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Décisions

ADLC, 23 août 2010, n° 10-DCC-99

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Otor Finance SA et Otor SA par la société DS Smith Plc

ADLC n° 10-DCC-99

23 août 2010

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 20 juillet 2010, relatif à la prise de contrôle exclusif des sociétés Otor Finance SA et Otor SA par la société DS Smith Plc, formalisée par un contrat de vente et d'achat, en date du 13 juillet 2010 ;

Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l'instruction ; Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération

1. DS Smith Plc est une société anonyme de droit anglais, cotée à la Bourse de Londres et active sur les secteurs de la fabrication et de vente en gros de produits de bureau, d'emballages plastiques, de papiers et d'emballages en carton ondulé. Les principaux actionnaires sont la société Schroder Investment Management Ltd (17,85 %), la société Standard Life Investment Ltd (14,15 %), la société Sparinvest Holdings A/S (5,08 %), la société AXA SA (4,21 %) et la société Legal & General Group Plc (3,98 %). DS Smith est à la tête d'un groupe de sociétés dont l'activité couvre l'ensemble des étapes de la filière du carton ondulé avec plus de la moitié de ses activités localisée au Royaume-Uni. DS Smith détient également en totalité une filiale, DS Smith Kaysersberg, qui produit des feuilles de papier ondulé, des plaques de carton ondulé et des emballages en carton ondulé en Europe continentale (1) et du papier recyclé pour la France. DS Smith Kaysersberg exploite 2 papeteries (situées en France), 8 usines d'emballage avec onduleurs (dont 2 en France) et 7 " workshop " strictement dédiés à la production d'emballages (dont 4 en France). DS Smith a réalisé un chiffre d'affaires hors taxe mondial de 2,3 milliards d'euro, dont [>50] millions en France.

2. Otor SA une société anonyme de droit français cotée à la bourse de Paris (Alternext), active sur le secteur du carton ondulé. Elle est détenue à hauteur de 80,14 % du capital social par Otor Finance (qui dispose cependant de 88,93 % des droits de vote), à hauteur de 13,01 % par la société Packaging 2 et à hauteur de 1,6 % par la société Packaging 1 (les deux sociétés disposant ensemble 8,11 % des droits de vote) et pour le reste par le public. Otor Finance est une société holding qui est détenue à hauteur de 82,95 % par Packaging 2, à hauteur de 10 % par Packaging 1 et à hauteur de 7,05 % par LCL. Otor est active sur l'ensemble des étapes de la filière du carton ondulé au travers de 15 filiales qu'elle détient en totalité ou à hauteur de plus de 99 % du capital social. Otor produit ainsi des feuilles de papier utilisées dans la fabrication de carton ondulé, des plaques de carton ondulé servant à la fabrication d'emballages en carton ondulé ainsi que des emballages en carton ondulé. Elle fabrique aussi des machines destinées à la formation des emballages. Elle possède pour ce faire deux papeteries, six sites de production équipés d'une onduleuse, trois sites de production ne produisant que les emballages et une usine de fabrication des machines, tous situés en sur le territoire français. Le groupe Otor a réalisé un chiffre d'affaire mondial hors taxe en 2009 de 315,1 millions d'euro, dont [>50] millions réalisés en France.

3. Le contrat de vente et d'achat, en date du 13 juillet 2010, entre Packaging 1, Packaging 2 et LCL d'une part et DS Smith d'autre part prévoit que cette dernière rachète à Packaging 1, Packaging 2 et LCL leurs participations dans Otor Finance. A l'issue de l'opération DS Smith détiendra ainsi, via sa filiale nouvellement créée DS Smith Hêtre Blanc SNC, 100 % des actions et droits de vote de la société Otor Finances, elle-même détentrice de 80,14 % des actions d'Otor. Il est également prévu que DS Smith rachète leurs participations dans Otor aux sociétés Packaging 1 et 2. A l'issue de l'opération DS Smith détiendra donc directement et indirectement [90-100] % du capital d'Otor, le reste du capital étant détenu par le public. DS Smith vise à obtenir 100 % du capital d'Otor en présentant une offre publique de retrait.

