ADLC, 26 janvier 2011, n° 11-D-02
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
Décision
Relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la restauration des monuments historiques
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Délibéré sur l'intervention de M. Jean-Marc Belorgey, rapporteur général adjoint, par Mme Françoise Aubert, vice-présidente, présidente de séance, Mme Reine-Claude Mader-Saussaye, MM. Jean-Vincent Boussiquet, Yves Brissy, Noël Diricq, Jean-Bertrand Drummen, membres.
L'Autorité de la concurrence (section II),
Vu la lettre, enregistrée le 18 mai 2005 sous le numéro 05/0035 F par laquelle la société GAR Rénovation Vieux Edifices a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre dans le secteur de la restauration des monuments historiques ; Vu la décision n° 07-SO-04 en date du 12 novembre 2007, par laquelle le Conseil de la concurrence s'est saisi d'office de pratiques mises en œuvre dans le secteur de la restauration des monuments historiques (affaire enregistrée sous le numéro 07/0081 F) ; Vu la décision en date du 13 novembre 2007 par laquelle le rapporteur général a procédé à la jonction de l'instruction des affaires 05/0035 F et 07/0081 F ; Vu la lettre, enregistrée le 20 novembre 2007 sous le numéro 07/0087 F par laquelle le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Emploi a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre dans le secteur de la restauration des monuments historiques ; Vu la décision en date du 21 janvier 2008 par laquelle le rapporteur général a procédé à la jonction de l'instruction des affaires 05/0035 F, 07/0081 F et 07/0087 F ; Vu les articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne, devenus 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) ; Vu le livre IV du Code de commerce ; Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie ; Vu l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008 portant modernisation de la régulation de la concurrence, et notamment son article 5 ; Vu le procès-verbal du 8 avril 2009, par lequel la société Coefficient a demandé à bénéficier des dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2008-1161 susvisée ; Vu le procès-verbal du 9 avril 2009, par lequel les SNC Pradeau et Morin et Eiffage construction Paris patrimoine ont demandé à bénéficier des dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2008-1161 susvisée ; Vu le procès-verbal du 9 avril 2009, par lequel la société Entreprise Georges Lanfry a demandé à bénéficier des dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2008-1161 susvisée ; Vu les décisions de secret des affaires n° 09-DSADEC-26 du 2l avril 2009 et n°10-DSADEC-17 du 16 septembre 2010 ; Vu les observations présentées par les sociétés M. Lefèvre, Nouvelle Bodin, Entreprise Pradeau et Morin, Pyramide, Entreprise Quélin, TERH Monuments historiques, Entreprise Georges Lanfry, Faber SA, H Chevalier, Charpentier PM, Entreprise Degaine et Pateu & Robert, Entreprise H Chevalier Nord, Entreprise Pavy et Cazenave et par le commissaire du Gouvernement ; Le rapporteur général adjoint, le commissaire du Gouvernement et les représentants des sociétés GAR Rénovation Vieux Edifices, M. Lefèvre, Nouvelle Bodin, Coefficient, Entreprise Pradeau et Morin, Pyramide, Entreprise Quélin, TERH Monuments historiques, Entreprise Georges Lanfry, Faber SA, H Chevalier, Charpentier PM, Entreprise Degaine et Pateu & Robert entendus lors de la séance de l'Autorité de la concurrence du 22 octobre 2010, les sociétés Payeux Invest, Entreprise H Chevalier Nord, Entreprise Pavy et Cazenave ayant été régulièrement convoquées ; Vu les autres pièces du dossier ; Adopte la décision suivante :
I. Constatations
A. LA PROCÉDURE
1. A la suite du signalement par la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) de Haute-Normandie, le 16 mars 2001, d'une anomalie constatée lors de la procédure d'appel d'offres pour la restauration de la cathédrale de Rouen, les services de la Direction générale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ont ouvert une enquête sur les pratiques mises en œuvre par les entreprises du secteur de la restauration de monuments historiques dans cette région, puis ont saisi le parquet de Rouen le 14 septembre 2001.
2. Le Procureur de la République de Rouen a ouvert une information judiciaire selon réquisitoire introductif en date du 24 septembre 2001, du chef de participation personnelle et déterminante à l'organisation de pratiques anticoncurrentielles, délit prévu et réprimé par l'article L. 420-6 du Code de commerce. L'information a ensuite été étendue à d'autres délits et aux régions de Basse-Normandie et de Picardie par réquisitoires supplétifs du 19 novembre 2001 et du 19 février 2002. L'enquête s'est notamment traduite par des perquisitions dans les locaux des sociétés mises en cause et au domicile de certains de leurs dirigeants, par des écoutes téléphoniques de plusieurs responsables de ces sociétés et par les auditions des personnes concernées. L'information judiciaire s'est achevée le 14 septembre 2005 et le réquisitoire définitif a été délivré le 16 juin 2006. L'ordonnance de renvoi délivrée le 8 septembre 2006 ayant été annulée par jugement du Tribunal correctionnel de Rouen en date du 2 décembre 2008, une nouvelle ordonnance de renvoi et de non-lieu partiel a été délivrée le 16 décembre 2009 par le juge d'instruction saisi à fin de régularisation de la procédure.
3. Par ailleurs, par lettre du 18 mai 2005 enregistrée sous le numéro 05/0035F, puis courrier complémentaire du 26 octobre 2005, la société GAR Rénovation Vieux Edifices, dont l'activité est la maçonnerie générale et la taille de pierres, a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques d'exclusion des marchés de rénovation de monuments historiques dont elle serait victime dans la région Ile-de-France. Au cours de l'instruction de cette saisine, les services du Conseil ont appris l'existence de l'instruction pénale ouverte auprès du Tribunal de grande instance de Rouen. Ces éléments ont conduit le Conseil à se saisir d'office de pratiques mises en œuvre dans le secteur de la restauration de monuments historiques par décision n° 07-SO-04 du 12 novembre 2007. Conformément aux dispositions de l'article L. 463-5 du Code de commerce, le procureur de Rouen a communiqué les pièces de l'instruction pénale ayant un lien direct avec la saisine du Conseil le 9 janvier 2008.
4. Enfin, le ministre de l'Economie a, le 20 novembre 2007, saisi le Conseil de la concurrence sur le fondement de l'article L. 462-5 du Code de commerce de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur des monuments historiques.
5. Par décision du 21 janvier 2008 du rapporteur général du Conseil de la concurrence, l'instruction des trois affaires a été jointe.
6. Une notification de griefs a été adressée aux entreprises Lefèvre, Société Nouvelle Bodin, Coefficient, Pradeau et Morin, Pyramide, Quélin, TERH Monuments historiques, Georges Lanfry, Faber SA, H Chevalier, Charpentier PM, Degaine, Pateu & Robert, Payeux Invest, H Chevalier Nord, Pavy et Cazenave le 16 décembre 2008.
7. Les sociétés Coefficient, Entreprise Pradeau et Morin et Entreprise Georges Lanfry ont sollicité le bénéfice des dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2008-1161 susvisée. Par procès-verbaux en date des 8 et 9 avril 2009, le rapporteur général adjoint a proposé, pour tenir compte de l'absence de contestation des griefs et des engagements souscrits par ces entreprises, que les montants des sanctions encourues soient réduits respectivement de 10 %, entre 15 et 25 % et entre 15 et 20 %.
8. A la suite de la réception des observations des parties, un rapport leur a été adressé le 1er juin 2010.
9. La séance devant l'Autorité de la concurrence s'est tenue le 22 octobre 2010.
B. LE SECTEUR CONCERNÉ
1. PRÉSENTATION DU SECTEUR
10. Le secteur concerné est celui de la restauration des monuments historiques. Aux termes de l'article L. 621-1 modifié du Code du patrimoine, " les immeubles dont la conservation présente, au point de vue de l'histoire ou de l'art, un intérêt public sont classés comme monuments historiques en totalité ou en partie par les soins de l'autorité administrative ". L'article L. 621-25 du même Code précise que " les immeubles ou parties d'immeubles publics ou privés qui, sans justifier une demande de classement immédiat, au titre des monuments historiques, présentent un intérêt d'histoire ou d'art suffisant pour en rendre désirable la préservation peuvent, à toute époque, être inscrits, par décision de l'autorité administrative, au titre des monuments historiques ".
11. De manière générale, l'Etat exerce la maîtrise d'ouvrage sur les monuments historiques, malgré une tendance à laisser une part croissante des travaux s'effectuer sous la maîtrise d'ouvrage des propriétaires. Jusqu'en 2007, les architectes en chef des monuments historiques (ACMH) étaient chargés à titre exclusif de la maîtrise d'œuvre des travaux entrepris sur tous les immeubles classés, lorsque la maîtrise d'ouvrage était assurée par les services relevant du ministère chargé de la culture ou lorsque les propriétaires recevaient une aide financière de l'Etat, sous réserve des travaux d'entretien des monuments, confiés aux architectes des bâtiments de France (ABF). Depuis 2007, les ACMH ne disposent de l'exclusivité de la maîtrise d'œuvre que sur les immeubles classés appartenant à l'Etat (1). Les ABF, regroupés au sein des services départementaux de l'architecture et du patrimoine (SDAP), veillent à la conservation des édifices protégés, en déterminant et en dirigeant les interventions d'entretien et de réparations ordinaires sur les édifices classés lorsque ces travaux sont financés par le ministère de la culture. La délimitation entre les interventions ponctuelles et les restaurations nécessite une concertation systématique assurée par le conservateur régional des monuments historiques (CRMH).
12. Les collectivités territoriales peuvent être amenées également à lancer des consultations pour la réalisation de travaux sur des édifices anciens non classés relevant de leur responsabilité, tels que les églises. La maîtrise d'œuvre de ces marchés peut être assurée par la collectivité elle-même, par le biais de ses services techniques. A défaut, la collectivité peut recourir à un maître d'œuvre extérieur.
13. Les maîtres d'ouvrage et les maîtres d'œuvre exigent de manière quasi systématique des entreprises de maçonnerie/taille de pierre qu'elles justifient d'une compétence spécifique pour répondre à la demande de travaux de rénovation ou d'entretien des monuments historiques.
14. La majorité des entreprises qui interviennent dans le secteur disposent d'une certification délivrée par Qualibat, organisme professionnel chargé de la qualification et de la certification des entreprises dans le secteur du bâtiment. La qualification la plus souvent requise pour intervenir sur les monuments historiques ou sur tout monument ancien en matière de maçonnerie/taille de pierre est identifiée par le numéro 2194. Elle est délivrée par une commission nationale composée de représentants des entrepreneurs, des maîtres d'œuvre et de l'administration. En 2001, et uniquement en ce qui concernait l'activité de maçonnerie/taille de pierre, les 95 sociétés qui disposaient de cette qualification ont réalisé un chiffre d'affaires de 185 799 000 euro (2).
2. LES ENTREPRISES EN CAUSE
15. Dix des vingt premières sociétés françaises du secteur sont concernées par la présente affaire.
a) Le groupe Lefèvre
16. La société M. Lefèvre (RCS n° 582111936) est une société par actions simplifiée au capital de 436 320 euro. Elle dispose de 11 filiales, dont les quatre suivantes, impliquées dans le dossier.
17. La société Lefèvre SA (RCS n° 353318736), filiale de M. Lefèvre, est une SA au capital de 500 000 euro. Elle dispose de huit agences, situées (3) dans les départements des Hauts-de-Seine en région Ile-de-France, du Loir-et-Cher en région Centre, de la Sarthe et de la Loire- Atlantique en région Pays-de-la-Loire, de l'Orne et du Calvados en région Basse-Normandie, des Côtes-d'Armor en région Bretagne et du Lot en région Midi-Pyrénées.
18. La société Léon Noël (RCS n° 572040640), filiale de M. Lefèvre est une SA au capital de 160 000 euro. A l'époque des faits, son président était également administrateur de l'entreprise Lefèvre SA et coordonateur des activités des autres filiales de M. Lefèvre, notamment, Normandie Réparation, Jacquet, Léon Noël et Compagnons de Saint Jacques.
19. La société Normandie-Rénovation (RCS n° 323565192), filiale de M. Lefèvre, est une SARL au capital de 20 000 euro.
20. Les Compagnons de Saint-Jacques (RCS n° 338028418), filiale de M. Lefèvre, est une SARL au capital de 20 000 euro.
21. Les autres filiales sont situées dans les départements de la Vienne et de la Charente en région Poitou-Charentes, de la Marne en région Champagne-Ardenne et du Gard en région Languedoc-Roussillon. Elles disposent elles-mêmes d'établissements répartis sur les départements de la Moselle en région Lorraine, de l'Oise en région Picardie, de l'Aube en région Champagne-Ardenne, de l'Allier en région Auvergne, de l'Isère en région Rhône-Alpes, de la Côte-d'Or en région Bourgogne, du Gard en région Languedoc-Roussillon, des Bouches-du-Rhône en région Provence-Alpes-Côte d'Azur, de Haute-Garonne et Tarn-et-Garonne en région Midi-Pyrénées.
b) La société Coefficient
22. La société Coefficient (RCS n° 320596018), contrôlée par M. X... père (4), est une SARL au capital de 10 000 euro. Son activité s'intitule " services ressortant du secteur Bâtiment Métrage. Participation directe ou indirecte dans opérations commerciales industrielles ".
23. L'activité de l'entreprise Coefficient consiste à " chiffrer " des études préalables, des projets architecturaux techniques et des devis, respectivement et principalement destinés aux maîtres d'ouvrage, aux maîtres d'œuvre et aux entrepreneurs. Ses principaux clients sont les agences et filiales du groupe M. Lefèvre. L'entreprise Coefficient dispose de six établissements (5) situés à Paris, Rennes, Le Mans, Poitiers, Montpellier et Biarritz.
c) Le groupe Eiffage
24. Le groupe Eiffage compte plusieurs filiales (6) spécialisées dans la taille de pierre. Parmi celles-ci figurent l'entreprise " Hory-Marçais " (RCS n° 015750904), dont le siège est en région Bourgogne et qui dispose d'établissements dans les départements des Hauts-de-Seine en région Ile-de-France et de la Drôme en région Rhône-Alpes.
25. A la date de la commission des pratiques, le groupe Eiffage disposait d'une autre filiale dans ce secteur, la société Dagand (RCS n° 312379324), société par actions simplifiée au capital de 300 000 euro dont le siège était à Périgueux, en Dordogne, et qui disposait de six établissements (7) situés dans les régions Aquitaine, Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon. Aux termes d'un protocole de cession d'actions en date du 23 août 2005, la SARL Pyramide (RCS n° 410626352) a fait l'acquisition de la totalité du capital social de la société Dagand. La dissolution sans liquidation de la société Dagand a été prononcée le 15 juin 2008, conformément aux dispositions de l'article 1844-5 du Code civil.
26. Le groupe Eiffage exerce par ailleurs, via la société Eiffage Construction Paris Patrimoine, la location-gérance du fonds de commerce de la société " Pradeau et Morin " (RCS n° 572104313), société en nom collectif au capital de 350 000 euro dont le siège est en région Ile-de-France.
d) L'entreprise Quélin
27. L'Entreprise Quélin (RCS n° 780076808) est une SA au capital de 1 000 000 euro. Son PDG est M. Y.... Elle a son siège en région Parisienne. Elle dispose (8) de 12 établissements (9) répartis sur les régions Ile-de-France, Picardie, Pays-de-la-Loire, Poitou-Charentes, Aquitaine, Basse-Normandie et Bretagne. Elle compte en outre trois filiales, à savoir, l'entreprise Lagarde située en région Centre, l'entreprise SMBR située en région Provence-Alpes Côte d'Azur et l'entreprise Billon implantée en Vendée.
e) Le groupe Vinci
28. Le groupe Vinci dispose de 10 filiales réparties sur les régions Languedoc-Roussillon, Lorraine, Rhône-Alpes, Ile-de-France, Provence-Alpes Côte d'Azur, Bourgogne et Pays-de-Loire. Parmi celles-ci figurent la société " Entreprise Degaine " (RCS n° 562062877), société en nom collectif au capital de 314 706,00 euro, et la société " Pateu & Robert " (RCS n° 383809621), dont le siège est situé en région Bourgogne.
f) Les autres intervenants du secteur mis en cause
29. La société Terh Monuments historiques (RCS n° 397743634) est une SA au capital de 40 000 euro. Son premier président en 1994/1995 a été M. Y....
30. L'entreprise Georges Lanfry (RCS n° 348922741) est une société par actions simplifiée au capital de 1 440 000 euro.
31. La société Faber SA, anciennement ETPM Battais, (RCS n° 308 363 712) est une société par actions simplifiée au capital de 300 000 euro. Son président, M. Z..., a exercé jusqu'en décembre 2001 les fonctions de délégué régional de la cellule de Picardie du GMH (Groupement français des entreprises de restauration de monuments historiques).
32. La société Payeux Invest (RCS n° 651920290) est une société par actions simplifiée, au capital de 120 960 euro.
33. L'entreprise H Chevalier Nord (RCS n° 319982989) est une société par actions simplifiée au capital de 840 000 euro.
34. L'entreprise H Chevalier Paris (RCS n° 629802778) est une société par actions simplifiée au capital de 600 000 euro, implantée dans la région Ile-de-France.
35. La société Charpentier PM (RCS n° 309 708 279) est une SARL au capital de 174 800 euro. Son siège social est en région parisienne. Elle dispose de huit établissements situés en région Ile-de-France, Picardie et Champagne-Ardenne.
36. L'entreprise Pavy (RCS n° 305163941) est une société par actions simplifiée au capital de 200 000 euro.
37. La société Nouvelle Bodin (RCS n° 377807276) est une SARL au capital de 30 490 euro.
38. L'entreprise Cazenave (RCS n° 595950015) est une société anonyme au capital de 40 000 euro qui réalise l'essentiel de son activité en région Aquitaine.
C. LES PRATIQUES RELEVÉES
1. LES ÉLÉMENTS DE PREUVE RECUEILLIS
39. Les pratiques en cause sont mises en évidence par quatre types d'éléments de preuve :
- les procès-verbaux de transcription des écoutes téléphoniques autorisées par le juge d'instruction du Tribunal de grande instance de Rouen ;
- les procès-verbaux des auditions des dirigeants des sociétés concernées dans le cadre de la procédure pénale ;
- les documents découverts dans le cadre des perquisitions effectuées au siège des sociétés dans le cadre de la procédure pénale ;
- les informations communiquées par les maîtres d'ouvrage.
40. En premier lieu, les écoutes téléphoniques des responsables des sociétés M. Lefèvre, et de plusieurs agences et filiales du groupe Lefèvre (Normandie Rénovation, Léon Noël et l'agence de Giberville), Coefficient, Terh, Dagand, Quélin et Lanfry ont permis de mettre en évidence l'existence de contacts entre ces entreprises préalablement au dépôt de leurs offres dans le cadre des procédures d'attribution de marchés publics de restauration de monuments historiques. Ces écoutes ont également permis de prendre connaissance de contacts avec des responsables d'autres entreprises, et notamment des sociétés Charpentier PM et Chevalier Nord. Par ailleurs, certaines des conversations interceptées portaient sur des zones géographiques différentes des zones visées par l'information judiciaire ouverte auprès du Tribunal de grande instance de Rouen, qui portait uniquement sur les appels d'offres lancés par les DRAC et les collectivités territoriales de Haute-Normandie, de Basse-Normandie et de Picardie.
41. En deuxième lieu, lors des auditions menées dans le cadre de l'enquête pénale, la plupart des dirigeants ou cadres des entreprises concernées ont reconnu l'existence de pratiques de concertation préalable au dépôt des appels d'offres dans le secteur des monuments historiques, soit de manière générale, soit en ce qui concerne des chantiers particuliers. Ont ainsi été entendus les responsables des sociétés Lanfry, Terh, M. Lefèvre ainsi que ceux de ses filiales Lefèvre SA, Normandie Rénovation et Léon Noël, des sociétés Coefficient, Charpentier PM, Faber, Entreprise Quélin, Dagand, Entreprise Pavy, Entreprise H Chevalier Nord, Payeux, Entreprise Pradeau et Morin et Entreprise Degaine. Ont également été interrogés des élus et des fonctionnaires de l'administration culturelle ou territoriale, ainsi que des architectes.
42. En troisième lieu, les documents saisis au cours des perquisitions pratiquées dans les locaux des entreprises ont permis de recueillir des documents faisant état de pratiques de concertation préalable au dépôt des offres, soit de manière générale, soit en ce qui concerne des chantiers particuliers.
43. En dernier lieu, les informations communiquées par les maîtres d'ouvrage (DRAC) ont permis de constater que certaines entreprises déposaient régulièrement des offres dans des zones géographiques dans lesquelles elles n'étaient pas implantées, sans se voir attribuer le moindre marché.
44. Seront exposés ci-après les éléments généraux relatifs à l'organisation et au fonctionnement des ententes, puis les éléments relatifs aux pratiques relevées dans chacune des régions concernées.
2. LES ÉLÉMENTS COMMUNS À L'ENSEMBLE DES PRATIQUES
a) Les réunions de répartition des marchés
45. Toutes les sociétés visées par la notification de griefs, à l'exception de la société Cazenave, font partie du Groupement National des Entreprises de Restauration des Monuments historiques (ci-après " GMH "). Ce groupement, qui compte 159 adhérents dont 92 entreprises de maçonnerie et taille de pierre, a été constitué en 1959 sous l'égide de la Fédération Française du Bâtiment. Il s'agit d'une instance représentative qui assure notamment la liaison entre les professionnels de la restauration de monuments historiques et du patrimoine ancien avec les donneurs d'ouvrages. Il a été dirigé de 1983 à 1987 par M. A..., dirigeant de la société Lanfry. Il a également été dirigé par M. G..., cadre-dirigeant du groupe Lefèvre, et M. X..., président de la société M. Lefèvre, en a été vice-président. Le GMH connaît une déclinaison locale avec des cellules régionales, dans le cadre desquelles se rencontrent les entreprises de monuments historiques.
46. L'existence de réunions ayant pour objet la répartition des marchés publics à venir dans certaines zones géographiques données est attestée par les déclarations des dirigeants d'entreprises auditionnés au cours de la procédure pénale.
47. Ces échanges pouvaient notamment avoir lieu dans le cadre des réunions des cellules régionales du GMH, ou en marge de ces réunions. Ainsi, M. B..., dirigeant de Normandie Rénovation (groupe Lefèvre) a indiqué qu'au cours des réunions de la cellule de Haute-Normandie il était arrivé que " soient évoqués les marchés à venir et le positionnement des entreprises ", en précisant qu'il ne s'agissait pas de l'objet principal de ces réunions (cote 2641).
48. De même, M. C..., président de la société Payeux, a reconnu que les entreprises de la cellule régionale du Nord-Pas-de-Calais se réunissaient deux à trois fois par an, à l'initiative de M. D..., dirigeant de la société Chevalier Nord, afin d'évoquer le programme des consultations et de procéder à une répartition des marchés à venir entre les différents participants (cotes 4054 et 4055).
49. De même, s'agissant de la région bordelaise, M. E..., cadre-dirigeant de la société M. Lefèvre, a déclaré : " J'ai participé personnellement à une réunion qui s'est tenue en 2000 regroupant MM. F... (Quélin), 2... (Dagand) et 3.... A cette réunion on avait conclu des accords en vue de répartir les chantiers venant en consultation sur les années à venir. La part revenant à Compagnons Saint Jacques était [l'abbaye de] la Sauve Majeure. En contrepartie de quoi, je couvrais sur les autres consultations " (cote 2850).
50. L'existence d'accords de répartition des marchés est ainsi avérée dans plusieurs régions, même si les dirigeants des entreprises concernées ont indiqué que la pratique ne revêtait pas un caractère systématique. M. G..., cadre-dirigeant de la société M. Lefèvre, a déclaré savoir " qu'il y avait une entente générale [...] mais pas systématique ". Il a néanmoins également précisé qu' " il s'agi[ssait] de pratiques tellement traditionnelles et récurrentes qu'il [était] difficile de changer les habitudes " (cotes 3033, 3034).
b) La pratique des offres de couverture
51. La pratique généralisée d'offres de couverture réciproques a été reconnue par la plupart des dirigeants au cours de leurs interrogatoires. Ainsi, M. E... a qualifié la sollicitation d'offres de couverture de la part des concurrents de " pratique générale ", " mises en œuvre de façon régulière dans le domaine des monuments historiques " (cote 2838).
52. MM. E... et G..., cadres-dirigeants de la société M. Lefèvre, ont tous deux reconnu au cours de leurs auditions avoir participé ou, à tout le moins avoir eu connaissance, de pratiques mises en œuvre par les filiales du groupe Lefèvre, consistant à présenter ou à solliciter des offres de couverture, notamment sur les régions Haute-Normandie, Basse-Normandie, Picardie, Aquitaine (cote 2850), Ile-de-France (cote 3020), Auvergne (cote 2639), Nord-Pas-de-Calais (cotes 2639, 3754 et 3755), Lorraine (cote 2639).
53. Lors de son audition réalisée en octobre 2002, M. A..., président de la société Lanfry, a déclaré qu'au-delà du périmètre d'intervention de l'entreprise, c'est-à-dire la Seine-Maritime, à l'exception du Havre, les réponses aux consultations déposées par son entreprise reposaient soit sur des " ... études grossières soit [sur] les informations communiquées par [ses] confrères " (cote 3718).
Le " cahier Lanfry "
54. Au cours de la perquisition du 13 décembre 2001 dans les locaux de l'entreprise Lanfry, a ainsi été saisi un cahier d'enregistrement des appels d'offres à l'occasion desquels l'entreprise avait déposé une offre de couverture, allant du 13 décembre 1993 au 31 mars 2000, tenu par M. H..., dessinateur de la société (cotes 9178 à 9213, ci-après " cahier Lanfry ").
55. A titre d'illustration, une page de ce cahier (cote 9201) est reproduite ci-dessous :
<emplacement tableau>
56. Au cours de cette perquisition, une note effectuant le compte-rendu de la visite des locaux de l'entreprise par les agents de la DGCCRF le 5 avril 2000 a également été saisie. Cette note, rédigée par M. A..., attaché de direction, à destination du président de l'entreprise, précise : " (...) sur les chronos, l'adjudicataire indiqué est celui qu'on couvre. Il y a donc parfois des erreurs, lorsque le marché échappe à celui qu'on couvre " (cote 16896).
57. Interrogés sur ce cahier, MM. H... et A... ainsi que M. I..., directeur adjoint de la société et M. J..., métreur, ont reconnu que les entreprises citées dans la colonne " adjudicataire " étaient bien celles qui avaient bénéficié d'une offre de couverture de la part de l'entreprise Lanfry pour les marchés cités (cote 5894).
58. Pour la période du 12 juin 1998 au 5 avril 2000, les entreprises citées dans le cahier Lanfry sont les suivantes (en nombre de citations, cote 5895) :
<emplacement tableau>
Le rôle de la société Coefficient
59. La société Coefficient, qui a été créée, gérée et est encore actuellement contrôlée par M. X... père, président de la société M. Lefèvre, dispose de 5 agences (cote 3819). Elle réalise, à la demande de ses clients, principalement les entreprises du groupe Lefèvre (cote 2773), des études préalables, des devis et des projets architecturaux et techniques.
60. M. K..., gérant de la société Coefficient, a reconnu que l'une des activités de l'entreprise était de préparer des offres de couverture à destination des filiales du groupe Lefèvre. Il indique ainsi que, lorsque plusieurs filiales du groupe soumissionnent sur un même marché, la société Coefficient intervient pour élaborer leurs offres en préparant des bordereaux complémentaires sur la base des données figurant dans la bibliothèque des prix et tarifs appliqués par chacune des entreprises du groupe mise à sa disposition (cote 2796).
61. M. K... a indiqué que les éléments nécessaires à l'établissement des offres des entreprises du groupe étaient communiqués à la société Coefficient par M. L..., secrétaire général de la société-mère, M. Lefèvre. Ainsi, les courriers en date du 22 février 2001 adressés au gérant de la société Coefficient et à l'ensemble des directeurs des filiales, détaillent les coefficients applicables pour l'année 2001 à l'ensemble des sociétés et agences du groupe, tels que taux de frais généraux, de frais d'études ou de facturation (cotes 717 à 744). M. K... a déclaré : " Je reçois chaque année de chaque entreprise (Lefèvre, Normandie Rénovation, Jacquet, Sele, Noël, Les Compagnons St Jacques, Soporen Renofors, Tollis, Les Métiers du Bois) les coefficients propres à chaque entreprise applicables au déboursé sec. Pour 2001, les documents sont signés de M. L... qui travaille à ma connaissance à la holding financière de Lefèvre. Depuis plusieurs années, c'est M. L... qui signe ces documents. Les sociétés clientes ne demandent jamais de modifier ces éléments " (cote 23).
62. M. K... a précisé que " le système a[vait] été mis en place au niveau national et depuis longtemps ", et que " l'ensemble des entreprises du groupe Lefèvre et de ses filiales [...] pratiqu[ai]ent toutes de la même manière sur leurs zones respectives à savoir qu'elles sollicit[ai]ent des devis pour répondre en couverture ou pour les transmettre aux entreprises concurrentes afin que celles-ci couvrent [ses] clients ". Il a indiqué en outre que M. X...ainsi que la totalité du personnel étaient informés de ces pratiques, et précisé que ces dernières étaient " tellement ancrées dans les habitudes que [ses] clients n'auraient pas compris qu['il] ne leur rende pas ce service " (procès-verbal d'audition de M. K..., cote 2768 et s.).
63. La société Coefficient prépare également des offres de couverture à l'attention d'entreprises tierces. Cette pratique est confirmée par M. E... : " II élabore, à la demande d'une agence, des bordereaux de prix fictifs destinés aux offres de couverture déposées par les autres filiales voire les entreprises extérieures au groupe Lefèvre qui font de la couverture. Si c'est une entreprise du groupe Lefèvre qui couvre une société extérieure, elle remet à Coefficient un bordereau pour modification en fonction de l'offre extérieure et en restant compétitive" (cote 2843). De même, M. G... reconnaît l'existence de ces pratiques (cote 3795).
c) Les actions de coordination et de médiation
64. Les éléments recueillis au cours de l'enquête ont permis de démontrer que certaines entreprises telles que les sociétés M. Lefèvre ou Quélin ont été chargées de missions de coordination des répartitions de marchés. Ainsi, si des difficultés se présentaient pour la passation d'un accord en vue d'un marché local, ces sociétés pouvaient intervenir pour régler les conflits par le biais de négociations, de réunions, ou de rencontres sur place des interlocuteurs locaux pour se mettre d'accord.
65. Ainsi, M. N..., directeur de la société Quélin, a indiqué avoir joué le rôle de médiateur dans un conflit qui opposait les entreprises Terh et Lanfry au cours des années 1999-2000, au sujet de la cathédrale de Rouen, alors que l'entreprise Quélin était extérieure au litige. L'objectif était de mettre fin à une situation concurrentielle, appelée par les protagonistes " la période de guerre " : confrontée à Rouen à la concurrence des sociétés Normandie Rénovation (marché de la façade Ouest de la cathédrale d'octobre 1999) et Terh (marché de la façade Ouest de la tour de Beurre du 1er avril 1999), alors qu'elle était historiquement attributaire des marchés de la cathédrale (cotes 2723 à 2725), la société Lanfry avait décidé de répliquer en présentant des offres concurrentielles dans le cadre des procédures d'attribution de divers marchés, notamment en Picardie, à Reims et à Meaux (cotes 3705 et s.). M. N... a indiqué qu'un accord avait été trouvé, s'étant traduit par la constitution d'un groupement entre Lanfry et Terh sur le chantier de la façade Ouest de la Tour de beurre (cotes 3634 et 3635, voir aussi le procès-verbal de transcription de la conversation téléphonique entre MM. E... et N..., cote 1435).
66. De même, il apparaît que les difficultés concernant les consultations lancées dans la région de Bordeaux (chantiers de la Tour Pey Berland et de l'abbaye de la Sauve Majeure) ont été évoquées et résolues par des contacts directs entre M. N... et M. E... de façon à ce que les engagements de répartition pris par les intervenants locaux (Dagand, Cazenave, Quélin, Compagnons de Saint Jacques) lors des réunions précédentes soient adaptés. Il est à noter que l'un des arguments utilisés par M. N... pour convaincre M. E... a été de lui rappeler la médiation opérée sur Rouen. M. Y... déclare en effet : " N... utilise la médiation qu'il a opérée sur Rouen pour convaincre E... de faire la même chose dans le Sud Ouest, c'est-à-dire de rester passif et de couvrir les accords locaux, sachant que les deux géographies locales se ressemblent. Je veux dire par là que les Compagnons Saint Jacques sont relativement éloignés de Bordeaux, tout comme l'agence Quélin de Caen par rapport à Rouen " (cote 3678, voir aussi le procès-verbal de transcription de la conversation téléphonique entre MM. E... et N..., appel n° 115, cote 1434 et s.).
67. M. N... (Quélin) déclare au sujet de son rôle de médiateur : " Pour moi faire des médiations cela consiste à dire à mes interlocuteurs d'éviter de perdre de l'argent (...) et à éviter des comportements de franc-tireur en matière de prix, comportement qui tend à faire baisser les prix des marchés " (cote 3632). S'agissant de la médiation opérée à Bordeaux, il indique : " Nous voulions à tout prix conserver le partage initial. Nous avons ainsi joué un rôle de médiateur, ce qui permettait en même temps de ne pas faire chuter les prix " (cote 3630).
3. LES ÉLÉMENTS SPÉCIFIQUES À CHACUNE DES RÉGIONS CONCERNÉES
a) Les pratiques relevées en Haute-Normandie
68. Les entreprises implantées en Haute-Normandie au cours de la période en cause sont les sociétés Normandie Rénovation, filiale de M. Lefèvre (40 % de parts de marché (10)), Lanfry (34 %), Terh (21 %), et Dagand (5 %). Entre janvier 1997 et juillet 2001, seules ces quatre entreprises ont été attributaires de marchés dans la région, aucune entreprise parmi les seize autres postulantes n'ayant été retenue sur cette période (cote 12).
Les déclarations des dirigeants d'entreprise
69. Selon les déclarations des dirigeants des entreprises concernées, les sociétés implantées localement se répartissaient les marchés de restauration de monuments historiques en Haute-Normandie, et bénéficiaient également d'accords de couverture d'entreprises tierces, implantées dans d'autres secteurs géographiques.
70. S'agissant de l'entreprise Lefèvre, il ressort tant des déclarations de M. B... (Normandie Rénovation) que de celles de M. O... (Lefèvre Giberville) que Normandie Rénovation présentait des offres en Haute-Normandie et que Lefèvre Giberville " couvrait " soit Normandie Rénovation, soit l'entreprise qui était pré-désignée pour remporter le marché.
71. Interrogé sur l'existence de " tables rondes " dans le secteur des monuments historiques, M. B... a reconnu avoir été convié à de telles réunions trois ou quatre fois, et a précisé que cela se passait généralement au restaurant, où il rencontrait M. A..., dirigeant de Lanfry et M. P..., dirigeant de Terh : " on évoquait les chantiers et chacun faisait part de son souhait d'obtenir tel ou tel marché " (cote 2641).
72. M. B... explique les règles présidant à la répartition des marchés en Haute-Normandie de la façon suivante : " il s'agit d'une répartition géographique car je veux donner du travail localement à mon personnel. (...) Il est beaucoup plus intéressant de travailler près de ses bases, ceci engendre moins de frais et le personnel peut rentrer à domicile le soir au lieu d'être en déplacement. La répartition qui est faite entre les entreprises ne tient pas compte du statut du client, qu'il s'agisse de l'Etat, d'une collectivité territoriale, voire d'un chantier privé. Le principe est de répartir les chantiers entre les entreprises locales de façon à ce que la Haute-Normandie soit traitée par les entreprises de Haute-Normandie. Cela nous conduit à solliciter des couvertures d'entreprises extérieures, notamment de Basse-Normandie et de Picardie et à l'inverse, de les couvrir sur leur propre zone. Pour procéder à la répartition des chantiers sur la Haute-Normandie, bien évidemment nous tenons compte du niveau d'activité des différentes entreprises, c'est à dire des chantiers déjà obtenus et des consultations à venir. " (cote 2641).
73. M. B... déclare par ailleurs : " Notamment pour ce qui concerne la région de Haute-Normandie, lorsque j'étais intéressé par un marché, je savais que j'allais trouver les entreprises implantées en Haute-Normandie telles que Terh et Lanfry. Dans cette hypothèse, j'avais l'habitude de fréquenter fréquemment M. I... (Lanfry), et P... (Terh). Si je ne les voyais pas, je leur téléphonais. Je ne passais pas systématiquement par M. E... mais il était tout le temps au courant. Dans cette hypothèse, c'est mon métreur de Coefficient qui établissait le bordereau de prix moins disant et les bordereaux de prix de couverture. La plupart du temps, c'est moi qui adressais les bordereaux de couverture soit à M. I..., soit à M. P.... Il est arrivé que l'on se mette d'accord sur le prix global du bordereau sans entrer dans le détail des prix poste par poste (...) Cela se passait de la même manière pour les entreprises extérieures " (cotes 2651).
74. M. O... (Lefèvre Giberville) indique avoir couvert ses confrères de Haute-Normandie : " Lefèvre Giberville ainsi que les autres entreprises (de Basse-Normandie) couvrent nos confrères sur la Haute-Normandie. Ainsi, par exemple et de mémoire, j'ai couvert, sans pour autant connaître l'attributaire, pour les chantiers suivants : la Tour de Beurre, Saint-Maclou (...) C'est un système qui est en place depuis longtemps " (2921 à 2924).
75. S'agissant de l'entreprise Lanfry, M. A..., président, déclare qu'à la suite des réunions de la cellule régionale du GMH de Haute-Normandie, au cours desquelles les représentants de la DRAC communiquaient aux entreprises les programmations pour les opérations à venir, " (...) nous évoquions entre nous, hors la présence de la DRAC, nos souhaits respectifs sur certains marchés. Cela étant, ces souhaits étaient assez clairs en ce qui me concerne, c'était de conserver des chantiers sur la zone du Grand Rouen " (cotes 3719, 3720).
76. M. J..., métreur, a déclaré que : " (...) depuis des années il existe un partage équitable des marchés régionaux entre les entreprises implantées localement. Ce partage se fait sur la base des programmations annuelles et c'est à ce moment là que les répartitions sont effectuées. Les contacts téléphoniques que je viens d'évoquer ne sont qu'une " mise en musique ". Cependant, il pouvait arriver que des entreprises extérieures à la région retirent des dossiers et les contacts téléphoniques servaient à s'assurer que les entreprises extérieures ne viendraient pas bouleverser la donne (...) Les entreprises obtenaient chaque année, la liste des consultations qui étaient programmées. Les entrepreneurs régionaux se réunissaient pour se répartir ces chantiers (...) " (cotes 4139, 4140).
77. M. I..., directeur de la société Lanfry a ainsi déclaré : " Afin de pouvoir tenir notre zone géographique, nous passons des accords avec le groupe Lefèvre notamment, qui est présent et soumissionne dans toutes les régions. Il suffit d'obtenir l'accord de M. E... ou de X... pour que les autres entreprises intervenant dans le secteur des monuments historiques accèdent aux exigences du groupe Lefèvre. C'est la raison pour laquelle nous avons des échanges d'informations sur les prix, à la fois sur les chantiers de Haute-Normandie, puisque c'est notre zone privilégiée d'intervention, mais également sur les régions limitrophes dans lesquelles le groupe Lefèvre est présent " (cote 2601).
78. S'agissant de l'entreprise Terh, M. P..., président-directeur-général, a reconnu devant le juge d'instruction s'être entendu avec ses concurrents. Il a déclaré que la répartition des marchés était effectuée de manière " empirique ", les concertations étant effectuées " au coup par coup, marché par marché ". Il a expliqué que l'entente lui avait donné une quote-part comprise 5 et 10 % du montant total annuel des marchés passés par la DRAC de Haute-Normandie et indiqué que 50 % des marchés régionaux revenaient aux entreprises du groupe Lefèvre, 30 % à la société Lanfry, le reste des marchés étant attribué à des entreprises moins importantes (cote 2749). Il a décrit le fonctionnement de l'entente de la manière suivante : " cela se passait de la manière suivante : j'envoyais le montant pour lequel je soumissionnerais ou même un bordereau de prix détaillé afin que mon concurrent puisse faire une offre supérieure à la mienne. Cà se passait soit par téléphone, à ce moment là je contactais MM. I... [Lanfry], E... [Lefèvre], Q... [Charpentier PM] (plus rarement), c'est pour l'essentiel mes trois concurrents sur place ; soit par remise du bordereau de prix qui figurerait dans la soumission définitive de Terh. Je précise que les bordereaux étaient envoyés à ce moment là par fax et lorsqu'ils étaient remis de la main à la main, c'était par M. T... " (2746 à 2752).
79. S'agissant de l'entreprise Dagand, M. R..., chef de l'agence de Caen de la société, a déclaré : " C'est vrai qu'il existe une forme de partage de marchés mais qui n'est pas systématique. En effet, pour ce qui est de mon secteur, la Manche, le Calvados et l'Eure, les entreprises travaillent régulièrement sur certains édifices. Elles acquièrent donc une connaissance et un savoir-faire particuliers sur ce bâtiment, qui fait qu'elles sont attributaires des chantiers. Lorsqu'il y a des consultations sur ces bâtiments, l'entreprise en place, ayant déjà travaillé sur le site bénéficie d'un accord des autres pour la couvrir, sachant que ce n'est pas systématique. (...) Moi, je ne réponds pas trop dans l'Eure. J'essaie de répondre sur la cathédrale d'Evreux. J'ai eu le château d'Harcourt. Dans l'Eure, je me fais couvrir par les entreprises de Seine Maritime pour ces deux édifices ; je couvre quand je réponds sur la Seine Maritime et les autres édifices de l'Eure. Ayant mon technicien de chantier sur Evreux, j'essaye d'avoir des chantiers autour d'Evreux " (2960 à 2961).
80. Cette répartition des marchés de Haute-Normandie entre les sociétés Lefèvre, Lanfry et Terh a été confirmée par certains concurrents de ces entreprises. M. Y... a ainsi déclaré : " Les entreprises Terh, Lefèvre et Lanfry se répartissent les marchés sur la région Haute-Normandie depuis la création de Terh, c'est à dire depuis au moins 1995 " (cote 3678). L'entreprise a répondu à 29 appels d'offres sur les 42 passés en Haute-Normandie au cours de la période du 13 février 1997 au 26 juillet 2001, sans jamais être attributaire d'un seul marché. M. Y... a indiqué que ces offres étaient " certainement [des] offres de couverture puisque nous ne sommes pas intéressés par les chantiers de Haute-Normandie que nous savons être répartis entre les entreprises locales " (cotes 3679 et 3680).
81. Plusieurs responsables de sociétés ont également reconnu avoir, sur cette région, présenté des offres de couverture. C'est le cas de M. O... (Lefèvre Giberville, point 74 ci-dessus). M. D... (Chevalier Nord) a reconnu que les douze réponses aux appels d'offres déposées dans la région entre décembre 1996 et octobre 2001 étaient des offres de couverture, mises au point à la suite de contacts avec les entreprises Terh, Lanfry et Normandie Rénovation (cote 3756). M. Q... (Charpentier PM) a, pour sa part, indiqué : " Je ne travaille pas avec la DRAC de Haute-Normandie, mais il m'arrive de répondre (...) la présentation d'offres non compétitives sur la région de Haute-Normandie peut m'aider à obtenir des marchés sur mon propre secteur et en particulier en Picardie. Il s'agit (...) d'un échange de service " (2577 à 2578). Enfin, s'agissant des offres déposées par la société Pradeau et Morin pour les marchés de l'église de Beaumont-le-Roger du 12 novembre 1997 et de Saint-Martin de Nonancourt du 15 septembre 1999, le dirigeant de cette entreprise a déclaré qu'il s'agissait d'offres de couverture, la région ne " l'intéressant pas du tout " (cote 4093).
82. Par ailleurs, il convient de relever que l'entente entre les diverses entreprises en Haute-Normandie a permis la création de la société Terh dans le but de provoquer la disparition de la société Lanctuit, qui avait été rachetée par le groupe Bouygues, le but de la manœuvre, qui a été atteint, étant de faire échec à l'implantation du groupe Bouygues dans le secteur des monuments historiques, Terh reprenant le personnel et les chantiers habituels de Lanctuit (cotes 3669, 3672, 3676).
Les éléments relevés dans le cadre d'appels d'offres particuliers
83. Les développements qui suivent correspondent à des éléments relevés dans certains des appels d'offres particuliers lancés en Haute-Normandie au cours de la période du 14 avril 1997 au 24 janvier 2002, qui illustrent les pratiques générales décrites dans les paragraphes précédents.
84. Marchés de l'église Saint Jacques de Dieppe (14 avril 1997, 10 mars 1998 et 25 mai 1999) attribués à Normandie Rénovation : plusieurs filiales de M. Lefèvre ont déposé des offres séparées sur ces trois marchés (Normandie Rénovation, Lefèvre SA, Léon Noël et Jacquet pour les premier et deuxième marchés, Normandie Rénovation, Lefèvre SA, Jacquet, Soporen et Compagnons de Saint Jacques pour le troisième). Dagand a déposé une offre pour le marché du 14 avril 1997. Ainsi qu'il a été relevé ci-dessus (point 79), son responsable, M. R..., a indiqué que les offres déposées dans l'Eure, excepté sur les chantiers de la cathédrale d'Evreux et le château d'Harcourt, étaient des offres de couverture (déclarations précitées, cote 2960). Par ailleurs, le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture de cette société pour le marché du 25 mai 1999 (cote 9210), ce que confirme M. B... (Normandie Rénovation, cote 2640).
85. Marché de Beaumont le Roger (12 novembre 1997) : Lefèvre SA (agence de Giberville), et Pradeau et Morin ont déposé une offre pour ce marché, attribué à Terh. Ainsi qu'il a été relevé ci-dessus (points 74 et 81), MM. O... (Lefèvre SA) et S... (Pradeau et Morin) ont indiqué que l'ensemble des offres déposées par leurs entreprises en Haute-Normandie étaient des offres de couverture (déclarations précitées, cotes 2921 et 4093). De même, Dagand a déposé une offre, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture (déclarations précitées, point 84).
86. Marché de Notre Dame des Flots à Sainte Adresse (22 juillet1998) attribué à Normandie Rénovation : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture de cette société (cote 9201).
87. Marché de l'église de Saint-Rémy de Dieppe (28 juillet 1998) attribué à Terh : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture de cette société. Lefèvre SA et Dagand ont déposé chacune une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, point 85). En outre, six filiales de M. Lefèvre (Normandie Rénovation, Léon Noël, Jacquet, Soporen, Compagnons de Saint Jacques et Lefèvre SA) ont déposé des offres séparées pour ce marché.
88. Marché de l'église de Bertreville St Ouen (8 septembre 1998) attribué à Dagand : le cahier Lanfry (cote 9202) mentionne une offre de couverture au profit de Normandie Rénovation, qui n'est toutefois arrivée qu'en seconde position derrière Dagand. M. B... (Normandie Rénovation) a reconnu précisément que Lanfry avait couvert son entreprise pour ce chantier (cote 2640). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
89. Les marchés de la cathédrale de Rouen (1999-2000) :
90. En ce qui concerne le marché de la façade Ouest de la tour de Beurre (1er avril 1999), l'entreprise Terh a déposé une offre concurrentielle et a été attributaire du marché alors même que la société Lanfry était l'attributaire habituel des chantiers de restauration de la cathédrale de Rouen (cotes 2723 à 2725 et 3720). M. P... (Terh) a expliqué que le fait de ne pas avoir respecté l'entente et d'avoir remporté le marché au détriment de Lanfry, a sensiblement perturbé l'exécution de celui-ci (cote 2729). Par ailleurs, la société Quélin a déposé une offre pour ce marché. Ainsi qu'il a été relevé ci-dessus, M. Y... a indiqué que l'ensemble des offres déposées par son entreprise en Haute-Normandie étaient des offres de couverture (déclaration précitée, cote 3680), ce qu'il a par ailleurs précisément reconnu s'agissant de l'édifice de la cathédrale de Rouen (cote 4093, déclaration confirmée par M. N..., directeur de la société, cotes 3646 et 3647). Enfin, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de la société M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
91. En ce qui concerne le marché de la façade Sud de la tour de Beurre (22 décembre 2000), attribué au groupement Lanfry/Terh, M. P... (Terh) a expliqué qu'à la suite des difficultés rencontrées lors de l'exécution du premier marché, il eût été " suicidaire " de ne pas chercher des alliances pour tenter d'obtenir ce nouveau marché. L'entreprise a contacté les sociétés Chevalier Nord et Chevalier Paris pour leur proposer la constitution d'un groupement, avant de conclure un groupement avec Lanfry (cote 2729), à la suite notamment de la médiation opérée par M. N..., directeur de la société Quélin (point 65 ci-dessus). Par ailleurs, Lefèvre SA, Normandie Rénovation et Léon Noël, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché. M. T..., métreur de la société Terh, a indiqué que les bordereaux de prix qu'il avait établis pour ce chantier (cotes 16848 à 16852 et 16855) ont été envoyés à plusieurs entreprises dont Lefèvre SA, Normandie Rénovation et Léon Noël, afin qu'elles déposent des offres de couverture (cote 2492). M. B... (Normandie Rénovation) a reconnu sa réponse de couverture (cote 2637), ce qu'a confirmé M. E... (Lefèvre, cote 2842). M. U... (Léon Noël) a aussi admis avoir déposé une offre de couverture pour ce chantier (cotes 2663 et 2679), ainsi que M. O... (Lefèvre SA, cotes 2924). En outre, Quélin a également déposé une offre pour ce marché, ce qui correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 90).
92. En ce qui concerne le marché de la restauration des parties hautes de la façade Ouest de la nef (21 octobre 1999), attribué à Normandie Rénovation, Quélin a déposé une offre, correspondant à une offre de couverture selon les déclarations de ses dirigeants (déclarations précitées, point 90). Par ailleurs, Lefèvre SA, Normandie Rénovation et Léon Noël, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
93. En ce qui concerne le marché de la galerie supérieure de la partie centrale (7 décembre 2000), attribué à Lanfry, Quélin a déposé une offre, correspondant à une offre de couverture selon les déclarations de ses dirigeants (déclarations précitées, point 90). Par ailleurs, Lefèvre SA, Normandie Rénovation et Léon Noël, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
94. Marché de l'église de la Feuillie (12 avril 1999) attribué à Normandie Rénovation : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture de cette société (cote 9210), ce que confirme M. B... (Normandie Rénovation, cote 2640). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
95. Marché de l'église Sainte Marguerite sur Mer (17 mai 1999) attribué à Normandie Rénovation : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture de cette société (cote 9210), ce que confirme M. B... (Normandie Rénovation, cote 2640). Par ailleurs, Lefèvre SA, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
96. Marchés de Château Gaillard aux Andelys (25 mai 1999 et 15 octobre 2001, 2 lots) : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture de cette société pour le premier chantier, attribué à Terh (cote 9210). Par ailleurs, Normandie Rénovation et Jacquet, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce chantier. Pour le second chantier, dont Terh et Dagand ont été attributaires d'un lot chacun, MM. H... et I... (Lanfry, cotes 2375, 2407 et 2600), et B... (Normandie Rénovation, cotes 2626 et 2636) ont reconnu que leurs entreprises respectives avaient présenté des offres de couverture. Par ailleurs, M. R... (Dagand) a indiqué avoir communiqué ses prix à Lanfry, Terh, Normandie Rénovation, Lefèvre SA et Quélin (cotes 2962 et 2963).
97. Marché de l'abbaye de Valmont (juin 1999) attribué à Normandie Rénovation : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture de cette société (cote 9210), ce que confirment M. B... (Normandie Rénovation, cote 2640) et M. I... (Lanfry, cote 2598). Une copie de l'offre de Lanfry a d'ailleurs été saisie dans les locaux du bureau d'études Coefficient (cote 17059). En outre, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
98. Marché du collège des Oratoriens de Dieppe (5 juillet 1999) attribué à Normandie Rénovation : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture de cette société (cote 9209), ce que confirme M. B... (Normandie Rénovation, cote 2640).
99. Marché de l'église de Saint Martin de Nonancourt (15 septembre 1999) attribué à Dagand : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture de cette société (cote 9209), ce que confirment MM. J... (Lanfry, cote 9208) et R... (Dagand, cote 2959). Par ailleurs, Lefèvre SA a déposé une offre pour ce marché, ce qui correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, s'agissant d'un édifice de Haute-Normandie (déclarations précitées, point 85). En outre, Lefèvre SA, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
100. Marché de l'église de Le Neubourg (27 février 2000) : Lefèvre SA et Dagand ont déposé une offre pour ce marché, attribué à Terh. Ainsi qu'il a été relevé ci-dessus, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, ces offres correspondent selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, points 84 et 85). Par ailleurs, Lefèvre SA, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
101. Marché du Prieuré de Graville au Havre (5 juillet 2000) : Dagand a déposé une offre pour ce marché, attribué à Normandie Rénovation, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture (déclarations précitées, point 84). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
102. Marché de la cathédrale du Havre (21 octobre 2000) : Chevalier Nord a déposé une offre pour ce marché, attribué à Normandie Rénovation. Ainsi qu'il a été relevé ci-dessus (point 81), M. D... (Chevalier Nord) a indiqué que l'ensemble des offres déposées par son entreprise en Haute-Normandie étaient des offres de couverture (déclarations précitées, cote 3756). Par ailleurs, Lefèvre SA, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées. M. U... (Léon Noël) a précisé avoir présenté l'offre de couverture qui avait été préparée par la société Coefficient (cote 2679).
103. Marché du château d'Harcourt (20 novembre 2000) : M. R... (Dagand) a indiqué que son entreprise, attributaire du marché, avait sollicité et obtenu des offres de couverture des entreprises Bodin, Quélin, Lefèvre, Normandie Rénovation et Lanfry (cotes 2960 et 2963, voir aussi déclaration précitée, point 79). MM. T... et P... (Terh) on également reconnu avoir déposé une offre de couverture (cotes 2491 et 2748). Par ailleurs, Chevalier Nord a déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture (déclarations précitées, point 102). En outre, les sociétés Lefèvre SA, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
104. Marché du théâtre gallo-romain de Lillebonne (22 novembre 2000) : MM. P... et T... (Terh) ont reconnu (cotes 2728 et 2491) avoir présenté une offre de couverture pour ce marché, attribué à Normandie Rénovation. Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
105. Marché du château d'Eu, aile des ministres (31 janvier 2001) : MM. P... et T... (Terh) ont reconnu (cotes 2728 et 2491) avoir présenté une offre de couverture pour ce marché, attribué à Normandie Rénovation.
106. Marché du clocher de la basilique Notre-Dame de la Couture à Bernay (27 février 2001) attribué à Terh : Lefèvre SA et Dagand ont déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, points 84 et 85). Par ailleurs, M. J..., métreur de Lanfry à la date du marché concerné, pour lequel l'entreprise a déposé une offre, a indiqué, après avoir énuméré l'ensemble des chantiers qu'il avait étudiés pour la région Haute-Normandie - et dont ne fait pas partie le marché en cause - que les chantiers ne faisant pas l'objet d'une étude correspondaient à une offre de couverture de sa société (cote 4142). En outre, Lefèvre SA, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
107. Marchés de l'abbaye de Fontaine Guérard à Radepont (28 février 2001 et 13 novembre 2001) attribué lors de la seconde consultation à Terh, le premier appel d'offres ayant été déclaré infructueux : MM. I... et H... (Lanfry) et B... (Normandie Rénovation) ont reconnu que leurs entreprises avaient déposé des offres de couverture au profit de Terh pour ces deux appels d'offres (cotes 2588, 2375 et 2626), M. I... (Lanfry) précisant que Terh lui avait communiqué ses prix lors du premier appel d'offres. M. P... (Terh) a confirmé avoir sollicité des offres de complaisance pour l'attribution de ce chantier lors du premier appel d'offres (cote 2730). Par ailleurs, Normandie Rénovation et Lefèvre SA, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
108. Marché de l'église Notre Dame à Arques la Bataille (27 mai 2001) attribué à la société Normandie Rénovation : MM. P... et T... (Terh) ont reconnu (cotes 2728 et 2491) avoir présenté une offre de couverture pour ce marché. Par ailleurs, Lanfry a présenté une offre sans que ce chantier n'ait fait l'objet d'une étude par son métreur, M. J..., ce qui, selon les dires de ce dernier, correspondrait à une offre de couverture (déclarations précitées, point 106). En outre, Lefèvre SA, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
109. Marché de la maison de l'armateur au Havre (29 mai 2001) attribué à la société Normandie Rénovation : les éléments relevés sont identiques à ceux qui ont été exposés au point 108 pour le marché de l'église Notre-Dame à Arques la Bataille.
110. Marché d'Ancretiéville-Saint-Victor (7 juin 2001, marché négocié) attribué à Lanfry : Chevalier Nord et Lefèvre SA ont déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, points 85 et 102). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
111. Marchés d'Ourville en Caux (18 juillet 2001 et 5 janvier 2002) attribués à Normandie Rénovation : M. H... (Lanfry, cote 2376) admet l'existence d'une offre de couverture au profit de Normandie Rénovation concernant l'édifice, ce que confirme M. I... pour le marché du 5 janvier 2002 (Lanfry, cote 2589). M. B... (Normandie Rénovation) confirme avoir communiqué ses prix à Lanfry (cote 2629), comme le laisse entendre une de ses conversations téléphoniques interceptées (cotes 1816 et 1817). Par ailleurs, Normandie Rénovation et Lefèvre SA, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour le premier appel d'offres. M. B... indique avoir communiqué ses prix à l'agence de Giberville de Lefèvre SA (cote 2629).
