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Décisions

Cass. com., 23 novembre 2010, n° 09-17.204

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

J3C Pewag France (SAS), Pewag Schneeketten Gmbh & Co KG (Sté)

Défendeur :

FMB COM (Sté), Lesueur, Clanet (ès qual.), River Valley (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

Mme Mandel

Avocat général :

M. Bonnet

Avocats :

SCP Gadiou, Chevallier, SCP Piwnica, Molinié

T. com. Grenoble, du 12 janv. 2009

12 janvier 2009

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 24 septembre 2009) que la société de droit autrichien Pewag Schneeketten (Pewag) qui fabrique et commercialise des chaînes de déneigement tout terrain et sa filiale, la société J3C Pewag France (J3C) qui en assure la distribution exclusive en France, ont poursuivi la société FMB COM, M. Lesueur et M. Clanet en qualité de liquidateur judiciaire de la société River Valley en concurrence déloyale au motif que les chaînes de déneigement qu'ils mettaient en vente et qui étaient fabriquées par la société de droit turc, Atli, étaient en tous points identiques à plusieurs de leurs modèles ;

Attendu que les sociétés Pewag et J3C font grief à l'arrêt de les avoir déboutées de l'ensemble de leurs demandes fondées sur des actes de concurrence déloyale résultant de la diffusion par la société FMB COM, M. Lesueur et M. Clanet, ès qualités, des chaînes de fabrication Atli sous les dénominations commerciales MCXP ou MCXI, Everest ou Montblanc, Master XT ou Master Grip, d'avoir ordonné à la société J3C de cesser tout acte de dénigrement au préjudice de la société FMB COM et de M. Lesueur et d'avoir condamné la société J3C à payer à chacun d'eux la somme de 5 000 euro à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen : 1°) que la copie servile d'un produit résulte d'une identité entre les deux modèles par imitation de leurs signes distinctifs ; que la cour d'appel a expressément relevé que les chaînes dénommées Uniradial pour le produit Pewag et Montblanc pour le produit Atli sont similaires s'agissant des manilles de jonction, de l'absence de protection de surface, de leur longueur, du plan du filet, de la présence de maillons de section carrée au centre de la chaîne, de la position de barrettes d'usure et du principe de tension de la chaîne cependant que les produits de type 20, 5 R 25 filet présentent des caractéristiques identiques relativement aux manilles de jonction, aux boucles de maintien latéral, aux anneaux de liaison, à la technique de soudure des anneaux et des boucles, aux maillons de section carrée au centre de la chaîne, à la position des barrettes d'usure, à leur longueur, au plan du filet et au principe de tension de la chaîne ; que la cour d'appel a également souligné que l'aspect visuel global des deux séries de produit et leur structure conceptive ne permettaient pas à un client non averti de les différencier ; qu'en relevant pourtant que le produit de fabrication Atli n'est pas une copie servile du produit Pewag, la cour d'appel, qui a refusé de tirer les conséquences légales s'évinçant de ses propres constatations, a violé l'article 1382 du Code civil ; 2°) qu'en relevant, pour considérer que les produits de fabrication Atli ne sont pas une copie servile des produits Pewag, que ces similitudes relèvent d'une nécessité technique fonctionnelle, cependant que l'expert judiciaire limitait la nécessité fonctionnelle à la longueur des chaînes, leurs soudures et les manilles de jonction, la cour d'appel a dénaturé l'expertise en violation de l'article 1134 du Code civil ; 3°) que la contradiction de motif équivaut à un défaut de motif ; qu'en relevant, d'une part, que les constatations techniques circonstanciées réalisées par l'expert judiciaire Rambert doivent prévaloir sur celles réalisées non contradictoirement par l'expert Quercia et en retenant, d'autre part, que cette dernière expertise révèle des différences sensibles entre les produits comparés, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; 4°) que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en relevant, pour écarter tout fait de concurrence déloyale, qu'il existe sur le marché national d'autres chaînes provenant de divers fabricants présentant des similitudes de conception sans examiner, comme elle y était pourtant expressément invitée les pièces 55 & 56 marquant des différences significatives entre ces autres chaînes et celles pour engins de déneigement Pewag, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 455 du Code de procédure civile ; 5°) que la diffusion d'un produit servile par imitation d'un autre est à elle seule constitutive d'un acte de concurrence déloyale ; qu'en relevant, pour faire échec à l'action en concurrence déloyale, que les sociétés exposantes ne font pas état d'agissements frauduleux, de manœuvres ou de procédés destinés à créer une confusion dans l'esprit de la clientèle, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; 6°) qu'en déduisant l'absence d'antériorité de conception des chaînes Pewag [de] ce que les modèles de chaînes litigieux Uniradial et Erzberg ne figurent pas dans les catalogues Pewag des années 1972 et 1990 sans rechercher si, nonobstant leur dénomination, la conception des chaînes figurant dans ces catalogues sous une autre appellation n'était pas identique à celles en litige, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 7°) qu'en relevant que les modèles de chaînes litigieux "Uniradial et Erzberg" ne figurent pas dans les catalogues Pewag des années 1972 et 1990, censés faire la preuve de l'antériorité revendiquée, cependant que celui de 1972 mentionne expressément le produit Erzberg (p. 7 et s) et que celui de 1990 vise celui Uniradial (p. 7 et s), la cour d'appel a derechef violé l'article 1134 du Code civil ; 8°) que nonobstant l'absence de tout droit privatif, une société peut obtenir la condamnation d'une autre entreprise pour des faits de concurrence déloyale ; qu'en relevant, pour débouter les sociétés exposantes de leurs demandes en paiement de dommages-intérêts pour concurrence déloyale, qu'elles ne justifient d'aucun droit privatif sur les chaînes d'enneigement, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève que si les points de ressemblance entre les chaînes "Uniradial" pour le produit Pewag et "Montblanc" pour le produit Atli sont nombreux, certains et non des moindres relèvent d'une nécessité fonctionnelle et que le détail de l'étude comparative figurant en annexe du rapport d'expertise judiciaire révèle que les pièces amovibles présentent des différences, qualifiées de sensibles par l'expert ; qu'il en déduit que le produit de fabrication Atli n'est pas la copie servile du produit Pewag ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations souveraines et, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les cinquième et huitième branches, la cour d'appel, qui a retenu qu'il n'existait une nécessité fonctionnelle que pour certains éléments, a pu statuer comme elle a fait ;

Attendu, en deuxième lieu, que l'arrêt ne retient pas que l'expertise non contradictoire de M. Quercia révèle des différences sensibles entre les produits comparés ;

Et attendu, en troisième lieu, que la cour d'appel qui a, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis et hors toute dénaturation, retenu que l'antériorité de conception et de diffusion des modèles "Erzberg" et "Uniradial" n'était pas rapportée, n'avait pas à répondre aux conclusions visées par la quatrième branche que ses constatations rendaient inopérantes ; d'où il suit que le moyen qui manque en fait en ses deuxième et troisième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.