4. En ce qu'elle se traduit au vu des développements qui précèdent par la prise de contrôle exclusif des sociétés cibles par DS Smith, l'opération notifiée constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce. Compte tenu des chiffres d'affaires des entreprises concernées, elle ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au point I de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

5. Le secteur économique concerné par l'opération est celui du carton ondulé sur lequel les groupes DS Smith et Otor sont simultanément présents. La matière première pour la fabrication de plaques de carton ondulé (" corrugated board ") est constituée de feuilles de papier (" corrugated case materials " ou CCM). Une plaque de carton ondulé est ainsi constituée de deux feuilles de papier planes à la surface imprimable formant le dessus et le dessous de la plaque (" liners "), au sein de laquelle sont intégrées une ou plusieurs feuilles de papier ondulé ou cannelures (" fluting") en fonction du degré de résistance et de protection recherché. Ces plaques de carton ondulé sont destinées à la production d'emballages en carton ondulé (" corrugated cases ") pour le transport de toutes sortes de produits alimentaires ou manufacturés. Il existe ainsi de multiples sortes de plaques de carton ondulé, variant en fonction du nombre de feuilles de papier utilisées (deux : " simple face ", trois : " simple cannelure double face ", cinq " double cannelure double-double face " ou sept " triple cannelure ") et de leur catégorie (A, B, C, E ou F selon la hauteur et le poids de la feuille). Il convient de préciser que les différents opérateurs actifs dans le secteur du carton ondulé présentent des structures de production plus ou moins intégrées. Certains sont présents sur les trois étapes du processus de production : feuilles de papier, plaques de carton ondulé et emballages. D'autres, en revanche, produisent uniquement des plaques et emballages en carton ondulé, ou bien seulement des emballages.

6. DS Smith et Otor fournissent du papier recyclé aux papeteries pour la production de feuilles de papier ondulé (ou CCM), produisent ces CCM, les transforment en plaques de carton ondulé et transforment ces plaques en emballages de carton ondulé. Selon la pratique décisionnelle nationale et communautaire (2), chacune de ces opérations constitue un marché distinct. En outre, les parties sont présentes sur le segment de la fabrication et vente d'emballages en carton ondulé formant l'élément extérieur des sacs dans des " sacs-en-boite " ou bags-in-boxes (BiB). Enfin, Otor fabrique et vend des machines destinées à la formation des emballages chez le client.

1. LE MARCHE DU PAPIER RECYCLÉ POUR LA FABRICATION DE FEUILLES DE PAPIER ONDULÉ

1. DÉLIMITATION DES MARCHES DE PRODUITS

7. Les feuilles servant à la fabrication des emballages en carton ondulé peuvent être produites à partir de fibres de bois vierges ou de papier recyclé qui est converti en pulpe dans les papeteries. La Commission européenne, dans sa décision Jefferson Smurfit/Kappa (3), a distingué un marché de l'achat de papier recyclé et un marché de la vente de papier recyclé, laissant ouverte la question d'une segmentation plus fine de ce dernier en fonction de la qualité du papier obtenu à partir du processus de recyclage.

8. En l'espèce, les parties sont simultanément présentes sur un marché de l'achat de papier recyclé, qu'elles utilisent pour leur production de feuilles de papier ondulé. Elles sont également toutes deux actives s'agissant de la vente de papier recyclé.

2. DÉLIMITATION DES MARCHES GÉOGRAPHIQUES

9. La Commission a considéré, dans sa décision Jefferson Smurfit/Kappa précitée, que le marché du papier recyclé, tant du point de vue de l'achat que de la vente, pouvait être de dimension nationale ou à l'échelle de l'Espace Economique Européen. Elle a cependant laissé la question ouverte dans la mesure où l'analyse concurrentielle restait inchangée quelle que soit la définition retenue.

10. En l'espèce, DS Smith s'approvisionne en papier recyclé en France et au Royaume-Uni. Otor n'est en revanche active qu'en France concernant ses achats de papier recyclé.

11. S'agissant des ventes de papier recyclé, DS Smith exporte du papier recyclé au sein de l'EEE dont une partie en France. Otor vend, quant à elle, une partie de sa collecte exclusivement sur le marché français.

12. Il ressort ce qu'il précède qu'il existe un chevauchement d'activité entre les parties sur les marchés de l'achat et de la vente de papier recyclé aux niveaux français et de l'EEE.