112. Marché de l'abbaye de Jumièges (26 juillet 2001 et 15 novembre 2001) attribué lors de la seconde consultation à Lanfry, le premier appel d'offres ayant été annulé : MM. I... et H... (Lanfry) ont reconnu avoir sollicité des offres de couverture, notamment auprès de Quélin, Dagand, Normandie Rénovation et Léon Noël (cotes 2375 et 2588). M. P... (Terh) a reconnu avoir présenté une offre de couverture au profit de Lanfry lors de la première consultation, Terh n'ayant pas été consultée lors de la seconde (cote 2730). Dagand a soumissionné lors du second appel d'offres, M. R..., confronté par les enquêteurs à des interceptions téléphoniques, ayant reconnu avoir reçu communication des prix de Lanfry (cote 2959). De même, M. Q... (Charpentier PM) a déclaré avoir élaboré une offre à l'aide les prix communiqués par Terh (cote 2574). Par ailleurs, Normandie Rénovation, Léon Noël et Lefèvre SA, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées lors du premier appel d'offres.
113. Marché du château de Mesnières en Bray (28 juillet 2001) attribué à Terh : MM. P... et T... (Terh) ont reconnu (cotes 2728 et 2491) avoir présenté une offre de couverture. Lefèvre SA a déposé une offre pour ce marché, ce qui correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, s'agissant d'un édifice de Haute-Normandie (déclarations précitées, point 85). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
114. Marché de l'église de Thomer-la-Sôgne (8 août 2001 et 19 octobre 2001) attribué lors de la seconde consultation à Renaissance du Patrimoine, le premier appel d'offres ayant été déclaré infructueux : M. I... (Lanfry) a indiqué que la première consultation avait donné lieu à des échanges d'informations avec Terh, pour couvrir ce dernier (cotes 2588 et 2589), ce que confirme M. P... (Terh, cotes 2730 et 2748). Par ailleurs, s'agissant du second appel d'offres, l'interception d'une communication téléphonique du 16 octobre 2001 entre M. I... et Mme 4... (Lanfry) fait état de l'élaboration d'une offre de couverture par Lanfry à la demande de Terh (cotes 1465 et 1466).
115. Marché de l'abbatiale de Saint-Ouen à Rouen (13 septembre 2001) attribué à Lanfry : MM. P... et T... (Terh) ont reconnu (cotes 2728 et 2491) avoir présenté une offre de couverture. Lefèvre SA a déposé une offre pour ce marché, ce qui correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, s'agissant d'un édifice de Haute-Normandie (déclarations précitées, point 85). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
116. Marché de l'église de St Rémy de Dieppe (28 septembre 2001) attribué à Normandie Rénovation : M. H..., dessinateur d'études, a indiqué que Lanfry a présenté une offre de couverture pour ce marché (cote 2407) de même que MM. P... et T... s'agissant de Terh (cotes 2728 et 2491). Chevalier Nord a déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture (déclarations précitées, point 102). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
117. Marché de l'église de Saint Maclou (9 octobre 2001) attribué au groupement Lanfry/Normandie Rénovation : diverses interceptions de conversations téléphoniques font état de concertations entre Normandie Rénovation, Chevalier Nord, Lanfry et Terh sur ce chantier (cotes 1473, 1511 et 1512). M. B... (Normandie Rénovation) a déclaré avoir communiqué ses prix à Charpentier PM et Chevalier Nord (cote 2625). M. H... (Lanfry) a reconnu lui aussi avoir appelé ses concurrents pour leur demander une couverture (cotes 2373 et 2374), ce que confirme M. I... s'agissant de Charpentier PM (cote 2762). MM. Q... (Charpentier PM) et D... (Chevalier Nord) ont reconnu avoir déposé des offres de couverture pour ce marché (cotes 2560 et 3748). Par ailleurs, Normandie Rénovation et Lefèvre SA, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées, alors que de multiples conversations téléphoniques entre M. B... et M. E... (M. Lefèvre) font état d'échanges intervenus au sein du groupe avant le dépôt des offres (cote 1453).
118. Marché de l'église de Norville (9 octobre 2001) attribué à Normandie Rénovation : alors que des interceptions téléphoniques font état de contacts entre MM. I... (Lanfry) et B... (Normandie Rénovation) pour l'attribution de ce marché (cotes 1468, 1508, 144, 1515, 1516), ce dernier a reconnu avoir sollicité une offre de couverture de la société Lanfry (cote 2626), ce que M. I... confirme, en précisant qu'il avait accepté de laisser ce marché à Normandie Rénovation car tous deux venaient de trouver un accord pour le marché de Saint Maclou (cote 2586).
119. Marché du Petit théâtre de Dieppe (20 novembre 2001) attribué à Normandie Rénovation : Lanfry a déposé une offre pour ce marché, M. B... (Normandie Rénovation) ayant indiqué avoir communiqué ses prix à cette entreprise (cote 2627).
120. Marché de l'église de Notre Dame des Anges à Bihorel (29 novembre 2001) attribué à Lanfry : M. I... (Lanfry) a reconnu avoir communiqué ses prix à Normandie Rénovation et à Terh (cotes 2589 et 2763), qui ont toutes deux déposé une offre pour ce marché. Une conversation téléphonique interceptée entre celui-ci et M. B... (Normandie Rénovation) confirme cette concertation (cote 1858). De même, M. P... (Terh) a indiqué avoir sans doute dû demander au métreur de son entreprise, M. T... de préparer une offre de couverture (cote 2730), ce que tend à confirmer l'interception d'une conversation téléphonique au cours de laquelle M. I... lui indique le positionnement qu'il lui réserve sur ce marché (cote 1853).
121. Marché de l'église Saint-Jean-Baptiste de Bléville au Havre (19 décembre 2001) attribué à Normandie Rénovation : M. B... a déclaré avoir communiqué ses prix à ses concurrents pour obtenir une offre de couverture (cote 2627), ce que confirme M. I... (Lanfry) s'agissant de son entreprise (cote 2589). Lefèvre SA a déposé une offre pour ce marché, ce qui correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, s'agissant d'un édifice de Haute-Normandie (déclarations précitées, point 85). Par ailleurs, Normandie Rénovation et Lefèvre SA, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées.
122. Marché de l'église Saint Vincent au Havre (8 janvier 2002) attribué à Normandie Rénovation : MM. B... (Normandie Rénovation) et E... (M. Lefèvre) ont reconnu avoir sollicité des offres de couverture pour ce marché, auprès notamment de Terh et Chevalier Nord (cotes 2627 et 2839). Terh a déposé une offre, son dirigeant M. P... reconnaissant une concertation avec Lefèvre dans le cadre de ce dossier (cotes 2730, 2731 et 2748).
123. Marché d'entretien de la ville de Rouen (14 janvier 2002) marché déclaré sans suite : M. H... (Lanfry) a indiqué que son entreprise avait l'accord de ses concurrents pour que ce marché lui revienne (cotes 2376 et 2407). M. I... (Lanfry) a précisé avoir eu des contacts avec M. B... (Normandie Rénovation), ce que confirment les interceptions téléphoniques (cote 1864).
124. Marché de Saint Sauveur d'Emalleville (24 janvier 2002) attribué à Lanfry : au moins trois conversations téléphoniques interceptées entre MM. I... (Lanfry) et B... (Normandie Rénovation) indiquent que le premier demande au second, qui accepte, qu'il lui laisse le chantier et fasse une offre de couverture (cotes 1863, 1865 et 1869), ce que M. I... a confirmé (cotes 2386, 2589).
b) Les pratiques relevées en Basse-Normandie
125. Les principales entreprises implantées en Basse-Normandie au cours de la période en cause sont les sociétés Lefèvre SA, agence de Giberville (25 % de parts de marché (11)), Terh (23 %), Quélin (20 %), Degaine (13 %), Dagand (6 %) et Pavy (2 %).
Les déclarations des dirigeants d'entreprise
126. Selon les déclarations des dirigeants des entreprises concernées, les sociétés implantées localement se répartissaient les marchés de restauration de monuments historiques en Basse-Normandie, et bénéficiaient également d'accords de couverture d'entreprises tierces, implantées dans d'autres secteurs géographiques.
127. S'agissant du groupe Lefèvre, ainsi qu'il a été relevé plus haut (point 70), les responsables des établissements locaux ont reconnu l'existence d'un système de couverture réciproque entre les entreprises haut et bas-normandes.
128. Ainsi, M. O..., chef de l'agence de Giberville de Lefèvre SA, a déclaré aux enquêteurs : " nous nous répartissons les chantiers entre les quatre entreprises Bas-normandes, Dagand, Quélin, Bodin et Lefèvre, les autres entreprises intervenant pour faire le nombre. A l'inverse, Lefèvre Giberville, ainsi que les autres entreprises couvrent nos confrères sur la Haute-Normandie. (...). C'est un système qui est en place depuis longtemps, bien avant que je prenne la responsabilité de l'agence. Je n'ai fait que poursuivre ce qui se faisait auparavant j'ai tout de suite été confronté à ces pratiques et les ai moi-même appliquées ". M. O... a indiqué avoir " couvert systématiquement à chaque fois qu'on me l'a demandé ", et notamment au bénéfice de Degaine, Bodin, Dagand ou Quélin (cote 2923). Il a expliqué que la répartition était effectuée " en partant du principe que chacun reste sur le chantier sur lequel il a l'habitude de travailler ". Interrogé quant aux modalités suivies pour les nouveaux chantiers, il a précisé : " II n'y a pas de nouveaux chantiers ; il y a toujours eu une entreprise qui a travaillé à un moment donné sur un des sites de la région ". Enfin, interrogé quant aux raisons pour lesquelles les entreprises déposent des offres alors que le " gagnant est connu dès le départ ", il a répondu : " En fait, il faut faire le nombre pour ne pas que cela se voie " (cotes 2921 à 2924).
129. S'agissant de la société Quélin, M. N..., directeur général, a déclaré au juge d'instruction l'interrogeant sur l'existence de réunions entre entreprises intervenant dans le secteur des monuments historiques au moment de la programmation du chiffre d'affaires au niveau régional : " Oui j'en ai eu connaissance pour la Picardie et la Basse-Normandie. En fait, nous nous réunissons au moment où on connaît la liste des marchés donnés par la DRAC et en fonction de nos capacités personnelles et de nos carnets de commande, on fait état de nos besoins en chiffres d'affaires sans préciser sur quel monument on entend travailler. (...) ". Interrogé quant au moment auquel intervient la décision de travailler sur un marché particulier ou de former un groupement, M. N... a déclaré : " c'est en fonction des besoins ou souhaits de chacun, ça se fait de manière très informelle et ça se fait au cas par cas, c'est dans ce cas qu'on est amené à faire des offres de couverture. Parfois on répond volontairement au dessus du prix lorsque l'on sait qu'on ne pourra assumer cette charge de travail, que le marché est trop complexe ou qu'un concurrent souhaite l'avoir. (...) ça peut éviter qu'un marché soit déclaré infructueux faute de candidat ou permettre éventuellement à un candidat de présenter un prix supérieur à celui qui serait sorti de la concurrence " (cotes 3655 à 3661). Interrogé quant à la continuité de ces pratiques de répartition, M. N... a précisé : " le principe est sur le long terme, la négociation se fait au coup par coup " (cote 3643). Enfin, il a indiqué intervenir pour résoudre les conflits en cas de désaccords dans la mise en œuvre de l'entente, sur appel de ses concurrents MM. G... et E... (groupe Lefèvre), A... et 5... (cote 3644).
130. M. Y..., président de la société Quélin, a reconnu avoir connaissance d'un système de répartition des marchés en Basse-Normandie, à laquelle il participait lorsqu'il s'occupait des relations commerciales dans cette région. Il a ajouté savoir que ce système perdurait, mais que depuis le déclenchement des enquêtes, il avait demandé à son personnel de déposer des offres indépendantes (cotes 3679 à 3680).
131. S'agissant de l'entreprise Degaine, son directeur, M. V..., a de même reconnu l'existence en Basse-Normandie d'un " partage des marchés basé sur les édifices " (cote 5349). Il a expliqué lors de son interrogatoire par le juge d'instruction : " Nous étions (...) un peu chez nous au Mont Saint Michel et pendant des années et des années, ça a été par le simple bouche à oreille entre tel ou tel architecte des monuments historiques et nous que les marchés ont été conclus. Par la suite, le système d'appel d'offres a été mis en place, les marchés publics ont été réglementés et c'est à partir de ce moment-là qu'entre entrepreneurs nous nous sommes entendus en fonction de nos implantations locales, de l'intérêt de notre personnel pour obtenir tel ou tel marché. Vous l'avez compris, comme nous étions sur place au Mont Saint Michel depuis toujours, comme nous avions du matériel et des salariés sur place, il était important pour nous d'emporter les marchés. (...) Et pour que ces marchés restent à Degaine, pour que l'administration ait le sentiment que les choses se passaient de manière normale, notamment en constatant qu'il y avait un nombre suffisant de soumissionnaires, il m'est effectivement arrivé parfois de demander à un concurrent de présenter une offre et ce faisant (...) de me couvrir, inversement, il m'est arrivé de couvrir ces concurrents sur des marchés auxquels ils tenaient " (cote 6132). Au cours des trois années qui se sont écoulées entre juillet 1999 et juillet 2002, Degaine a ainsi remporté l'ensemble des onze marchés sur le Mont Saint Michel.
132. S'agissant de la société Dagand, M. R..., chef de l'agence de Caen, indique : " C'est vrai qu'il existe une forme de partage de marchés mais qui n'est pas systématique. En effet, pour ce qui est de mon secteur, la Manche, le Calvados et l'Eure, les entreprises travaillent régulièrement sur certains édifices. Elles acquièrent donc une connaissance et un savoir-faire particuliers sur ce bâtiment, qui fait qu'elles sont attributaires des chantiers. Lorsqu'il y a des consultations sur ces bâtiments, l'entreprise en place, ayant déjà travaillé sur le site bénéficie d'un accord des autres pour la couvrir, sachant que ce n'est pas systématique. Cette pratique concerne notamment, pour Dagand la cathédrale de Coutances, l'abbaye d'Hambye, la cathédrale d'Evreux. Pour Bodin, lui, il reste dans son secteur, dans le Nord Cotentin et le centre de la Manche. Pour Quélin, c'est peut-être le château de Falaise et autour d'Alençon et Argentan. Pour Lefèvre, ce sont les édifices de Caen et de Bayeux. Je sais que j'ai également couvert une fois l'entreprise Degaine sur le Mont Saint Michel (...). Pour ce qui est de la Basse-Normandie, le système de concertation entre les quatre entreprises bas-normandes nécessitait des échanges réguliers d'offres de couverture. Mes interlocuteurs dans ces entreprises étaient M. O... pour Lefèvre, pour Quélin, M. W..., pour Bodin, c'était M. 1.... Cela se passait de la manière suivante : nous nous échangions un prix qui était généralement celui auquel devait répondre l'entreprise pressentie, charge aux autres de se situer au dessus (...) " (cotes 2956 à 2961).
133. Plusieurs responsables de sociétés ont reconnu avoir, sur cette région, présenté des offres de couverture.
134. S'agissant de l'entreprise Terh, M. T..., métreur de la société, a déclaré : " je peux préciser que je ne me suis jamais déplacé dans la Manche, ni dans l'Orne. Schématiquement, Terh travaille sur une zone géographique constituée des départements de Seine-Maritime et de l'Eure, de la partie Est du Calvados (Falaise), et à la " frontière " des départements de l'Oise et de la Somme avec la Seine-Maritime. Lorsque Terh répond au-delà de cette zone, il s'agit d'offres de couverture demandées par les concurrents. Il nous arrive également de nous abstenir de répondre à des consultations, bien que nous ayons retiré le dossier, à la demande de ces mêmes concurrents " (cotes 2489 à 2493). M. P..., président de la société, a confirmé ces propos, en ajoutant que la zone d'intervention pour le Calvados, n'allait " pas au-delà d'Orbec " (point 2728).
135. S'agissant de la société Lanfry, M. A..., président-directeur-général, a déclaré, à propos de ses activités en Basse-Normandie : " C'est une région où nous sommes peu présents compte tenu de la distance. Il arrive de répondre malgré tout avec des tarifs élevés pour être sûr de ne pas obtenir les marchés, les entreprises locales étant forcément moins disantes puisqu'elles maîtrisent mieux leur budget " frais de déplacement ". Là encore, je ne donne pas de consigne particulière à mes collaborateurs qui savent comment réagir pour faire des offres de couverture. (...) Pour ce qui concerne l'entreprise Lanfry, nous ne faisions que des offres non compétitives. Il nous arrivait bien entendu d'avoir des informations pour nous aider à rédiger nos propositions et à déposer des soumissions sans faire la moindre étude pour limiter les frais " (3718 à 3723). M. J... (Lanfry), à la question posée par les enquêteurs de savoir pour quelles raisons Lanfry présentait des offres concernant les chantiers situés notamment dans le Nord-Pas-de-Calais, la Picardie et la Basse-Normandie, a répondu : " En dehors de la période de conflit avec les concurrents, on a toujours répondu en couverture " (4137 à 4146).
136. S'agissant de l'entreprise Chevalier Nord, M. D..., président, a déclaré que : " de toutes façons, je ne suis pas intéressé par la Basse-Normandie qui est située trop loin de mes bases. J'y retire des dossiers pour montrer que j'existe même si je suis contraint de répondre en couverture " (3754 à 3760).
Les éléments relevés dans le cadre d'appels d'offres particuliers
137. Marché de l'abbaye aux Hommes à Caen (16 décembre 1997) attribué à Lefèvre SA : Terh a déposé une offre pour ce marché. Ainsi qu'il a été relevé ci-dessus (point 134), ses responsables, MM. T... et P..., ont indiqué que les offres déposées par la société au-delà de la zone de l'Est du Calvados étaient des offres de couverture (déclarations précitées, cote 2491). M. 5... (Pavy) a reconnu avoir déposé une offre au prix communiqué par M. O... (Lefèvre SA, cote 3047). Par ailleurs, Lefèvre SA et Léon Noël, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
138. Marché de l'église de Carpiquet (9 octobre 1998) attribué à Quélin : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Quélin (cotes 9203).
139. Marché de l'abbaye aux Dames à Caen (12 octobre 1998) attribué à Lefèvre SA : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Lefèvre (cote 9203). Terh a déposé une offre, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 137). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
140. Marché de l'église de Chanu (29 octobre 1998) attribué à Lefèvre SA : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Lefèvre (cote 9203). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
141. Marché de l'ancien Couvent des Dominicaines de Pont l'Evêque (13 novembre 1998) attribué aux sociétés Dagand et Lefèvre SA : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Lefèvre (cote 9203). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
142. Marché de l'église Saint-Etienne de Caen (13 novembre 1998) attribué à Lefèvre SA : Dagand a déposé une offre pour ce marché. Ainsi qu'il a été relevé ci-dessus (point 132), son dirigeant, M. R..., a reconnu le dépôt d'offres de couverture dans la région Basse-Normandie au bénéfice de la société intervenant habituellement sur l'édifice concerné, soit Lefèvre SA s'agissant des édifices de la ville de Caen (cotes 2960). De même, Terh a déposé une offre, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 137). Par ailleurs, Lefèvre SA, Jacquet et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
143. Marché des ruines d'Alauma à Valognes (30 mars 1999) attribué à Bodin : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Bodin (cote 9206), ce que confirme M. J..., métreur de la société (cotes 4142 et 4143). Par ailleurs, Terh a déposé une offre, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 137).
144. Marché du château de Tourlaville (9 juillet 1999) attribué à Quélin : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Quélin (cote 9208). Terh a déposé une offre, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 137). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
145. Marché de l'église Saint-Pierre de Coutances (9 juillet 1999) attribué à Dagand : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Dagand (cotes 9208), ce que confirme M. J..., métreur de la société (cotes 4142 et 4143). MM. V... (Degaine) et O... (Lefèvre SA) ont reconnu avoir présenté une offre de couverture pour ce marché (cotes 5348 et 2923). Terh a déposé une offre, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 137). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
146. Marché de l'église Saint-Pierre de Lisieux (28 juillet 1999) attribué à Terh : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Terh (cote 9209). M. D... (Chevalier Nord) a reconnu avoir déposé une offre de couverture pour ce marché (cote 3759). Lors de son audition, M. Y..., dont l'entreprise a déposé une offre, a précisé qu'il existait un accord de partage des marchés entre Quélin et Terh attribuant la zone de Lisieux à cette dernière, partage officialisé en 1995 et " prévu dans la durée " (cote 3676). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
147. Marché du château de Fresney le Puceux (9 octobre 1999) attribué à Lefèvre SA : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Lefèvre SA (cote 9210). M. V... (Degaine) a également reconnu avoir présenté une offre de couverture pour ce marché (cote 5348). Par ailleurs, Terh a déposé une offre, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 137). M. O... (Lefèvre SA) a reconnu avoir sollicité des offres de couverture, citant notamment Normandie Rénovation, Degaine, Dagand, Bodin et Quélin (cotes 2922 et 2923). En outre, trois filiales de M. Lefèvre (Lefèvre SA, Normandie Rénovation et Soporen) ont déposé des offres séparées pour ce marché.
148. Marché du domaine de la Baronnie à Bretteville sur Odon (13 octobre 1999 et 19 janvier 2001) attribués à Dagand : M. R... (Dagand) a reconnu avoir bénéficié d'offres de couverture de Terh, Bodin, Quélin, Lefèvre SA, Normandie Rénovation, Lanfry et Pavy pour le second marché (cotes 2963 et 2964), ce que confirment notamment MM. P... et T... s'agissant de Terh (cotes 2728 et 2491). Par ailleurs, le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Dagand pour le premier marché (cote 9210). En outre, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
149. Marché de l'église de Saint Céneri-le-Geréi (18 octobre 1999 et 21 février 2000), attribué lors de la seconde consultation à Pavy, le premier appel d'offres ayant été déclaré infructueux : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Pavy (cotes 9210 et 9213). M. O... (Lefèvre SA), après l'avoir nié, a reconnu avoir présenté une offre de couverture pour ce marché (cotes 2922, 2944 et 2945). Par ailleurs, Terh a déposé une offre, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 137).
150. Marché de l'église de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe (28 octobre 1999) attribué à Lefèvre SA : Dagand a déposé une offre pour le premier marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 142).
151. Marchés du Mont Saint Michel :
<emplacement tableau>
152. M. V..., directeur de Degaine, a reconnu avoir sollicité et bénéficié d'offres de couverture pour les appels d'offres concernant le Mont-Saint-Michel, notamment de la part de Lefèvre SA, Lanfry, Terh, Bodin et Quélin (cotes 5348 et 5349). Le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Degaine en ce qui concerne le marché du 23 juillet 1999 (cote 9209). M. T... (Terh) a reconnu avoir présenté une offre de couverture pour les marchés du 23 juillet et du 9 août 1999 de même que M. P... (Terh) s'agissant des marchés 9 et 10 (cotes 2491 et 2728). De même, M. O... (Lefèvre SA) a reconnu que l'ensemble des offres déposées par son entreprise sur cet édifice étaient des offres de couverture au profit de Degaine (cote 2923). A cet égard, il convient de relever que plusieurs filiales de M. Lefèvre ont déposé des offres séparées pour les marchés 1, 3 et 4. Enfin, M. R... (Dagand) a également reconnu avoir présenté une offre de couverture au profit de Degaine sur cet édifice (cote 2960).
153. Marché de l'IMEC à l'abbaye d'Ardenne, Saint-Germain-la-Blanche-Herbe (5 janvier 2000) attribué au groupement Lefèvre/Quélin, Bodin, Dagand et Pavy intervenant en sous-traitance : M. N... (Quélin) a reconnu l'existence d'un accord de répartition entre Quelin, Lefèvre, Bodin, Dagand et Pavy, qui s'est traduit par l'obtention d'offres de couverture au bénéfice du groupement entre Quélin et Lefèvre SA, et par le partage du marché par la suite (cotes 3645 et 3646). M. O... (Lefèvre SA) a indiqué qu'il devait contacter des filiales de M. Lefèvre pour qu'elles couvrent le groupement Lefèvre/Quelin et que M. W... (Quelin) devait contacter aux mêmes fins les autres entreprises consultées (cote 2923). M. R... (Dagand) a reconnu son offre de couverture et son intervention prévue en sous-traitance et a indiqué savoir que les entreprises Bodin et Pavy faisaient de même en échange d'une part du chantier (cote 2963). Si M. 5... (Pavy) a nié l'existence d'une offre de couverture de son entreprise (cotes 4161 à 4163), il a admis (cote 5025) avoir déposé une offre en fonction du bordereau de prix du groupement Quélin/Lefèvre SA transmis par M. N... (Quélin). Par ailleurs, une conversation téléphonique interceptée entre M. O... et M. 5... fait comprendre que Pavy " attend " une partie du chantier en sous-traitance (" c'était tout réglé ") (cotes 1679 et 1680).
154. Marché du château de Crèvecoeur-en-Auge (6 mars 2000) attribué au groupement Dagand/Soltav : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Pavy (cote 9213). M. 5... a exposé qu'un groupement Pavy/Lanfry avait été envisagé mais que chacune des deux entreprises avait finalement soumissionné de son côté (cote 5022). Le montant des offres déposées par Lanfry et Pavy est toutefois strictement identique, alors qu'elles ont été présentées au donneur d'ordres comme indépendantes.
155. Marchés du château de Bricquebec (16 avril 1999 et 19 mai 2000) attribués à Dagand : Terh a déposé des offres pour ces deux marchés, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, point 137). Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont toutes deux déposé une offre, M. O... (Lefèvre SA) ayant expressément reconnu avoir présenté une offre de couverture pour les marchés de cet édifice (cotes 2923 et 2925) et précisé que toutes les offres de Normandie Rénovation en Basse-Normandie étaient des offres de couverture (cote 2921).
156. Marché de la cathédrale de Coutances (13 novembre 2000) attribué à Dagand : M. R... (Dagand) a reconnu avoir bénéficié d'offres de couverture pour cet édifice (cote 2960). Terh a déposé une offre, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 137). En outre, M. J... (Lanfry), dont l'entreprise a déposé une offre, a indiqué que les offres présentées par la société en Basse-Normandie étaient toutes des offres de couverture, à l'exception des chantiers de la cathédrale de Sées et de Juaye- Mondaye (cotes 4142 et 4143). Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées, M. O... (Lefèvre SA) reconnaissant une offre de complaisance (cote 2923), et précisant que toutes les offres de Normandie Rénovation en Basse-Normandie étaient des offres de couverture (cote 2921).
157. Marché de l'église Notre-Dame-de-Guibray à Falaise (16 novembre 2000) attribué à Quélin : M. O... (Lefèvre SA) a reconnu avoir présenté une offre de couverture à la demande de M. Y... (cote 2923). De même, MM. T... et P... (Terh), dont l'entreprise a déposé une offre, ont reconnu avoir reçu communication des prix pour répondre en couverture sur ce marché (cotes 2491 et 2728). De même, Dagand a déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture (déclarations précitées, point 142). En outre, Lanfry a déposé des offres pour ces deux marchés, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son métreur à des offres de complaisance (déclarations précitées, point 156).
158. Marché du grenier à sel d'Honfleur (15 décembre 2000) attribué à Tehr : MM. T... et P... (Terh) ont reconnu avoir sollicité et obtenu des offres de couverture de leurs concurrents, citant notamment Lefèvre SA (cotes 2490 et 2728). M. D... (Chevalier Nord) a reconnu avoir présenté une offre de couverture à la demande de Terh (cote 3759). Lanfry a déposé une offre, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son métreur à une offre de couverture (déclarations précitées, point 156). En outre, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
159. Marché de la cathédrale de Bayeux (8 février 2001) attribué à Lefèvre SA : M. O... (Lefèvre SA) a reconnu avoir sollicité des offres de couverture de ses concurrents, sans obtenir d'accord en raison de la volonté de Bodin d'obtenir le marché (cotes 2922, 2923). MM. P... et T... (Terh) ont reconnu avoir reçu communication des prix pour répondre en couverture (cotes 2728 et 2491). En outre, M. B... (Normandie Rénovation) a reconnu s'être excusé pour ce marché sur la demande de Lefèvre SA (cote 2640), ce que confirme une interception téléphonique (cote 1711).
160. Marchés de l'abbaye d'Hambye (3 mars 1999 et 13 mars 2001) attribués à Dagand : M. R... (Dagand) a reconnu avoir bénéficié d'offres de couverture pour cet édifice (cotes 2958 et 2960). S'agissant du marché du 3 mars 1999, le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Dagand (cote 9211), ce que confirme M. J..., métreur de la société (cotes 4142 et 4143). Par ailleurs, Terh a déposé une offre, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 137). En outre, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour le marché du 13 mars 2001.
161. Marché de l'église Saint Pierre de Tinchebray (7 novembre 2001) attribué à Lefèvre SA : une conversation téléphonique interceptée entre MM. O... (Lefèvre) et 5... montre que ce dernier a demandé des éléments de prix pour répondre en couverture avant d'indiquer finalement qu'il ne déposerait pas d'offre. (cote 1678).
162. Marché de la cathédrale de Sées (12 novembre 2001) attribué à Lefèvre SA : M. O... (Lefèvre SA) a reconnu avoir sollicité des offres de couverture de Terh, Quélin, Dagand, Bodin, Pavy et Degaine pour ce marché (cote 2923), ce que confirment MM. H... et I... s'agissant de Lanfry (cotes 2376 et 2590), et MM. P... et T... s'agissant de Terh (cotes 2728 et 2491), Quélin ayant également déposé une offre pour ce marché. Par ailleurs, une conversation téléphonique interceptée entre MM. O... (Lefèvre) et 5... montre que ces derniers " marchandaient " l'affectation du chantier (cotes 1683 à 1686).
163. Marché de l'entretien du patrimoine de la ville de Caen (20 novembre 2001) attribué à Lefèvre SA : M. O... (Lefèvre SA) a reconnu avoir fait réaliser par le bureau d'études Coefficient des offres de couverture destinées à ses concurrents Quélin, Dagand, Bodin, Normandie Rénovation, Pavy et peut-être Lanfry et Terh (cote 2922), ce que confirment MM. P... et T... s'agissant de Terh (cotes 2728 et 2491) et M. 5... s'agissant de Pavy (cotes 3052, 3054 et 4157), Quélin ayant également déposé une offre pour ce marché. En outre, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché, M. B... (Normandie Rénovation) ayant précisé que l'agence de Giberville de Lefèvre SA lui transmettait les devis déjà rédigés à l'en-tête de sa société afin qu'il les remette à la Ville de Caen.
164. Marchés du château de Canisy (9 septembre 1999 et 12 février 2002) attribués à Bodin : Lanfry a déposé des offres pour ces deux marchés, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son métreur à des offres de complaisance (déclarations précitées, point 156), ce que confirme la mention sur le cahier Lanfry d'une offre de couverture au profit de Bodin s'agissant du marché du 9 septembre 1999 (cote 9208). M. O... (Lefèvre SA), dont l'entreprise a déposé une offre pour les deux marchés concernés, a reconnu avoir couvert Bodin à sa demande sur cet édifice (cote 2923). Par ailleurs, Terh a déposé une offre pour le premier marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 137). En outre, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour le marché du 9 septembre 1999.
c) Les pratiques relevées en Picardie
165. Les principales entreprises implantées en Picardie sont les sociétés Charpentier PM (22 % de parts de marché (12)), Pradeau et Morin (18 %), Faber (18 %), Chevalier Nord (15 %) et Léon Noël, filiale de M. Lefèvre (13 %). Sont plus marginalement actives dans cette région les sociétés Lanfry (4 %), Quélin (2 %), Terh (2 %) et Payeux (1 %).
Les déclarations des dirigeants d'entreprise
166. Selon les déclarations des dirigeants des entreprises concernées, les sociétés implantées localement se répartissaient les marchés de restauration de monuments historiques en Picardie, et bénéficiaient également d'accords de couverture d'entreprises tierces, implantées dans d'autres secteurs géographiques.
167. S'agissant de la société Charpentier PM, son gérant, M. Q..., a reconnu l'existence d'échanges avec les autres entreprises implantées localement : " Comme je le pratique régulièrement, il a pu m'arriver d'appeler l'entreprise Lefèvre pour savoir s'ils avaient retiré des dossiers et répondaient à des consultations. A l'inverse il est arrivé que Lefèvre m'interroge dans le même sens pour connaître ma position sur une consultation pour laquelle j'avais retiré un dossier. D'une manière plus générale, c'est pareil avec Quélin, ETPM, Pradeau et Morin (mais relativement peu souvent), Léon Noël, Chevalier Nord, Lanfry, Normandie Rénovation, Terh " (cote 2574). S'agissant de la pratique des offres de couverture, il a indiqué : " sur une opération, il est nécessaire qu'il y ait plusieurs candidats qui soumissionnent pour que le marché soit attribué, sinon le maître d'ouvrage risque de relancer la consultation. C'est dans cet esprit que je réponds, en rendant service à mes concurrents du secteur des monuments historiques (...) Cela peut tromper certains maîtres d'ouvrage mais pas tous. Pour ma part, je n'appelle pas ça des offres de couverture mais des services rendus aux entreprises. La présentation d'offres non compétitives sur la région de Haute-Normandie peut m'aider à obtenir des marchés sur mon propre secteur et en particulier la Picardie. Il s'agit (...) d'un échange de services. (...) Cette pratique d'échanges de prix entre les entreprises a toujours existé, je n'ai rien inventé et tout le monde était au courant " (cotes 2577 à 2578).
168. S'agissant de la société Pradeau et Morin, son directeur, M. S..., a nié avoir participé à des réunions anticoncurrentielles dans la région de Picardie (cote 4091) et a déclaré, s'agissant de la pratique des offres de couverture : " j'ai donné des consignes à l'ensemble de mon personnel pour interdire tout envoi par fax. De même, lorsque nous recevons d'un concurrent un fax présentant une demande de couverture sur un chantier précis, je demande à ce que ce document soit détruit et nous ne répondons pas sur ce chantier ". Il a toutefois reconnu l'existence d'échanges avec ses concurrents, et notamment avec MM. Z... (Faber SA) et Q... (Charpentier PM) sur un certain nombre de chantiers dans la région, et notamment les marchés de la cathédrale de Beauvais, du palais national de Compiègne et de l'église de Marquemont à Monneville (cote 4096). Il a par ailleurs indiqué : " nous privilégions nos interventions sur la région de Beauvais. En principe, les entreprises extérieures à la région n'ont pas vocation à intervenir et lorsqu'elles le font, elles remettent des prix sciemment non compétitifs " (cote 4097). Lors de son interrogatoire par le juge d'instruction, il a précisé que : " souhaitant travailler sur la région de Beauvais, j'ai indiqué aux autres que ne me déplaçant pas je souhaitais qu'ils en fassent autant que l'on puisse me laisser travailler sur Beauvais pour occuper mon personnel. Ça s'est passé une fois à l'occasion de la discussion sur Compiègne et une autre pour la cathédrale de Beauvais " (cote 4996).
169. S'agissant de la société Chevalier Nord, son président, M. D..., a indiqué aux enquêteurs qu'en Picardie, " l'ensemble des marchés n'est pas dévolu de façon systématique après concertation. Mais il arrive ponctuellement que des coups de main soient donnés entre confrères locaux pour telle ou telle opération. Cela concerne ou de très grosses opérations impossibles à réaliser soi-même pour lesquelles nous constituons un groupement qui bénéficie des couvertures des autres, ou alors de toutes petites opérations sur lesquelles on n'est pas sûr à l'inverse qu'il y ait suffisamment de réponses pour que la consultation soit déclarée fructueuse ". A cet égard, il a donné les indications suivantes : " Les grosses opérations sont celles du type cathédrale d'Amiens ou basilique d'Albert soit à partir de 5 MF ou en raison de la technicité du chantier. Les petites opérations, en dessous de 300 000 francs. Pour les opérations moyennes, il y a en général très peu de couvertures, la concurrence joue, du moins dans le Nord ". Il a par ailleurs précisé : " Il existe également une répartition selon des critères plus géographiques, ma zone d'intervention privilégiée en Picardie c'est principalement le département de la Somme car j'ai des salariés qui habitent sur place. Quand je réponds dans l'Oise ou l'Aisne, c'est pour couvrir mes confrères " (cotes 3758 et 3759). Interrogé par le juge d'instruction sur les modalités de préparation des offres de couverture, il a déclaré : " ça se fait souvent par téléphone ou parfois au cours de réunions de la cellule régionale des Monuments Historiques de Picardie qui réunit la quasi totalité des entreprises de ce secteur ; ça nous arrivait de discuter après le déjeuner pour savoir qui se grouperait avec qui. Tout le monde était présent au moment de ces conversations et était donc au courant des souhaits des uns et des choix des autres " (cote 3805).
170. Interrogé quant aux déclarations de MM. N... (Quélin) et D... (Chevalier Nord) reconnaissant l'existence en Picardie d'une répartition géographique des chantiers avec échange d'offres de couverture entre les entreprises, M. Z..., président de la société Faber SA (ETPM Battais) a confirmé les propos tenus par M. D... : " je suis tout à fait d'accord avec ces propos. Il s'agit simplement de comprendre que les entreprises n'essaient que de travailler à leur porte pour minimiser les coûts d'exécution. Et il est vrai que je ne suis pas intéressé par les chantiers de la Somme et de l'Aisne. Quand je réponds sur ces deux départements, pour les consultations DRAC, je ne me " bagarre " pas pour foutre la paix à mes confrères. Il m'arrive également de ne pas répondre du tout, donc là, il est clair que je ne couvre pas. Contrairement à ce qu'affirme M. N..., l'entente n'est pas érigée en système car sur cette région, le conservateur s'oppose systématiquement à la communication des programmes annuels " (cote 4078). Il a précisé : " les concertations que nous avons évoquées précédemment se font au coup par coup en fonction de la situation géographique et de l'intérêt manifesté par tel ou tel concurrent. Participent à ces échanges, MM. S... de Pradeau et Morin, Q... de Charpentier PM, D... de Chevalier Nord, E... de Léon Noël, Y... de Quélin. En ce qui concerne les entreprises extérieures il s'agit de M. G... de Lefèvre (et ses filiales), B... pour Normandie Rénovation, A... pour Lanfry, C... pour Payeux " (cote 4079).
171. S'agissant du groupe Lefèvre, M. U..., directeur de l'agence Léon Noël depuis l'année 2000, a reconnu solliciter des offres de couverture des entreprises concurrentes dans sa zone de chalandise, à savoir l'Oise, le Sud de la Somme, l'Ouest de l'Aisne et le Nord du Val d'Oise, pour accroître ses chances d'obtenir les marchés. Interrogé par le juge d'instruction quant à la mise en place d'un système de répartition géographique des marchés en Picardie, il a précisé : " ça s'est fait naturellement. Au moment de ma prise de fonction chez Léon Noël, j'ai été très rapidement contacté par mes concurrents pour ce faire " (interrogatoire de première comparution, cote 2680). Interrogé quant aux critères de négociation des marchés avec ses concurrents, il a déclaré : " le choix se fait sur la proximité du chantier, sur l'intérêt du chantier en termes technique et financier, sur le plan de charge de l'entreprise, ainsi que sur les services (couverture) déjà rendus dans le passé et les chantiers à venir " (cote 2669). Par ailleurs, M. B... (Normandie Rénovation) a reconnu que les quarante réponses aux appels d'offres déposées par son entreprise dans la région entre février 1998 et février 2002 étaient des offres de couverture, mises au point sur la base des éléments transmis par M. U... (Léon Noël) ou la société Coefficient (cote 2638). Enfin, dans le cadre de ses déclarations générales concernant les ententes mises en place par le groupe Lefèvre, M. E..., cadre-dirigeant de M. Lefèvre, a déclaré que son groupe et la société Quélin avaient des " accords réciproques " pour répondre aux appels d'offres passés en Picardie (cote 2851).
172. S'agissant de la société Quélin, son directeur général, M. N..., a déclaré : " en réalité, nous travaillons uniquement sur le département de l'Aisne car c'est le plus proche de notre base géographique, sachant que l'on répond sur les autres affaires mais sans être intéressé. C'est en fait un système analogue à celui que j'ai décrit en Haute-Normandie, à savoir que nous sommes contactés certaines fois par les entreprises qui sont intéressées par les chantiers sur la Somme et l'Oise et qu'à leur demande, nous faisons des offres avec des prix non compétitifs " (cote 3647). Il a ajouté : " sur la Picardie comme sur les autres régions précédemment évoquées, il existe un système de répartition des marchés avec des dépôts d'offres de couverture mais je tiens à préciser que le rôle de la SA Quélin dans ces deux départements de la Somme et l'Oise est passif car nous n'avons pas d'agence sur ce secteur " (cote 3648).
173. S'agissant de la société Lanfry, interrogé quant aux motifs pour lesquels la société avait répondu à 34 des 75 appels d'offre lancés par la DRAC de Picardie entre février 1998 et février 2002 alors qu'elle ne disposait pas d'implantation dans cette région, son président, M. A..., a déclaré : " pour la période mars/avril 2000, nous avons perdu les marchés de la cathédrale de Rouen, nous avons été contraints de combler le carnet de commandes en pratiquant des prix compétitifs sur les trois chantiers de Sept Monts, Clermont et Chantilly. Sans l'attribution de ces chantiers, le licenciement du personnel était inévitable.
Quand je n'ai pas besoin d'aller travailler ailleurs que chez moi, je n'y vais pas et en conséquence je pratique des prix plus importants, étant précisé que pour les trois chantiers cités nous avons dû faire des pertes. Pour répondre à votre interrogation, je vous dirai que les autres chantiers ne m'intéressaient pas et dès lors mon collaborateur M. I... a fait le nécessaire (...) M. I... savait que l'on ne s'intéressait pas à ces chantiers, il faisait en conséquence des offres de couverture, je n'avais pas besoin de lui donner des consignes, il savait très bien ce qu'il fallait faire, l'on peut parler de non-dits " (cotes 3721 et 3722).
174. S'agissant de la société Payeux, interrogé quant à la nature de ses réponses aux appels d'offre lancés par la DRAC de Picardie, la société n'ayant remporté qu'un seul des 34 marchés pour lesquels elle avait déposé une offre dans la région au cours de la période visée par l'enquête pénale, son président, M. C..., a nié présenter des offres de couverture dans la région (cote 4059). Il a reconnu participer à des réunions de partage des marchés dans la région Nord-Pas-de-Calais, mais non dans la région Picardie (cotes 4056 à 4060).
175. Enfin, s'agissant de la société Terh, M. T..., métreur, a déclaré qu'au-delà des chantiers " à la " frontière " des départements de l'Oise et de la Somme avec la Seine-Maritime ", les réponses de la société étaient des offres de couverture déposées à la demande d'entreprises concurrentes (point 134 ci-dessus, cote 2491), propos confirmés par le président de la société, M. P... (cote 2728).
Les éléments relevés dans le cadre d'appels d'offres particuliers
176. Marché de la Maison Greber (Oise, 16 février 1998) attribué à ETPM Battais (Faber SA) : M. Z... a reconnu avoir notamment contacté MM. E... (groupe Lefèvre), Q... (Charpentier PM), A... et Y..., pour obtenir de leur part des offres de couverture (cotes 2824 et 4076), ces entreprises ayant toutes répondu à l'appel d'offres. S'agissant de la société Quélin, et ainsi qu'il a été relevé ci-dessus (point 172), son directeur, M. N..., a indiqué que son entreprise n'intervenait que sur des chantiers de l'Aisne et que ses réponses aux appels d'offres lancés dans la Somme et dans l'Oise étaient des offres de complaisance déposées à la demande de ses concurrents (déclarations précitées, cote 3631). Le cahier Lanfry confirme également le dépôt d'une offre de couverture de cette société (cote 9198). De même, Chevalier Nord a déposé une offre pour ce marché, ce qui correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, s'agissant d'un édifice situé dans l'Oise (déclarations précitées, point 169, cote 3759).
177. Marché de l'église Saint-Vulfran à Abbeville (Somme, 15 juillet 1998) attribué à Lanfry, Charpentier PM ayant cependant déposé une offre moins-disante : interrogé quant à la signification d'annotations manuscrites associant des noms de chantiers, dont celui de l'église Saint-Vulfran à Abbeville, et d'entreprises, portées sur un document saisi dans les locaux de Charpentier PM et daté du 22 juin 1998 (cote 16.946), son dirigeant, M. Q..., a reconnu avoir contacté les entreprises mentionnées avant la date limite de dépôt des offres afin de savoir si elles avaient retiré un dossier et " d'ajuster son offre de prix " (cotes 2563, 2564). Le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture de cette société au profit de Charpentier PM (cote 9201, lot " maçonnerie "). Terh a déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de ses dirigeants à une offre de couverture (déclarations précitées, point 175), de même que Normandie Rénovation, s'agissant d'un édifice de Picardie (déclarations précitées, point 171). Par ailleurs, Soporen et Normandie Rénovation filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
178. Marché de l'église Saint Antoine à Compiègne (Oise, 16 juillet 1998) attribué à ETPM Battais (devenue Faber SA) : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit d'ETPM (cote 9201). Le document saisi dans les locaux de Charpentier PM et mentionné ci-dessus (point 177) indique l'existence de contacts avant le dépôt des offres entre cette entreprise et les sociétés ETPM et Lanfry pour ce chantier, ce que confirme M. Q... (Charpentier PM, cote 2564). Chevalier Nord, Normandie Rénovation, Quélin et Terh ont déposé des offres pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, points 169, 171, 172 et 175).
179. Marché de l'église Saint-Martin à Lierville (Oise, 20 juillet 1998) attribué à Léon Noël : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Léon Noël (cote 9201), ce que confirme M. J..., métreur de la société (cote 4143). Chevalier Nord a déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture (déclarations précitées, point 169).
180. Marché du château de Rambures (Somme, 22 juillet 1998) attribué à Chevalier Nord : M. D... (Chevalier Nord) a admis avoir sollicité des entreprises concurrentes pour ce marché, et notamment Lanfry, ETPM, Terh, et Charpentier PM, à l'occasion d'une réunion de la cellule du GMH en Picardie, puis leur avoir transmis des éléments de prix afin qu'elles déposent des offres de couverture à son profit (cotes 3755 et 3756). Le cahier Lanfry indique le dépôt d'une offre de couverture au profit de Chevalier Nord (cote 9201), ce que confirment MM. I... et J... (Lanfry, cotes 2600 et 4143). Le document daté du 22 juin 1998 saisi dans les locaux de la société Charpentier PM et mentionné ci-dessus (point 177) indique l'existence de contacts entre cette entreprise et, notamment, les sociétés ETPM, Terh, Lanfry et Payeux pour ce chantier, ce que confirment MM. Q... (Charpentier PM, cote 2564) et P... (Terh, cote 2733). Par ailleurs, Jacquet et Léon Noël, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
181. Marché de l'école des Beaux Arts à Abbeville (Somme, 12 novembre 1998) attribué à Payeux : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Payeux (cote 9203).
182. Marché de l'église de Gamaches (Somme, 1er décembre 1998) attribué à Chevalier Nord : Normandie Rénovation et Quélin ont déposé des offres pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, points 171 et 172). Par ailleurs, Lefèvre SA et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
183. Marché de la chapelle Saint Esprit à Rue (Somme, 1er décembre 1998) attribué à Charpentier PM : Normandie Rénovation a déposé une offre pour ce marché, ce qui correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, s'agissant d'un édifice de Picardie (déclarations précitées, point 171).
184. Marché de l'église de Camelin (Aisne, 26 avril 1999) attribué à Charpentier PM : ETPM (Faber SA) a déposé une offre pour ce marché, ce qui correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, s'agissant d'un édifice localisé dans l'Aisne (déclarations précitées, point 170).
185. Marché de la basilique d'Albert (Somme, 2 juin 1999) attribué au groupement Chevalier Nord/Charpentier PM : un document saisi dans les locaux de Charpentier PM, en date du 12 mars 1999 (correspondant à une réunion organisée par M. Z... à laquelle participaient notamment les responsables de Léon Noël, Faber, Quélin, Pradeau et Morin, Terh, Chevalier Nord et Charpentier PM, voir cote 4074), comporte l'indication suivante : " Albert accord des présents pour laisser ChPM Chevalier Nord " (cote 16957). MM. Q... (Charpentier PM) et D... (Chevalier Nord) ont explicitement reconnu avoir obtenu l'accord des participants à cette réunion pour obtenir le chantier (cotes 2565 et 3758). M. C... (Payeux) a déclaré qu'il n'était intéressé qu'à " obtenir la partie échafaudage " (explication concordante avec les indications de M. D...) bien qu'il ait déposé une offre globale plaçant son entreprise derrière Chevalier Nord. Même s'il a indiqué ne pas avoir de souvenir précis, il a admis que cela laissait penser qu'il avait établi une offre de couverture (cote 4057). Normandie Rénovation a déposé une offre, ce qui correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, s'agissant d'un édifice de Picardie (déclarations précitées, point 171). Par ailleurs, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
186. Marché de l'église de Puiseaux en Bray (Oise, 22 juin 1999) attribué à ETPM Battais (Faber SA) : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit d'ETPM (cote 9209), ce que reconnaît M. Z... (cote 2819).
187. Marché de l'église de Varinfroy (Oise, 24 février 1998 et 12 juillet 1999) attribué lors de la seconde consultation à Léon Noël, le premier appel d'offres ayant été déclaré infructueux : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Léon Noël (cote 9209). Chevalier Nord, Normandie Rénovation et Quélin ont déposé des offres pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, points 169, 171 et 172). Par ailleurs, plusieurs filiales de M. Lefèvre ont déposé des offres séparées sur ces deux marchés (Lefèvre SA et Léon Noël pour le premier, Lefèvre SA, Léon Noël et Normandie Rénovation pour le second).
188. Marché de l'église d'Ault (Somme, 15 juillet 1999) attribué à Charpentier PM : M. Q... (Charpentier PM) a reconnu avoir contacté avant la date limite de dépôt les mêmes entreprises que lors de l'appel d'offres du château de Rambures (à savoir ETPM, Terh, Lanfry et Payeux), ainsi que l'indiquaient les annotations manuscrites portées sur des documents saisis dans les locaux de l'entreprise (cotes 2565 et 16958). MM. P... (Terh) et Z... (Faber SA) ont reconnu avoir déposé des offres de couverture pour ce marché à la demande de Charpentier PM (cotes 2733 et 4076), M. C... (Payeux) déclarant quant à lui ne plus s'en souvenir (cote 4057). Normandie Rénovation a déposé une offre, ce qui correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, s'agissant d'un édifice de Picardie (déclarations précitées, point 171). Par ailleurs, Léon Noël et Lefèvre SA, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
189. Marché de Marles (Aisne, 19 juillet 1999) attribué à Charpentier PM : de même que pour les appels d'offres du château de Rambures et de l'église d'Ault, M. Q... (Charpentier PM) a reconnu avoir contacté ses concurrents avant la date limite de dépôt des offres, ainsi que l'indiquaient les documents saisis dans les locaux de son entreprise (cote 2565). M. Z... (Faber SA) a reconnu avoir déposé une offre de couverture pour ce marché à la demande de Charpentier PM (cote 4076), M. S... (Pradeau et Morin) déclarant quant à lui avoir " sans doute remis un prix pour ne pas remporter l'affaire ", " peut-être à la demande de M. Q... " (cote 4095). Chevalier Nord et Normandie Rénovation ont déposé des offres pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, points 169 et 171). Par ailleurs, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
190. Marché de Neuilly sous Clermont (Oise, 15 novembre 1999) attribué à Léon Noël : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Léon Noël (cote 9206), ce que confirme M. J..., métreur de la société (cote 4142). Par ailleurs, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché, le dirigeant de Normandie Rénovation ayant reconnu que l'ensemble de ses offres en Picardie étaient de complaisance (déclarations précitées, point 171).
191. Marché de la chapelle des Saintes Hosties à Marseille-en-Beauvaisis (Oise, 24 novembre 1999) attribué à ETPM Battais (Faber SA) : M. Z... a reconnu avoir indiqué son intérêt pour le chantier aux entreprises qui ont répondu à l'appel d'offres (cote 4073). M. C... (Payeux) a reconnu avoir déposé une offre de couverture à la demande de Faber (cotes 4057 et 5008). Par ailleurs, le document saisi dans les locaux de Charpentier PM et mentionné ci-dessus (point 185), rédigé lors de la réunion du 12 mars 1999, comporte la mention " ETPM ", en face de la mention " Marseille en Beauvaisis " (cote 16957). M. D... a reconnu avoir participé à cette réunion au cours de laquelle les présents (Léon Noël, Faber, Quélin, Pradeau et Morin, Terh, Chevalier Nord et Charpentier PM, cote 4074) ont fait part de leurs souhaits sur les consultations à venir, et notamment sur le marché de Marseille-en-Beauvaisis (cote 3758). Par ailleurs, Normandie Rénovation a déposé une offre, ce qui correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, s'agissant d'un édifice de Picardie (déclarations précitées, point 171). Enfin, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
192. Marché de l'église de Frambourg (Oise, 13 décembre 1999) attribué à Lanfry : Normandie Rénovation a déposé une offre, ce qui correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, s'agissant d'un édifice de Picardie (déclarations précitées, point 171). Par ailleurs, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
193. Marché du château de Condé en Brie (Aisne, 17 décembre 1999) attribué à Pradeau et Morin : les éléments relevés sont identiques à ceux qui ont été exposés au point précédent pour le marché de l'église de Frambourg.
194. Marché de l'église de Vic-sur-Aisne (Aisne, 17 décembre 1999) attribué à Quélin : Chevalier Nord, Faber SA et Normandie Rénovation ont déposé des offres pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, points 169, 170 et 171). Par ailleurs, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
195. Marché de l'église de Marquemont à Monneville (Oise, 20 juillet 1998, 5 novembre 1998, 10 janvier 2000 et 23 juin 2000), attribué lors de la quatrième consultation à ETPM Battais (Faber SA), les trois premiers appels d'offres ayant été déclarés infructueux : s'agissant de l'appel d'offres du 20 juillet 1998, le document daté du 22 juin 1998 saisi dans les locaux de Charpentier PM et mentionné ci-dessus (point 177) indique l'existence de contacts avant le dépôt des offres entre cette entreprise et, notamment, les sociétés ETPM, Chevalier Nord, Léon Noël, Terh et Quélin, pour ce chantier, ce que confirme MM. Q... (Charpentier PM, cote 2564) et P... (Terh, cote 2733). M. S... (Pradeau et Morin) a également reconnu avoir remis une offre de couverture pour ce chantier à la demande de Charpentier PM (cote 4096). S'agissant du troisième appel d'offres, le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Charpentier PM (cote 9205). Par ailleurs, les entreprises suivantes ont déposé des offres à l'occasion de l'une ou plusieurs des consultations relatives à cet édifice, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de ce dernier, correspond selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, points 169, 170, 171, 172 et 175) : Chevalier Nord (quatre appels d'offre), Faber SA (premier et quatrième appels d'offres), Normandie Rénovation (trois derniers appels d'offres), Quélin (premier appel d'offres) et Terh (premier appel d'offres).
196. En outre, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
197. Marché de la cathédrale de Laon (Aisne, 12 janvier 2000) attribué à Chevalier Nord : les éléments relevés sont identiques à ceux qui ont été exposés au point 192 pour le marché de l'église de Frambourg.
198. Marché de l'église de Brumetz (Aisne, 12 janvier 2000) attribué à Charpentier PM : les éléments relevés sont identiques à ceux qui ont été exposés au point 192 pour le marché de l'église de Frambourg. Par ailleurs, Chevalier Nord a déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture (déclarations précitées, point 169).
199. Marché de la Maison Baron à Amiens (Somme, 12 janvier 2000) attribué à Léon Noël : Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché, le dirigeant de Normandie Rénovation ayant reconnu que l'ensemble de ses offres en Picardie étaient de complaisance (déclarations précitées, point 171).
200. Marchés du Palais National de Compiègne (Oise, 24 novembre 1999 et 18 janvier 2000) attribués à ETPM Battais (Faber SA) : M. Z... a indiqué avoir contacté ses concurrents afin qu'ils lui laissent ce chantier (cote 4075). Le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit d'ETPM pour le marché de novembre 1999 (cote 9205). M. S... (Pradeau et Morin) reconnaît avoir déposé une offre de pure complaisance à la demande de Faber pour cet édifice (cote 4096). Par ailleurs, Chevalier Nord et Normandie Rénovation ont déposé des offres pour ces deux marchés, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, points 169 et 171). Enfin, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
201. Marché de la chapelle de Mailly-Maillet (Somme, 10 mars 2000 et 14 décembre 2000) attribué lors de la seconde consultation à Lanfry, le premier appel d'offres ayant été déclaré infructueux : les éléments relevés sont identiques à ceux qui ont été exposés au point 192 pour le marché de l'église de Frambourg.
202. Marchés de la chapelle Saint Louis à Septmonts (Aisne, 31 mars 2000), de l'église Saint-Samson à Clermont (Oise, 3 mai 2000) et du château Bullant à Chantilly (Oise, 5 mai 2000) : le directeur de Lanfry, M. I..., a indiqué avoir déposé des offres concurrentielles pour ces trois marchés, en réaction à l'entente entre Lefèvre et Terh en Haute-Normandie et afin d'éviter le licenciement de son personnel (déclarations précitées, point 173, cotes 3721 et 3722).
