrugge. Elle soutient la décision de la Commission et ajoute que les pratiques commerciales déloyales d'Ostende lui ont porté préjudice (baisse de son chiffre d'affaires); par ailleurs, elle constate que les prêts octroyés aux entreprises en difficulté ont eu pour effet de leur permettre de survivre à Ostende, tandis que leurs dettes restaient impayées à Zeebrugge.
5. OBSERVATIONS DE LA BELGIQUE À LA SUITE DES DOUTES EXPRIMÉS DANS LA DÉCISION D'OUVERTURE DE LA PROCÉDURE D'EXAMEN
(76) Dans leurs observations présentées le 8 septembre 2008 à la suite de l'ouverture de la procédure formelle d'examen, les autorités belges estiment que la Commission devrait limiter son examen à la criée. Du fait que ni AGVO ni Pakhuizen ne sont actives sur cette criée, les mesures dont elles ont bénéficié n'ont pas à entrer en ligne de compte dans le cadre de la procédure. Plus généralement, les autorités belges estiment que la Commission n'a pas correctement défini le champ de son examen et qu'il existe un risque de double comptabilisation de l'aide.
5.1. EN CE QUI CONCERNE L'AIDE À AGVO
(77) Les autorités belges soulignent qu'AGVO n'a aucune activité commerciale et ne saurait dès lors avoir une incidence sur la concurrence. L'aide octroyée à AGVO ne peut donc être classée comme une aide d'État. Les autorités belges ajoutent que, tout au plus, seuls les fonds utilisés au profit d'EVO pourraient être pris en compte aux fins de l'examen (il s'agit par exemple de la part du capital initial transférée à EVO par l'intermédiaire d'AGVO). Elles déclarent que le reste des sommes concernées a été employé pour des tâches d'intérêt public et ne saurait dès lors avoir une incidence sur la concurrence dans le secteur des criées.
(78) Les autorités belges notent que, sur le capital de départ de 6 197 338,12 EUR qui lui avait été promis, AGVO n'a jusqu'ici perçu que 3 569 667 EUR.
(79) En ce qui concerne le droit de percevoir des taxes ou des redevances, les autorités belges estiment que celui-ci est lié aux tâches d'intérêt public d'AGVO et ne saurait être considéré comme une aide d'État; elles soulignent aussi qu'en tout état de cause, AGVO n'est pas habilitée à percevoir des taxes sur les écluses ni les rampes.
(80) En ce qui concerne les bâtiments, elles soutiennent que le fait que ceux-ci appartiennent à la ville ou à toute autre entité publique ne fait aucune différence. Elles considèrent en effet la mise à disposition des bâtiments au profit d'AGVO comme une simple opération interne d'affectation de bâtiments. Les autorités belges rappellent à cet égard qu'AGVO n'exerce aucune activité commerciale et que la mise à disposition des bâtiments ne saurait dès lors être considérée comme une aide d'État. Elles ajoutent qu'elle est assortie de l'obligation de réparer les bâtiments et de les maintenir en bon état et contestent sur cette base que la mise à disposition des bâtiments constitue un avantage au profit d'AGVO.
(81) Les autorités belges estiment en outre que les garanties accordées à titre gracieux ne sauraient être considérées comme des aides d'État parce qu'elles portent sur des emprunts contractés par AGVO pour mener à bien des réparations sur des bâtiments loués aux autorités publiques. Elles reconnaissent cependant qu'un des emprunts garantis (qui porte sur un montant de 550 000 EUR) a été utilisé au profit d'EVO.
(82) Enfin, les autorités belges notent que l'arrêt Altmark ne s'applique pas dans le cas d'espèce puisque les tâches d'intérêt public d'AGVO sont des activités à caractère non économique. Elles ajoutent qu'il n'existe aucun risque de subventions croisées du fait qu'AGVO n'exerce aucune activité commerciale.
5.2. EN CE QUI CONCERNE L'AIDE À PAKHUIZEN
(83) La Belgique fait valoir qu'Ostende ne possède que des droits limités sur les terrains, ce qui restreint la valeur commerciale du bail emphytéotique. En outre, Pakhuizen est tenue de réparer et de rénover les bâtiments, ce que les autorités belges présentent comme une très lourde obligation compensant largement le loyer symbolique qui lui est consenti.
(84) Les autorités belges ajoutent que les activités de Pakhuizen se cantonnent exclusivement au marché de la gestion des bâtiments utilisés dans le secteur halieutique. Elles estiment que cette activité peut difficilement être considérée comme commerciale étant donné les obligations de rénovation dont elle est assortie et compte tenu de la faible valeur des bâtiments. Enfin, du fait que les bâtiments gérés par Pakhuizen ne peuvent être loués que pour des activités en rapport avec le secteur halieutique, les autorités belges soutiennent que Pakhuizen n'est en concurrence avec personne.
(85) Enfin, les autorités belges font remarquer qu'AGVO a acheté les actions de Pakhuizen aux prix du marché et que cette dernière loue également les bâtiments aux prix du marché (compte tenu de leur mauvais état).
5.3. EN CE QUI CONCERNE L'AIDE À EVO
(86) Les autorités belges indiquent que le fait que les bâtiments soient mis à la disposition d'EVO à titre gracieux est compensé par l'obligation qui incombe à cette dernière de supporter des coûts de rénovation qui devraient normalement être assumés par le propriétaire.
(87) Elles avancent ensuite que les garanties accordées gratuitement à EVO pour l'obtention de prêts doivent être analysées dans le cadre du plan de privatisation et de restructuration de la criée. Elles considèrent que, dans le cadre de la restructuration de la criée, la ville a agi comme un investisseur privé car, d'une part, la recapitalisation de la criée était économiquement plus rentable que sa fermeture et, d'autre part, la privatisation devait permettre à la ville de récupérer son investissement grâce au loyer reçu du propriétaire privé de la criée. Les autorités belges soulignent en outre qu'il existe des projets de privatisation de la criée depuis déjà 2002 et que la privatisation passait nécessairement par une restructuration préalable.
(88) En ce qui concerne plus spécifiquement la garantie accordée gratuitement, elles font observer que les prêts ont été utilisés pour compléter le financement de la criée, qui provenait principalement d'une injection de capital effectuée par la ville (au profit d'AGVO et, par l'intermédiaire d'AGVO, au profit d'EVO). Les autorités belges notent que par le moyen de la garantie, la ville a substantiellement réduit les coûts liés à la restructuration. Elles ajoutent qu'en l'absence de cette garantie de la ville, aucun prêt n'aurait été accordé et font valoir que l'octroi d'une garantie par la société mère pour couvrir un emprunt souscrit par une filiale constitue une pratique commerciale normale.
5.4. EN CE QUI CONCERNE L'AIDE AUX ENTREPRISES DE PÊCHE/ARMATEURS
(89) Les autorités belges constatent que la Commission a comptabilisé deux fois la même aide: l'aide est soit au profit d'EVO, soit au profit des pêcheurs, mais pas au profit des deux. Elles considèrent que si les mesures concernées constituent une aide d'État, c'est au niveau d'EVO et de Pakhuizen, et que s'il y a distorsion de la concurrence, c'est à ce niveau et non à celui des armateurs et des entreprises de pêche. Elles ajoutent qu'en tout état de cause, EVO et Pakhuizen ne proposent pas leurs services à des tarifs inférieurs aux prix du marché. En ce qui concerne spécifiquement EVO, les autorités belges expliquent que l'entreprise propose des services qu'elle n'est pas la seule à offrir. Elles font aussi remarquer qu'EVO ne propose aucune installation d'entreposage, n'offre pas l'électricité à titre gracieux et n'est chargée ni de la gestion du port, ni de celle des rampes. Elles signalent en outre que le prix de l'eau est compris dans la redevance d'utilisation de la criée et qu'EVO n'accorde pas de prêts aux armateurs à des tarifs inférieurs à ceux du marché. Enfin, elles affirment qu'en pratique, EVO n'a jamais appliqué les clauses contractuelles obligeant les armateurs à écouler leurs captures à sa criée.
6. PROCESSUS DE PRIVATISATION ENGAGÉ APRÈS L'OUVERTURE DE LA PROCÉDURE D'EXAMEN
(90) La Belgique a informé la Commission qu'il a été décidé, le 22 mai 2008, de privatiser la criée d'Ostende et que la ville a lancé une procédure de sélection publique en vue de trouver un partenaire opérationnel pour l'exploitation d'EVO.
(91) Dans ses observations, la Belgique explique que la privatisation se fera au moyen de la fondation d'une nouvelle entité qui prendra à son compte l'exploitation de la criée. Quant aux bâtiments de la criée, ils retourneront à la ville, avec laquelle la nouvelle entité devra conclure un contrat de bail. Celle-ci ne sera pas tenue de reprendre les autres actifs de la criée (personnel, caisses à poisson, contrats, prêts consentis aux armateurs, etc.)
(92) Étant donné que la vente et le contrat de bail seront négociés aux prix du marché, aucune aide ne sera transférée au profit de la nouvelle entité et aucune aide ne pourra être récupérée auprès de cette dernière.
(93) Dans sa lettre du 16 novembre 2009, la Belgique a informé la Commission de l'avancement du processus de privatisation.
(94) Elle y indique que dans un premier temps, la propriété des bâtiments appartenant à AGVO a été rendue, sans frais, à la ville le 4 septembre 2009, et que les droits et obligations liés aux bâtiments (baux) ont aussi été transférés à la ville. La ville a également repris à son compte différents prêts consentis par AGVO et Pakhuizen. Puis, la propriété des bâtiments a été transférée à la Région flamande, qui a octroyé à la ville une compensation constituée de plusieurs éléments: un paiement de 3 500 000 EUR au profit de la ville, le droit pour celle-ci de percevoir jusqu'au 1 er janvier ou, dans certains cas, jusqu'au 30 juin 2010, les loyers payés par les institutions publiques ou semi-publiques locataires des bâtiments, et enfin la reprise par la Région flamande de divers prêts et/ou dettes de la ville.
(95) La Belgique soutient que le transfert des bâtiments à la ville, qui en retrouve la propriété, met un terme à la question de l'aide d'État.
(96) La Belgique a indiqué en outre que Pakhuizen a décidé de résilier le bail à long terme conclu avec la ville en 1989. La Belgique s'attend à ce que Pakhuizen soit liquidée prochainement, ce qui, selon son appréciation, priverait de tout objet la procédure relative aux aides d'État.
(97) Pour ce qui est d'EVO, la Belgique a expliqué que le soumissionnaire remplissant les critères de sélection proposait des conditions que la ville ne jugeait pas satisfaisantes. En conséquence, EVO continuera d'exister jusqu'à ce qu'un soumissionnaire répondant aux critères de sélection ait été retenu pour prendre à son compte les actifs de la société.
(98) Enfin, la Belgique a indiqué qu'AGVO continuerait à exister jusqu'à l'extinction de toutes les créances/obligations encore en cours.
(99) La Belgique demande à la Commission de reporter sa décision jusqu'à la conclusion du processus de privatisation.
7. COMMENTAIRES DE LA BELGIQUE À LA SUITE DES OBSERVATIONS DES TIERCES PARTIES
(100) La Belgique indique, en ce qui concerne la question islandaise, qu'EVO n'a jamais acheté de poisson directement à des armateurs ou à des pêcheurs islandais, mais uniquement dans des criées islandaises et par l'intermédiaire d'un agent de ventes.
(101) La Belgique ajoute qu'il est vite apparu que la revente du poisson islandais n'était pas rentable. C'est pourquoi, au bout d'un an environ, il a été décidé, le 17 mars 2006, de mettre un terme à ces opérations d'achat et de revente. La Belgique a fourni une copie de la décision correspondante.
(102) La Belgique explique que la raison pour laquelle le poisson était acheté à des prix élevés dans des criées islandaises puis revendu sur la place d'Ostende à des prix inférieurs n'a rien à voir avec une quelconque stratégie visant à attirer du poisson islandais à Ostende. Elle tient au fait que le poisson de qualité supérieure acheté en Islande par l'agent de ventes pour le compte d'EVO ne parvenait jamais chez EVO: il était acquis directement par une société de filetage privée dénommée Luna Fish, tandis que le poisson islandais de moindre qualité parvenait bien à EVO mais ne pouvait être vendu avec un bénéfice, compte tenu, précisément, de sa qualité inférieure. La Belgique conclut qu'EVO était en fait victime des pratiques décrites. L'administrateur délégué d'AGVO/EVO et leur directeur commercial ont d'ailleurs été remerciés lorsque le problème a été découvert.
(103) En ce qui concerne la prétendue mise à disposition de fonctionnaires à titre gracieux pour l'exécution de tâches administratives, comptables et d'entretien, la Belgique répond que les déclarations de ZV ne vont pas au-delà de simples allégations, qu'EVO dispose de son propre personnel pour la réalisation des tâches concernées et qu'en outre, ce sont plutôt certains employés d'EVO qui effectuent occasionnellement certaines tâches d'intérêt public (comme l'entretien de la route menant à la criée).
(104) La Belgique indique aussi que l'affirmation de ZV selon laquelle EVO garantirait un prix minimum fixé par référence aux prix pratiqués à la criée de Zeebrugge ne repose sur aucun fondement. Elle ajoute qu'il n'est pas impossible que les entreprises de pêche aient prétendu que tel était le cas lors de leurs négociations avec ZV afin que celle-ci leur concède de meilleures conditions commerciales.
(105) Pour ce qui est du problème concernant la société Ostend Filleting Factory (OFF), la Belgique souligne que les documents présentés par les tierces parties montrent uniquement que l'entreprise a été fondée par des opérateurs privés et n'indiquent pas en quoi elle pratiquerait une concurrence déloyale. La Belgique précise que c'est seulement en mars 2006 que Pakhuizen a acquis 60 % des actions d'OFF. Le nom "OFF" a ensuite été modifié en "Ostend Premium Fish bvba" et l'entreprise a finalement été déclarée en faillite le 14 janvier 2008.
(106) Sur la question du manque à gagner que Gardec et Flanders Ship Repair imputent à l'incidence de l'aide d'État, la Belgique considère que même s'il était vrai que celle-ci ait eu pour conséquence d'encourager des navires à choisir Ostende plutôt que Zeebrugge, le lien de cause à effet avec les pertes de revenus resterait à établir. La Belgique ajoute en effet que les armateurs ne font pas systématiquement réparer leurs navires au port d'attache et préfèrent souvent recourir aux services proposés à un coût inférieur en Europe de l'Est (Pologne). La Belgique note à cet égard que les entreprises de réparation navale implantées à Ostende ont enregistré un net déclin de leur activité.
8. INJONCTION DE FOURNIR DES INFORMATIONS
(107) Par lettres des 13 mars et 26 juin 2006, la Commission a demandé aux autorités belges des renseignements quant à la situation juridique de la criée d'Ostende et à l'implication de l'État, ainsi que des informations détaillées sur les flux financiers entre l'État et la criée.
(108) Dans leur lettre du 19 octobre 2006, les autorités belges ont souligné le fait que, parallèlement à son activité commerciale, à savoir la gestion de la criée, AGVO était chargée de tâches d'intérêt public. Cependant, les informations fournies sur ce point étaient très fragmentaires et ne contenaient aucun élément permettant à la Commission d'évaluer si les avantages accordés par la ville à AGVO pouvaient être considérés comme une compensation pour des tâches d'intérêt (économique) général, si cette compensation n'était pas excessive et s'il n'y avait pas de risque de subventions croisées.
(109) Par conséquent, conformément aux dispositions de l'article 10, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 659-1999, la Commission a demandé aux autorités belges, par lettre du 11 juillet 2007, de lui fournir des renseignements détaillés sur les tâches d'intérêt public confiées à AGVO. Elle a notamment demandé si ces tâches pouvaient être considérées comme des tâches de service public au sens de la décision 2005-842-CE de la Commission du 28 novembre 2005 concernant l'application des dispositions de l'article 86, paragraphe 2, du traité CE aux aides d'État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général (15), et sur quelle base.
(110) Par lettre du 27 novembre 2007, les autorités belges ont simplement déclaré qu'aucune des tâches confiées à AGVO n'avait de caractère économique et que la question ne relevait pas de la décision 2005-842-CE. Elles ont en outre déclaré qu'AGVO ne reçoit de compensation pour aucune des tâches d'intérêt public qu'elle exécute.
(111) Dans sa décision du 2 juillet 2008 d'ouvrir la procédure formelle d'examen, la Commission a conclu qu'AGVO, EVO et Pakhuizen formaient un groupement d'entreprises opérant sur le marché des criées et des services connexes et que les divers avantages octroyés à celles-ci par la ville faussaient la concurrence sur le marché. Sur la question de la compensation pour les tâches d'intérêt public, la Commission a relevé qu'aucun élément du dossier ne permettait d'établir que les critères établis par la Cour de justice dans son arrêt Altmark étaient remplis. De plus, le manque d'informations sur ce point n'a pas permis à la Commission de déterminer si, en particulier, le droit d'appliquer et de prélever des taxes pouvait être considéré comme une compensation accordée pour des services d'intérêt public; la Commission a ainsi été amenée à exprimer des doutes sur la compatibilité de l'aide. En conséquence, au considérant 121 de sa décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen, la Commission a invité les autorités belges à fournir tout renseignement utile pour l'appréciation des mesures considérées.
(112) Dans leurs observations, reçues le 8 septembre 2008, et au cours de la réunion de suivi du 9 octobre 2008, les autorités belges n'ont fourni aucun élément supplémentaire permettant à la Commission d'examiner si les avantages accordés à AGVO pouvaient être considérés comme une compensation pour des tâches d'intérêt (économique) général. En revanche, les autorités belges ont répété que les critères de l'arrêt Altmark n'étaient pas pertinents du fait qu'AGVO intervenait exclusivement dans des tâches d'intérêt public.
(113) Cette réponse n'a pas été jugée satisfaisante puisque, de fait, AGVO intervenait également dans des activités à caractère économique.