2. LE MARCHE DES FEUILLES DE PAPIER UTILISÉES DANS LA FABRICATION DE PLAQUES DE CARTON ONDULÉ

1. DÉLIMITATION DES MARCHES DE PRODUITS

13. Dans sa décision Jefferson Smurfitt/Saint-Gobain (4), la Commission européenne a défini un marché des feuilles de papier utilisées dans la fabrication de plaques de carton ondulé (" corrugated case materials " ou CCM). La Commission a en outre envisagé de segmenter ce marché selon que les feuilles soient produites à partir de fibres vierges, auxquelles sont ajoutées quelques fibres de papier recyclé (" kraftliner "), ou à partir de fibres recyclées uniquement (" testliner "), tout en laissant la question ouverte dans la mesure où l'analyse concurrentielle restait inchangée. Les autres décisions de la Commission sur ce secteur ont également retenu l'existence d'un marché des feuilles de papier utilisées dans la fabrication de carton ondulé, et laissé ouverte la question d'une éventuelle segmentation de ce marché (5), de même que l'Autorité de la concurrence dans sa décision Europac/Mondi Packaging France (6).

14. En l'espèce, DS Smith vend sur le marché une partie des CCM qu'elle produit. En revanche, les ventes de CCM d'Otor sont marginales, [90-100] % de la production étant consommés en interne pour la fabrication des plaques de carton ondulé.

2. DÉLIMITATION DES MARCHES GÉOGRAPHIQUES

15. Les feuilles de papier utilisées dans la fabrication de carton ondulé, obtenues à partir de fibre vierge ou recyclée, se caractérisent par une forte densité qui les rend aisément transportables. Dans ses précédentes décisions (7) la Commission a ainsi considéré que, s'agissant d'un tel produit, le marché géographique correspondait, au moins, à l'Espace Economique Européen.

16. Il ressort de ce qui précède qu'il existe un chevauchement d'activité entre les parties sur le marché des feuilles de papier au niveau de l'EEE.

3. LE MARCHE DES PLAQUES DE CARTON ONDULÉ

1. DÉLIMITATION DES MARCHES DE PRODUITS

17. Dans sa décision SCA Packaging/Rexam (8), la Commission européenne a défini un marché des plaques de carton ondulé (" corrugated board "). Elle a en outre envisagé, tout en laissant la question ouverte, une possible segmentation de ce marché entre, d'une part, les plaques de carton ondulé lourd, qu'elle a défini comme les plaques " simple cannelure double face " comportant au moins une feuille de type A, " double cannelure double-double face" et " triple cannelure" et, d'autre part, les autres types de plaques de carton ondulé, soit les plaques " simple face " et " simple cannelure double face " ne comportant pas de feuille de type A. En effet, la Commission a souligné que les plaques lourdes de carton ondulé servent à faire des emballages utilisés plus particulièrement pour le transport de marchandises pondéreuses, répondant ainsi aux besoins d'une clientèle spécifique (secteurs automobile, chimique et de l'ameublement principalement). L'Autorité de la concurrence, dans sa décision Europac/Mondi Packaging France, a rappelé cette distinction entre plaques de carton ondulé lourd et plaques de carton ondulé autre que lourd, tout en laissant la question ouverte.

18. En l'espèce, Otor fabrique exclusivement des plaques en carton ondulé autre que lourd alors que DS Smith est présent sur les deux segments, [40-50] % de sa production de carton ondulé étant du carton ondulé autre que lourd. Il y a donc un chevauchement des parties sur le segment des plaques en carton ondulé autre que lourd.

2. DÉLIMITATION DES MARCHES GÉOGRAPHIQUES

19. Les plaques de carton ondulé utilisées dans la fabrication d'emballages sont de faible densité et leur transport sur de longues distances ne serait donc pas rentable. La Commission a ainsi retenu dans son analyse (9), des zones de chalandise de 300 à 400 kilomètres de rayon autour du site de production. Elle a, par ailleurs, souligné que la délimitation des marchés géographiques pouvait être affinée en fonction de la nature des plaques de carton ondulé. Les plaques de carton ondulé lourd peuvent en effet être profitablement transportées sur de plus longues distances que les autres plaques de carton ondulé. L'Autorité de la concurrence, dans sa décision précitée, a utilisé pour mener l'analyse concurrentielle le découpage de la France, effectué par l'ONDEF (organisation professionnelle des fabricants d'emballages), en 5 zones: Nord, Est, Ouest, Sud-est et Sud-ouest.

