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Décisions

Cass. crim., 12 janvier 2011, n° 10-80.018

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Louvel

Rapporteur :

Mme Nocquet

Avocats :

Mes Ricard, Spinosi, SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard

Aix-en-Provence, du 28 oct. 2009

28 octobre 2009

LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par la société W, la société X, la société Y, la société Z, l'entreprise Michel R, contre l'ordonnance du premier Président de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 28 octobre 2009, qui a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à effectuer des opérations de visite et saisie de documents en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; - Joignant les pourvois en raison de la connexité ; - Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation proposé par Me Spinosi pour la société W, pris de la violation des articles 6 § 1, 8, 13 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, 1er du premier Protocole additionnel à ladite Convention, L. 450-4 et L. 420-1 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'ordonnance rendue le 3 novembre 2008 n'a pas prévu l'assistance d'un avocat, droit entré en vigueur le 14 novembre 2008, lors des opérations de perquisitions qui se sont déroulées le 18 novembre 2008 ;

"alors qu'il résulte de l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008 modifiant l'article L. 450-4, alinéa 4, du Code de commerce et entrée en vigueur le 14 novembre 2008, que l'ordonnance autorisant les perquisitions doit mentionner la faculté pour l'occupant des lieux de se faire assister par un avocat ; que si, le 3 novembre 2008, l'ordonnance autorisant les perquisitions a été légalement rendue, elle n'était plus exécutable à compter du 14 novembre 2008, faute de prévoir le droit à être assisté d'un avocat ; qu'il appartenait au juge des libertés et de la détention, à compter de cette date, de faire mention de ce droit à l'intéressé, au besoin, par une ordonnance rectificative ; qu'en confirmant l'ordonnance du 3 novembre 2008 dont la rédaction a privé la société W d'être informée de son droit, alors applicable, à l'assistance d'un avocat lors des perquisitions du 18 novembre 2008, le premier Président de la cour d'appel a porté atteinte à l'exercice des droits de la défense de la société demanderesse";

Sur le deuxième moyen de cassation proposé par Me Spinosi pour la société W, subsidiaire à la question de constitutionnalité ;

"en ce que l'article L. 450-4 du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 13 novembre 2008, ne prévoyait pas l'assistance d'un avocat ;

"alors que l'article L. 450-4 du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 13 novembre 2008, est contraire aux principes constitutionnels des droits de la défense, de la liberté individuelle et du respect de la vie privée et de l'inviolabilité du domicile ; qu'il y a lieu, dès lors, de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ; qu'à la suite de la déclaration d'inconstitutionnalité qui interviendra, l'arrêt attaqué se trouvera privé de base légale au regard des principes constitutionnels des droits de la défense, de la liberté individuelle et du respect de la vie privée et de l'inviolabilité du domicile";

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, par ordonnance du 3 novembre 2008 confirmée le 28 octobre 2009 par l'ordonnance attaquée, le juge des libertés et de la détention a autorisé la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à effectuer des opérations de visite et saisie de documents en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la gestion déléguée des services publics de distribution d'eau et d'assainissement ; que, par ordonnance du 14 novembre 2008, il a rectifié et complété sa décision du 3 novembre précédent, non encore mise à exécution; que, se référant aux nouvelles dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce, issues de l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008, il a notamment ajouté une mention relative à la possibilité, pour l'occupant des lieux ou son représentant, de faire appel à un conseil de son choix pendant les opérations de visite ;

Que, par arrêt du 15 juin 2010, la Cour de cassation a jugé que les dispositions anciennes de cet article, contestées par la question prioritaire de constitutionnalité en ce qu'elles ne prévoyaient pas le droit d'être assisté d'un avocat, n'étaient pas applicables au litige et a dit n'y avoir lieu à renvoi devant le Conseil constitutionnel ;

Qu'à la suite de cet arrêt, les moyens sont devenus inopérants ;

Sur le moyen unique de cassation proposé par la société civile professionnelle Barthélémy, Matuchansky et Vexliard pour la X, la X, la Y, la Z et l'entreprise Michel R, pris de la violation des articles 6 § 1, 8, 13 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, 1er du premier Protocole additionnel à ladite Convention, L. 450-4 et L. 420-1 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'ordonnance a confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Marseille, en date du 3 novembre 2008, ayant autorisé les visites domiciliaires dans les locaux identifiés à l'ordonnance et a débouté les appelants de leurs demandes d'annulation et de réformation de cette ordonnance, ainsi que de leur demande tendant à voir ordonner la restitution des pièces saisies par la Biec le 18 novembre 2008 dans les locaux des sociétés appelantes ;