(114) En vertu des dispositions de l'article 10, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 659-1999, la Commission a dès lors demandé, par le truchement d'une injonction de fournir des informations, du 8 septembre 2009, que lui soit communiquée toute information utile et notamment:
- une liste des différentes activités confiées à AGVO, ventilées entre activités économiques, tâches d'intérêt public à caractère non économique et tâches d'intérêt économique général,
- les paramètres utilisés pour le calcul, le contrôle et la révision de la compensation pour les tâches d'intérêt public à caractère non économique, d'une part, et de la compensation pour les tâches d'intérêt public à caractère économique, d'autre part,
- les modalités de remboursement des éventuelles surcompensations et les dispositions mise en œuvre pour éviter ces surcompensations,
- les frais supportés pour l'exécution des obligations de service public à caractère économique, des obligations de service public à caractère non économique et des autres services, ainsi que les recettes liées à ces différents services,
- des extraits des comptes internes présentant séparément les dépenses et les recettes afférentes au service d'intérêt général économique, les dépenses et les recettes afférentes au service d'intérêt général non économique et les dépenses et les recettes afférentes aux autres services, ainsi que les paramètres utilisés pour l'affectation des dépenses et des recettes,
- s'ils sont disponibles, les documents établissant qu'AGVO satisfait au quatrième critère défini par l'arrêt Altmark, à savoir que le niveau de compensation nécessaire a été déterminé sur la base d'une analyse des coûts qu'une entreprise ordinaire du même secteur, bien gérée et dotée des moyens adéquats, aurait supportés, compte tenu des recettes correspondantes, ainsi que d'un bénéfice raisonnable à retirer de l'exécution de ces obligations.
(115) Dans leur lettre du 16 novembre 2009, les autorités belges répètent qu'AGVO est chargée des tâches d'intérêt public suivantes: gestion du port de pêche, rénovation et location de bâtiments à des organisations publiques ou semi-publiques, gestion et entretien du domaine public (en ce compris l'entretien de la route desservant la criée). Elles déclarent qu'il s'agit de tâches d'intérêt public puisqu'elles ne sont pas exécutées au profit de bénéficiaires particuliers. Bien qu'elles ne fassent pas de distinction entre tâches d'intérêt général à caractère non économique et services d'intérêt public à caractère économique, elles admettent que certaines, voire la totalité, des tâches d'intérêt public puissent être à caractère économique.
(116) Les autorités belges reconnaissent qu'AGVO, par le biais de sa filiale EVO, est engagée dans une activité commerciale, à savoir la gestion de la criée, qui ne relève pas de l'intérêt public.
(117) Les autorités belges déclarent qu'en fait, AGVO ne reçoit aucune compensation au titre des tâches d'intérêt général qu'elle assume, et qu'elle finance sur son propre budget. Il n'existe donc aucune méthode de calcul d'une compensation. Les autorités belges ajoutent que les comptabilités d'AGVO et d'EVO ne permettent pas de distinguer les coûts et les revenus liés aux tâches d'intérêt général de ceux qui sont liés aux tâches à caractère commercial.
9. CHAMP DE L'EXAMEN
(118) Comme cela ressort de plusieurs considérants de la décision d'ouverture de la procédure formelle d'examen (le considérant 85, par exemple), le champ de l'examen s'étend au-delà du marché des criées et englobe les activités liées à la criée (location des bâtiments voisins de la criée, gestion du port de pêche, etc.). Les avantages octroyés à AGVO ou Pakhuizen qui ne sont pas directement liés au fonctionnement de la criée sont donc aussi visés par la procédure.
(119) La Commission a également analysé les avantages accordés à EVO soit directement par la ville, soit par AGVO. Dans la décision d'ouverture de la procédure formelle d'examen, le capital initial d'EVO et les augmentations de capital ultérieures n'ont pas été examinés comme des mesures distinctes des versements de capital effectués au profit d'AGVO. Ils ont simplement été considérés comme une des utilisations faites par AGVO des versements de capital reçus de la ville. Or, dans leurs observations, les autorités belges ont affirmé, d'une part, que la Commission n'a pas suffisamment fait la distinction entre les activités et les tâches effectuées par AGVO, Pakhuizen et EVO et, d'autre part, qu'en raison de la répartition des tâches entre AGVO et EVO, les avantages consentis à AGVO ne devaient entrer dans le champ de l'examen que dans la mesure où ils avaient été "transférés" au profit d'EVO. Par conséquent, par souci de clarté et afin de répondre aux préoccupations des autorités belges, l'octroi à EVO de son capital initial et les augmentations de capital ultérieures font l'objet d'un examen séparé au point 10.1.2.2.3. Quant à la question de la détermination du bénéficiaire effectif de l'aide, elle est examinée au considérant 319.
10. APPRÉCIATION
10.1. EXISTENCE DE L'AIDE D'ÉTAT
(120) L'article 107, paragraphe 1, du TFUE prévoit ce qui suit: "Sauf dérogations prévues par les traités, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions."
10.1.1. ENTREPRISES
(121) Comme cela est expliqué plus haut, l'examen concerne les aides éventuelles octroyées à AGVO, EVO, Pakhuizen et aux entreprises de pêche qui utilisent la criée d'Ostende et ont recours aux services d'EVO et de Pakhuizen. Toutes ces entités doivent être reconnues comme entreprises au sens de l'article 107 du TFUE. La seule pour laquelle les autorités belges contestent sérieusement cette qualité est AGVO, qui selon elles, ne se consacre qu'à des tâches d'intérêt public.
(122) Les autorités belges ont indiqué que l'activité d'AGVO consiste en des "tâches d'intérêt public" (taken van openbaar belang). Il apparaît cependant qu'AGVO se livre à des activités économiques et doit à ce titre être considérée comme une entreprise (16) au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE, pour les raisons exposées aux considérants 123 à 129 inclus.
(123) Du fait qu'elle propose des bâtiments à la location à des institutions publiques et semi-publiques, ainsi qu'à des entreprises, AGVO intervient directement sur le marché comme prestataire de services (de location).
(124) AGVO est également chargée de l'exploitation et de la gestion du port de pêche. Comme l'ont déclaré le Tribunal et la Cour de justice dans l'affaire Aéroports de Paris (17), la gestion d'infrastructures peut constituer une activité économique. En ce qui concerne les infrastructures portuaires, cela a notamment été confirmé dans les affaires relatives aux ports flamands et au développement du port de Rotterdam (18). La Commission note qu'AGVO propose des services, des biens et des infrastructures contre paiement. De fait, ses statuts prévoient qu'elle est habilitée à appliquer et à percevoir des redevances au titre de la rémunération de ses services.
(125) En outre, AGVO propose aussi indirectement des biens et des services sur le marché, par l'intermédiaire de ses filiales EVO et Pakhuizen.
(126) AGVO détient une participation de contrôle dans EVO et Pakhuizen et exerce effectivement ce contrôle en s'impliquant directement ou indirectement dans leur gestion:
- presque tous les membres du conseil d'administration d'AGVO sont aussi membres du conseil d'administration d'EVO et de Pakhuizen. Entre 2005 et 2007, AGVO et EVO étaient membres du conseil d'administration de Pakhuizen,
- conformément à ses statuts, AGVO est chargée de la gestion, du développement et de l'exploitation de la criée, ainsi que du quai aux poissons d'Ostende et de ses annexes, de même que du développement de toutes les activités qui s'y rapportent directement ou indirectement. En d'autres termes, AGVO a l'obligation, de par ses statuts, de s'impliquer dans la gestion de la criée.
(127) Il existe d'autres liens entre AGVO, EVO et Pakhuizen qui contribuent à illustrer l'existence de liens organiques et fonctionnels entre AGVO et ses filiales: AGVO a garanti des prêts consentis à EVO, elle a mis des bâtiments à la disposition d'EVO et de Pakhuizen et, comme en témoignent ses comptes annuels, elle a régulièrement accordé des prêts à EVO et à Pakhuizen.
(128) Par le biais de toutes ces opérations, AGVO exerce des fonctions liées non seulement au contrôle, mais aussi à la direction et au soutien financier d'EVO et de Pakhuizen. Pour ces motifs, et notamment en raison de sa participation aux affaires d'EVO et de Pakhuizen (19), AGVO doit aussi être considérée comme une entreprise aux fins de la législation sur la concurrence.
(129) La Commission relève que les autorités belges ont admis qu'EVO et Pakhuizen sont les membres opérationnels d'AGVO, que celle-ci a participé à des activités commerciales par l'intermédiaire d'EVO, et que les mesures en faveur d'AGVO peuvent avoir une incidence sur le marché par le biais d'EVO. Dans leurs observations et leurs réponses, elles tendent à traiter AGVO, Pakhuizen et EVO comme une seule et même entreprise et elles ont aussi explicitement déclaré qu'il y a lieu de considérer AGVO et EVO comme une seule et même entité.
(130) Enfin, il convient de noter qu'AGVO ne dispose pas de comptabilités séparées pour ses tâches à caractère économique et non économique, ce qui implique que le risque de subventions croisées ne saurait être exclu.
10.1.2. AVANTAGES AU PROFIT DES ENTREPRISES CONCERNÉES
10.1.2.1. Avantages au profit d'AGVO
10.1.2.1.1. Capital initial
(131) Les investissements publics sont considérés comme une aide d'État lorsqu'il apparaît qu'une autorité publique qui injecte du capital dans une entreprise ne se limite pas à fournir des capitaux propres aux conditions normales d'une économie de marché. C'est le cas lorsque la situation financière de l'entreprise, et en particulier la structure et l'ampleur de ses dettes, est telle qu'on ne peut pas s'attendre à ce que l'investissement soit rentable (c'est-à-dire qu'il produise des dividendes ou une plus-value en capital) dans un délai raisonnable à compter de l'engagement des capitaux. Il importe donc d'évaluer si, dans des circonstances similaires, un investisseur privé, d'une dimension comparable à celle des entités qui gèrent le secteur public, aurait pu être amené à réaliser des apports de capitaux de la même ampleur pour la restructuration de l'entreprise ou si, au contraire, il aurait choisi de procéder à sa liquidation, compte tenu notamment des informations disponibles et de l'évolution prévisible de la situation à la date des contributions concernées (20).
(132) Les autorités belges estiment que la décision de la ville d'octroyer à AGVO un capital initial de 250 millions BEF (6 179 338 EUR) était un choix rationnel du point de vue économique. Le choix de la restructuration de la criée a été fait en se fondant sur un plan financier et sur un plan commercial qui montraient que la criée pouvait redevenir rentable au bout de huit ans, moyennant un investissement, si elle était purgée des pertes essuyées dans le passé. Les autorités belges soutiennent qu'un investisseur privé placé dans la même situation aurait pris la même décision.
(133) Sur la base des informations dont elle dispose, la Commission ne peut partager ce point de vue.
(134) Comme cela est indiqué ci-dessus, la criée d'Ostende fonctionnait mal et sa part de marché n'avait cessé de se contracter au cours des années précédant la restructuration. La Commission estime qu'un opérateur privé ordinaire se trouvant dans une situation similaire n'aurait pas fait le choix d'octroyer un capital initial de plus de 6 millions EUR sur la base d'un unique plan financier contenant des prévisions financières correspondant à une "hypothèse positive" pour la période 2002-2010 et d'un plan commercial de deux pages à peine.
(135) Ce raisonnement est d'autant plus valable que, comme cela est détaillé au considérant 259, AGVO, en tant que prolongement de la criée d'Ostende, pouvait être classée comme une entreprise en difficulté au moment de l'octroi du capital initial. En présence d'une entreprise en difficulté, un opérateur privé ordinaire aurait cherché à obtenir de solides assurances quant aux perspectives d'avenir de cette société et ne se serait pas satisfait des documents sur la base desquels la ville a arrêté sa décision.
(136) La Commission insiste d'une part sur l'ampleur de l'investissement et d'autre part sur la situation de déficit chronique que connaît depuis longtemps la criée d'Ostende (21). À la lumière, tout spécialement, de ces deux éléments, auxquels s'ajoute le fait que l'entreprise opérait sur un marché très compétitif mais en régression, un opérateur privé ordinaire aurait fondé sa décision sur un plan commercial et un plan financier bien plus complets présentant plusieurs hypothèses et scénarios, plutôt que de se satisfaire d'un plan financier fondé sur une unique hypothèse, laquelle, de surcroît, était qualifiée de "positive".
(137) On peut également présumer qu'un opérateur privé ordinaire aurait demandé une étude examinant, notamment, le marché disponible à l'époque dans le secteur, sur la base des chiffres existants concernant les débarquements et la demande locale, ainsi qu'un plan présentant la manière dont il serait possible de restructurer l'activité, de même que les mesures à envisager pour éviter la répétition des lourdes pertes enregistrées dans le passé et pour stimuler la productivité (nouveaux investissements, nouvelle stratégie marketing, etc.).
(138) Or, le plan commercial ne contient aucun de ces éléments.
(139) En outre, le plan commercial s'appuie sur un certain nombre de présomptions et d'éléments factuels qui sont tenus pour acquis et ne font l'objet d'aucune explication ou justification alors qu'ils semblent parfois très hypothétiques, voire improbables. À titre d'exemple, il est difficile d'accepter l'hypothèse d'une croissance de 10 % du chiffre d'affaires des activités de la criée au cours des cinq années à venir alors que, sur la période précédant la restructuration, les débarquements comme le chiffre d'affaires n'ont cessé de diminuer, le marché était devenu très compétitif et les quotas de pêche étaient aussi à la baisse. En outre, le plan ne fournit aucune explication en ce qui concerne le calcul des coûts liés aux charges sociales, à l'externalisation, à l'approvisionnement en eau et à l'énergie. Ces coûts sont de surcroît présentés comme absolument constants sur les neuf ans suivant la fondation d'AGVO. Cela semble difficilement imaginable, particulièrement si l'on attend un doublement du chiffre d'affaires sur la même période.
(140) Il ressort de ce qui précède que le plan financier et le plan commercial paraissent non seulement très brefs et incomplets, mais aussi dénués de crédibilité. On voit mal comment un investisseur privé ordinaire se serait fondé sur de tels documents pour injecter 250 millions BEF dans une entreprise déficitaire opérant sur un marché en contraction (22).
(141) Même si l'on pouvait admettre que le plan financier et le plan commercial étaient complets et fiables - quod non - la Commission fait valoir qu'un investisseur privé n'aurait malgré tout pas injecté une somme aussi importante que la ville. Il ressort justement du plan financier et du plan commercial qu'un apport en capital plus modeste aurait suffi. Compte tenu du faible rendement du capital engagé, un opérateur privé ordinaire n'aurait pas investi une telle somme alors que ce n'était pas nécessaire.
(142) Les autorités belges considèrent que la décision de poursuivre les activités de la criée était plus rationnelle que de la fermer.
(143) Les autorités belges ne donnent toutefois aucune indication quant aux coûts que supposerait la liquidation de ces activités et n'expliquent pas non plus en quoi la décision de fermeture n'aurait pas été rationnelle.
(144) Les autorités belges tentent ensuite de justifier le caractère rationnel de la décision prise en 2001 d'injecter 250 millions BEF dans AGVO en invoquant la décision de privatisation de la criée. Ainsi soutiennent-elles que l'actuel processus de privatisation faisait partie du plan de restructuration décidé en 2001 et qu'aucune privatisation de la criée n'était possible sans procéder à la restructuration.
(145) La Commission rappelle que conformément à une jurisprudence et à une pratique constantes, il y a lieu, pour examiner si un État a adopté la conduite d'un investisseur prudent opérant dans une économie de marché, de se placer dans le contexte de la période pendant laquelle les mesures de soutien financier ont été adoptées afin d'évaluer la rationalité économique de la démarche de l'État concerné. Il convient donc de s'abstenir de formuler toute appréciation fondée sur une situation ultérieure (23).
(146) Les autorités belges déclarent que le processus actuel de privatisation fait partie de la décision de restructuration prise en 2001 et qu'il y a lieu d'apprécier le caractère rationnel de la décision de restructurer la criée à la lumière de ce processus de privatisation. Or, les différents documents soumis par les autorités belges ne soutiennent pas cette thèse. On notera en particulier que le projet de privatisation de la criée n'est mentionné ni dans la décision de restructuration de la criée, ni dans le plan commercial, ni dans le plan financier. Rien dans ces documents n'indique que la décision d'investir 6 200 000 EUR dans la criée ait été (entre autres) motivée ou justifiée par le fait que cet investissement permettrait, au bout d'un certain temps, de privatiser la criée. L'affirmation des autorités belges est aussi difficilement conciliable avec les statuts d'AGVO, qui indiquent que celle-ci est constituée sans limite de durée, que l'intention de la ville est d'en assurer le contrôle, et que les filiales d'AGVO ou les entreprises dans lesquelles elle détient une participation doivent être contrôlées par elle (et donc par la ville).
(147) En outre, on s'attendrait à ce que la décision de privatiser soit envisagée une fois que la criée aurait renoué avec les profits. Il s'agirait ainsi d'en retirer un meilleur prix - qui permette en fait de récupérer au moins une partie de l'investissement supplémentaire de 250 millions BEF. Or, non seulement la privatisation n'était pas mentionnée dans le plan financier ni dans le plan commercial, mais la décision de privatiser n'a même pas été prise à un moment où la criée était rentable. Bien au contraire, elle a été prise au bout de deux années de lourdes pertes touchant à la fois AGVO et EVO et après l'ouverture de l'examen de la Commission. Tout semble donc indiquer que le projet de privatisation est étranger à la décision de restructuration prise par la ville en 2001.
(148) En outre, les autorités belges ont indiqué que le futur partenaire privé reprendra le fonds de commerce d'EVO mais pourra choisir les actifs qu'il lui plaira de récupérer (ainsi pourra-t-il décider de reprendre ou non le personnel, les machines, les planches de présentation des poissons, etc.). Il n'aura pas à reprendre le passif d'EVO. Dans ces circonstances, on comprend mal pour quelle raison il n'aurait pas été possible d'opter pour une démarche similaire en 2001/2002 (sans investir un montant supplémentaire de 250 millions BEF).