20. En l'espèce, Otor a 6 sites de production de plaques répartis sur les 5 zones définies. DS Smith dispose de deux sites de production de plaques situés dans les zones Nord et Est. Il y a donc un chevauchement des activités des parties sur les zones Nord et Est.

4. LE MARCHE DES EMBALLAGES EN CARTON ONDULÉ

1. DÉLIMITATION DES MARCHES DE PRODUITS

21. Dans de précédentes décisions (10) relatives au secteur du carton ondulé, la Commission européenne a défini un marché des emballages en carton ondulé. Elle a également évoqué une éventuelle distinction entre un marché des emballages en carton ondulé faits de plaques de carton ondulé lourd et un marché des emballages en carton ondulé faits à partir de plaques autres que des plaques lourdes pour les raisons mentionnées précédemment et du fait que des machines spécifiques sont nécessaires à la fabrication d'emballages de carton lourd. Elle a toutefois laissé ouverte cette dernière question. L'Autorité de la concurrence, dans sa décision précitée, a repris cette distinction.

22. En l'espèce, Otor produit et vend uniquement des emballages en carton ondulé autre que lourd. DS Smith en revanche produit des emballages en carton ondulé lourd et autre que lourd. Il y a donc un chevauchement des parties sur le segment des emballages en carton ondulé autre que lourd.

2. DÉLIMITATION DES MARCHES GÉOGRAPHIQUES

23. L'ensemble des emballages en carton ondulé, tout comme les plaques de carton à partir desquelles ils sont fabriqués, se caractérisent par une faible densité. Pour de tels produits, la Commission retient, dans sa pratique décisionnelle (11), des zones de chalandise de 200 à 300 kilomètres de rayon autour du site de production. Elle note également qu'une distinction peut être faite entre les emballages en carton ondulé lourd et les autres emballages en carton ondulé, ces derniers étant distribués, pour des raisons économiques, dans des zones aux dimensions plus faibles.

24. La Commission précise également que la majorité des consommateurs d'emballages en carton ondulé souhaitent voir leurs approvisionnements assurés par un seul fournisseur. Par conséquent, bien que, pour un tel produit, le rayon des zones de chalandise suggère des marchés de dimension régionale, ces derniers peuvent être de taille supérieure.

25. En l'espèce, l'opération envisagée comporte un chevauchement d'activités sur les 5 zones définies par l'ONDEF (Nord, Est Ouest, Sud-est, Sud-Ouest). Par ailleurs, compte tenu de la possibilité d'un marché de dimension suprarégionale, l'analyse sera également menée au niveau national.

5. LE MARCHE DES BAG-IN-BOX

1. DÉLIMITATION DES MARCHES DE PRODUITS

26. Les Bag-in-box (ou " BiB ") sont des emballages contenant un sac en plastique avec une ouverture en plastique (outre, robinet) et destinés à contenir et transporter des liquides (par exemple du vin ou du lait). La Commission européenne, dans sa décision Jefferson Smurfit/Kappa précitée, a évoqué la possibilité de l'existence d'un marché distinct des BiB tout en laissant cette question ouverte dans la mesure où l'analyse concurrentielle restait inchangée.

27. En l'espèce, DS Smith fabrique et vend des BiB intégrés et de manière séparée les éléments en carton ondulés pour BiB et les éléments en plastique pour BiB. Otor ne fabrique et ne vend que les éléments en carton ondulé destinés à être intégrés dans les BiB. Il y a donc un chevauchement des parties sur le segment des éléments en carton ondulé pour BiB.

2. DÉLIMITATION DES MARCHES GÉOGRAPHIQUES

28. Dans la décision Smurfit/Kappa précitée, la Commission a laissé ouverte la question de la délimitation géographique de ce marché, et effectué une analyse des parts de marché des parties au niveau de l'EEE et à l'échelle nationale.