203. Marché de l'église d'Avrechy (Oise, 9 octobre 2000) attribué à Léon Noël : les éléments relevés sont identiques à ceux qui ont été exposés au point 192 pour le marché de l'église de Frambourg.
204. Marchés de Saint Germer de Fly (Oise, 22 mars 1999, 15 juillet 1999 et 9 octobre 2000) : le marché de juillet 1999 a été attribué à Payeux et le marché d'octobre 2000 à Léon Noël, l'appel d'offres de mars 1999 ayant été déclaré infructueux. Le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Léon Noël pour les marchés de 1999 (cotes 9212 et 9209), M. H... (Lanfry) confirmant le dépôt d'une offre de complaisance (cote 2377). Par ailleurs, Normandie Rénovation et Terh ont déposé des offres pour le marché de juillet 1999, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de leurs dirigeants à des offres de couverture (déclarations précitées, points 171 et 175). S'agissant du marché d'octobre 2000, M. U... (Léon Noël) a indiqué avoir communiqué ses prix, notamment à Normandie Rénovation, Lanfry, Faber et Charpentier PM (cote 2665), qui ont déposé des offres. Par ailleurs, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
205. Marché d'Ailly-le-Haut-Clocher (Somme, 12 octobre 2000) attribué à Charpentier PM : les éléments relevés sont identiques à ceux qui ont été exposés au point 192 pour le marché de l'église de Frambourg.
206. Marché du théâtre impérial de Compiègne (Oise, 14 décembre 2000) attribué à ETPM Battais (Faber SA) : M. Z... a indiqué lors de son interrogatoire du 6 juin 2002 avoir demandé à M. E... (groupe Lefèvre) de faire une " réponse ciblée " sur ce marché (cote 2824) avant de revenir sur ses déclarations un an plus tard (cote 4076). Normandie Rénovation a déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture (déclarations précitées, point 171). Par ailleurs, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché.
207. Marché de Coucy le Château (Aisne, 9 novembre 1999 et 16 mars 2001) attribué lors de la seconde consultation à Quélin, le premier appel d'offres ayant été déclaré infructueux : le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de Quélin pour le premier appel d'offres (cote 9207), ce que confirme M. H... (Lanfry, cote 2377). Léon Noël a répondu aux deux appels d'offre, alors que le groupe Lefèvre disposait d'accords réciproques avec Quélin en Picardie (déclarations précitées de M. E..., point 171). Par ailleurs, Chevalier Nord a déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture (déclarations précitées, point 169).
208. Marché du domaine du Temple de Vénus à Chantilly (Oise, 3 avril 2001) attribué à Léon Noël : Quélin a déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture, M. E... (M. Lefèvre) ayant par ailleurs reconnu l'existence d'accords réciproques entre les deux entreprises en Picardie (déclarations précitées, points 171 et 172).
209. Marché de la corniche des Grandes écuries à Chantilly (Oise, 28 mai 2001) attribué à Léon Noël : M. E... (M. Lefèvre) a reconnu avoir sollicité des offres de couverture pour ce chantier, notamment auprès de Faber SA (cote 2843), ce que confirme M. U..., qui précise avoir communiqué son bordereau de prix, notamment à Lanfry et à Charpentier PM (cote 2667), qui ont déposé des offres. M. N... (Quélin) a admis avoir déposé une offre de complaisance pour ce marché (cotes 3647 et 3648), de même que M. I... (Lanfry, cote 2600). Par ailleurs, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ce marché, le dirigeant de Normandie Rénovation ayant reconnu que l'ensemble de ses offres en Picardie étaient de complaisance (déclarations précitées, point 171).
210. Marché de la cathédrale de Noyon (Oise, 27 juin 2001) attribué à ETPM Battais (Faber SA) : les éléments relevés sont identiques à ceux qui ont été exposés au point 206 pour le marché du théâtre impérial de Compiègne.
211. Marchés de la cathédrale d'Amiens (Somme, 25 juin 1998, 31 janvier 2001 et 23 juillet 2001) :
212. En ce qui concerne le premier marché du 25 juin 1998, attribué à Léon Noël, le cahier Lanfry mentionne une offre de couverture au profit de cette société (cote 9201), ce que confirme M. J..., métreur de la société (cote 4142). De même, Terh a déposé une offre pour ce marché, ce qui, compte tenu de la localisation géographique de l'édifice, correspond selon les déclarations de son dirigeant à une offre de couverture (déclarations précitées, point 175).
213. Le marché du 31 janvier 2001 a été attribué à un groupement Faber SA/Charpentier PM et le marché du 23 juillet 2001 à un groupement Léon Noël/Chevalier Nord. M. D... (Chevalier Nord) a expliqué que ces deux importants appels d'offres, programmés à un court intervalle, avaient donné lieu à un accord de répartition entre les entreprises, se traduisant par la constitution de deux groupements attributaires chacun d'une tranche de travaux, les autres entreprises intervenant à titre de couverture. Il a notamment reconnu des échanges avec Léon Noël, Charpentier PM et Faber SA, et des offres de couverture émanant de Lanfry, Quélin et Normandie Rénovation (cote 3757 et 3758). L'existence de cet accord est confirmée par M. Y... (Quélin), qui précise avoir reçu le bordereau de prix de Léon Noël afin d'élaborer une réponse de couverture (cotes 3685 et 3687). De son côté, M. Z... (Faber SA) a déclaré avoir laissé M. Q... (Charpentier PM) piloter seul cette opération, après lui avoir remis une étude de prix en vue du dépôt de l'offre commune (cotes 4075 et 4076). Par ailleurs, Léon Noël et Normandie Rénovation, filiales de M. Lefèvre, ont déposé des offres séparées pour ces deux marchés, le dirigeant de Normandie Rénovation ayant reconnu que l'ensemble de ses offres en Picardie étaient de complaisance (déclarations précitées, point 171).
214. Marché de la Boissière en Thelle (Oise, 27 septembre 2001) attribué à ETPM Battais (Faber SA) : M. Z... a indiqué avoir sollicité des offres de couverture du groupe Lefèvre, de Charpentier PM et de Payeux pour ce marché (cotes 4067 et 4073).
215. Marché de la cathédrale Saint Pierre de Beauvais (Oise, 29 mai 1998, 16 juin 1998 et 19 octobre 2001) : les premier et troisième marchés ont été attribués à Pradeau et Morin, le deuxième à Terh. M. S... (Pradeau et Morin) a déclaré ne pas subir de concurrence des autres entreprises de la région sur cet édifice, dès lors que lui-même ne les concurrençait pas sur d'autres édifices (cote 4092). S'agissant des deux premiers appels d'offres, et malgré l'attribution du marché de juin 1998 à Terh, entreprise extérieure à la région, le cahier Lanfry mentionne des offres de couverture au profit de l'attributaire " habituel " des chantiers de l'édifice, Pradeau et Morin (cote 9200). S'agissant du marché d'octobre 2001, M. S... a indiqué l'existence d'échanges avec Faber SA et Charpentier PM pour leur permettre de déterminer le prix de leur offre de couverture (cote 4096). MM. Z... (Faber SA), Y... (Quélin), H... et I... (Lanfry) ont reconnu le dépôt d'offres de couverture pour ce marché (cotes 4077, 3687, 2377 et 2600). Par ailleurs, l'interception d'une conversation téléphonique entre MM. B... (Normandie Rénovation) et U... (Léon Noël) fait état de la transmission d'un bordereau de prix de la société Pradeau et Morin et de la préparation par la société Coefficient de l'offre de couverture de Léon Noël (cote 1454), ce que confirment MM. U... et E... (Lefèvre, cotes 2661 et 2842).
d) Les pratiques relevées en Aquitaine
216. Au cours de la période en litige, les sociétés Quélin, Dagand (alors filiale du groupe Eiffage) et Compagnons de Saint-Jacques, filiale du groupe Lefèvre, étaient actives dans le secteur de la restauration des monuments historiques en Aquitaine.
217. Les transcriptions des écoutes téléphoniques intervenues le 5 octobre 2001 ont fait apparaître que M. E... (groupe Lefèvre), s'adressant à M. 6..., responsable de la filiale Les Compagnons de Saint-Jacques, au sujet " du contexte de Bordeaux ", a indiqué qu'il y avait " un noyau dur parfait ", qu'ils " [faisaient] mine de se battre des fois, mais [qu'] ils [étaient] ensemble ..., [que] c'[était] Bordeaux, [qu'] ils s'entend[ai]ent parfaitement, [que] c'[était] comme Lyon, [que] c'[était] comme ailleurs. " (cotes 1428 et 1429).
218. En cours d'audition, M. N... (Quélin), a expliqué : " en réalité, de façon chronologique, la DRAC nous communique son programme annuel par chantier et les budgets correspondants. Ensuite, des réunions sont organisées (...), au cours desquelles les représentants des entreprises locales regardent leur charge de travail et émettent certains souhaits pour obtenir les chantiers qui vont venir en consultation " (cote 3629). Il a indiqué que " dans ce type de réunion, [ils s'] entend[aient] de façon à [se] positionner par rapport aux uns et aux autres sur tel ou tel marché de façon à [se] les répartir dans le temps " (cote 3633).
219. M. E... (Lefèvre) a déclaré à ce sujet : " j'ai participé personnellement à une réunion qui s'est tenue en 2000 regroupant M. F... (Quélin), 2... (Dagand) et 3.... A cette réunion, on avait conclu des accords en vue de répartir les chantiers venant en consultation sur les années à venir " (cote 2850). Cet accord prévoyait notamment que l'entreprise Compagnons de Saint-Jacques, filiale de M. Lefèvre, devait obtenir l'intégralité du marché de l'abbaye de la Sauve Majeure (16 octobre 2001) et une petite part du marché des façades de la Tour Pey Berland (24 octobre 2001) dont l'essentiel était destiné à l'entreprise Quélin (écoutes téléphoniques, cotes 1426 à 1435, audition de M. E..., cote 2850, et audition de M. N..., cotes 3629 et 3630).
220. Ainsi, la conversation téléphonique du 5 octobre 2001 interceptée entre M. E... (Lefèvre) et M. 6..., (Compagnons de saint Jacques) fait état de discussions entre la filiale du groupe Lefèvre et, d'une part, la société Dagand concernant le chantier de l'abbaye de la Sauve Majeure et, d'autre part, la société Quélin concernant le chantier de la tour Pey-Berland (cotes 1426 à 1428).
221. Une conversation téléphonique du 9 octobre 2001, interceptée entre M. E... et M. N... (Quélin) fait état de difficultés suscitées par l'accord initial de partage (cotes 1429 et suivantes). M. N... a dit : " je t'appelais pour le Sud-Ouest (...) y avait un truc, y avait une réunion, tout le monde s'est arrangé et ton gars, 6... (...) il était plus d'accord pour [Sauve Majeure] ". M. E... a répondu : " Mais la Sauve Majeure c'est un chantier à 6..., c'est un chantier aux Compagnons de saint Jacques, qu'est-ce que c'est que cette histoire ? ". M. N... a répondu : " Mais j'en sais rien moi, c'est réparti 50/50 avec Dagand ". La conversation s'est poursuivie et M. E... a dit, en faisant référence à Quélin : " ils [avec 6...] s'étaient mis d'accord depuis un an en disant la tour Pey Berland va sortir je t'en filerai un bout (...) et puis la Sauve Majeure, c'est tout ! En conséquence de ça, 6... a dit, moi je vous fous la paix sur tout le reste. ". M. E... a exposé ensuite que ce plan initial était remis en cause en raison des revendications de Dagand sur la Sauve Majeure et du choix de Quélin de travailler avec Cazenave au lieu des Compagnons de Saint Jacques sur la tour Pey-Berland. Au cours d'une seconde conversation dans la journée entre les deux hommes (cotes 1434 et 1435), M. N... a annoncé à M. E... l'intervention du directeur de l'agence de la société Quélin en Aquitaine pour " essayer d'arranger les choses avec Dagand " et a sollicité une offre de couverture sur le chantier de la tour Pey Berland.
222. M. E... a indiqué par la suite aux enquêteurs que " malgré les accords passés, on n'a pas pu se mettre d'accord au final sur le partage des travaux sur la Sauve Majeure et la tour Pey-Berland. " (cote 2851). M. N... a en substance admis la même chose (cotes 3630 à 3632).
e) Les pratiques relevées en Ile-de-France
223. Au cours de la période en litige, les sociétés Pradeau et Morin, filiale du groupe Eiffage, Degaine, filiale du groupe Vinci, Lefèvre SA, Quélin, Charpentier PM, H Chevalier Paris et GAR Rénovation étaient actives dans le secteur de la restauration des monuments historiques en Ile-de-France.
224. Au moins 29 marchés situés en région parisienne, dont les appels d'offre se sont déroulés entre le 12 janvier 1996 et le 1er mars 2000, ont été recensés dans le " cahier Lanfry " mentionné ci-dessus. Apparaissent ainsi dans la colonne des " adjudicataires " du cahier, qui correspond selon les déclarations des dirigeants de la société Lanfry, aux entreprises ayant bénéficié d'une offre de couverture de cette société :
- l'entreprise Lefèvre SA, qui est mentionnée à dix reprises en ce qui concerne des marchés en Ile-de-France entre 1994 et 1999 (13) ;
- l'entreprise Quélin, qui est mentionnée à dix reprises en ce qui concerne des marchés en Ile-de-France entre 1995 et 2000 (14) ;
- l'entreprise H Chevalier Paris, qui est mentionnée à huit reprises en ce qui concerne des marchés en Ile-de-France entre 1997 et 1999 (15) ;
- l'entreprise Faber, qui est mentionnée à une reprise (16).
225. M. A..., président de la société Lanfry a indiqué avoir procédé à des échanges avec M. Q..., dirigeant de l'entreprise Charpentier PM : " Comme pour M. Z..., je le rencontre à l'occasion de réunions parisiennes, nous évoquons parfois des marchés mais sans rentrer dans le détail des prix " (cote 3721). M. Q... a confirmé cette déclaration (cote 2574).
226. S'agissant du groupe Lefèvre, M. G..., tout en précisant ne pas en connaître les détails, a reconnu l'existence d'échanges d'informations auxquels participait l'agence de la société Lefèvre SA de Gennevilliers, en région parisienne. Il a précisé que : " ces échanges d'informations préalables aux dépôts des plis ne sont pas systématiques " (cote 3020). M. E..., au cours d'une conversation téléphonique intervenue le 23 octobre 2001, a confié à son interlocuteur regretter n'avoir pas eu le temps de contacter ses concurrents pour les couvrir sur les marchés de Conflans-Sainte-Honorine et de Marly (cote 1443).
227. Les enquêteurs ont saisi au domicile de M. C..., dirigeant de l'entreprise Payeux, un fax en provenance de l'entreprise Lefèvre en date du 18 juillet 2001, communiquant le bordereau de prix de cette entreprise concernant le chantier de l'église de Saint Eustache à Paris (cote 16.730 et 16.745 et s.). M. C... a reconnu avoir apporté sa couverture à l'entreprise Lefèvre sur ce chantier. Il a précisé qu' " ... à chaque fois que Lefèvre [lui] envoy[ait] ce type de documents, il s'agiss[ait] toujours d'édifices en région parisienne " (cotes 4051, et 5006 à 5007).
f) Les pratiques relevées en Bourgogne
228. Au cours de la période en litige, les sociétés Jacquet, filiale du groupe Lefèvre, la SNC SAC (devenue Pateu & Robert), filiale du groupe Vinci, et Hory-Marçais, filiale du groupe Eiffage, étaient actives dans le secteur de la restauration des monuments historiques en Bourgogne.
229. Les éléments relevés s'agissant de la région Bourgogne reposent sur les écoutes téléphoniques de conversations entre M. 7..., dirigeant de la société Pateu & Robert, et M. E..., cadre-dirigeant du groupe M. Lefèvre. Au cours d'une conversation téléphonique intervenue le 9 novembre 2001 (cote 1569 et s.), M. E... discute avec son concurrent du niveau des offres déposées par la filiale de M. Lefèvre mais aussi par les autres entreprises de la région pour l'attribution du marché de l'église Saint-Michel de Dijon. Il propose de laisser à l'entreprise Jacquet (Lefèvre) le marché de Saint-Michel à Dijon, en échange du marché de l'hôtel de ville d'Autun : " si tu peux avoir Autun et que Jacquet garde Saint Michel, ce sera parfait pour l'avenir " (cote 1570). Cette conversation téléphonique intervient après le dépôt des offres pour le marché de Saint-Michel à Dijon et les intéressés essaient de trouver les moyens de " rattraper " une erreur plaçant Pateu & Robert en meilleure position que Lefèvre pour ce chantier. Au cours d'une conversation téléphonique intervenue le 14 novembre 2001, M. 7... rend compte à M. E... des démarches entreprises auprès du maître d'ouvrage pour se retirer du chantier, motif pris d'une erreur commise sur les prix de la fourniture de pierres (cote 1576). Au cours d'une audition, M. E... (Lefèvre) explique à ce sujet : " à l'issue de la consultation, Jacquet [Lefèvre] était 3ème en dessous de l'enveloppe. J'ai eu des contacts avec 7... (Pateu et Robert) pour que les entreprises situées devant moi [fassent en sorte] que je puisse remporter ce marché. Dans ces conversations, je fais un inventaire des arguments que ces entreprises pourraient mettre en avant pour s'éliminer (...) Au final, Pateu et Robert s'est manifesté dans un premier temps auprès du maître d'ouvrage pour se désister. Puis peu de temps après, il s'est remis sur les rangs et je n'ai pas eu le marché " (cote 2852).
g) Les pratiques relevées en Lorraine
230. Au cours de la période en litige, les sociétés Léon Noël, filiale du groupe Lefèvre, la SNC Chanzy & Pradoux, filiale du groupe Vinci, et Hory Chauvelin étaient actives dans le secteur de la restauration des monuments historiques en Lorraine.
231. Au cours de son audition, et sur la base des écoutes téléphoniques intervenues, M. E... a déclaré qu'une réunion avec les entreprises SNC Chanzy & Pradoux et Hory Chauvelin avait permis de répartir les marchés à intervenir en 2001 mais que cette dernière, malgré les accords passés, n'avait pas respecté ses engagements (cote 2852). Les transcriptions d'écoutes téléphoniques intervenues le 29 novembre 2001, font apparaître que M. E... considère que l'entreprise Hory-Chauvelin " a piqué " à ses concurrents les marchés de Saint Mihiel et de Commercy en région Lorraine (cotes 1587 et 1588).
232. Par ailleurs, M. B..., responsable de l'entreprise Normandie Rénovation, filiale de M. Lefèvre, a déclaré qu'il était arrivé à M. E... de lui demander de répondre en couverture dans le département de la Moselle (cote 2639).
h) Les pratiques relevées en Champagne-Ardenne
233. Au cours de la période en litige, les sociétés Léon Noël, filiale du groupe Lefèvre, Hory- Marçais, Chatignoux et Charpentier PM étaient actives dans le secteur de la restauration des monuments historiques en Champagne-Ardenne.
234. Le " cahier Lanfry " recense au moins cinq offres de couverture au profit de l'entreprise Léon Noël en 1996, 1997 et 1999 (17).
235. Par ailleurs, au cours d'une conversation téléphonique entre M. E... et le dirigeant de Léon Noël intervenue le 12 décembre 2001, au sujet d'un marché pour lequel l'entreprise Léon Noël n'avait pas été retenue, le premier a fait valoir à son interlocuteur qu'ils auraient dû appeler le concurrent attributaire, l'entreprise Chatignoux, " pour tenir l'espace ". M. E... a en outre approuvé son interlocuteur lorsque celui-ci lui a dit : " pour les trois appels d'offres qu'il y a en 2002, dans l'Aube, c'est vrai qu'il faut essayer de faire un rapprochement ..., qu'on ait au moins chacun une affaire " (cote 1600). Les transcriptions des écoutes téléphoniques intervenues le 6 décembre 2001 ont également fait apparaître que M. E... avait précisé à son interlocuteur qu'il pouvait " réclame[r] " le marché d'Ervy-le-Chatel (10), dans la mesure où c'était son " tour " (cote 1595). Au cours de son audition, M. E... a précisé que le responsable du secteur en question " aurait dû rencontrer SNBR et Charpentier pour procéder à une répartition des marchés à venir selon [ses] directives ", que toutefois, ce responsable " a quitté l'entreprise et n'a pas rencontré les entreprises ", que " finalement, il n'y a pas eu de partage, chacun a fait son prix " (cote 2853).
236. Lors d'une conversation téléphonique intervenue le 9 novembre 2001 concernant les difficultés rencontrées sur la région Bourgogne, M. E... a déclaré à son interlocuteur, au sujet de l'entreprise Hory-Marçais, accusée de ne pas respecter les accords convenus : " en Champagne Ardenne, on l'a un peu chargé " (cote 1573).
237. M. Q..., dirigeant de l'entreprise Charpentier PM, a quant à lui déclaré se souvenir " d'avoir contacté M. Lecaille, qui [lui] a remis un prix de Léon Noël pour soumissionner sur la cathédrale de Reims en décembre 2001 ou janvier 2002 " (cote 2574). Il a confirmé avoir déposé une offre de couverture devant le juge d'instruction (cote 6421). Léon Noël a remporté le marché devant plusieurs entreprises dont Charpentier PM (50 000 euro, soit 20 % d'écart).
i) Les pratiques relevées dans le Nord-Pas-de-Calais
238. Au cours de la période en litige, les sociétés Payeux et Chevalier Nord étaient actives dans le secteur de la restauration des monuments historiques dans le Nord-Pas-de-Calais.
239. M. C..., président de la société Payeux a reconnu que les entreprises de la cellule régionale du Nord-Pas-de-Calais se réunissaient deux à trois fois par an, à l'initiative de M. D..., dirigeant de la société Chevalier Nord, afin d'évoquer le programme des consultations et de procéder à une répartition des marchés à venir entre les différents participants (cotes 4054 et 4055).
240. Interrogé quant aux modalités de partage des marchés, il a indiqué aux enquêteurs : " la répartition était faite selon les critères suivants : certaines entreprises réalisaient des pré-études et étaient de ce fait avantagées par rapport aux concurrents. Il pouvait également s'agir d'une poursuite de chantier, c'est-à-dire une consultation relative à des tranches supplémentaires (...) Enfin, cette répartition est fonction des plans de charge des entreprises (...) A la suite des répartitions qui sont faites dans le cadre des réunions de groupement, l'entreprise pressentie envoie le fax de couverture aux entreprises concernées par l'appel d'offres " (cote 4056).
241. M. Z..., dirigeant de l'entreprise Faber, a dit savoir qu'il existait sur le Nord-Pas-de-Calais des pratiques consistant à répartir les marchés (cote 4071). Il a indiqué toutefois qu'il ne participait pas aux réunions de la cellule locale du GMH, " à une ou deux exceptions près en 2000 et 2001 ", mais qu'il était tout à fait possible qu'il ait indiqué à M. D..., de l'entreprise Chevalier Nord, les marchés qui l'intéressaient particulièrement, et que ce dernier en ait fait part aux réunions. Sur la mise en œuvre du système de couverture en Picardie et Nord-Pas-de-Calais, M. Z... a reconnu qu'il " demandait, de temps en temps, des coups de main, mais qu'[il] ne participait pas pour autant à des réunions de partage ", et qu'il lui " [était] également arrivé de donner un coup de main à des confrères en répondant en couverture " (cotes 4072 et 4073).
242. Les enquêteurs ont saisi au domicile de M. C..., dirigeant de l'entreprise Payeux, des télécopies émanant, avant la date limite de dépôt des offres, d'entreprises concurrentes et comprenant des bordereaux de prix concernant les marchés de l'église Saint-Martin à Auxi-le-Château et de l'église de Barlin (cotes 16.730 et s.).
243. S'agissant d'un bordereau de prix émanant de la société Faber (cotes 16.740 à 16.744), M. Z... a déclaré avoir sollicité de l'entreprise Payeux une offre de couverture sur le chantier de la commune de Barlin en 2001 (cotes 4067 et 4985). M. C... (Payeux) a reconnu avoir déposé une offre de couverture à la demande et en faveur de la société Faber sur ce chantier (cotes 4051 et 5007).
244. S'agissant de la télécopie en date du 29 juin 2001 émanant de l'entreprise Chevalier Nord, celle-ci comprend le détail de l'offre que cette entreprise s'apprêtait à déposer avant la date limite de soumission sur le chantier de l'église Saint-Martin à Auxi-le-Château (cote 16.730 à 16.739). M. C... a précisé : " ce document était un document qui m'a été transmis pour réaliser une offre de couverture " (cote 4052). Par ailleurs, M. Z... a déclaré que M. D... (Chevalier Nord) avait pris contact avec lui pour obtenir une offre de couverture sur ce chantier, demande à laquelle il a accédé (cote 4068).
245. Par ailleurs, les dirigeants des entreprises concernées ont reconnu que les entreprises Léon Noël, filiale du groupe Lefèvre, et Payeux avaient couvert l'entreprise Chevalier Nord sur le marché de la cathédrale de Saint-Omer. M. U... (Léon Noël) a indiqué " je reconnais que l'entreprise Chevalier Nord m'avait transmis directement un bordereau de prix pour que nous puissions couvrir cette entreprise sur le marché de la cathédrale de St Omer, en répondant au dessus du prix de Chevalier Nord " (cote 2661, voir aussi cote 2664). M. K..., du bureau d'études Coefficient, a confirmé, en commentant des conversations avec M. U... au sujet de ce chantier : " il s'agit une nouvelle fois de la réalisation d'une offre de couverture réalisée par Coefficient à la demande de l'entreprise cliente " (cote 2778). M. D... (Chevalier Nord) a admis avoir fourni un bordereau de prix à M. U... (cotes 3754 et 3755). Enfin, M. C... (Payeux) a reconnu avoir déposé une offre de couverture (cote 4060).
246. Enfin, le " cahier Lanfry " recense huit offres de couverture sur des marchés situés en région Nord-Pas-de-Calais entre le 26 janvier 1996 et le 19 février 1999. Ces offres étaient notamment destinées à couvrir l'entreprise Payeux sur sept marchés (18) et l'entreprise Chevalier Nord sur un marché (19).
j) Les pratiques relevées en Pays-de-la-Loire
247. Au cours de la période en litige, les sociétés Lefèvre SA, Dagand, filiale du groupe Eiffage, et Pavy étaient actives dans le secteur de la restauration des monuments historiques en Pays-de-la-Loire.
248. M. 5..., dirigeant de l'entreprise Pavy, a déclaré au cours de son audition par les enquêteurs s'être entendu avec l'agence de la société Lefèvre au Mans pour répondre aux deux appels d'offres du chantier de l'église de la Visitation au Mans en 1999 : " (...) je me suis entendu avec un confrère Lefèvre pour répondre en groupement sur deux chantiers sur Le Mans. (...) Et face au groupement les confrères n'ont pas répondu, parce qu'on leur avait demandé de ne pas répondre. (...) Pour ma part, j'ai contacté quelques confrères : Dagand et Terh Normandie, Quélin entre autres. Certains n'avaient pas le dossier donc n'ont pas eu à se positionner. Certains n'ont pas répondu suite à mon coup de fil ou pour une autre raison. Et d'autres ont répondu au prix que je leur avais indiqué. Cela m'a permis de décrocher le marché à 2,5 MF " (cotes 3047, 3048). Il a indiqué que le responsable de Lefèvre, M. 8..., " a vraisemblablement procédé de la même sorte en contactant d'autres confrères " (cote 3048).
249. M. G... (Lefèvre), interrogé sur la connaissance qu'il avait des ententes pratiquées par les agences de la société Lefèvre SA à Giberville (Basse-Normandie), Gennevilliers (Ile-de-France) et Arnage (Pays-de-la-Loire), a répondu : " je suis informé de l'existence de ces pratiques et de l'implication de mes directeurs. Je sais également que ces échanges d'informations préalables aux dépôts des plis ne sont pas systématiques " (cote 3020).
250. Enfin, le " cahier Lanfry " recense treize offres de couverture sur des marchés situés en région Pays-de-la-Loire entre le 26 février 1996 et le 16 mars 1999. Ces offres étaient notamment destinées à couvrir l'entreprise Pavy sur 8 marchés (20), l'entreprise M. Lefèvre sur 3 marchés (21) et l'entreprise Dagand (22) sur 2 marchés.
k) Les pratiques relevées en Auvergne
251. Au cours de la période en litige, les sociétés Dagois et Jacquet, respectivement filiales des groupes Eiffage et Lefèvre, étaient actives dans le secteur de la restauration des monuments historiques en Auvergne.
252. En cours d'audition, interrogé quant au sens d'une conversation téléphonique interceptée le 18 décembre 2001, M. B... (Normandie Rénovation, filiale de M. Lefèvre) a déclaré : " M. E... m'avait demandé de prendre des dossiers en région Auvergne et de faire une réponse aux consultations en couverture. Les prix me sont communiqués par Coefficient, je ne sais même plus de quels marchés il s'agissait et j'ignore quelle était la société pressentie sur ces dossiers... " (cote 2639).
l) Les pratiques relevées en Rhône-Alpes
253. Au cours de la période en litige, les sociétés Compagnons de Saint Jacques, filiale du groupe Lefèvre, ainsi que les groupes Eiffage et Vinci, étaient actifs dans le secteur de la restauration des monuments historiques en Rhône-Alpes.
254. Les transcriptions des écoutes téléphoniques intervenues le 5 octobre 2001 ont fait apparaître que M. E... (groupe Lefèvre), en s'adressant au responsable de la filiale Compagnons de Saint-Jacques, au sujet du " contexte de Bordeaux ", a indiqué que " [qu'] ils s'entend[ai]ent parfaitement, [que] c'[était] comme Lyon, [que] c'[était] comme ailleurs. " (cotes 1428 et 1429). Quelques semaines plus tard, il a fait savoir à un employé de l'entreprise Léon Noël, filiale du groupe Lefèvre, qu'il avait repris Lyon parce qu'il y avait " quelques petits soucis " (cote 1599).
4. L'ÉVOLUTION DES PRIX OBSERVÉE
Les éléments relevés dans le cadre de l'information judiciaire
255. La comparaison des prix des marchés attribués au cours de la période de mise en œuvre, les pratiques et, ceux des marchés attribués au cours de la période qui a suivi l'ouverture de l'instruction pénale et les premières auditions des dirigeants d'entreprises permet de constater une baisse des prix pour les trois régions Haute-Normandie, Basse-Normandie et Picardie.
256. Au cours de la période du 1er janvier 1999 au 30 novembre 2002, l'index BT 14, publié au BOCCRF et qui permet de suivre l'évolution des prix de revient dans le secteur, a connu une progression continue de 8,6 %, seuls les mois de septembre 1999 et de septembre 2002 ayant enregistré une évolution négative (rapport de synthèse de la DGCCRF, cote 5914).
En Haute-Normandie
257. En Haute-Normandie, le différentiel entre les prix des marchés attribués et les estimations des maîtres d'œuvre, calculé par les services d'enquête de la DGCCRF à partir des données fournies par la DRAC pour l'ensemble des consultations lancées par cette direction, est passé de -3,6 % entre décembre 1996 et novembre 2001 à -19,2 % entre mars 2002 et mars 2003 (cote 5912 et 4340 à 4342).
258. Interrogés quant à ces évolutions, MM. 9... et 10..., ingénieurs de la DRAC de Haute-Normandie, ont apporté les précisions qui suivent : " pour certaines opérations, les prix remis par les entreprises [depuis mars 2002] se situent nettement en dessous des estimations produites par les maîtres d'œuvre. Nous constatons également l'arrivée sur notre zone d'intervention d'entreprises nouvelles (...). De plus, certaines entreprises, qui auparavant répondaient de manière très ponctuelle à nos consultations, proposent des offres d'un niveau compétitif et approchant celui atteint par les entreprises locales (...). Cette baisse de prix et l'arrivée d'entreprises nouvellement compétitives coïncide avec un changement des entreprises habituelles sur certains édifices. (...) Nous remarquons que ces baisses de prix, qui sont importantes, affectent les travaux annexes aux prestations principales comme la taille de pierres ". Quant à une éventuelle baisse de la qualité des prestations rendues : " sur les marchés exécutés, nous n'avons rien constaté de la sorte. Pour les chantiers à venir, ces baisses de prix n'affectent pas les prestations principales et la qualité devrait être maintenue. Nous avons le sentiment que les entreprises disposaient de marges confortables qui leur permettent actuellement de procéder à des baisses importantes liées à un durcissement de la concurrence ". Quant à une éventuelle baisse des prix liée aux variations des volumes de travaux programmés : " II y a eu un " gel républicain " suite au résultat des élections de 2002. Cela signifie que les crédits ont été bloqués pendant plusieurs mois. Ces crédits nous ont été réaffectés presque en totalité. Nous savons maintenant que les crédits programmés pour 2003 subissent une diminution de l'ordre de 5 %. Toutes les opérations antérieures, qui s'exécutent sur plusieurs années (Saint Maclou) sont confirmées et seront exécutées selon les prévisions ". Enfin, interrogés quant aux évolutions constatées suite aux premières mises en examen en mai 2002 : " nous avons constaté surtout lors des derniers appels d'offres, une baisse sensible des offres des entreprises comparativement aux appels d'offres précédents. Cette baisse a pour effet de dégager des reliquats financiers importants qui permettront d'engager des opérations de restaurations nouvelles qui, sans ces reliquats, n'auraient pas trouvé de financement à court terme. Nous avons pu constater la même diminution sur des opérations ne relevant pas de la maîtrise d'ouvrage de la DRAC. C'est le cas de l'appel d'offres mené par la ville d'Evreux sur le beffroi où les économies importantes permettront de financer plus de 50 % de travaux supplémentaires. (...) Nous ne pouvons pas dire si ces baisses sont la conséquence des enquêtes en cours mais il n'existe, à notre connaissance, pas d'autres raisons techniques ou autres pour expliquer ce phénomène qui est d'ailleurs concomitant avec l'enquête que vous évoquez " (cote 4292).
En Basse-Normandie
259. En Basse-Normandie, le différentiel entre les prix des marchés attribués et les estimations des maîtres d'œuvre, calculé par les services d'enquête de la DGCCRF à partir des données fournies par la DRAC pour l'ensemble des consultations lancées par cette direction, est passé de -10 % entre mars 1999 et février 2002 à -27,8 % entre mars 2002 et mai 2003 (cotes 5911 et 4335 à 4337).
260. Interrogé quant à ces évolutions, M. 11..., conservateur régional des monuments historiques en Picardie, a apporté les précisions qui suivent : " j'ai constaté que depuis environ l'été 2002, nous avions beaucoup moins d'appels d'offres infructueux. De même, j'avais constaté une baisse importante des prix remis par les candidats par rapport aux estimations. J'évalue cette baisse à environ 30 % voire parfois 40 %. De nombreuses fois, cette baisse n'est pas seulement le fait d'une seule entreprise ; ces baisses importantes émanent parfois de tous les candidats sur le même chantier. Toutes les entreprises de la région pratiquent de la même façon en baissant leurs prix dans des proportions importantes ". Quant à une éventuelle baisse des prix liée aux variations des volumes de travaux programmés : " depuis peu de temps, nous avons des comptes-rendus de chantier beaucoup plus détaillés et ceux ci ne font pas apparaître de problèmes graves ". Quant à une éventuelle baisse des prix liée aux variations des volumes de travaux programmés : " En Basse-Normandie, nous essayons progressivement d'augmenter le volume des travaux programmés. C'est ce qui s'est passé à partir de 2001. Cette augmentation des crédits s'explique également par le volume de travaux généré par la tempête de 1999. Les travaux correspondants continuent à être mis en œuvre et cela jusqu'en 2004. Je ne vois pas de corrélation entre les baisses de prix décrites ci-dessus et l'augmentation du volume de travaux. L'an dernier, j'ai augmenté les engagements de 22,5 % et la consommation des crédits de paiement de 36,5 %. Cela suit une augmentation de 20 % en 2001. D'avril 2002 à avril 2003, les engagements ont augmenté de 7 % ". Enfin, interrogé quant au moment auquel est intervenue cette évolution : " j'ai constaté ce " décrochement " au printemps 2002. Ce n'est que vers l'été 2002 que le caractère systématique de ces baisses de prix m'est apparu " (cotes 4301 à 4303).
En Picardie
261. En Picardie, le différentiel entre les prix des marchés attribués et les estimations des maîtres d'œuvre, calculé par les services d'enquête de la DGCCRF à partir des données fournies par la DRAC pour l'ensemble des consultations lancées par cette direction, est passé de + 0,5 % entre février 1998 et février 2002 à -16 % entre avril 2002 et avril 2003 (cotes 5912 et 4337 à 4340).
262. Interrogé quant à ces évolutions, M. 12..., conservateur régional des monuments historiques en Picardie, a apporté les précisions qui suivent : " des entreprises non habituées à nos consultations se manifestent et proposent des offres qui s'avèrent souvent compétitives. (...) Il semble que l'attitude de l'entreprise Payeux dans les réponses à nos consultations ait changé. D'abord, il répond plus fréquemment et de manière compétitive. (...) Les prix baissent de façon très sensible et pour l'ensemble des concurrents. Pour ma part, je ne vois pas d'explications techniques particulières si ce n'est une modification des politiques d'entreprises. (...) Cette réactivation de la concurrence se traduit par un changement de titulaire de marché pour certains édifices " (cote 4284).
Les éléments relevés par l'IGAAC
263. Dans son rapport de décembre 2007 (cote 19648 et s.), l'inspection générale de l'administration des affaires culturelles (IGAAC) du ministère de la Culture et de la Communication a procédé à une évaluation similaire de l'évolution des prix des marchés entre la période 1999-2001 et la période 2002-2004, pour les seules entreprises dont les dirigeants avaient été mis en cause dans le cadre de l'instruction judiciaire ouverte devant le Tribunal de grande instance de Rouen.
264. Les données de l'IGAAC font également apparaître une nette baisse des prix entre les deux périodes. L'écart constaté entre le montant des marchés attribués et l'estimation de la maîtrise d'ouvrage passe ainsi de -3,83 % à -24,5 % en Haute-Normandie, de -8,96 % à -24,8 % en Basse-Normandie, et de -2,23 % à -16,1 % en Picardie.
265. Les baisses de prix relevées par l'IGAAC sont récapitulées dans le tableau suivant (cote 19657) :
<emplacement tableau>
266. Outre cette baisse globale des prix, le rapport de l'IGAAC relève la baisse des prix unitaires des prestations fournies par certaines entreprises à partir de 2002.
267. La DRAC de Basse-Normandie estime ainsi que la baisse de prix est comprise entre 20 et 25 % en matière de maçonnerie, avec des fluctuations importantes d'une consultation à l'autre (cote 19659). Selon les éléments fournis par cette direction, les prix de la taille de parements unis et moulurés sur la pierre facturés par l'entreprise Lefèvre passent de 290 et 434 euro respectivement en 2001 (chantier de la cathédrale de Bayeux) à 159,80 et 319,60 euro respectivement en 2003 (chantier de l'Hôtel-Dieu de Bayeux). Les prix de maçonnerie de moellons facturés par l'entreprise Dagand passent de 927,08 euro en 2000 (remparts du château de Bricquebec) à 589,56 euro en 2002 (même édifice).
268. Les éléments fournis par la DRAC de Haute-Normandie font également apparaître une forte baisse des prix facturés par certaines entreprises pour une même prestation après 2002 (cote 19660). Les prix de la taille de pierre facturés par l'entreprise Terh pour la restauration du bras Sud du transept de l'église Saint Jacques de Dieppe en 2003 sont ainsi inférieurs de 12,2 % à 34,6 % selon la nature de la pierre et du parement aux prix facturés par l'entreprise Normandie Rénovation pour la restauration du bras Nord du transept de cette église en 1998. Symétriquement, les prix de la taille de pierre facturés par l'entreprise Normandie Rénovation pour la restauration de la tour de Beurre de la cathédrale Notre- Dame de Rouen en 2004 sont inférieurs de 24,6 % à 51,3 % selon la nature de la pierre et du parement aux prix facturés par l'entreprise Terh pour la restauration de la même tour en 1999.
269. Le rapport de l'IGAAC conclut que " sur la base des éléments dont dispose [l'auteur du rapport], il ne paraît pas possible de chiffrer le préjudice certain que l'Etat a subi (...). Il n'en demeure pas moins que les données rassemblées peuvent constituer de solides arguments pour estimer que l'Etat a subi un préjudice qui, dans certains cas, avoisine les 30 % " (cote 19661).
D. LES GRIEFS NOTIFIÉS
270. Sur la base des constatations qui précèdent, par lettre du 26 janvier 2009, le rapporteur général a notifié les griefs suivants :
" Au niveau régional :
En Haute-Normandie :
Aux sociétés M. Lefèvre, Terh, Dagand, Pradeau et Morin,
D'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de Beaumont le Roger du 22 avril 1998 ;
aux sociétés M. Lefèvre et Lanfry
D'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment, sur les marchés suivants :
le marché de la chapelle des Flots à Ste Adresse du 22/07/1998 ;
le marché de Bertreville sur Odon du 8/09/1998 ;
le marché de l'église de la Feuillie du 12/04/1999 ;
le marché de l'église de Ste Marguerite sur Mer du 17/05/1999 ;
le marché de l'abbaye de Valmont en juin 1999 ;
le marché du collège des Oratoriens de Dieppe du 5/07/1999 ;
le marché du Gros Horloge à Rouen des 10/03/1998, et 16/01/2001 ;
le marché de St Sauveur d'Emalleville du 24/01/01 ;
le marché de l'Eglise de Norville du 22/10/2001 ;
le marché du petit théâtre à Dieppe du 20/11/2001 ;
le marché de l'église Notre dame des Anges à Bihorel du 29/11/2001 ;
les marchés de l'église d'Ourville en Caux des 18/07/01 et 5/01/02.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Terh, Quélin,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment, sur le marché suivant :
le marché de la cathédrale de Rouen, façade Ouest de tour de Beurre du 1er/04/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Terh, Chevalier Nord,
D'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de la cathédrale de Rouen, façade Ouest de tour de beurre du 22/12/00,
le marché de l'église St Rémy de Dieppe du 28/09/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Terh,
D'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
les marchés du château d'Eu, aile des ministres des 1er/03/01, 12/10/00 et 31/10/01 ;
le marché de l'Abbaye de Fontaine Guérard à Radepond du 28/02/2001 ;
le marché de l'Eglise Notre Dame à Arques la Bataille du 27/05/01 ;
le marché de la maison de l'armateur au Havre du 29/05/01 ;
le marché de l'abbatiale St Ouen à Rouen des 13/02/1997 et 13/09/01 ;
le marché de l'Abbaye de Fontaine Guérard à Radepont les 28/02/2001 et 13/11/2001 ;
le marché de l'église St Jean-Baptiste de Bléville 19/12/2001 ;
le marché d'entretien de la ville de Rouen du 30/01/02.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Terh et Dagand,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché du clocher de la Basilique Notre Dame de la Couture à Bernay, courant avril 2001 ;
les marchés des Andélys à Château Gaillard des 25/05/1999 et 15/10/01 ;
les marchés de l'église St Rémy de Dieppe des 28/07/98 et 28/09/01 ;
le marché de l'église St Rémy de Dieppe du 28/07/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Dagand,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
les marchés de l'église St Jacques à Dieppe du 14/04/97 au 7/12/99 ;
le marché de Quilleboeuf du 25/05/1999 ;
le marché des murs de l'Abbaye de Jumièges du 15/11/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Pradeau et Morin,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir ainsi empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de St Martin de Nonancourt du 15/09/1999.
Aux sociétés M. Lefèvre, Quélin,
D'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de la cathédrale de Rouen (restauration des parties hautes de la façade Ouest de la nef du 28/10/1999 ;
le marché de la cathédrale de Rouen (galerie supérieure de la partie centrale) du 12/12/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Dagand,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché du Prieuré de Graville à Le Havre du 5/07/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Chevalier Nord,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de la cathédrale du Havre du 21/11/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Terh,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offre avant le dépôt des offres s, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché du théâtre gallo-romain à Lillebonne du 22/12/00 ;
le marché du château de Mesnières en Bray du 31/07/2001 ;
le marché de l'église St Vincent à Le Havre du 8/01/2002.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Terh, Dagand, Chevalier Nord,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché du château d'Harcourt du 22/11/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Chevalier Nord,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché d'Ancretieville St Victor du 7/06/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Charpentier PM, Chevalier Nord,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de St Maclou du 26/07/2001.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Dagand, Charpentier PM, Terh,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le chantier des murs de l'abbaye de Jumièges du 15/11/2001.
Aux sociétés Lanfry, Terh,
d'avoir, en Haute-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'Eglise de Thomer La Sogne des 8/01/01 et 19/10/01.
En Basse-Normandie :
Aux sociétés M. Lefèvre, Pavy, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de l'Abbaye aux Hommes à Caen du 16/12/1997 ;
le marché de restauration des piles du transept à St Ceneri le Géréi des 18/10/99 et 21/02/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'Abbaye aux Dames à Caen du 12/10/1998.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de Chenu du 29/10/1998.
Aux sociétés M. Lefèvre, Pavy,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de l'église de St Pierre de Tinchebray du 7/11/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Dagand,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de St Germain la Blanche Herbe du 28/10/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Dagand,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres avant le dépôt des offres, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'ancien couvent des dominicaines à Pont L'Evêque du 13/11/98.
Aux sociétés M. Lefèvre Dagand, Terh,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de l'église de St Etienne de Caen du 13/11/98 ;
le marché du château de Briquebec des 16/04/99 et 19/05/00 ;
le marché de la cathédrale de Bayeux du 8/02/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Quélin, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché du château de Tourlaville du 9/07/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, Dagand, Degaine, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de l'église de St Pierre à Coutances du 9/07/1999 ;
les marchés du Mont St Michel du 23/07/99 au 9/08/99 et le 13/02/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Dagand, Degaine, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
les marchés du Mont St Michel, entre le 3/01/00 et le 8/02/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Pavy, Quélin, Terh Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de St Pierre de Lisieux du 28/07/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, Pavy, Dagand, Quélin, Degaine, Bodin, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché du château de Fresney le Puceux du 9/10/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, Dagand, Quélin, Bodin,
d' avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché du donjon de Chambois du 31/10/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Dagand, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir ainsi empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de la cathédrale de Coutances du 13/11/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Quélin, Dagand, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église Notre Dame de Guibray du 16/11/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Pavy, Quélin, Bodin, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché du grenier à sel d'Honfleur du 15/12/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Pavy, Dagand, Quélin, Bodin, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'IMEC Abbaye d'Ardenne St Germain la Blanche Herbe du 5/01/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Pavy, Dagand, Quélin, Bodin, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offre avant le dépôt des offres s, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants:
le marché du domaine de la Baronnie, Bettreville sur Odon des 13/10/99 et 19/01/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Pavy, Dagand, Quélin, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de la cathédrale de Sees du 12/11/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Pavy, Dagand, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'abbaye d'Hambye du 13/03/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Pavy, Dagand, Quélin, Terh, Lanfry,
D'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'entretien de la ville de Caen du 20/11/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Bodin, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence sur le marché suivant :
les marchés du château de Canisy des 9/07/99 et 12/02/02.
Aux sociétés, Pavy, Dagand, Terh,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'abbaye d'Hambye du 3/03/99.
Aux sociétés Pavy, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché du château de Crève Coeur en Auge du 6/03/00.
Aux sociétés Bodin, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché des ruines d'Alauma Valognes du 30/03/99.
Aux sociétés Quélin, Lanfry,
d'avoir, en Basse-Normandie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir de s'être ainsi réparti les marchés empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de Carpiquet du 9/10/1998.
En Picardie :
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais devenue Faber SA, Lanfry, Quélin, Charpentier PM,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de la maison Greber du 16/02/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Charpentier PM, Terh,
D'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de l'église St Vulfran à Abbeville du 15/07/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Lanfry, Charpentier PM, Terh, Chevalier Nord, Quélin,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de l'église St Antoine à Compiègne du 16/07/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Lanfry, Charpentier PM, Terh, Chevalier Nord, Payeux,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le château de Rambures du 22/07/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Charpentier PM, Pradeau et Morin, Payeux,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de l'église de Marles du 19/07/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Charpentier PM, Pradeau et Morin, Payeux, Chevalier Nord,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché des saintes hosties à Marseille en Beauvaisis du 24/11/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Charpentier PM, Terh, Payeux,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église d'Ault du 15/07/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Chevalier Nord, Charpentier PM, Terh, Quélin,
D'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de Marquemont à Monneville du 20/07/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, Chevalier Nord, Charpentier PM, Pradeau et Morin, Quélin,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de Marquemont à Monneville du 5/11/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, ETPM Battais, devenue Faber SA, Chevalier Nord, Charpentier PM, Pradeau et Morin,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de Marquemont à Monneville du 10/01/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Chevalier Nord,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de Marquemont à Monneville du 23/06/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Payeux,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de St Germer de Fly du 22/03/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Terh, Payeux,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de St Germer de Fly du 15/07/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Lanfry, Charpentier PM,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de St Germer de Fly du 9/10/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenueFaber SA, Lanfry, Charpentier PM,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché des Grandes Ecuries à Chantilly du 28/05/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Chevalier Nord,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de l'église de St Martin de Lierville du 20/07/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de l'église de Neuilly sous Clermont du 15/11/99 ;
le marché de l'église St Frambourg à Senlis du 13/12/99 ;
le marché de Mailly Maillet des 10/03/2000 et 14/12/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Chevalier Nord, Quélin,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de l'église de Gamaches du 1er/12/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, Chevalier Nord,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de la cathédrale de Laon du 12/10/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Charpentier PM,
D'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de la chapelle St Esprit à Rue du 1er/12/98 ;
le marché de l'église de Brumetz du 12/01/00 ;
le marché de Ailly le Haut Clocher du 12/10/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, Charpentier PM, Chevalier Nord, Payeux,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de la basilique d'Albert du 2/06/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, Lanfry, Terh, Quélin, Chevalier Nord,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
les marchés de l'église de Varinfroy des 24/02/98, 12/07/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenueFaber SA, Chevalier Nord, Quélin,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de Vic sur Aisne du 17/12/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Lanfry, Charpentier PM, Chevalier Nord,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres avant le dépôt des offres, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché du Palais National de Compiègne du 24/11/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Lanfry, Pradeau et Morin, Charpentier PM, Chevalier Nord,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché du Palais National de Compiègne du 18/01/00.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché du théâtre impérial de Compiègne du 14/12/00 ;
le marché de la cathédrale de Noyon du 27/06/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Pradeau et Morin,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché du château de Condé en Brie du 17/12/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Lanfry, Chevalier Nord, Quélin,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de Coucy le Château du 9/11/99.
Aux sociétés M. Lefèvre, ETPM Battais, devenue Faber SA, Quélin, Chevalier Nord,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres ; avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de Coucy le Château du 16/03/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Quélin,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché du domaine du Temple de Vénus du 3/04/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Terh, Lanfry,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de la cathédrale d'Amiens du 25/06/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, Charpentier PM, Lanfry, Quélin, ETPM Battais, devenue Faber SA, Chevalier Nord,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de la cathédrale d'Amiens du 31/01/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Chevalier Nord, Charpentier PM, ETPM Battais, devenue Faber SA, Quélin, Pradeau et Morin,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de la cathédrale d'Amiens du 23/07/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Charpentier PM, Lanfry, Pradeau et Morin, Quélin, Terh,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de la cathédrale St Pierre de Beauvais du 29/05/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, Terh, Quélin, Lanfry,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
les marchés de la cathédrale St Pierre de Beauvais du 16/06/98.
Aux sociétés M. Lefèvre, Charpentier PM, Lanfry, Pradeau et Morin, Quélin, ETPM Battais, devenue Faber SA,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
les marchés de la cathédrale St Pierre de Beauvais du 19/10/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Charpentier PM, ETPM Battais, devenueFaber SA,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de la Boissière en Thelle du 27/09/01.
Aux sociétés Lanfry, Payeux,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le
dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'Ecole des Beaux Arts à Abbeville du 12/11/98.
Aux sociétés Charpentier PM, ETPM Battais, devenue Faber SA,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur les marchés suivants :
le marché de l'église de Camelin du 26/04/99.
Aux sociétés ETPM Battais, devenue Faber SA, Lanfry,
d'avoir, en Picardie, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence, notamment sur le marché suivant :
le marché de l'église de Puiseux en Bray du 22/06/99.
En Aquitaine :
Aux sociétés Cazenave, M. Lefèvre, Quélin et Dagand,
d'avoir, en région Aquitaine, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparties les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence sur les marchés suivants :
le marché de l'abbaye de la Sauve-Majeure à Bordeaux, le 16/10/01 ;
le marché des façades de la Tour Pey-Berland à Bordeaux, le 24/10/01.
En Ile-de-France :
Aux sociétés M. Lefèvre et Payeux,
d'avoir, en région Ile-de-France, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparties les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence sur le marché suivant :
le marché de l'église Saint-Eustache à Paris, le 6/09/01.
En Bourgogne :
Aux sociétés M. Lefèvre et SNC SAC,
d'avoir avoir, en région Bourgogne, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparties les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence sur le marché suivant :
le marché de l'église Saint-Michel à Dijon, le 8/10/01 ;
le marché de l'hôtel de ville de Autun, le 20/11/01.
En Nord-Pas-de-Calais :
Aux sociétés M. Lefèvre, H Chevalier Nord et Payeux,
d'avoir avoir, en région Nord-Pas-de-Calais, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparties les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence sur le marché suivant :
le marché de la cathédrale Notre-Dame de Saint-Omer, le 21/11/01.
Aux sociétés Faber, H Chevalier Nord et Payeux,
d'avoir avoir, en région Nord-Pas-de-Calais, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparties les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence sur le marché suivant :
le marché de l'église Saint-Martin à Auxi-le-Château, le 06/07/01.
Aux sociétés M. Lefèvre, Faber et Payeux,
d'avoir avoir, en région Nord-Pas-de-Calais, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparties les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence sur le marché suivant :
le marché de l'église de Barlin, le 14/05/01.
En Champagne-Ardenne :
Aux sociétés M. Lefèvre et Carpentier PM,
d'avoir avoir, en région Champagne-Ardenne, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres, pour laisser le marché à l'une d'elles, de s'être ainsi réparties les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence sur le marché suivant :
le marché de la cathédrale de Reims, le 1/3/02.
En Pays-de-la-Loire :
Aux sociétés Pavy et M. Lefèvre,
d'avoir avoir, en région Pays-de-la-Loire, depuis temps non couvert par la prescription mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles en échangeant avec des entreprises concurrentes des informations sur leurs offres, avant le dépôt des offres, pour laisser le marché à certaines d'entre elles, de s'être ainsi réparti les marchés et d'avoir empêché le jeu de la concurrence sur le marché suivant :
le marché de l'église de la visitation au Mans, le 20/09/99.