(149) De plus, si tout cela avait fait partie du plan de restructuration de la criée en 2002, aucun investisseur privé n'aurait consenti à investir 250 millions BEF dans la criée avec l'intention de la revendre plus tard, étant donné que, sur la base du plan commercial, il n'aurait pas pu raisonnablement espérer récupérer son investissement au bout de quelques années grâce à la seule revente du fonds de commerce de la criée. À cet égard, la Cour a jugé qu'un investisseur privé poursuivant une politique structurelle, globale ou sectorielle, et guidé par des perspectives de rentabilité à long terme ne saurait raisonnablement se permettre, après des années de pertes ininterrompues, de procéder à un apport en capital lié à la vente de l'entreprise, ce qui lui enlève toute perspective de bénéfice, même à terme (24).
(150) Les autorités belges ajoutent que la restructuration, suivie de la privatisation, permettra de récupérer les investissements grâce aux loyers qui seront demandés pour les bâtiments de la criée.
(151) Cet argument n'est pas non plus convaincant. En effet, le plan financier indiquait qu'au cours des huit années à venir, la ville perdrait 121 603 000 BEF (outre les pertes précédemment accumulées) avant de pouvoir récupérer une partie des 250 millions BEF de capital qu'il a été décidé d'injecter en 2001. La Commission relève que la ville aurait pu décider dès 2002 de louer les bâtiments de la criée à un tiers. Cela aurait pu lui permettre de récupérer d'ores et déjà, à compter de 2002, une partie des sommes considérables investies dans la criée d'Ostende avant sa restructuration ou, tout au moins, de couvrir la charge financière liée au remboursement des emprunts bancaires, plutôt que de s'exposer au risque très élevé (particulièrement à la lumière des mauvais résultats de la criée) d'une inflation des pertes qu'il faudrait ultérieurement éponger.
(152) Les autorités belges poursuivent en soulignant que la décision de restructurer la criée a été mûrement réfléchie, puisqu'elle a d'abord été rejetée par l'autorité publique de contrôle de la ville (toezichtautoriteit) en raison des trop maigres espoirs que la criée puisse devenir rentable. De fait, les documents fournis à la Commission montrent que la décision de restructurer la criée a d'abord été rejetée, sur la base d'un premier plan financier indiquant qu'il fallait s'attendre, au bout de cinq ans, à des pertes cumulées d'un montant de 190 000 000 BEF.
(153) Loin de plaider pour le caractère rationnel de la décision arrêtée, cet élément révèle en fait que, dès le départ, l'intention de restructurer la criée et de lui faire un nouvel apport de capital n'était même pas fondée sur l'espoir que la criée puisse renouer avec la rentabilité au bout d'une période donnée. En outre, il fait ressortir de manière encore plus criante le caractère incomplet et le manque de fiabilité du second plan financier, puisqu'aucun argument n'a été fourni pour expliquer comment il se fait que les premier et second plans financiers débouchent sur des conclusions aussi différentes. Il est donc encore moins probable qu'un investisseur privé eût pris la décision, dans les mêmes circonstances, d'investir 250 millions BEF supplémentaires dans la criée.
(154) Sur la base des éléments ci-dessus, la Commission conclut qu'un investisseur privé ordinaire n'aurait pas pris, dans les mêmes circonstances, la décision d'investir 250 millions BEF dans la criée. Elle en trouve d'ailleurs confirmation dans les documents qui lui ont été fournis. Ceux-ci montrent en effet qu'une des raisons pour lesquelles il a été décidé de restructurer la criée plutôt que de la liquider était de nature politico-sociale, à savoir que la restructuration aurait permis de maintenir de l'emploi dans une ville où le taux de chômage dépassait 12 % (25), or c'est un argument qu'un investisseur privé n'aurait pas pris en compte (26).
(155) Cette action octroie par conséquent un avantage à AGVO par rapport à ses concurrents et, partant, favorise cette entreprise au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE.
10.1.2.1.2. Terrains et constructions
(156) Conformément à l'article 30 de ses statuts, AGVO dispose depuis sa fondation de l'exclusivité des droits d'utilisation, à titre gracieux, des terrains et constructions du port de pêche d'Ostende.
(157) En 2004, AGVO a reçu en pleine propriété divers bâtiments et infrastructures situés dans le port de pêche d'Ostende et représentant 57 500 m 2 , selon les indications portées à l'époque dans les registres de la ville. Selon les comptes communaux, la valeur comptable de ce patrimoine immobilier s'élevait à l'époque à 14 891 524 EUR. La Commission n'a reçu aucune information lui permettant de déterminer la valeur marchande de ces biens au moment de leur transfert à AGVO.
(158) Les autorités belges affirment que la décision de transférer la propriété de ces biens immeubles à AGVO ne saurait en aucun cas être considérée comme une aide d'État puisqu'il s'agit d'un simple transfert de biens immobiliers entre deux autorités publiques, AGVO n'étant engagée dans aucune activité commerciale.
(159) Or, comme cela est démontré au point 10.1.1 de la présente décision, AGVO participe bel et bien à des activités commerciales, à la fois directement et indirectement (par l'intermédiaire de ses filiales), et doit dès lors être considérée comme une entreprise. En conséquence, la décision de transférer à AGVO la propriété des biens immobiliers ne peut être considérée comme un simple transfert de biens immobiliers entre autorités publiques, notamment du fait que ces biens sont largement utilisés pour les activités économiques concernées (services de location, fonctionnement de la criée, gestion du port de pêche).
(160) La Commission estime qu'un opérateur privé ordinaire n'aurait pas accepté de transférer la propriété de bâtiments d'une telle valeur sans en obtenir un prix raisonnable.
(161) Les autorités belges ont déclaré que les bâtiments étaient en piteux état et que leur valeur comptable était dès lors surestimée. Elles ont également fait valoir que les coûts de rénovation, à assumer par AGVO, étaient si importants que le transfert de propriété pouvait en fait être considéré comme une opération neutre.
(162) Toutefois, les autorités belges n'ont fourni à la Commission aucune preuve démontrant que la valeur comptable des actifs concernés avait été surestimée ou que les coûts de rénovation pouvaient être égaux à la valeur effective des droits de propriété des biens immeubles concernés.
(163) Les informations dont dispose la Commission montrent au contraire que l'argument des autorités belges ne peut être accepté.
(164) Tout d'abord, il convient de souligner qu'AGVO a reçu au moment de sa fondation, avant le transfert de propriété, l'exclusivité des droits d'utilisation, à titre gracieux, des terrains et constructions du port de pêche, criée comprise. On ne trouve pas trace, dans ses statuts, d'une quelconque obligation spécifique de réaliser des travaux de rénovation. Conformément à l'article 3 de ses statuts, AGVO a le droit d'entreprendre, si elle le souhaite, tous travaux d'entretien, de réparation ou de modernisation des bâtiments (27), mais les statuts ne contiennent aucune disposition ayant pour effet d'obliger AGVO à rénover certains bâtiments.
(165) Depuis sa fondation, AGVO a donc pu disposer des terrains et des bâtiments du port de pêche sans avoir à payer le moindre loyer ou s'acquitter d'une quelconque rémunération. Un opérateur privé n'aurait pas accepté d'octroyer des droits d'utilisation exclusifs à une entreprise sans en recevoir une rémunération appropriée.
(166) Quant à l'acte de transfert de propriété par l'apport d'un bien immobilier, daté du 30 décembre 2004, en vertu duquel les droits de propriété des bâtiments ont été transférés de la ville à AGVO, il n'impose pas non plus de condition ou obligation particulières à AGVO en ce qui concerne des travaux spécifiques de rénovation. Il s'agit en l'espèce d'un acte général par lequel la ville transfère à AGVO tous les droits et obligations concernant les bâtiments en question. Les responsabilités imposées à AGVO dans cet acte ne semblent pas à ce point considérables qu'il soit justifié de n'exiger aucun paiement pour l'acquisition des bâtiments.
(167) En outre, il n'est pas contesté qu'AGVO est aussi habilitée à louer les bâtiments ou à accorder des droits de concession exclusifs pour leur utilisation. Ces bâtiments (tout du moins une partie d'entre eux) ont une valeur commerciale. Les autorités belges ont reconnu qu'une partie d'entre eux était louée à des organisations publiques ou semi-publiques et une autre partie à des entités privées (voir le considérant 46 de la présente décision).
(168) Enfin, la Commission note qu'AGVO a reçu un autre avantage en rapport avec les coûts de rénovation susmentionnés. Les autorités belges ont transmis à la Commission une liste des garanties qui ont été fournies, à titre gracieux, pour certains prêts. Il ressort de la liste transmise à la Commission que certains de ces prêts garantis avaient pour objet de financer les coûts de rénovation. Par conséquent, outre le fait qu'AGVO n'avait aucune obligation d'effectuer lesdites rénovations, le coût d'au moins certaines de celles qui ont été réalisées a été réduit grâce aux garanties mentionnées. C'est aussi pour cette raison qu'on ne peut accepter l'argument selon lequel le transfert de propriété à titre gracieux était censé représenter une sorte de "compensation" pour les coûts particulièrement élevés de rénovations qu'AGVO aurait été tenue de mener à bien.
(169) Même si l'on pouvait considérer que les coûts de rénovation étaient particulièrement considérables et constituaient une sorte de rémunération pour le transfert de propriété des bâtiments, ce qui n'a pas été démontré par les autorités belges, le fait qu'AGVO a reçu dès sa fondation, à titre gracieux, les droits d'utilisation exclusifs des terrains et des bâtiments du port de pêche d'Ostende devrait tout de même être considéré comme une aide d'État. De fait, la question de savoir si la ville s'est comportée comme un investisseur privé ordinaire doit être examinée à la lumière des éléments disponibles au moment où la décision a été prise (28). Dans le cas d'espèce, la ville devait bien être consciente, au moment où elle a arrêté sa décision, qu'elle octroyait un avantage à AGVO, puisqu'il était clairement indiqué, au point 11 du plan commercial du 9 novembre 2001 élaboré par HAMA Consult NV, qu'aucun investissement important n'était à prévoir au cours des dix années suivantes, étant donné que la criée venait d'être modernisée.
(170) En outre, conformément à la communication de la Commission concernant les éléments d'aide d'État contenus dans des ventes de terrains et de bâtiments par les pouvoirs publics (29), pour que le transfert de propriété de bâtiments appartenant aux pouvoirs publics soit considéré comme conforme à la valeur du marché, il faut normalement que la vente ait eu lieu dans le cadre d'une procédure d'offre inconditionnelle ou après évaluation par un expert indépendant. Aucune de ces procédures n'a été suivie. Or, dans le cas d'espèce, une évaluation par un expert de la valeur des bâtiments et de la rémunération appropriée à verser pour les droits d'utilisation exclusifs concédés à AGVO puis le transfert de propriété aurait été d'autant plus nécessaire que les autorités belges considéraient que la valeur comptable des biens concernés ne correspondait pas à leur valeur réelle.
(171) Il apparaît dès lors que la mise à disposition, à titre gracieux, puis le transfert des bâtiments dont a bénéficié AGVO de la part de la ville sont des actes qui ne sauraient être considérés comme conformes aux pratiques économiques habituelles qu'un investisseur privé ordinaire aurait suivies dans des conditions similaires.
(172) Les autorités belges considèrent que le retour à la ville des bâtiments (sans compensation) met un terme à la question de l'aide d'État.
(173) C'est une position à laquelle la Commission ne peut souscrire.
(174) En effet, la Commission souligne que le retour des bâtiments à la ville ne change rien au fait que, de 2002 à 2009, AGVO a bénéficié à titre gracieux des droits d'utilisation exclusifs des bâtiments concernés, tant au titre de l'article 30 de ses statuts qu'en vertu de l'acte de transfert de propriété du 30 décembre 2004. En particulier, il n'est pas certain que la valeur de ces biens au moment de leur récente restitution à la ville soit au moins équivalente à celle des avantages visés dans la phrase précédente, augmentée des intérêts dus en application des règles en matière d'aides d'État régissant la récupération des aides illégales et incompatibles.
(175) De plus, la Commission considère que, dans la mesure où AGVO continuerait après le transfert de propriété à utiliser ces bâtiments à titre gracieux ou contre un loyer inférieur à celui du marché, AGVO continuerait à bénéficier d'une aide d'État (30).
10.1.2.1.3. Garanties accordées à titre gracieux pour l'obtention de prêts
(176) Conformément au point 2.1.1 de la communication de la Commission sur l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides d'État sous forme de garanties (ci-après dénommée la "communication sur les garanties") (31), une garantie de l'État est considérée comme favorisant une entreprise lorsqu'elle permet à l'emprunteur d'obtenir un prêt à des conditions financières plus avantageuses que celles qui sont normalement consenties sur les marchés financiers, et ce sans s'acquitter d'une prime commerciale. Pour déterminer les conditions de marché normales, il conviendrait de comparer le comportement de la ville à celui qu'aurait adopté un créancier privé qui aurait placé son capital en vue d'en obtenir un profit raisonnable (32).
(177) La communication sur les garanties donne un certain nombre d'indications sur la manière d'apprécier les garanties au regard de la réglementation relative aux aides d'État. Elle prévoit notamment que, pour ne pas être considérée comme une aide d'État, la garantie doit remplir des conditions bien définies, or, dans le cas d'espèce, certaines de ces conditions posent des problèmes.
(178) En effet, aucun prix de marché n'a été payé pour l'obtention des garanties; celles-ci ont été accordées à titre entièrement gracieux.
(179) De plus, les garanties couvraient plus de 80 % (à savoir, en fait, la totalité) de l'encours total des prêts. Cela renforce l'avantage obtenu, car, si la garantie d'État se monte à 100 %, il n'est pas utile pour le prêteur d'étudier convenablement la solvabilité d'AGVO en vue de déterminer comme il se doit les conditions financières du prêt en fonction du profil de risque de l'entreprise (33).
(180) De toute évidence, ces garanties ont permis à AGVO d'obtenir des conditions financières plus avantageuses que celles qui sont normalement consenties sur les marchés financiers (34), d'autant plus que les résultats enregistrés par AGVO et ses filiales étaient médiocres, voire souvent négatifs.
(181) Les autorités belges rétorquent qu'il est normal qu'un actionnaire fournisse gratuitement une garantie au profit d'une entreprise qu'il contrôle. Elles ne citent cependant aucun élément probant ni aucun exemple à l'appui de cette affirmation. Il est de surcroît particulièrement difficile d'imaginer qu'un créancier privé agirait de la sorte.
(182) De fait, la décision de la ville d'octroyer des garanties à des institutions financières, tout à fait gratuitement, pour des prêts contractés par AGVO est particulièrement inhabituelle au regard des comportements normalement constatés sur les marchés financiers. Dans une situation normale, cette garantie serait rémunérée par le paiement d'une prime appropriée reflétant les risques associés à la garantie (35), même si le garant se trouve être un actionnaire détenteur d'une participation majoritaire lui assurant le contrôle de l'entreprise (36). De plus, un créancier privé ordinaire fournissant des garanties aurait pris certaines précautions avant de les octroyer et aurait préalablement vérifié les conditions du prêt, les risques encourus, etc., or les informations communiquées par la Belgique révèlent que cela n'a pas été le cas (37). Cela est d'autant plus problématique dans le cas d'espèce étant donné la situation financière de la criée, qui a régulièrement essuyé de lourdes pertes au cours des années précédentes et qui opère dans un marché hautement compétitif et en contraction (38).
(183) Comme cela est démontré plus en détail au considérant 259, il y a lieu de considérer AGVO comme une entreprise en difficulté financière au sens des lignes directrices de 1999. Conformément à une pratique établie, il y a présomption d'aide d'État dans le cas des garanties accordées aux entreprises en difficulté (39).
(184) Les autorités belges soutiennent que les garanties ont été accordées pour des prêts relatifs à des travaux de rénovation à effectuer dans des bâtiments loués à des organismes publics et semi-publics. Elles ajoutent que, comme ces travaux relèvent des tâches de service public d'AGVO, ces garanties doivent être vues comme une contribution à ces tâches de service public et ne sauraient dès lors être considérées comme une aide d'État.
(185) On notera tout d'abord qu'il n'est pas certain que les prêts garantis aient été effectivement utilisés aux fins prévues. Même s'il est exact que les informations transmises à la Commission semblent indiquer que la ville a accordé les garanties sur la base de l'intention qu'avait AGVO d'affecter les sommes empruntées au financement de travaux de rénovation, il apparaît néanmoins que la ville n'a pas subordonné l'octroi des garanties gratuites à la réalisation de travaux de rénovation et n'a pas non plus retiré les garanties ni exigé une rémunération lorsqu'il a été constaté que les prêts avaient en fait été utilisés à d'autres fins.
(186) Les autorités belges ont expliqué que les prêts ont parfois été utilisés à d'autres fins que celles qui avaient été annoncées. Elles citent l'exemple d'un prêt consenti par Fortis dont le montant, initialement destiné à financer l'achat des actions de Pakhuizen, n'a finalement pas été utilisé dans ce but, mais apparemment affecté à des travaux de rénovation.
(187) Les autorités belges ont par ailleurs reconnu que le prêt de 550 000 EUR de la banque ING, initialement destiné à financer des travaux de rénovation, a finalement servi à soutenir EVO. Personne ne conteste que la garantie accordée à titre gracieux pour l'obtention de ce prêt ne puisse être considérée comme une contribution à des travaux de rénovation. En d'autres termes, on ne peut pas dire que la ville se soit comportée comme un garant privé ordinaire (même détenant le contrôle de la société concernée), lequel aurait d'abord examiné si toutes les conditions étaient réunies pour que le prêt bénéficiant de la garantie puisse être remboursé, puis vérifié que les sommes empruntées étaient exclusivement utilisées pour le projet auquel elles étaient initialement destinées.
(188) Pour ce qui est des prêts garantis qui ont effectivement été utilisés (en partie ou en totalité) pour financer des travaux de rénovation, on rappellera que l'activité de loueur exercée par AGVO est de nature économique et que l'octroi d'une garantie à titre gracieux favorise cette entreprise sur le marché de la location. En outre, la garantie gratuite améliore la situation financière globale d'AGVO, puisqu'elle lui permet d'utiliser des ressources financières qui, dans des circonstances normales, auraient dû servir à payer la prime à d'autres fins que la rénovation des bâtiments loués à des organismes publics et semi-publics.