"aux motifs propres que les appelants soutiennent que, contrairement aux exigences de l'article L. 450-4 du Code de commerce, le premier juge a autorisé les visites et saisies en l'absence de présomption de l'existence des pratiques recherchées et sans analyser le bien-fondé de la requête ; mais que c'est pour des motifs pertinents, qu'il convient d'adopter, que le premier juge, après s'être livré à une analyse minutieuse des pièces annexées à la requête, notamment les pièces relatives aux consultations lancées par diverses communes, a retenu les éléments énumérés en pages 6 et suivantes de sa décision qui lui ont permis de considérer à bon droit qu'il existait des présomptions de pratiques prohibées au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce ; qu'en effet, la reconduction systématique du "sortant", favorisée par les carences des autres entreprises, caractérise celles-ci ; que les moyens invoqués par les appelants tendent à démontrer qu'ils ne se sont pas rendus coupables de pratiques concertées au sens de l'article L. 420-1 alors qu'il incombait seulement au juge des libertés et de la détention de rechercher des présomptions, en l'espèce établies pour les motifs exposés ci-dessus ; d'autre part, que c'est en vain que les appelants reprochent au juge d'avoir repris les analyses développées dans la requête sans en apprécier la pertinence, en ce que ce fait ne permet pas de présumer qu'il a rendu sa décision sans adopter les motifs qui étaient soumis à son appréciation ; enfin, que c'est également à tort que les appelants soutiennent que l'autorisation donnée par le premier juge est disproportionnée par rapport aux éléments apportés par l'administration ; qu'en effet, étant rappelé que l'existence de simples présomptions suffit à fonder la décision, le juge des libertés et de la détention a, à juste titre, autorisé les visites et saisies dès lors qu'il a considéré que les éléments produits laissaient présumer, comme exposé plus haut, les pratiques recherchées ; qu'à l'évidence, les autres mesures d'enquête évoquées par les appelants, consistant à interroger les entreprises attributaires et celles qui n'avaient pas été retenues, auraient été vouées à l'échec dès lors qu'étaient recherchées des preuves matérielles d'échanges d'informations occultes entre les soumissionnaires pour favoriser l'un d'entre eux ;