29. Au cas d'espèce, l'opération sera analysée au niveau national, seul marché sur lequel l'opération entraine un chevauchement d'activité.

6. LE MARCHE DES MACHINES DESTINÉES À LA FORMATION DES EMBALLAGES

1. DÉLIMITATION DES MARCHES DE PRODUITS

30. Les machines destinées à la formation des emballages effectuent le montage et le pliage des emballages plats prédécoupés afin de leur donner leur forme finale. Ces machines peuvent également effectuer le remplissage du carton en plaçant l'emballage autour du produit. Elles sont vendues aux clients afin de permettre à ceux-ci de monter les emballages dans leurs locaux.

31. En l'espèce, Otor produit et vend des machines via sa division Otor Systems. DS Smith n'est pas un acteur de ce marché mais, en aval, distribue parfois des machines en contrepartie de la conclusion de contrats de fournitures d'emballages en carton ondulé, et perçoit dans ce cadre une commission du fournisseur.

32. L'analyse concurrentielle examinera donc les éventuels risques de forclusion liés à l'opération sur ce marché.

2. DÉLIMITATION DES MARCHES GÉOGRAPHIQUES

33. Un certain nombre d'éléments peuvent accréditer l'hypothèse d'une délimitation géographique plus que nationale du marché. Ainsi, Otor a des clients sur l'ensemble du territoire de l'EEE. La réglementation applicable aux machines est harmonisée par la directive communautaire 2006-42-CE. En outre, dans une décision concernant un secteur similaire (12), le ministre de l'économie a effectué une analyse des positions des parties au niveau de l'EEE au stade de la production. Au stade de la distribution toutefois, une analyse au niveau national avait été menée. Concernant ces deux stades cependant, le ministre n'a pas tranché la question de leur délimitation géographique.

34. En l'espèce, une analyse pourra être menée au niveau national pour la distribution des machines par analogie avec la pratique ministérielle dans un secteur proche et du fait de l'existence d'éventuelles barrières de langage.

7. CONCLUSION SUR LA DÉLIMITATION DES MARCHES

35. L'analyse sera menée :

- sur le marché de l'achat de papier recyclé au niveau national (13) ;

- sur le marché de la vente de papier recyclé aux niveaux national et de l'Espace Economique Européen ;

- sur le marché des feuilles de papier utilisées dans la fabrication de carton ondulé au niveau de l'EEE ;

- sur le segment des plaques de carton ondulé autre que lourd au niveau national et au niveau des zones Nord et Est ;

- sur le segment des emballages en carton ondulé autre que lourd au niveau national et au niveau de chacune des cinq zones identifiées (Nord, Est, Ouest, Sud-Est, Sud-Ouest) ;

- sur le segment des éléments en carton ondulés destinés à être intégrés dans des BiB au niveau de l'EEE et au niveau national ;

- sur le segment des machines destinées à la formation des emballages au niveau national.

36. En tout état de cause, en l'absence d'atteinte à la concurrence, la question de la délimitation exacte des marchés précédemment évoqués peut rester ouverte.

III. Analyse concurrentielle

37. La présente opération entraine des chevauchements sur les marchés de l'achat et de la vente de papier recyclé, des feuilles de papier ondulé, des plaques de carton ondulé autre que lourd, des emballages en carton ondulé autre que lourd, des éléments en carton ondulé destinés à être intégrés dans un BiB. En outre, la nouvelle entité étant présente sur l'ensemble de la filière du carton ondulé, une analyse verticale sera également menée. D'éventuels effets de forclusion liés à l'opération seront également étudiés s'agissant des machines destinées à la formation des emballages.

A. ANALYSE HORIZONTALE

1. LE MARCHÉ DE L'ACHAT DE PAPIER RECYCLÉ

38. La partie notifiante affirme qu'elle ne dispose pas de données publiques relatives aux cinq grades définis par la norme EN 643, à laquelle la décision communautaire Smurfit/Kappa faisait référence pour sa segmentation. En revanche, elle indique détenir des données provenant du CEPI, qui retient quant à lui quatre segments, et précise que le CEPI publie une "table de conversion" entre les deux segmentations, démontrant que celles-ci couvrent le même ensemble.