(189) Enfin, même si l'on admettait que la location de bâtiments à des entités publiques et semi-publiques pouvait être considérée comme un service d'intérêt économique général confié à AGVO, les conditions énoncées dans l'arrêt Altmark ne sont pas remplies, ce qui impose de conclure que l'octroi des garanties à titre gracieux constitue une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE.
(190) Dans son arrêt concernant l'affaire Altmark, la Cour de justice a jugé que la compensation de service public ne constitue pas une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE dès lors qu'elle remplit les conditions suivantes: "[...] premièrement, l'entreprise bénéficiaire doit effectivement être chargée de l'exécution d'obligations de service public et ces obligations doivent être clairement définies. [...]; [...] deuxièmement, les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation doivent être préalablement établis de façon objective et transparente [...]; [...] troisièmement, la compensation ne saurait dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l'exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d'un bénéfice raisonnable [...]; [...] quatrièmement, lorsque le choix de l'entreprise chargée de l'exécution d'obligations de service public, dans un cas concret, n'est pas effectué dans le cadre d'une procédure de marché public permettant de sélectionner le candidat capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d'une analyse des coûts qu'une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée en moyens de transport afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d'un bénéfice raisonnable pour l'exécution de ces obligations."
(191) En l'espèce, ces conditions ne sont pas remplies. Mis à part le fait qu'il est contestable qu'AGVO ait été chargée d'obligations de service public en rapport avec la location de bâtiments à des entités publiques ou semi-publiques, la Commission relève que les autorités belges ont explicitement confirmé qu'aucun paramètre de compensation n'a été défini. De plus, AGVO n'a pas opté pour un système de comptabilités séparées, ce qui implique que rien ne fait obstacle aux risques de surcompensation et de subventions croisées entre ses diverses activités. Par ailleurs, AGVO n'a pas non plus été sélectionnée à l'issue d'une procédure de marché public et les autorités belges n'ont pas démontré que les services concernés sont fournis au moindre coût pour la collectivité.
10.1.2.1.4. Taxes
(192) La ville a octroyé à AGVO le droit d'appliquer et de percevoir les taxes communales dues pour l'utilisation du port de pêche et de la criée.
(193) Il semble que les taxes ainsi perçues par AGVO constituent des ressources disponibles au profit de l'État dont une partie (40) a été transférée à cette entreprise. Elles constituent en outre un avantage dont AGVO n'aurait normalement pas bénéficié et qui, partant, favorise cette entreprise au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE.
(194) Dans le cas d'espèce, les autorités belges ont indiqué que la perception de la taxe relève des tâches d'intérêt public confiées à AGVO, au nombre desquelles figure la gestion du port de pêche, et en constitue de fait la rémunération. Elles soutiennent que le transfert des tâches et le droit de percevoir les taxes doivent être considérés comme une simple affectation de tâches interne à l'État et ne peuvent être assimilés à une aide d'État.
(195) Cependant, comme cela a déjà été démontré au point 10.1.1 de la présente décision, AGVO est à classer comme une entreprise au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE, ce que les autorités belges ont aussi reconnu dans leur lettre du 27 novembre 2009. Comme cela est expliqué au considérant 124, la gestion du port de pêche est une activité économique.
(196) La Commission a examiné si le droit de percevoir les taxes et d'en utiliser les recettes pouvait être considéré comme une compensation pour des services d'intérêt économique général et si les critères combinés définis dans l'arrêt Altmark étaient remplis.
(197) Comme cela a déjà été établi au considérant 191 de la présente décision, il apparaît toutefois que ces critères ne sont pas remplis, étant donné, par exemple, qu'aucun paramètre de compensation n'a été fixé.
(198) Enfin, même si l'on admettait que le droit de percevoir des taxes et d'en utiliser les recettes devait être considéré comme une compensation/rémunération pour la réalisation de tâches d'intérêt public (non économiques), il n'en reste pas moins qu'AGVO exerce également des activités commerciales, comme l'ont explicitement reconnu les autorités belges. Puisque ces dernières ont également admis qu'AGVO ne tient pas de comptabilités séparées et qu'il n'a pas été possible d'isoler les coûts et les recettes relatifs aux tâches non commerciales de l'entreprise, il est impossible d'éviter les subventions croisées et la question des taxes doit être considérée comme un avantage.
10.1.2.1.5. Conclusion
(199) Au vu des considérants qui précèdent, il apparaît que les actions mentionnées aux points 10.1.2.1.1 à 10.1.2.1.4 inclus ont favorisé AGVO au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE.
10.1.2.2. Avantage au profit d'EVO
(200) La Commission estime qu'une aide a été octroyée à EVO, d'une part, directement par la ville, sous la forme de garanties gratuites pour des prêts contractés auprès de banques privées et, d'autre part, par l'intermédiaire d'AGVO, qui lui a permis d'utiliser à titre gracieux des bâtiments d'une superficie de 13 600 m 2 , lui a accordé des garanties gratuites pour des prêts contractés auprès de banques privées et lui a apporté à la fois un capital initial et des augmentations de capital.
10.1.2.2.1. Garanties accordées à titre gracieux pour l'obtention de prêts
(201) S'agissant des garanties accordées par la ville et par AGVO, la Commission relève qu'aucun prix de marché n'a été payé, les garanties ayant été accordées à titre entièrement gracieux. En outre, ces garanties couvrent plus de 80 % de l'encours des prêts.
(202) Les autorités belges soutiennent qu'il est normal qu'un actionnaire détenant une participation de contrôle dans une entreprise fournisse gratuitement une garantie au profit de l'entreprise qu'il contrôle. Aucun élément de preuve n'est cependant fourni à l'appui de cette affirmation, qui est en outre très difficilement compatible avec le comportement d'un investisseur privé. Dans une situation normale, cette prestation serait en effet rémunérée par le paiement d'une prime appropriée reflétant les risques associés à la garantie (41), même si le garant se trouve être la société-mère (42). En outre, la Cour a déjà jugé que les opérations commerciales, même au sein d'un groupe d'entreprises publiques, doivent être rémunérées aux conditions normales du marché (43).
(203) Il convient en outre de noter qu'EVO, comme cela est démontré plus en détail au considérant 306, doit être considérée comme une entreprise en difficulté financière au sens des lignes directrices de 1999 et des lignes directrices de 2004 concernant les aides d'État au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté (44) (ci-après dénommées les "lignes directrices de 2004"). En effet, sa situation financière est restée difficile tout au long de la période allant de 2003 à 2008. Au terme de l'exercice 2003, plus de la moitié de son capital social avait disparu et cette situation n'a pas évolué au cours des années suivantes malgré les augmentations de capital successives dont l'entreprise a bénéficié.
(204) Conformément à une pratique établie, il y a présomption d'aide d'État dans le cas des garanties accordées aux entreprises en difficulté (45).
(205) Les autorités belges ont ajouté qu'EVO n'aurait pas pu obtenir les prêts sans la garantie fournie par la ville à titre gracieux. Du point de vue de la Commission, ce constat, auquel s'ajoute la mauvaise situation financière chronique d'EVO, implique que les prêts consentis par les banques privées avec une garantie gratuite de la ville (ou d'AGVO) n'auraient pas non plus été obtenus en l'absence de cette garantie. En conséquence, les prêts garantis constituent eux aussi un avantage au profit d'EVO (46).
(206) Enfin, les autorités belges soutiennent qu'il y a lieu de considérer les garanties comme faisant partie de l'opération de restructuration de la criée.
(207) La Commission note cependant que ni les garanties gratuites, ni les investissements aux fins desquels les prêts ont apparemment été obtenus n'étaient mentionnés dans le plan commercial. En outre, les prêts et les garanties en cause (c'est-à-dire ceux qui ont effectivement été mis en place) n'ont pas été accordés en 2002, au moment de la fondation d'EVO, mais plus tard, en 2004 et en 2005. Le nombre important des garanties fournies montre d'ailleurs qu'elles ont été accordées sur demande chaque fois qu'il a été annoncé qu'EVO avait besoin d'une garantie pour l'obtention d'un prêt de la part d'une institution de crédit. La Commission relève également qu'un des prêts consentis par Fortis et garantis par la ville a en fait été utilisé pour octroyer des prêts à des armateurs; on voit mal comment cela pourrait être considéré comme une opération relevant de la restructuration ou même du projet de privatisation de la criée.
(208) En conséquence, la Commission est d'avis que les garanties accordées à titre gracieux par la ville et par AGVO ont favorisé EVO au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE.
10.1.2.2.2. Bâtiments
(209) Les autorités belges ont avancé que la décision prise par AGVO d'accorder à EVO le droit d'utiliser gratuitement les bâtiments peut être considérée comme conforme aux conditions normales du marché, conditions auxquelles aurait souscrit un investisseur privé ordinaire dans des circonstances similaires.
(210) La Commission ne peut accepter cet argument. Il est d'ailleurs déjà contredit par le fait que les autorités belges ont indiqué que le futur partenaire stratégique devra conclure un bail pour l'utilisation des bâtiments de la criée et acquitter un loyer. De plus, on ne peut faire valoir qu'AGVO, propriétaire exclusif d'EVO (47), s'attendait à ce que celle-ci réalise des profits si élevés que la plus-value ainsi obtenue justifierait de ne pas facturer de loyer à EVO. On rappellera que la criée accumulait de lourdes pertes annuelles moyennes.
(211) Les autorités belges ont avancé que l'absence de loyer était compensée par le fait qu'EVO devait prendre à sa charge des coûts de rénovation et de réparation de la criée qui auraient normalement dû être assumés par le propriétaire. Selon elles, EVO a payé 182 377,31 EUR depuis 2002 au titre de travaux de rénovation et d'infrastructure effectués dans la criée.
(212) La Commission relève en premier lieu que les autorités belges n'ont présenté aucun document confirmant qu'EVO avait l'obligation d'assumer tous les coûts de rénovation des bâtiments de la criée. De même, elles n'ont fourni aucun document confirmant qu'EVO a effectivement payé la somme de 182 377,31 EUR pour des travaux de rénovation.
(213) La Commission note ensuite que les autorités belges n'ont pas démontré qu'il est si inhabituel qu'un locataire prenne en charge des frais de rénovation ou que, dans ce cas, il est normal de le dispenser de loyer. Elles n'ont pas davantage indiqué la nature des travaux effectués, ce qui prive la Commission de la possibilité de déterminer s'il s'agit de travaux inhabituels pour un locataire. Il apparaît en outre, à la lumière du document reçu, qu'AGVO a elle aussi effectué, entre 2004 et 2007, des travaux de rénovation de la criée dont le montant s'élève à 36 497,40 EUR. Cela ne semble pas compatible avec l'argument des autorités belges selon lequel c'est à EVO qu'il incombait d'assumer tous les coûts d'entretien et de rénovation.
(214) En outre, les autorités belges n'ont fourni aucune preuve établissant que la somme de 182 377,31 EUR prétendument payée par EVO pour des travaux de rénovation correspondrait à la valeur du loyer à payer, dans les conditions normales du marché, pour l'utilisation, cinq années durant, de bâtiments d'une superficie de 13 600 m2.
(215) En outre, même si l'on pouvait considérer que les coûts de rénovation étaient particulièrement considérables et constituaient une sorte de rémunération pour l'utilisation des bâtiments, ce qui n'a pas été démontré par les autorités belges, le plan commercial du 21 novembre 2001 indiquait clairement qu'aucun investissement important n'était à prévoir au cours des dix années suivantes, étant donné que la criée venait d'être modernisée. En conséquence, en décidant, en 2002, de mettre gracieusement les bâtiments à la disposition d'EVO, sans pouvoir raisonnablement s'attendre à ce que les coûts correspondant à l'obligation prétendument imposée à EVO d'en financer l'entretien puissent au minimum équivaloir au loyer qu'un opérateur aurait été disposé à payer pour la jouissance des bâtiments, AGVO a octroyé un avantage à EVO. Étant donné que la question de savoir si AGVO a agi comme un investisseur privé ordinaire doit être examinée à la lumière des éléments disponibles au moment où la décision a été prise (48), il y a lieu de conclure qu'au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE, EVO a reçu une aide d'État, en 2002, sous la forme de la mise à disposition gratuite de bâtiments représentant une superficie de 13 600 m 2 .
10.1.2.2.3. Capital initial et opérations ultérieures d'augmentation de capital
(216) Concernant le capital initial d'environ 370 000 EUR octroyé à EVO, la Commission renvoie à l'analyse présentée au point 10.1.2.1.1 de la présente décision. De fait, les autorités belges ont confirmé que le capital initial d'EVO a été financé sur le capital initial d'AGVO. La Commission a déjà fait observer qu'un investisseur privé n'aurait pas fait le choix de restructurer la criée et d'y investir 250 millions BEF; a fortiori, il n'aurait pas non plus choisi de constituer une filiale à 100 % avec une partie du nouvel apport de capital.
(217) En ce qui concerne les augmentations de capital effectuées au moyen de remises de dettes de la part d'AGVO, la Commission renvoie également à l'analyse présentée au point 10.1.2.1.1 de la présente décision. De fait, les autorités belges ont confirmé que les augmentations de capital ont aussi été [partiellement (49)] financées sur le capital initial d'AGVO.
(218) Il existe en outre d'autres raisons pour lesquelles il y a lieu de considérer qu'AGVO ne s'est pas comportée comme l'aurait fait un investisseur privé dans la même situation.
(219) Les investissements publics sont considérés comme une aide d'État lorsqu'il apparaît que la situation financière de l'entreprise concernée, et en particulier la structure et l'ampleur de ses dettes, est telle qu'on ne peut pas s'attendre à ce que l'investissement soit rentable (c'est-à- dire qu'il produise des dividendes ou une plus-value en capital) dans un délai raisonnable à compter de l'engagement des capitaux.
(220) La Commission relève que la première augmentation de capital au moyen d'une remise de dette est intervenue le 31 décembre 2004, alors qu'EVO avait presque un an et demi d'existence. Il paraît évident que cette augmentation de capital avait pour objectif de compenser les lourdes pertes enregistrées par EVO. On peut en dire autant des augmentations de capital intervenues en 2005 et en 2007. Il va de soi que ces mesures n'ont pas été prises en vue d'obtenir un retour sur capital à court ou même long terme, mais uniquement dans le but d'éponger des pertes subies dans le passé. Un investisseur privé n'aurait jamais décidé d'octroyer ces augmentations de capital, particulièrement les deux dernières. EVO n'était pas dans une bonne situation financière et économique et celle-ci, de toute évidence, n'évoluait pas comme annoncé dans le plan commercial, qui prévoyait une réduction constante des pertes et non leur aggravation rapide. De fait, dès la fin de l'exercice 2003, plus de la moitié du capital social d'EVO avait fondu et cette situation n'a pas évolué au cours des années suivantes, malgré les augmentations de capital successives dont l'entreprise a bénéficié. En l'absence de toute perspective de retour sur capital, un investisseur privé n'aurait pas fait le choix d'augmenter le capital de l'entreprise dans le but d'en éponger les pertes (50). Il aurait plutôt étudié sérieusement les autres possibilités envisageables (liquidation, vente, etc.) et aurait au minimum exigé certaines garanties ou mesures de restructuration. De plus, la forme particulière de l'augmentation de capital (remise de dette) confirme que les opérations concernées ne peuvent être considérées comme faisant partie de la restructuration planifiée en 2001.
(221) Il convient en outre de noter qu'EVO doit être considérée comme une société en difficulté financière (51). Or, conformément aux pratiques établies, il y a présomption d'aide d'État dans le cas des augmentations de capital accordées aux entreprises en difficulté (52).
(222) En conséquence, les augmentations de capital successives dont a bénéficié EVO l'ont favorisée au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE.
10.1.2.3. Avantage au profit de Pakhuizen
(223) S'agissant du bail à long terme concédé à Pakhuizen pour l'utilisation des bâtiments (53), la Commission considère, au vu des informations disponibles, qu'il s'agit d'un avantage. Tout d'abord, un montant de seulement 25 EUR par an ne saurait être considéré comme une rémunération normale pour un bail à long terme d'une durée de 45 ans portant sur une surface bâtie de 14 754 m 2, même si ces bâtiments doivent être rénovés eu égard à leur très mauvais état. Le fait que Pakhuizen soit tenue d'en effectuer la rénovation ne change rien à ce point. De fait, selon la législation belge (54), le bailleur n'a pas l'obligation de réparer les bâtiments. Le preneur, en revanche, est tenu de maintenir les bâtiments en bon état et d'effectuer toutes les réparations ordinaires. Les autorités belges n'ont pas démontré que les travaux de rénovation que Pakhuizen avait l'obligation d'effectuer en vertu du bail à long terme allaient au-delà des "réparations ordinaires". En outre, elles n'ont apporté aucune preuve que les coûts découlant de ladite obligation sont égaux au prix qui aurait pu être obtenu pour la location des bâtiments dans les conditions normales du marché.
(224) Par ailleurs, les autorités belges ont admis que Pakhuizen n'a pas rempli ses obligations en matière de rénovation, ni respecté l'affectation des bâtiments. Or, de toute évidence, la ville n'a pris aucune mesure à l'encontre de Pakhuizen pour faire appliquer les clauses du contrat, alors que cela était son droit. En conséquence, même si, compte tenu des coûts de rénovation, le loyer de 25 EUR par an avait pu être considéré comme conforme aux prix du marché - ce qui n'est pas le cas - il n'en resterait pas moins que Pakhuizen a été avantagée dès lors qu'il est apparu que la ville avait renoncé à faire appliquer le contrat.
(225) En outre, en ce qui concerne la location des bâtiments à Pakhuizen moyennant l'engagement d'en assurer l'entretien et la rénovation, il convient de noter que, conformément au principe de l'investisseur en économie de marché et compte tenu également des conditions établies dans la communication de la Commission concernant les éléments d'aide d'État contenus dans des ventes de terrains et de bâtiments par les pouvoirs publics, les pouvoirs publics peuvent être considérés comme agissant en tant qu'opérateur en économie de marché dès lors qu'ils offrent leurs contrats aux prix le plus élevé possible, dans le cadre d'un marché ouvert, transparent et non discriminatoire, au soumissionnaire le plus offrant, ou à la suite d'une estimation de la valeur de marché réalisée par un expert indépendant. Il semble toutefois que cela n'ait pas été le cas.
