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Décisions

Cass. com., 18 janvier 2011, n° 10-11.777

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Euro Properties Investment (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Avocats :

Me Foussard, SCP Yves, Blaise Capron

Paris, du 21 janv. 2010

21 janvier 2010

LA COUR : - Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier Président d'une cour d'appel (Paris, 21 janvier 2010), et les pièces de la procédure, que par ordonnance du 22 novembre 2006, le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris a autorisé des agents de l'administration des impôts à procéder à des opérations de visite et de saisie, notamment dans des locaux situés <adresse> à Paris, susceptibles d'être occupés par M. X, en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale commise par ce dernier et M. Y; que les opérations se sont déroulées le 23 novembre 2006 et qu'un ordinateur portable et un disque dur externe ont été mis sous scellés ; que, le 28 novembre 2006, les agents de l'administration ont, en présence de M. X, ouvert les scellés et procédé à la duplication de certains fichiers figurant sur l'ordinateur portable, ainsi qu'à la copie, sur un disque, de toutes les informations se trouvant sur le disque dur externe, qui a été restitué à M. X; qu'un certificat électronique d'authentification a été établi et joint au procès-verbal ; que la société Euro Properties Investments a formé un recours contre le déroulement des opérations ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société Euro Properties Investment fait grief à l'ordonnance de n'avoir prononcé que la nullité de la saisie des correspondances d'avocat et d'avoir rejeté sa demande d'annulation de l'ensemble des opérations de visite et de saisie, alors, selon le moyen : 1°) que la signature des procès-verbaux des opérations de visite et de saisie et d'inventaire de saisie sans réserve ne constitue pas une renonciation à exercer les voies de recours ouvertes à la loi à tous les intéressés ; qu'en énonçant, dès lors, pour écarter les moyens soulevés par la société Euro Properties Investments tirés de ce que les fichiers informatiques figurant sur le disque dur externe saisi n'avaient pas fait l'objet d'un inventaire et de l'absence de compostage des fichiers informatiques saisis, que M. David Y (en réalité, M. Arnaud X) avait signé le procès-verbal décrivant les documents saisis, sans y apporter de réserve, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; 2°) que l'administration fiscale a l'obligation de dresser un inventaire des pièces et documents saisis au plus tard au jour de l'ouverture des scellés ; qu'en énonçant, par conséquent, pour écarter le moyen soulevé par la société Euro Properties Investments tiré de ce que les fichiers figurant sur le disque dur externe saisi n'avaient pas fait l'objet d'un inventaire, après avoir constaté qu'il était précisé au procès-verbal de restitution du 28 novembre 2006, date de l'ouverture des scellés, que ce disque dur avait été copié sur un disque compact, sans que les fichiers qui y figuraient n'aient été inventoriés, que lorsque l'administration fiscale copie intégralement un disque dur à partir d'un logiciel sécurisé, comme cela était le cas en l'espèce, elle n'a pas l'obligation d'indiquer sur le champ la liste des fichiers copiés et qu'elle n'a donc pas commis de faute à ce titre, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; 3°) que l'administration fiscale a l'obligation de dresser un inventaire des pièces et documents saisis ; qu'en énonçant, par conséquent, pour écarter le moyen soulevé par la société Euro Properties Investments tiré de ce que les fichiers figurant sur le disque dur externe saisi n'avaient pas fait l'objet d'un inventaire, après avoir constaté qu'il était précisé au procès-verbal de restitution du 28 novembre 2006, date de l'ouverture des scellés, que ce disque dur avait été copié sur un disque compact, sans que les fichiers qui y figuraient n'aient été inventoriés, que lorsque l'administration fiscale copie intégralement un disque dur à partir d'un logiciel sécurisé, comme cela était le cas en l'espèce, elle n'a pas l'obligation d'indiquer sur le champ la liste des fichiers copiés et qu'elle n'a donc pas commis de faute à ce titre, sans relever que l'administration fiscale avait bien dressé un inventaire des fichiers figurant sur le disque dur externe saisi, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; 4°) que si les dispositions de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ne soumettent l'établissement d'un inventaire à aucune forme particulière, l'inventaire des pièces et documents saisis que l'administration fiscale a l'obligation de dresser a pour objet de garantir la conformité des pièces saisies à celles invoquées par l'administration fiscale dans le cadre d'une éventuelle procédure de rectification et doit, en conséquence, permettre d'identifier, de manière certaine, chacune des pièces et chacun des documents saisis ; qu'il en résulte que, pour être régulier, l'inventaire des pièces et documents saisis que l'administration fiscale a l'obligation de dresser doit énumérer chacune des pièces et chacun des documents saisis et les identifier par un numéro de compostage ; qu'en écartant le moyen soulevé par la société Euro Properties Investments tiré de l'absence de compostage des fichiers informatiques saisis, sans constater que l'administration fiscale avait identifié chacun des fichiers informatiques saisis par un numéro de compostage, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu que l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ne soumet l'inventaire à aucune forme particulière ; que l'ordonnance retient que le procès-verbal d'ouverture des scellés et d'inventaire indique sur quarante et une pages les fichiers qui figuraient dans l'ordinateur portable et qui ont été copiés ; qu'elle relève que le disque dur externe a été intégralement copié sur un disque, à partir d'un logiciel sécurisé, et restitué à son propriétaire ; que le premier président a pu déduire de ces constatations que l'Administration avait satisfait à ses obligations relatives à l'inventaire ; que le moyen, qui, en sa première branche, critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le troisième moyen : - Attendu que la société Euro Properties Investment fait encore à l'ordonnance le même grief, alors, selon le moyen, que dès lors que, lorsqu'un support de documents est indivisible ou insécable, l'Administration est en droit d'appréhender tous les documents qui y sont contenus si certains de ces documents se rapportent, au moins en partie, aux agissements visés par l'ordonnance judiciaire autorisant les opérations de visite et saisie domiciliaires, l'illégalité de la saisie de certains documents contenus dans un support de documents indivisible ou insécable entraîne l'illégalité et, partant, la nullité, de la saisie de tous les documents qui figuraient dans ce support de documents ; qu'en écartant, dès lors, le moyen soulevé par la société Euro Properties Investments, tiré de ce qu'en raison du caractère insécable de la messagerie électronique se trouvant sur l'ordinateur portable saisi, l'illégalité de la saisie des correspondances d'avocats qui y figuraient entraînait l'illégalité et, partant, la nullité, de la saisie de tous les éléments contenus dans cette messagerie électronique et en se bornant à prononcer la nullité de la saisie des correspondances d'avocats effectuée par l'Administration fiscale, sans rechercher si, comme le soutenait la société Euro Properties Investments, la messagerie électronique se trouvant sur l'ordinateur portable saisi n'était pas insécable, la juridiction du premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu que la présence, dans une messagerie électronique, de courriels couverts par le secret professionnel, n'a pas pour effet d'invalider la saisie des autres éléments de cette messagerie ; que le premier président n'avait dès lors pas à procéder à une recherche inopérante ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que les autres moyens ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.