39. Entre outre, la partie notifiante n'a pu obtenir de chiffres récents quant à la taille des marchés français de papier à recycler par grade, qui, à l'inverse des totaux par pays et du détail par grade au niveau EEE, ne sont pas publiés sur le site internet du CEPI. Les chiffres détaillés les plus récents sont ainsi de 2007. La partie notifiante estime cependant, en s'appuyant sur le rapport statistique CEPI 2009, que la taille du marché français du papier à recycler de 2009 est comparable à celle du marché en 2007. Selon la partie notifiante, les parts d'achat des parties sur le marché français de l'achat de papier recyclé et ses différents segments sont donc les suivantes :

<emplacement tableau>

40. Au regard de ces données, la part d'achat de la nouvelle entité sur un marché global de l'approvisionnement en papier recyclé et sur ses différents segments demeurera limitée. L'opération n'est donc pas de nature à créer un risque de création ou de renforcement d'une position de dépendance économique des fournisseurs de papier recyclé vis-à-vis de la nouvelle entité.

<emplacement tableau>

41. Eu égard à la faiblesse des parts de marché combinées des parties, l'opération n'emporte pas de risque concurrentiel sur le marché de la vente de papier recyclé et ses différents segments, tant au niveau national que de l'EEE.

3. LE MARCHÉ DES FEUILLES DE PAPIER UTILISÉES DANS LA FABRICATION DE CARTON ONDULÉ

42. Sur le marché de l'EEE, estimé à 14,2 millions de tonnes (14), la part de marché de DS Smith, qui commercialise [50-60] % de sa production, tandis que le reste est consommé en interne s'élève à [0-5] %. Celle d'Otor, qui ne vend à des tiers que [0-5] % de sa production, est de [0-5] %. A l'issue de l'opération, la part de marché de DS Smith sera donc limitée et sensiblement la même qu'avant, c'est-à-dire d'environ [0-5] %, ce qui permet d'écarter un éventuel risque pour la concurrence sur le marché EEE des feuilles de papier utilisées dans la fabrication de carton ondulé.

4. LE MARCHÉ DES PLAQUES EN CARTON ONDULE AUTRE QUE LOURD

43. A titre liminaire, il peut être relevé qu'au niveau du marché national, estimé à environ 440 000 tonnes en 2009 (15), la part de marché cumulée des parties sur le marché français des plaques en carton ondulé autre que lourd sera de [0-5] % (dont [0-5] % attribuée à Otor et [0-5] % à DS Smith). De plus la nouvelle entité se trouvera confrontée à la concurrence de plusieurs opérateurs notamment Cartonneries de Gondardennes ([30-40] %), Smurfit Kappa ([10-20] %), Saica ([5-10] %), International Paper ([5-10] %), SCA ([5-10] %) et Rossman ([0-5] %).

44. A l'échelle régionale, les activités des parties se chevauchent sur la zone Nord et la zone Est. Sur la zone Nord, Otor commercialise des plaques sur un site de production, Otor Picardie dont la production de plaques est marginale (inférieure à 1 tonne), et sur le site d'Otor Normandie, située dans la zone Ouest, qui produit [<2000] tonnes de plaques et en vend une partie dans la zone Nord. DS Smith a également un site de production sur cette zone et sa production de plaques s'élève à [<1000] tonnes. La nouvelle entité sera confrontée à la présence d'opérateurs concurrents de taille plus importante possédant un ou plusieurs sites de production dans cette zone, parmi lesquels Gondardennes qui produit 150 000 tonnes de plaques en France et possède un de ses deux sites de production dans cette zone, Smurfit Kappa et Saica qui y possèdent 2 sites de production chacun, ainsi qu'International Paper, Rossmann, et SCA qui détiennent chacun un site de production dans la zone Nord. En raison de l'existence de cette pression concurrentielle, l'opération envisagée n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur cette zone.

45. Sur la zone Est, les parties ont une production faible (production cumulée de [<1000] tonnes) et font face à la présence de concurrents (2 sites Smurfit Kappa en banlieue nancéenne et à Strasbourg, 1 site SCA Packaging en Alsace), de sorte que l'opération envisagée n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur cette zone.