(226) Enfin, le fait qu'au bout de 27 ans, le propriétaire des bâtiments (à savoir tout d'abord la ville, puis AGVO) a droit à la moitié des bénéfices annuels de Pakhuizen ne change rien à l'analyse présentée ci-dessus. Cet avantage est trop lointain et trop incertain pour représenter à l'heure actuelle la moindre valeur nette effective pour le propriétaire des bâtiments. De plus, même si l'avantage avait pareille valeur, les autorités belges n'ont pas démontré que celle-ci serait suffisamment élevée, même combinée aux 25 EUR annuels et au coût des rénovations (non ordinaires), pour équivaloir au loyer que Pakhuizen aurait payé, aux prix du marché, pour l'utilisation des biens immeubles concernés.
(227) En conséquence, Pakhuizen bénéficie, au profit de ses coûts d'exploitation, d'un avantage annuel qui constitue une faveur au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE.
(228) En ce qui concerne la période postérieure au 26 mars 2004, date à laquelle la propriété des bâtiments est passée à AGVO, la Commission note que le contrat de bail a continué à s'appliquer dans les mêmes conditions qu'auparavant et que Pakhuizen a donc continué à bénéficier du même avantage.
10.1.2.4. Avantage au profit des entreprises de pêche utilisant les services d'EVO et de Pakhuizen
(229) Dans la décision portant ouverture de la procédure formelle d'examen, la Commission a relevé qu'EVO et, peut-être, Pakhuizen, offraient aux entreprises de pêche utilisant la criée des services facturés à des tarifs inférieurs à ceux qu'imposerait un opérateur privé ordinaire.
(230) Ainsi apparaît-il qu'EVO rembourse, totalement ou partiellement, les coûts du transport en conteneurs du poisson destiné à être vendu à la criée d'Ostende, et ce au départ de plusieurs sites européens. En outre, EVO consent des prêts à des taux apparemment inférieurs à ceux du marché à la condition que l'entreprise emprunteuse écoule ses prises à la criée d'Ostende.
(231) Les observations présentées par les tierces parties suggèrent qu'EVO a aussi adopté d'autres pratiques qui faussent les conditions normales de la concurrence sur le marché, mais la Commission n'a pas reçu d'élément permettant de confirmer ces allégations. Les autorités belges ont contesté qu'EVO offre des services à des tarifs inférieurs aux conditions du marché.
(232) Bien que la Commission ait reçu très peu d'éléments de preuve concernant les conditions commerciales auxquelles EVO propose ses services, on ne peut exclure que les entreprises faisant usage de la criée d'Ostende soient favorisées au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE. Pour l'heure, toutefois, la Commission reconnaît aussi une certaine validité à l'argument des autorités belges lorsqu'elles font valoir que si l'aide d'État a permis à EVO de proposer ses services à des conditions plus avantageuses, cela ne signifie pas nécessairement que l'aide d'État ait été transférée au profit des armateurs et des entreprises de pêche.
(233) Pour ces motifs, la Commission considère qu'il n'est pas possible de conclure avec certitude qu'un avantage a été transféré aux armateurs. En outre, du fait que la Commission ordonne par la présente décision qu'il soit mis fin à l'aide au profit d'AGVO, d'EVO et de Pakhuizen et que les montants correspondants soient récupérés, il est probable que tout avantage au profit des armateurs disparaîtra ou, tout du moins, sera fortement réduit. Enfin, il apparaît en tout état de cause que le bénéficiaire principal de l'aide est la criée restructurée, qui l'a mise à profit pour se maintenir sur le marché et pour accroître sa part de marché en proposant des services à perte, ce qui a perturbé le fonctionnement normal du marché.
10.1.3. RESSOURCES D'ÉTAT ET IMPUTABILITÉ À L'ÉTAT
(234) La Commission note que les activités en cause concernent des actions menées par la ville elle-même, ainsi que des actions financées sur des ressources de l'État et imputables à la ville.
10.1.3.1. Aides octroyées par les pouvoirs publics
(235) En premier lieu, la ville a octroyé une aide à AGVO en lui fournissant un capital initial financé sur le budget communal, en lui fournissant à titre gracieux les garanties nécessaires pour obtenir des prêts de la part de banques privées, en lui transférant la propriété de ses bâtiments et en l'habilitant à appliquer et à percevoir des taxes communales. Elle a également octroyé une aide à Pakhuizen par le truchement du bail à long terme conclu pour l'utilisation de ses bâtiments, et à EVO par le truchement des garanties accordées à titre gracieux pour l'obtention de crédits auprès de banques privées.
(236) Il s'agit dès lors de mesures financées au moyen de ressources de l'État qui sont, de ce fait, imputables à ce dernier.
10.1.3.2. Actions imputables à l'autorité publique
(237) En second lieu, pour ce qui est des avantages accordés par AGVO à EVO et par AGVO à Pakhuizen, la Commission observe que, conformément aux articles concernés de ses statuts, AGVO est l'unique actionnaire d'EVO (exception faite de M. Miroir, qui possède une seule des quinze mille actions de l'entreprise et est en réalité membre du conseil communal) et de Pakhuizen et que c'est elle qui désigne tous les membres du conseil d'administration de ces entreprises. Par ailleurs, la ville est l'unique actionnaire d'AGVO, dont les membres du conseil d'administration sont tous désignés par le conseil communal. La ville est donc en situation d'exercer une influence dominante sur AGVO.
(238) En outre, conformément à ses statuts, AGVO est chargée de la gestion, du développement et de l'exploitation de la criée et du quai aux poissons d'Ostende et de ses annexes, ainsi que du développement de toutes les activités qui s'y rapportent directement ou indirectement. En d'autres termes, AGVO a l'obligation, de par ses statuts, de s'impliquer dans la gestion de la criée.
(239) En ce qui concerne spécifiquement le bail à long terme pour la location des bâtiments à Pakhuizen, celui-ci a été accordé directement par la ville.
(240) Ainsi, à la lumière de l'affaire Stardust (55), et compte tenu du soutien public octroyé aux entreprises citées, comme cela est décrit ci-dessus, il y a lieu de considérer AGVO comme un organisme relevant de l'État et ses décisions concernant les injections de capital dans EVO, l'octroi à EVO de garanties gratuites pour l'obtention de prêts, ainsi que l'octroi à EVO du droit d'utiliser des bâtiments à titre gracieux comme des décisions financées au moyen de ressources d'État et imputables à l'autorité publique.
(241) Ces conclusions ne sont pas contestées par les autorités belges, qui confirment au contraire que la ville contrôlait bien EVO et Pakhuizen, par l'intermédiaire d'AGVO (56).
10.1.4. DISTORSION DE LA CONCURRENCE ET INCIDENCE SUR LES ÉCHANGES
(242) Les activités de la ville s'exercent au bénéfice d'AGVO d'EVO et de Pakhuizen. AGVO, EVO et Pakhuizen forment un groupement d'entreprises opérant sur un même marché, commercialisant du poisson en criée et fournissant des services connexes au secteur de la pêche.
(243) Le marché des criées est hautement concurrentiel et les criées d'États membres voisins sont en concurrence directe les unes avec les autres pour attirer la clientèle des pêcheurs de divers États membres. En conséquence, tout avantage concédé à l'un des acteurs de ce marché fausse ou risque de fausser la concurrence entre criées et peut ainsi affecter le commerce entre États membres.
(244) Cela est confirmé par les observations reçues de tierces parties. En effet, des criées ou associations de criées du Royaume-Uni, des Pays-Bas et d'autres pays d'Europe ont aussi manifesté leur intérêt pour la procédure et exposé en quoi elles estiment que les mesures d'aide d'État ont eu une incidence sur leur activité.
(245) Enfin, la Commission relève que les autorités belges ont indiqué que, parmi les candidats à l'acquisition de la criée d'Ostende, figurent non seulement des criées belges mais aussi des criées d'autres États membres.
(246) S'agissant des marchés de services de location, les aides aux entreprises actives dans ces secteurs sont susceptibles de fausser la concurrence au détriment des entreprises fournissant des services de location dans d'autres ports de pêche, même situés dans d'autres États membres, ainsi qu'au détriment des entreprises proposant à la location des bâtiments situés à proximité du port de pêche d'Ostende (parmi lesquelles peuvent figurer des entreprises d'autres États membres). Par ailleurs, les mesures d'aide ont pu contribuer à maintenir ou à renforcer la position d'AGVO et de Pakhuizen sur le marché, alors qu'en l'absence d'aide, leurs activités auraient été ou auraient pu être reprises par une autre entreprise. Il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice, le simple fait que la compétitivité d'une entreprise soit renforcée par rapport à des entreprises concurrentes grâce à l'octroi d'un avantage économique qu'elle n'aurait pas reçu autrement dans l'exercice normal de son activité indique qu'il y a risque de distorsion de concurrence (57).
(247) S'agissant des activités de gestion des ports de pêche, la Commission considère que l'aide à ces entreprises est de nature à fausser la concurrence au détriment des entreprises qui gèrent d'autres ports de pêche en concurrence avec le port de pêche d'Ostende. Par ailleurs, les mesures d'aide ont pu contribuer à maintenir ou à renforcer la position d'une entreprise sur le marché, alors qu'en l'absence d'aide, ses activités auraient été ou auraient pu être récupérées par une autre entreprise (58).
(248) La Commission souhaite ajouter que, bien qu'AGVO et Pakhuizen n'opèrent pas directement sur le marché des criées, elles fournissent des services connexes à l'activité de ce marché qui ont une incidence sur l'attractivité de la criée. La Commission relève en outre qu'AGVO est indirectement active sur le marché des criées par l'intermédiaire de sa filiale EVO. Il ressort de ce qui précède que l'aide octroyée à AGVO et à Pakhuizen est de nature à fausser la concurrence et à affecter le commerce entre États membres, non seulement sur le marché spécifique où elles opèrent (à savoir le marché locatif et celui des ports de pêche), mais aussi sur le marché des criées.
10.1.5. CONCLUSION
(249) Compte tenu de ce qui précède, la Commission estime qu'il y a lieu de considérer que les activités dont la liste suit correspondent aux critères de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE et constituent par conséquent des aides d'État:
a) les avantages accordés à AGVO par les décisions de la ville consistant:
- à doter AGVO d'un capital de départ de 250 millions BEF (soit 6 179 338 EUR),
- à octroyer à AGVO les droits de jouissance exclusifs des terrains et bâtiments situés dans l'enceinte du port de pêche,
- à mettre des bâtiments à la disposition d'AGVO,
- à fournir à titre gracieux les garanties nécessaires pour l'obtention de prêts au profit d'AGVO, et
- à octroyer à AGVO le droit de percevoir des taxes communales et d'en utiliser les recettes;
b) les avantages octroyés à EVO par:
- la décision de la ville de fournir à titre gracieux les garanties nécessaires pour l'obtention de prêts au profit d'EVO,
- la décision d'AGVO de ne pas facturer de loyer à EVO pour l'utilisation de ses bâtiments, et
- la décision d'AGVO d'octroyer à EVO un capital initial et des augmentations de capital pour un montant cumulé de 3 969 000 EUR;
c) les avantages octroyés à Pakhuizen par la ville et/ou ensuite par AGVO, dans le cadre du bail à long terme conclu pour l'utilisation de leurs bâtiments.
10.2. COMPATIBILITÉ
(250) Une aide d'État peut être déclarée compatible avec le marché intérieur si elle correspond à l'une des exceptions mentionnées dans le TFUE. Les entreprises concernées sont actives principalement dans le secteur de la pêche. Elles opèrent également sur le marché des services locatifs. La Commission estime qu'AGVO, en tant que gestionnaire du port de pêche, et EVO, en tant qu'opérateur de la criée, sont des entreprises dont une part significative des activités doit être considérée comme relevant du secteur de la pêche. Dans le cas de Pakhuizen, il semble moins évident que cette entreprise soit à considérer comme active dans le secteur de la pêche.
(251) En ce qui concerne le secteur de la pêche, les aides d'État ne peuvent être présumées compatibles avec le marché intérieur que lorsqu'elles répondent aux conditions fixées dans les lignes directrices pour la pêche. Conformément au point 5.3 des lignes directrices actuellement en vigueur, toute "aide illégale" au sens de l'article 1 er, point f), du règlement (CE) n° 659-1999 sera examinée au regard des lignes directrices applicables au moment où l'acte administratif établissant l'aide est entré en vigueur. En conséquence, il y a lieu d'examiner l'aide sur la base des lignes directrices pour la pêche de 2001, de 2004 et de 2008.
(252) Dans la mesure où Pakhuizen ne peut être considérée comme une entreprise de pêche, la Commission note que l'examen de l'aide devrait se fonder sur les règles générales applicables à tous les secteurs, ainsi que sur les objectifs de l'aide.
(253) Enfin, la Commission relève que les autorités belges n'ont pas contesté l'analyse de la Commission en ce qui concerne la question de la compatibilité.
10.2.1. AIDE OCTROYÉE À AGVO
(254) En ce qui concerne l'aide d'État octroyée par la ville à AGVO, il y a lieu, aux fins de l'examen, de faire la distinction entre les différentes actions et de prendre en compte leurs dates respectives de mise en œuvre.
10.2.1.1. Capital initial
(255) Les autorités belges ont fait valoir qu'il y avait lieu d'apprécier la question du capital initial dans le cadre de la restructuration de la criée d'Ostende.
(256) En vertu du point 2.2.4 des lignes directrices de 2001 pour la pêche, qui s'appliquaient au moment de la restructuration, les aides ayant pour but la restructuration des entreprises en difficulté doivent être appréciées conformément aux lignes directrices communautaires pour les aides d'État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté qui s'appliquaient au moment où l'aide a été octroyée, à savoir, dans le cas d'espèce, les lignes directrices de 1999, y compris dans le cas des entreprises actives dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture (59).
(257) Au sens du point 2.1 des lignes directrices de 1999, on considère qu'une entreprise est en difficulté lorsqu'elle est incapable, avec ses propres ressources financières ou avec les ressources que sont prêts à lui apporter ses propriétaires/actionnaires ou ses créanciers, d'enrayer des pertes qui la conduisent, en l'absence d'une intervention extérieure des pouvoirs publics, vers une mort économique quasi certaine à court ou moyen terme. Les difficultés d'une entreprise se manifestent habituellement par le niveau croissant des pertes, la diminution du chiffre d'affaires, le gonflement des stocks, la surcapacité, la diminution de la marge brute d'autofinancement, l'endettement croissant, la progression des charges financières ainsi que l'affaiblissement ou la disparition de la valeur de l'actif net.
(258) Selon l'appréciation de la Commission, il n'y a aucun doute que la criée d'Ostende présentait en 2001 toutes les caractéristiques d'une "entreprise en difficulté". De fait, comme cela est expliqué au considérant 17, sa part des arrivées de poisson dans les ports belges a chuté d'environ 37 % à 20 % entre 1991 et 2001. Entre 1997 et 2001, son chiffre d'affaires est tombé de 20 550 000 EUR à 13 440 000 EUR et, pendant de nombreuses années, elle a occasionné à la ville des pertes annuelles moyennes d'un montant de 1 850 000 EUR. C'est ce qui a conduit la ville à choisir, en 2001, entre la fermeture et la restructuration de la criée. En conséquence, la Commission estime que la criée d'Ostende est à considérer comme une "entreprise en difficulté" au sens des lignes directrices de 1999. Les autorités belges n'ont pas contesté cette conclusion.
(259) Bien qu'AGVO soit une entité juridique nouvellement formée, la Commission note que la constitution de son capital initial faisait partie du plan de restructuration de la criée d'Ostende. Étant donné que la criée était une entreprise en difficulté, qu'AGVO a été créée uniquement aux fins de sa restructuration et qu'AGVO en a repris non seulement les actifs, mais aussi les charges liées à divers emprunts bancaires, on peut considérer qu'AGVO était une entreprise en difficulté au moment où elle a été dotée de son capital initial. On peut dès lors considérer que ce capital initial constitue une aide à la restructuration (60) au sens des lignes directrices de 1999.
(260) Bien qu'AGVO soit admissible au bénéfice de l'aide visée au point 30 des lignes directrices de 1999, l'aide à la restructuration sous la forme de la création d'AGVO, société dotée d'un capital de départ de 250 millions BEF (6 179 338 EUR), ne remplit pas les conditions de compatibilité avec le marché intérieur telles que fixées au point 32 des lignes directrices de 1999.
(261) Le point 32 des lignes directrices prévoit en particulier que "le plan de restructuration, dont la durée doit être la plus courte possible, doit permettre de rétablir dans un délai raisonnable la viabilité à long terme de l'entreprise, sur la base d'hypothèses réalistes concernant ses conditions d'exploitation futures". La Commission considère que le plan de restructuration visé au considérant 19 ne remplit pas ces conditions; elle note à cet égard que le plan ne comprend aucune mesure interne spécifique visant à améliorer le fonctionnement de la criée et à abandonner les activités déficitaires.
(262) En outre, contrairement aux exigences du point 32 des lignes directrices de 1999, la restructuration ne semble pas avoir été fondée sur une étude de marché fournissant des indications sur les perspectives d'évolution de l'offre et de la demande, une analyse du marché concerné et les autres informations visées à l'annexe I des lignes directrices de 1999.
(263) Le plan de restructuration ne contient pas non plus les éléments visés au point 33 des lignes directrices de 1999, à savoir une description des circonstances ayant entraîné les difficultés de l'entreprise qui permette d'évaluer si les mesures proposées sont adaptées, un bilan de la situation actuelle et de l'évolution prévisible de l'offre et de la demande sur le marché des produits concernés, accompagné de scénarios traduisant des hypothèses optimistes, pessimistes et médianes, ainsi qu'un état des forces et faiblesses spécifiques de l'entreprise.