Grief propre à la société M. Lefèvre et à la société Coefficient
D'avoir, depuis temps non couvert par la prescription, mis en œuvre des ententes anticoncurrentielles ayant pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, en présentant par le biais de ses filiales Lefèvre, LN, NR, Jacquet, Soporen, Compagnons St Jacques plusieurs soumissions apparemment distinctes mais en réalité concertées ayant pour conséquence de tromper le maître d'ouvrage sur la réalité et l'étendue de la concurrence, sur les marchés suivants :
le marché de St Ouen du 8/09/98 ;
le marché du château de Bonneval à La haye Aubret du 26/09/99 ;
le marché de la cathédrale de Rouen, (Tour au Beurre) des 1er/04/99 et 22/10/00 ;
le marché de l'Eglise de la Feuillie du 12/04/99 ;
le marché de l'Eglise de Ste Marguerite sur Mer du 17/05/99 ;
le marché de Quilleboeuf du 25/05/99 ;
le marché de l'Abbaye de Valmont du mois de juin 1999 ;
le marché de l'Eglise de St Martin de Nonancourt du 15/09/99 ;
le marché de la cathédrale de Rouen (restauration des parties hautes de la façade Ouest de la nef du 28/10/99 ;
le marché de l'Eglise St Jacques de Dieppe des14/04/97, 25/09/99, 7/12/99 ;
le marché de l'Eglise Le Neubourg du 27/02/00 ;
le marché du Prieuré de Graville Le Havre du 5/07/00 ;
le marché de la Cathédrale du havre du 21/11/00 ;
le marché du Théâtre gallo-romain à Lillebonne du 22/12/00 ;
le marché de la Cathédrale de Rouen, galerie supérieure de la partie centrale du 12/12/00 ;
le marché de St Sauveur d'Emalleville du 24/01/01 ;
le marché du Château d'Eu, aile des ministres du12/10/2000 ;
le marché du Clocher de la Basilique Notre dame de la Couture à Bernay ;
le marché de l'Eglise Notre Dame Arques la Bataille du27/05/01 ;
le marché de la Maison de l'armateur, le Havre du 29/05/01 ;
le marché de Ancretieville St Victor du 4/05/01 ;
le marché de Château de Mesnières en Bray du 31/07/01 ;
le marché de l'Abbatiale St Ouen à Rouen du 13/09/01 ;
le marché de l'Eglise St Rémy de Dieppe (28/07/98 et 28/09/01) ;
le marché de Les Andélys Château Gaillard (25/05/99) ;
le marché de l'Eglise St Maclou (22/10/01) ;
le marché de l'Abbaye de Fontaine Guérard à Radepont (28/02/01) ;
le marché des Murs de l'abbaye de Jumièges (26/07/01) ;
le marché de l'Eglise St Jean Baptiste de Bleville du 19/12/01 ;
le marché de l'Eglise St Vincent Le Havre du 8/01/02 ;
le marché de l'Eglise d'Ourville en Caux des 18/07/01 et 5/01/02 ;
le marché de l'Abbaye aux hommes à Caen du 16/12/97 ;
le marché de l'Eglise de Chanu du 29/10/98 ;
le marché de l'Ancien couvent des dominicaines Pont l'Evêque du 13/11/98 ;
le marché de l'Eglise St Etienne de Caen du 13/11/98 ;
le marché du Château de Tourlaville du 9/07/99 ;
le marché de l'Eglise St Pierre Coutances du 9/07/99 ;
le marché de l'Eglise St Pierre Lisieux du 28/07/99 ;
le marché du Château de Fresney le Puceux du 9/10/99 ;
le marché du Mont St Michel des 23/07/99 et 9/08/99 ;
le marché du Château de Bricquebec des 16/04/99 et 19/05/00 ;
le marché de la Cathédrale de Coutances du 13/11/00 ;
le marché de l'Eglise Notre Dame de Guibray du 16/11/00 ;
le marché du Grenier à sel Honfleur du 15/12/00 ;
le marché du château de Rambures du 22/07/98 ;
le marché de l'Eglise de Gamaches du 1er/12/98 ;
le marché de la Basilique d'Albert du 2/06/99 ;
le marché de l'IMEC Abbaye d'Ardenne St Germain la Blanche Herbe du 5/01/0 ;
le marché du Domaine de la Baronnie Bettreville Sur Odon du 19/01/01 ;
le marché de la Cathédrale de Bayeux du 8/02/01 ;
le marché de l'Abbaye d'Hambye du 13/03/01 ;
le marché du Château de Canisy du 9/07/99 ;
le marché de l'Eglise St Vulfran à Abbeville du 15/07/98 ;
les marchés de Varinfroy des 24/02/1998 et 12/07/99 ;
le marché de l'Eglise d'Ault du 15/07/99 ;
le marché de l'Eglise de Marles du 19/07/99 ;
le marché de l'Eglise de Neuilly sous Clermont du 15/11/99 ;
le marché de la Chapelle des saintes Hosties à Marseille en Beauvaisis du 24/11/99 ;
le marché de l'Eglise St Frambourg à Senlis du 13/12/99 ;
le marché du Château de Condé en Brie du 17/12/99 ;
le marché de l'Eglise de Vic sur Aisne du 17/12/99 ;
le marché de l'Eglise de Marquemont à Monneville du 5/11/1998 au 10/01/00 ;
le marché de la Cathédrale de Laon du 12/01/00,
le marché de l'Eglise de Brumetz du 12/01/00 ;
le marché de la Maison Baron à Amiens du 12/01/00 ;
le marché du Palais national de Compiègne du 8/03/99 au 18/01/00 ;
le marché de la Chapelle de Mailly Maillet des 10/03/2000 et 14/12/00 ;
le marché de l'Eglise Samson à Clermont du 3/05/00 ;
le marché du Château Bullant à Chantilly des 20/07/98 et 5/05/00 ;
le marché de l'Eglise d'Avrechy du 9/10/00 ;
le marché de Saint Germer de Fly des 15/07/99 et 9/10/00 ;
le marché de Ailly le Haut Clocher du 12/10/00 ;
le marché du Théâtre impérial de Compiègne du 14/12/00 ;
le marché de Coucy le Château du 9/11/99 ;
le marché de la Corniche des Grandes Ecuries à Chantilly du 28/05/01.
Au niveau national :
Aux sociétés M Lefèvre, Coefficient, Quélin, Lanfry, Terh, Dagand, Pradeau et Morin, Charpentier PM, Faber, Cazenave, Payeux, H chevalier Nord, H chevalier Paris, SNC SAC, et SNC Chanzy et Pradoux d'avoir pris part, entre 1995 et 2002 au plus tôt, sur le marché de la maçonnerie taille de pierre se rapportant à la restauration des monuments historiques, sur un territoire comprenant les régions Haute-Normandie, Basse-Normandie, Picardie, Aquitaine, Ile-de-France, Bourgogne, Lorraine, Champagne-Ardenne, Nord-Pas-de-Calais, Pays-de-la-Loire, Auvergne et Rhône-Alpes, soit environ les deux tiers du territoire national, à des accords et à des pratiques concertées consistant à se répartir les marchés conclus dans ces régions avant le dépôt des offres.
Ces pratiques constituent un obstacle à la libre concurrence et, par leur objet et leurs effets anticoncurrentiels, elles sont contraires aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce ".
E. LA MISE EN OEUVRE DU III DE L'ARTICLE L. 464-2 DU CODE DE COMMERCE
271. Selon les dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce, dans sa version applicable à l'espèce " lorsqu'un organisme ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés et s'engage à modifier ses comportements pour l'avenir, le rapporteur général peut proposer au Conseil de la concurrence qui entend les parties et le commissaire du Gouvernement sans établissement préalable d'un rapport, de prononcer la sanction pécuniaire prévue au 1 en tenant compte de l'absence de contestation. Dans ce cas le montant maximum de la sanction encourue est réduit de moitié ".
a) En ce qui concerne la société Pradeau et Morin
272. Aux termes du procès-verbal établi le 9 avril 2009, la société Pradeau et Morin a décidé de ne pas contester le grief qui lui a été notifié. Conformément à l'article L. 464-2 du Code de commerce, elle a souscrit, pour l'avenir, les engagements suivants :
" La SNC Pradeau et Morin, inscrite au RCS de Paris sous le n° B 572 104 313, destinataire de la notification de griefs, développait son activité " monuments historiques " au travers de deux agences situées à Paris et Beauvais. L'agence de Beauvais a été définitivement fermée. La SNC Pradeau et Morin a confié, sous couvert d'une location gérance en date du 26 décembre 2006 à effet au 1er janvier 2007, son fonds de commerce à la société Eiffage construction Paris patrimoine, inscrite au RCS de Nanterre sous le n° B 408 063 436, qui exerce une activité " monuments historiques " au sein de l'établissement Pradeau et Morin qu'elle a créé le 15 novembre 2006.
La SNC Pradeau et Morin ne conteste pas les griefs qui lui sont opposés et s'engage à modifier son comportement pour l'avenir. Afin que ces engagements puissent être concrètement respectés au sein de toute l'activité " restauration des monuments historiques " ceux-ci seront proposés par la SNC Pradeau et Morin et la société Eiffage construction Paris patrimoine et mis en œuvre au sein de la SNC Pradeau et Morin (même s'il n'y a plus d'activité) et de l'établissement Pradeau et Morin géré par la société Eiffage construction Paris patrimoine.
C'est toute l'activité " monuments historiques " qui est engagée dans le processus. Pour simplifier la compréhension du texte des engagements, on entendra par "Pradeau et Morin " la SNC Pradeau et Morin ainsi que l'établissement Pradeau et Morin.
1. Formation et sensibilisation au respect des règles du droit de la concurrence
1.1 - Pradeau et Morin s'engage à organiser des sessions de formation régulières portant sur le respect des règles du droit français et communautaire de la concurrence à l'attention de ses collaborateurs en charge des appels d'offres, à savoir les directeurs d'agence et les responsables commerciaux.
1.2 - Les sessions de formation seront assurées par des avocats intervenant en droit de la concurrence. Elles pourront être complétées par des formations internes. Elles auront pour objet de présenter et d'expliquer les règles du droit de la concurrence et les types de comportements interdits par le droit de la concurrence en insistant plus particulièrement sur les échanges d'informations entre concurrents. A la fin de chaque session, chaque participant recevra un livret de synthèse relatif à la formation dispensée. Les sessions de formation seront renouvelées pour autant que de besoin au profit des personnes nouvellement embauchées.
1.3 - Elles seront obligatoires et chaque participant devra émarger une feuille de présence. Pradeau et Morin tiendra un état annuel des sessions de formation précisant notamment le nombre de participants à chaque session. Chaque participant aura la possibilité de contacter l'avocat ayant assuré la formation interne afin de renforcer ses connaissances en matière de droit de la concurrence et de poser des questions précises.
1.4 - Pradeau et Morin s'engage à donner à ses personnels ayant à répondre aux consultations publiques des instructions formelles et réitérées par écrit visant au strict respect des règles du droit de la concurrence interne et communautaire, notamment des dispositions des articles L. 420-1 du Code de commerce et 81 du traité CE et des engagements pris devant l'Autorité de la concurrence.
1.5 - Les délégations de pouvoirs donnés par Pradeau et Morin à ses cadres dirigeants ou commerciaux susceptibles d'engager dans une procédure d'attribution de marchés rappelleront, au titre des obligations attachées à leurs fonctions, celle de respecter et faire respecter strictement les règles de mise en concurrence.
2. Contrôle du respect des règles de concurrence
2.1- Contrôle interne
Pradeau et Morin souligne que les règles comportementales qu'elle entend respecter, reposent sur les concepts de confiance, responsabilité, exemplarité, transparence, qui doivent être déclinés dans le domaine du droit de la concurrence.
Pradeau et Morin s'engage à intégrer, dans le cadre de ses processus de contrôle interne et aux différents niveaux de ces derniers, le rappel des règles de comportement au regard du droit de la concurrence et la vérification de l'effectivité de leur application.
Ces règles seront rappelées notamment dans le guide des bonnes pratiques et la vérification de leur stricte application assurée au travers de la procédure de contrôle et d'audit de la société.
2.2- Intervention d'un délégué spécial à la concurrence
2.2.1. - Le responsable du contrôle interne de la branche Eiffage construction interviendra en tant que délégué spécial à la concurrence, chargé de veiller au respect des règles du droit de la concurrence et, le cas échéant, d'alerter la Direction générale dont relève l'activité de Pradeau et Morin, de toute violation de celles-ci.
2.2.2 - Ce délégué spécial aura notamment pour mission de mettre en place une ligne téléphonique ou un courrier électronique d'alerte professionnelle permettant, dans le respect de la réglementation et notamment de la loi "Informatique et Libertés", à tout employé de Pradeau et Morin ayant connaissance de pratiques potentiellement anticoncurrentielles, de l'en informer. L'auteur de l'information se verra garantir une stricte confidentialité.
2.2.3 - Ce délégué spécial pourra diligenter tout audit sur les faits portés à sa connaissance et devra transmettre le rapport en résultant à la Direction générale dont relève l'activité de Pradeau et Morin.
2.2.4 - Le délégué spécial à la concurrence aura toute latitude pour remplir sa mission au sein de Pradeau et Morin.
3. Réunions entre concurrents
3.1 -Engagement de Pradeau et Morin de s'abstenir de participer à toute réunion collective entre concurrents potentiels préalablement à l'attribution d'un marché déterminé, à l'exception des réunions telles que décrites aux points 4 et 5 ci-dessous, et à l'exception des contacts, après attribution, rendus nécessaires par la mise au point et la mise en œuvre des conditions d'exécution de la prestation entre membres d'un groupement (tels que visés au point 5 ci-dessous) ou rendus nécessaires par des difficultés d'exécution d'un marché, afin d'assurer l'exécution du marché ou encore rendus nécessaires par des questions strictement techniques, organisationnelles ou afférentes aux relations sociales.
3.2 -Engagement de Pradeau et Morin d'abstention de communiquer à des concurrents potentiels préalablement à l'attribution d'un marché déterminé toute information commercialement sensible, en particulier les conditions de réponse à un appel d'offres en cours ou à venir, à l'exception des cas décrits aux points 4 et 5 ci-dessous.
4. Réunions dans le cadre du Groupement National des Entreprises de Restauration des Monuments Historiques (GNERMH)
Pradeau et Morin s'efforcera, dans la mesure de ses moyens en tant qu'adhérent, de faire adopter par le GNERMH une résolution prévoyant :
- l'obligation pour le GNERMH d'établir un ordre du jour préalablement à chaque réunion ; - l'obligation de rédiger un procès-verbal détaillé et exhaustif, soumis pour approbation à la réunion suivante ; - l'obligation de conserver ces documents pendant un délai de 3 ans.
5. Réunions entre concurrents dans le cadre de groupements
Le recours à un groupement ne devra pas être envisagé sauf cas de nécessité avérée et justifiée. Un groupement ne pourra être envisagé que dans la mesure où Pradeau et Morin serait dans l'incapacité de concourir seul.
5.1 - Dans le cas où Pradeau et Morin envisage un groupement pour répondre à une consultation publique, il respectera les étapes suivantes :
Etape 1 : Intention de groupement
Pradeau et Morin ne prendra contact avec des entreprises que lorsque leur concours est nécessaire pour pouvoir répondre à un marché donné (constitué d'un ou plusieurs lots) au sein d'un appel d'offres ou pouvoir y répondre dans des conditions optimisées, notamment pour le donneur d'ordres.
A ce niveau, l'entreprise sollicitée ne pourra faire part que de son intérêt ou non pour un tel projet de groupement.
En cas de désintérêt de l'entreprise sollicitée pour le projet de groupement, chaque entreprise pourra répondre seule ou avec un autre partenaire à l'appel d'offres en cause.
Etape 2 : Proposition de groupement
En cas d'intérêt de l'entreprise sollicitée pour le projet de groupement Pradeau et Morin s'engage à entamer une discussion qui ne portera que sur la capacité de la société concernée à répondre à la proposition de groupement.
Pradeau et Morin précisera au partenaire envisagé que sa réponse doit être strictement limitée à ce qui a été précisément demandé à savoir les moyens techniques et humains nécessaires à la satisfaction du cahier des charges.
Dans l'hypothèse d'une insuffisance des moyens techniques et/ou humains de l'entreprise sollicitée, chaque entreprise pourra répondre seule ou avec un autre partenaire à l'appel d'offres en cause.
Etape 3 : Formalisation du groupement
Dans le cas où l'entreprise sollicitée dispose des moyens techniques et humains souhaités et que la discussion se poursuit avec elle Pradeau et Morin s'oblige à répondre à l'appel d'offres avec son partenaire ou à s'abstenir d'y répondre seul.
Tout projet devra être validé par la Direction dont relève l'activité de Pradeau et Morin et donner lieu à l'établissement d'une convention de groupement préliminaire qui expliquera et justifiera de la nécessité de concourir en groupement.
5.2. - Les groupements qui ne répondront pas au processus ainsi défini sont rigoureusement proscrits.
5.3. - En cas de non-réponse à un appel d'offres restreint, une lettre d'excuses motivée et justifiant l'absence de concours de Pradeau et Morin devra être adressée au donneur d'ordre.
5.4 - Toutes les étapes à partir de celle mentionnée sous 5.1 doivent être retracées dans un dossier comprenant l'ensemble des données échangées, notamment en ce qui concerne les capacités et disponibilités sur le plan matériel, technique et humain et les aspects financiers et commerciaux. Ce dossier doit être conservé pendant, au minimum, trois ans. Pradeau et Morin s'applique à lui même ces principes lorsqu'il est sollicité par un autre opérateur pour constituer un groupement.
6. Contrôle du respect des engagements souscrits
6.1 - Afin d'informer l'Autorité de la concurrence de l'exécution des engagements souscrits dans le présent procès-verbal, Pradeau et Morin lui adressera, au cours du 1er trimestre de chaque année, un rapport relatif à la mise en œuvre, lors de l'année précédente, de ces engagements.
Ce rapport indiquera notamment :
1. les sessions de formation au droit de la concurrence ayant eu lieu et le nombre de participants à ces sessions afin que puisse être attestée de la formation effective de tout personnel, non précédemment formé, accédant à des fonctions l'amenant à engager la société dans une procédure d'attribution ;
L'engagement pris étant celui d'assurer au personnel concerné une formation adaptée et, si nécessaire, actualisée ;
2. le nombre d'alertes reçues par le délégué spécial et les suites données par ce dernier à ces alertes et, le cas échéant, par la Direction générale.
3. Ce rapport sera adressé à l'Autorité de la concurrence au cours des trois années civiles qui suivront la notification à Pradeau et Morin de la décision à intervenir de l'Autorité de la concurrence. Au cours des années suivantes, ce rapport sera adressé à l'Autorité de la concurrence sur demande expresse de sa part.
6.2 - Par ailleurs, les documents relatifs à la mise en œuvre des engagements souscrits seront conservés pendant une durée de trois ans dans le respect de la réglementation afin de continuer à pouvoir en assurer la matérialité et, en tant que de besoin, en justifier.
Ces actions seront mises en œuvre dans un délai de six mois et poursuivies au-delà. "
273. Prenant acte de cette position, le rapporteur général adjoint s'est engagé à demander à l'Autorité de la concurrence d'accorder à la société Pradeau et Morin le bénéfice des dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce et à proposer, pour tenir compte de l'absence de contestation du grief et des engagements présentés, que la sanction pécuniaire le cas échéant encourue soit réduite dans une proportion de 15 % à 25 % du montant qui aurait été normalement infligé.
b) En ce qui concerne la société Lanfry
274. Aux termes du procès-verbal établi le 9 avril 2009, la société Lanfry a décidé de ne pas contester le grief qui lui a été notifié. Conformément à l'article L. 464-2 du Code de commerce, elle a souscrit, pour l'avenir, les engagements suivants :
" Par la présente, EGL renonce à contester les griefs de la page 111 à 127 inclus de la notification du 16 décembre 2008. Dans le prolongement de cette renonciation à contestation de griefs, EGL offre de prendre les engagements suivants :
1. Communication avec des concurrents :
Non-participation à une concertation anticoncurrentielle :
EGL s'engage à ne pas participer à une concertation anticoncurrentielle, et à cet effet s'engage à donner instruction au personnel concerné de ne participer à aucune concertation anticoncurrentielle avec des représentants des entreprises concurrentes, dans le cadre des appels d'offres publics ou privés, visant notamment à fixer des prix ou à se répartir des marchés.
Rappel écrit, visé et retourné de l'interdiction :
EGL s'engage à donner à son personnel ayant à répondre aux consultations publiques et privées des instructions formelles et réitérées par écrit visant au strict respect des règles du droit de la concurrence interne et communautaire, notamment des dispositions des articles L. 420-1 du Code du commerce et 8l du traité CE et des engagements pris devant l'Autorité de la concurrence.
EGL vérifiera que ces instructions écrites ont été adressées à chacune des personnes concernées, puis visées et retournées par chacune d'elles.
2. Formation et sensibilisation aux règles du droit de la concurrence.
EGL s'engage à rappeler systématiquement l'importance du respect des règles de la concurrence, notamment en matière d'ententes, à tous les cadres et à tous les salariés qui seraient susceptibles de se trouver en contact avec leurs homologues des entreprises concurrentes, cette information pouvant être faite par tout procédé et soulignant que la participation à une pratique anticoncurrentielle serait susceptible de constituer une faute grave.
EGL s'engage à mettre en place un dispositif de formation interne aux fins de sensibiliser les personnes concernées au respect des principes du droit de la concurrence. A cette fin, EGL organisera au moins une fois par an une journée approfondie au droit de la concurrence, à laquelle la présence de tous son personnel, ayant à répondre aux consultations publiques ou privées sera obligatoire.
Dans le cadre de la première formation, un livret sera remis aux personnes concernées, attirant leur attention sur l'application des règles de la concurrence, notamment au regard des spécificités des marchés sur lesquels ils opèrent.
Ce livret rappellera les principes légaux et jurisprudentiels en matière du droit de la concurrence, au regard notamment de l'article L. 420-1 du Code du commerce prohibant les ententes anticoncurrentielles. Le livret sera actualisé à chaque évolution législative ou réglementaire.
Chaque participant signera à la fin de la première séance de formation, attestant de la bonne réception du livret et de la formation reçue.
EGL s'engage à mettre en place un système de sanction appropriée des personnels qui ne respecteraient pas un ou plusieurs des présents engagements.
3. Réponse aux appels d'offres dans le cadre de groupement ou de sous-traitance
Certains marchés soumis à appel d'offres requièrent une association avec des partenaires, qu'il s'agisse d'un groupement ou d'une sous-traitance, afin d'apporter une réponse satisfaisante au cahier des charges de l'autorité adjudicatrice.
Dans cette hypothèse, EGL s'engage à respecter la procédure décrite, ci-après, en trois étapes, et à refuser tout projet de groupement ou de sous-traitance avec un partenaire qui l'aurait sollicitée à cette fin mais qui n'accepterait pas les termes de cette procédure.
Etape 1 : Intention de groupement ou de sous-traitance
EGL s'engage à n'entrer en contact avec un concurrent qu'en cas de volonté de créer un groupement ou une sous-traitance, suite à la réception du cahier des charges du marché en cause.
A ce niveau, la personne sollicitée ne pourra faire part que de son intérêt ou non pour un tel projet de groupement ou de sous-traitance.
En cas de désintérêt de la personne sollicitée pour le projet de groupement ou de sous-traitance, chaque personne pourra répondre seule ou avec un autre partenaire à l'appel d'offres en cause.
Etape 2 : Proposition de groupement ou de sous-traitance
En cas d'intérêt de la personne sollicitée pour le projet de groupement ou de sous-traitance dans le cadre de l'étape 1, EGL s'engage à entamer une discussion qui ne portera que sur la capacité de la société concernée à répondre à la proposition de groupement ou de sous-traitance, au regard du cahier des charges imposé.
Les discussions ne porteront que sur les moyens techniques et humains nécessaires à la satisfaction du cahier des charges.
EGL précisera au partenaire envisagé que sa réponse doit être strictement limitée à ce qui a été précisément demandé, c'est-à-dire de se contenter d'indiquer s'il dispose, ou non, des moyens techniques et humains suffisants pour satisfaire, avec EGL, au cahier des charges.
En cas d'insuffisance des moyens techniques et/ou humains de la personne sollicitée, chaque personne pourra répondre seule ou avec un autre partenaire à l'appel d'offres en cause.
Etape 3 : Formalisation du groupement ou de la sous-traitance
Si la personne sollicitée dispose des moyens techniques et humains souhaités dans le cadre de l'étape 2, la discussion se poursuit avec EGL dans le cadre de l'étape 3. Toute discussion à compter de cette étape 3 impose à EGL de répondre à l'appel d'offres avec son partenaire ou de s'abstenir d'y répondre seule.
Toutefois, en cas d'échec du projet de groupement ou de sous-traitance, EGL pourra répondre seule ou avec un autre partenaire, à la condition d'avoir conservé une trace écrite des raisons de cet échec et le contenu des informations qui auront été échangées depuis le commencement de l'étape 3, garantissant le respect des règles de concurrence.
4. Dispositif d'alerte professionnelle
Un dispositif d'alerte professionnelle, axé sur d'éventuelles irrégularités dans le domaine du droit de la concurrence sera mis en place par la société EGL.
EGL désignera parmi sa direction " un responsable-conformité ". La personne désignée sera une personne impliquée dans l'activité quotidienne de la société. Elle présentera également du fait de ses fonctions, une garantie d'objectivité dans l'appréciation du fonctionnement de la société.
Une note interne sera adressée à l'ensemble des salariés. Ces derniers auront la possibilité d'émettre des alertes auprès de ce " responsable-conformité " en cas de constat relatif à des pratiques de nature à enfreindre les règles du droit de la concurrence.
Grâce au dispositif d'alerte professionnelle, les salariés pourront contacter directement et de manière confidentielle, le responsable du système d'alerte, par courrier ou par le biais d'un portail internet. Ainsi, les salariés pourront utiliser l'adresse internet afin d'émettre des alertes sur tout incident ou fait se rapportant à des infractions aux règles du droit de la concurrence.
Ces actions seront mises en œuvre dans un délai de six mois et poursuivies au-delà. "
275. Prenant acte de cette position, le rapporteur général adjoint s'est engagé à demander à l'Autorité de la concurrence d'accorder à la société Lanfry le bénéfice des dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce et à proposer, pour tenir compte de l'absence de contestation du grief et des engagements présentés, que la sanction pécuniaire le cas échéant encourue soit réduite dans une proportion de 15 % à 20 % du montant qui aurait été normalement infligé.
c) En ce qui concerne la société Coefficient
276. Aux termes du procès-verbal établi le 8 avril 2009, la société Coefficient a décidé de ne pas contester le grief qui lui a été notifié. Conformément à l'article L. 464-2 du Code de commerce, elle a souscrit, pour l'avenir, les engagements suivants :
" Pour des raisons qui lui sont propres la société Coefficient ne conteste pas la réalité des griefs qui lui ont été notifiés et prend les engagements qui suivent :
- la société Coefficient s'engage à mettre en place, avec l'aide de conseils externes spécialisés en droit de la concurrence, une procédure d'audit sur le respect des principes du droit de la concurrence. Cette procédure permettra de vérifier que les pratiques de la société et le comportement de son personnel n'enfreignent pas les règles de la concurrence. Cet audit comportera notamment des entretiens individuels avec tous les responsables et salariés de la société Coefficient, susceptibles de chiffrer des offres, afin d'évaluer la situation de la société au regard du respect du droit de la concurrence ;
- la société Coefficient s'engage à rappeler systématiquement les termes de l'engagement ci-dessus, l'importance de cet engagement et les sanctions encourues à tous les responsables et salariés susceptibles d'élaborer des offres. La société Coefficient s'engage aussi à informer ces derniers que la participation à une entente anticoncurrentielle constitue une faute grave susceptible d'entraîner le licenciement de son auteur et à leur rappeler leur responsabilité personnelle, sur le plan pénal, en matière de droit de la concurrence. A cette fin, la société Coefficient diffusera une note écrite à tous les responsables et salariés susceptibles d'élaborer ou de participer à l'élaboration d'offres ;
- dans le cadre du rappel ci-dessus énoncé, la société Coefficient s'engage à élaborer une charte de bonne conduite en accord avec le Code de déontologie de l'Union Nationale des Economistes de la Construction (UNTEC), joint au présent procès-verbal. Cette charte, qui insistera en particulier sur le respect des régies de concurrence sera diffusée à l'ensemble du personnel concerné, directement ou indirectement, par ces règles de la concurrence, étant rappelé que la société Coefficient a toujours respecté les obligations de même nature pour lesquelles elle a pu s'engager auparavant ;
- la société Coefficient entend préciser qu'elle n'a pas de filiales au sein desquelles elle pourrait être susceptible de faire assurer la vérification des actions tendant au respect des règles de la concurrence. Elle mènera donc, de façon interne, une politique active et appropriée, notamment en tenant compte du fait que la société est un bureau d'études, auprès des responsables directement concernés par ces questions.
- Ces actions, pour autant qu'elles n'aient pas déjà été mises en œuvre, seront achevées dans un délai de six mois à compter de la signature du présent procès-verbal et seront poursuivies en tant que de besoin au-delà ".
277. Prenant acte de cette position, le rapporteur général adjoint s'est engagé à demander à l'Autorité de la concurrence d'accorder à la société Coefficient le bénéfice des dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce et à proposer, pour tenir compte de l'absence de contestation du grief et des engagements présentés, que la sanction pécuniaire le cas échéant encourue soit réduite de 10 % par rapport au montant qui aurait été normalement infligé.
II. Discussion
278. Seront successivement abordés ci-après :
- la compétence de l'Autorité de la concurrence,
- la procédure,
- l'application du droit communautaire de la concurrence,
- le bien-fondé des griefs,
- l'imputabilité des pratiques,
- les suites à donner aux qualifications retenues.
A. SUR LA COMPÉTENCE DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
279. Dans sa saisine en date du 18 mai 2005, complétée par lettre du 18 décembre 2006, la société GAR Rénovation Vieux Edifices dénonce, outre une entente horizontale entre certaines entreprises du secteur de la restauration des monuments historiques en Ile-de-France, pratique qui fera l'objet d'un examen au fond ci-après, une entente entre ces entreprises et certains maîtres d'œuvre, architectes en chef des monuments historiques, dans le cadre des procédures de passation et de l'exécution des marchés publics passés par les maîtres d'ouvrage (Etat ou collectivités territoriales) en Ile-de-France. Les maîtres d'œuvre favoriseraient l'attribution des marchés aux entreprises pré-désignées dans le cadre de l'entente horizontale en faisant réaliser le projet architectural et technique de l'appel d'offres par une entreprise candidate à l'attribution du marché, en fixant des conditions techniques ou financières particulières dans le projet architectural et technique ou en influençant le choix des maîtres d'ouvrage lors de l'ouverture des plis, notamment au moyen d'appréciations subjectives portées à l'égard des mémoires techniques déposés par les soumissionnaires. Ces pratiques se traduiraient par le boycott de la société GAR Rénovation Vieux Edifices. Par ailleurs, l'entreprise fait valoir qu'en tolérant l'exécution de prestations non conformes aux spécifications des appels d'offres, telles que l'utilisation de pierres usinées au lieu de pierres taillées manuellement, les maîtres d'œuvre permettraient à certaines entreprises de déposer des offres d'un montant inférieur au coût réel de la prestation demandée, et, partant, de remporter le marché.
280. Les règles de l'article L. 420-1 du Code de commerce sont applicables aux seules activités de production, de distribution ou de services au sens des dispositions de l'article L. 410-1 du même Code. Le droit de la concurrence s'applique ainsi aux seuls acteurs économiques intervenant sur un marché (voir, en ce sens l'arrêt de la Cour de cassation du 15 janvier 2002, Société Les Meilleures Editions, rejetant le pourvoi contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 29 février 2000, Syndicat général du livre et de la communication écrite). De même, en droit communautaire, les articles 81 et 82 CE, devenus 101 et 102 TFUE ne s'appliquent qu'aux pratiques des entreprises, c'est-à-dire aux entités exerçant une activité économique, indépendamment de leur statut juridique et de leur mode de financement, l'activité économique étant définie comme toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné.
281. Les comportements dénoncés, même s'ils pouvaient porter atteinte à la concurrence sur le marché de la restauration des monuments historiques, ne peuvent être rattachés à l'exercice par les architectes en chef des monuments historiques d'une activité de production, de distribution ou de services au sens des dispositions de l'article L. 410-1 du Code de commerce. En effet, lorsqu'ils exercent, en leur qualité de fonctionnaires de l'Etat et conformément à la mission d'intérêt général dont ils sont chargés en vertu de dispositions réglementaires (23), la maîtrise d'œuvre des travaux de restauration des monuments historiques, les architectes en chef des monuments historiques, rémunérés à ce titre par l'Etat selon des modalités fixées par décret (24), ne sont pas des opérateurs économiques indépendants des services de l'Etat, et ne peuvent donc pas être considérés comme intervenant sur le marché comme des offreurs de services de maîtrise d'œuvre. Il résulte de ce qui précède que l'Autorité de la concurrence n'est pas compétente pour connaître des comportements individuels des architectes en chef des monuments historiques, dénoncés par la société GAR Rénovation. La responsabilité de ces derniers peut toutefois, le cas échéant, être recherchée devant le juge pénal, ou faire l'objet d'une procédure disciplinaire.
B. SUR LA PROCÉDURE
1. SUR LES RÈGLES DE PROCÉDURE APPLICABLES
a) En ce qui concerne la substitution de l'Autorité au Conseil de la concurrence
282. La société Terh soutient que la notification de griefs en date du 26 janvier 2009 est irrégulière dès lors qu'elle émane des services du Conseil de la concurrence alors que celui-ci avait été remplacé par l'Autorité de la concurrence le 1er janvier 2009.
283. Aux termes de l'article 5 de l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008 portant modernisation de la régulation de la concurrence, ratifiée par l'article 139 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 : " I. Les membres du Conseil de la concurrence sont maintenus dans leurs fonctions jusqu'à la première réunion de l'Autorité de la concurrence. Jusqu'à cette date, le Conseil de la concurrence et le ministre chargé de l'Economie exercent les compétences qui leur sont respectivement dévolues par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date de publication de la présente ordonnance. II. La validité des actes de poursuite, d'instruction et de sanction accomplis antérieurement à la première réunion de l'Autorité de la concurrence est appréciée au regard des textes en vigueur à la date à laquelle ils ont été pris ou accomplis ".
284. La première réunion de l'Autorité de la concurrence s'étant tenue le 2 mars 2009, il résulte des dispositions précitées qu'à la date à laquelle les griefs ont été notifiés aux parties dans la présente affaire, le 16 décembre 2008, le Conseil de la concurrence exerçait toujours les compétences qui lui étaient dévolues par les textes antérieurs à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 13 novembre 2008. La notification de griefs a donc valablement été établie par les services d'instruction du Conseil de la concurrence. Ainsi, le moyen soulevé doit être écarté.
b) En ce qui concerne l'intervention du conseiller-auditeur
285. Les sociétés Faber SA et Quélin soutiennent que les parties auraient dû pouvoir bénéficier dans la présente affaire de l'intervention du conseiller-auditeur.
286. Aux termes de l'article 5 de l'ordonnance du 13 novembre 2008, ratifiée par l'article 139 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 : " III. L'examen des affaires de concentration notifiées avant la date de la première réunion de l'Autorité de la concurrence et l'examen des affaires de pratiques anticoncurrentielles ayant donné lieu à une notification de griefs ou à une proposition de non-lieu avant cette même date se poursuivent selon les règles de procédure en vigueur antérieurement à cette date ". La présente affaire a fait l'objet d'une notification de griefs en date du 16 décembre 2008, avant la première réunion de l'Autorité de la concurrence qui s'est tenue le 2 mars 2009. Conformément aux dispositions précitées, l'examen de l'affaire suit donc les règles de procédure antérieures à cette date.
287. La faculté pour les parties de présenter des observations auprès du conseiller auditeur a été instituée par l'alinéa 4 de l'article L. 461-4 du Code de commerce, issu de l'article 95 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (ci-après " LME "). L'article 95 de la LME, qui a pour objet l'instauration d'une Autorité de la concurrence, prévoyait une entrée en vigueur des dispositions nouvelles à compter de la publication de l'ordonnance prévue pour leur application et, au plus tard, le 1er janvier 2009. Cette ordonnance, publiée le 13 novembre 2008, ayant maintenu les compétences du Conseil de la concurrence jusqu'à la première réunion de l'Autorité de la concurrence, l'entrée en vigueur des dispositions nouvelles issues de l'article 95 de la LME a ainsi été repoussée à cette date.
288. Ainsi, les règles de procédure en vigueur antérieurement à la date de la première réunion de l'Autorité de la concurrence le 2 mars 2009, applicables à l'examen de la présente affaire, ne prévoyant pas la possibilité pour les parties de saisir le conseiller auditeur, les entreprises mises en cause ne sont pas fondées à se plaindre de l'absence d'intervention du conseiller auditeur dans la présente procédure.
289. En tout état de cause, il convient de relever que les entreprises n'ont pas sollicité la saisine du conseiller-auditeur dans la présente affaire.
2. SUR LA PRESCRIPTION
a) En ce qui concerne la prescription décennale
290. Les entreprises mises en cause font valoir que le délai de prescription de dix ans prévu par l'article L. 462-7 du Code de commerce est applicable à la présente affaire dès lors que cette règle de prescription, instaurée par l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008, est d'application immédiate.
291. Dans le cas d'une infraction continue, le délai de prescription ne commence toutefois à courir qu'à compter du jour où l'infraction a pris fin (voir, en ce sens, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 29 septembre 2009, Etablissements Mathé, confirmant la décision du Conseil de la concurrence n° 08-D-12 du 21 mai 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la production du contreplaqué, point 123 et s. ; voir aussi la décision du Conseil de la concurrence n° 07-D-15 du 9 mai 2007 relative à des pratiques concernant les marchés publics relatifs aux lycées d'Ile-de-France, et la jurisprudence citée sous les points 177 et s.).
292. Au cas d'espèce, ainsi qu'il sera démontré ci-après (voir points 380 et s. ci-dessous), les ententes de répartition des marchés publics mises en œuvre par les entreprises au niveau régional en Haute-Normandie, Basse-Normandie et Picardie constituent des infractions continues, qui se sont poursuivies jusqu'en 2001 ou 2002 selon les régions, la fin des pratiques correspondant aux premières phases de développement de l'enquête menée dans le cadre de l'information judiciaire ouverte devant le Tribunal de grande instance de Rouen. Ainsi, la cessation de ces ententes peut être fixée, pour chaque région concernée, aux dates des derniers appels d'offres où il a été constaté que des contacts et des échanges d'informations entre les entreprises concernées avaient eu lieu (voir points 124, 164 et 215 ci-dessus).
293. Le délai de prescription a ainsi commencé à courir :
- le 24 février 2002 s'agissant de l'entente mise en œuvre en Haute-Normandie,
- le 12 février 2002, s'agissant de l'entente mise en œuvre en Basse-Normandie,
- le 19 octobre 2001, s'agissant de l'entente mise en œuvre en Picardie.
294. Par ailleurs, les griefs relatifs aux pratiques mises en œuvre dans les régions Aquitaine, Ile-de-France, Bourgogne, Nord-Pas-de-Calais, Champagne-Ardenne et Pays-de-la-Loire visent des concertations à l'occasion d'appels d'offres spécifiques, qui se sont déroulées entre mai 2001 et septembre 2002 selon les marchés en cause.
295. Ainsi, un délai inférieur à dix ans s'est écoulé entre la cessation des ententes et la date de la présente décision. En admettant même, malgré les dispositions transitoires citées au point 286, que les dispositions nouvelles de l'alinéa 3 de l'article L. 462-7 du Code de commerce soient applicables à la présente affaire, les pratiques ne sont donc en tout état de cause pas prescrites à la date à laquelle l'Autorité statue.
b) En ce qui concerne la prescription quinquennale
296. La société Quélin soutient que les actes interruptifs de l'action publique pris dans le cadre de l'information judiciaire ouverte auprès du Tribunal de grande instance de Rouen n'ont pas interrompu la prescription devant l'Autorité de la concurrence, dès lors qu'ils sont antérieurs à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 13 novembre 2008, qui a prévu que les actes interruptifs de l'action publique interrompaient également la prescription devant l'Autorité de la concurrence.
297. La société Terh fait valoir que la procédure pénale ne peut avoir interrompu la prescription au-delà de son objet, et que le réquisitoire introductif du 24 septembre 2001 et les réquisitoires supplétifs des 19 novembre 2001 et 19 février 2002 du parquet de Rouen ne visent que des faits constatés en Haute-Normandie, en Basse-Normandie et en Picardie au cours des années 2000 et 2001.
298. L'article L. 462-7 du Code de commerce, dans sa version issue de l'ordonnance du 13 novembre 2008, dispose que : " Les actes interruptifs de la prescription de l'action publique en application de l'article L. 420-6 sont également interruptifs de la prescription devant l'Autorité de la concurrence ".
299. La Cour de cassation a jugé que cette règle était également applicable aux actes interruptifs antérieurs à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 13 novembre 2008 : " c'est à bon droit, nonobstant l'absence de disposition expresse alors en vigueur, que l'arrêt retient que l'élément matériel du délit pénal prévu par l'article L. 420-6 du Code du commerce, qui réprime le fait pour toute personne physique de prendre frauduleusement une part personnelle et déterminante dans la conception, l'organisation ou la mise en œuvre de pratiques visées aux articles L. 420-1 et L. 420-2 du même Code, étant défini par renvoi aux dispositions de ces articles qui définissent les pratiques anticoncurrentielles prohibées pouvant faire l'objet de sanctions prononcées contre les entreprises par le Conseil, les actes interruptifs de la prescription de l'action publique exercée en application de l'article L. 420-6 interrompent également la prescription de l'action devant le Conseil portant sur les mêmes faits " (arrêt du 13 octobre 2009, n° 08-17.269, Colas Ile-de-France Normandie, rejetant le pourvoi contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 24 juin 2008, France Travaux).
300. Ainsi, les actes interruptifs de prescription dans le cadre de la procédure pénale ouverte le 24 septembre 2001 devant le Tribunal de grande instance de Rouen sont également interruptifs de la prescription dans la présente affaire.
301. Par ailleurs, il résulte d'une jurisprudence constante que, même s'il ne concerne qu'une partie des faits ou des entreprises incriminées, l'acte interruptif de prescription produit ses effets à l'égard de l'ensemble des faits dénoncés et des entreprises concernées. La Cour de cassation a ainsi jugé qu'" un acte tendant à la recherche, la constatation ou la sanction de pratiques anticoncurrentielles, même s'il ne concerne que certaines des entreprises incriminées ou une partie seulement des faits commis pendant la période visée par la saisine, interrompt la prescription à l'égard de toutes les entreprises concernées et pour l'ensemble des faits dénoncés dès lors que ceux-ci présentent entre eux un lien de connexité " (arrêt précité du 13 octobre 2009, Colas Ile-de-France Normandie ; voir dans le même sens, l'arrêt du 12 juillet 2005, CNPA et l'arrêt du 10 juillet 2008, n° 07-17.276, Sephora). La Cour précise que l'effet interruptif " vaut à l'égard de toutes les entreprises mises en cause, peu important qu'elles n'aient pas toutes été entendues au cours de l'instruction " (arrêt du 13 juillet 2004, n° 03-11.280, DTP Terrassement ; voir aussi, dans le même sens, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 7 mars 2006, Ineo SA).
302. Les pratiques visées dans la présente affaire concernent des accords de répartition de marchés et des concertations préalables à des appels d'offres, qui ont tous pour objet de faire obstacle à la concurrence par les prix sur un ensemble de marchés publics dans le secteur de la restauration des monuments historiques. Ainsi, ces pratiques présentent entre elles des liens étroits caractérisant leur connexité. Partant, l'effet interruptif des actes effectués dans le cadre de l'information judiciaire ouverte devant le Tribunal de grande instance de Rouen vaut à l'égard de l'ensemble des entreprises concernées par la procédure devant l'Autorité de la concurrence, et pour l'ensemble des faits visés par la notification de griefs.
303. S'agissant enfin de la computation du point de départ du délai de la prescription, l'article L. 462-7 du Code de commerce, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2004-1173 du 4 novembre 2004 prévoit que : " Le Conseil de la concurrence ne peut être saisi de faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction ". Ce délai de prescription a été porté à cinq ans par l'ordonnance du 4 novembre 2004.
304. Au cas d'espèce, le délai de prescription a été interrompu par l'audition de M. 10..., représentant de la DRAC de Rouen, dans le cadre de l'enquête ouverte par les services de la DGCCRF ayant pour objet " la vérification du respect des dispositions des titres II et IV du livre IV du Code de commerce dans le secteur de la rénovation et de l'entretien des monuments historiques " en date du 6 avril 2001 (cf. procès-verbal d'audition, cotes 86 à 88).
305. Constituent également des actes ayant interrompu la prescription, car tendant à la recherche, la constatation ou la sanction des pratiques d'ententes dénoncées, les actes subséquents de l'enquête de la DGCCRF, de l'information judiciaire ouverte devant le Tribunal de grande instance de Rouen, puis de l'instruction des services du Conseil de la concurrence, à savoir :
- la visite des locaux de la société Normandie Rénovation en date du 12 juin 2001 effectuée en application des dispositions de l'article L. 450-3 du Code de commerce (cote 469) ;
- le réquisitoire introductif d'ouverture d'information judiciaire et la commission rogatoire du 24 septembre 2001 (cotes 1308 et 1310) ;
- les procès-verbaux de garde à vue et des interrogatoires de première comparution ainsi que les transcriptions d'écoutes téléphoniques qui ont pris place au cours des années 2001, 2002, 2003, 2004 et 2005 (cotes 1419 à 6422) ;
- la saisine de la société GAR Rénovation en date du 18 mai 2005 ;
- l'ordonnance de renvoi devant le Tribunal correctionnel de Rouen du 8 septembre 2006 (cotes 3 à 51, dossier 07/0087 F) ;
- la saisine d'office du Conseil de la concurrence du 12 novembre 2007 et la saisine du ministre en charge de l'économie en date du 19 novembre 2007.
306. Ainsi, entre le 6 avril 2001 et le 6 novembre 2004, date d'entrée en vigueur du nouveau régime de prescription quinquennale, des actes interruptifs de la prescription sont intervenus à une fréquence inférieure à 3 ans. Entre le 6 novembre 2004 et les 18 mai 2005 et 12 novembre 2007, dates des saisines du Conseil de la concurrence, des actes interruptifs de la prescription sont intervenus à une fréquence inférieure à 5 ans. Il résulte de ce qui précède que les pratiques en cause dans la présente affaire, qui ont pris fin après le 6 avril 1998, ne sont pas prescrites.
3. SUR LA DURÉE DE LA PROCÉDURE
307. Les sociétés Charpentier PM, Quélin, Terh, Degaine, Faber SA, Pavy et Pateu & Robert se plaignent de la durée excessive de la procédure. Elles font valoir que certains des marchés dont elles doivent répondre ont été passés en 1998, et que, du fait du délai écoulé, elles sont aujourd'hui dans l'impossibilité de retrouver des pièces à décharge. La société Quélin fait valoir que le caractère excessif du délai de la procédure résulte de l'inaction de l'administration, les griefs n'ayant été notifiés qu'en 2009 alors que les services de la DGCCRF ont saisi le parquet de Rouen dès 2001. La société Pateu & Robert fait valoir qu'elle n'a pris connaissance des faits qui lui étaient reprochés qu'à la réception de la notification de griefs du 16 décembre 2008.
a) Le droit applicable
308. Aux termes d'une jurisprudence constante, le délai raisonnable prescrit par l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales (ci-après la " CEDH ") doit s'apprécier au regard de l'ampleur et de la complexité de la procédure, cette circonstance devant être appréciée concrètement (voir par exemple les arrêts de la Cour d'appel de Paris du 29 janvier 2008, Le Goff Confort SAS, du 8 avril 2008, GlaxoSmithKline, du 6 mai 2008, Lafarge Ciments, du 24 novembre 2009, Chevron Products, et du 24 juin 2008, France Travaux).
309. Cette appréciation doit être menée en se référant à la durée de l'ensemble de la procédure, en ce compris la phase non contradictoire pendant laquelle sont mis en œuvre les pouvoirs d'enquête, préalablement à la notification de griefs et donc à l'ouverture de la procédure d'instruction visée à l'article L. 463-1 du Code de commerce. Dans son arrêt du 23 novembre 2010, Beauté Prestige International, la Cour de cassation a ainsi précisé que le caractère raisonnable de la durée de la première phase non contradictoire de la procédure devait être examiné au regard de la complexité de l'affaire et des diligences menées.
310. Par ailleurs, la sanction qui s'attache à la violation par les autorités de concurrence de leur obligation de se prononcer dans un délai raisonnable n'est pas l'annulation de la procédure ou sa réformation mais la réparation du préjudice résultant éventuellement du délai subi (voir les arrêts de la Cour de cassation du 28 janvier 2003, Domoservices, et du 6 mars 2007, Demathieu et Bard) sous réserve, toutefois, que la conduite de la procédure n'ait pas irrémédiablement privé les entreprises mises en cause des moyens de se défendre, de telles circonstances devant être appréciées concrètement (voir notamment l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, Le Goff Confort SAS, précité, et, pour une analyse similaire du juge communautaire, l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 21 septembre 2006, Nederlandse Federatieve Verninging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied (NFVG), C-105-04, Rec. p. I-8725, point 42). Dans son arrêt du 23 novembre 2010 précité, la Cour de cassation a exigé que soit démontrée par les parties une " atteinte personnelle, effective et irrémédiable " à leur droit de se défendre. La charge de la preuve de l'atteinte aux droits de la défense repose donc sur les parties en cause.
b) Appréciation en l'espèce
311. La durée de la procédure, phase non contradictoire comprise, s'élève à huit ans. En effet, ainsi qu'il a été exposé ci-dessus (point 1), l'enquête diligentée par la DGCCRF en 2001 s'est d'abord traduite par une saisine du parquet de Rouen le 24 septembre 2001, le ministre en charge de l'économie n'ayant saisi le Conseil de la concurrence que le 20 novembre 2007. Pour sa part, le Conseil a décidé de se saisir d'office des mêmes faits le 13 novembre 2007 quelques jours seulement avant la saisine du ministre, à la suite notamment des éléments relevés dans le cadre de l'instruction de la saisine de la société GAR Rénovation Vieux Edifices en date du 18 mai 2005, complétée par lettre du 18 décembre 2006, et qui était limitée à des pratiques mises en œuvre dans la région Ile-de-France. A la suite de ces saisines, les services d'instruction du Conseil ont demandé la communication des éléments de la procédure pénale au juge d'instruction qui y a procédé le 9 janvier 2008. La phase d'instruction contradictoire s'est ouverte un an plus tard avec l'envoi aux entreprises de la notification de griefs le 16 décembre 2008.
312. L'affaire concerne des ententes mises en œuvre dans le secteur de la restauration des monuments historiques sur un territoire comprenant douze régions, à savoir la Haute-Normandie, la Basse-Normandie, la Picardie, l'Aquitaine, l'Ile-de-France, la Bourgogne, la Lorraine, la Champagne-Ardenne, le Nord-Pas-de-Calais, les Pays-de-la-Loire, l'Auvergne et Rhône-Alpes. Les griefs ont été notifiés à dix-sept entreprises, ils portent sur plus d'une centaine de marchés publics, et le dossier comporte plus de 24 000 pièces. Ces éléments témoignent ainsi de l'ampleur des pratiques mises en œuvre et de la complexité de la procédure (voir, pour des faits similaires, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 7 mars 2006, Ineo SA, pourvoi rejeté par l'arrêt de la Cour de cassation précité, Demathieu et Bard). Il convient d'ailleurs de relever que l'information judiciaire ouverte en 2001 devant le Tribunal de grande instance de Rouen ne s'est pas encore traduite par un jugement au fond.
313. En outre, les entreprises mises en cause ne démontrent pas que la possibilité de se défendre contre les faits qui leur étaient reprochés aurait été affectée de façon personnelle, effective et irrémédiable par la durée de la procédure.
314. A cet égard, les sociétés font notamment valoir que, compte tenu de l'ancienneté des faits, elles ne disposent plus des documents à décharge relatifs aux marchés d'appels d'offres en cause et que les responsables impliqués dans la commission des pratiques ne sont aujourd'hui plus présents dans l'entreprise, rendant ainsi plus difficile la possibilité de recueillir leur témoignage.
315. Il convient de relever que l'affaire instruite devant le Conseil puis l'Autorité de la concurrence s'articule avec la procédure pénale portant, parmi d'autres incriminations, sur les pratiques anticoncurrentielles qui font l'objet de la présente décision, imputées aux personnes physiques sur le fondement de l'article L. 420-6 du Code de commerce. Ainsi, les entreprises dont les responsables ont été poursuivis pour avoir pris une part personnelle et déterminante dans la conception, l'organisation ou la mise en œuvre des ententes à laquelle elles ont elles-mêmes participé n'ont pu ignorer l'existence d'une information pénale qui a donné lieu à de nombreux interrogatoires et à des enquêtes : ces entreprises ont par conséquent été en mesure de sauvegarder les preuves qui leur auraient permis de renverser les charges pesant contre elles (voir, dans le même sens, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 24 juin 2008, France Travaux, ou la décision n° 07-D-15 du 9 mai 2007 relative à des pratiques mises en œuvre dans les marchés publics relatifs aux lycées d'Ile-de-France, point 193).
316. Les entreprises ont eu connaissance du fait qu'elles auraient à répondre des pratiques en cause au plus tard en mars 2002 en ce qui concerne Terh (cote 2485), en mars 2003 en ce qui concerne Degaine (cote 4125), en octobre 2002 en ce qui concerne Quélin (cote 3581) en mai 2002 en ce qui concerne Faber SA (cote 2816), en avril 2003 en ce qui concerne Pavy (cote 4152) et en avril 2002 en ce qui concerne Charpentier PM (cote 2556), à l'occasion des interrogatoires de leurs représentants, diligentés dans le cadre de la procédure pénale. Pour ces entreprises, les plus anciens des marchés retenus par la notification de griefs datent respectivement d'avril 1998 (Tehr), de juillet 1999 (Degaine) de février 1998 (Quélin, Charpentier PM et Faber SA), de décembre 1997 (Pavy). Par ailleurs, les pratiques de répartition de marché reprochées à ces entreprises se sont poursuivies au moins jusqu'en février 2001 s'agissant de Degaine, en novembre 2001 s'agissant de Quélin, en janvier 2002 s'agissant de Terh, en février 2002 s'agissant de Pavy et en octobre 2001 s'agissant de Faber SA et de Charpentier PM.
317. Or, la prudence commandait aux entreprises de conserver toute preuve de nature à établir la licéité de leurs pratiques jusqu'à la fin de la prescription fixée par l'article L. 462-7 du Code de commerce, dont le délai a été porté de trois ans à cinq ans par l'ordonnance du 4 novembre 2004, et qui avait été interrompue dans la présente affaire par les actes pris dans le cadre de l'information judiciaire ouverte devant le Tribunal de grande instance de Rouen.
318. Par ailleurs, la Cour de cassation a jugé que les entreprises incriminées par l'Autorité de la concurrence " sont responsables de la déperdition éventuelle des preuves qu'elles entendaient faire valoir tant que la prescription (...) n'était pas acquise " (Com., 12 janvier 1999, Bull. IV n° 9). A cet égard, les motifs d'ordre interne à l'entreprise incriminée sont indifférents. La Cour de cassation a précisé qu'aucune violation des droits de la défense n'était démontrée lorsque " les difficultés alléguées [relatives à la conservation des preuves] dues à des causes internes aux deux sociétés tenant aux changements intervenus dans leurs directions respectives par suite de leur fusion, sont sans lien avec le déroulement de l'instruction et de la procédure suivie devant le Conseil " (Com., 28 janvier 2003, Bull. IV n° 12).
319. Il résulte de ce qui précède que les sociétés Tehr, Degaine, Quélin, Faber SA, Charpentier PM et Pavy, à qui il incombait de conserver les éléments à décharge de nature à renverser les charges pesant contre elles dès la mise en cause de leurs dirigeants dans le cadre de la procédure pénale, ne démontrent pas que la durée de la procédure devant l'Autorité de la concurrence les aurait effectivement privées de la possibilité de se défendre utilement contre les griefs qui leur étaient reprochés. Partant, le moyen tiré de la violation du principe de délai raisonnable doit être écarté pour ce qui les concerne.
320. S'agissant de la société Pateu & Robert, celle-ci fait valoir qu'elle n'a fait l'objet d'aucune mesure d'enquête ni d'aucune audition, dans le cadre de la procédure pénale comme dans le cadre de la procédure instruite par les services du Conseil de la concurrence, avant l'envoi de la notification de griefs le 16 décembre 2008 (25), soit sept ans après les faits qui lui étaient reprochés, à savoir une concertation avec ses concurrents à l'occasion de deux appels d'offres dans la région Bourgogne en octobre et novembre 2001. Elle souligne que, ses dirigeants n'ayant pas été mis en cause dans le cadre de la procédure pénale, ils n'ont pas pu répondre aux déclarations des dirigeants d'entreprises concurrentes par le biais, notamment, d'auditions dont la teneur aurait pu être actée dans les procès-verbaux de la procédure pénale. Elle soutient qu'elle n'était plus en mesure de recueillir d'éventuels témoignages à décharge, près de huit ans après les faits, alors que cinq dirigeants s'étaient succédé à la tête de la société et que les principaux cadres de l'époque avaient quitté l'entreprise.
321. Toutefois, l'entreprise ne démontre pas qu'à la date de la notification des griefs, ses possibilités de réfuter ceux-ci étaient effectivement atteints du fait de l'écoulement d'un délai déraisonnable au cours de la procédure antérieure d'enquête.
322. En effet, la société Pateu & Robert n'a pas été mise en cause sur le fondement des déclarations de dirigeants d'entreprises concurrentes mais sur la base des écoutes téléphoniques effectuées dans le cadre de la procédure pénale et, plus particulièrement, de deux conversations entre M. 7..., dirigeant de la société Pateu & Robert, et M. E..., cadre-dirigeant du groupe M. Lefèvre, au cours desquelles ont eu lieu des échanges sur les prix des offres que les entreprises s'apprêtaient à déposer (voir points 229 et s. ci-dessus).
323. Dans ce contexte, la société mise en cause n'expose aucunement la nature des éclaircissements qui auraient été nécessaires à sa défense pour apprécier la portée des conversations interceptées. Elle ne précise pas quels renseignements émanant de témoins des faits auraient pu être utiles à sa défense. Au demeurant, elle ne précise pas les circonstances rendant impossible le témoignage des dirigeants ayant quitté l'entreprise.
324. Par ailleurs, si la société soutient que les pièces à décharge ont été détruites compte tenu de l'ancienneté des marchés en cause, et que les pièces de la procédure administrative de l'appel d'offres figurant au dossier (avis d'appel public à la concurrence, avis d'attribution, rapport de présentation du marché, rapports des commissions chargées de l'attribution des marchés) n'étaient pas utiles à sa défense, elle ne précise pas la nature et la portée des documents qui auraient été nécessaires à sa défense et que le délai écoulé entre les faits et la notification de griefs l'empêcherait de produire.
325. Ainsi, l'argumentation de Pateu & Robert, qui revêt un caractère général, n'est pas de nature à établir la réalité d'une violation des droits de la défense, laquelle doit être examinée en fonction des circonstances spécifiques de chaque cas d'espèce. Partant, le moyen tiré de la violation du principe de délai raisonnable doit également être écarté pour ce qui la concerne.
