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Décisions

ADLC, 29 novembre 2010, n° 10-DCC-173

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Mom par LBO France Gestion

ADLC n° 10-DCC-173

29 novembre 2010

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 25 octobre 2010, relatif à la prise de contrôle exclusif du groupe Mom par LBO France Gestion, formalisée par la signature d'un projet d'accord de cession d'actions en date du 6 octobre 2010 ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l'instruction ; Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération

1. LBO France Gestion, société par actions simplifiée de droit français, est une société de gestion de portefeuille indépendante, dont aucun des actionnaires n'est majoritaire ou ne détient de droits particuliers lui permettant d'exercer une influence déterminante. LBO France Gestion gère actuellement [...] fonds communs de placement à risques qui détiennent des participations contrôlantes dans le capital d'entreprises, à faible ou moyenne capitalisation, actives dans différents secteurs d'activité, tels que le bâtiment, l'agroalimentaire, l'immobilier ou la santé.

2. La société Investco MBMA, société par actions simplifiée, tête du groupe Mom, détient la majorité du capital de la société Mom SAS, cette dernière disposant également de la totalité du capital des sociétés Mont Blanc, Materne et Materne North American. Le groupe Mom est principalement actif dans la production et la commercialisation de compotes, de confitures, de crèmes desserts, de lait concentré et de préparations à base de fruits.

3. L'opération envisagée s'articule en deux étapes. Dans un premier temps, une nouvelle société sera créée dont la majorité du capital et des droits de vote sera détenue par LBO France Gestion, sans que les actionnaires minoritaires ne possèdent de droits particuliers de nature à leur octroyer sur celle-ci une influence déterminante. Dans un second temps, cette nouvelle société procédera, directement, à l'acquisition de la totalité des titres de la société Investco MBMA et, indirectement, à la totalité des titres de la société Mom SAS, Mont Blanc, Materne et Materne North American. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle exclusif par LBO France Gestion du groupe Mom, l'opération notifiée constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.

4. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 150 millions d'euro (LBO France gestion : [>150 millions] d'euro pour l'exercice clos au 31 décembre 2009 ; groupe Mom : [>150 millions] d'euro pour l'exercice clos au 31 décembre 2009). Deux au moins de ces entreprises réalisent en France un chiffre d'affaires supérieur à 50 millions d'euro (LBO France Gestion : [>50 millions] d'euro pour l'exercice clos au 31 décembre 2009 ; groupe Mom : [>50 millions] d'euro pour l'exercice clos au 31 décembre 2009). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

5. Le groupe Mom commercialise cinq types de produits : des compotes, de la crème dessert, de la confiture, du lait concentré et des préparations de fruits pour l'industrie, à savoir des préparations à base de fruits destinées aux industriels fabriquant des biscuits, de la pâtisserie, des produits laitiers ou des crèmes glacées.

6. Les 31 sociétés dans lesquelles LBO France Gestion détient des participations contrôlantes, sont spécialisées dans différents secteurs d'activité sans lien avec celui de la cible, tels que les vêtements, l'immobilier, la santé, à l'exception toutefois de la société Poult qui fabrique et commercialise des biscuits.

7. Dès lors les seuls marchés susceptibles d'être concernés par l'opération sont ceux de la commercialisation de préparations de fruits et de biscuits, marchés qui seront pris en compte au titre de l'analyse des effets verticaux.

A. DÉLIMITATION DES MARCHÉS DE PRODUITS

1. LES PRÉPARATIONS DE FRUITS

8. Les préparations de fruits commercialisées par le groupe Mom sont des ingrédients à base de fruits destinés à être incorporés aux biscuits, aux pâtisseries, aux glaces, aux crèmes glacées, aux produits laitiers fabriqués par des industriels. Si ces ingrédients et leur processus de fabrication sont identiques, quel que soit le type de produit fini dans lequel ils sont intégrés, leur degré de concentration en fruits peut toutefois différer. Ainsi le taux de concentration est généralement plus fort pour des préparations destinées aux biscuits que pour celles incorporées à des produits laitiers.

9. Les parties estiment que ces préparations à base de fruits constituent un marché de produits distinct, sans qu'il soit nécessaire de le segmenter davantage. En l'espèce, la question de l'existence et de la délimitation précise de ce marché peut être laissée ouverte, en l'absence de tout problème concurrentiel au cas d'espèce.