5. LE MARCHÉ DES EMBALLAGES EN CARTON ONDULE AUTRE QUE LOURD

46. DS Smith et Otor sont simultanément présents sur le marché des emballages en carton ondulé autre que lourd.

47. Au niveau national, où le marché est estimé à 1 944 500 tonnes environ (16), la part de marché cumulée de DS Smith à l'issue de l'opération sera de [10-20] %, résultant des parts cumulées d'Otor ([10-20] %) et de DS Smith ([0-5] %). La nouvelle entité sera confrontée à la concurrence de multiples opérateurs tels que Smurfit Kappa ([20-30] %), Saica ([10-20] %), International Paper ([5-10] %), Rossmann ([5-10] %), SCA ([5-10] %).

48. Au niveau régional, il est à noter que les zones de chalandise du Nord et de l'Est déterminées autour des implantations des parties dépassent les frontières françaises. Ainsi la zone de chalandise du Nord inclut-elle aussi la Belgique et la moitié des Pays-Bas et la zone de chalandise de l'Est inclut la Suisse et une partie de l'Allemagne.

49. Sur la zone de chalandise Nord, la nouvelle entité détiendra une part de marché de [5-10] %. Si on limite la zone au Nord de la France uniquement, la part de marché cumulée sera de [20-30] %, dont [10-20] % attribués à Otor et [10-20] % à DS Smith. Cependant, la nouvelle entité sera confrontée à la présence d'autres opérateurs à même d'exercer une pression concurrentielle notamment Smurfit Kapp ([10-20] %), Saica ([10-20] %), Rossman ([5-10] %), SCA ([5-10] %).

50. Sur la zone de chalandise Est, la nouvelle entité détiendra une part de marché de [5-10] %. Si on limite la zone à l'Est de la France uniquement, la part de marché cumulée sera de [10-20] %, dont [10-20] % attribués à Otor et [5-10] % à DS Smith. Cependant, la nouvelle entité sera confrontée à la présence d'autres opérateurs à même d'exercer une pression concurrentielle tels que Smurfit Kapp ([30-40] %), International Paper ([10-20] %) Saica ([5-10] %), Rossman ([5-10] %).

51. Sur la zone Ouest, la nouvelle entité détiendra une part de marché de [10-20] %, résultant des parts de marché cumulées de DS Smith ([0-5] %) et d'Otor ([10-20] %). Outre la faible addition de parts de marché issue de l'opération, il convient de noter la présence des concurrents suivants : Smurfit Kappa ([30-40] %), SCA ([10-20] %), Saica ([5-10] %).

52. Sur la zone Sud-Est, la nouvelle entité détiendra une part de marché de [10-20] % (Otor : [10-20] % ; DS Smith : [0-5] %). Les principaux concurrents sont Smurfit Kapp ([20-30] %), International Paper ([10-20] %), Saica ([5-10] %), Rossman ([5-10] %).

53. Sur la zone Sud-Ouest, la nouvelle entité détiendra une part de marché de [10-20] % (Otor : [10-20] % ; DS Smith : [0-5] %). Outre la faible addition de parts de marché issue de l'opération, il convient de noter la présence des concurrents suivants : Saica ([20-30] %), Smurfit Kapp ([10-20] %), International Paper ([5-10] %), SCA ([5-10] %), Rossman ([5-10] %).

54. Il ressort de ce qui précède que la nouvelle entité détiendra, sur chacune des zones, une part de marché inférieure à 25 % et sera confrontée à la présence de plusieurs concurrents à même d'exercer une pression concurrentielle. L'opération envisagée ainsi n'est pas de nature à porter atteinte à concurrence sur le marché des emballages en carton ondulé autre que lourd, tant au niveau national que régional.

6. LE MARCHÉ DES ÉLÉMENTS EN CARTON ONDULÉ DESTINÉS AUX BIB

55. Sur un marché national estimé à 120 millions d'unités produites, la part de marché de DS Smith est inférieure à [0-5] %, avec la production de seulement [...] pièces par an par l'usine de Kunheim. Celle d'Otor est comprise entre [5-10] %. La part de marché cumulée des parties est donc inférieure à 15 %. En outre, la nouvelle entité restera confrontée à la concurrence d'autres producteurs sur le territoire tels que LGR, Papcart, Soleco, Smurfit ou SCA Nicollet.