4. SUR L'UTILISATION DES PIÈCES DU DOSSIER PÉNAL
a) En ce qui concerne l'opposabilité des pièces du dossier pénal
326. La société Charpentier PM fait valoir que les déclarations de son représentant dans le cadre de la procédure pénale ne lui seraient pas opposables dès lors qu'elles ont évolué au cours de la garde à vue et que les questions posées par l'officier de police judiciaire l'obligeaient à reconnaître l'existence de l'entente. La société Pavy soutient que l'Autorité de la concurrence ne peut utiliser les déclarations obtenues dans le cadre des gardes à vue des responsables des entreprises en cause, dès lors que celles-ci se sont déroulées dans des conditions contraires à la Constitution, ainsi qu'il résulte de la décision du Conseil constitutionnel du 29 juillet 2010.
327. Aux termes de l'article L. 463-5 de Code de commerce : " Les juridictions d'instruction et de jugement peuvent communiquer au Conseil de la concurrence [aujourd'hui, l'Autorité de la concurrence], sur sa demande, les procès-verbaux ou rapports d'enquête ayant un lien direct avec des faits dont le Conseil est saisi ". Cet article ne prévoit aucune restriction dans l'utilisation des pièces pénales communiquées au Conseil, celles-ci étant donc opposables aux parties dans les mêmes conditions que les pièces rassemblées dans le cadre d'une enquête administrative.
328. Les juridictions de contrôle ont confirmé à maintes reprises que le Conseil ou l'Autorité de la concurrence pouvait régulièrement utiliser les éléments de preuve recueillis au cours d'une instruction pénale pour constater une infraction au droit de la concurrence. Cette prérogative n'est pas contraire au principe de l'égalité des armes, nonobstant la circonstance que les entreprises n'ont pas la faculté d'accéder à l'entier dossier pénal, mais aux seules pièces utilisées par le rapporteur pour fonder les griefs et communiquées aux parties. La Cour de cassation a ainsi jugé que : " la prérogative permettant au Conseil de demander, pour accomplir sa mission de protection de l'ordre public économique, aux juridictions d'instruction et de jugement la communication des procès-verbaux ou rapports d'enquête ayant un lien direct avec des faits dont il est saisi, lesquels sont à la suite de la notification des griefs, communiqués aux parties et soumis au débat contradictoire, ne constitue pas par elle-même une atteinte au principe de l'égalité des armes " (arrêt du 13 octobre 2009, n° 08-18.224, Spie, rejetant le pourvoi dirigé contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 3 juillet 2008, Eiffage Construction, confirmant la décision n° 07-D-15 précitée ; voir, dans le même sens, les arrêts de la Cour de cassation du 13 octobre 2009, n° 08-17.269, et du 15 janvier 2008, n° 07-11-677, Colas Ile-de-France Normandie).
329. En l'espèce, l'ensemble des documents et pièces transmis par le juge d'instruction qui ont été utilisés par les rapporteurs pour fonder les griefs notifiés le 16 décembre 2008 ont été versés au dossier, communiqués aux parties et soumis au débat contradictoire. Les entreprises mises en cause ont ainsi pu faire valoir leurs observations et présenter d'éventuels éléments à décharge, dans les délais prévus par les dispositions de l'article L. 463-2 du Code de commerce.
330. La Cour d'appel de Paris a précisé qu'il revient à l'Autorité de la concurrence d'examiner les contestations des entreprises mises en cause quant à la validité ou la force probante des documents retenus contre elles (voir, en ce sens, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 3 juillet 2008 précité). Les contestations des entreprises relatives à la valeur probante des éléments recueillis au cours de la procédure pénale seront examinées dans le cadre de l'analyse du bien-fondé des griefs développée ci-après.
331. S'agissant plus particulièrement de la validité des procès-verbaux de garde à vue, contestée par la société Pavy, il y a lieu de relever que, dans sa décision n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010, le Conseil constitutionnel a décidé que la déclaration d'inconstitutionnalité des dispositions du Code pénal relatives à l'organisation des gardes à vue qu'il prononçait prendrait effet le 1er juillet 2011. Il a précisé que " les mesures prises avant cette date en application des dispositions déclarées contraires à la Constitution ne peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité " (cons. 30). De même, si la Cour de cassation a jugé que l'article 6 de la CEDH imposait le droit de toute personne gardée à vue d'être informée de son droit de se taire et de bénéficier, sauf renonciation non équivoque, de l'assistance d'un avocat, la Cour a précisé que " ces règles de procédure ne peuvent s'appliquer immédiatement à une garde à vue conduite dans le respect des dispositions législatives en vigueur lors de sa mise en œuvre, sans porter atteinte au principe de sécurité juridique et à la bonne administration de la justice ; que ces règles prendront effet lors de l'entrée en vigueur de la loi devant, conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010, modifier le régime juridique de la garde à vue, ou, au plus tard, le 1er juillet 2011 " (Crim., trois arrêts du 19 octobre 2010, n° 10-82.902 n° 10-82.306 et n° 10-85.051).
332. Dans ces conditions, l'Autorité de la concurrence peut valablement utiliser les procès-verbaux relatifs et consécutifs à la garde à vue des responsables des entreprises concernées dans le cadre de la procédure pénale ouverte devant le Tribunal de grande instance de Rouen pour prouver l'existence d'une infraction aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
b) En ce qui concerne les conséquences procédurales de l'instance en cours devant le Tribunal de grande instance de Rouen
333. Les sociétés Terh, Charpentier PM, Pavy et Degaine soulignent que la procédure pénale est toujours pendante devant le Tribunal de grande instance de Rouen et que l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel en date du 8 septembre 2006 a été annulée en raison de son imprécision. Elles indiquent qu'une nouvelle ordonnance de renvoi et de non-lieu partiel a été prise le 15 décembre 2009, reconnaissant l'absence d'éléments suffisants pour démontrer l'existence de certaines des pratiques anticoncurrentielles en litige.
334. La Cour de cassation a précisé que, malgré le lien étroit institué par le législateur entre les faits à la source du délit pénal de l'article L. 420-6 du Code de commerce et les infractions au droit de la concurrence réprimées par les articles L. 420-1 et L. 420-2 du même Code, qui permet à l'action administrative de bénéficier des actes interruptifs de la prescription de l'action publique, la survie de l'action administrative n'est pas placée dans la dépendance de celle de l'action publique, les deux actions, indépendantes, suivant leur propre évolution en fonction des actes accomplis par chacune des autorités compétentes (arrêt précité du 13 octobre 2009, Colas Ile-de-France Normandie).
335. Par ailleurs, il convient de relever qu'en principe, l'autorité de la chose jugée au pénal ne s'impose aux autorités administratives qu'en ce qui concerne les constatations de fait que les juges répressifs ont retenues et qui sont le support nécessaire de leurs décisions (décision du Conseil d'Etat du 8 janvier 1971, ministre de l'Intérieur/Dame Desamis, Ass. n° 77800 ; ou, récemment, décision du 10 octobre 2003, Commune de Soisy-sous-Montmorency et Société anonyme pour l'aide à l'accession à la propriété des locataires, n° 259111).
336. Au cas d'espèce, le jugement du Tribunal correctionnel de Rouen en date du 2 décembre 2008 ne procède à aucune constatation quant aux faits en litige devant l'Autorité de la concurrence. En effet, il se borne à constater l'imprécision de l'ordonnance de renvoi du 8 septembre 2006 pour en prononcer l'annulation : " le dispositif de l'ordonnance ne donne aucune précision. Or, il est impératif d'identifier les marchés publics à l'occasion desquelles les pratiques anticoncurrentielles auraient été mises en œuvre (...) En l'absence de toute démonstration ou allégation quant à l'existence d'une entente interrégionale regroupant tous les mis en cause, on ne peut conclure à l'implication de chacun sur l'ensemble des marchés (...) Mais il n'est nulle part suggéré que les poursuites à l'encontre des prévenus se limitent aux marchés sur lesquels les propos sont rapportés (...) En tout état de cause, l'ordonnance de renvoi ne permet pas aux prévenus de connaître les faits pour lesquels ils sont poursuivis (...) l'imprécision étant générale et les faits étant commis en coaction, il y a lieu d'annuler l'ordonnance du 8 septembre 2006 dans toutes ses dispositions concernant les infractions en matière de concurrence ". Par ailleurs, l'ordonnance du juge d'instruction en date du 15 décembre 2009, qui ordonne le renvoi devant le tribunal correctionnel de dix-huit responsables d'entreprises sur le fondement des dispositions de l'article L. 420-6 du Code de commerce, tout en considérant insuffisantes les charges afférentes à certains marchés spécifiques, n'est pas revêtue de l'autorité de la chose jugée.
337. L'Autorité de la concurrence n'est donc liée dans la présente affaire par aucune constatation de fait retenue par le juge pénal à l'appui d'une décision revêtue de l'autorité de la chose jugée.
338. Enfin, il y a lieu de souligner qu'en tout état de cause, si les constatations de fait qui sont le support nécessaire d'une décision pénale s'imposent à elle, il appartient à l'Autorité de la concurrence de donner aux faits qui lui sont soumis leur qualification juridique au regard des dispositions des articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce, sous le contrôle de la Cour d'appel de Paris.
5. SUR LE RESPECT DES DROITS DE LA DÉFENSE
a) En ce qui concerne l'absence d'audition avant l'envoi de la notification de griefs
339. La société Pavy se plaint de ne pas avoir été auditionnée par les rapporteurs avant l'envoi de la notification de griefs du 26 janvier 2009. Elle fait valoir que, compte tenu de cette circonstance, le délai de deux mois prévu par l'article L. 463-2 du Code de commerce pour présenter des observations en réponse était trop court pour lui permettre d'exercer utilement sa défense, alors que le dossier d'instruction contenait plusieurs milliers de pièces.
340. La Cour d'appel de Paris a cependant jugé que la régularité de la procédure ne pouvait être contestée à raison du défaut d'audition des responsables d'une entreprise mise en cause devant l'Autorité de la concurrence pendant la phase de la procédure préalable à la notification de griefs, phase dont la Cour de cassation a elle aussi rappelé le caractère non contradictoire (voir point 309 ci-dessus) : " l'audition de personnes intéressées constitue une faculté laissée à l'appréciation du rapporteur ou du Conseil, eu égard au contenu du dossier ; (...) de surcroît, le fait que les dirigeants d'une entreprise n'aient pas été entendus au cours de l'enquête et de l'instruction est, en l'absence d'obligation légale en la matière, sans incidence sur la régularité de la procédure, dès lors qu'à compter de la notification de griefs et lors des différentes phases de la procédure, l'entreprise a été en mesure (...) de faire valoir ses observations en temps utile " (arrêt du 29 janvier 2008, Le Goff Confort).
341. Au cas d'espèce, les rapporteurs ont estimé que les documents et pièces de la procédure pénale qui leur avaient été communiqués en application de l'article L. 463-5 du Code de commerce, ainsi que les informations complémentaires communiquées par les maîtres d'ouvrage, telles que les avis d'appels d'offres, avis d'attribution et rapports de présentation, suffisaient à caractériser les griefs notifiés, sans qu'il soit besoin de procéder à l'audition des entreprises concernées.
342. Les sociétés mises en cause ont pu faire valoir leurs observations à compter de la notification de griefs, qui marque l'ouverture de la phase contradictoire de la procédure. Elles ont ainsi bénéficié du délai de deux mois pour présenter des observations écrites, à la suite de la notification de griefs du 16 décembre 2008, puis à la suite du rapport du 1er juin 2010, conformément aux dispositions de l'article L. 463-2 du Code de commerce. Elles ont par ailleurs été mises à même de présenter leurs observations orales au cours de la séance de l'Autorité du 22 octobre 2010. Il résulte de ce qui précède qu'aucune irrégularité de procédure ne saurait être constatée à raison du défaut d'audition des entreprises en cause.
343. S'agissant de l'insuffisance alléguée du délai de deux mois pour répondre à la notification de griefs et au rapport des services d'instruction, la société Pavy ne démontre pas en quoi ce délai aurait été insuffisant pour lui permettre de réunir les éléments utiles à sa défense. A cet égard, il convient de relever que la société n'a pas fait usage de la faculté qui lui était ouverte de solliciter un délai supplémentaire pour la consultation du dossier et la production de ses observations, conformément aux prévisions de l'alinéa 4 de l'article L. 463-2 Code de commerce.
b) En ce qui concerne l'accès au dossier
344. La société Pavy se plaint du classement de certaines pièces au titre du secret d'affaires au motif que l'Autorité de la concurrence ne saurait fonder sa décision sur des éléments non soumis au débat contradictoire.
345. Aux termes de l'article L. 463-2 du Code de commerce : " (...) le rapporteur général (...) notifie les griefs aux intéressés ainsi qu'au commissaire du Gouvernement, qui peuvent consulter le dossier sous réserve des dispositions de l'article L. 463-4 et présenter leurs observations dans un délai de deux mois ". Selon une jurisprudence constante, le principe du contradictoire est respecté lorsque les parties ont disposé, à compter de la notification des griefs, de la faculté de consulter l'ensemble des pièces ayant servi à établir les griefs notifiés (voir, en ce sens, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 24 janvier 2006, Ordre des avocats au barreau de Marseille).
346. Par ailleurs, l'article L. 463-4 du Code de commerce dispose que : " Sauf dans les cas où la communication ou la consultation de ces documents est nécessaire à l'exercice des droits de la défense d'une partie mise en cause, le rapporteur général de l'Autorité de la concurrence peut refuser à une partie la communication ou la consultation de pièces ou de certains éléments contenus dans ces pièces mettant en jeu le secret des affaires d'autres personnes. Dans ce cas, une version non confidentielle et un résumé des pièces ou éléments en cause lui sont accessibles ".
347. Au cas d'espèce, par décisions n° 09-DSADEC-26 du 2l avril 2009 et n° 10-DSADEC-17 du 16 septembre 2010, le président de l'Autorité de la concurrence a procédé, à la demande de la société Faber SA, au classement dans une annexe confidentielle de certains documents transmis par celle-ci. Ces documents comportaient des informations relatives à la situation financière et à l'activité commerciale de la société, et notamment aux dépenses, aux recettes et à la marge dégagée sur les chantiers sur lesquels elle est intervenue. Ces informations commerciales et confidentielles mettaient en jeu le secret des affaires de la société Faber SA. Une version non confidentielle de ces pièces a été versée au dossier, conformément aux dispositions de l'article L. 463-4 du Code de commerce.
348. Il est constant que les documents ayant fait l'objet d'un classement pour protection du secret d'affaires n'ont pas servi à établir les griefs notifiés. Par ailleurs, compte tenu de la nature des informations en cause, propres à la société Faber SA, ces documents n'étaient nullement nécessaires à l'exercice par la société Pavy de ses droits de la défense. Partant, le moyen soulevé ne peut qu'être écarté.
c) En ce qui concerne l'analyse des griefs développée au stade du rapport
349. La société Chevalier Paris critique la " réinterprétation " des griefs effectuée au stade du rapport des services d'instruction du 1er juin 2010, distinguant, en ce qui concerne le grief d'entente au niveau national visé par la notification de griefs du 16 décembre 2008, des pratiques générales d'ententes par régions et une entente nationale de répartition des marchés, et proposant l'abandon de " l'aspect du grief " relatif à l'entente nationale. La société Charpentier PM soutient que les griefs d'entente régionale constituent des griefs nouveaux, qui ne pouvaient régulièrement lui être notifiés au stade du rapport.
350. Un grief est un ensemble de faits, qualifiés juridiquement et imputés à une ou plusieurs entreprises. Dans un arrêt du 23 février 2010, Expedia Inc., la Cour d'appel de Paris a rappelé que la notification des griefs doit " contenir un exposé des griefs libellé dans des termes suffisamment clairs, fussent-ils sommaires, pour permettre aux intéressés de prendre effectivement connaissance des comportements qui leur sont reprochés (...) ; le principe de la contradiction et les droits de la défense sont respectés lorsque la décision ne met pas à la charge des intéressés des infractions différentes de celles visées dans les notifications de griefs et ne retient que des faits sur lesquels ils ont eu l'occasion de s'expliquer ". La vérification de la précision d'une notification de griefs doit se faire " au regard non seulement de la formule finale d'accusation, mais aussi du corps même de la notification de griefs " (arrêt du 24 juin 2008, France Travaux).
351. Au cas d'espèce, la formule d'accusation de la notification de griefs en date du 16 décembre 2008 retient des griefs " au niveau régional ", classés selon les régions suivantes : Haute-Normandie, Basse-Normandie, Picardie, Aquitaine, Ile-de-France, Bourgogne, Nord-Pas-de-Calais, Champagne-Ardenne, et Pays-de-la-Loire. Pour chacune de ces régions, elle fait état d'une liste de marchés spécifiques ayant donné lieu à des ententes entre sociétés, en précisant pour chacun d'entre eux le nom des participantes à l'entente. Elle retient, par ailleurs, un grief " propre à la société M. Lefèvre et à la société Coefficient ". Enfin, elle retient un grief " au niveau national ", pour un territoire comprenant, outre les neuf régions visées par la première catégorie de griefs, la Lorraine, l'Auvergne et Rhône-Alpes.
352. Dans ses motifs, la notification de griefs identifie en premier lieu une entente généralisée dans le secteur de la rénovation des monuments historiques, étendue à l'ensemble du territoire (§ 47 à 79 de la notification). Elle précise en second lieu que les entreprises se mettaient d'accord entre elles dans un cadre régional (§ 80 à 363 de la notification). Pour chacune de ces régions, elle dresse la liste des marchés spécifiques ayant donné lieu à des concertations et échanges d'informations entre les sociétés, en précisant le nom des entreprises concernées.
353. Il résulte de ce qui précède que la notification de griefs a permis aux entreprises mises en cause de prendre connaissance des comportements qui leur étaient reprochés, et de s'en expliquer, ce qu'elles ont d'ailleurs fait dans le cadre de leurs observations en réponse à la notification de griefs, dans lesquelles elles ont notamment contesté l'existence d'une entente de dimension nationale. Les parties ont ainsi pu, dans le détail, contester la matérialité des faits relevés par les services d'instruction, la qualification qui leur a été attribuée et l'imputation qui en a été faite.
354. Si les services d'instruction ont, au stade du rapport du 1er juin 2010 et à la suite des observations des parties, fait évoluer leur analyse et proposé d'abandonner le grief d'entente au niveau national, en effectuant dans ce cadre une nouvelle présentation et classification des griefs notifiés, cette circonstance n'a pas eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense des parties mises en cause. En effet, il résulte du caractère contradictoire de la procédure que l'analyse faite dans le rapport peut évoluer par rapport à celle développée dans la notification des griefs (voir, à cet égard, la décision de l'Autorité de la concurrence n° 10-D-28 relative aux tarifs et aux conditions liées appliquées par les banques et les établissements financiers pour le traitement des chèques remis aux fins d'encaissement, point 160). Au cas d'espèce, aucun grief nouveau n'a été notifié aux parties, dès lors que les ententes régionales comme les ententes propres à chaque marché étaient identifiées dans les motifs comme dans la formule d'accusation de la notification de griefs du 26 janvier 2009.
355. Par ailleurs, il convient de rappeler que l'Autorité de la concurrence n'est pas liée par les appréciations du rapporteur et doit statuer sur la totalité des griefs notifiés (arrêt de la Cour d'appel de Paris du 19 juin 2007, Philips France, non cassé sur ce point). Il revient donc à l'Autorité, dans le cadre de la présente décision, de se prononcer sur l'ensemble des infractions visées par la notification de griefs, au niveau régional comme au niveau national.
356. Ainsi, et dès lors que les parties ont bénéficié du délai de deux mois prévu par l'article L. 463-2 du Code de commerce pour présenter leurs observations sur les analyses des services d'instruction, aucune atteinte au principe du contradictoire ne saurait être constatée à raison de l'analyse des griefs développée dans le rapport.
C. SUR L'APPLICABILITÉ DU DROIT COMMUNAUTAIRE
357. Les articles 81 et 82 CE, en vigueur au cours de la période de commission des pratiques, s'appliquent aux accords horizontaux et verticaux et aux pratiques abusives d'entreprises qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres. Il résulte de la jurisprudence communautaire que, pour être susceptibles d'affecter le commerce entre États membres, une décision, un accord ou une pratique doivent, sur la base d'un ensemble d'éléments objectifs de droit ou de fait, permettre d'envisager avec un degré de probabilité suffisant qu'ils puissent exercer une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d'échanges entre États membres, et cela de manière à faire craindre qu'ils puissent entraver la réalisation d'un marché unique entre États membres. Il faut, en outre, que cette influence ne soit pas insignifiante (arrêt du 11 juillet 1985, Remia e.a./Commission, 42/84, Rec. p. 2545, point 22, du 28 avril 1998, Javico, C-306-96, Rec. p. I-1983, point 16, et Ambulanz Glöckner, C-475-99, Rec. p. I-8089, point 48).
358. S'agissant de la notion de " commerce entre Etats-membres ", les lignes directrices de la Commission relatives à la notion d'affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité (JO 2004, C 101, p. 81) précisent : " La notion de "commerce" n'est pas limitée aux échanges transfrontaliers traditionnels de produits et de services, mais a une portée plus large qui recouvre toute activité économique internationale, y compris l'établissement. Cette interprétation concorde avec l'objectif fondamental du traité consistant à favoriser la libre circulation des biens, des services, des personnes et des capitaux (...) D'après une jurisprudence constante, la notion de "commerce" englobe aussi les cas où des accords et pratiques affectent la structure de la concurrence sur le marché. (...) La condition de l'existence d'une affectation du commerce "entre États membres" suppose qu'il doit y avoir une incidence sur les activités économiques transfrontalières impliquant au moins deux États membres. (...) L'application du critère de l'affectation du commerce est indépendante de la définition des marchés géographiques en cause, car le commerce entre États membres peut également être affecté dans des cas où le marché en cause est national ou subnational " (points 19 à 22).
359. Aux termes des lignes directrices de la Commission précitées : " Lorsque des accords ou des pratiques abusives couvrent le territoire d'un seul État membre, il peut s'avérer nécessaire de procéder à un examen plus détaillé de la capacité des accords ou des pratiques abusives d'affecter le commerce entre États membres. (...) dans de nombreux cas impliquant un seul État membre, la nature de l'infraction alléguée, et notamment sa propension à interdire l'accès au marché national, renseigne bien sur la capacité de l'accord ou de la pratique d'affecter le commerce entre États membres " (point 77). Par ailleurs, s'agissant d'accords ne couvrant qu'une partie d'un Etat-membre, la Commission a précisé que " Si un accord interdit l'accès à un marché régional, le volume de ventes affecté doit être significatif par rapport au volume de ventes global des produits en cause à l'intérieur de l'État membre en cause pour que le commerce soit affecté de manière sensible " (point 90). Enfin, " les accords de nature locale ne sont pas, en eux-mêmes, susceptibles d'affecter sensiblement le commerce entre Etats-membres " (point 91).
360. Au cas d'espèce, les pratiques reprochées affectent le marché de la restauration de monuments historiques. Elles n'affectent qu'une partie du territoire national.
361. Il résulte des éléments de l'enquête qu'aucun des opérateurs présents sur ce marché n'est ressortissant d'un autre Etat-membre de l'Union européenne. En effet, les entreprises intervenant sur les chantiers de restauration de monuments historiques dans les zones concernées par l'enquête sont principalement des petites et moyennes entreprises françaises ou des filiales de groupes français, implantées au niveau régional. Les marchés publics de restauration de monuments historiques, de dimension locale, ne faisaient pas l'objet d'avis d'appels à la concurrence publiés au Journal Officiel des Communautés Européennes, dès lors qu'ils ne dépassaient pas les seuils prévus par les directives communautaires portant coordination des procédures de passation des marchés publics. Aucun élément du dossier n'indique l'existence d'offreurs en provenance d'autres Etats- membres de l'Union européenne susceptibles d'intervenir sur le marché, et dont les pratiques en cause auraient pu influencer la décision de répondre aux appels d'offres lancés par les maîtres d'ouvrage (voir, pour l'application d'un tel critère, et a contrario, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 24 novembre 2009, Chevron Products Company). De même, aucun élément n'indique que des entreprises d'un autre Etat-membre seraient susceptibles de s'établir sur le marché français de la restauration des monuments historiques. Par ailleurs, du fait de l'absence d'opérateurs déployant une activité transfrontalière sur le marché, les pratiques en cause ne sont pas susceptibles d'affecter la structure de la concurrence au niveau communautaire.
362. Dans ces conditions, les éléments du dossier ne permettent pas d'envisager avec un degré de probabilité suffisant que les pratiques en litige étaient susceptibles d'exercer de manière sensible une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d'échanges entre États membres. Partant, les stipulations de l'article 81 CE, devenu 101 TFUE, ne sont pas applicables en l'espèce.
D. SUR LES PRATIQUES
363. Aux termes de l'article L. 420-1 du Code de commerce, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les ententes expresses sont interdites, notamment lorsqu'elles tendent à " faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse " et à " répartir les marchés ".
364. A titre liminaire, il convient de rappeler que, lorsque les pratiques qui ont fait l'objet de la notification des griefs sont recherchées au titre de la prohibition des ententes, il n'est pas nécessaire de définir le marché avec précision, comme en matière d'abus de position dominante, dès lors que le secteur et les marchés ont été suffisamment identifiés pour permettre de qualifier les pratiques observées et de les imputer aux opérateurs qui les ont mises en œuvre (décision du Conseil de la concurrence n° 05-D-27 du 15 juin 2005 relative à des pratiques relevées dans le secteur du thon blanc, point 28).
365. En l'espèce, le secteur concerné par les pratiques constatées au titre des griefs d'ententes anticoncurrentielles est celui de la restauration de monuments historiques en France, sans qu'il soit besoin de définir avec précision les limites géographiques des marchés en cause.
366. Seront successivement examinés ci-après :
- les griefs d'ententes de répartition des marchés mises en œuvre au niveau régional,
- le grief d'entente spécifique notifié aux sociétés M. Lefèvre et Coefficient,
- le grief d'entente de répartition des marchés mise en œuvre au plan national.
1. S'AGISSANT DES ENTENTES MISES EN OEUVRE AU NIVEAU RÉGIONAL
a) Sur la valeur probante des éléments recueillis
367. Les entreprises contestent la valeur probante des éléments relevés par les services d'instruction pour démontrer leur participation effective à des ententes anticoncurrentielles. S'agissant du cahier saisi dans les locaux de l'entreprise Lanfry, la société M. Lefèvre fait valoir qu'il constitue un simple document interne à cette société, qui ne laisse pas apparaître de concertation préalable au dépôt des offres. Chevalier Paris soutient que ce cahier ne permet pas d'établir qu'elle aurait bénéficié d'offres de couverture de ses concurrents. S'agissant des déclarations des représentants d'entreprises concurrentes, la société M. Lefèvre estime que celles-ci, recueillies au cours de gardes à vue, ont un caractère " aléatoire ". Enfin, les entreprises contestent la pertinence des indices retenus pour caractériser leur participation à des ententes sur les divers marchés particuliers identifiés par la notification de griefs.
368. Il résulte d'une jurisprudence constante que la preuve d'une pratique anticoncurrentielle peut résulter, soit de preuves matérielles se suffisant à elles-mêmes, soit d'un faisceau d'indices graves, précis et concordants constitués par le rapprochement de divers éléments recueillis au cours de l'instruction (voir, récemment, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 16 septembre 2010, Raffalli & Cie).
369. S'agissant des procès-verbaux d'audition établis au cours de la procédure pénale, qui sont pleinement opposables aux parties ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus (point 327 et s.), les déclarations recueillies émanent des principaux responsables des entreprises mises en cause et révèlent de façon concordante l'organisation et la mise en œuvre d'ententes dans le secteur de la restauration de monuments historiques.
370. La valeur probante de la déclaration d'un témoin est d'autant plus grande que cette déclaration va à l'encontre de l'intérêt de l'entreprise à laquelle il appartient. En droit communautaire, la Cour de justice considère que les déclarations allant à l'encontre des propres intérêts de son auteur doivent, en principe, être considérées comme particulièrement fiables (arrêts du 25 janvier 2007, Sumitomo Metal Industries Ltd, C- 403-04 et C-405-04, Rec. p. I-729, point 102, et du 3 septembre 2009, Papierfabrik August Koehler AG, C-322-07, C-327-07 et C-338-07, non encore publié au Rec., point 63).
371. La déclaration d'une entreprise mise en cause pour avoir participé à une entente, dont l'exactitude est contestée par plusieurs autres entreprises inculpées, ne peut toutefois être considérée comme constituant une preuve suffisante de l'existence d'une infraction commise par ces dernières sans être étayée par d'autres éléments de preuve (arrêt du tribunal du 8 juillet 2004, JFE Engineering/Commission, T-67-00, T-68-00, T-71-00 et T-78-00, Rec. p. II-2501, point 219).
372. Dans le cas présent, la déclaration du représentant d'une entreprise reconnaissant sa participation à une entente constitue une preuve se suffisant à elle-même de l'existence et de la participation de l'entreprise à l'infraction en cause.
373. En revanche, une déclaration mettant en cause une entreprise et émanant du représentant d'une entreprise concurrente constitue un simple indice de la participation de l'entreprise concernée à l'entente en cause. Il sera donc recherché si un tel indice est corroboré par d'autres éléments de preuve issus du dossier pénal, tels que des déclarations concordantes d'autres entreprises inculpées, des écoutes téléphoniques ou d'autres indices matériels.
374. Par ailleurs, les références portées dans le " cahier Lanfry ", dont l'objet était, selon les déclarations des représentants de cette société, de recenser les offres de couverture émises par cette dernière au bénéfice de ses concurrentes (voir point 56 ci-dessus), ne seront pas considérées comme une preuve se suffisant à elle-même de la participation de l'entreprise tierce référencée aux ententes en cause, mais comme un indice devant être corroboré par d'autres éléments de preuve.
b) Sur l'articulation entre les pratiques d'ententes générales et les pratiques mises en œuvre à l'occasion de marchés particuliers
375. Les entreprises soutiennent que les pratiques dénoncées ne peuvent être qualifiées d'ententes générales, complexes et continues. M. Lefèvre fait ainsi valoir que la hausse artificielle des prix alléguée ne saurait suffire à démontrer l'existence d'un objectif unique des participants à l'entente, au sens de la jurisprudence applicable.
376. Aux termes de la jurisprudence tant communautaire que nationale, un comportement qui se manifeste par plusieurs décisions ayant un objet anticoncurrentiel unique peut être qualifié d'infraction unique et continue pour la période pendant laquelle il est mis en œuvre.
377. La Cour de justice des Communautés européennes a ainsi jugé " qu'une violation de l'article 81, paragraphe 1, CE peut résulter non seulement d'un acte isolé, mais également d'une série d'actes ou bien encore d'un comportement continu. Cette interprétation ne saurait être contestée au motif qu'un ou plusieurs éléments de cette série d'actes ou de ce comportement continu pourraient également constituer en eux-mêmes et pris isolément une violation de ladite disposition. Lorsque les différentes actions s'inscrivent dans un " plan d'ensemble ", en raison de leur objet identique faussant le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun, la Commission est en droit d'imputer la responsabilité de ces actions en fonction de la participation à l'infraction considérée dans son ensemble " (arrêt de la Cour de justice du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C-204-00 P, C-205-00 P, C-211-00 P, C-213-00 P, C-217-00 P et C-219-00 P, Rec. p. I-123, point 258).
378. Une entreprise, qui a participé à une infraction par des comportements qui lui étaient propres et qui visaient à contribuer à la réalisation de l'infraction dans son ensemble, peut être tenue pour responsable, pour toute la période de sa participation à ladite infraction, des comportements mis en œuvre par d'autres entreprises dans le cadre de la même infraction. Tel est le cas lorsqu'il est établi que l'entreprise en question connaissait les comportements infractionnels des autres participants ou qu'elle pouvait raisonnablement les prévoir et qu'elle était prête à en accepter le risque (arrêt de la Cour de justice du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C-49-92 P, Rec. p. I-4125, point 83). Ainsi, le fait que différentes entreprises aient joué des rôles différents dans la poursuite d'un objectif commun n'élimine pas l'identité d'objet anticoncurrentiel et, partant, d'infraction, à condition que chaque entreprise ait contribué, à son propre niveau, à la poursuite de l'objectif commun (arrêts du tribunal de première instance du 15 mars 2000, Cimenteries CBR e.a./Commission, T-25-95, T-26-95, T-30-95 à T-32-95, T-34-95 à T-39-95, T-42-95 à T-46-95, T-48-95, T-50-95 à T-65-95, T-68-95 à T-71-95, T-87-95, T-88-95, T-103-95 et T-104-95, Rec. p. II-491, point 4123).
379. Le tribunal de première instance a précisé que : " la notion d'objectif unique ne saurait être déterminée par la référence générale à la distorsion de la concurrence dans le marché concerné par l'infraction (...). Ainsi, aux fins de qualifier différents agissements en tant qu'infraction unique et continue, il y a lieu de vérifier s'ils présentent un lien de complémentarité en ce sens que chacun d'entre eux est destiné à faire face à une ou à plusieurs conséquences du jeu normal de la concurrence, et contribuent, par le biais d'une interaction, à la réalisation de l'ensemble des effets anticoncurrentiels voulus par leurs auteurs, dans le cadre d'un plan global visant un objectif unique " (arrêt du tribunal de première instance du 28 avril 2010, Amman & Söhne GmbH & Co KG, T-446-05, non encore publié au Rec., points 89 et s. ; dans le même sens, arrêt du 12 décembre 2007, BASF AG, T-101-05 et T-111-05, Rec. p. II-4949, points 179 à 181).
380. Au cas d'espèce, s'agissant des pratiques mises en œuvre dans les régions de Haute-Normandie, Basse-Normandie et Picardie, et ainsi qu'il sera exposé ci-après, les éléments relevés mettent en évidence des ententes ayant pour objet de se répartir les marchés à l'échelon régional, des concertations préalables au dépôt des offres, et la présentation à titre habituel d'offres de couverture à l'occasion des procédures de mise en concurrence organisées par les maîtres d'ouvrage pour la restauration de différents monuments historiques. Les dirigeants des sociétés concernées ont reconnu avoir présenté à de multiples reprises des offres sur des marchés qu'ils ne souhaitaient pas obtenir, dans le seul but de faire nombre et de favoriser l'entreprise désireuse de remporter le marché, à charge pour cette dernière d'adopter un comportement similaire sur un autre marché en faveur de ses concurrents.
381. Ainsi, les concertations et échanges d'informations intervenus à l'occasion d'appels d'offres particuliers, de même que la présentation à titre habituel d'offres de couverture, doivent être considérés comme la mise en œuvre des ententes générales visant à se répartir les marchés entre les entreprises au niveau régional. L'ensemble de ces pratiques présentent un lien de complémentarité évident, en ce sens que chacune d'entre elles est destinée à s'opposer aux conséquences du jeu normal de la concurrence dans le cadre des appels d'offres, qui devrait se traduire par l'ignorance de chacune des entreprises intéressées, lorsqu'elle élabore son offre, de la qualité de ses compétiteurs et de leurs capacités financières à proposer la meilleure prestation ou fourniture possible au prix le plus bas. Par ailleurs, les concertations observées traduisent la mise en œuvre de jeux de compensation entre les entreprises, et donc d'une interdépendance des marchés en cause, celles-ci présentant des offres de complaisance au bénéfice de leurs concurrents dans l'assurance d'obtenir la réciprocité à l'occasion des appels d'offres portant sur les marchés dont elles souhaitent être attributaires. Ainsi, l'ensemble de ces pratiques contribuent, par le biais d'une interaction, à la réalisation des effets anticoncurrentiels voulus par leurs auteurs, dans le cadre d'un plan global visant un objet identique.
382. Par conséquent, la qualification exacte des faits commande de ne pas séparer les pratiques mises en œuvre par les entreprises dans le cadre de chacun des appels d'offres particuliers examinés pour ces régions en les traitant comme autant d'infractions séparées, alors que celles-ci ne constituent que les manifestations successives d'une conduite continue, à savoir des ententes entre les entreprises ayant pour objet de simuler une concurrence auprès des maîtres d'ouvrage tout en coordonnant leur comportement en vue de l'attribution des marchés publics de restauration de monuments historiques.
383. Ainsi, et nonobstant la circonstance que certaines des pratiques constatées à l'occasion de marchés particuliers pourraient également constituer en elles-mêmes et prises isolément une violation des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, ne sera recherchée dans la suite de la présente décision que la participation des entreprises en cause aux ententes régionales générales de répartition des marchés, sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur leur participation à des infractions spécifiques commises à l'occasion de chacun des appels d'offres particuliers énumérés dans la notification de griefs.
384. Lorsque les éléments de preuve ne permettent pas d'établir la participation d'une entreprise donnée à l'entente générale de répartition régionale, il conviendra d'examiner si les pratiques mises en œuvre par cette entreprise à l'occasion d'un marché particulier permettent de caractériser en elles-mêmes une violation des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce sur ce marché spécifique.
c) Sur les pratiques mises en œuvre en Haute-Normandie
385. Seront examinés ci-après les éléments de preuve permettant d'établir l'existence de l'infraction et d'en décrire le fonctionnement, puis, pour chacune des entreprises visées par la notification de griefs, les éléments de preuve permettant d'apprécier sa participation à l'entente et la durée de celle-ci.
Sur le fonctionnement de l'entente
386. A titre liminaire, il convient de rappeler qu'aux termes d'une jurisprudence constante, si chaque marché passé sur appel d'offres, qu'il s'agisse d'un marché public ou d'une délégation de service public, constitue un marché pertinent, l'entente organisée à un échelon plus vaste que chacun des marchés considérés et produisant des effets sur ces marchés, en ce qu'elle conduit les entreprises qui y sont présentes à s'en répartir illicitement les parts, peut être sanctionnée en application des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce (voir, en ce sens, l'arrêt de la Cour de cassation du 13 juin 2004, DTP Terrassement, rejetant le pourvoi contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 14 janvier 2003, SA Bouygues).
387. Au cas d'espèce, les éléments de preuve relevés aux points 68 et suivants ci-dessus démontrent l'existence d'une entente organisée à l'échelon régional, ayant pour objet la répartition des marchés publics de restauration de monuments historiques passés par les maîtres d'ouvrage régionaux, et principalement par la DRAC, entre les entreprises intervenant sur ces marchés, à savoir, Normandie Rénovation, Lanfry, Terh, et, plus marginalement, Dagand.
388. Les éléments recueillis mettent en évidence des concertations mises en œuvre à titre habituel entre les entreprises, prenant la forme de réunions de partage, d'échanges d'informations à l'occasion des appels d'offres et de sollicitations d'offres de couverture.
389. Seront examinés ci-après les accords de partage de marchés, les critères de répartition des marchés entre les entreprises, la mise en œuvre des accords de répartition et l'association à l'entente d'entreprises extérieures à la région.
Les accords de partage
390. S'agissant des accords de partage de marchés, les déclarations concordantes des responsables des sociétés Normandie Rénovation et Lanfry établissent l'existence de réunions au cours desquelles les entreprises implantées dans la région procédaient à la répartition des marchés à venir, et qui se tenaient notamment à la suite des réunions de la cellule régionale du GMH de Haute-Normandie, au cours desquelles les représentants de la DRAC communiquaient aux entreprises les programmations de chantiers à venir. Ainsi, M. B... (Normandie Rénovation) a indiqué avoir participé à des " tables rondes " trois ou quatre fois, en présence des dirigeants des entreprises Lanfry et Terh. Les participants évoquaient alors les chantiers et faisaient part de leurs souhaits d'obtenir des marchés particuliers (point 71). Ces propos ont été confirmés par M. A... (Lanfry) qui a précisé que les souhaits des entreprises étaient évoqués à la suite des réunions de la cellule du GMH, hors la présence des représentants de la DRAC (point 75). L'existence de réunions annuelles de répartition des chantiers est en outre confirmée par M. J..., métreur de la société Lanfry (point 76).
391. Si M. P... (Terh) affirme ne pas avoir participé à des réunions formalisant un partage des marchés dans le cadre de la cellule régionale du GMH, il a quant à lui reconnu l'existence d'une répartition des marchés de nature " empirique ", se traduisant par l'attribution aux entreprises intervenant dans la région d'une quote-part du montant annuel total des marchés passés par la DRAC (point 78).
Les critères de répartition des marchés régionaux
392. Les critères de répartition des marchés ont été décrits par M. B... (Normandie Rénovation), dont les propos ont été confirmés par ceux de M. A... (Lanfry). Il a ainsi exposé que cette répartition obéissait à un critère géographique, les entreprises privilégiant les chantiers géographiquement proches de leur lieu d'implantation, afin de limiter les frais et d'éviter d'imposer des déplacements au personnel. Le principe était de répartir les chantiers de la région entre les entreprises locales, et de solliciter des offres de couverture de la part des entreprises extérieures. Par ailleurs, M. B... a également expliqué que la répartition tenait compte du niveau d'activité des entreprises, c'est-à-dire des chantiers déjà obtenus et des consultations à venir (points 72 et 75). Les modalités d'une répartition des marchés fondée sur la proximité géographique des chantiers avec l'implantation de l'entreprise sont confirmées par les déclarations de M. R..., dirigeant de l'agence de Dagand implantée à Caen en Basse-Normandie, mais intervenant également sur certains chantiers dans le département de l'Eure, en Haute-Normandie (point 79).
393. Par ailleurs, ces propos sont corroborés par l'étude de la répartition des marchés sur une sélection d'appels d'offres dans la région présentée aux points 83 à 124, même si les entreprises ont parfois obtenu des chantiers plus éloignés de leur zone habituelle.
394. En ce qui concerne par exemple la société Lanfry, le dirigeant de la société a déclaré que les accords de partage avaient pour but la conservation par son entreprise de la zone du Grand Rouen (point 75). L'entreprise a ainsi été attributaire des marchés de l'abbatiale de Saint-Ouen à Rouen (point 115) et de Notre-Dame de Bihorel, dans la banlieue rouennaise (point 120) ou des marchés d'Ancretiéville-Saint-Victor (point 110) et de l'abbaye de Jumièges (point 112) à une trentaine de kilomètres de la ville. Par ailleurs, Lanfry était l'attributaire " historique " des chantiers de la cathédrale de Rouen, perdus en 1999 du fait de la présentation d'une offre concurrentielle de Terh, et qu'elle a récupérés en décembre 2000 (marchés de la galerie supérieure de la partie centrale et de la façade Sud de la tour de Beurre, points 91 et 92).
395. De même, en ce qui concerne Dagand, les chantiers obtenus sont situés en majorité dans le secteur d'Evreux, où l'entreprise disposait selon les déclarations de son dirigeant, M. R..., d'un technicien de chantier (point 79). C'est le cas des marchés de l'église de Saint Martin de Nonancourt (point 99) et du château d'Harcourt (point 103), situés à une trentaine de kilomètres d'Evreux, M. R... déclarant par ailleurs être l'attributaire des chantiers de la cathédrale d'Evreux (point 79).
396. Les zones d'intervention de Normandie Rénovation et de Terh apparaissent quant à elles plus largement étendues à l'ensemble de la région Haute-Normandie.
397. Les sociétés mises en cause soutiennent que cette répartition reposerait sur des raisons objectives et non sur une entente anticoncurrentielle dès lors que l'entreprise ayant réalisé la restauration d'un monument dans le passé est généralement attributaire des marchés afférents à ce monument lors d'appels d'offres ultérieurs, la connaissance du bâtiment constituant selon elles une garantie de qualité aux yeux des maîtres d'ouvrage et des maîtres d'œuvre. Ces allégations sont toutefois démenties par les déclarations des dirigeants d'entreprise citées plus haut, qui ont reconnu prendre part à des ententes visant à se répartir les marchés, et par les indices et éléments de preuve établissant l'existence de concertations entre les entreprises avant le dépôt des appels d'offres. D'autre part, aucun élément ne permet de corroborer l'existence d'une préférence alléguée du maître de l'ouvrage pour l'entreprise intervenant habituellement sur un édifice, le représentant de la DRAC de Haute-Normandie ayant au contraire souligné l'effet positif sur les prix du changement des entreprises habituelles sur certains édifices qui a été observé après la fin des ententes (point 258).
La mise en œuvre des accords de répartition
398. S'agissant de la mise en œuvre des accords de répartition, les déclarations concordantes des dirigeants ainsi que les écoutes téléphoniques effectuées dans le cadre de la procédure pénale, dont l'étude des appels d'offres effectuée aux points 83 à 124 présente de nombreux exemples, établissent le caractère habituel des pratiques de concertations et d'offres de couverture à l'occasion des appels d'offres.
399. Selon les déclarations de certains dirigeants, ces contacts avaient pour objet de garantir la bonne mise en œuvre des accords de répartition conclus lors des réunions. M. J... (Lanfry) explique ainsi que la répartition s'effectue au moment des programmations annuelles et que les contacts avec les autres entreprises à l'occasion des appels d'offres constituent une simple " mise en musique " (point 76). Les déclarations ne montrent toutefois pas que le partage des chantiers était nécessairement définitivement arrêté lors des réunions au cours desquelles les entreprises exprimaient leurs " souhaits " (point 390). La pratique habituelle des concertations à l'occasion des appels d'offres correspondait donc également à la mise en œuvre d'accords de répartition plus informels, fondés sur des traditions ou des critères " empiriques " (point 391), mais dont la répétition démontre qu'il s'agissait d'un véritable système mis en place entre les entreprises répondant aux appels d'offres sur la région. La circonstance que ces pratiques n'ont pas été mises en œuvre à l'occasion de l'intégralité des marchés lancés dans la région n'enlève pas son caractère général à l'entente, compte tenu du volume très élevé des marchés ayant fait l'objet de concertations. Cette répétition des concertations démontre bien, en elle-même et indépendamment de l'existence des réunions " formelles " relevée au point 390 ci-dessus, que l'entente était organisée à un échelon plus vaste que celui des marchés individuels en cause.
400. Les procédés mis en œuvre ont été précisément décrits au cours des auditions des responsables des entreprises concernées. M. B... (Normandie Rénovation) a ainsi expliqué avoir l'habitude de rencontrer ou de se concerter par téléphone avec les responsables des entreprises Lanfry et Terh. Il a indiqué adresser des bordereaux de prix de couverture établis par l'entreprise Coefficient, bureau d'étude utilisé par le groupe Lefèvre, à ses concurrents afin que ces derniers déposent des offres de couverture en sa faveur, ou se mettre d'accord avec ces derniers sur le prix global des bordereaux de couverture (point 73). M. P... (Terh) a de même indiqué communiquer à ses concurrents le montant des offres qu'il s'apprêtait à déposer ou un bordereau de prix détaillé afin que ses concurrents puissent déposer une offre supérieure à la sienne (point 78).
L'association à l'entente d'entreprises extérieures à la région
401. Les concertations à l'occasion des appels d'offres avaient également pour objet d'assurer une coordination avec les entreprises extérieures à la région et retirant les dossiers afin que celles-ci ne remettent pas en cause la répartition envisagée. M. J... (Lanfry) explique que les contacts avec les entreprises tierces servaient à s'assurer que les entreprises extérieures ne viennent pas " bouleverser la donne " (point 76).
402. A cet égard, les éléments recueillis mettent également en lumière le recours habituel des entreprises locales à la sollicitation d'offres de couverture auprès d'entreprises extérieures à la région, visant notamment à " faire nombre " pour créer l'apparence d'un degré de concurrence élevé auprès du maître d'ouvrage, ou pour éviter qu'un appel d'offres soit déclaré infructueux en raison du nombre insuffisant d'offres remises. Pour les entreprises tierces, le dépôt d'offres de couverture avait pour but d'obtenir en retour des offres de couverture pour les marchés sur lesquels ces entreprises tierces soumissionnaient dans leur propre zone géographique. La mise en œuvre de ces pratiques dans la région Haute-Normandie est notamment reconnue par les dirigeants de Normandie Rénovation (Lefèvre), Lefèvre SA et Chevalier Nord (points 72, 74, 81).
403. L'étude des résultats des appels d'offres effectués entre janvier 1997 et juillet 2001 a montré que les sociétés Lefèvre, Lanfry, Terh et Dagand avaient été attributaires de l'ensemble des marchés de la région Haute-Normandie, aucun marché n'ayant été attribué aux autres entreprises candidates, malgré la fréquence des soumissions de certaines d'entre elles (point 68).
404. Ainsi, participaient à l'entente en cause non seulement des entreprises implantées en Haute-Normandie, mais également des entreprises extérieures, qui n'étaient pas attributaires de marchés dans la région. Ces pratiques ont en effet permis aux entreprises locales de conserver les marchés régionaux selon le partage convenu entre elles et d'éviter l'arrivée d'entreprises extérieures dans la région, dès lors que ces dernières obtenaient en échange du dépôt d'offres de couverture, des offres de complaisance réciproques des entreprises haut-normandes dans leur propre zone d'intervention.
405. Le fonctionnement de l'entente générale mise en œuvre en Haute-Normandie est illustré par l'étude des appels d'offres spécifiques lancés par les maîtres d'ouvrage de la région Haute-Normandie, exposée aux points 83 à 124 ci-dessus. Celles-ci constituent autant de manifestations successives de l'entente générale par laquelle les entreprises en cause coordonnaient leur comportement en vue de l'attribution des marchés publics de restauration de monuments historiques en Haute-Normandie selon un partage entre les entreprises locales.
Sur la participation des entreprises à l'entente
Le groupe Lefèvre
406. Les déclarations concordantes des responsables du groupe Lefèvre, MM. E..., cadre- dirigeant de la société M. Lefèvre, B..., dirigeant de sa filiale Normandie Rénovation, et O..., responsable de l'agence de Lefèvre SA à Giberville, relevées aux points 70 à 74 ci-dessus, et corroborées par les déclarations des dirigeants d'entreprises concurrentes (points 75 à 80), constituent des preuves directes de la participation des entités du groupe à l'entente mise en œuvre en Haute-Normandie.
407. L'analyse des marchés présentés aux points 83 à 124 ci-dessus fait apparaître le caractère habituel des concertations mises en œuvre par Normandie Rénovation avec ses concurrents et la pratique des offres de couverture. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevés pour la quasi-totalité des 44 appels d'offres analysés (26), dont 21 ont été attribués à Normandie Rénovation, seule ou en groupement. Ces éléments établissent, d'une part, la participation de Normandie Rénovation à des accords de partage de marché ainsi que la mise en œuvre de concertations habituelles avec les entreprises concurrentes à l'occasion des appels d'offres lancés dans la région, et d'autre part, la pratique habituelle par les autres filiales du groupe, et notamment par Lefèvre SA et Léon Noël, d'offres de couverture au bénéfice de Normandie Rénovation comme de ses concurrents.
408. Il résulte de ce qui précède que la participation des filiales de M. Lefèvre à l'entente dénoncée est établie.
409. S'agissant de la durée de la participation de Normandie Rénovation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins avril 1997 (marché de l'église de Saint Jacques de Dieppe, point 84). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en janvier 2002 (marchés de l'église Saint Vincent au Havre, d'Ourville en Caux, de l'entretien de la ville de Rouen et de Saint Sauveur d'Emalleville, points 111 et 122 à 124). S'agissant des autres filiales du groupe, il convient de relever que leur participation est établie d'avril 1997 à décembre 2001 s'agissant de Lefèvre SA (marchés de l'église de Saint Jacques de Dieppe et de l'église Saint Jean-Baptiste de Bléville au Havre, points 84 et 121), et de mars 1999 à juillet 2001 s'agissant de Léon Noël (marchés de la cathédrale de Rouen et du château de Mesnières en Bray, points 89 et 113).
L'entreprise Lanfry
410. La société Lanfry, dont la participation à l'entente est démontrée aussi bien par les déclarations de ses dirigeants que par les éléments matériels relevés au cours de l'instruction, n'a pas contesté les griefs qui lui ont été notifiés.
411. Il convient toutefois de relever, s'agissant de la durée de l'infraction commise, que la société s'est temporairement écartée de l'entente à la suite d'un conflit l'opposant notamment au groupe Lefèvre après l'attribution du chantier de restauration de la façade Ouest de la nef de la cathédrale de Rouen en octobre 1999 (point 90). Il ressort des éléments recueillis au cours de l'instruction, et notamment, des déclarations de M. A..., que ce conflit a pris fin avec la constitution d'un groupement entre les entreprises Lanfry et Terh pour répondre à l'appel d'offres du marché de la façade Sud de la tour de Beurre de la cathédrale de Rouen du 20 décembre 2000 (points 65 et 91). A compter de cette date, Lanfry a repris ses pratiques habituelles de sollicitation et dépôts d'offres de couverture relevées aux points 83 à 124 ci-dessus. Cette abstention temporaire ne constitue toutefois pas, en l'absence d'autres éléments, une cessation de sa participation à l'entente, car elle ne s'est pas distanciée de l'entente générale mise en œuvre en Haute-Normandie. Cette circonstance sera toutefois prise en compte au stade de l'appréciation de la sanction infligée à l'entreprise.
412. La participation de Lanfry à l'entente est établie d'avril 1997 (marché de l'église de Saint Jacques de Dieppe, point 84) à octobre 1999, et de décembre 2000 à janvier 2002 (marchés d'Ourville en Caux, de l'entretien de la ville de Rouen et de Saint Sauveur d'Emalleville, points 111 et 123 à 124).
L'entreprise Terh
413. Bien qu'il n'ait pas reconnu avoir participé à des réunions de partage des marchés, le dirigeant de l'entreprise Terh a reconnu l'existence d'un accord empirique de répartition des marchés entre les entreprises haut-normandes, dans le cadre duquel une quote-part de chiffre d'affaires lui était réservée (point 78). Sa participation à l'entente de répartition est également établie par les déclarations concordantes des dirigeants des entreprises Lefèvre et Lanfry (points 71 et 75).
414. L'analyse des marchés présentés aux points 83 à 124 ci-dessus établit le caractère habituel des concertations mises en œuvre par l'entreprise Terh avec ses concurrents, se traduisant par la sollicitation ou le dépôt d'offres de couverture au profit de l'entreprise pressentie. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevés pour environ la moitié des 44 appels d'offres analysés, dont 10 ont été attribués à Terh, seule ou en groupement.
415. S'agissant de la durée de sa participation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins novembre 1997 (marché de Beaumont le Roger, point 85). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en janvier 2002 (marché de l'église Saint Vincent au Havre, point 122).
416. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Terh à l'entente dénoncée est établie de juillet 1998 à janvier 2002.
L'entreprise Dagand
417. La déclaration du dirigeant de la société Dagand, qui a reconnu solliciter la couverture de ses concurrents lorsqu'il répondait aux appels d'offres sur les édifices de la cathédrale d'Evreux et du château d'Harcourt dans l'Eure et, réciproquement, déposer des offres de couverture lorsqu'il répondait aux appels d'offres portant sur d'autres édifices de Haute-Normandie (point 79), constitue une preuve directe de la participation de l'entreprise à l'entente régionale.
418. L'analyse des marchés présentés aux points 83 à 124 ci-dessus établit le caractère habituel des concertations mises en œuvre par l'entreprise Dagand avec ses concurrents, se traduisant par la sollicitation ou le dépôt d'offres de couverture au profit de l'entreprise pressentie. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevées pour le quart des 44 appels d'offres analysés, dont 4 ont été attribués à Dagand, seule ou en groupement.
419. S'agissant de la durée de sa participation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins avril 1997 (marché de l'église de Saint Jacques de Dieppe, point 84). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en juillet 2001 (marché de l'abbaye de Jumièges, point 112).
420. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Dagand à l'entente dénoncée est établie d'avril 1997 à juillet 2001.
L'entreprise Quélin
421. Il ressort des éléments recueillis au cours de l'instruction et relevés au point 80 ci-dessus, que l'entreprise Quélin a répondu à 29 appels d'offres sur les 42 passés en Haute-Normandie au cours de la période du 13 février 1997 au 26 juillet 2001 (soit 69 % des appels d'offres passés dans la région), sans jamais être attributaire d'un seul marché. Son dirigeant, M. Y..., a reconnu que ces offres étaient de complaisance dès lors que l'entreprise n'était pas intéressée par des chantiers en Haute-Normandie, qu'elle savait être répartis entre les entreprises locales (point 80). Les éléments présentés aux points 83 à 124 ci-dessus illustrent le caractère habituel de la pratique de sollicitation par les entreprises locales d'offres de couverture auprès de Quélin.
422. Les déclarations précitées du président de l'entreprise permettent d'établir que la société Quélin connaissait parfaitement les comportements infractionnels des autres participants à l'entente. Par ailleurs, son directeur, M. N..., est intervenu comme médiateur afin de résoudre le conflit opposant la société Lanfry notamment au groupe Lefèvre entre octobre 1999 et décembre 2000 à la suite de la perte par Lanfry de chantiers de restauration de la cathédrale de Rouen (point 65). La société Quélin a donc joué un rôle essentiel pour convaincre Lanfry de reprendre sa participation à l'accord de répartition de marchés, et, partant, pour assurer le bon fonctionnement de l'entente.
423. Ainsi, par la présentation d'offres de couverture à titre habituel sur les marchés régionaux et les actions de médiation auxquelles elle a pris part, Quélin a activement contribué à la poursuite de l'objectif anticoncurrentiel commun. Sa participation à l'entente est donc établie.
424. S'agissant de la durée de cette participation, celle-ci est établie depuis au moins avril 1997 (dépôt d'une offre pour le marché de l'église de Saint Jacques de Dieppe, point 84). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en octobre 2001 (marché des Andélys à Château Gaillard, point 96).
L'entreprise Chevalier Nord
425. Le dirigeant de l'entreprise Chevalier Nord a reconnu avoir répondu à des appels d'offres en Haute-Normandie à douze reprises entre décembre 1996 et octobre 2001, bien qu'il n'intervienne pas sur des chantiers dans cette région, dans le but de couvrir les entreprises concurrentes implantées localement (point 81). L'entreprise n'a jamais été attributaire d'un marché dans la région au cours de la période concernée. La pratique habituelle par Chevalier Nord du dépôt d'offres de couverture à la demande des entreprises implantées localement en Haute-Normandie est notamment illustrée s'agissant des appels d'offres analysés aux points 102 à 104, 110, 116 et 117.