(264) La Commission estime par ailleurs que les informations disponibles n'apportent aucun élément de preuve établissant que l'aide a été limitée au strict minimum nécessaire, conformément aux dispositions du point 40 des lignes directrices de 1999, ou que le bénéficiaire ait été tenu d'apporter la moindre contribution prélevée sur ses ressources propres. Il importe également de noter à cet égard que, conformément au point 41 des lignes directrices de 1999, l'aide ne doit être utilisée que dans le but de restaurer la viabilité de l'entreprise et ne doit pas permettre au bénéficiaire d'étendre sa capacité de production au cours de la mise en œuvre du plan de restructuration. Or, comme cela est souligné plus haut, le plan financier élaboré en 2001 suggère que la criée aurait pu se redresser au bout de huit ans sans nécessiter l'intégralité de la dotation de 250 millions BEF. Le plan commercial prévoit pour sa part une progression du chiffre d'affaires de 10 % au cours des cinq premières années d'activité de la criée restructurée sur le marché, ce qui pourrait signifier que la criée prévoyait de se développer. Il apparaît donc que le plan de redressement n'a pas été conçu dans la perspective de veiller à ce que l'aide soit utilisée exclusivement pour restaurer la viabilité de l'entreprise; le plan semble en outre envisager que la criée puisse faire usage de l'apport de liquidités supplémentaires pour étendre sa capacité de production, développer ses activités et/ou mener des actions agressives de conquête du marché. De fait, il ressort des informations reçues que l'aide a bien été utilisée pour développer les activités de la criée (61), ainsi que pour des actions agressives susceptibles de provoquer des distorsions du marché (62).
(265) La Commission relève par ailleurs que le plan de restructuration ne comprend aucune mesure visant à garantir sa pleine exécution et le respect de toutes ses conditions.
(266) En outre, la Belgique n'a pas non plus démontré que des contreparties ont été mises en place conformément aux exigences des points 35 à 39 des lignes directrices de 1999 ou, à défaut, que les conditions particulières (de substitution) applicables à l'agriculture (pêche comprise), prévues aux points 73 à 82 des lignes directrices de 1999, étaient remplies (63). De fait, il semble que la ville n'ait pris aucune mesure pour atténuer, autant que possible, les conséquences défavorables de l'aide pour les concurrents, contrairement à ce qui est exigé au point 35 des lignes directrices de 1999. Or, vu la situation spécifique des criées, compte tenu, notamment, des limitations de l'offre résultant des mesures de conservation restrictives adoptées annuellement au niveau de l'Union, il est hautement probable que l'aide soit susceptible d'avoir des conséquences défavorables pour les criées concurrentes et c'est un point auquel la ville aurait dû prêter une attention particulière.
(267) En conséquence, l'aide octroyée à AGVO pour la restructuration de la criée n'est pas compatible avec les conditions fixées dans les lignes directrices de 1999, ni avec les lignes directrices de 2001 pour la pêche se rapportant aux lignes directrices en matière de sauvetage et de restructuration.
(268) En ce qui concerne la question de savoir si l'apport de capital pourrait être considéré comme une compensation pour des obligations de service public, la Commission renvoie à l'analyse présentée au point 10.2.1.4. de la présente décision.
10.2.1.2. Transfert de propriété des bâtiments et droits exclusifs d'utilisation des terrains et des bâtiments
(269) Comme cela a été établi au point 10.1.2.2.2 de la présente décision, l'octroi du droit exclusif d'utilisation gratuite des bâtiments à compter du 14 mars 2002, puis le transfert par la ville de la propriété de plusieurs bâtiments représentant une superficie de 57 500 m 2 ont été effectués sans qu'il soit imposé à AGVO d'obligations d'une valeur équivalente. Ainsi qu'il a déjà été fait remarquer, ni les statuts, ni l'acte de transfert ne semblent liés à une quelconque condition ou obligation spécifique et inhabituelle de nature à justifier l'absence de loyer ou de rémunération.
(270) Il y a donc lieu de considérer cette action comme une aide destinée à améliorer la situation de l'entreprise et à accroître sa trésorerie, dont le résultat est de réduire les coûts de production du bénéficiaire.
(271) La Commission ne voit pas en quoi cette aide pourrait être compatible avec l'une au moins des règles de compatibilité avec le marché intérieur énoncées dans les lignes directrices de 2001 pour la pêche, et les autorités belges n'ont présenté aucun élément à cet égard.
(272) En ce qui concerne la question de savoir s'il y a lieu de considérer les droits d'utilisation exclusifs et le transfert de propriété, accordés à titre gracieux, dans le cadre de la restructuration de la criée, la Commission a déjà établi aux considérants 260 et suivants de la présence décision que les conditions fixées dans les lignes directrices de 1999 ne sont pas remplies, et ce bien qu'AGVO eût pu prétendre à une aide à la restructuration au moment de l'octroi des mesures (en tant qu'entreprise en difficulté).
(273) En ce qui concerne la question de savoir si les droits d'utilisation exclusifs et le transfert de propriété pourraient être considérés comme une compensation pour des obligations de service public, la Commission renvoie à l'analyse présentée au point 10.2.1.4. de la présente décision.
10.2.1.3. Garanties de prêts
(274) Les autorités belges estiment qu'il y a lieu d'établir une distinction entre les garanties octroyées à titre gracieux pour l'obtention des prêts dont le montant a été utilisé pour des travaux de rénovation et de ceux dont le montant a été utilisé pour soutenir EVO.
(275) Elles ont reconnu à cet égard qu'un prêt de 550 000 EUR avait été utilisé pour soutenir EVO.
(276) Les autorités belges ont fait valoir que la question des garanties octroyées à titre gracieux pour l'obtention de prêts destinés au soutien d'EVO devait être appréciée dans le cadre de la restructuration de la criée d'Ostende.
(277) La Commission note cependant, comme cela a été établi aux considérants 260 et suivants de la présence décision, que les conditions de compatibilité fixées dans les lignes directrices de 1999 ne sont pas remplies, et ce bien qu'AGVO eût pu prétendre à une aide à la restructuration au moment de l'octroi des mesures (en tant qu'entreprise en difficulté).
(278) En outre, la Commission relève que les garanties gratuites constituent des mesures d'aide dont on ne trouve pas trace dans le plan de restructuration. La Commission rappelle que, conformément au point 3.2.3 des lignes directrices de 1999 et au point 3.3 des lignes directrices de 2004 (64), les aides à la restructuration ne peuvent être octroyées qu'une fois. En conséquence, même si l'on admettait que l'aide originale, octroyée sous la forme du capital initial etc., était conforme aux lignes directrices au sauvetage et à la restructuration applicables - ce qui n'est pas le cas - les garanties gratuites ne respectent pas la condition du "une fois seulement".
(279) Les autorités belges semblent avancer que la ville a finalement choisi d'octroyer des garanties à titre gracieux pour l'obtention de prêts plutôt que de continuer à payer les tranches annuelles du capital initial. La Commission relève toutefois que le plan de restructuration n'a pas été révisé comme l'exige le point 52 des lignes directrices de 1999 et des lignes directrices de 2004. En outre, on ne voit pas clairement si le montant de l'aide a été augmenté ou diminué, ou encore si c'est la forme de l'aide qui a été modifiée. De fait, bien que les tranches correspondant au capital initial n'aient pas toutes été payées annuellement comme cela était initialement prévu, il n'en reste pas moins qu'AGVO était légalement fondée à exiger de son actionnaire le paiement du solde. Elle a d'ailleurs exercé ce droit en 2006 et en 2007, années où des versements supplémentaires ont été effectués en sa faveur.
(280) En conséquence, la Commission considère que la garantie gratuite accordée pour l'obtention du prêt de 550 000 EUR n'est pas compatible avec les conditions énoncées dans les lignes directrices de 1999 et celles de 2004, ni dans les lignes directrices de 2004, en matière de sauvetage et de restructuration.
(281) S'agissant des garanties octroyées à titre gracieux pour des prêts utilisés aux fins de travaux de rénovation, la Commission renvoie à l'analyse présentée au point 10.2.1.4 de la présente décision.
10.2.1.4. Taxes et compensations pour services publics
(282) Les autorités belges ont fait valoir qu'une partie du capital initial, une partie des bâtiments et une partie des prêts garantis ont été utilisées pour des prestations de services d'intérêt (économique) général, à savoir la gestion du port de pêche et la location de bâtiments à des institutions publiques et semi-publiques. Elles considèrent en outre que le droit de percevoir des taxes auprès des utilisateurs du port de pêche (et d'en utiliser le produit) est à considérer comme une des missions de service public d'AGVO.
(283) Les autorités belges n'ont pas apporté la preuve que ces mesures peuvent être déclarées compatibles au titre de l'article 106, paragraphe 2, du TFUE. Il convient de rappeler qu'il incombe à tout État membre invoquant l'article 106, paragraphe 2, du TFUE pour justifier une dérogation aux règles fondamentales du traité, de démontrer que les conditions d'application de cette disposition sont réunies (65). En tout état de cause, la Commission a examiné si les mesures d'aide pouvaient être considérées dans une certaine mesure comme des compensations pour service public accordées conformément aux conditions énoncées à l'article 106, paragraphe 2, du TFUE.
(284) À cet égard, la Commission a énoncé, dans ses communications de 1996 (66) et de 2001 (67) - Les services d'intérêt général en Europe -, ainsi que dans l'encadrement communautaire des aides d'État sous forme de compensations de service public de 2005 (68), les conditions auxquelles une aide d'État peut être considérée comme compatible au titre de l'article 106, paragraphe 2.
(285) Une de ces conditions est que l'entreprise bénéficiaire de l'aide doit avoir été spécifiquement chargée par l'État membre de l'exécution d'un service d'intérêt économique général bien déterminé. L'acte ou les actes de mandatement correspondant(s) doivent préciser, au minimum, la nature précise, le champ d'application et la durée des obligations de service public, ainsi que l'identité des entreprises concernées.
(286) La Commission pourrait admettre que, de par ses statuts, AGVO a été chargée de la gestion du port de pêche et que cette mission entraîne un certain nombre d'obligations.
(287) Toutefois, pour ce qui est des activités de location d'AGVO, la Commission relève que les obligations de service public imposées à l'entreprise ne sont pas clairement définies. En particulier, elle n'a trouvé aucune disposition imposant à cet égard des obligations spécifiques à AGVO et les autorités belges n'ont pas fourni d'informations supplémentaires sur ce point. Celles-ci semblent considérer que le fait que les institutions locataires des bâtiments sont de type public ou semi-public implique nécessairement que les entreprises qui leurs donnent ces bâtiments en location s'acquittent dès lors elles-mêmes d'une mission de service public. C'est une position à laquelle la Commission ne peut souscrire, puisque l'opération considérée n'implique en soi aucun mandatement, ni aucune obligation spécifique de service public différente des obligations qui incomberaient à un quelconque bailleur privé. La Commission conclut dès lors que la Belgique n'a pas démontré qu'AGVO a été chargée d'obligations de service public en lien avec ses activités de location immobilière.
(288) De surcroît, la Commission considère que les mesures d'aides octroyées à AGVO ne répondent pas non plus aux exigences de nécessité et de proportionnalité.
(289) Les exigences de nécessité et de proportionnalité de la compensation sont définis comme suit (voir notamment les points 14, 15 et 17 de l'encadrement communautaire des aides d'État sous forme de compensations de service public de 2005):
- le montant de la compensation ne peut pas dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts occasionnés par l'exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives, ainsi que d'un bénéfice raisonnable pour l'exécution de ces obligations,
- le montant de la compensation comprend tous les avantages accordés par l'État ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit - indépendamment de leur qualification au regard de l'article 107 du TFUE,
- le montant de la compensation doit être effectivement utilisé pour assurer le fonctionnement du service d'intérêt économique général concerné. La compensation de service public, si elle est en fait utilisée pour intervenir sur d'autres marchés, n'est pas justifiée et constitue donc une aide d'État incompatible.
(290) La Commission relève que, dans le cas d'espèce, les exigences de nécessité et de proportionnalité n'ont pas été respectées. La Belgique a admis qu'aucun paramètre n'a été défini en ce qui concerne la compensation. Par ailleurs, les autorités belges ont expliqué à la Commission qu'il n'était pas possible de déterminer les coûts et les recettes liés à l'exécution des obligations de service public. La Commission relève en outre qu'AGVO ne tient pas de comptabilités séparées pour les différentes catégories d'activités qu'elle exerce. Il est dès lors possible que la compensation accordée pour des obligations de service public soit utilisée pour intervenir sur d'autres marchés. Plusieurs éléments du dossier indiquent qu'il y a effectivement eu surcompensation. À titre d'exemple, en ce qui concerne les garanties octroyées à titre gracieux pour l'obtention de prêts, il a été établi aux considérants 186 et suivants de la présente décision que des prêts garantis pouvaient être utilisés, et l'avaient effectivement été, à d'autres fins que l'objectif initialement déclaré. Étant donné que le montant du capital investi dans EVO (3 969 000 EUR) et le prix payé pour les actions de Pakhuizen (350 000 EUR) [soit un total de 4 319 000 EUR] dépassent le montant du capital effectivement payé à AGVO [à savoir 3 596 665,62 EUR], il apparaît nécessairement qu'AGVO a utilisé les prêts et, éventuellement, les revenus des taxes, pour effectuer ces financements.
(291) Pour ces motifs, la Commission ne peut considérer les mesures d'aides en question comme compatibles avec les conditions imposées à l'article 106, paragraphe 2, du TFUE.
10.2.2. AIDE OCTROYÉE À EVO
(292) S'agissant de l'aide d'État octroyée par la ville et par AGVO à EVO, il y a lieu, aux fins de l'examen, d'établir une distinction entre les différentes actions et de tenir compte des dates auxquelles elles sont intervenues.
(293) Il y a lieu d'apprécier les décisions suivantes au regard des lignes directrices de 2001:
- les décisions prises par la ville d'accorder des garanties à titre gracieux pour l'obtention de prêts à la date du 28 juin 2002, du 27 septembre 2002 et du 23 avril 2004,
- la décision prise par AGVO d'autoriser EVO à utiliser gratuitement et de façon continue, à compter du 8 août 2002, les bâtiments appartenant à AGVO, dont la superficie totale est de 13 600 m 2 ,
- la décision prise par AGVO de doter EVO d'un capital de départ de 371 840 EUR, à la date du 22 août 2002.
(294) Il y a lieu d'apprécier les décisions suivantes au regard des lignes directrices de 2004:
- la décision prise par la ville d'accorder une garantie à titre gracieux pour l'obtention d'un prêt à la date du 22 avril 2005,
- les décisions prises par AGVO de procéder à des augmentations de capital au profit d'EVO, au moyen de remises de dettes, à la date du 31 décembre 2004, du 31 décembre 2005 et du 21 décembre 2007.
(295) Il y a lieu d'apprécier les décisions suivantes au regard à la fois des lignes directrices de 2001 et des lignes directrices de 2004:
- les décisions prises par AGVO d'accorder des garanties à titre gracieux pour l'obtention de prêts d'un montant de 600 000 EUR entre le 22 août 2002 et le 3 août 2006.
(296) Il y a lieu d'apprécier la décision suivante au regard à la fois des lignes directrices de 2004 et des lignes directrices de 2008:
- la décision prise par la ville d'accorder une garantie à titre gracieux pour l'obtention d'un prêt d'un montant de 78 000 EUR entre le 27 septembre 2007 et le 4 septembre 2008.
10.2.2.1. Garanties pour l'obtention de prêts et droit d'utiliser la criée à titre gracieux
(297) Conformément au point 1.2 des lignes directrices de 2001 et au point 3.7 des lignes directrices de 2004, les aides d'État qui sont octroyées sans exiger d'obligation de la part des bénéficiaires et qui sont destinées à améliorer la situation des entreprises et à accroître leur trésorerie ou dont les montants sont fonction de la quantité produite ou commercialisée, du prix des produits ou des moyens de production, et qui ont pour effet de diminuer les coûts de production ou d'améliorer les revenus du bénéficiaire sont, en tant qu'aides au fonctionnement, incompatibles avec le marché intérieur. Conformément au point 3.4 des lignes directrices de 2008, les aides au fonctionnement qui, par exemple, accroissent la trésorerie du bénéficiaire ou dont le montant est fonction de la quantité produite ou commercialisée, du prix des produits, des unités produites ou des moyens de production et qui ont pour effet de diminuer les coûts de production ou d'améliorer les revenus du bénéficiaire sont en principe incompatibles avec le marché intérieur. Elles ne peuvent être considérées comme compatibles que si elles contribuent clairement et profondément à atteindre les objectifs de la politique commune de la pêche.
(298) Or, il ressort des informations disponibles que les garanties accordées à titre gracieux pour l'obtention de prêts et le droit d'utiliser gratuitement la criée ont été octroyés sans que soit imposée à EVO la moindre obligation particulière de nature à rendre l'aide compatible avec l'une au moins des conditions énoncées dans les lignes directrices pour la pêche.
(299) De fait, il semble que les garanties accordées à titre gracieux pour l'obtention de prêts aient été octroyées sur simple demande pour des prêts visant plusieurs objectifs et n'aient été assorties d'aucune condition ou obligation particulière.
(300) Les informations fournies par les autorités belges montrent même que le fait que le prêt garanti a finalement été utilisé à d'autres fins que l'objectif initialement annoncé n'a entraîné ni sanction, ni annulation de la garantie. À titre d'exemple, il apparaît que le prêt de 1 795 000 EUR consenti par Fortis et initialement destiné, entre autres, à financer l'achat de machines et de caisses à poisson supplémentaires, ainsi que divers travaux d'aménagement, a servi, en réalité (au moins partiellement) à accorder des prêts à des armateurs. Or, non seulement la garantie n'a pas été retirée, mais d'autres garanties ont encore été accordées par la suite, apparemment sans que la situation n'encourage la ville à imposer à EVO quelque condition que ce soit en contrepartie de l'octroi des garanties.
(301) L'octroi des garanties à titre gracieux a permis de gonfler la trésorerie d'EVO; en effet, non seulement celle-ci n'a rien eu à débourser pour en bénéficier mais il apparaît aussi que les prêts lui auraient été refusés en l'absence de ces garanties.
(302) Quant à la jouissance à titre gracieux du bâtiment de la criée, elle a également permis à EVO d'accroître sa trésorerie, du fait qu'elle a pu faire l'économie du coût des loyers qu'elle aurait dû débourser dans les conditions du marché.
