Livv
Décisions

Cass. soc., 9 novembre 2010, n° 09-41.898

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Linden (faisant fonction)

Avocats :

Me Blondel, SCP Piwnica, Molinié

Besançon, du 16 janv. 2009

16 janvier 2009

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 16 janvier 2009), que Mme X a, par acte notarié du 26 septembre 2003, donné en location-gérance à M. A et Mme B à compter du 1er octobre 2003 un fonds de station-service à Besançon, pour une durée de trois mois renouvelable par tacite reconduction de six mois en six mois ; que M. A et Mme B ont notifié le 23 juin 2005 à Mme X leur décision de ne pas renouveler le contrat ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale de demandes sur le fondement de l'article L. 781-1-2° du Code du travail recodifié sous les numéros L. 7321-1 et L. 7321-2, 2°, a) ;

Attendu que M. A et Mme B font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes tendant à voir requalifier une situation en une relation de travail et de leurs demandes résultant de cette requalification alors, selon le moyen : 1°) que, s'agissant d'un débat portant sur la qualification de la situation des locataires-gérants par rapport à une relation de travail qu'ils invoquaient, il appartient au juge de se prononcer en connaissance de cause notamment sur le point essentiel de savoir ce qu'il en est de revenus provenant de la vente des produits pétroliers et des recettes des activités annexes afin d'apprécier si ces dernières constituent un apport négligeable ou non et de pouvoir définir le degré de dépendance économique ; que les appelants faisaient valoir que c'était Mme X qui détenait la comptabilité, qu'ils ne pouvaient dès lors la verser aux débats et ils produisaient une lettre émanant de leur compagnie d'assurance selon laquelle il n'exerçait aucune activité secondaire génératrice de plus de 20 % du chiffre d'affaires, les juges d'appel ajoutant que les successeurs de locataires-gérants ne tiraient par jour des activités annexes que la somme dérisoire de 150 euro à 180 euro ; qu'en l'état de ces données, il appartenait au juge, tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit applicable, d'ordonner une mesure d'instruction pour faire le point objectivement sur la répartition des recettes entre les produits pétroliers et celles des activités annexes ; qu'en refusant d'ordonner cette mesure d'instruction et en ne tranchant pas dès lors la vraie difficulté soumise à son examen, la cour méconnaît son office au regard des articles 4 du Code civil et 12 du Code de procédure civile, ensemble au regard des exigences d'un procès équitable au sens de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; 2°) que, s'agissant de la politique des prix, que les juges du fond relèvent que " si la marge bénéficiaire laissée sur les produits pétroliers peut exclure toute politique personnelle de prix et si un contrôle s'exerce sur la vente de ces carburants, les cogérants exerçaient des activités annexes et pouvant développer d'autres, de nature à représenter une part significative de l'activité pour laquelle ils n'étaient tenus d'aucune obligation d'approvisionnement, d'aucune stratégie commerciale, d'aucun tarif, et grâce à laquelle ils pouvaient acquérir une indépendance encouragée et une réelle liberté d'exploitation " ; qu'en refusant de faire le départ entre les activités de vente de carburant et lubrifiant où les cogérants ne disposaient pas de réelle liberté de manœuvre sur la détermination des prix et les profits résultant des activités annexes pour décider que n'avait pas été établie la condition relative à une absence de liberté de manœuvre par rapport à la fixation des prix, la cour qui statue à partir de motifs inopérants et dubitatifs, ne justifie pas légalement son arrêt au regard de l'article L. 781-1 ancien, devenu les articles L. 7321-1 à 7321-4 du Code du travail, la cour ayant laissé la vraie question à trancher en suspens, violant ce faisant de surcroît les articles cités au précédent élément de moyen ; 3°) que la cour se fonde sur une motivation hypothétique en indiquant par rapport à la liberté de fixation des prix en réalité inexistante que si la marge bénéficiaire laissée sur les produits pétroliers - activité principale de la station - peut exclure toute politique personnelle de prix, et si un contrôle s'exerce sur la vente de ces carburants ..., d'où une méconnaissance des exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ; 4°) que la liberté de détermination des prix s'agissant des activités annexes étant sans la moindre incidence sur l'existence ou non d'une telle liberté sur ce qui était principal, à savoir la vente de carburants et de lubrifiants ; qu'en décidant le contraire, la cour viole les articles L. 7321-1 à 7321-4 du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, dont aucune pièce de la procédure ne fait apparaître qu'elle était saisie d'une demande tendant à ce qu'elle ordonne une mesure d'instruction, a estimé, par une appréciation des éléments de fait et des moyens de preuve qui lui étaient soumis, et sans se prononcer par des motifs hypothétiques ou dubitatifs, que M. A et Mme B n'établissaient, ni que la proportion des recettes de la station-service provenant des activités annexes était négligeable, ni que cette proportion avait pour conséquence d'exclure toute politique personnelle de prix ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.