426. Compte tenu de la liste de marchés énumérée dans la lettre du 16 décembre 1998 pour notifier à la société Chevalier Nord un grief d'entente en Haute-Normandie, la participation de cette entreprise à l'entente ne sera retenue que pour la période courant de novembre 2000 (marchés de la cathédrale du Havre et du château d'Harcourt, points 102 et 103) à octobre 2001 (marché de l'église Saint Maclou, point 117).
L'entreprise Charpentier PM
427. Le dirigeant de l'entreprise Charpentier PM a reconnu qu'il lui arrivait de répondre aux appels d'offres passés par les maîtres d'ouvrage en Haute-Normandie par des offres de complaisance, dans le cadre d'un " échange de services " avec ses concurrents (point 81). La déclaration du dirigeant de l'entreprise constitue une preuve directe de sa participation à l'entente. L'analyse des marchés présentés aux points 83 à 124 ne mettant en évidence que deux réponses de l'entreprise à des appels d'offres sur la région, cette circonstance sera prise en compte au stade de l'appréciation de la sanction infligée à l'entreprise.
Compte tenu de la liste de marchés énumérée dans la lettre du 16 décembre 1998 pour notifier le grief à la société Charpentier PM, sa participation à l'entente ne sera retenue que pour la période courant de juillet (marchés de l'abbaye de Jumièges (point 112) à octobre 2001 (marché de l'église Saint Maclou, point 117).
L'entreprise Pradeau et Morin
428. L'analyse des marchés présentés aux points 83 à 124 ci-dessus ne met en évidence que deux réponses à des appels d'offres sur la région, s'agissant des marchés de l'église de Beaumont-le-Roger (point 85) et de Saint-Martin de Nonancourt (point 99), pour lesquels le dirigeant de l'entreprise a admis avoir " vraisemblablement " déposé des offres de couverture au profit de ses concurrents, dès lors qu'il n'intervenait pas en Haute-Normandie.
429. Compte tenu du caractère isolé des agissements relevés en Haute-Normandie, et bien que la société Pradeau et Morin n'ait pas contesté les griefs qui lui ont été notifiés, il n'est pas établi que celle-ci ait participé à l'entente générale mise en œuvre dans cette région ayant pour objet de simuler une concurrence auprès des maîtres d'ouvrage et de réserver l'attribution des marchés aux entreprises implantées localement. Le grief n'est donc pas retenu à son encontre.
d) Sur les pratiques mises en œuvre en Basse-Normandie
430. Seront examinés ci-après les éléments de preuve permettant d'établir l'existence de l'infraction et d'en décrire le fonctionnement, puis, pour chacune des entreprises visées par la notification de griefs, les éléments de preuve permettant, le cas échéant, de caractériser sa participation à l'entente et la durée de celle-ci.
Sur le fonctionnement de l'entente
431. Les éléments de preuve relevés ci-dessus aux paragraphes 125 et suivants démontrent l'existence d'une entente organisée à l'échelon régional, ayant pour objet la répartition des marchés publics de restauration de monuments historiques passés par les maîtres d'ouvrage régionaux, et principalement par la DRAC, entre les entreprises intervenant sur ces marchés.
432. Le fonctionnement de l'entente en Basse-Normandie est comparable à celui de l'entente de Haute-Normandie décrit ci-dessus, bien que les participants aux deux ententes, et leur rôle dans chacune d'entre elles soient différents.
433. Seront examinés ci-après les accords de partage de marchés, les critères de répartition des marchés entre les entreprises, la mise en œuvre des accords de répartition et l'association à l'entente d'entreprises extérieures à la région.
Les accords de partage
434. Les déclarations concordantes de plusieurs dirigeants des sociétés mises en cause permettent d'établir l'existence d'accords de répartition des chantiers entre les principales entreprises actives dans la région. M. N..., directeur général de Quélin, a ainsi reconnu l'organisation de réunions entre les entreprises bas-normandes intervenant après la communication par la DRAC de la liste des chantiers programmés, et portant sur une répartition en termes de chiffres d'affaires, en fonction des capacités des entreprises et de leurs carnets de commande (point 129).
435. Si les dirigeants des sociétés Lefèvre (agence de Giberville) et Dagand n'ont pas expressément reconnu avoir participé à de telles réunions, ils ont néanmoins reconnu l'existence d'accords de répartition des marchés entre les entreprises bas-normandes, et notamment, Lefèvre, Quélin, Dagand et Bodin. M. O... (Lefèvre) a ainsi indiqué que, dans le cadre d'un " système " établi de longue date, les chantiers étaient répartis entre les entreprises bas-normandes, les entreprises extérieures à la région intervenant pour " faire nombre " (point 128). M. R... (Dagand) a également reconnu l'existence d'une " forme de partage des marchés ", bien que celle-ci ne présente pas de caractère systématique (point 132).
Les critères de répartition des marchés régionaux
436. Les critères de répartition des marchés ont notamment été décrits par MM. O... (Lefèvre), R... (Dagand) et V... (Degaine). Cette répartition reposait sur des critères géographiques, et plus précisément sur la constance de l'intervention de chaque entreprise sur des édifices particuliers, l'entreprise ayant déjà travaillé sur un édifice bénéficiant d'un accord de couverture lorsqu'un nouveau marché était lancé sur ce même bâtiment (points 128, 131 et 132). M. V... (Degaine) a ainsi indiqué que, depuis la mise en place des procédures d'appels d'offres dans la région, la répartition des marchés était effectuée en fonction des implantations locales des entreprises et de l'intérêt de leur personnel pour obtenir tel ou tel marché.
437. Ces propos contredisent l'argument des sociétés mises en cause évoqué plus haut selon lequel la répartition des marchés s'expliquerait non par une entente anticoncurrentielle mais par le choix objectif du maître d'ouvrage, portant sur l'entreprise ayant réalisé la restauration d'un monument dans le passé, à raison de sa connaissance du bâtiment. Cet argument est par ailleurs démenti par les nombreux indices et éléments de preuve établissant l'existence de concertations entre les entreprises avant le dépôt des appels d'offres en Basse-Normandie, relevés aux points 137 à 164 ci-dessus.
438. M. R... (Dagand) a expliqué que sa société était attributaire des chantiers de la cathédrale de Coutances et de l'abbaye d'Hambye, la société Bodin, des chantiers du secteur du Nord du Cotentin et du centre de la Manche, la société Quélin, des chantiers du château de Falaise et des chantiers de la zone d'Alençon et d'Argentan, la société Lefèvre, des marchés portant sur les édifices de Caen et de Bayeux, et la société Degaine des chantiers du Mont Saint Michel (point 132).
439. Les propos de M. R... sont corroborés par l'étude de la répartition des marchés sur une sélection d'appels d'offres dans la région présentée aux points 137 à 164 ci-dessus. Par exemple, en ce qui concerne la société Lefèvre SA, il peut être observé que celle-ci a été attributaire de tous les appels d'offres afférents à des édifices caennais, dont les marchés de l'abbaye aux Hommes et de l'abbaye aux Dames (points 137 et 139), de l'église Saint- Etienne (point 142), et de l'entretien du patrimoine de la ville (point 163). Elle a également été attributaire des marchés de l'église et de l'abbaye d'Ardenne de Saint-Germain-la- Banche-Herbe, dans la banlieue caennaise (points 150 et 153). La société Bodin a été attributaire des marchés des ruines d'Alauma à Valognes (point 143) et du château de Canisy (point 164), tous deux situés dans la péninsule du Cotentin. La société Degaine a quant à elle été attributaire des onze marchés passés pour la restauration du Mont-Saint- Michel au cours de la période en cause (point 151).
440. S'agissant de la société Terh, lui sont revenus les édifices de l'est du Calvados (zones de Lisieux et de Honfleur), secteur exploité antérieurement par la société Lanctuit, qui avait été acquise par le groupe Bouygues et dont Terh avait récupéré le personnel afin de faire échec à l'implantation de Bouygues dans le secteur des monuments historiques (point 82). En Basse-Normandie, Terh a ainsi été attributaire des marchés de l'église Saint-Pierre de Lisieux (point 146) et du grenier à sel d'Honfleur (point 158).
La mise en œuvre des accords de répartition
441. S'agissant de la mise en œuvre des accords de répartition, les déclarations concordantes des dirigeants ainsi que les écoutes téléphoniques effectuées dans le cadre de la procédure pénale établissent le caractère habituel des pratiques de concertations et d'offres de couverture à l'occasion des appels d'offres.
442. De même qu'en Haute-Normandie, ces contacts avaient pour objet de garantir l'attribution des chantiers correspondant aux appels d'offres à l'entreprise pressentie, conformément aux critères de répartition explicites ou tacites suivis par les entreprises et fondés notamment sur la localisation de l'édifice (point 436). La circonstance que ces pratiques n'ont pas été mises en œuvre à l'occasion de l'intégralité des marchés lancés dans la région n'enlève pas son caractère général à l'entente, compte tenu du volume très élevé des marchés ayant fait l'objet de concertations. La répétition des concertations démontre bien l'existence d'un véritable système mis en place entre les entreprises répondant aux appels d'offres sur la région. L'entente était donc bien organisée à un échelon plus vaste que celui des marchés individuels en cause.
443. Les procédés mis en œuvre ont été précisément décrits au cours des auditions des responsables des entreprises concernées. M. R... (Dagand) explique ainsi que le système de concertation entre les entreprises nécessitait des échanges réguliers d'offres de couverture. Il a indiqué procéder régulièrement à des échanges avec les représentants des sociétés Lefèvre, Quélin et Bodin, les entreprises échangeant un prix correspondant à celui de l'offre présentée par l'entreprise désignée attributaire du chantier, afin que les autres entreprises puissent déposer une offre d'un montant supérieur (point 132). Cette pratique habituelle d'offres de couverture réciproques est confirmée par les déclarations de M. O... (Lefèvre) et N... (Quélin, points 128 et 129).
L'association à l'entente d'entreprises extérieures à la région
444. Par ailleurs, les éléments recueillis mettent en lumière le recours habituel des entreprises locales à la sollicitation d'offres de couverture auprès d'entreprises tierces, visant notamment à " faire nombre " pour créer l'apparence d'un degré de concurrence élevé auprès du maître d'ouvrage, ou pour éviter qu'un appel d'offres soit déclaré infructueux en raison du nombre insuffisant d'offres remises. Le dépôt d'offres de couverture avait pour but d'obtenir en retour des offres de couverture pour les marchés sur lesquels ces entreprises tierces soumissionnaient dans leur propre zone géographique. La mise en œuvre de ces pratiques dans la région Basse-Normandie est notamment reconnue par les dirigeants de Normandie Rénovation, Lanfry, et Chevalier Nord (points 128, 135 et 136).
445. Ainsi, participaient aux concertations mises en œuvre non seulement des entreprises implantées en Basse-Normandie, mais également des entreprises extérieures, qui n'étaient pas attributaires de marchés dans la région. Ces pratiques ont permis aux entreprises locales de conserver les marchés régionaux selon le partage convenu entre elles et d'éviter l'arrivée d'entreprises extérieures dans la région, dès lors que ces dernières obtenaient en échange du dépôt d'offres de couverture des offres de complaisance réciproques des entreprises haut-normandes dans leur propre zone d'intervention.
446. Le fonctionnement de l'entente générale mise en œuvre en Basse-Normandie est illustré par l'étude des appels d'offres spécifiques lancés par les maîtres d'ouvrage de la région Basse-Normandie, exposée aux points 137 à 164 ci-dessus. Celles-ci constituent autant de manifestations successives de l'entente générale par laquelle les entreprises en cause coordonnaient leur comportement en vue de l'attribution des marchés publics de restauration de monuments historiques en Basse-Normandie.
Sur la participation des entreprises à l'entente
Le groupe Lefèvre
447. Les déclarations concordantes des responsables du groupe Lefèvre, MM. E... cadre- dirigeant de la société M. Lefèvre, B..., dirigeant de sa filiale Normandie Rénovation, et O..., responsable de l'agence de Lefèvre SA à Giberville relevées aux points 127 et 128 ci-dessus, et corroborées par les déclarations de dirigeants d'entreprises concurrentes (points 129 à 132), constituent des preuves directes de la participation des entités du groupe à l'entente mise en œuvre en Basse-Normandie.
448. L'analyse des marchés présentés aux points 137 à 164 ci-dessus fait apparaître le caractère habituel des concertations mises en œuvre par Lefèvre SA avec ses concurrents et la pratique des offres de couverture. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevées pour la quasi-totalité des appels d'offres analysés, dont 12 ont été attribués à Lefèvre SA, seule ou en groupement. Ces éléments établissent, d'une part, la participation de Lefèvre SA à des accords de partage de marché ainsi que la mise en œuvre de concertations habituelles avec les entreprises concurrentes à l'occasion des appels d'offres lancés dans la région, et d'autre part, la pratique habituelle par les autres filiales du groupe, et notamment par Normandie Rénovation, d'offres de couverture au bénéfice de Lefèvre SA comme de ses concurrents.
449. Il résulte de ce qui précède que la participation des filiales de M. Lefèvre à l'entente dénoncée est établie.
450. S'agissant de la durée de la participation de Lefèvre SA à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins décembre 1997 (marché de l'abbaye aux Hommes de Caen, point 137). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en février 2002 (marché du château de Canisy, point 164). S'agissant des autres filiales du groupe, il convient notamment de relever que la participation de Normandie Rénovation à l'entente est établie d'octobre 1998 à novembre 2001 (marchés de l'abbaye aux Dames à Caen et de l'entretien du patrimoine de la ville de Caen, points 139 et 163).
L'entreprise Quélin
451. Les déclarations de MM. Y... et N..., respectivement président et directeur général de la société Quélin, relevées aux points 129 et 130 ci-dessus corroborées par les déclarations concordantes de dirigeants d'entreprises concurrentes (points 127 et 128, 131 et 132), constituent des preuves directes de la participation de l'entreprise à l'entente mise en œuvre en Basse-Normandie.
452. L'analyse des marchés présentés aux points 137 à 164 ci-dessus établit le caractère habituel des concertations mises en œuvre par l'entreprise Quélin avec ses concurrents, se traduisant par la sollicitation ou le dépôt d'offres de couverture au profit de l'entreprise pressentie. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevées pour plus du quart des appels d'offres analysés, 4 marchés ayant été attribués à Quélin.
453. S'agissant de la durée de sa participation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins octobre 1998 (marché de l'église de Carpiquet, point 138). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en novembre 2001 (marchés de la cathédrale de Sées et de l'entretien du patrimoine de la ville de Caen, points 162 et 163).
454. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Quélin à l'entente dénoncée est établie d'octobre 1998 à novembre 2001.
L'entreprise Dagand
455. Les déclarations de M. R..., chef de l'agence de Caen de la société Dagand, relevées au point 132 ci-dessus, et corroborées par les déclarations concordantes de dirigeants d'entreprises concurrentes (points 127 à 131), constituent des preuves directes de la participation de l'entreprise à l'entente mise en œuvre en Basse-Normandie.
456. L'analyse des marchés présentés aux points 137 à 164 ci-dessus établit le caractère habituel des concertations mises en œuvre par l'entreprise Dagand avec ses concurrents, se traduisant par la sollicitation ou le dépôt d'offres de couverture au profit de l'entreprise pressentie. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevés pour près de la moitié des appels d'offres analysés, 10 marchés lui ayant été attribués.
457. S'agissant de la durée de sa participation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins novembre 1998 (marchés de l'ancien couvent des Dominicaines de Pont l'Evêque et de l'église de Saint-Etienne de Caen, points 141 et 142). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en mars 2001 (marchés de l'abbaye d'Hambye, point 160).
458. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Dagand à l'entente dénoncée est établie de novembre 1998 à mars 2001.
L'entreprise Bodin
459. Si les responsables de la société Bodin n'ont pas été entendus au cours de la procédure pénale, M. 1..., son directeur technique, étant décédé en 2003, il ressort des déclarations concordantes de MM. O... et R..., responsables des agences bas-normandes des sociétés Lefèvre SA et Dagand, que l'entreprise Bodin prenait part au système de répartition des marchés mis en place dans la région (points 128 et 132).
460. L'analyse des marchés présentés aux points 137 à 164 ci-dessus confirme que l'entreprise était habituellement attributaire des marchés passés pour la restauration d'édifices situés dans le Cotentin (voir point 439 ci-dessus). Ces éléments établissent par ailleurs le caractère habituel des concertations mises en œuvre par l'entreprise Bodin avec ses concurrents, se traduisant par la sollicitation ou le dépôt d'offres de couverture au profit de l'entreprise pressentie. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevés pour plus du quart des appels d'offres analysés, 3 marchés lui ayant été attribués.
461. S'agissant de la durée de sa participation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins mars 1999 (marché des ruines d'Alauma à Valognes, point 143). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'au février 2002 (marché du château de Canisy, point 164).
462. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Bodin à l'entente dénoncée est établie de mars 1999 à février 2002.
L'entreprise Degaine
463. Il ressort des éléments recueillis au cours de l'instruction et relevés aux points 137 à 164 ci-dessus, que l'entreprise Degaine a été attributaire de l'ensemble des marchés de restauration du Mont-Saint-Michel au cours de la période en cause. M. V..., directeur de l'entreprise Degaine, a reconnu solliciter des offres de couverture de ses concurrents pour conserver les chantiers de restauration de cet édifice, dont l'entreprise était l'attributaire " historique ", afin de simuler une concurrence aux yeux du maître de l'ouvrage. Il a également admis déposer en retour des offres de complaisance au profit de ses concurrents (point 131).
464. L'analyse des marchés présentés aux points 137 à 164 ci-dessus fait apparaître des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevés pour près du tiers des appels d'offres analysés, 11 marchés lui ayant été attribués.
465. S'agissant de la durée de sa participation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins juillet 1999 (marché de l'église St Pierre de Coutances, point 145). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en juin 2002 (marché du Mont-Saint-Michel, point 151).
466. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Degaine à l'entente dénoncée est établie de juillet 1999 à juin 2002.
L'entreprise Terh
467. L'analyse des marchés présentés aux points 137 à 164 ci-dessus montre que Terh n'a été attributaire que de deux marchés en Basse-Normandie, alors même qu'elle a répondu à 60 % des appels d'offres analysés.
468. La société Terh, principalement active en Haute-Normandie, n'intervenait en Basse-Normandie que dans l'est du Calvados (voir point 440 ci-dessus). Le président et le métreur de la société, MM. P... et T... ont reconnu qu'au-delà de cette zone, l'ensemble des offres déposées par Terh étaient des offres de couverture élaborées à la demande des entreprises concurrentes (point 134). Les deux marchés attribués dans la région sont les marchés de l'église Saint-Pierre de Lisieux (point 146) et du grenier à sel de Honfleur (point 158), situés dans la " zone d'activité " de l'entreprise, telle que définie par ses dirigeants.
469. Si Terh fait valoir qu'elle aurait pu concourir pour obtenir certains des autres marchés situés dans la région, s'agissant notamment des édifices situés à moins de deux heures de son siège, l'absence de caractère concurrentiel de la majorité des offres déposées par l'entreprise en Basse-Normandie est toutefois clairement établie par les déclarations concordantes de ses dirigeants au cours de l'instruction pénale rappelées au point précédent. Ils ont par ailleurs expressément reconnu que les offres déposées pour les marchés du domaine de la Baronnie à Bretteville sur Odon (point 148), de l'église Notre- Dame de Guibray à Falaise (point 157), de la cathédrale de Bayeux (point 159), de la cathédrale de Sées (point 162), de l'entretien du patrimoine de la ville de Caen (point 163), ainsi que certaines offres déposées pour les marchés du Mont-Saint-Michel (point 151) étaient de complaisance.
470. Les éléments relevés constituent un faisceau d'indices suffisamment graves, précis et concordants pour établir la participation de l'entreprise Terh à l'entente mise en place en Basse-Normandie, cette participation se traduisant par la présentation d'offres de couverture à titre habituel au profit des entreprises implantées localement, et ce, afin de simuler la concurrence auprès des maîtres d'ouvrage.
471. S'agissant de la durée de cette participation, celle-ci est établie depuis au moins octobre 1998 (marché de l'abbaye aux Dames à Caen, point 139). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en novembre 2001 (marché de l'entretien du patrimoine de la ville de Caen, point 163).
L'entreprise Pavy
472. M. 5..., président de la société Pavy SA, a nié avoir pris part à des pratiques d'ententes anticoncurrentielles, même s'il a reconnu au cours de l'instruction pénale avoir reçu la sollicitation d'entreprises concurrentes pour déposer une offre de complaisance sur certains chantiers.
473. M. 5... a toutefois été cité comme interlocuteur pour la région Basse-Normandie par M. N..., directeur de Quélin, dans sa déclaration aux enquêteurs citée au point 129 ci-dessus. Par ailleurs, l'analyse des marchés présentés aux points 137 à 164 ci-dessus fait apparaître des preuves directes ou des indices de la participation de Pavy à des concertations à l'occasion de nombreux appels d'offres sur la région. M. 5... a expressément reconnu avoir déposé une offre de couverture pour le marché de l'abbaye aux Hommes à Caen (point 137). Par ailleurs, les dirigeants d'entreprise concurrentes ont indiqué avoir sollicité ou bénéficié d'offres de couverture de la part de Pavy pour les marchés du domaine de la Baronnie à Bretteville sur Odon (point 148), et de l'entretien du patrimoine de la ville de Caen (point 163). La participation de l'entreprise à des concertations en vue de l'attribution des chantiers est également établie par les interceptions téléphoniques effectuées s'agissant des marchés de l'IMEC à l'abbaye d'Ardenne (point 153), de Saint Pierre de Tinchebray (point 161) et de la cathédrale de Sées (point 162). Enfin, le cahier Lanfry mentionne des offres de couverture de cette société au profit de Pavy s'agissant du marché de l'église de Saint Céneri-le-Geréi (point 149).
474. Les éléments relevés constituent un faisceau d'indices suffisamment graves, précis et concordants pour établir la participation de la société Pavy à l'entente mise en place en Basse-Normandie, cette participation se traduisant par la présentation d'offres de couverture à titre habituel au profit des entreprises implantées localement, et ce, afin de simuler la concurrence auprès des maîtres d'ouvrage.
475. S'agissant de la durée de cette participation, celle-ci est établie depuis au moins décembre 1997 (marché de l'abbaye aux Hommes à Caen, point 137). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en novembre 2001 (marchés de la cathédrale de Sées et de l'entretien du patrimoine de la ville de Caen, points 162 et 163).
L'entreprise Lanfry
476. La société Lanfry, dont la participation à l'entente est démontrée aussi bien par les déclarations de ses dirigeants que par les éléments matériels relevés au cours de l'instruction, n'a pas contesté les griefs qui lui ont été notifiés.
477. Par ailleurs, s'agissant de la durée de l'infraction commise, aucun élément n'indique que la société se soit temporairement écartée de l'entente mise en œuvre en Basse-Normandie, contrairement à ce qui a été constaté en ce qui concerne les pratiques mises en œuvre en Haute-Normandie. En effet, le dépôt d'offres de couverture peut être relevé pour les marchés de l'église de Saint Cénéri-le-Geréi d'octobre 1999 et février 2000 (point 149), de la cathédrale de Coutances de novembre 2000 (point 156) ou encore de l'église Notre-Dame-de-Guibray à Falaise de novembre 2000 (point 157). La participation de Lanfry est donc établie depuis au moins octobre 1998 (marché de l'église de Carpiquet, point 138). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en février 2002 (marché du château de Canisy, point 164).
478. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Lanfry à l'entente dénoncée est établie d'octobre 1998 à février 2002.
L'entreprise Chevalier Nord
479. Le dirigeant de l'entreprise Chevalier Nord a reconnu que ses réponses aux appels d'offres passés par les maîtres d'ouvrage en Basse-Normandie constituaient des offres de couverture. Cette déclaration n'est cependant pas dépourvue de toute ambigüité dès lors qu'il précisait également qu'il retirait des dossiers dans cette région, située loin de son lieu d'implantation, pour se faire connaître auprès des maîtres d'ouvrage (point 136). Par ailleurs, l'analyse des marchés présentés aux points 137 à 164 ci-dessus ne met en évidence que deux réponses de l'entreprise à des appels d'offres sur la région, s'agissant des marchés de l'église Saint-Pierre à Lisieux (point 146), d'une part, et du grenier à sel de Honfleur (point 158), d'autre part.
480. Compte tenu du caractère isolé des agissements relevés en Basse-Normandie, il n'est pas établi que Chevalier Nord ait participé à l'entente générale mise en œuvre dans cette région ayant pour objet de simuler une concurrence auprès des maîtres d'ouvrage et de réserver l'attribution des marchés aux entreprises implantées localement. Le grief n'est donc pas retenu à son encontre.
e) Sur les pratiques mises en œuvre en Picardie
481. Seront examinés ci-après les éléments de preuve permettant d'établir l'existence de l'infraction et d'en décrire le fonctionnement, puis, pour chacune des entreprises visées par la notification de griefs, les éléments de preuve permettant, le cas échéant, de caractériser sa participation à l'entente et la durée de celle-ci.
Sur le fonctionnement de l'entente
482. Les éléments de preuve relevés ci-dessus aux paragraphes 166 et suivants démontrent l'existence d'une entente organisée à l'échelon régional, ayant pour objet la répartition des marchés publics de restauration de monuments historiques passés par les maîtres d'ouvrage régionaux, et principalement par la DRAC, entre les entreprises intervenant sur ces marchés.
483. Le fonctionnement de l'entente en Picardie est comparable à celui des ententes décrit ci-dessus s'agissant des deux régions normandes, bien que les participants aux trois ententes, et leur rôle dans chacune d'entre elles, soient différents. Seront examinés ci-après les accords de partage de marchés, les critères de répartition des marchés entre les entreprises, la mise en œuvre des accords de répartition et l'association à l'entente d'entreprises extérieures à la région.
Les accords de partage
484. Bien que certains dirigeants aient fait état de l'absence d'accords formalisés de répartition des chantiers, en l'absence notamment de communication des programmations annuelles par la DRAC de Picardie (point 170), l'existence d'au moins une réunion de partage, au cours de laquelle les entreprises ont fait état de leurs souhaits de répartition des chantiers à venir est établie par les notes manuscrites prises par M. Q... (Charpentier PM) au cours de cette réunion, saisies dans les locaux de son entreprise (cotes 16944 à 16992), ainsi que par les déclarations concordantes de MM. D... (Chevalier Nord) Z... (Faber SA) et Q... (points 169 et 170). Les notes de M. Q... mentionnent que participaient à cette réunion, qui s'est tenue le 12 mars 1999, les représentants des sociétés Léon Noël, Faber SA, Quélin, Pradeau et Morin, Chevalier Nord et Terh et qu'un accord a été conclu quant à l'attribution, entre autres, des chantiers de la basilique d'Albert et de la chapelle des Saintes Hosties à Marseille-en-Beauvaisis. Par ailleurs, M. D... (Chevalier Nord) a déclaré que les réunions de la cellule régionale du GMH de Picardie étaient " parfois " l'occasion de concertations entre les entreprises pour la mise au point des accords de couverture sur les marchés à venir (point 169).
485. Par ailleurs, l'existence d'un système de partage géographique des marchés reposant sur un système d'offres de couverture réciproques entre les entreprises a notamment été reconnue par MM. Y... (Quélin, point 172), et Q... (Charpentier PM), ce dernier précisant que cette pratique " d'échange de services " avait " toujours existé " au su de tous les acteurs de la région (point 167). Ces propos sont également confirmés sur le fond par MM. D... (Chevalier Nord, point 169) et Z... (Faber SA, point 170), même si ces derniers refusent l'utilisation du terme " système " au seul motif que l'entente ne couvrait pas l'intégralité des appels d'offres lancés par la DRAC de Picardie. M. D... reconnaît ainsi l'existence d'une répartition des marchés " selon des critères géographiques " ainsi que l'existence de coopérations entre concurrents sur les grosses opérations (à partir de 5 millions de Francs, chantiers à forte technicité) ou les petites opérations (en deçà de 300 000 Francs).
486. Il apparaît par ailleurs que les nouveaux acteurs étaient invités à rejoindre l'entente existante, M. U... (Léon Noël) déclarant ainsi avoir été contacté très rapidement par ses concurrents après son arrivée au sein de l'entreprise en 2000 pour la mise en place de la répartition géographique des marchés dans la région (point 171).
Les critères de répartition des marchés régionaux
487. Les critères de répartition des marchés, semblables aux critères observés dans les régions normandes, ont notamment été décrits par MM. D... (Chevalier Nord), Z... (Faber SA), U... (Léon Noël) et Y... (Quélin). Cette répartition était essentiellement de nature géographique, reposant sur la proximité du chantier avec l'implantation de l'entreprise (points 169, 170, 171 et 172).
488. M. D... (Chevalier Nord) a ainsi indiqué intervenir principalement dans le département de la Somme (point 169), M. S... (Pradeau et Morin), dans la région de Beauvais (point 168), M. Z... (Faber SA), dans l'Oise (point 170), M. U... (Léon Noël), dans l'Oise, le Sud de la Somme et l'Ouest de l'Aisne (point 171) et Y... (Quélin) dans l'Aisne (point 172).
489. Ces propos sont corroborés par l'étude de la répartition des marchés sur une sélection d'appels d'offres dans la région présentée aux points 176 à 215 ci-dessus, même si les entreprises ont parfois obtenu des chantiers plus éloignés de leur zone habituelle. Par exemple, s'agissant de la société Chevalier Nord, quatre des cinq chantiers dont elle a été attributaire dans la région, seule ou en groupement sont situés dans la Somme, à savoir les marchés du château de Rambures (point 180), de l'église de Gamaches (point 182), de la basilique d'Albert (point 185), et de la cathédrale d'Amiens (point 213). En ce qui concerne la société Pradeau et Morin, celle-ci a été attributaire du marché de la cathédrale de Beauvais (point 215). Les deux marchés dont la société Quélin était l'attributaire, à savoir le marché de l'église de Vic-sur-Aisne (point 194) et Coucy-le-Château (point 207) étaient tous deux situés dans le département de l'Aisne.
490. S'agissant de l'entreprise Charpentier PM, on observe que celle-ci n'a été attributaire que de chantiers situés dans la Somme (marchés cités aux points 177, 183, 185, 188, 205 et 213) ou l'Aisne (marchés cités aux points 184, 189 et 198, et n'a été attributaire d'aucun marché dans l'Oise bien qu'elle ait déposé à de nombreuses reprises des offres dans ce département (marchés cités aux points 176, 178, 191, 195, 204 et 209).
491. Quant à l'argument des sociétés mises en cause évoqué plus haut selon lequel cette répartition s'expliquerait non par une entente anticoncurrentielle mais par le choix objectif du maître d'ouvrage, portant sur l'entreprise ayant réalisé la restauration d'un monument dans le passé, celui-ci est de même démenti par les déclarations des dirigeants d'entreprise citées plus haut, par lesquelles ces derniers ont reconnu prendre part à des ententes visant à se répartir les marchés, et par les indices et éléments de preuve établissant l'existence de concertations entre les entreprises avant le dépôt des appels d'offres en Picardie. D'autre part, aucun élément ne permet de corroborer l'existence d'une préférence alléguée du maître de l'ouvrage pour l'entreprise intervenant habituellement sur un édifice, le représentant de la DRAC de Picardie ayant au contraire souligné que la réactivation de la concurrence après la fin de l'entente en 2002 se traduisait par un changement de titulaire de marché pour certains édifices (point 258).
La mise en œuvre des accords de répartition
492. S'agissant de la mise en œuvre des accords de répartition, les déclarations concordantes des dirigeants établissent le caractère habituel des pratiques de concertations et d'offres de couverture à l'occasion des appels d'offres.
493. Les procédés mis en œuvre sont semblables à ceux qui ont été relevés s'agissant des régions normandes. M. N... (Quélin) relève ainsi que le système est " analogue " à celui qui avait été mis en place en Haute-Normandie. Les dirigeants des entreprises ont reconnu procéder à des contacts avant la date limite de dépôt des offres afin de savoir si les entreprises concurrentes avaient retiré des dossiers, de leur communiquer les prix des offres qu'elles s'apprêtaient à déposer, de solliciter ou élaborer des offres de couverture (déclarations de MM. Q... (Charpentier PM), Z... (Faber SA), U... (Léon Noël), N... (Quélin), A... (Lanfry) et T... (Terh), (points 166 à 175).
494. De même que dans les deux régions normandes, ces contacts avaient pour objet de garantir l'attribution des chantiers correspondant aux appels d'offres à l'entreprise pressentie, conformément aux critères de répartition explicites ou tacites suivis par les entreprises et fondés notamment sur la localisation de l'édifice (point 487). La circonstance que ces pratiques n'ont pas été mises en œuvre à l'occasion de l'intégralité des marchés lancés dans la région n'enlève pas son caractère général à l'entente, compte tenu du volume très élevé des marchés ayant fait l'objet de concertations. La répétition des concertations et la réciprocité des offres de couverture démontre bien, en elle-même et indépendamment de l'existence des réunions " formelles " relevée au point 484 ci-dessus, que l'entente était organisée à un échelon plus vaste que celui des marchés individuels en cause.
L'association à l'entente d'entreprises extérieures à la région
495. Par ailleurs, les éléments recueillis mettent en lumière la sollicitation habituelle par les entreprises locales d'offres de couverture auprès d'entreprises tierces, visant notamment à " faire nombre " pour créer l'apparence d'un degré de concurrence élevé auprès du maître d'ouvrage, ou pour éviter qu'un appel d'offres soit déclaré infructueux en raison du nombre insuffisant d'offres remises. Le dépôt d'offres de couverture avait pour but d'obtenir en retour des offres de couverture pour les marchés sur lesquels ces entreprises tierces soumissionnaient dans leur propre zone géographique. La mise en œuvre de ces pratiques dans la région Picardie est notamment reconnue par les dirigeants de Charpentier PM, Pradeau et Morin, Normandie Rénovation, Lanfry, et Terh (points 167, 168, 171, 173 et 175).
496. Ainsi, participaient aux concertations mises en œuvre non seulement des entreprises implantées en Picardie, mais également des entreprises extérieures, qui n'étaient pas attributaires de marchés dans la région. Ces pratiques ont permis aux entreprises locales de conserver les marchés régionaux selon le partage convenu entre elles et d'éviter l'arrivée d'entreprises extérieures dans la région, dès lors que ces dernières obtenaient en échange du dépôt d'offres de couverture des offres de complaisance réciproques des entreprises picardes dans leur propre zone d'intervention.
497. Le fonctionnement de l'entente générale mise en œuvre en Picardie est illustré par l'étude des appels d'offres spécifiques lancés par les maîtres d'ouvrage de la région, exposée aux points 176 à 215 ci-dessus. Celles-ci constituent autant de manifestations successives de l'entente générale par laquelle les entreprises en cause coordonnaient leur comportement en vue de l'attribution des marchés publics de restauration de monuments historiques en Picardie.
Sur la participation des entreprises à l'entente
Le groupe Lefèvre
498. Les déclarations concordantes des responsables du groupe Lefèvre, MM. E..., cadre- dirigeant de la société M. Lefèvre, B..., dirigeant de sa filiale Normandie Rénovation, et U..., responsable de l'agence de Léon Noël, filiale du groupe implantée en Picardie, relevées au point 171 ci-dessus, et corroborées par les déclarations de dirigeants d'entreprises concurrentes, et notamment de M. Q... (Charpentier PM, point 167) et Z... (Faber SA, point 170), constituent des preuves directes de la participation des entités du groupe à l'entente mise en œuvre en Picardie.
499. L'analyse des marchés présentés aux points 176 à 215 ci-dessus fait apparaître le caractère habituel des concertations mises en œuvre par Léon Noël avec ses concurrents et la pratique des offres de couverture. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevés pour la plus de la moitié des 44 appels d'offres analysés (27), dont 10 ont été attribués à Léon Noël, seule ou en groupement. Ces éléments établissent, d'une part, la participation de Léon Noël à des accords de partage de marché ainsi que la mise en œuvre de concertations habituelles avec les entreprises concurrentes à l'occasion des appels d'offres lancés dans la région, et d'autre part, la pratique habituelle par les autres filiales du groupe, et notamment par Normandie Rénovation, d'offres de couverture au bénéfice de Léon Noël comme de ses concurrents.
500. Il résulte de ce qui précède que la participation des filiales de M. Lefèvre à l'entente dénoncée est établie.
501. S'agissant de la durée de la participation de Léon Noël à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins février 1998 (marché de la Maison Greber, point 176 et déclarations de M. B..., point 170). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en octobre 2001 (marché de la cathédrale de Beauvais, point 215). S'agissant des autres filiales du groupe, il convient notamment de relever que la participation de Normandie Rénovation à l'entente est établie de juillet 1998 à juillet 2001 (marchés de l'église Saint-Vulfran à Abbeville et de la cathédrale d'Amiens, points 177 et 211).
L'entreprise Charpentier PM
502. Les déclarations de M. Q..., gérant de la société Charpentier PM, relevées au point 167 ci-dessus, et corroborées par les déclarations concordantes de dirigeants d'entreprises concurrentes, et notamment M. Z... (Faber SA, point 170), constituent des preuves directes de la participation de l'entreprise à l'entente mise en œuvre en Picardie.
503. L'analyse des marchés présentés aux points 176 à 215 ci-dessus établit le caractère habituel des concertations mises en œuvre par l'entreprise Charpentier PM avec ses concurrents, se traduisant par la sollicitation ou le dépôt d'offres de couverture au profit de l'entreprise pressentie. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevés pour près de la moitié des 44 appels d'offre analysés, dont 9 ont été attribués à Charpentier PM, seule ou en groupement.
504. S'agissant de la durée de sa participation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins au moins février 1998 (marché de la Maison Greber, point 176 et déclarations de M. Q..., point 167). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en octobre 2001 (marché de la cathédrale de Beauvais, point 215).
505. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Charpentier PM à l'entente dénoncée est établie de février 1998 à octobre 2001.
L'entreprise Faber SA
506. Les déclarations de M. Z..., président de la société Faber SA (ETPM Battais), relevées au point 170 ci-dessus, et corroborées par les déclarations concordantes de dirigeants d'entreprises concurrentes, et notamment M. Q... (Charpentier PM, point 167), constituent des preuves directes de la participation de l'entreprise à l'entente mise en œuvre en Picardie.
507. Si Faber SA fait valoir que l'absence de dépôt d'offres compétitives sur un certain nombre de marchés situés loin du lieu d'implantation de l'entreprise ne peut être assimilée au dépôt d'offres de couverture, au motif que ces offres tiendraient compte de coûts plus élevés en raison de l'éloignement des chantiers, ces propos sont contredits par les nombreux échanges avérés entre les entreprises avant le dépôt des offres, établis aussi bien par les pièces saisies dans les locaux de la société Charpentier PM que par les déclarations des dirigeants des entreprises concernées. Par ailleurs, M. Z... a reconnu expressément l'existence de concertations auxquelles participait son entreprise et déclaré que le dépôt d'offres non compétitives avait pour but de laisser le champ libre aux entreprises concurrentes (point 170).
508. L'analyse des marchés présentés aux points 176 à 215 ci-dessus établit le caractère habituel des concertations mises en œuvre par l'entreprise Faber SA avec ses concurrents, se traduisant par la sollicitation ou le dépôt d'offres de couverture au profit de l'entreprise pressentie. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevés pour près de la moitié des 44 appels d'offres analysés, dont 10 ont été attribués à Faber SA, seule ou en groupement.
509. S'agissant de la durée de sa participation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins février 1998 (marché de la Maison Greber, point 176). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en octobre 2001 (marché de la cathédrale de Beauvais, point 215).
510. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Faber SA à l'entente dénoncée est établie de février 1998 à octobre 2001.
L'entreprise Chevalier Nord
511. Les déclarations de M. D..., président de la société Chevalier Nord, relevées au point 169 ci-dessus, et corroborées par les déclarations concordantes de dirigeants d'entreprises concurrentes, et notamment de M. Q... (Charpentier PM, point 167) et Z... (Faber SA, point 170), constituent des preuves directes de la participation de l'entreprise à l'entente mise en œuvre en Picardie.
512. L'analyse des marchés présentés aux points 176 à 215 ci-dessus établit le caractère habituel des concertations mises en œuvre par l'entreprise Chevalier Nord avec ses concurrents, se traduisant par la sollicitation ou le dépôt d'offres de couverture au profit de l'entreprise pressentie. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevés pour plus du tiers des 44 appels d'offre analysés, dont 5 ont été attribués à Chevalier Nord, seule ou en groupement.
513. S'agissant de la durée de sa participation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins février 1998 (marché de la Maison Greber, point 176). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en juillet 2001 (marché de la cathédrale d'Amiens, point 211).
514. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Chevalier Nord à l'entente dénoncée est établie de février 1998 à juillet 2001.
L'entreprise Lanfry
515. La société Lanfry, dont la participation à l'entente est démontrée aussi bien par les déclarations de ses dirigeants que par les éléments matériels relevés au cours de l'instruction, n'a pas contesté les griefs qui lui ont été notifiés.
516. Il convient de relever, s'agissant de la durée de l'infraction commise, que la société s'est temporairement écartée de l'entente à la suite du conflit l'opposant au groupe Lefèvre après l'attribution en Haute-Normandie du chantier de restauration de la façade Ouest de la nef de la cathédrale de Rouen en octobre 1999 (point 90). Il ressort des éléments recueillis au cours de l'instruction, et notamment, des déclarations de M. A... relevées au point 173 que la société a déposé des offres concurrentielles dans la région de Picardie au cours de la période des mois de mars à mai 2000 pour les trois chantiers de la chapelle Saint-Louis à Septmonts, de l'église Saint-Samson à Clermont et du château Bullant à Chantilly (point 202), alors que cette région ne correspondait pas à sa zone d'intervention habituelle. Ainsi qu'il a été relevé ci-dessus, le conflit avec l'entreprise Lefèvre a pris fin avec la constitution d'un groupement entre les entreprises Lanfry et Terh pour répondre à l'appel d'offres du marché de la façade Sud de la tour de beurre de la cathédrale de Rouen du 20 décembre 2000 (points 65 et 91). Parallèlement, l'entreprise Lanfry n'a plus été attributaire de chantiers en Picardie après mai 2000 et a repris, à compter de cette date, ses pratiques habituelles de dépôts d'offres de couverture (voir notamment, les éléments relevés aux points 209, 213 et 215 ci-dessus s'agissant des marchés de la corniche des Grandes Ecuries à Chantilly en mai 2001, de la cathédrale d'Amiens en janvier et juillet 2001, et de la cathédrale de Beauvais en octobre 2001). L'abstention temporaire de l'entreprise ne constitue pas, en l'absence d'autres éléments, une cessation de sa participation à l'entente, car elle ne s'est pas distanciée de l'entente générale mise en œuvre en Picardie. Cette circonstance sera toutefois prise en compte au stade de l'appréciation de la sanction infligée à l'entreprise.
517. La participation de Lanfry à l'entente est établie depuis au moins février 1998 (marché de la Maison Greber, point 176) à mars 2000. Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en juillet 2001 (marché de la cathédrale d'Amiens, point 211). Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Lanfry à l'entente dénoncée est établie de février 1998 à juillet 2001.
L'entreprise Quélin
518. Les déclarations de M. N..., directeur général de la société Quélin, relevées au point 172 ci-dessus, et corroborées par les déclarations concordantes de dirigeants d'entreprises concurrentes, et notamment de MM. Q... (Charpentier PM, point 167), E... (M. Lefèvre, point 171), et Z... (Faber SA, point 170), constituent des preuves directes de la participation de l'entreprise à l'entente mise en œuvre en Picardie.
519. L'analyse des marchés présentés aux points 176 à 215 ci-dessus établit le caractère habituel des concertations mises en œuvre par l'entreprise Quélin avec ses concurrents, se traduisant par la sollicitation ou le dépôt d'offres de couverture au profit de l'entreprise pressentie. Des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise sont relevés pour près du tiers des 44 appels d'offres analysés, dont 2 ont été attribués à Quélin, seule ou en groupement.
520. S'agissant de la durée de sa participation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins février 1998 (marché de la Maison Greber, point 176). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en juillet 2001 (marché de la cathédrale d'Amiens, point 211).
521. Il résulte de ce qui précède que la participation de la société Quélin à l'entente dénoncée est établie de février 1998 à juillet 2001.
L'entreprise Terh
522. L'analyse des marchés présentés aux points 176 à 215 ci-dessus montre que Terh n'a été attributaire d'aucun marché en Picardie au cours de la période en cause, à l'exception d'un marché sur la cathédrale de Beauvais en juin 1998, alors même qu'elle a répondu à près de 22 % des appels d'offres analysés.
523. Si Terh fait valoir qu'elle aurait pu concourir pour obtenir certains de ces marchés, s'agissant notamment des édifices situés à moins de deux heures de son siège, l'absence de caractère concurrentiel de la majorité des offres déposées par Terh en Picardie est toutefois clairement établie par les déclarations concordantes de ses dirigeants au cours de l'instruction pénale. En effet, la société Terh, principalement active en Haute-Normandie, n'intervenait en Picardie qu'à la frontière des départements de l'Oise et de la Somme avec la Seine-Maritime. Le président et le métreur de la société, MM. P... et T... ont reconnu qu'au-delà de cette zone, l'ensemble des offres déposées par Terh étaient des offres de couverture élaborées à la demande des entreprises concurrentes (voir point 175 ci-dessus). Ils ont par ailleurs expressément reconnu que les offres déposées pour les marchés du château de Rambures (point 180), de l'église d'Ault (point 188) et de l'église de Marquemont à Monneville (point 195) étaient de complaisance. L'absence d'attribution de marchés, à l'exception de celui de la cathédrale de Beauvais en juin 1998, constitue par ailleurs un indice confirmant l'absence de compétitivité des offres déposées par Terh en Picardie.
524. Les éléments relevés constituent un faisceau d'indices suffisamment graves, précis et concordants pour établir la participation de l'entreprise Terh à l'entente mise en place en Picardie, cette participation se traduisant par la présentation d'offres de couverture à titre habituel au profit des entreprises implantées localement, et ce, afin de simuler la concurrence auprès des maîtres d'ouvrage.
525. S'agissant de la durée de cette participation, celle-ci est établie depuis au moins juillet 1998 (dépôt d'une offre pour le marché de l'église Saint Vulfran à Abbeville, point 177). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en juillet 1999 (dépôt d'offres pour les marchés de l'église de Varinfroy et de Saint Germer de Fly, points 187 et 204).
L'entreprise Payeux
526. M. C..., dirigeant de l'entreprise Payeux, a nié avoir participé à des pratiques anticoncurrentielles en Picardie, et notamment, a déclaré ne pas solliciter ni présenter d'offres de couverture à la demande d'entreprises concurrentes dans cette région. Il ressort toutefois des éléments recueillis au cours de l'instruction et relevés au point 174 ci-dessus, que l'entreprise Payeux a répondu à 34 appels d'offres sur les 75 passés en Picardie entre février 1998 et février 2002, soit 45 % des appels d'offres passés dans la région, et n'a été attributaire que d'un seul marché dans la région. Par ailleurs, les propos de M. C... sont notamment démentis par les déclarations de MM. Q... (Charpentier PM), D... (Chevalier Nord) Z... (Faber SA), faisant état de sollicitations d'offres de couverture à l'occasion d'appels d'offres particuliers, auxquelles Payeux a répondu (voir notamment les marchés du château de Rambures, point 180, de la basilique d'Albert, point 185, de l'église d'Ault, point 188). M. C... a d'ailleurs expressément reconnu le dépôt d'une offre de couverture à la demande de Faber SA pour le marché de la chapelle des Saintes Hosties à Marseille-en-Beauvaisis (point 191). En outre, M. Z... a affirmé que l'entreprise Payeux participait aux échanges mis en place en Picardie (point 170).
527. Les éléments relevés constituent un faisceau d'indices suffisamment graves, précis et concordants pour établir la participation de l'entreprise Payeux à l'entente mise en place en Picardie, cette participation se traduisant par la présentation d'offres de couverture à titre habituel au profit des entreprises implantées localement, et ce, afin de simuler la concurrence auprès des maîtres d'ouvrage.
528. S'agissant de la durée de cette participation et compte tenu de la liste de marchés énumérée dans la lettre du 16 décembre 1998 pour notifier le grief à la société Payeux, celle-ci sera retenue pour la période courant de juillet 1998 (marché du château de Rambures, point 180) à novembre 1999 (marché de la chapelle des Saintes Hosties à Marseille-en-Beauvaisis, point 191).
L'entreprise Pradeau et Morin
529. M. S..., dirigeant de l'entreprise Pradeau et Morin, a nié avoir participé à des réunions de partage des marchés en Picardie, et notamment, a déclaré de manière générale ne pas solliciter ni présenter d'offres de couverture à la demande d'entreprises concurrentes dans cette région (point 168 ci-dessus). Il a cependant reconnu avoir demandé à ses concurrents de lui laisser les chantiers de la région de Beauvais, correspondant à sa zone d'intervention privilégiée et reconnu l'existence d'échanges avec ses concurrents sur certains chantiers particuliers.
530. Par ailleurs, les notes manuscrites saisies dans les locaux de la société Charpentier PM mentionnées ci-dessus (point 484) indiquent la participation de Pradeau et Morin à la réunion de partage des marchés du 12 mars 1999, portant notamment sur l'attribution du marché de la basilique d'Albert (point 185) et de la chapelle des Saintes Hosties à Marseille-en-Beauvaisis (point 191). S'agissant des marchés analysés aux points 176 à 215 ci-dessus, M. S... a reconnu la sollicitation ou le dépôt d'offres de couverture pour quatre autres édifices, à savoir les marchés de Marles (point 189), de l'église de Marquemont à Monneville (195), du palais national de Compiègne (deux appels d'offres, point 200) et de la cathédrale de Beauvais (trois appels d'offres, point 215).
531. La participation à l'entente de Pradeau et Morin est par ailleurs confirmée par les déclarations concordantes de M. Q... (Charpentier PM, point 167) et Z... (Faber SA, point 170), même si le premier indique des contacts moins fréquents avec Pradeau et Morin qu'avec les autres participantes à l'entente.
532. Les éléments relevés constituent un faisceau d'indices suffisamment graves, précis et concordants pour établir la participation de l'entreprise Pradeau et Morin à l'entente mise en place en Picardie.
533. S'agissant de la durée de sa participation à l'entente, celle-ci est établie depuis au moins juillet 1999 (marché de Marles, point 189). Elle s'est poursuivie au moins jusqu'en juillet 2001 (marché de la cathédrale d'Amiens, point 211).
f) Sur les pratiques mises en œuvre en Aquitaine
534. En ce qui concerne la région Aquitaine, le grief notifié aux sociétés Cazenave, M. Lefèvre, Quélin et Dagand vise une entente portant sur les marchés de l'abbaye de la Sauve- Majeure (16 octobre 2001) et des façades de la tour Pey-Berland (24 octobre 2001) à Bordeaux.
535. Les éléments relevés au cours de l'instruction et exposés aux points 216 à 222 ci-dessus montrent l'existence d'une réunion de partage des marchés et de concertations entre les entreprises précédant le dépôt des offres sur les deux marchés concernés.
536. Ainsi, M. E... (M. Lefèvre) a reconnu avoir personnellement participé au cours de l'année 2000 à une réunion avec les représentants de Quélin, Dagand et Cazenave, au cours de laquelle un accord a été conclu pour la répartition des chantiers en consultation sur les années à venir (point 219). L'existence de cette réunion de partage des marchés est également attestée par les propos de M. N... (Quélin) interceptés dans le cadre des écoutes téléphoniques intervenues en octobre 2001 au cours de l'instruction judiciaire (point 220). Il ressort des déclarations de MM. E... (Lefèvre) et N... (Quélin) comme des écoutes téléphoniques réalisées que l'accord en cause portait sur l'attribution des chantiers de l'abbaye de la Sauve-Majeure, qui devait revenir aux Compagnons de Saint Jacques, filiale de M. Lefèvre, et des façades de la tour Pey-Berland, qui devait revenir pour sa majeure partie à Quélin.
537. La mise en œuvre de cet accord a donné lieu à de nouvelles concertations entre les entreprises au cours du mois d'octobre 2001, avant le dépôt des offres. Ainsi, les écoutes téléphoniques intervenues les 5 et 9 octobre 2001 ont permis d'intercepter des échanges entre les responsables de Lefèvre et Quélin quant aux difficultés soulevées pour l'application de l'accord initial par les interventions de Dagand sur le chantier de l'abbaye de la Sauve-Majeure et le groupement constitué entre Quélin et Cazenave pour répondre à l'appel d'offres sur le chantier de la tour Pey-Berland. Ces écoutes font notamment état de discussions entre les représentants de Dagand et Compagnons de Saint Jacques pour négocier l'intervention de la première sur le chantier de l'abbaye de la Sauve Majeure, puis l'intervention de Quélin comme médiateur du conflit entre Dagand et Compagnons de Saint Jacques (point 220).
538. Les éléments recueillis établissent l'existence de concertations dans le but de se répartir les marchés de l'abbaye de la Sauve-Majeure et de la tour Pey-Berland, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce. La circonstance que l'accord initial de répartition des marchés n'ait pas été respecté est sans incidence sur le caractère anticoncurrentiel de ces concertations, dès lors que ces pratiques, qui avaient pour objet de coordonner leurs réponses aux appels d'offres, ont faussé l'indépendance de comportement des entreprises en cause.
539. Les déclarations des responsables de Lefèvre et Quélin comme les conversations téléphoniques interceptées constituent des preuves directes de la participation de ces sociétés à l'entente. En ce qui concerne la société Dagand, la déclaration de M. E... (Lefèvre) ainsi que les éléments tirés des écoutes téléphoniques constituent des indices graves, précis et concordants permettant d'établir la participation de cette société à l'entente.
540. En revanche, les éléments recueillis sont insuffisants pour établir la participation de la société Cazenave à l'entente, bien qu'elle ait constitué un groupement avec la société Quélin pour répondre à l'appel d'offres du marché de la tour Pey-Berland, dès lors que le seul indice de sa participation à la réunion de partage repose sur la déclaration isolée de M. E... (Lefèvre), et alors que les écoutes téléphoniques ne permettent pas d'établir si elle a pris part aux concertations intervenues en octobre 2001.
541. Il résulte de ce qui précède que la participation des sociétés M. Lefèvre, Quélin et Dagand à l'entente dénoncée est établie, le grief ne pouvant être retenu à l'encontre de la société Cazenave.
g) Sur les pratiques mises en œuvre en Ile-de-France
542. En ce qui concerne la région Ile-de-France, le grief notifié aux sociétés M. Lefèvre et Payeux vise une entente portant sur le marché de l'église Saint Eustache à Paris (6 septembre 2001).
543. Les éléments relevés au point 227 montrent que la société Lefèvre a communiqué par fax le 18 juillet 2001 à la société Payeux le bordereau de prix correspondant à l'offre qu'elle s'apprêtait à déposer pour ce marché, antérieurement à la date limite de dépôt des offres du 6 septembre 2001. M. C..., dirigeant de la société Payeux, a reconnu avoir déposé une offre de couverture sur ce marché.
544. Les éléments recueillis établissent l'existence d'un échange d'informations antérieurement au dépôt des offres sur le marché de l'église Saint Eustache à Paris, contraire aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, entre les sociétés Payeux et Lefèvre.
h) Sur les pratiques mises en œuvre en Bourgogne
545. En ce qui concerne la région Bourgogne, le grief notifié aux sociétés M. Lefèvre et Pateu & Robert vise une entente portant sur les marchés de l'église Saint Michel de Dijon (8 octobre 2001) et de l'hôtel de ville d'Autun (20 novembre 2001).
546. Les éléments relevés au point 229 montrent l'existence d'échanges téléphoniques interceptés entre MM. 7... (Pateu & Robert) et E... (M. Lefèvre) en vue de l'attribution des marchés concernés. Ces échanges sont intervenus les 9 et 14 novembre 2001, postérieurement à la date limite de dépôt des offres pour le marché de l'église Saint Michel de Dijon fixée au 8 octobre 2001. Toutefois, ils avaient pour objet d'obtenir de la société Pateu & Robert, qui avait déposé une offre plus intéressante, qu'elle se retire du marché au profit de la société Jacquet, filiale de M. Lefèvre, en échange de l'attribution du marché de l'hôtel de ville d'Autun. Les écoutes montrent que la société Pateu & Robert est effectivement intervenue auprès du maître d'ouvrage pour faire état de son intention de renoncer au marché au motif d'une erreur dans le calcul du prix du devis.
547. Les éléments recueillis établissent l'existence de concertations entre les sociétés Pateu & Robert et M. Lefèvre, dans le but de se répartir les marchés de l'église Saint Michel de Dijon et de l'hôtel de ville d'Autun, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
i) Sur les pratiques mises en œuvre dans le Nord-Pas-de-Calais
548. En ce qui concerne la région Nord-Pas-de-Calais, les pratiques visées par la notification de griefs sont trois ententes portant respectivement sur les marchés de la cathédrale Notre- Dame de Saint-Omer (21 novembre 2001), de l'église Saint-Martin à Auxi-le-Château (6 juillet 2001) et de l'église de Barlin (14 mai 2001).