(303) La Commission ne voit pas comment les garanties gratuites ou le droit d'utiliser gratuitement les bâtiments pourraient être considérés comme une contribution aux objectifs de la politique commune de la pêche. Les autorités belges n'ont transmis aucun élément à cet égard.
(304) Les autorités belges ont déclaré qu'il y avait lieu d'apprécier les mesures en question dans le cadre de la restructuration de la criée.
(305) En premier lieu, il importe d'examiner si EVO serait admissible au titre des lignes directrices sur le sauvetage et la restructuration. EVO pourrait être considérée comme une entreprise en difficulté au sens des lignes directrices de 1999 et de 2004, respectivement.
(306) Conformément au point 8 des lignes directrices de 1999 et au point 13 des lignes directrices de 2004, une société faisant partie d'un groupe n'est pas en principe éligible aux aides au sauvetage et à la restructuration. Elle peut toutefois l'être si elle a été fondée par une entreprise en difficulté. Or, EVO a été fondée par AGVO, qui est elle-même la nouvelle forme légale prise par la criée d'Ostende à la suite de la restructuration de 2001. Il convient également de noter qu'AGVO constitue la continuation de l'ancienne criée d'Ostende, qui était propriété de l'État et n'était pas dotée de la personnalité juridique. Comme il a été signalé au considérant 259 de la présente décision, la Commission estime qu'AGVO, bien que fondée récemment, est à considérer comme une entreprise en difficulté et se trouve dès lors admissible au titre des lignes directrices de 1999 sur le sauvetage et la restructuration. Étant donné qu'EVO a été constituée dans le cadre de la restructuration d'AGVO, ces deux sociétés peuvent conjointement être considérées comme une entreprise en difficulté susceptible, dès lors, de recevoir une aide dans le respect des conditions établies dans les lignes directrices sur le sauvetage et la restructuration.
(307) Cependant, même si EVO est admissible au titre des lignes directrices sur le sauvetage et la restructuration, il n'en reste pas moins qu'il a été démontré, aux considérants 260 et suivants de la présente décision, que les conditions établies en matière de compatibilité par les lignes directrices de 1999 ne sont pas réunies. En outre, comme les mesures d'aide concernées n'étaient pas prévues dans le plan de restructuration, elles soulèvent les mêmes questions que celles qui sont mentionnées aux considérants 278 et suivants de la présente décision.
(308) En conséquence, il y a lieu de considérer l'octroi de garanties à titre gracieux pour l'obtention de prêts et le droit d'utiliser gratuitement la criée comme des aides au fonctionnement au sens des lignes directrices pour la pêche de 2001, de 2004 et de 2008, aides qui ne contribuent pas à atteindre les objectifs de la politique commune de la pêche. Elles sont dès lors incompatibles avec le marché intérieur.
10.2.2.2. Capital initial et augmentations de capital ultérieures
(309) EVO a été fondée dans le cadre de la restructuration de la criée d'Ostende. Les autorités belges ont par ailleurs confirmé qu'une partie du capital initial d'AGVO (à savoir la somme de 371 840 EUR) a été utilisée pour constituer le capital initial nécessaire à la création d'EVO et pour lui apporter ensuite des augmentations de capital.
(310) Il convient dès lors d'examiner si le capital initial et les augmentations de capital ultérieures peuvent être considérés comme une aide au sauvetage et à la restructuration au sens, respectivement, des lignes directrices de 1999 et de 2004 sur le sauvetage et la restructuration.
(311) EVO, conjointement avec AGVO, peut être considérée comme une entreprise en difficulté au sens, respectivement, des lignes directrices de 1999 et de 2004 sur le sauvetage et la restructuration, comme cela est indiqué au point 10.2.2.1.
(312) Toutefois, comme cela est démontré aux considérants 260 et suivants de la présente décision, les conditions de compatibilité afférentes à l'aide à la restructuration ne sont pas réunies dans le cas d'espèce.
(313) En conséquence, l'apport du capital initial et des augmentations de capital ultérieures ne peut être considéré comme compatible avec le marché intérieur.
10.2.3. AIDE OCTROYÉE À Pakhuizen
(314) Le contrat de bail entre la ville et Pakhuizen avait pour effet que cette dernière pouvait bénéficier chaque année d'une réduction de ses coûts d'exploitation. Ce type d'aide n'entre dans le champ d'aucune des mesures visées dans les lignes directrices pour la pêche, ni dans le cadre des objectifs d'autres lignes directrices horizontales ou particulières susceptibles de s'appliquer à ce genre d'entreprise. Tant au titre des lignes directrices pour la pêche applicables que des règles horizontales en matière d'aides d'État, il y a lieu de considérer le type d'aides en question comme des aides au fonctionnement incompatibles avec le marché intérieur.
10.2.4. CONCLUSION
(315) Eu égard à ce qui précède, la Commission conclut que les mesures visées au point 10.1.5. de la présente décision doivent être considérées comme des aides d'État, qu'elles ne sont pas compatibles avec le marché intérieur et qu'elles doivent être récupérées selon les modalités exposées à la section 11.
11. RÉCUPÉRATION
(316) Le règlement (CE) n° 659-1999 prévoit en son article 14, paragraphe 1, qu'en cas de décision négative concernant une aide illégale, la Commission décide que l'État membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l'aide auprès de son bénéficiaire. Cette disposition est réalisée une fois que l'aide considérée, augmentée le cas échéant d'intérêts moratoires, a été remboursée par le destinataire, c'est-à-dire les entreprises qui en ont effectivement bénéficié.
(317) Le règlement (CE) n° 659-1999 ne fixe aucun délai de rigueur pour l'examen des dossiers d'aides illégales au sens de son article 1er, point f), c'est-à-dire des aides mises en œuvre avant que la Commission ait pu statuer sur leur compatibilité avec le marché intérieur. Toutefois, l'article 15 de ce règlement dispose que les pouvoirs de la Commission en matière de récupération de l'aide sont soumis à un délai de prescription de dix ans, que ce dernier commence le jour où l'aide est accordée au bénéficiaire et que toute mesure prise par la Commission interrompt le délai de prescription.
(318) Le délai de prescription a été interrompu par la demande d'informations adressée à la Belgique le 13 mars 2006. En conséquence, la récupération est limitée à l'aide reçue après le 13 mars 1996.
(319) Afin de déterminer les montants à recouvrer auprès d'AGVO, d'EVO et de Pakhuizen, il convient de tenir compte du fait qu'une partie de l'aide octroyée à AGVO a été transférée au profit d'EVO. Comme l'ont fait remarquer les autorités belges, cette aide ne doit être récupérée qu'une fois, auprès de son bénéficiaire effectif.
(320) C'est pourquoi, dans les cas où l'aide octroyée par la ville a bénéficié in fine à EVO, l'aide à recouvrer auprès d'AGVO se limite à la part de l'aide qui n'a pas été transférée au profit d'EVO.
11.1. RÉCUPÉRATION AUPRÈS D'EVO
(321) L'aide à recouvrer auprès d'EVO se répartit comme suit:
- le capital initial, d'un montant de 371 840 EUR,
- les augmentations de capital ultérieures, dont les montants respectifs s'élèvent à 1 387 044 EUR, 710 000,75 EUR et 1 500 114,96 EUR,
- l'avantage correspondant à l'octroi de garanties à titre gracieux pour l'obtention de prêts,
- l'avantage correspondant à l'utilisation gratuite de la criée entre le 22 août 2002 et le dernier jour où EVO a pu disposer de la criée.
(322) En ce qui concerne l'élément d'aide lié aux garanties apportées gratuitement, il s'agit en principe du montant des prêts garantis, à moins que les autorités belges ne fournissent la preuve qu'EVO aurait pu obtenir des garanties équivalentes sur le marché; dans ce cas, l'élément d'aide correspond à la prime qui, selon toute vraisemblance, aurait été exigée sur le marché pour l'obtention de la garantie.
(323) Les autorités belges ont déclaré qu'EVO n'a finalement pas souscrit les deux emprunts pour lesquels une garantie avait été accordée en 2002. En conséquence, bien que l'aide ait été octroyée (la décision de fournir la garantie à titre gracieux ayant été adoptée), EVO n'en a pas bénéficié. Il n'y a donc pas lieu de récupérer l'aide correspondant aux garanties accordées à titre gracieux pour l'obtention de prêts comme convenu les 28 juin et 27 septembre 2002. Le montant à récupérer s'élève dès lors à 4 284 995 EUR (soit 3 606 995 EUR + 78 000 EUR + 600 000 EUR).
11.2. RÉCUPÉRATION AUPRÈS DE Pakhuizen
(324) L'aide à recouvrer auprès de Pakhuizen correspond à l'avantage lié au fait que le bail à long terme n'a pas été conclu aux prix du marché.
(325) En application des dispositions de l'article 15 du règlement (CE) n° 659-1999, la récupération est limitée à une période de dix ans à compter du 13 mars 2006.
(326) L'avantage est constitué de la rémunération (loyer) qui aurait été versée dans les conditions normales du marché au titre du bail à long terme de location des bâtiments, diminuée: a) des 25 EUR payés annuellement; et b) de tous les coûts de rénovation supportés par Pakhuizen et qu'elle n'aurait pas été tenue de prendre en charge en application de la législation belge (69). La période concernée s'étend jusqu'au jour de la récupération ou, si le bail a été résilié avant l'émission de l'ordre de récupération, jusqu'au jour de la résiliation du bail.
11.3. RÉCUPÉRATION AUPRÈS D'AGVO
(327) L'aide à récupérer auprès d'AGVO est constituée du capital initial, de l'avantage découlant des garanties gratuites accordées pour l'obtention de prêts, de l'avantage découlant de la jouissance exclusive des terrains et bâtiments du port de pêche d'Ostende du 14 mars 2002 au 25 mars 2004 (pour ce qui est des bâtiments ultérieurement transférés à AGVO) et du 14 mars 2002 au jour de la récupération (pour les autres terrains et bâtiments qui étaient exclus de l'acte de transfert de propriété conclu le 26 mars 2004) et enfin de l'avantage découlant du transfert de propriété portant sur 57 500 m 2 de bâtiments situés sur le port de pêche d'Ostende qui a été effectué à titre gracieux le 26 mars 2004.
(328) S'agissant du capital initial, il ressort des informations communiquées à la Commission que l'aide, dont le montant initialement prévu s'élevait à 250 millions BEF (6 200 000 EUR), n'a pas encore été intégralement versée. Il convient dès lors que l'ordre de récupération se limite au montant effectivement payé à AGVO, lequel est établi à 3 596 665,62 EUR sur la base des dernières informations transmises à la Commission. Si AGVO a perçu un montant plus élevé, la différence est également à récupérer.
(329) En ce qui concerne l'élément d'aide lié aux garanties apportées gratuitement, il s'agit en principe du montant des prêts garantis, à moins que les autorités belges ne fournissent la preuve qu'AGVO aurait pu obtenir des garanties équivalentes sur le marché; dans ce cas, l'élément d'aide correspond à la prime qui, selon toute vraisemblance, aurait été exigée sur le marché pour l'obtention des garanties, au moment où elles ont été accordées (soit les 26 mars 2004, 23 avril 2004 et 22 avril 2005).
(330) Si aucune garantie n'est disponible sur le marché pour le type de transaction concerné, le montant de l'élément d'aide doit être calculé de la même façon que l'équivalent-subvention d'un prêt bonifié, c'est-à-dire sur la base d'une bonification d'intérêt égale à la différence entre le taux du marché particulier qui aurait été imposé à AGVO en l'absence de la garantie et le taux d'intérêt obtenu grâce à la garantie d'État. En l'absence de taux d'intérêt du marché, si l'État membre souhaite recourir au taux de référence, la Commission souligne que les conditions établies dans la communication de la Commission relative à la révision de la méthode de calcul des taux de référence et d'actualisation (70) s'appliquent aux fins du calcul de l'intensité d'aide d'une garantie individuelle. En d'autres termes, il convient de prendre dûment en considération le supplément à ajouter au taux de base afin de tenir compte du profil de risque lié à l'opération couverte, de l'entreprise bénéficiant de la garantie et des sûretés constituées.
(331) Pour ce qui concerne l'avantage découlant de la jouissance exclusive, à titre gracieux, des terrains et des bâtiments du port de pêche d'Ostende, le montant de l'aide correspond au loyer qu'AGVO aurait dû acquitter dans les conditions du marché pour l'utilisation exclusive de ces terrains et bâtiments, du 14 mars 2002 au jour de la récupération ou au dernier jour où AGVO a disposé du droit d'utilisation des bâtiments à titre gracieux, au titre de ses statuts, au titre de l'acte de transfert de propriété ou à tout autre titre.
(332) La Commission est consciente du fait qu'une partie des terrains et des bâtiments ne présentait qu'une valeur commerciale limitée ou même nulle (c'est le cas des routes, par exemple). Elle relève cependant qu'une partie des terrains et des bâtiments présentait indiscutablement une valeur commerciale (la criée, les bureaux et les entrepôts) tandis qu'une autre partie de ces terrains et bâtiments (les infrastructures du port de pêche) permettait à AGVO d'offrir des prestations de service aux armateurs; elle note également qu'AGVO était habilitée à percevoir une redevance en contrepartie des services fournis. Ces éléments doivent être pris en compte dans le calcul du loyer.
(333) Pour ce qui concerne l'avantage découlant de la perception des redevances, le montant de l'aide correspond à celui des redevances perçues depuis la mise en place de l'avantage jusqu'au jour de la récupération ou jusqu'au dernier jour où AGVO a été habilitée à percevoir ces redevances.
(334) Enfin, la Commission relève que le montant à récupérer auprès d'AGVO doit être réduit du montant de l'aide qui a été transférée à EVO sous la forme de capital (3 969 000 EUR) et de la mise à disposition à titre gracieux des bâtiments utilisés pour le fonctionnement de la criée.
(335) La Commission est consciente du fait qu'AGVO était chargée de certaines tâches d'utilité publique à caractère non économique (inspection du poisson débarqué destiné à la consommation, vérifications visant à établir si le poisson débarqué était soumis aux exigences en matière de TVA, fonctions de relations publiques), ainsi que de la gestion du port de pêche. La Commission considère que le montant à récupérer auprès d'AGVO doit être réduit des coûts afférents, preuves à l'appui, à l'exécution de ces tâches.
11.4. INCIDENCE DE LA RESTRUCTURATION DE LA CRIÉE SUR LA QUESTION DE LA RÉCUPÉRATION
(336) Les autorités belges ont informé la Commission que la ville et AGVO préparaient la privatisation de la criée, faisant valoir qu'au terme du processus de privatisation, la question de l'aide d'État disparaîtrait et que la procédure serait sans objet.
(337) La Commission souhaite rappeler à cet égard que, même si la privatisation venait à mettre un terme aux mesures d'aide en cause, elle n'effacerait pas pour autant les avantages octroyés aux bénéficiaires de l'aide pendant la période précédant la fin desdites mesures d'aide. Le but de la récupération est précisément de rétablir la situation préexistante afin de garantir des conditions de concurrence équitables sur le marché intérieur. La Commission attire à cet égard l'attention des autorités belges sur la communication de la Commission - "Vers une mise en œuvre effective des décisions de la Commission enjoignant aux États membres de récupérer les aides d'État illégales et incompatibles avec le marché commun" - (71), et notamment sur la section 3.2.4 de cette communication, qui traite de la récupération des aides d'État auprès d'entreprises en cours de liquidation et de bénéficiaires insolvables. S'agissant de la demande de report de la décision (visée au considérant 99), il serait malvenu d'y réserver une suite favorable étant donné qu'il est important que les aides d'État illégales et incompatibles fassent l'objet d'une récupération dans les plus brefs délais,
A adopté la présente décision:
Article premier
1. L'aide d'un montant de 3 969 000 EUR octroyée à NV Exploitatie Vismijn Oostende (EVO) sous la forme d'un capital initial et de prêts transformés ultérieurement en augmentations de capital est incompatible avec le marché intérieur.
2. L'aide d'un montant de 4 284 995 EUR octroyée à EVO sous la forme de garanties fournies à titre gracieux pour l'obtention de prêts est incompatible avec le marché intérieur.
3. L'aide octroyée à EVO sous la forme d'un droit d'utilisation, à titre gracieux, des bâtiments de la criée situés sur le port de pêche d'Ostende est incompatible avec le marché intérieur.
Article 2
1. L'aide d'un montant de 6 200 000 EUR octroyée à Autonoom Gemeentebedrijf Vismijn Oostende (AGVO) sous la forme d'un capital initial est incompatible avec le marché intérieur.
2. L'aide octroyée à AGVO sous la forme de garanties fournies à titre gracieux pour l'obtention de prêts est incompatible avec le marché intérieur.
3. L'aide octroyée à AGVO sous la forme d'un droit d'utilisation, à titre gracieux et/ou à un prix inférieur à ceux du marché, de terrains et de bâtiments situés sur le port de pêche d'Ostende est incompatible avec le marché intérieur.
4. L'aide octroyée à AGVO sous la forme du transfert de propriété, à titre gracieux, entre le 26 mars 2004 et le 4 septembre 2009, de bâtiments représentant une superficie de 57 500 m 2 situés sur le port de pêche d'Ostende est incompatible avec le marché intérieur.
5. L'aide octroyée à AGVO depuis le 14 mars 2002 sous la forme d'un droit de perception de redevances est incompatible avec le marché intérieur.
Article 3
L'aide octroyée à NV Pakhuizen (Pakhuizen) résultant du contrat de bail à long terme conclu en 1989 avec la ville d'Ostende est incompatible avec le marché intérieur.
Article 4
1. La Belgique récupère auprès de leurs bénéficiaires les aides visées à l'article 1er, ainsi qu'à l'article 2, paragraphes 2 à 5.
2. La Belgique récupère l'aide visée à l'article 2, paragraphe 1, à concurrence des montants déjà payés à AGVO (soit 3 596 665,62 EUR).