56. L'opération envisagée n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché des éléments en carton ondulé destinés aux BiB.

B. ANALYSE VERTICALE

1. ENTRE LES DIFFÉRENTS STADES DE LA FILIÈRE DU CARTON ONDULE

57. La nouvelle entité disposant sur chacun des marchés considérés précédemment d'une part de marché inférieure à 30 %, l'opération envisagée n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence.

2. LE MARCHÉ DES MACHINES DESTINÉES À LA FORMATION DES EMBALLAGES

58. En France, DS Smith ne propose pas les machines d'Otor à ses clients. En effet, la plupart des machines fabriquées par Otor sont vendues en France directement par sa filiale Otor Systems. Il est peu probable que ce mode de fonctionnement disparaisse à l'issue de l'opération. Toutefois, dans l'hypothèse où, à l'issue de l'opération, Otor utilisait DS Smith comme unique canal de distribution pour vendre sa production, il convient de noter que, sur un marché national estimé entre 20 et 25 millions d'euro, Otor réalise entre [0-5] millions de chiffre d'affaires, et détient donc une part de marché limitée, aux côtés d'acteurs comme Cermex (groupe Tetra), qui détient 25 à 30 % du marché, Mecasystems ou Techmapack.

59. Par ailleurs, il est rappelé que la nouvelle entité disposera de parts de marché largement inférieures à 30 % au niveau national sur les marchés des emballages, soit de [10-20] % sur un marché global et respectivement de [5-10] % et [10-20] % sur les segments relatifs aux emballages en carton ondulé lourd et aux emballages en carton ondulé autre que lourd. Dès lors, les fabricants de machines destinées à la formation des emballages concurrents d'Otor continueront de bénéficier d'une large clientèle à l'issue de l'opération.

Décide

Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 10-0103 est autorisée.

Notes :

1 Notamment en France, Italie, Pologne, République Tchèque, Slovaquie, Ukraine 2

2 Voir notamment la décision 09-DCC-09Mondi Packaging France/Europac et la décision COMP/M.3935 Jefferson Smurfit/Kappa

3 Décision précitée

4 COMP/M.499, Jefferson Smurfitt/Saint-Gobain

5 Voir notamment IV/M.549 - SCA/PWA; IV/M.613- Jefferson Smurfit/Munksjö; IV/M.1208 - Jefferson Smurfit/Stone Container; IV/M.2020 - Metsä-Serla/MODO.

6 Décision 09-DCC-09 Europac/Mondi Packaging France

7 Voir les décisions précitées auxquelles il convient d'ajouter la décision COMP/M.2391 - CVC/Cinven/Assidomän.

8 Décision COMP/M.141., SCA Packaging/Rexam

9 Voir notamment la décision précitée COMP/M.2391 - CVC/Cinven/Assidomän.

10 Voir notamment IV/M.1418 SCA Packaging/Rexam et IV/M.2391- CVC/Cinven/Assidonän.

11 Voir notamment les décisions précitées COMP/M.2391 - CVC/Cinven/Assidomän et IV/M.1208 - Jefferson Smurfit/Stone Container ainsi que la décision IV/M.1418 SCA Packaging/Rexam.

12 C2005-49/Lettre du ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie en date du 5 juillet 2005 au conseil de la société NRG France relative à une concentration dans le secteur de la distribution d'appareils d'impression et de copie.

13 Dans la mesure où Otor n'achète pas de papier hors de France.

14 Source: estimations de la partie notifiante sur la base d'étude de consultants ([...]), de documents élaborés par des associations professionnelles (RISI Lockwood Post Directory, Birkner Directory), des sites internet des concurrents et de la presse spécialisée (telle que Brunton Publications, Euwid Packaging news).

15 Source : Organisation professionnelle des fabricants d'emballages (ONDEF) pour les ventes agrégées de plaques et d'emballages, Fédération européenne de fabricants de carton ondulé (FEFCO )pour la distinction entre plaques et emballages, connaissance du marché de la partie notifiante, notamment pour la distinction entre lourd et autre que lourd.

16 Source : ONDEF pour les données englobant plaques et emballages, FEFCO pour la distinction entre plaques et emballages, connaissance du marché de la partie notifiante.