S'agissant du marché de la cathédrale Notre-Dame de Saint-Omer
549. Ainsi qu'il ressort des éléments relevés aux points 242 et 245, la société Chevalier Nord a transmis aux sociétés Léon Noël, filiale de M. Lefèvre, et Payeux le bordereau de prix correspondant à l'offre qu'elle s'apprêtait à déposer pour ce marché, antérieurement à la date limite de dépôt des offres. MM. U..., dirigeant de la société Léon Noël et C..., dirigeant de la société Payeux, ont reconnu avoir déposé une offre de couverture sur ce marché. Par ailleurs, M. K..., gérant de la société Coefficient, a reconnu avoir préparé l'offre de couverture de la société Léon Noël pour ce marché.
550. Les éléments recueillis établissent l'existence d'un échange d'informations antérieurement au dépôt des offres sur le marché de la cathédrale Notre-Dame de Saint-Omer, contraire aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, entre les sociétés Léon Noël, Chevalier Nord et Payeux.
S'agissant du marché de l'église Saint Martin à Auxi-le-Château
551. Ainsi qu'il ressort des éléments relevés aux points 242 et 244, Chevalier Nord a transmis à Payeux le bordereau de prix correspondant à l'offre qu'elle s'apprêtait à déposer pour ce marché, antérieurement à la date limite de dépôt des offres.
552. M. C..., dirigeant de Payeux, a reconnu que ce fax était destiné à la réalisation d'une offre de couverture. Cependant, Payeux n'a pas déposé d'offre pour ce marché. Aucun élément ne permet d'établir un lien entre l'abstention de Payeux et la communication des prix de Chevalier Nord. Le grief ne sera donc pas retenu à l'encontre de cette société.
553. En revanche, M. Z..., dirigeant de Faber, a reconnu avoir déposé une offre de couverture sur ce marché à la demande de la société Chevalier Nord.
554. Les éléments recueillis établissent l'existence d'un échange d'informations antérieurement au dépôt des offres sur le marché de l'église Saint Martin à Auxi-le-Château, contraire aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, entre les sociétés Faber et Chevalier Nord.
S'agissant du marché de l'église de Barlin
555. Ainsi qu'il ressort des éléments relevés aux points 242 et 243, la société Faber a envoyé à la société Payeux le bordereau de prix correspondant à l'offre qu'elle s'apprêtait à déposer pour ce marché, antérieurement à la date limite de dépôt des offres. M. C..., dirigeant de la société Payeux, a reconnu avoir déposé une offre de couverture sur ce marché.
556. Les éléments recueillis établissent l'existence d'un échange d'informations antérieurement au dépôt des offres sur le marché de l'église de Barlin, contraire aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, entre les sociétés Faber et Payeux. En revanche, les éléments recueillis sont insuffisants pour établir la participation de l'entreprise M. Lefèvre à cette entente. Le grief ne sera donc pas retenu à son encontre.
j) Sur les pratiques mises en œuvre en Champagne-Ardenne
557. En ce qui concerne la région Champagne-Ardenne, le grief notifié aux sociétés M. Lefèvre et Charpentier PM vise une entente portant sur le marché de la cathédrale de Reims (1er mars 2002).
558. Concernant ce marché, les seuls éléments recueillis au cours de l'instruction, relevés au point 237, sont les affirmations de M. Q..., dirigeant de Charpentier PM, qui a déclaré se souvenir d'avoir contacté le dirigeant de la société Léon Noël afin de déposer une offre de couverture. Léon Noël a remporté le marché en déposant une offre d'un montant inférieur de 20 % à celle de Charpentier PM.
559. La déclaration de M. Q..., vague et isolée, ne permet pas d'établir à elle seule l'existence d'une entente entre les sociétés Charpentier PM et Léon Noël pour ce marché. Le grief ne sera donc pas retenu à leur encontre.
k) Sur les pratiques mises en œuvre en Pays-de-la-Loire
560. En ce qui concerne la région Pays-de-la-Loire, le grief notifié aux sociétés M. Lefèvre et Pavy vise une entente portant sur le marché de l'église de la Visitation au Mans (20 septembre 2002).
561. Il ressort toutefois des éléments relevés au point 248 que les sociétés Pavy et Lefèvre ont constitué un groupement afin de répondre à l'appel d'offres et n'ont pas déposé d'offres indépendantes pour ce marché. Par ailleurs, si M. 5..., dirigeant de l'entreprise Pavy, a reconnu avoir sollicité des offres de couverture de la part d'entreprises tierces dans le cadre de cet appel d'offres, et jugé " vraisemblable " que le responsable de la société Lefèvre avait procédé de même, ces éléments n'apportent aucune information quant à la réponse apportée à ces sollicitations par les entreprises concurrentes. Partant, ces éléments ne permettent pas de caractériser l'existence d'une entente ayant faussé la concurrence sur le marché de l'église de la Visitation du Mans. Le grief ne sera donc pas retenu à l'encontre des sociétés Pavy et Lefèvre.
l) Sur l'application des dispositions de l'article L. 420-4 du Code de commerce
562. Aux termes de l'article L. 420-4 du Code de commerce : " Ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 420-1 et L. 420-2 les pratiques : 1° Qui résultent de l'application d'un texte législatif ou d'un texte réglementaire pris pour son application ; 2° Dont les auteurs peuvent justifier qu'elles ont pour effet d'assurer un progrès économique, y compris par la création ou le maintien d'emplois, et qu'elles réservent aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, sans donner aux entreprises intéressées la possibilité d'éliminer la concurrence pour une partie substantielle des produits en cause ".
563. En premier lieu, la société Quélin se prévaut, sur le fondement du 1° de l'article L. 420-1 du " particularisme culturel " du secteur des monuments historiques, dans lequel les usages inciteraient à un partage d'informations entre donneurs d'ordre et entrepreneurs et à la planification de chantiers entre confrères dans le cadre du GMH.
564. A supposer même établie l'existence d' " usages " encourageant les entreprises du secteur des monuments historiques à procéder à des échanges d'informations dans le cadre des appels d'offres lancés par les maîtres d'ouvrage - ce qui ne ressort nullement des affirmations non étayées de la société - cette dernière ne peut utilement se prévaloir du 1° de l'article L. 420-1 du Code de commerce dès lors que l'exonération qu'il prévoit ne s'applique qu'aux pratiques constituant une conséquence nécessaire de l'application d'un texte législatif ou réglementaire.
565. Par ailleurs, il convient de rappeler qu'il résulte d'une jurisprudence constante que la compromission ou la tolérance des pouvoirs publics dans la mise en œuvre de pratiques anticoncurrentielles ne fait pas obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce (voir les arrêts précités de la Cour d'appel de Paris du 7 mars 2006, Ineo SA et de la Cour de cassation du 6 mars 2007, Demathieu et Bard, ainsi que les arrêts de la Cour de cassation du 6 octobre 1992, SA Entreprise Jean Lefèbvre et autres, et du 30 mai 1995, Sté Ghihlion).
566. En second lieu, la société Quélin fait valoir que les pratiques mises en œuvre comportaient des avantages économiques suffisants pour compenser leurs incidences sur la concurrence et permettaient de préserver les emplois dans un secteur fragilisé par la crise.
567. Les entreprises qui se prévalent des dispositions du 2° de l'article L. 420-1 du Code de commerce doivent démontrer, au moyen d'arguments et d'éléments de preuve convaincants, que les conditions requises pour bénéficier d'une exemption sont réunies. A cet égard, si la société Quélin fait valoir que les pratiques en cause auraient permis de pratiquer des prix inférieurs, elle ne démontre nullement la réalité de ces allégations. Les éléments recueillis au cours de l'instruction et exposés aux points 255 à 269 démontrent au contraire que les ententes reprochées ont conduit à une hausse du prix des marchés attribués au cours de la période en cause. En outre, la société Quélin ne prouve nullement que les ententes mises en œuvre étaient indispensables à la création ou au maintien d'emplois dans le secteur des monuments historiques, ses affirmations n'étant étayées par aucun élément justificatif. Les conditions de l'exemption ne sont donc, en tout état de cause, pas réunies.
2. S'AGISSANT DES PRATIQUES MISES EN OEUVRE PAR LES SOCIÉTÉS M. LEFÈVRE ET COEFFICIENT
568. Le grief notifié aux sociétés M. Lefèvre et Coefficient vise la mise en œuvre d'ententes anticoncurrentielles visant à tromper le maître d'ouvrage sur la réalité et l'étendue de la concurrence sur un certain nombre de marchés publics en présentant par le biais des filiales de la société M. Lefèvre plusieurs soumissions apparemment distinctes mais en réalité concertées.
569. Aux termes d'une jurisprudence constante en matière de marchés publics sur appels d'offres, le dépôt d'offres distinctes par des entreprises appartenant à un même groupe dans le cadre de procédures de mise en concurrence manifeste leur autonomie commerciale et l'indépendance de ces offres. Toutefois, s'il apparaît que ces offres ont été établies en concertation, ou après que les entreprises ont communiqué entre elles, elles ne sont plus indépendantes. Dès lors, les présenter comme telles trompe le responsable du marché sur la nature, la portée, l'étendue ou l'intensité de la concurrence. Cette pratique a, en conséquence, un objet ou, potentiellement, un effet anticoncurrentiel (voir l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 28 octobre 2010, Maquet SA, confirmant la décision de l'Autorité de la concurrence n° 10-D-04 du 26 janvier 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des tables d'opération).
570. Au cas d'espèce, il ressort des éléments relevés aux points 83 à 124, 137 à 164 et 176 à 215 ci-dessus que plusieurs filiales de la société M. Lefèvre, dont Normandie Rénovation, Lefèvre SA, Léon Noël, Jacquet, Soporen et les Compagnons de Saint Jacques, ont déposé des offres distinctes dans le cadre des marchés visés par la notification de griefs, lancés par les maîtres d'ouvrage des régions de Haute et Basse-Normandie et de Picardie au long des années 1997 à 2002.
571. Par ailleurs, ainsi qu'il a été relevé ci-dessus (points 59 et s.), la société Coefficient réalisait à la demande de ses clients, et notamment des filiales de la société M. Lefèvre, des études préalables, des devis et des projets architecturaux et techniques. Son gérant, M. K..., a reconnu que l'une des activités de l'entreprise était de préparer des offres de couverture à destination des filiales du groupe M. Lefèvre. Il a déclaré que, lorsque plusieurs filiales du groupe déposaient des offres distinctes sur un même marché, la société Coefficient intervenait pour élaborer ces offres en préparant des bordereaux de prix complémentaires sur la base des éléments figurant dans la bibliothèque des prix et tarifs appliqués par chacune des entreprises du groupe dont elle avait reçu communication par la société M. Lefèvre. Il a précisé que l'ensemble des filiales du groupe M. Lefèvre participaient à ce système d'élaboration des offres de couverture. En conséquence, les réponses aux appels d'offres des filiales de la société M. Lefèvre, élaborées par un même bureau d'études, qui établissait à la fois un devis concurrentiel et une ou plusieurs offres de complaisance, n'étaient pas indépendantes, mais concertées.
572. Les éléments relevés ci-dessus permettent d'établir que les filiales de la société M. Lefèvre se sont entendues, en violation des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, pour présenter des soumissions séparées, mais fictivement indépendantes, par recours à divers procédés simulant l'autonomie des offres et des entreprises. Les pratiques relevées étaient de nature à fausser le jeu de la concurrence sur le marché de la restauration des monuments historiques, en donnant aux acheteurs publics une appréciation erronée de l'état de cette concurrence.
573. La société M. Lefèvre n'a pas présenté d'observations quant au grief d'entente avec la société Coefficient qui lui a été notifié à raison des pratiques ainsi mises en œuvre par ses filiales. Dès lors qu'elles ont concouru à la commission des infractions d'ententes générales mises en œuvre au niveau régional, déjà retenues plus haut à l'encontre des filiales de M. Lefèvre, aucune sanction spécifique ne sera infligée à M. Lefèvre à raison de ces pratiques spécifiques.
574. Par ailleurs, s'agissant de la société Coefficient, celle-ci n'a, ainsi qu'il a été indiqué plus haut, pas contesté le grief d'entente qui lui avait été notifié. En élaborant sciemment des bordereaux de prix fictifs destinés au dépôt d'offres de couverture visant à simuler la concurrence auprès des maîtres d'ouvrage, la société Coefficient a participé à l'entente anticoncurrentielle mise en place entre les filiales de M. Lefèvre. Le grief doit donc être considéré comme établi à son égard.
3. S'AGISSANT DES PRATIQUES MISES EN OEUVRE AU NIVEAU NATIONAL
575. Le grief notifié au niveau national vise des accords et pratiques concertées mises en œuvre entre 1995 et 2002 par les sociétés M. Lefèvre, Coefficient, Quélin, Lanfry, Terh, Dagand, Pradeau et Morin, Charpentier PM, Faber, Cazenave, Payeux, Chevalier Nord, Chevalier Paris, Pateu & Robert et Chanzy et Pradoux sur un territoire comprenant les régions Haute-Normandie, Basse-Normandie, Picardie, Aquitaine, Ile-de-France, Bourgogne, Lorraine, Champagne-Ardenne, Nord-Pas-de-Calais, Pays-de-la-Loire, Auvergne et Rhône-Alpes, et consistant à se répartir les marchés conclus dans ces régions avant le dépôt des offres.
576. Il convient de relever que les éléments exposés aux points 230 à 232 et 251 à 254 ci-dessus, s'agissant de pratiques observées dans les régions Lorraine, Auvergne et Rhône-Alpes, n'ont pas fait l'objet de griefs spécifiques dans la notification de griefs du 16 décembre 2008, mais ont été retenus au soutien du grief notifié au niveau national.
577. Les entreprises mises en cause contestent l'existence d'une entente au niveau interrégional ou national au motif notamment que les marchés et le champ d'intervention des entreprises concernés sont de dimension locale, d'une part, et que les déclarations recueillies au cours de l'information judiciaire sont trop imprécises, voire contradictoires, pour prouver une entente nationale, d'autre part. Par ailleurs, les sociétés Faber SA, Chevalier Paris et Charpentier PM font valoir que la notification de griefs ne pouvait valablement retenir un grief d'entente nationale à leur encontre alors que ses motifs visent à ce titre les seules entreprises Lefèvre, Lanfry et Quélin (§§ 424 et 425).
578. Les éléments relevés au cours de l'instruction ont montré qu'il existait des interactions entre les différentes ententes mises en œuvre au niveau régional, certaines entreprises " extérieures " à la région déposant des offres de couverture dans le but d'obtenir en retour des offres de couverture pour les marchés sur lesquels ces entreprises tierces soumissionnaient dans leur propre zone géographique.
579. Ces éléments sont toutefois insuffisants pour démontrer que les ententes en cause ont dépassé l'échelon régional pour s'étendre sur l'ensemble du territoire visé par le grief, qui couvre environ les deux tiers du territoire national.
580. En effet, la plupart des entreprises mises en cause ne sont actives que sur une partie du territoire visé, voire dans une seule région. Il en est ainsi des éléments relevés par la notification de griefs en ce qui concerne la SNC Chanzy et Pradoux, qui ne visent que la région Lorraine, de même que les éléments relevés à l'encontre de la société Pateu & Robert, qui ne visent que la région Bourgogne, de la société Chevalier Paris, qui ne visent que la région Ile-de-France et de la société Cazenave, qui ne visent que l'Aquitaine. Les participants aux ententes régionales en Haute-Normandie, en Basse-Normandie et en Picardie examinées ci-dessus diffèrent selon les régions. S'agissant des entreprises pour lesquelles les pratiques relevées couvrent plusieurs régions, le territoire concerné varie également selon les entreprises : Basse-Normandie, Haute-Normandie et Picardie s'agissant de Terh, Haute-Normandie, Picardie et Ile-de-France s'agissant de Charpentier PM, Picardie et Nord-Pas-de-Calais s'agissant de l'entreprise Faber SA par exemple.
581. Par ailleurs, la mise en place des ententes s'articule généralement autour des programmations effectuées par un même maître d'ouvrage, la plupart des appels d'offres pour la restauration des monuments historiques étant lancés par les directions régionales des affaires culturelles (DRAC), qui disposent d'une compétence à l'échelon régional.
582. De même, les entreprises se rencontraient habituellement dans le cadre des structures locales de leur instance représentative, à savoir les cellules régionales du Groupement National des Entreprises de Restauration des Monuments historiques (GMH), qui assuraient la liaison entre les professionnels de la restauration de monuments historiques et du patrimoine ancien avec les maîtres d'ouvrage. Les accords de répartition des marchés pouvaient notamment être conclus à l'occasion ou en marge des réunions de ces cellules régionales (points 45 et s.).
583. Dès lors, les éléments du dossier ne mettent pas en évidence d'accords de répartition des parts de marchés entre les entreprises au niveau national dans le secteur des monuments historiques. L'existence de tels accords ne peut ainsi être déduite de la seule implantation des entreprises M. Lefèvre, Lanfry et Quélin sur l'ensemble du territoire national et de leur champ d'action plus vaste, relevée au point 425 de la notification de griefs.
584. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que les entreprises mises en cause aient mis en œuvre une entente de répartition des marchés à l'échelon national entre 1995 et 2002. Le grief ne sera donc pas retenu à leur encontre.
585. Il résulte de ce qui précède qu'aucune pratique anticoncurrentielle ne saurait être retenue à l'encontre des sociétés Chevalier Paris et Chanzy et Pradoux, auxquelles n'a été notifié que le seul grief d'entente nationale.
E. SUR L'IMPUTABILITÉ DES PRATIQUES
1. SUR L'IMPUTABILITÉ DES PRATIQUES À LA SOCIÉTÉ M. LEFÈVRE
586. La société M. Lefèvre soutient que les pratiques en litige ne peuvent lui être imputées dès lors qu'elle n'a pas participé directement à l'entente, d'une part, et que ses filiales disposent d'une complète autonomie commerciale pour conduire leur activité, et notamment pour déposer des offres et conclure des marchés publics, d'autre part. Elle fait valoir qu'elle a fait l'objet d'un traitement inéquitable dès lors que les sociétés-mères des autres entreprises mises en cause n'ont pas fait l'objet d'une notification de griefs.
a) Sur le droit applicable
587. Il résulte d'une jurisprudence constante que les articles L. 421-1 et L. 420-2 du Code de commerce, et 81 et 82 du traité CE, devenus 101 et 102 TFUE, visent les infractions commises par des entreprises, comprises comme désignant des entités exerçant une activité économique (voir point 280 ci-dessus).
588. Le juge communautaire a précisé que la notion d'entreprise, placée dans ce contexte, doit être comprise comme désignant une unité économique, même si, du point de vue juridique, cette unité économique est constituée de plusieurs personnes physiques ou morales (voir les arrêts de la Cour de justice du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C-97-08, Rec. p. I-8237, point 55 et du 14 décembre 2006, Confederación Española de Empresarios de Estaciones de Servicio, C-217-05, Rec. p. I-11987, point 40).
589. Il résulte également d'une jurisprudence communautaire établie que c'est cette entité économique qui doit, lorsqu'elle a enfreint le droit de la concurrence, répondre de cette infraction, conformément au principe de la responsabilité personnelle (voir l'arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C-97-08, non encore publié au Recueil, point 58, et jurisprudence citée sous ce point, points 56 et 57), " sur lequel repose le droit de la concurrence de l'Union " (arrêt du 20 janvier 2011, General Química SA, C-90-09, non encore publié au Rec., point 52).
590. En droit interne comme en droit communautaire, au sein d'un groupe de sociétés, le comportement d'une filiale peut être imputé à la société-mère notamment lorsque, bien qu'ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l'essentiel les instructions qui lui sont données par la société-mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques. Ces solutions jurisprudentielles cohérentes sont fondées sur le fait qu'en l'absence d'autonomie de la société filiale par rapport à la société-mère, ces deux sociétés font partie d'une même unité économique, et, partant, forment une seule entreprise au sens du droit de la concurrence.
591. Les juridictions nationales ont ainsi jugé que les pratiques mises en œuvre par une société filiale sont imputables à celle-ci dès lors qu'elle est en mesure de définir sa propre stratégie commerciale, financière et technique, et de s'affranchir du contrôle hiérarchique de la société dont elle dépend (voir l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, Cemex Bétons Sud-Est, du 25 mars 2008, non cassé sur ce point ; rapp. Cour d'appel de Paris, 26 juin 2007, Guerlain, non cassé sur ce point, s'agissant de sociétés-soeurs et Cour de cassation, 4 juin 1996, Jean Lefebvre, s'agissant de succursales ; voir aussi, pour un rappel de la pratique décisionnelle de l'Autorité de la concurrence sur ce point, la décision n° 09-D-36 du 9 décembre 2009 relative à des pratiques mises en œuvre par Orange Caraïbe et France Télécom sur différents marchés de services de communications électroniques dans les départements de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane, points 408 et s.). A contrario, la Cour d'appel de Paris a jugé que " l'imputation des pratiques d'une filiale à sa société-mère, qui ne constitue qu'une faculté, peut intervenir lorsque la filiale ne détermine pas de façon autonome sa ligne d'action sur le marché, mais applique les instructions qui lui sont imparties par la société-mère " (arrêt du 28 octobre 2010, Maquet).
592. En droit communautaire, la jurisprudence a défini un régime de la preuve spécifique pour apprécier l'autonomie d'une filiale par rapport à sa mère en ce qui concerne son comportement sur le marché. Dans le cas particulier où une société-mère détient, directement ou indirectement par le biais d'une société interposée, la totalité ou la quasi- totalité du capital de sa filiale auteur d'un comportement infractionnel, il existe une présomption simple selon laquelle la société-mère exerce une influence déterminante sur le comportement de sa filiale. Il incombe alors à la société-mère de renverser la présomption en apportant des éléments de preuve susceptibles de démontrer que sa filiale détermine de façon autonome sa ligne d'action sur le marché. Si la présomption n'est pas renversée, la Commission sera en mesure de tenir la société-mère solidairement responsable pour le paiement de l'amende infligée à sa filiale (arrêt Akzo Nobel, points 60 et 61 et jurisprudence citée, solution confirmée récemment par l'arrêt précité General Quìmica SA, points 39 et 40, voir aussi point 90 du même arrêt ; arrêt du tribunal du 30 septembre 2009, Arkema SA/Commission, non encore publié au Rec., point 70).
593. Si les conditions d'application de ce régime de présomption réfragable ne sont pas réunies, la jurisprudence impose à la Commission européenne de vérifier que la société-mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale, et non de se contenter de constater qu'elle est en mesure d'exercer une telle influence (arrêt du Tribunal de première instance du 27 octobre 2010, Alliance One International Inc., T-24-05, non encore publié au Rec., point 126). Dans un tel cas, afin d'établir si une filiale détermine de façon autonome son comportement sur le marché, il convient de prendre en compte l'ensemble des éléments pertinents propres aux circonstances de l'espèce, relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent la filiale à la société-mère (même arrêt, point 171).
594. A cet égard, il n'est pas exigé pour imputer à une société-mère les actes commis par sa filiale de prouver que la société-mère a été directement impliquée dans, ou a eu connaissance, des comportements incriminés. Ainsi que le relève le juge communautaire : " ce n'est pas une relation d'instigation relative à l'infraction entre la société-mère et sa filiale ni, à plus forte raison, une implication de la première dans ladite infraction, mais le fait qu'elles constituent une seule entreprise au sens de l'article 81 CE qui permet à la Commission d'adresser la décision imposant des amendes à la société-mère d'un groupe de sociétés (...) " (arrêt précité Alliance One International Inc., point 169 ; dans le même sens, arrêt Akzo Nobel, point 59).
595. Ces principes, et notamment, le régime de la preuve institué par la jurisprudence communautaire, s'imposent à l'Autorité de la concurrence lorsqu'elle fait application des stipulations des articles 81 et 82 CE, devenus 101 et 102 TFUE. En effet, la notion d'entreprise et les règles d'imputabilité relèvent des règles matérielles du droit communautaire de la concurrence. L'interprétation qu'en donnent les juridictions communautaires s'impose donc à l'autorité nationale de concurrence lorsqu'elle applique le droit communautaire, ainsi qu'aux juridictions qui la contrôlent.
596. Sans l'exclure, les juridictions nationales n'ont pas encore eu l'occasion de faire application à ce jour, lorsqu'elles appliquent le seul droit interne de la concurrence, d'un régime de la preuve reposant sur l'existence d'une présomption simple d'exercice par une société-mère d'une influence déterminante sur le comportement de sa filiale dans le cas où elle détient la totalité ou la quasi-totalité du capital de celle-ci (voir l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 23 septembre 2010, Digicel).
597. Cependant, s'agissant d'une règle de fond, il convient d'assurer la mise en œuvre de règles d'imputabilité homogènes, et notamment, d'un standard de preuve unique, lorsque l'Autorité applique le seul droit interne de la concurrence ou lorsqu'elle applique simultanément le droit interne et le droit communautaire.
598. Ainsi, même lorsqu'elle fait application des seules dispositions de droit interne, l'Autorité est fondée, dans un cas comme celui de l'espèce, où une société-mère détient la totalité ou la quasi-totalité du capital de sa filiale auteur d'un comportement infractionnel, à présumer l'exercice par la société-mère d'une influence déterminante sur la politique commerciale de sa filiale, et à la tenir solidairement responsable pour le paiement de l'amende infligée à sa filiale. Cette présomption peut alors être combattue par les entreprises, qui ont à cet effet la possibilité de faire valoir tous éléments de nature à démontrer que leur filiale se comporte de façon autonome sur le marché.
599. Toutefois, dans la présente affaire, le débat contradictoire ouvert devant les services d'instruction s'est appuyé sur l'analyse développée dans la notification de griefs se fondant, non sur le recours à cette présomption, mais sur des éléments de fait visant à établir que la société M. Lefèvre exerçait effectivement une influence déterminante sur ses filiales.
600. Dans ces conditions, la possibilité d'imputer les comportements infractionnels des filiales de M. Lefèvre à la société-mère sera appréciée sur le fondement d'une analyse concrète des éléments relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces sociétés.
b) Appréciation en l'espèce
601. Les éléments factuels du dossier permettent d'établir que les filiales de la société M. Lefèvre qui ont pris part aux ententes en litige, et notamment Normandie Rénovation, Lefèvre SA et Léon Noël, ne déterminaient pas de façon autonome leur comportement sur le marché au cours de la période en litige. Ces éléments relèvent de trois catégories : les liens juridiques et capitalistiques unissant les sociétés, le contrôle exercé sur les filiales par les conseillers du président de la société-mère, et la coordination de la stratégie commerciale du groupe exercée par l'intermédiaire de la société Coefficient.
602. S'agissant des liens juridiques et capitalistiques unissant les sociétés du groupe, il ressort de l'instruction que la société M. Lefèvre, contrôlée par M. X... (cote 3819), président du Conseil de surveillance, détenait près de 100 % du capital de ses filiales, Lefèvre SA, Léon Noël, Normandie Rénovation et les Compagnons de St Jacques. M. X... était l'administrateur de plusieurs de ces filiales, dont Lefèvre SA et Léon Noël (cote 2348). Par ailleurs, la société Lefèvre SA disposait de plusieurs établissements ou " agences ", dont l'agence de Giberville impliquée dans les ententes en litige. Ces entités ne disposaient pas d'une personnalité morale distincte.
603. S'agissant du contrôle exercé sur les filiales, celles-ci étaient supervisées par deux salariés de la société M. Lefèvre, cadres supérieurs ayant la fonction de conseiller du président du conseil d'administration de cette société (cotes 3964 à 3971). Aux termes de leurs contrats de travail, ces conseillers étaient chargés d'assurer les " missions " confiées par la société M. Lefèvre auprès des entités juridiques du groupe, sans que ces " missions " ne les empêchent d'assumer des responsabilités au sein de M. Lefèvre. Les contrats de travail stipulent également que leurs responsabilités respectives s'exercent sous le contrôle direct du président du conseil d'administration de M. Lefèvre (cote 1285).
604. M. G... était ainsi chargé de superviser les établissements de la société Lefèvre SA en tant que président-directeur-général de cette filiale du groupe (cotes 3031 et 3969). M. E... était quant à lui chargé de superviser les filiales Normandie Rénovation, Soporen, Jacquet, les Compagnons de Saint-Jacques et Sele (cote 3965). Par ailleurs, M. E... était à l'époque des faits le président-directeur-général d'une autre filiale de la société M. Lefèvre, la société Léon Noël.
605. Il ressort des déclarations de ces deux conseillers dans le cadre de la procédure pénale que les " missions " qu'ils exerçaient peuvent être assimilées à l'exercice d'un contrôle hiérarchique des filiales de M. Lefèvre. Ainsi, les directeurs d'agence ou de filiales étaient soumis à un contrôle des prix pratiqués dans le cadre des appels d'offres lancés par les maîtres d'ouvrage. MM. G... et E... ont reconnu que les filiales de la société M. Lefèvre ne pouvaient déroger à une marge minimale de 10 % qu'avec leur autorisation expresse. M. E... a par ailleurs reconnu avoir fixé directement le prix de certaines offres présentées par les filiales (procès-verbaux d'audition, cotes 2837, 2838 et 2989).
606. MM. G... et E... et les directeurs d'agences et de filiales procédaient au compte-rendu mensuel des activités des agences et filiales à MM. L... et X..., respectivement secrétaire général et président-directeur-général de la société M. Lefèvre (cotes 2837 et 2989).
607. Le contrôle exercé par les conseillers du président de la société-mère M. Lefèvre s'est notamment illustré dans le cadre de la mise en œuvre des pratiques d'entente en litige.
608. M. E... a ainsi indiqué (cote 2853) qu'il avait " un droit de regard sur ce qui se pass[ait] dans l'ensemble des filiales de son ressort ", que " pour toutes les affaires prises en concertation, cela se pass[ait] avec son accord exprès ou tacite ", qu'il " n'ignor[ait] pas le principe des couvertures qui ét[aient] faites avec son aval de principe ", et qu'en cas de difficulté, il " pouvait intervenir personnellement auprès des autres concurrents ".
609. Ces propos sont corroborés par les déclarations des directeurs de filiales et d'agences et des concurrents du groupe Lefèvre. M. B..., directeur de la société Normandie Rénovation a déclaré : " ... il est exact que toutes les concertations que j'entreprends avec les entreprises concurrentes ou avec les filiales Lefèvre, que je considère également comme des concurrents, sont faites avec l'accord exprès de M. E... " (cote 2628). Il a précisé : " D'une façon plus générale, lorsque M. E... me demande de préparer une offre de couverture et de répondre loin de mon secteur, je m'exécute quelle que soit la région concernée. Par exemple j'ai répondu dans le département 57, en Basse-Normandie de façon plus régulière et aussi dans la région Nord " (cote 2639). M. B..., représentant de la société Lanfry a déclaré : " nous passons des accords avec le groupe Lefèvre notamment qui est présent et soumissionne dans toutes les régions. Il suffit d'obtenir l'accord de M. E... ou de M. X... pour que les autres entreprises intervenant dans le secteur des monuments historiques accèdent aux exigences du groupe Lefèvre " (cote 2601).
610. S'agissant enfin du rôle joué par la société Coefficient, dont le capital est détenu par M. X..., président-directeur-général de la société M. Lefèvre, et qui était notamment chargée de chiffrer les offres présentées dans le cadre des appels à la concurrence, celui-ci permet également d'illustrer l'absence d'autonomie des filiales du groupe M. Lefèvre.
611. Les principaux clients de la société Coefficient sont les filiales du groupe M. Lefèvre. Un courrier à en tête de la société M. Lefèvre fait apparaître que dès septembre 1998, son président-directeur-général, M. X... a souhaité " ... faire établir par Coefficient les études de plus de 500 kF : afin d'éviter que la dégradation des prix du marché n'entraine un abaissement incontrôlé de [ses]offres et que l'on en vienne à traiter, sans [s]on accord, avec des marges insuffisantes plutôt que de rechercher des solutions alternatives " (cotes 3960 & 3961). Les documents saisis dans le bureau de M. K..., gérant de la société Coefficient, font apparaître que cette pratique avait cours depuis 1996 pour les marchés de l'ordre d'un million de francs (cotes 17045 à 17048).
612. M. X... a expliqué que la société Coefficient lui communiquait toutes les offres dont les marges étaient inférieures à 7 % en précisant qu'en cas de baisse de marge consécutive à la concurrence entre les filiales, il aurait été amené à intervenir pour s'y opposer (cotes 3831 et 3836). Les documents saisis dans le bureau de M. K..., gérant de la société Coefficient, font apparaître que cette pratique a effectivement été mise en œuvre, notamment au cours des exercices 1999 et 2000 (cotes 17031 à 17044).
613. Par ailleurs, les éléments nécessaires à l'établissement des offres des entreprises du groupe étaient communiqués à la société Coefficient par M. L..., secrétaire général de la société-mère, M. Lefèvre. Ainsi, les courriers en date du 22 février 2001 adressés au gérant de la société Coefficient et à l'ensemble des directeurs des filiales du groupe M Lefevre, détaillent les coefficients applicables pour l'année 2001 à l'ensemble des sociétés et agences du groupe, tels que taux de frais généraux, de frais d'études ou de facturation (cotes 717 à 744). Le gérant de la société Coefficient a déclaré à l'enquêteur de la DGCCRF : " Je reçois chaque année de chaque entreprise (Lefèvre, Normandie Rénovation, Jacquet, Sele, Noël, Les Compagnons St Jacques, Soporen Renofors, Tollis, Les Métiers du Bois) les coefficients propres à chaque entreprise applicables au déboursé sec. Pour 2001, les documents sont signés de M. L... qui travaille à ma connaissance à la holding financière de Lefèvre. Depuis plusieurs années, c'est M. L... qui signe ces documents. Les sociétés clientes ne demandent jamais de modifier ces éléments " (cote 23).
614. S'agissant de la mise en œuvre des pratiques d'entente, l'utilisation de la société Coefficient à des fins de coordination de l'action des filiales de M. Lefèvre indique également l'existence d'une stratégie commerciale commune du groupe. M. K..., gérant de la société Coefficient depuis le 5 avril 1990, a déclaré que " le système a[vait] été mis en place au niveau national et depuis longtemps ", et que " l'ensemble des entreprises du groupe Lefèvre et de ses filiales [...] pratiqu[ai]ent toutes de la même manière sur leurs zones respectives à savoir qu'elles sollicit[ai]ent des devis pour répondre en couverture ou pour les transmettre aux entreprises concurrentes afin que celles-ci couvrent [ses] clients " (cotes 2778, 2781, 2788 et 2789). Ces déclarations sont corroborées par celles de M. E..., conseiller du président de la société M. Lefèvre : " Coefficient ... élabore les bordereaux de prix fictifs à destination des autres filiales ou d'entreprises extérieures au groupe " (cote 2843).
615. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société M. Lefèvre exerçait, au cours de la période en litige, une influence déterminante sur le comportement de ses filiales, qui n'étaient donc pas en mesure de définir de façon autonome leur comportement sur le marché. La société M. Lefèvre doit donc répondre des comportements infractionnels de ses filiales, qui lui sont imputables.
616. Enfin, il convient d'écarter l'argument de la société M. Lefèvre qui allègue avoir fait l'objet d'un traitement inéquitable de la part des services d'instruction dès lors que les griefs n'ont pas été notifiés aux sociétés-mères des autres entreprises mises en cause dans la présente affaire. Cet argument vise les sociétés Pradeau et Morin, Pateu & Robert et Degaine, respectivement filiales du groupe Eiffage et du groupe Vinci. Cependant, les éléments du dossier n'indiquent pas l'exercice effectif par les sociétés-mères des groupes Vinci et Eiffage d'une influence déterminante dans le comportement de leurs filiales sur le marché, et notamment, dans la définition de leur politique commerciale, à la différence des éléments ressortant de l'enquête s'agissant du groupe M Lefèvre. Partant, le comportement infractionnel des filiales des groupes Vinci et Eiffage ne saurait être imputé à leurs sociétés-mères.
2. SUR L'IMPUTABILITÉ DES PRATIQUES À LA SOCIÉTÉ PYRAMIDE
617. Aux termes d'une jurisprudence constante, lorsque la personne ayant commis l'infraction a cessé d'exister juridiquement après la commission de l'infraction, les pratiques sont imputées à la personne morale à laquelle l'entreprise a été juridiquement transmise, et, à défaut d'une telle transmission, à celle qui assure en fait sa continuité économique et fonctionnelle (voir les arrêts de la Cour de cassation du 23 juin 2004, BNP Paribas, et de la Cour d'appel de Paris du 14 janvier 2009, Eurelec Midi-Pyrénées). Il en résulte qu'en cas de dissolution par absorption de la personne morale, les pratiques doivent être imputées à la société qui succède, sur le plan juridique, à la société auteur des pratiques, c'est-à-dire la société absorbante (voir, par exemple, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 23 octobre 2007, SNC Eiffage Construction Languedoc).
618. Au cas d'espèce, la société Pyramide a fait l'acquisition de la totalité du capital social de la société Dagand en vertu d'un protocole de cession d'actions conclu le 23 août 2005 avec la société Eiffage Construction. A la suite de la dissolution de la société Dagand consécutive à la réunion de toutes les parts sociales en une seule main, la société Pyramide vient aux droits de la société Dagand en application des dispositions de l'article 1844-5 alinéa 3 du Code civil.
619. Les infractions au droit de la concurrence commises par la société Dagand sont donc imputables à la société Pyramide, qui lui succède juridiquement, nonobstant la circonstance que ces infractions sont antérieures à l'acquisition de l'entreprise. La société Pyramide ne conteste d'ailleurs pas que les pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre par la société Dagand lui sont imputables.
F. SUR LES SANCTIONS
1. SUR LE MONTANT MAXIMUM DES SANCTIONS
620. Le I de l'article L. 464-2 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001, relative aux nouvelles régulations économiques (ci-après la " loi NRE ") prévoit que " [s]i le contrevenant n'est pas une entreprise, le montant maximum de la sanction est de 3 millions d'euro. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante ".
621. Le III du même article, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 13 novembre 2008 en vertu de laquelle certaines des mises en cause ont demandé le bénéfice de la procédure de non-contestation des griefs prévoit : " Lorsqu'un organisme ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés et s'engage à modifier ses comportements pour l'avenir, le rapporteur général peut proposer à l'Autorité de la concurrence, qui entend les parties et le commissaire du Gouvernement sans établissement préalable d'un rapport, de prononcer la sanction pécuniaire prévue au I en tenant compte de l'absence de contestation. Dans ce cas, le montant maximum de la sanction encourue est réduit de moitié ".
622. Lorsque les pratiques relevées sont constitutives d'une pratique continue, commencée antérieurement et terminée postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi NRE et que le Conseil de la concurrence a été saisi postérieurement à cette entrée en vigueur, les dispositions applicables sont celles de la loi NRE (voir sur ce point l'arrêt de la Cour de cassation du 14 mars 2006, SAS Privileg).
623. En l'espèce, la saisine du Conseil de la concurrence par la société GAR Rénovation Vieux Edifices en date du 18 mai 2005 est postérieure à l'entrée en vigueur de la loi NRE, de même que la saisine d'office du Conseil de la concurrence en date du 12 novembre 2007. Ces saisines visent des pratiques continues, qui ont été mises en œuvre jusqu'au 24 février 2002 s'agissant de l'entente mise en œuvre en Haute-Normandie, au 12 février 2002, s'agissant de l'entente mise en œuvre en Basse-Normandie, et au 19 octobre 2001, s'agissant de l'entente mise en œuvre en Picardie. Les dispositions de la loi NRE sont donc applicables.
624. Il en est de même des ententes mises en œuvre à l'occasion d'appels d'offres spécifiques dans les régions Aquitaine, Ile-de-France, Bourgogne et Nord-Pas-de-Calais qui ont pris place entre juillet 2001 et septembre 2002 selon les marchés en cause, à l'exception de l'entente entre les sociétés Faber et Payeux, mise en œuvre à l'occasion de l'appel d'offres de l'église de Barlin, en date du 14 mai 2001.
2. SUR LES CRITÈRES DE DÉTERMINATION DES SANCTIONS
625. A titre liminaire, il convient de souligner que, si les entreprises mises en cause se prévalent de l'ancienneté des faits pour demander la réduction des sanctions, il résulte d'une jurisprudence constante que l'ancienneté des faits et la durée de la procédure ne constituent pas des moyens de réduction de la sanction (arrêts de la Cour d'appel de Paris du 15 juin 1999, Solatrag, du 30 janvier 2007, Le Foll, du 16 juin 2009, Colas Midi- Méditerranée et du 29 janvier 2008, Le Goff Confort).
626. Le I de l'article L. 464-2 du Code de commerce dispose que " les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné ou du groupe auquel l'entreprise appartient et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées par le présent titre. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction ".
627. Seront successivement abordées :
- la gravité des pratiques ;
- l'importance du dommage à l'économie ;
- la situation individuelle des entreprises.
a) Sur la gravité des pratiques
La nature et la portée des pratiques
628. L'ensemble des ententes en cause portent sur des marchés publics d'appels d'offres.
629. Les pratiques relevées en Aquitaine, en Ile-de-France, en Bourgogne et dans le Nord-Pas-de-Calais portent sur des concertations et échanges d'informations des entreprises avant le dépôt des offres.
630. Les éléments relevés dans les régions Haute-Normandie, Basse-Normandie et Picardie ont permis d'établir, dans ces trois régions, l'existence d'ententes organisées à un échelon plus vaste que chacun des marchés considérés, et visant à se répartir les marchés publics lancés pour la restauration des monuments historiques situés sur ces territoires et à simuler la concurrence auprès des maîtres d'ouvrage. Ces ententes régionales ont été mises en œuvre au moyen de concertations et échanges d'informations répétés, intervenant à l'occasion des appels d'offres particuliers, et par la présentation à titre habituel d'offres de couverture au profit des entreprises concurrentes.
631. Enfin, l'entente spécifique à laquelle la société Coefficient a pris part avec les filiales du groupe M. Lefèvre a eu pour objet l'élaboration délibérée de bordereaux de prix fictifs destinés au dépôt d'offres de couverture permettant aux filiales du groupe de présenter des soumissions séparées, mais fictivement indépendantes, et de simuler l'autonomie des offres auprès des maîtres d'ouvrage.
632. A cet égard, il convient de souligner que les pratiques d'ententes entre les soumissionnaires aux appels d'offres lancés dans le cadre de marchés publics sont particulièrement graves par nature, puisque seul le respect des règles de concurrence dans ce domaine garantit à l'acheteur public la sincérité de l'appel d'offres et la bonne utilisation de l'argent public. En particulier, le fondement même des appels à la concurrence réside dans le secret dont s'entourent les entreprises intéressées pour élaborer leurs offres, chacune d'entre elles devant se trouver dans l'ignorance de la qualité de ses compétiteurs, de leurs capacités financières à proposer la meilleure prestation ou fourniture possible au prix le plus bas. Au contraire, les échanges d'informations entre entreprises, lorsqu'ils sont antérieurs à la remise des plis, libèrent les compétiteurs de l'incertitude de la compétition et leur permettent d'élaborer des offres ne prenant plus en compte seulement leurs données économiques propres, mais celles, normalement confidentielles, de leurs concurrents.
633. Aux termes d'une jurisprudence constante, les juridictions de contrôle considèrent que de telles pratiques anticoncurrentielles prennent rang parmi les plus graves (voir, récemment, les arrêts de la Cour d'appel de Paris du 28 octobre 2010, Maquet SA, du 16 juin 2009, Colas Midi-Méditerranée, du 24 juin 2008, France Travaux, du 8 avril 2009 Ela Médical, du 30 janvier 2007, Le Foll, du 25 septembre 2007, Entreprise Vendasi et du 23 octobre 2007, SNC Eiffage Construction Languedoc).
634. Ces pratiques sont d'autant plus graves s'agissant des ententes mises en œuvre en Haute-Normandie, Basse-Normandie et en Picardie qu'elles ont pris la forme d'un véritable système de partage des marchés au niveau régional. Ainsi que l'a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 24 mars 2008, Sade : " la tromperie de l'acheteur public érigée en système perturbe le secteur où elle est pratiquée et porte une atteinte grave à l'ordre public économique ".
635. Par ailleurs, comme l'a souligné le Conseil de la concurrence dans sa décision n° 08-D-28 du 3 décembre 2008 relative à des pratiques mises en œuvre par des entreprises exploitant des granulats dans le département d'Ille-et-Vilaine, lorsque des entreprises sont " habituées à répondre à de nombreux appels d'offres publics, de ce fait, elles ne p[euvent] ignorer le caractère prohibé des échanges d'informations entre soumissionnaires se présentant comme concurrents à un appel d'offres, rappelé par de très nombreuses décisions des autorités de concurrence et une jurisprudence constante ". Or, la connaissance par l'entreprise du caractère illicite des pratiques qu'elle a commises constitue également un facteur aggravant reconnu par la jurisprudence (voir les arrêts de la Cour d'appel de Paris du 10 novembre 1998, Ordre des avocats du barreau de Marseille et du 30 mars 2004, SAS Novartis Pharma). Cette jurisprudence peut être appliquée en l'espèce dès lors que la restauration de monuments historiques est presque exclusivement subordonnée à l'engagement de procédures de mise en concurrence publiques et que les entreprises actives dans ce secteur sont donc nécessairement habituées à répondre à de nombreux appels d'offres.
L'étendue des pratiques
636. Les ententes ont regroupé les principales entreprises actives dans le secteur de la restauration des monuments historiques. La généralisation des pratiques anticoncurrentielles est également illustrée par le fait que les nouveaux acteurs étaient invités à rejoindre l'entente existante au niveau régional, M. U... (Léon Noël) déclarant ainsi avoir été contacté très rapidement par ses concurrents après son arrivée au sein de l'entreprise en 2000 pour la mise en place de la répartition géographique des marchés dans la région (point 171 ci-dessus).
637. Par ailleurs, s'agissant des trois régions dans lesquelles une entente de répartition a pu être établie, le comportement des entreprises mises en cause ne s'est pas limité à quelques appels d'offres, comme en témoigne le nombre très important des marchés sur lesquels des pratiques de concertation préalable ont pu être identifiées. Le volume très élevé des appels d'offres en cause témoigne de la mise en place, dans chaque région concernée, de véritables systèmes de partage des marchés et de pactes de non-agression de large portée.
638. De manière générale, les accords de répartition mis en œuvre en Haute-Normandie, en Basse-Normandie et en Picardie, et les concertations à l'occasion d'appels d'offres particuliers mises en œuvre en Aquitaine, Ile-de-France, Bourgogne et Nord-Pas-de-Calais, qui ont été relevées dans le cadre de la présente affaire mettent en évidence la vaste étendue du territoire concerné par les pratiques d'ententes sur appels d'offres mises en œuvre par les entreprises du secteur des monuments historiques au cours de la période en cause.
La durée des pratiques
639. En ce qui concerne les trois ententes régionales de répartition des marchés, qui constituent chacune une infraction continue, les pratiques ont été mises en œuvre pendant une longue période, les éléments relevés au cours de l'instruction ayant permis de démontrer des échanges depuis au moins avril 1997 s'agissant de la Haute-Normandie, décembre 1997 s'agissant de la Basse-Normandie et février 1998 s'agissant de la Picardie. Elles ont pris fin au plus tôt en février 2002 s'agissant des deux premières ententes, et en octobre 2001 s'agissant de la dernière.
640. Il convient de relever que de nombreux dirigeants ont reconnu au cours de l'enquête que ces pratiques constituaient une " tradition " dans le secteur de la restauration des monuments historiques, mise en œuvre depuis de très longues années (voir notamment, les déclarations citées aux points 50, 51, 74, 80, 128, 131 et 167), même s'il sera seulement tenu compte, pour l'appréciation du montant de la sanction, de la durée qui a été établie sur le fondement des éléments relevés à l'occasion des appels d'offres individuels étudiés lors de l'instruction et retenus pour notifier les griefs aux entreprises concernées.
641. Il n'a donc été mis fin aux ententes qu'à la suite des perquisitions des locaux des entreprises et de l'audition de leurs dirigeants dans le cadre de l'information judiciaire ouverte auprès du Tribunal de grande instance de Rouen en septembre 2001. Il y a donc tout lieu de penser que, en l'absence de signalement par les services de la DRAC de Haute-Normandie d'anomalies constatées au cours de l'appel d'offres de la tour de Beurre de la cathédrale de Rouen, l'entente en Haute-Normandie aurait perduré au-delà de cette date, tout comme les ententes en Basse-Normandie et en Picardie.
Le rôle joué par les autorités publiques
642. Les sociétés Charpentier PM et Degaine font valoir que certains maîtres d'œuvre ou maîtres d'ouvrage ont joué un rôle actif, sinon décisif, dans l'élaboration et la mise en œuvre des pratiques anticoncurrentielles alléguées. Sur ce point, elles se prévalent du rapport d'enquête des services de la DGCCRF, qui fait état de l'existence, pour certains marchés, de rapports étroits entre des personnes liées à la maîtrise d'œuvre ou d'ouvrage et l'entreprise déclarée attributaire des travaux, susceptibles de caractériser une complicité à la mise en œuvre des ententes anticoncurrentielles (cotes 5918 et s.). De même, le rapport de l'inspection générale de l'administration des affaires culturelles du ministère de la Culture et de la Communication (IGAAC) de décembre 2007 fait état de la responsabilité du conservateur régional des monuments historiques de Haute-Normandie. De manière générale, les mises en cause font valoir que les maîtres d'œuvre auraient incité les entreprises à s'entendre, dès lors qu'ils souhaitaient attribuer les marchés de restauration à l'entreprise intervenant habituellement sur le monument concerné, au motif que sa connaissance du bâtiment constituerait une garantie de qualité.
643. Dans son arrêt du 3 juillet 2008, Eiffage Construction, relatif à l'affaire des marchés publics passés par le conseil régional d'Ile-de-France pour la rénovation de ses établissements scolaires, la Cour d'appel de Paris a jugé, au stade du contrôle des sanctions qui avaient été prononcées par le Conseil de la concurrence : " Considérant, sur les sanctions (...) que c'est à juste titre que le Conseil a retenu l'extrême gravité des pratiques (...) que, s'il est constant que c'est le maître de l'ouvrage qui, en recourant au METP, plus propice aux ententes, les a incitées, voire les a invitées à s'entendre pour parvenir à une participation jugée "équitable" de toutes les entreprises du secteur, cette circonstance n'est pas de nature à exonérer les requérantes, qui n'y étaient pas obligées, d'agissements aussi graves ". Cette jurisprudence peut être transposée en l'espèce, en l'absence de toute contrainte irrésistible exercée par les autorités publiques et compte tenu du caractère d'extrême gravité des comportements en cause.
644. En tout état de cause, aucun élément ne permet de corroborer l'existence d'une préférence alléguée du maître de l'ouvrage pour l'entreprise intervenant habituellement sur un édifice, qui aurait incité les entreprises à s'entendre. Les représentants des DRAC de Haute-Normandie et de Picardie, assurant la maîtrise d'ouvrage des bâtiments appartenant à l'Etat dans ces régions, ont au contraire souligné l'effet positif sur les prix du changement des entreprises habituelles sur certains édifices qui a été observé après la fin des ententes (points 258 et 260 ci-dessus).
645. Il convient par ailleurs de relever que l'ordonnance du juge d'instruction du Tribunal de grande instance de Rouen du 15 décembre 1999 conclut au non lieu en ce qui concerne les agissements qui avaient été reprochés aux représentants des autorités publiques dans le cadre de l'information judiciaire ouverte en 2001. Les entreprises ne font état d'aucun autre élément circonstancié pour établir l'encouragement des autorités publiques dans la mise en œuvre des pratiques anticoncurrentielles en litige.
646. En outre, à supposer que certains représentants des autorités publiques se soient effectivement rendus complices, à titre individuel, de la mise en œuvre des ententes anticoncurrentielles comme le soutiennent les parties, cette circonstance ne pourrait être prise en compte pour modérer la gravité des pratiques en cause dès lors que les entreprises concernées, habituées à répondre à de nombreux appels d'offres, ne pouvaient pas ignorer le caractère illicite d'un tel comportement des maîtres d'œuvre.
b) Sur l'importance du dommage causé à l'économie
647. A titre liminaire, il convient de rappeler qu'aux termes d'une jurisprudence constante, et contrairement à ce que soutiennent les entreprises mises en cause, l'Autorité de la concurrence peut procéder à une appréciation globale de l'importance du dommage à l'économie, comme de la gravité des pratiques, dès lors qu'elle tient compte, de manière individualisée, de la situation de chaque entreprise et de sa contribution personnelle aux pratiques (voir, notamment l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 17 septembre 2008, Coopérative agricole l'Ardéchoise, ainsi que l'arrêt de la Cour de cassation du 22 novembre 200, Dexxon Data Media).
648. S'agissant d'ententes portant sur des marchés d'appels d'offres, la Cour d'appel de Paris a récemment rappelé que " le dommage causé à l'économie est indépendant du dommage souffert par le maître d'ouvrage en raison de la collusion entre plusieurs entreprises soumissionnaires et s'apprécie en fonction de l'entrave directe portée au libre jeu de la concurrence ; en effet, de telles pratiques affectent le principe même de l'appel d'offres, qui repose sur la loyauté des participants et constituent, en soi, une tromperie sur la réalité de la concurrence dont elles faussent le libre jeu " (arrêt du 28 octobre 2010, Maquet SA ; voir, dans le même sens, les arrêts du 13 janvier 1998, Fougerolle Ballot, du 12 décembre 2000, Sogea Sud Est, et du 4 février 2003, SNC Suburbaine de Canalisation et de Grands Travaux).
649. Par ailleurs, l'Autorité de la concurrence n'est pas tenue de chiffrer précisément l'importance du dommage à l'économie (voir, par exemple, les arrêts de la Cour d'appel de Paris du 19 janvier 2010, AMD Sud-Ouest, du 26 janvier 2010, Adecco France SAS, du 23 mars 2010, SEMGEG, et du 28 janvier 2009, Epsé Joué Club, précité). S'agissant des ententes de répartition régionale des marchés
Sur la taille et la part des marchés affectés
650. En 2001, le marché de la restauration des monuments historiques pouvait être estimé à environ 186 millions d'euro au niveau national (point 14). Les pratiques continues d'ententes de répartition des marchés ont été mises en œuvre dans trois des 22 régions françaises, la Haute-Normandie, la Basse-Normandie et la Picardie. Les éléments présents au dossier ne permettent pas d'évaluer la taille des marchés régionaux en cause au cours de la période de commission des pratiques.
651. Les membres de l'entente mise en œuvre en Haute-Normandie détenaient la quasi-totalité du marché en cause (point 68 ci-dessus), et les membres des ententes mises en œuvre en Basse-Normandie et en Picardie détenaient ensemble plus de 90 % des parts des marchés concernés (points 125 et 165 ci-dessus). Les pratiques ont donc porté sur la quasi-totalité des marchés régionaux affectés.
Sur la durée des pratiques
652. Comme rappelé au point 639 ci-dessus, les trois ententes régionales de répartition des marchés ont été mises en œuvre pendant une période continue, égale à près de cinq ans pour l'entente en Haute-Normandie (avril 1997 à février 2002), plus de quatre ans pour l'entente en Basse-Normandie et près de quatre ans pour l'entente en Picardie (février 1998 à octobre 2001) (28). Les ententes ont donc causé un dommage important au secteur de la restauration des monuments historiques durant la période considérée, et plus largement à l'économie, les clients des mises en cause étant principalement, comme il a été indiqué plus haut, des services de l'État et des collectivités territoriales.
Sur les conséquences conjoncturelles et/ou structurelles des pratiques
. Le cloisonnement des marchés
653. Les éléments relevés au cours de l'instruction montrent que les ententes régionales avaient pour effet de figer les parts de marchés et de prévenir l'entrée d'entreprises " extérieures " sur chacun des marchés régionaux concernés, l'éclatement des ententes s'étant traduit a contrario par une animation du jeu concurrentiel entre les membres des ententes. Ainsi, les représentants des DRAC de Haute-Normandie et de Picardie, interrogés au cours de l'instruction pénale, ont indiqué avoir constaté au cours de l'année 2002 l'arrivée dans leur région d'entreprises nouvelles, déposant des offres compétitives par rapport aux entreprises locales " historiques " (points 258 et 262 ci-dessus).
654. Durant la période de mise en œuvre des ententes, les membres de celles-ci se sont également opposés à l'entrée de nouveaux acteurs sur le marché de la restauration de monuments historiques, tels que la société Bouygues, dont l'implantation en Haute-Normandie via le rachat de la société Lanctuit a été contrecarrée par la création de la société Terh, qui en a repris le personnel et les chantiers habituels, avec l'aide notamment de Quélin (point 82 ci-dessus).
655. L'effet de cloisonnement des marchés lié à la mise en œuvre des ententes est également illustré par l'existence de zones géographiques et de monuments " réservés " à une entreprise particulière, tel que le Mont Saint Michel pour l'entreprise Degaine (voir les développements relatifs aux critères de répartition des marchés dans les trois régions concernées, points 392 à 397, 436 à 440 et 487 à 491 ci-dessus). Selon les indications des représentants des DRAC auditionnés, l'éclatement des ententes s'est ainsi traduit par le changement des titulaires habituels des marchés pour certains édifices.
. L'augmentation des prix résultant de la mise en œuvre des ententes
656. Bien qu'il ne soit pas nécessaire de démontrer que l'entente en cause s'est effectivement traduite en l'espèce par une élévation des prix, les éléments concordants relevés au cours de l'instruction permettent toutefois d'établir que les pratiques en cause ont eu un important effet haussier sur les prix des marchés d'appels d'offres pour la restauration de monuments historiques dans les trois régions concernées.