3. La Belgique récupère l'aide visée à l'article 3 dans la limite des avantages octroyés depuis le 13 mars 1996.
4. Les montants à récupérer sont majorés d'intérêts calculés à compter de la date à laquelle ils ont été mis à la disposition des bénéficiaires et jusqu'à leur récupération effective ou, si les mesures d'aide ont pris fin avant la récupération, jusqu'à la date ultime à laquelle ces montants se sont trouvés à la disposition des bénéficiaires.
5. Les intérêts sont calculés sur une base composée conformément aux dispositions du chapitre V du règlement (CE) n° 794-2004 de la Commission (72) et du règlement (CE) n° 271-2008 de la Commission portant modification du règlement (CE) n° 794-2004 de la Commission (73).
6. La Belgique annule tous les paiements en cours de l'aide visée aux articles 1er, 2 et 3, et/ou toute autre forme d'octroi de cette aide, avec effet à la date d'adoption de la présente décision.
Article 5
1. La récupération de l'aide visée aux articles 1er, 2 et 3, est immédiate et effective.
2. La Belgique veille à ce que la présente décision soit mise en œuvre dans un délai de quatre mois à compter de la date de sa notification.
Article 6
1. Dans les deux mois suivant la notification de la présente décision, la Belgique communique les informations suivantes à la Commission:
a) le montant total (principal et intérêts de recouvrement) à récupérer auprès d'AGVO, d'EVO et de Pakhuizen;
b) une description détaillée des mesures déjà prises et prévues pour se conformer à la présente décision;
c) des documents démontrant qu'il a été ordonné à AGVO, à EVO et à Pakhuizen de rembourser l'aide.
2. La Belgique tient la Commission informée de l'avancement des mesures nationales prises en vue de la mise en œuvre de la présente décision, et ce jusqu'à la récupération complète de l'aide visée aux articles 1er, 2 et 3. Elle transmet immédiatement, sur simple demande de la Commission, toute information sur les mesures déjà prises et prévues pour se conformer à la présente décision. Elle fournit également des informations détaillées sur les montants déjà récupérés auprès d'AGVO, d'EVO et de Pakhuizen au titre des aides et des intérêts de recouvrement.
Article 7
Le Royaume de Belgique est destinataire de la présente décision.
Notes :
(1) JO L 1 du 3.1.1994, p. 3.
(2) JO L 83 du 27.3.1999, p. 1.
(3) JO C 238 du 17.9.2008, p. 12.
(4) À compter du 1 er décembre 2009, les articles 87 et 88 du traité CE sont devenus respectivement les articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ("TFUE"). Dans les deux cas, les dispositions sont, en substance, identiques. Aux fins de la présente décision, les références faites aux articles 107 et 108 du TFUE s'entendent, s'il y a lieu, comme faites respectivement aux articles 87 et 88 du traité CE.
(5) Voir la note 4 de bas de page.
(6) De Belgische Zeevisserij - Anvoer en Besomming 2007, Vlaamse overheid, Departement Landbouw en Visserij (http://www2. vlaanderen.be/landbouw/downloads/vis/aanvoer_besomming_2007. pdf), p. 12.
(7) Vlaamse overheid, Departement Landbouw en Visserij, Jaaroverzicht Zeevisserij 1998, 1999, 2000 en 2001 (http://lv.vlaanderen.be/ nlapps/docs/default.asp?fid = 122).
(8) AGVO a été fondée le 23 novembre 2001 par la ville, dont la décision a été approuvée le 14 mars 2002 par le ministre flamand des affaires intérieures.
(9) "De Stad Oostende kan aan het AG Vismijn Oostende de volle eigendom, respectievelijk de bestaande zakelijke rechten en beheersrechten overdragen van de goederen die zich bevinden binnen of behoren bij het in artikel 3.1 omschreven Visserhavengebied of die nodig en/of nuttig zijn voor de realisatie van de doelstellingen van het AG Vismijn Oostende [...]. In afwachting van de overdracht van de onroerende goederen krijgt het AG Vismijn Oostende het uitsluitend recht deze goederen zonder vergoeding te gebruiken.".
(10) Projet consistant à pêcher/acheter du crabe en Norvège en vue de (tenter de) l'écouler sur le marché asiatique.
(11) Jaarrekening AGVO 2005, p. 26 (verslag van de Raad van Bestuur aan de aandeelhouders over de waardering van de aandelen in EVO): "Tenslotte is het niet onbelangrijk dat in deze fase de engagementen van de Stad Oostende een wezenlijke buffer vormen om op verantwoorde wijze een waardering in going concern toe te passen zodat de waardering zoals beschreven in art. 66§2 mag aangehouden worden en niet naar een waardering in discontinuïteit moet overgegangen worden."
(12) JO C 288 du 9.10.1999, p. 2.
(13) JO C 19 du 20.1.2001, p. 7; JO C 229 du 14.9.2004, p. 5; JO C 84 du 3.4.2008, p. 10.
(14) Arrêt du 24 juillet 2003, dans l'affaire C-280-00, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg contre Nahverkehrsgesellschaft Altmark, Rec. 2003, p. I-7747.
(15) JO L 312 du 29.11.2005, p. 67.
(16) Arrêt du 23 avril 1991, dans l'affaire C-41-90, Höfner et Elser, Rec. 1991, p. I-1979, point 21; arrêt du 16 mars 2004, dans les affaires jointes C-264-01, C-306-01, C-354-01 et C-355-01, AOK Bundesverband, Rec. 2004, p. I-2493, point 46; arrêt du 10 janvier 2006, dans l'affaire Ministero dell'Economia contre Cassa di Risparmio e.a., C-222-04, Rec. 2006, p. I-289, points 107 à 112.
(17) Arrêt du 24 octobre 2002, dans l'affaire C-82-01 P, Aéroports de Paris contre Commission, Rec. 2002, p. I-9297, point 78; arrêt du 12 décembre 2000, dans l'affaire T-128-98, Aéroports de Paris contre Commission, Rec. 2002, p. II-3929, points 122 à 124.
(18) Décision N 520-03 du 20 octobre 2004 (ports flamands); décision N 60-06 du 24 avril 2007 (projet Mainportontwikkeling).
(19) Arrêt C-222-04, Ministero dell'Economia e delle Finanze contre Cassa di Risparmio di Firenze e.a., précité, points 110 à 117.
(20) Arrêt du 28 janvier 2003, dans l'affaire C-334-1999, République fédérale d'Allemagne contre Commission, Rec. 2003, p. I-01139, point 133; arrêt du 16 mai 2002, dans l'affaire C-482-1999, France contre Commission (Stardust), Rec. 2002, p. I-4397, point 70; arrêt du 3 octobre 1990, dans l'affaire C-261-89, Italie contre Commission, Rec. 1990, p. I-4437, point 8; arrêt du 14 septembre 1994, dans les affaires jointes C-278-92 à C-280-92, Espagne contre Commission, Rec. 1994, p. I-4103, point 21; arrêt du 14 septembre 1994, dans l'affaire C-42-93, Espagne contre Commission, Rec. 1994, p. I-4175, point 13.
(21) À l'époque, la ville devait faire face à des pertes annuelles moyennes de 1 850 000 EUR.
(22) Arrêt du 11 juillet 2002, dans l'affaire T-152-1999, HAMSA contre Commission, Rec. 2002, p. II-3049, point 132; arrêt du 8 mai 2003, dans les affaires jointes C-328-1999 et C-399-00, Italie et SIM 2 Multimedia contre Commission, Rec. 2003, p. I-4035, point 44, et arrêt du 21 mars 1991, dans l'affaire C-303-88, Italie contre Commission, Rec. 1991, p. I-1433, points 18 et suivants.
(23) Arrêt dans l'affaire C-482-1999, France contre Commission (Stardust Marine), précité, point 71; arrêt du 30 avril 1998, dans l'affaire T-16-96, Cityflyer Express contre Commission, Rec. 1998, p. II-757, point 76; arrêt du 6 mars 2003, dans les affaires jointes T-228-1999 et T-233-1999, Westdeutsche Landesbank Girozentrale contre Commission, Rec. 2003, p. II-435, point 246.
(24) Arrêt dans les affaires jointes T-129-95, T-2-96 et T-97-96, Neue Maxhütte Stahlwerke contre Commission, affaires Rec., p. II-17, point 124; arrêt dans les affaires jointes C-278-92, C-279-92 et C-280-92, précité, Espagne contre Commission, point 26.
(25) Réponse des autorités belges du 19 octobre 2006, p. 2: "De Stad koos voor deze laatste oplossing: [...] - de locale economie rondom de vismijn scheepsherstel, scheepsbenodigheden, opslag- en diepvriesbedrijven, ijsfabrieken, groot- en kleinhandels, toerisme ...) bleef behouden, wat in de naweeën van de sluiting (1997) van de plaatselijke (verlieslatende) Regie der Maritiem Transport (verlies van 1 700 arbeidsplaatsen) een belangrijke considerans was binnen een Stad met meer dan 12 % werkloosheid". Réponse des autorités belges du 19 octobre 2006, p. 6: "Dit belet niet dat de gedelegeerd bestuurder van een bedrijf dat voor 100 % gehouden wordt door een lokale overheid ook oog heeft voor de maatschappelijke en sociale rol die de vismijn van Oostende binnen de regio kan vervullen en die de Stad anno 2001 heeft gemotiveerd om niet radicaal tot sluiting over te gaan."
(26) Arrêt dans les affaires jointes C-328-1999 et C-399-00, Italie et SIM 2 Multimedia contre Commission, précité, point 44; arrêt dans l'affaire C-303-88, Italie contre Commission, précité, points 18 et suivants.
(27) "Het AG Vismijn Oostende beslist vrij over het aanleggen, het bouwen, het onderhouden, het herstellen, het verbeteren, het bedienen, het zelf exploiteren en het aan derden ter beschikking stellen van roerende en onroerende goederen."
(28) Arrêt dans l'affaire C-482-1999, France contre Commission (Stardust Marine), précité, point 71; arrêt dans l'affaire T-16-96, Cityflyer Express contre Commission, précité, point 76; arrêt dans les affaires jointes T-228-1999 et T-233-1999, Westdeutsche Landesbank Girozentrale contre Commission, précité, point 246.
(29) JO C 209 du 10.7.1997, p. 3.
(30) C'est pourquoi le dispositif de la présente décision couvre aussi l'éventualité où les bâtiments seraient actuellement mis à la disposition d'AGVO moyennant une rémunération, mais à des prix inférieurs à ceux du marché.
(31) JO C 71 du 11.3.2000, p. 14.
(32) Arrêt du 29 avril 1999, dans l'affaire C-342-96, Espagne contre Commission, Rec. 1999, p. I-2459; arrêt du 29 juin 1999, dans l'affaire C-256-97, DTM Transports SA, Rec. 1999, p. I-3913; et arrêt dans l'affaire T-152-1999, HAMSA contre Commission, précité.
(33) Voir le point 3.4 de la communication sur les garanties.
(34) Décision C 5-03 (ex NN 115/02) du 21 janvier 2003 - Aide au profit de MobilCom AG (JO C 80 du 3.4.2003, p. 5).
(35) Arrêt du 13 juin 2000, dans les affaires jointes T-204-97 et T-270-97, EPAC contre Commission, Rec. 2000, p. II-2267, point 82.
(36) En ce qui concerne l'octroi d'une garantie par la société-mère, on pourra se reporter à l'exemple de la garantie accordée par CDC à sa filiale CDC IXIS: décision des 21 janvier 2003 et 30 avril 2003 relative à l'aide n° E 50/2001 (JO C 154 du 2.7.2003, p. 13). La garantie avait été rémunérée, mais pas aux conditions du marché, en conséquence de quoi il a été considéré qu'elle contenait un élément d'aide d'État.
(37) Les autorités belges ont admis que la ville n'est même pas systématiquement en possession d'un exemplaire des documents contractuels relatifs aux prêts et aux garanties (voir l'annexe B de la lettre du 27 novembre 2007).
(38) Arrêt dans l'affaire C-334-1999, République fédérale d'Allemagne contre Commission, précité, point 138; décision 1999-720-CE, CECA du 8 juillet 1999 concernant l'aide en faveur de Gröditzer Stahlwerke (JO L 292 du 13.11.1999, p. 27, point 45).
(39) Voir à titre d'exemple le point 17 des lignes directrices de 1999.
(40) La Belgique a souligné à plusieurs reprises que la ville avait conservé le droit d'appliquer et de percevoir les taxes relatives à l'utilisation des rampes et des écluses du port.
(41) Arrêt dans les affaires jointes T-204-97 et T-270-97, EPAC contre Commission, précité, point 82.
(42) En ce qui concerne l'octroi d'une garantie par la société-mère, on pourra se reporter à l'exemple de la garantie accordée par CDC à CDC IXIS: décision du 17 janvier 2003 relative à l'aide 50-01. La garantie avait été rémunérée, mais pas aux conditions du marché, en conséquence de quoi il a été considéré qu'elle contenait un élément d'aide d'État.
(43) Arrêt du 11 juillet 1996, dans l'affaire C-39-94, SFEI contre La Poste, Rec. 1996, p. I-3547, point 61.
(44) JO C 244 du 1.10.2004, p. 2.
(45) Voir à titre d'exemple le point 17 des lignes directrices de 1999.
(46) Décision 96-563-CE dans l'affaire Jadekost (JO L 246 du 27.9.1996), confirmée par l'arrêt du 5 octobre 2000 dans l'affaire C-288-96, Allemagne contre Commission, Rec. 2000, p. I-8237, point 41.
(47) À l'exception d'une action sur les 15 000.
(48) Arrêt dans l'affaire C-482-1999, France contre Commission (Stardust Marine), précité, point 71; arrêt dans l'affaire T-16-96, Cityflyer Express contre Commission, précité, point 76; arrêt dans les affaires jointes T-228-1999 et T-233-1999, Westdeutsche Landesbank Girozentrale contre Commission, précité, point 246.
(49) Le capital d'EVO n'a pas été financé exclusivement sur le capital initial d'AGVO; de fait, le montant du capital injecté dans EVO est supérieur au capital apporté à AGVO.
(50) Voir également le considérant 99 de la décision 2006-740-CE de la Commission du 20 octobre 2004 relative à l'affaire Hamburgische Landesbank contre Girozentrale (JO L 307 du 7.11.2006, p. 110).
(51) Voir les considérants 203 et 306 de la présente décision.
(52) Voir, à titre d'exemple, le point 17 des lignes directrices de 1999.
(53) Voir le considérant 44 de la présente décision.
(54) Article 5 de la loi du 10 janvier 1824 sur le droit d'emphytéose (Moniteur belge XIX, n° 14).
(55) Arrêt dans l'affaire C 482-1999, France contre Commission, précité.
(56) Voir la réponse des autorités belges du 19 octobre 2006, p. 3: "zowel op het niveau van aandeelhouderschap als dat van de organen (bestuur) dient de Gemeente (achter AGVO) krachtens de wet de meerderheid te hebben in de stemrechten. Dit is hier het geval."
(57) Voir l'arrêt du 17 septembre 1980, dans l'affaire 730-79, Philip Morris, Rec. 1980, p. 2671, points 11 et 12.
(58) Voir l'arrêt Philip Morris,précité.
(59) Voir également le point 12 des lignes directrices de 1999, qui prévoient que celles-ci s'appliquent aussi au secteur de l'agriculture et de la pêche.
(60) Décision 2008-849-CE de la Commission du 16 juillet 2008 concernant l'aide d'État C 14-07 (ex NN 15/07), Italie, aide à la restructuration en faveur de NGP (JO L 301 du 12.11.2008, p. 14).
(61) Acquisition par AGVO de Pakhuizen en 2004 et, en 2006, d'une participation de 51 % dans Haf Holding BO (Ijsland). EVO s'est également engagée dans plusieurs projets, tels que les projets Pollar Drift (projet relatif au crabe royal) et Novafish (HAF Holding), mentionnés dans les comptes annuels relatifs à 2005. Voir également les observations dans lesquelles Grimsby Fish Market déclare que "vers 2005/2006, EVO a commencé à acheter du poisson directement à des pêcheurs islandais, à des prix forfaitaires (élevés), et à vendre ce poisson au cadran à Ostende, souvent à des prix inférieurs". Les autorités belges n'ont contesté aucune des observations présentées par les tierces parties. De plus, les documents qu'elles ont présentés en ce qui concerne les appels d'offres confirment qu'EVO s'était engagée avant 2007 dans des actions à l'étranger, auxquelles elle a mis fin cette année-là (voir le mémorandum, p. 39).
(62) Emprunts soumis à la condition que l'emprunteur écoule son poisson à la criée d'Ostende, contribution (parfois à hauteur de 100 %) aux frais de transport du poisson destiné à être vendu à la criée d'Ostende, prix minimal garanti de vente à la criée, etc.
(63) Les lignes directrices de 1999 prévoient, en leur point 70, que les dispositions de leurs points 35 à 39 s'appliquent à toutes les entreprises du secteur agricole, PME comprises. Dans le secteur agricole, en ce qui concerne les contreparties, les États membres ont la possibilité de choisir entre appliquer les points 35 à 39 des lignes directrices de 1999 ou appliquer les règles particulières pour le secteur agricole énoncées aux points 73 à 82 de ces lignes directrices.
(64) JO C 244 du 1.10.2004, p. 2.
(65) Arrêt du 23 octobre 1997, dans l'affaire C-158-94, Commission contre Italie, Rec. 1997, p. I-5789, point 54.
(66) JO C 281 du 26.9.1996, p. 3.
(67) JO C 17 du 19.1.2001, p. 4.
(68) JO C 297 du 29.11.2005, p. 4.
(69) Comme il a déjà été remarqué, en ce qui concerne la clause prévoyant qu'au bout de 27 ans, la moitié des bénéfices de Pakhuizen reviennent au bailleur, il est tellement incertain qu'elle ait la moindre valeur effective que rien ne peut être déduit à ce titre. En outre, le bail a été résilié de sorte que cette clause ne s'appliquera jamais.
(70) JO C 14 du 19.1.2008, p. 6.
(71) JO C 272 du 15.11.2007, p. 4.
(72) JO L 140 du 30.4.2004, p. 1.
(73) JO L 82 du 25.3.2008, p. 1.