2. LES BISCUITS

10. La pratique décisionnelle (1) a envisagé plusieurs segmentations du secteur des biscuits :

- une première relative au type de produits, en faisant la distinction entre les biscuits industriels et les pâtisseries de conservation, en raison d'une faible substituabilité tant du côté de l'offre que de la demande ;

- une deuxième relative au type de recettes ou de spécialités retenues pour la fabrication des biscuits ;

- une troisième selon le canal de distribution, en distinguant notamment les produits destinés à la restauration hors foyer et les produits vendus aux commerces à dominante alimentaire ;

- enfin, parmi les produits vendus aux commerces à dominante alimentaire, une quatrième segmentation en fonction du positionnement commercial des produits, en faisant la distinction entre les produits vendus sous marque de distributeur ou sous marque premier prix et les produits vendus sous marque de fabricant.

11. La partie notifiante, qui ne conteste pas la pertinence de ces délimitations de marché envisagées, est uniquement présente sur le marché des biscuits destinés aux commerces à dominante alimentaire et commercialisés sous marque de distributeur.

12. En tout état de cause, dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées, quelles que soient les hypothèses retenues, la question de la délimitation précise de ces marchés peut être laissée ouverte.

B. DÉLIMITATION GÉOGRAPHIQUE DES MARCHÉS

13. Dans le domaine alimentaire, les autorités de la concurrence considèrent traditionnellement les marchés comme de dimension nationale (2). Les préférences, les goûts et les habitudes des consommateurs, les différences de prix, des variations de parts de marché des opérateurs dans les différents pays, et la forte présence de marques nationales justifient cette délimitation.

14. Dans le secteur des biscuits industriels, la pratique décisionnelle (3) a retenu la même conclusion quant à la dimension géographique des marchés et il n'y a pas lieu, au cas d'espèce, de la remettre en cause.

III. Analyse concurrentielle

15. Les parties à l'opération n'étant pas simultanément présentes sur les mêmes marchés pertinents, l'analyse des effets horizontaux de l'opération est sans objet. En revanche, l'activité de fabrication de biscuits de la société Poult, société contrôlée par LBO France Gestion, se situant en aval de l'activité de fabrication de préparations de fruits pour le secteur industriel du groupe Mom, il convient d'analyser les effets verticaux de l'opération.

16. Une concentration verticale peut restreindre la concurrence en rendant plus difficile l'accès aux marchés sur lesquels la nouvelle entité sera active, voire en évinçant potentiellement les concurrents ou en les pénalisant par une augmentation de leurs coûts. Deux types de verrouillages sont distingués. Dans le premier cas, l'entreprise intégrée refuse de vendre un intrant à ses concurrents en aval ou alors le fournit à un prix élevé, dans des conditions défavorables ou à un niveau de qualité dégradé (verrouillage du marché des intrants). Dans le second cas, la branche aval de l'entreprise intégrée refuse d'acheter ou de distribuer les produits des fabricants actifs en amont et réduit ainsi leurs débouchés commerciaux (verrouillage de l'accès à la clientèle). La pratique décisionnelle des autorités de concurrence considère cependant que ces risques sont peu probables lorsque la part de l'entreprise issue de l'opération sur les marchés concernés ne dépasse pas 30 %.

17. En l'espèce, la partie notifiante a estimé que la société Poult présente une part de marché comprise entre [10-20] % sur le marché national des biscuits destinés aux commerces à dominante alimentaire. Elle est en concurrence avec plusieurs acteurs, dont certains présentent des parts de marché largement plus élevées, tels que Lu, United Biscuits, et le groupe MB. Elle a par ailleurs estimé que le groupe Mom représente environ [5-10] % du marché national de la commercialisation de préparations de fruits auprès du secteur industriel.

18. Dès lors, compte tenu de ces faibles parts de marché, les risques de verrouillage des marchés peuvent être écartés. La présente opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets verticaux.

Décide

Article unique : l'opération notifiée sous le numéro 10-0178 est autorisée.

Notes :

1 Voir notamment les lettre du ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie n° C2006-115 du 8 décembre 2006 aux conseils de la société Biscuiterie de la Baie du Mont Saint Michel, n° C2007-109 du 27 août 2007 au conseil des sociétés Galapagos et Norac.

2 Voir les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 09-DCC-48 dans le secteur des produits Traiteur, n°10-DCC-21 dans le secteur des légumes et champignons, n° 10-DCC-60 dans le secteur des crèmes glacées.

3 Voir les lettres du ministre n° C2006-115 et C2007-109 précitées.