657. A titre liminaire, il convient de rappeler que les entreprises ne peuvent pas soutenir pour leur défense que dans de nombreux cas, l'offre retenue par le maître d'ouvrage était d'un montant inférieur à l'estimation de l'administration. En effet, seul le fonctionnement normal de la concurrence et l'incertitude sur le montant des offres proposées par les concurrents sont de nature à garantir l'obtention du juste prix (décision du Conseil précitée n° 07-D-15, point 486, confirmée sur ce point par l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 3 juillet 2008, Eiffage Construction SAS).
La différence observée entre les prix des marchés attribués et les estimations des maîtres d'œuvre avant et après l'éclatement des ententes.
658. Dans le cadre de l'information judiciaire ouverte devant le Tribunal de grande instance de Rouen, il a été procédé, sur la base des données fournies par les DRAC et portant sur l'ensemble des procédures d'appels d'offres passées par ces directions, au calcul du différentiel observé entre les prix des marchés attribués et les estimations des maîtres d'œuvre pendant une période précédant la fin de l'entente de répartition, d'une part, et pendant l'année suivant l'éclatement de chacune des ententes régionales, d'autre part (points 257 et s.).
659. Les différentiels de prix observés indiquent, en creux, l'existence d'un surprix au cours de la période de mise en œuvre de l'entente (29) :
<emplacement tableau>
660. Les entreprises mises en cause font valoir que cette évaluation est entachée de partialité dès lors qu'elle s'appuie sur les auditions des représentants des DRAC concernées, à l'origine de la plainte auprès des services de la DGCCRF qui a abouti à l'ouverture des procédures devant le juge pénal et le Conseil de la concurrence. Les éléments présentés ci-dessus résultent cependant d'une simple comparaison mathématique, effectuée par les services d'enquête de la DGCCRF, entre les prix réels des marchés et les estimations des maîtres d'œuvre pour l'ensemble des procédures d'appels d'offres passées par ces directions au cours des périodes en cause. Cette évaluation quantitative repose donc sur des éléments de nature purement objective.
661. Par ailleurs, ces éléments sont corroborés par l'étude figurant au rapport de l'inspection générale des affaires culturelles (IGAAC) de décembre 2007, cité au point 263 ci-dessus. Ce rapport procède au même type de calcul, en retenant les marchés obtenus par les entreprises concernées par l'ordonnance de renvoi devant le Tribunal de grande instance de Rouen, et en prenant pour périodes de référence les années 1999 à 2001, d'une part et 2002 à 2004, d'autre part.
662. Les résultats obtenus sont les suivants :
<emplacement tableau>
663. En consolidant les résultats pour l'ensemble des régions en cause, l'estimation du surprix résultant de la mise en œuvre des trois ententes s'élève à 24,1 % (35) (cote 19.658).
664. Il convient de noter que le rapport de l'IGAAC ne porte que sur une partie des pratiques en litige, dès lors que les marchés antérieurs à 1999 n'ont pas été inclus dans l'étude, d'une part, et que celle-ci n'a porté que sur les seuls marchés passés entre 1999 et 2004 pour lesquels avait été fournie une estimation de la maîtrise d'œuvre, d'autre part. Certains des marchés étudiés aux points 83 à 124, 137 à 164, et 176 à 215 ci-dessus n'ont donc pas été inclus dans cette étude.
665. Les entreprises critiquent la méthode d'évaluation retenue, qui se fonde sur les estimations de prix des maîtres d'œuvre préalables aux appels d'offres, au motif notamment que celles- ci seraient trop imprécises.
666. La nature même des marchés d'appels d'offres dans le secteur des monuments historiques, rend malaisée la comparaison directe des prix pratiqués par les entreprises. Ainsi que le relève le rapport précité de l'IGAAC, " chaque marché de travaux présente de nombreuses caractéristiques techniques qui le rendent difficilement comparable à un autre, qu'il s'agisse, dans le cas de la maçonnerie et de la pierre de taille, des conditions de la dépose, de la nature des pierres posées, de leur taille pour le parement, de l'accessibilité du chantier et donc des échafaudages, du nombre des compagnons employés, de la durée, etc. ".
667. Dans ces conditions, les études comparatives effectuées par les services d'enquête de la DGCCRF et de l'IGAAC, qui portent sur un volume important de marchés, réduisant ainsi les incertitudes liées aux éventuelles imprécisions des estimations des maîtres d'œuvre, permettent de donner un ordre de grandeur de l'évolution des prix, même si elles ne permettent pas de la mesurer de manière incontestable. En tout état de cause, l'estimation du surprix lié à la mise en œuvre des ententes qui résulte de ces études est très certainement conservatrice, dès lors que les estimations de la maîtrise d'œuvre s'adaptent aux conditions du marché et se sont donc probablement ajustées au nouveau contexte concurrentiel après l'éclatement des ententes, réduisant ainsi progressivement l'écart avec les prix réels des marchés attribués.
668. Le rapport de l'IGAAC reconnaît que " sur la base des éléments dont dispose [l'auteur du rapport], il ne paraît pas possible de chiffrer le préjudice certain que l'Etat a subi (...) Il n'en demeure pas moins que les données rassemblées peuvent constituer de solides arguments pour estimer que l'Etat a subi un préjudice qui, dans certains cas, avoisine les 30 % " (cote 19661).
669. A cet égard, il convient par ailleurs de rappeler que l'Autorité de la concurrence n'est pas tenue de chiffrer précisément le dommage à l'économie, qui en tout état de cause ne se confond pas avec le préjudice qu'ont pu subir les personnes victimes de l'infraction.
L'étude proposée par M. Lefèvre
670. Le groupe Lefèvre propose une étude-type alternative (cote 18.500 à 18.507), qui repose sur le principe d'un retraitement du prix des marchés réels obtenus par les trois filiales du groupe utilisés dans le rapport de l'IGAAC, afin de les comparer dans le temps. Elle détermine le poids de diverses catégories de prestations fournies sur un chantier-type de restauration de monument historique, puis calcule le prix (fictif) que coûterait ce chantier- type en appliquant les prix unitaires des prestations, tirés des bordereaux de prix unitaires, pour chaque chantier réel. Elle compare ensuite la moyenne des prix du chantier-type entre la période 1999-2001 et la période 2002/2004. L'étude conclut que les prix ont, entre les deux périodes, augmenté pour Lefèvre SA (Basse-Normandie) et Normandie Rénovation (Haute-Normandie), de 8 % et 1 % respectivement, et baissé de 4 % pour Léon Noël (Picardie).
671. Cette étude, qui porte sur les prix de la seule entreprise Lefèvre et non de l'ensemble des participants aux ententes, n'est cependant accompagnée d'aucune pièce justificative des prix unitaires retenus pour effectuer les calculs. Par ailleurs, la détermination du poids relatif de chaque catégorie de prestation sur un chantier-type de restauration est effectuée, selon les indications de l'étude, sur le fondement d'une " dizaine " de chantiers de Haute-Normandie, qui ne sont pas énumérés, et dont il est impossible d'apprécier la représentativité. En outre, lorsqu'un marché réel ne comporte pas l'une des catégories de prestations du chantier-type, l'étude applique un prix unitaire moyen des chantiers de la période. Cette méthode est susceptible de fortement biaiser les résultats, dès lors que l'on observe qu'elle a été appliquée sur un nombre important des marchés étudiés, et notamment pour les postes de dépenses les plus importants en valeur (36). De même, certains chantiers sont exclus de l'étude sans justification précise, aux motifs du caractère " spécifique " de leurs prix.
672. Enfin, cette étude ne prend pas en compte l'effet de l'inflation. Or, il convient d'observer qu'au cours de la période du 30 juin 2000 au 30 juin 2003, l'index BT 14, publié au BOCCRF, et qui permet de suivre l'évolution des prix de revient dans le secteur de la restauration des monuments historiques, a connu une progression continue de 8,8 %, seul le mois de 2002 ayant enregistré une évolution négative (37). S'ils étaient corrigés pour tenir compte de l'évolution de cet indice, les propres calculs de l'entreprise Lefèvre, indiqueraient ainsi une hausse des prix pratiqués entre la période 1999/2001 et 2002/2004.
Eléments de comparaison des prix unitaires des prestations
673. Le rapport de l'IGAAC montre une baisse des prix unitaires des prestations fournies par certaines entreprises à partir de 2002, ce qui corrobore les conclusions de l'étude globale fondée sur la comparaison des prix et des estimations des maîtres d'œuvre (38).
674. La DRAC de Basse-Normandie estime ainsi que la baisse de prix est comprise entre 20 et 25 % en matière de maçonnerie, avec des fluctuations importantes d'une consultation à l'autre (cote 19659). Selon les éléments fournis par cette direction, les prix de la taille de parements unis et moulurés sur la pierre facturés par l'entreprise Lefèvre passent de 290 et 434 euro respectivement en 2001 (chantier de la cathédrale de Bayeux) à 159,80 et 319,60 euro respectivement en 2003 (chantier de l'Hôtel-Dieu de Bayeux). Les prix de maçonnerie de moellons facturés par l'entreprise Dagand passent de 927,08 euro en 2000 (remparts du château de Bricquebec) à 589,56 euro en 2002 (même édifice).
675. Les éléments fournis par la DRAC de Haute-Normandie font également apparaître une forte baisse des prix facturés par certaines entreprises pour une même prestation après 2002 (cote 19660). Les prix de la taille de pierre facturés par l'entreprise Terh pour la restauration du bras Sud du transept de l'église Saint Jacques de Dieppe en 2003 sont ainsi inférieurs de 12,2 % à 34,6 % selon la nature de la pierre et du parement aux prix facturés par l'entreprise Normandie Rénovation pour la restauration du bras Nord du transept de cette église en 1998. Symétriquement, les prix de la taille de pierre facturés par l'entreprise Normandie Rénovation pour la restauration de la tour de Beurre de la cathédrale Notre- Dame de Rouen en 2004 sont inférieurs de 24,6 % à 51,3 % selon la nature de la pierre et du parement aux prix facturés par l'entreprise Terh pour la restauration de la même tour en 1999.
676. Il convient de relever que ces estimations sont conservatrices, puisqu'elles ne prennent pas en compte l'inflation au cours de la période en cause.
Les autres facteurs d'évolution des prix
677. Les entreprises soutiennent que la baisse des prix constatée ne s'expliquerait pas uniquement par la cessation des pratiques, compte tenu notamment du contexte de crise du secteur de la restauration des monuments historiques lié à la diminution des crédits publics depuis 2002.
678. Toutefois, cette allégation n'est nullement démontrée. Il convient d'observer au contraire que le volume des marchés remportés par les entreprises ayant fait l'objet de l'étude de l'IGAAC était stable au cours de la période concernée (26,3 millions d'euro, contre 27,8 millions pour l'estimation des maîtres d'œuvre, pour les années 1999 à 2001, et 26,8 millions d'euro, contre 35 millions pour l'estimation des maîtres d'œuvre, pour les années 2002 à 2004). Le représentant de la DRAC de Basse-Normandie relève une augmentation du volume des travaux programmés à partir de 2001, les autorisations d'engagement et les crédits de paiement ayant augmenté respectivement de 22,5 % et 36,5 % en 2002 (point 260 ci-dessus). S'agissant de la Haute-Normandie, les représentants de la DRAC indiquent l'existence d'un gel ponctuel des crédits au moment de l'élection présidentielle de 2002, ceux-ci ayant ensuite été réaffectés à cette direction. De même, selon un rapport de la commission des affaires culturelles du Sénat, les crédits consommés consacrés aux monuments historiques sont passés au niveau national de 314 à 367 millions d'euro entre 2000 et 2004, étant demeurés stables autour de 330 millions d'euro en 2001 et 2002 (cote 20.161) (39).
679. En conclusion, il convient de relever que la hausse des prix liée à la mise en œuvre des ententes régionales a eu pour probable effet de freiner le lancement de chantiers de restauration de monuments historiques appartenant au patrimoine culturel national. A contrario, le représentant de la DRAC de Haute-Normandie a indiqué que la baisse des prix consécutive à l'éclatement de l'entente dans cette région avait permis de dégager des crédits pour engager de nouvelles opérations de restauration, qui n'auraient, sans ces reliquats, pas trouvé de financement à court terme (point 258 ci-dessus).
S'agissant des ententes ponctuelles sur appels d'offres
680. Ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, le dommage causé à l'économie est indépendant du dommage souffert par le maître d'ouvrage en raison de la collusion entre les entreprises soumissionnaires et s'apprécie en fonction de l'entrave directe portée au libre jeu de la concurrence (point 648). De telles pratiques affectent en effet le principe même de l'appel d'offres, qui repose sur la loyauté des participants.
681. En l'espèce, le dommage à l'économie peut être apprécié, notamment, au regard du montant des marchés attribués, d'une part, et de la part des auteurs des ententes anticoncurrentielles sur le marché, d'autre part.
682. Les montants des marchés concernés sont les suivants (40) :
Montant (euro)
Aquitaine
Abbaye de la Sauve-Majeure : 382.037
Façade de la tour Pey-Berland : 1 426 883
Ile-de-France
Eglise de Saint-Eustache : 1 699 292
Bourgogne
Eglise Saint-Michel à Dijon : 239 303
Hôtel de Ville d'Autun : 540 342
Nord-Pas-de-Calais
Cathédrale Notre-Dame de Saint-Omer : 370 866
Eglise Saint-Martin à Auxi-le-Château : 135 178
Eglise de Barlin : 160 664
683. En 2001, les parts de marché des entreprises en cause, au niveau national, étaient les suivantes (41) :
groupe Lefèvre 13,33 %
Quélin 2,39 %
Dagand 2,77 %
Payeux 1,36 %
Pateu & Robert N/C
Chevalier Nord 1,93 %
Faber 0,55 %
684. Il résulte de ces éléments que les ententes ponctuelles sur appels d'offres se sont traduites par un dommage non négligeable à l'économie.
S'agissant de l'entente mise en œuvre par M. Lefèvre et Coefficient
685. S'agissant de l'entente spécifique à laquelle la société Coefficient a pris part avec les filiales du groupe M. Lefèvre, qui a eu pour objet l'élaboration délibérée de bordereaux de prix fictifs destinés au dépôt d'offres de couverture visant à présenter des soumissions séparées, mais fictivement indépendantes, et simuler l'autonomie des offres et des filiales du groupe auprès des maîtres d'ouvrage, le dommage à l'économie peut être apprécié notamment au regard de la durée de la pratique, du nombre de marchés concernés, et des parts de marchés détenues par les filiales de M. Lefèvre dans le secteur de la restauration des monuments historiques.
686. L'entente entre M. Lefèvre et Coefficient a été mise en œuvre pendant une période continue égale à trois ans et demi, les dates de dépôt des appels d'offres concernés s'étalant entre le 15 juillet 1998 (église Saint Vulfran à Abbeville), et le 8 janvier 2002 (église Saint-Vincent au Havre).
687. Par ailleurs, le dépôt d'offres séparées de filiales du groupe Lefèvre, préparées par la société Coefficient a été relevé pour 74 marchés dans les trois régions de Haute-Normandie, Basse-Normandie et Picardie, c'est-à-dire plus de la moitié des appels d'offres étudiés dans ces régions.
688. En outre, au cours de la période en cause, les parts de marché des filiales du groupe Lefèvre actives dans ces régions, au niveau régional, étaient les suivantes (points 68, 125 et 165 ci-dessus) :
Normandie Rénovation 40 %
Lefèvre SA 25 %
Léon Noël 13 %
689. Le dommage à l'économie consécutif à la mise en œuvre de l'entente est ainsi d'autant plus important qu'il a concerné un nombre élevé de marchés et affecté les offres d'acteurs disposant de fortes parts de marché au niveau régional.
c) Sur la situation individuelle des entreprises
Sur le rôle joué dans l'entente
690. Pradeau et Morin soutient n'avoir joué qu'un rôle mineur et ponctuel dans la mise en œuvre des pratiques, puisqu'elle n'a participé aux ententes que pour une durée de trois ans et demi sur les seuls territoires de Haute-Normandie et de Picardie. De même, la société Charpentier PM fait valoir qu'elle n'a joué qu'un rôle passif dans l'entente.
691. Cependant, si le rôle de meneur d'une entreprise constitue une circonstance aggravante pour l'individualisation de la sanction (Cour de cassation, 18 février 2004, OCP Répartition), la circonstance qu'une entreprise ait adopté une position de suiveur à l'occasion de la conclusion d'un accord restrictif de la concurrence ne saurait à l'inverse être prise en compte comme une circonstance atténuante, dès lors que cette entreprise n'a pas fait l'objet d'une contrainte irrésistible, qu'elle a approuvé la conclusion de l'accord et qu'elle a appliqué celui-ci. Seule pourrait être prise en compte au titre des circonstances atténuantes la démonstration par l'entreprise que sa participation à l'infraction était substantiellement réduite notamment parce qu'elle s'est effectivement soustraite à l'application de l'accord en cause en adoptant un comportement concurrentiel sur le
marché (franc tireur - voir, sur ce point, la décision n°10-D-28 du 20 septembre 2010 relative aux tarifs et aux conditions liées appliquées par les banques et les établissements financiers pour le traitement des chèques remis aux fins d'encaissement, point 731).
692. En outre, et en tout état de cause, Pradeau et Morin a selon ses propres déclarations, participé à deux ententes régionales de répartition des marchés pendant une durée de trois ans et demi, ce qui ne peut manifestement pas être considéré comme une participation mineure et ponctuelle aux pratiques. S'agissant de Charpentier PM, celle-ci n'établit aucunement avoir joué un rôle passif dans les ententes en cause, alors notamment que des preuves directes ou des indices impliquant cette entreprise ont été relevés pour près de la moitié des appels d'offres étudiés en Picardie par exemple (point 503 ci-dessus).
693. La société Pyramide demande que l'Autorité de la concurrence tienne compte du fait qu'elle était dans l'ignorance des agissements anticoncurrentiels de la société Dagand lorsqu'elle a fait l'acquisition de son capital le 23 août 2005, soit postérieurement aux faits en litige. Cette circonstance ne saurait toutefois être prise en compte comme une circonstance atténuante, la société Pyramide étant venue aux droits et obligations de la société Dagand dont elle a acquis l'intégralité du capital. L'Autorité relève que la société Pyramide a intenté un recours en indemnisation auprès du cédant et obtenu en première instance la condamnation des sociétés Eiffage Construction SAS et Eiffage Construction Nord Patrimoine à l'indemniser de toutes les conséquences financières résultant des actions civiles et pénales pouvant résulter des accusations d'ententes illicites pour les faits antérieurs à la cession du 23 août 2005 (jugement du Tribunal de commerce de Bordeaux du 2 octobre 2009).
Sur l'absence de profit retiré de l'entente
694. Lanfry et Quélin font valoir qu'elles n'ont pas retiré de profit de l'entente.
695. Toutefois, la Cour d'appel de Paris relève que, si l'explosion des profits est un facteur aggravant pour l'individualisation de la sanction, la réciproque n'est pas admissible (voir l'arrêt du 19 janvier 2010, AMD Sud-Ouest, précité). Si le montant de la sanction pécuniaire doit être proportionné à la gravité des pratiques et à l'importance du dommage à l'économie, pour l'appréciation desquels le profit retiré par les membres de l'entente en cause peut être pris en compte, la circonstance qu'une entreprise n'ait tiré aucun bénéfice de la mise en œuvre d'une pratique restrictive de la concurrence ne saurait faire obstacle à l'imposition d'une sanction et ne saurait être prise en compte comme une circonstance atténuante (voir, pour une analyse similaire effectuée par le juge communautaire, l'arrêt du tribunal de première instance du 25 juin 2010, Imperial Chemical Industries Ltd, T-66-01, non encore publié au Recueil, point 443). En effet, à la supposer avérée, l'absence de profit retiré par l'entreprise en cause ne minore en rien le dommage à l'économie établi aux points précédents.
696. Il s'ensuit que cette circonstance n'est pas susceptible d'atténuer la sanction encourue.
Sur la durée de participation
697. La durée de la participation de chacune des entreprises aux ententes régionales a été établie plus haut. Il sera tenu compte des différences de durée de participation pour l'appréciation de la sanction infligée aux entreprises. S'agissant plus particulièrement de Lanfry, il a été relevé ci-dessus (points 411 et 516) que la société s'est temporairement écartée des ententes mises en œuvre en Haute-Normandie et en Picardie, entre octobre 1999 et décembre 2000 pour la première entente, et au cours des mois de mars à mai 2000 pour la seconde. Cette abstention temporaire sera prise en considération dans le cadre du calcul de la sanction infligée à l'entreprise.
Sur l'appartenance à un groupe
698. Pradeau et Morin considère que son appartenance au groupe Eiffage n'a joué aucun rôle dans les mécanismes du comportement anticoncurrentiel qui lui est imputé.
699. Cependant, cet argument, à le supposer avéré, ne fait pas obstacle à ce que l'Autorité tienne compte du fait que l'entreprise à laquelle elle impute l'infraction appartient à un groupe jouissant d'un périmètre d'activité et d'une puissance financière significatifs, voire considérables (voir, sur ce point, la décision n°10-D-39 du 22 décembre 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la signalisation routière verticale, point 432 et s.).
700. En effet, l'article L. 464-2 du Code de commerce prévoit que la sanction pécuniaire imposée par l'Autorité doit être proportionnée à la situation de l'entreprise, mais aussi, lorsque celle-ci appartient à un groupe, à celle de ce dernier. L'obligation d'assurer le caractère à la fois dissuasif et proportionné de la sanction pécuniaire peut conduire à ce que celle-ci soit, en considération d'une infraction donnée, plus élevée dans le cas d'une entreprise puissante ou intégrée à un groupe d'envergure européenne ou internationale, que dans celui d'une petite ou moyenne entreprise. En l'occurrence, il convient de tenir compte du fait que Pradeau et Morin appartient, à la différence d'autres entreprises en cause, à un groupe, le groupe Eiffage, lequel dispose de ressources globales considérablement plus importantes que celles des autres acteurs des ententes.
701. Cette conclusion vaut pour les autres entreprises se trouvant dans une situation comparable, sur ce point, à celle de Pradeau et Morin, à savoir Degaine et Pateu & Robert, qui appartiennent toutes deux au groupe Vinci.
702. Il s'ensuit que l'appartenance des entreprises susmentionnées à un groupe dont le chiffre d'affaires est en l'occurrence particulièrement important constitue une circonstance individuelle conduisant à majorer leur sanction.
3. SUR LA PROCÉDURE DE NON-CONTESTATION DES GRIEFS
703. Les sociétés Entreprise Lanfry, Entreprise Pradeau et Morin et Coefficient ont demandé le bénéfice de la procédure prévue par les dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce.
704. Ainsi que l'a récemment rappelé la Cour d'appel de Paris : " lorsqu'une entreprise demande le bénéfice des dispositions attachées à la non-contestation des griefs, l'office de l'Autorité de la concurrence consiste notamment à s'assurer du caractère crédible, substantiel et vérifiable des modifications de comportement proposées par l'entreprise pour éviter à l'avenir des atteintes à la concurrence " (arrêt du 23 février 2010, Expedia, confirmant la décision de l'Autorité n° 09-D-06 du 5 février 2009 relative à des pratiques mises en œuvre par la SNCF et Expedia Inc. dans le secteur de la vente de voyages en ligne).
a) En ce qui concerne les engagements proposés par la société Entreprise Pradeau et Morin
705. Les engagements souscrits par la SNC Pradeau et Morin, cités au point 272 ci-dessus, ne concernent pas seulement cette société, destinataire de la notification de griefs, mais également la société Eiffage construction Paris patrimoine, qui exerce une activité dans le secteur de la restauration de monuments historiques au sein de son établissement Pradeau et Morin.
706. Les engagements portent non seulement sur un programme de sensibilisation et de formation professionnelle, mais aussi sur la mise en place de procédures de contrôle interne sous la responsabilité d'un délégué spécial à la concurrence, et comprenant un système d'alerte professionnelle interne visant à détecter les pratiques anticoncurrentielles. Les engagements portent également sur la formalisation de la procédure suivie en cas de recours à un groupement pour répondre à une consultation publique, et la conservation, pour une durée minimale de trois ans, de l'ensemble des données échangées entre les entreprises dans le cas d'un projet ou de la mise en place d'un groupement. Enfin, l'envoi à l'Autorité d'un rapport annuel de mise en œuvre des engagements souscrits est prévu afin de contrôler le respect de leur bonne application.
707. Ces différents engagements, de réelle envergure, apparaissent substantiels, en partie vérifiables et susceptibles de prévenir des pratiques litigieuses de même nature que celles examinées dans le cadre de la présente affaire. Ils conduisent donc, conformément à la proposition formulée par le rapporteur général adjoint, à accorder une réduction de la sanction pécuniaire de la SNC Pradeau et Morin dans une proportion de 20 % du montant qui aurait été normalement infligé.
b) En ce qui concerne les engagements proposés par la société Entreprise Georges Lanfry
708. Les engagements souscrits par Lanfry, cités au point 274 ci-dessus, portent non seulement sur un programme de sensibilisation et de formation professionnelle, mais aussi sur la mise en place, sous la responsabilité d'un responsable désigné, d'un dispositif d'alerte professionnelle visant à détecter les pratiques anticoncurrentielles. Les engagements portent également sur la formalisation de la procédure suivie en cas de recours à un groupement pour répondre à une consultation publique.
709. Ces différents engagements apparaissent substantiels, en partie vérifiables et susceptibles de prévenir des pratiques litigieuses de même nature que celles examinées dans le cadre de la présente affaire. Ils conduisent, conformément à la proposition formulée par le rapporteur général adjoint, à accorder une réduction de la sanction pécuniaire de la société Lanfry dans une proportion de 15 % du montant qui aurait été normalement infligé.
c) En ce qui concerne les engagements proposés par Coefficient
710. Les engagements souscrits par Coefficient, cités au point 276 ci-dessus, portent sur la mise en place d'une procédure d'audit externe de la société, fondée sur des entretiens individuels avec les membres du personnel, afin d'évaluer sa situation au regard du respect du droit de la concurrence, sur un programme d'information professionnelle, et sur l'élaboration d'une charte de bonne conduite à l'attention du personnel de l'entreprise.
711. De tels engagements, s'ils ne sont pas dépourvus d'intérêt et sont en partie vérifiables, sont toutefois moins substantiels que les engagements proposés par les sociétés Pradeau et Morin et Lanfry, même en tenant compte de la nature spécifique de l'activité de bureau d'études de Coefficient. Ils conduisent donc, conformément à la proposition formulée par le rapporteur général adjoint, à accorder une réduction de la sanction pécuniaire de la société Coefficient dans une proportion de 10 % du montant qui aurait été normalement infligé.
4. SUR LE MONTANT DES SANCTIONS
a) Sur la méthode de détermination des sanctions
712. En l'espèce, il sera prononcé une sanction unique pour chaque entreprise à raison de l'ensemble des infractions auxquelles elles ont pris part, ainsi que le permet la jurisprudence (voir, en ce sens, l'arrêt de la Cour de cassation du 22 novembre 2005, Dexxon Data Media).
713. Il convient, en premier lieu, de déterminer l'assiette sur la base de laquelle est calculé le montant de la sanction et, en second lieu, de rappeler les différents éléments entrant dans le calcul de ce montant.
L'assiette servant au calcul du montant de la sanction
714. Si la valeur des ventes réalisées par les entreprises en cause de produits ou de services en relation avec l'infraction constitue généralement une référence appropriée pour déterminer l'assiette de la sanction pécuniaire infligée par l'Autorité de concurrence, dans la mesure où elle permet de proportionner celle-ci à la réalité économique de l'infraction, cette référence ne pourra être retenue au cas d'espèce comme montant de base des sanctions infligées, faute d'éléments suffisamment probants permettant d'en déterminer le montant.
715. En effet, les entreprises, invitées en séance à communiquer les éléments relatifs à la proportion de leur chiffre d'affaires en rapport avec leur activité dans le secteur de la restauration des monuments historiques, réalisé au cours de la période de commission des pratiques sur les marchés affectés par celles-ci (42), n'ont pas fourni, pour la plupart d'entre elles, de données pertinentes, complètes et justifiées. Par ailleurs, certaines d'entre elles n'ont fourni aucun élément sur ce point.
716. Dans ces conditions, l'Autorité, faute de disposer de données alternatives adéquates et suffisamment fiables et complètes utilisera le chiffre d'affaires réalisé par les entreprises comme base pour déterminer le montant des sanctions. A cet égard, le chiffre d'affaires réalisé par chaque entreprise au cours du dernier exercice clos sera retenu, soit 2009, dès lors qu'il s'agit de la seule donnée appuyée de justificatifs probants disponible pour l'ensemble des entreprises mises en cause. Sera seul pris en compte le chiffre d'affaires réalisé en France, tel qu'il ressort des liasses fiscales communiquées par les parties.
717. Le coefficient appliqué pour calculer le montant de base de la sanction de chaque entreprise sera plus faible que celui qui aurait été appliqué si la valeur des ventes des entreprises en relation avec les infractions avait pu être retenue comme assiette de la sanction. Par ailleurs, dans le cas particulier de la société Faber, qui a communiqué sur ce point des données pertinentes, complètes et justifiées, il sera pris en compte, pour le calcul de la sanction qui lui sera infligée, qu'elle réalisait au cours de la période de commission des pratiques un très faible pourcentage de son chiffre d'affaires total dans le secteur de la restauration de monuments historiques, à la différence des autres entreprises concernées.
Les éléments à prendre en compte
718. Le montant de chaque sanction sera déterminé à partir du chiffre d'affaires qui vient d'être défini en tenant compte du nombre d'infractions auxquelles chacune des entreprises a participé. Le montant de la sanction repose sur les éléments généraux suivants : la gravité des infractions constatées ainsi que l'importance du dommage à l'économie, telles qu'elles ont été analysées aux points 628 à 689 de la présente décision. A cet égard, lorsqu'une entreprise a participé à une ou plusieurs des ententes régionales (43), infractions complexes et continues, sa participation à une ou plusieurs ententes ponctuelles sur appels d'offres sera également prise en compte pour moduler à la hausse le coefficient appliqué au chiffre d'affaires pour calculer le montant de base de la sanction.
719. Le montant de la sanction intègre ensuite les éléments d'individualisation retenus aux points 690 à 702 ci-dessus. Elle conduit, ensuite, à appliquer, le cas échéant, les coefficients de minoration, fixés aux points 703 à 711 au titre de la non-contestation des griefs et des engagements pris.
720. Enfin, le montant de la sanction est écrêté s'il y a lieu afin de ne pas excéder le montant maximal de la sanction applicable pour chacune des parties. Lorsque les entreprises ont invoqué l'existence de difficultés financières particulières et soumis les éléments nécessaires pour en permettre la vérification par l'Autorité, leur capacité à s'acquitter de la sanction ainsi déterminée est vérifiée en dernier lieu. Dans le cas présent, de telles difficultés sont alléguées par Quélin, Charpentier PM, Faber SA, Terh et Degaine.
b) Sur les sanctions individuelles
M. Lefèvre
721. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par M. Lefèvre est de 10 341 906 euro en 2009. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 1 034 190 euro.
722. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et, d'autre part, au chiffre d'affaires de 10 341 906 millions d'euro que M. Lefèvre a réalisé en France au cours du dernier exercice clos, le montant de la sanction s'élève à 1 034 190 euro.
Entreprise Georges Lanfry
723. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Lanfry est de 16 089 125 euro en 2008. Compte tenu de la mise en œuvre de la procédure de non- contestation de griefs, le montant maximal de la sanction s'élève donc à 804 456 euro.
724. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et, d'autre part, au chiffre d'affaires de 9 313 059 euro que Lanfry a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction s'élève à 745 000 euro, qu'il convient de réduire de 15 % pour tenir compte de l'absence de contestation des griefs et des engagements pris.
725. Le montant total de la sanction infligée à Lanfry s'élève donc à 633 000 euro. Entreprise Quélin
726. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Quélin, est de 39 29 2225 euro en 2008. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 3,9 millions d'euro.
727. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et, d'autre part, au chiffre d'affaires de 21 653 593 euro que Quélin a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction qui devrait lui être infligée s'élève à 1 840 000 euro.
728. Cependant, par jugement en date du 22 juillet 2010, le Tribunal de commerce de Nanterre a ouvert la procédure de redressement judiciaire prévue par l'article L. 631-1 du Code de commerce à l'égard de la société Quélin, fixé la date de cessation des paiements au 29 juin 2010 et à six mois la période d'observation (cotes 24.090 à 24.093).
729. Compte tenu de la situation financière de la société Quélin, il lui sera infligé une sanction symbolique de 20 000 euro.
Entreprise H Chevalier Nord
730. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Chevalier Nord, est de 9 135 996 euro en 2009. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 913 599 euro.
731. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et, d'autre part, au chiffre d'affaires de 9 135 996 euro que Chevalier Nord a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction qui lui est infligée s'élève à 685 000 euro.
Payeux Invest
732. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Payeux est de 6 192 428 euro en 2004. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 619 242 euro.
733. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et, d'autre part, au chiffre d'affaires de 200 773 euro que Payeux a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction qui lui est infligée s'élève à 12 000 euro. Terh Monuments historiques
734. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Terh est de 19 012 739 euro en 1999. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 1 901 273 euro.
735. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et, d'autre part, au chiffre d'affaires de 6 296 567 euro que Terh a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction qui lui est infligée s'élève à 503 000 euro.
736. Terh a, dans une note en délibéré adressée à l'Autorité le 5 novembre 2010, fait état de difficultés financières subies au cours de l'exercice 2010. Elle a communiqué un compte de résultat provisoire faisant apparaître une perte prévisionnelle pour la période allant du 1er janvier au 30 septembre 2010. Cependant, les éléments fournis par la société, qui ne portent que sur les trois premiers trimestres de l'exercice 2010, ne permettent pas de conclure à l'existence de difficultés financières individuelles particulières, affectant la capacité contributive de la société Terh, alors que celle-ci a enregistré des résultats bénéficiaires continus au titre des trois exercices précédents. Par ailleurs, il convient de relever que le résultat d'exploitation de la société pour les trois premiers trimestres de l'exercice 2010 demeure bénéficiaire.
Faber SA
737. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Faber est de 37 020 250 euro en 2007. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 3 702 025 euro.
738. Eu égard aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et au chiffre d'affaires de 25 655 338 euro que Faber SA a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction infligée à l'entreprise s'élève à 900 000 euro.
739. Faber SA a fait état de ses difficultés financières dans ses observations du 6 août 2010 en réponse au rapport et dans une note en délibéré adressée à l'Autorité le 5 novembre 2010. Elle communique un compte de résultat provisoire faisant apparaître une perte prévisionnelle pour la période allant du 1er janvier au 30 juin 2010. Cependant, les éléments fournis par la société, qui ne portent que sur les deux premiers trimestres de l'exercice 2010, ne permettent pas de conclure à l'existence de difficultés financières individuelles particulières, affectant la capacité contributive de la société Faber SA, alors même que celle-ci a enregistré des résultats bénéficiaires au titre des exercices précédents, et alors que Groupe Faber, société consolidante de Faber SA, a enregistré des résultats bénéficiaires au cours des derniers exercices connus.
Pyramide, venant aux droits et obligations de Dagand
740. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Pyramide est de 1 292 994 euro en 2008. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 129 299 euro.
741. Eu égard aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et au chiffre d'affaires de 1 062 950 euro que Pyramide a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction infligée à l'entreprise s'élève à 80 000 euro.
Charpentier PM
742. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Charpentier PM est de 27 305 866 euro en 2000. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 2 730 586 euro.
743. Eu égard, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et au chiffre d'affaires de 4 998 736 euro que Charpentier PM a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction qui devrait être infligée à l'entreprise s'élève à 300 000 euro.
744. Charpentier PM a, dans une note en délibéré adressée à l'Autorité le 5 novembre 2010, fait état de difficultés financières. La société a enregistré des pertes continues au cours des deux derniers exercices clos, et produit un compte de résultat provisoire faisant état d'une situation comptable déficitaire au 30 septembre 2010. Par ailleurs, elle produit une analyse de risque et sa cote de crédit établie par la Banque de France au 4 novembre 2010 faisant état d'une rentabilité et d'une autonomie financière présentant des signes de fragilité marqués. Ces éléments attestent de difficultés financières particulières et actuelles de nature à diminuer la capacité contributive de la société Charpentier PM.
745. En conséquence, le montant de la sanction infligée à Charpentier PM, qui aurait dû s'élever à 300 000 euro, est fixé à 240 000 euro.
Entreprise Pradeau et Morin
746. Le chiffre d'affaires hors taxes le plus élevé connu réalisé par la Société Eiffage, société consolidante de Pradeau et Morin, est de 13,6 milliards d'euro en 2008. Compte tenu de la mise en œuvre de la procédure de non-contestation de griefs, le montant maximal de la sanction s'élève donc à 0,68 milliard d'euro.
747. Pradeau et Morin a mis son fonds de commerce en location-gérance auprès de la société Eiffage Construction Paris Patrimoine en décembre 2006, postérieurement à la commission des pratiques anticoncurrentielles en litige. En 2006, elle réalisait un chiffre d'affaires de 79,5 millions d'euro. En 2009, les établissements Pradeau et Morin, qui exploitent le fonds de commerce de la SNC Pradeau et Morin au sein d'Eiffage Construction Paris Patrimoine, ont réalisé un chiffre d'affaires de 74,9 millions d'euro. Le chiffre d'affaires de la SNC Pradeau et Morin en 2009, d'un montant de 241 115 euro, ne reflète donc aucunement l'activité de restauration de monuments historiques mise en location-gérance, seule en rapport avec la commission des infractions en litige. Compte tenu de cette situation particulière, le montant du chiffre d'affaires réalisé en 2009 par les établissements Pradeau et Morin au sein de la société Eiffage Construction Paris Patrimoine sera retenu comme assiette servant de calcul au montant de la sanction infligée à la SNC Pradeau et Morin.
748. Par ailleurs, il convient de relever qu'aux termes de l'article L. 221-2 du Code de commerce : " Les associés en nom collectif (...) répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales. Les créanciers de la société ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé, qu'après avoir vainement mis en demeure la société par acte extrajudiciaire ". Il résulte de ces dispositions que la SNC Eiffage Construction Gestion et Développement, et la SAS Fougerolle, associées en nom de la SNC Pradeau et Morin, devront répondre indéfiniment et solidairement de l'amende infligée à la SNC Pradeau et Morin.
749. Eu égard aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et au chiffre d'affaires réalisé par les établissements Pradeau et Morin en 2009, le montant de la sanction infligée à la SNC Pradeau et Morin s'élève à 5 625 000 euro, qu'il convient de réduire de 20 % pour tenir compte de l'absence de contestation des griefs et des engagements pris.
750. Le montant total de la sanction infligée à la SNC Pradeau et Morin s'élève donc à 4 500 000 euro.
Entreprise Pavy
751. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Pavy est de 4 300 160 en 2003. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 430 016 euro.
752. Eu égard aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et au chiffre d'affaires de 2 614 200 euro que Pavy a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction infligée à l'entreprise s'élève à 157 000 euro.
Entreprise Degaine
753. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Degaine est de 7 149 098 euro en 2009. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 714 909 euro.
754. Eu égard aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et au chiffre d'affaires de 7 179 098 euro que Degaine a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction infligée à l'entreprise s'élève à 536 000 euro.
755. Degaine a fait état de ses difficultés financières dans ses observations du 5 août 2010 en réponse au rapport, la société enregistrant des résultats déficitaires continus depuis l'exercice 2006. Cependant, la société Degaine appartient au groupe Vinci, qui a enregistré un chiffre d'affaires de 31,9 milliards d'euro, et un résultat net de 1,6 milliard d'euro en 2009. Ainsi, compte tenu de son appartenance à un groupe disposant de ressources financières considérables, Degaine ne peut se prévaloir de difficultés financières particulières qui affecteraient sa capacité contributive.
Société Nouvelle Bodin
756. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par la SARL Sté Nouvelle Bodin est de 2 720 069 euro en 2009. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 272 006 euro.
757. Eu égard, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et au chiffre d'affaires de 2 720 069 euro que Bodin a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction infligée à l'entreprise s'élève à 136 000 euro.
Pateu & Robert
758. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Pateu & Robert est de 6 965 399 euro en 2009. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 696 539 euro.
759. Eu égard, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et au chiffre d'affaires 6 965 399 de euro que Pateu & Robert a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction infligée à l'entreprise s'élève à 209 000 euro.
Coefficient
760. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé connu réalisé par Coefficient, est de 3 519 442 euro en 2009. Compte tenu de la mise en œuvre de la procédure de non-contestation de griefs, le montant maximal de la sanction s'élève donc à 175 972 euro.
761. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus et, d'autre part, au chiffre d'affaires de 3 519 442 euro que Coefficient a réalisé en France en 2009, le montant de la sanction s'élève à 176 000 euro, qu'il convient de réduire de 10 % pour tenir compte de l'absence de contestation des griefs et des engagements pris.
762. Le montant total de la sanction infligée à Coefficient s'élève donc à 158 400 euro.
G. SUR L'OBLIGATION DE PUBLICATION
763. Aux termes de l'article L. 464-2 I du Code de commerce, " l'Autorité de la concurrence peut ordonner la publication, la diffusion ou l'affichage de sa décision ou d'un extrait de celle-ci selon les modalités qu'elle précise (...) Les frais sont supportés par la personne intéressée ".
764. En l'espèce, afin d'informer les maîtres d'œuvre et d'ouvrage de la présente décision et de les inciter à la vigilance vis-à-vis des pratiques condamnées au titre d'ententes dans le secteur de la restauration des monuments historiques, il y a lieu d'ordonner aux mises en cause de faire publier à leurs frais, au prorata des sanctions prononcées, la publication dans Le Figaro et Le Moniteur des travaux publics du résumé de la présente décision figurant au point suivant.
765. " Obligation de publication imposée par l'Autorité de la concurrence
L'Autorité de la concurrence a rendu, le 26 janvier 2011, une décision par laquelle elle sanctionne 14 acteurs majeurs du secteur de la restauration de monuments historiques (les sociétés M. Lefèvre, Entreprise Georges Lanfry, Quélin, Entreprise H Chevalier Nord, Payeux Invest, Terh Monuments historiques, Faber, Charpentier PM, Entreprise Pradeau et Morin, Entreprise Pavy, Entreprise Degaine, Pateu & Robert, Société Nouvelle Bodin, et Pyramide, au titre des infractions commises par la société Dagand, (aux droits et obligations de laquelle elle a succédé) ainsi qu'une société de géométrie expertise (Coefficient) pour avoir pris part à des ententes dans le secteur de la restauration des monuments historiques.
Informé au cours de l'année 2006 de l'existence d'une information judiciaire ouverte devant le Tribunal de grande instance de Rouen le 24 septembre 2001 à l'encontre de divers dirigeants d'entreprises actives dans le secteur de la restauration des monuments historiques du chef de participation personnelle et déterminante à l'organisation de pratiques anticoncurrentielles, délit prévu et réprimé par l'article L. 420-6 du Code de commerce, le Conseil de la concurrence, auquel a succédé l'Autorité de la concurrence, avait ouvert une instruction sur ces pratiques au cours de l'année 2007, et avait également été saisi peu après par le ministre de l'Economie.
Dans chacune des régions de Haute-Normandie, de Basse-Normandie et de Picardie, les entreprises ont mis en œuvre des ententes visant à se répartir les marchés d'appels d'offres lancés par les maîtres d'ouvrage (l'Etat, pour son compte ou pour le compte de particuliers recevant son aide financière, et des collectivités territoriales) dans le secteur de la restauration des monuments historiques. Ces ententes se sont traduites par l'organisation de réunions de partage des marchés programmés, et la mise en œuvre de concertations et d'échanges d'informations à l'occasion des appels d'offres particuliers, les entreprises présentant des offres de complaisance au bénéfice de leurs concurrents dans l'assurance d'obtenir la réciprocité à l'occasion des appels d'offres portant sur les marchés dont elles souhaitaient être attributaires. Les entreprises locales sollicitaient également des offres de couverture auprès d'entreprises implantées dans d'autres régions afin de créer l'apparence d'un degré de concurrence élevé auprès des maîtres d'ouvrage. Ces ententes ont été mises en œuvre pendant une période continue, égale à près de cinq ans pour la Haute-Normandie (1997 à 2002), plus de quatre ans pour la Basse-Normandie (1998 à 2002) et près de quatre ans pour la Picardie (1998 à 2001).
Par ailleurs, des pratiques d'ententes ponctuelles sur appels d'offres ont été mises en œuvre au cours des années 2001 et 2002 par les entreprises en Aquitaine, Bourgogne, Nord-Pas-de-Calais et Ile-de-France. Enfin, le groupe Lefèvre et la société de géométrie expertise Coefficient ont mis au point au cours des années 1998 à 2002 un système d'élaboration de bordereaux de prix fictifs destinés au dépôt d'offres de couverture, afin de permettre aux différentes filiales du groupe de présenter des soumissions fictivement indépendantes aux appels d'offres, et, ainsi, de simuler la concurrence auprès des maîtres d'ouvrage.
Ces ententes, et tout particulièrement les ententes de répartition de marchés, qui ont affecté la majeure partie des appels d'offres lancés par les maîtres d'ouvrages publics dans les trois régions de Haute-Normandie, de Basse-Normandie et de Picardie, ont gravement faussé ces consultations en éliminant presque complètement la concurrence. Il en est résulté un dommage à l'économie très important, car ces pratiques ont conduit au cloisonnement des marchés, ainsi qu'à une élévation artificielle du montant des offres, qui peut être estimée à plus de 20 %, dans les trois régions concernées. Les ententes régionales ont également eu pour probable effet de freiner le lancement de chantiers de restauration de monuments historiques appartenant au patrimoine culturel national.
Certaines des entreprises concernées ont décidé de ne pas contester la réalité des griefs, à savoir Lanfry, Pradeau et Morin et Coefficient, et ont de ce fait bénéficié d'une réduction de sanction.
L'Autorité de la concurrence a prononcé des sanctions proportionnées à la gravité des comportements en cause, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation individuelle des entreprises. Elle a ainsi infligé :
- à M. Lefèvre, une sanction de 1 034 190 euro ;
- à Entreprise Georges Lanfry, une sanction de 633 000 euro ;
- à Entreprise Quélin, une sanction de 20 000 euro ;
- à Entreprise H Chevalier Nord, une sanction de 685 000 euro ;
- à Payeux Invest, une sanction de 12 000 euro ;
- à Terh Monuments historiques, une sanction de 503 000 euro ;
- à Faber SA, une sanction de 900 000 euro ;
- à Pyramide, venant aux droits et obligations de Dagand, une sanction de 80 000 euro ;
- à Charpentier PM, une sanction de 240 000 euro ;
- à Entreprise Pradeau et Morin, une sanction de 4 500 000 euro ;
- à Entreprise Pavy, une sanction de 157 000 euro ;
- à Entreprise Degaine, une sanction de 536 000 euro ;
- à Sté Nouvelle Bodin, une sanction de 136 000 euro ;
- à Pateu & Robert, une sanction de 209 000 euro ;
- à Coefficient, une sanction de 158 400 euro.
Les amendes sont recouvrées au bénéfice du Trésor public. Cependant l'Etat, les collectivités territoriales et les particuliers victimes des ententes disposent du droit de demander réparation auprès des tribunaux compétents du préjudice qu'elles ont subi de ce fait.
Le texte intégral de la décision de l'Autorité de la concurrence est accessible sur le site www.autoritedelaconcurrence.fr "
Décision
Article 1er : Il est établi que les sociétés M. Lefèvre, Entreprise Georges Lanfry, Entreprise Quélin, Entreprise H Chevalier Nord, Payeux Invest, Terh Monuments historiques, Faber SA, Pyramide, venant aux droits et obligations de Dagand, Charpentier PM, Entreprise Pradeau et Morin, Entreprise Pavy, Entreprise Degaine, Sté Nouvelle Bodin, Pateu & Robert et Coefficient ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
Article 2 : Il n'est pas établi que les sociétés Cazenave, Chevalier et Chanzy et Pradoux ont enfreint l'article L. 420-1 du Code de commerce.
Article 3 : Sont infligées, au titre des pratiques visées à l'article 1er, les sanctions pécuniaires suivantes :
- à M. Lefèvre, une sanction de 1 034 190 euro ;
- à Entreprise Georges Lanfry, une sanction de 633 000 euro ;
- à Entreprise Quélin, une sanction de 20 000 euro ;
- à Entreprise H Chevalier Nord, une sanction de 685 000 euro ;
- à Payeux Invest, une sanction de 12 000 euro ;
- à Terh Monuments historiques, une sanction de 503 000 euro ;
- à Faber SA, une sanction de 900 000 euro ;
- à Pyramide, venant aux droits et obligations de Dagand, une sanction de 80 000 euro ;
- à Charpentier PM, une sanction de 240 000 euro ;
- à Entreprise Pradeau et Morin, une sanction de 4 500 000 euro ;
- à Entreprise Pavy, une sanction de 157 000 euro ;
- à Entreprise Degaine, une sanction de 536 000 euro ;
- à Sté Nouvelle Bodin, une sanction de 136 000 euro ;
- à Pateu & Robert, une sanction de 209 000 euro ;
- à Coefficient, une sanction de 158 400 euro.
Article 4 : Les personnes morales visées à l'article 1er feront publier à leurs frais, au prorata des sanctions prononcées, le texte figurant au point 765 de la présente décision dans " Le Figaro " et " Le Moniteur des travaux publics ", en respectant la mise en forme. Cette publication interviendra dans un encadré en caractères noirs sur fond blanc de hauteur au moins égale à trois millimètres sous le titre suivant, en caractère gras de même taille : " Décision de l'Autorité de la concurrence n° 11-D-02 du 26 janvier 2011 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la restauration des monuments historiques ". Elle pourra être suivie de la mention selon laquelle la décision a fait l'objet de recours devant la Cour d'appel de Paris si de tels recours sont exercés. Les personnes morales concernées adresseront, sous pli recommandé, au bureau de la procédure, copie de ces publications, dès leur parution et au plus tard le 31 avril 2011.
Notes :
1 Décret n° 80-911 du 20 novembre 1980, abrogé par le décret n° 2007-1405 du 28 septembre 2007 portant statut particulier du corps des architectes en chef des monuments historiques.
2 Cotes 4247 à 4257, 6956 à 7810, 7816 à 7829, 7848 à 7861, 7873 à 7894, 7897 à 8070.
3 Cote 2988 et 3820.
4 Cote 3819.
5 Cote 2773.
6 Cote 4088.
7 Cote 2957.
8 Cotes 3624 et 3625.
9 Cotes 3624, 3625 et 5036.
10 Parts de marché calculées en cumulant les montants des marchés attribués dans le cadre des consultations lancées par les DRAC (rapport de synthèse de la DDCRF du 1er décembre 2004, cote 5879).
11 Parts de marché calculées en cumulant les montants des marchés attribués dans le cadre des consultations lancées par les DRAC (rapport de synthèse de la DDCRF du 1er décembre 2004, cote 5879)
12 Parts de marché calculées en cumulant les montants des marchés attribués dans le cadre des consultations lancées par les DRAC (rapport de synthèse de la DDCRF du 1er décembre 2004, cote 5879)
13 Eglise de Longueville sur seine (96) ; Eglise Saint-Sulpice et Saint-Laurent Paris (96) ; Collège de Beauvais Paris (96) ; Eglise Saint-Yon Lesigny (96) ; Parc de bagatelle Paris (97) ; Château de Jossigny (97) ; Hôtel de Lassay assemblée Nationale Paris (98) ; Théâtre des Hauts-de-Seine Puteaux (98) ; Pavillon des ducs Clichy (99).
14 Conflans-Sainte-Honorine (98) ; Saint-Germain en Laye (98) ; Château de Montfort l'Amaury (98) ; Hôtel de Beauvais Paris (98) ; Ancienne chapelle Saint-Denis (98) ; Collégiale Mantes la Jolie (98) ; Eglise Saint-Maclou Conflans-Sainte-Honorine (99) ; Hôtel de Beauvais Paris (99) ; Immeuble place des Vosges Paris (2000) ; château de Maisons-Laffitte (2000).
15 Parc de bagatelle Paris (97) ; Eglise Saint-Jacques Houdan (97) ; Eglise Saint Séverin Oinville sur Montcient (97) ; Pavillon de la lanterne Versailles (97) ; Palais Royal Paris (98) ; Fontaine des mers Paris (98) ; Tribunal de commerce Paris (18/01/99 et 15/09/99).
16 Eglise de Cléry en Vexin (98).
17 Eglise de Saint-Amand sur Fion (96) ; Eglise de la Neuville au Pont (97) ; Eglise Saint-Martin Somsois (99) ; Eglise Saint-Médard Grandpré (99) ; Cathédrale Saint-Etienne Châlons-en-Champagne (99).
18 Cathédrale Arras (97) ; Eglise Steenbecque (98) ; Cathédrale Arras (98) ; Eglise Saint-Jean-Baptiste Berck-sur-mer (98) ; Eglise Saint-Maurice Lille (99) ; Eglise Saint-Jean-Baptiste Berck-sur-mer (02/99) ; Eglise Saint-Jean-Baptiste Berck-sur-mer (05/99).
19 Chapelle des Chartreux Douai (96).
20 Château de Mausson Landivy (96) ; Château de Bouloire (96) ; Eglise de Chevillé (96) ; Les Halles Saint- Calais (96) ; Ancien couvent de la visitation Le Mans (98) ; Eglise Le Grand Lucé (98) ; Château Le Grand Lucé (99) ; Eglise Saint-Benoît Le Mans (99).
21 Eglise Abbatiale Valmont (97) ; Eglise Roullée (97) ; Eglise Mauçon (99).
22 Eglise Saint-Vénévand Laval (95) ; Basilique Notre-Dame d'Avesnières Laval (97).
23 Ainsi qu'il a été relevé plus haut, pendant la période concernée par les pratiques, les ACMH étaient chargés de la maîtrise d'œuvre sur tous les immeubles classés, lorsque la maîtrise d'ouvrage était assurée par les services de l'Etat, ou lorsque les propriétaires recevaient une aide financière de l'Etat (article 3 du décret n° 80-911 du 20 novembre 1980 précité). Aujourd'hui, les ACMH ne disposent de l'exclusivité de la maîtrise d'œuvre que sur les immeubles classés appartenant à l'Etat (article 3 du décret n° 2007-1405 du 28 septembre 2007).
24 Il convient de relever que, pour cette mission d'intérêt général, les ACMH sont rémunérés non par un traitement mais par des honoraires fixés par décret, au cas d'espèce, le décret n° 87-312 du 5 mai 1987 alors applicable.
25 Rectifiée le 13 janvier 2009 s'agissant d'une erreur quant à la dénomination de l'entreprise
26 Non compris les appels d'offres infructueux
27 Non compris les appels d'offre infructueux.
28 Ainsi qu'il a été relevé ci-dessus (point 633), la durée réelle des ententes régionales dépasse celle qui est retenue pour l'appréciation du dommage à l'économie et du montant de la sanction, celle-ci étant déterminée sur le seul fondement des éléments relevés à l'occasion des appels d'offres individuels étudiés lors de l'instruction et retenus pour notifier les griefs aux entreprises concernées.
29 Les chiffres présentés au rapport administratif d'enquête et au rapport de l'IGAAC sont entachés d'erreur de calcul s'agissant de la baisse des prix consécutive à l'entente, qui ne résulte pas de la différence mathématique entre des pourcentages. Pour l'appréciation du dommage à l'économie, il est plus pertinent d'estimer le surprix résultant de l'entente. S'agissant de la Haute-Normandie, ce surprix s'exprime de la façon suivante : (100-3,6)/(100-19,2).
30 Périodes de référence retenues : décembre 1996 - novembre 2001 pour la Haute-Normandie, mars 1999 - février 2002 pour la Basse-Normandie, et février 1998 - février 2002 pour la Picardie.
31 Périodes de référence retenues : mars 2002 - mars 2003 pour la Haute-Normandie, mars 2002 - mai 2003 pour la Basse-Normandie, et avril 2002 - avril 2003 pour la Picardie.
32 Hors prise en compte de l'inflation. Les estimations de surprix figurant dans ce tableau sont de ce fait conservatrices.
33 Même remarque qu'en note 32 supra
34 Voir note 29, supra.
35 Idem.
36 Il en est notamment ainsi des prestations de taille de pierre, qui représenteraient selon l'étude 43 % du prix d'un chantier-type de restauration de monument historique, les prestations fournies variant d'un chantier à l'autre (taille unie ou moulurée, sur pierre de Caen ou non...).
37 Insee, Ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
38 Sur ce point, il convient d'ailleurs de relever, s'agissant de l'étude proposée par M. Lefèvre, que l'intérêt d'observer des chantiers fictifs plutôt que de comparer directement les prix unitaires des prestations fournies n'est pas clairement établi.
39 Rapport d'information n° 38 (2006-2007) de M. M..., fait au nom de la commission des affaires culturelles et de la mission d'information, déposé le 24 octobre 2006.
40 Cotes 17.7175 et s., 17.738 et s., 17.748 et s., 17.763 et s., 17.823 et s., 17.353 et s., 17.382 et s., 17.692 et s., 10.515 et s., 17.654 et s., 17.330 et s., 17.377 et s., 17.401 et s., 17.428 et 17.455.
41 Rapport d'enquête, cote 5878.
42 Voir le procès-verbal de la séance du 22 octobre 2010
43 C'est le cas de l'ensemble des entreprises, à l'exception de Pateu & Robert et Coefficient.