"et aux motifs adoptés que la liste des contrats pour lesquels il existe des présomptions n'est probablement pas exhaustive, les DPS mentionnées dans la présente ordonnance n'étant que des illustrations des pratiques dont la preuve est recherchée dans le secteur concerné ; que le Siape qui regroupe les communes de Toulon, La Valette, La Garde et le Pradet a lancé, en juillet 2004, une consultation, pour la délégation en affermage du service public d'assainissement des eaux (collecte et traitement) d'une durée de douze ans, pour un chiffre annuel indicatif de 2 millions d'euro ; que quatre candidats se sont déclarés, Degrémont Services et R, qui se sont tous deux ensuite excusés et la X et la Seerc ; qu'à l'issue de l'analyse des propositions, le Siape a décidé de retenir le candidat X seul et d'engager avec ce dernier des négociations qui ont abouti à la signature d'un contrat d'affermage, le 5 avril 2006 ; que la commune de Bagnols-en-Forêt (Var) a lancé, en mars 2005, une consultation pour la gestion déléguée en affermage du service public d'eau potable, d'une durée de dix ans ; que les cinq candidats ont été retenus, Saur, R, Serex, la Y, et Lyonnaise des eaux, mais que seuls ces deux derniers ont déposé des offres ; qu'à l'issue d'une négociation menée avec la Y, la collectivité a décidé de reconduire ce délégataire ; que le Siaep de Sanary, Six-Fours, Ollioules et Bandol a lancé, en juillet 2005, une consultation pour la gestion déléguée en affermage du service public d'eau potable, d'une durée de douze ans pour un chiffre d'affaires annuel prévisionnel de 200 000 euro, faisant suite à une gestion en régie ; que cinq candidats se sont manifestés, R et la société du Canal de Provence qui se sont ensuite désistés, la W, la Seerc et la X qui ont été retenus et ont déposé des offres ; que celle de la Seerc s'est révélée sommaire, celle de la X était techniquement valide mais d'un montant élevé et que seule celle de la W a été jugée recevable et, ce qui a conduit à attribuer le contrat à la W, prestataire de l'ancienne régie ; que la SIA de Rocbaron-Forcalqueiret et la commune de Rocharon (Var) ont lancé de manière coordonnée deux consultations, le 13 juillet 2006, pour la gestion déléguée en affermage du service d'assainissement collectif de la commune, et le 18 juillet 2006, pour la gestion déléguée en affermage de la station d'épuration du SIA ; que sept candidats ont été admis à participer aux deux compétitions ; Seerc (délégataire sortant), la Sodeo, W, Z, Selfema, Saur et R ; que ces deux derniers n'ont pas répondu ; que cinq offres ont été ouvertes par les CDSP des 17 octobre (SIA) et 23 octobre 2006 (commune) puis négociées (à l'exclusion de celle de Z pour le SIA jugée d'un montant trop élevé) ; qu'à l'issue de la négociation, le conseil municipal de Rocbaron a décidé le 16 février 2007 d'attribuer la DSP à la Seerc ; que la SIA a fait de même le 28 février 2007 ; que, toutefois, au terme d'un déféré pré-contractuel déposé par la société Sodbo, le Tribunal administratif de Nice a annulé, par deux décisions du 26 mars 2007, l'attribution des DSP de la commune de Rocbaron et du SIA Rocbaron-Forcalqueiret ; que la commune de Rocbaron et le SIA Rocbaron-Forcalqueiret ont relancé une consultation pour la gestion déléguée de leurs infrastructures d'assainissement des eaux, le 10 septembre 2007, sur la base de programmes inchangés ; que le candidat SVAG s'est désisté et que seule la société Seerc, délégataire sortant a répondu et remporté les deux DSP ; que la commune de Sainte Maxime a lancé, le 16 juin 2006, une consultation pour l'affermage du service de distribution d'eau potable qui a suscité les candidatures de la Y, Saur, Lyonnaise des eaux, (LDE) Suez, Serex, R, société Nantaise des Eaux ; que les trois premiers candidats ont remis des offres, que la Y, délégataire sortant, a remporté le contrat ; que la commune de Rousset (Bouches-du-Rhône) a lancé le 4 mai 2007 une consultation pour la délégation par affermage de service public de transfert et de traitement des eaux usées qui a suscité huit candidatures, R, Saur, société Nantaise des Eaux, Sodeo, Scam TP, Ternois, W et Seerc ; que les cinq premiers n'ont pas été admis à présenter une offre, que seule la W et la Seerc ont déposé des offres ; que les deux candidats ont été invités à remettre des propositions pour préparer une négociation mais que la Seerc a décliné l'invitation ; que le contrat a été attribué à la W, délégataire sortant ; que la SIAE des communes de la région est de Toulon a lancé, le 17 juillet 2007, une consultation pour la gestion déléguée du service de production et d'adduction d'eau potable de neuf communes, d'une durée de dix-huit ans pour un chiffre d'affaires annuel indicatif de 8,2 millions d'euro ; que quatre candidats se sont manifestés et ont été agréés Seerc, Saur, X et Serex ; que la Seerc a demandé un délai supplémentaire de quarante-trois jours pour répondre, ce qui n'a pas été accepté ; que la Saur et Serex n'ont pas déposé d'offre ; que seul la X, délégataire sortant, a remis une offre et s'est vu attribuer la DSP ; qu'au vu de tous ces éléments, il peut être constaté une situation de concurrence déficiente lors des consultations étudiées relatives au secteur de la gestion déléguée des service publics de distribution d'eau et d'assainissement, marquées par des présomptions d'échanges d'informations entre soumissionnaires pour favoriser l'un d'entre eux, afin de perpétuer les positions acquises ; que l'ensemble de ces agissements peut avoir été favorisé par des échanges d'informations entre les entreprises ; que nous pouvons ainsi présumer l'existence d'une concertation prohibée par l'article L. 420-1 4° du Code de commerce qu'il convient de qualifier ; s'agissant du point 4 de l'article L. 420-1 du Code de commerce, à savoir la pratique prohibée qui consiste à répartir les marchés ; que sur les huit procédures d'attribution de DSP examinées, les sociétés du groupe Veolia environnement (Y, X et Z, composition et organisation du groupe Veolia eau) en remportent quatre (Siape de Toulon, La Garde et autres, commune de Bagnols-en-Forêt, commune de Sainte-Maxime et le SIAE de la région Est de Toulon) ; que la société du groupe Suez environnement (Seerc) est victorieuse à deux reprises (commune de Rocbaron et SIA Rocbaron-Forcalqueiret) ; que la filiale commune de ces deux groupes, la W, remporte deux DSP (Siaep de Sanary et autres et commune de Rousset) ; que, dans les huit cas, les délégataires sortants sont reconduits ; que ce qui apparait comme une règle semble révélateur d'une concertation destinée à réserver à chacune de ces entreprises l'exploitation des services d'eau ou d'assainissement qu'elles détiennent ; qu'ainsi à quatre reprises, les sociétés du groupe Suez environnement (Seerc et Lyonnaise des Eaux), confrontées à des sortants du groupe Veolia environnement (Y et X) ou la W, déposent des offres non compétitives, incomplètes ou d'un montant trop élevé, qui s'apparentent à des offres de couverture ; que ces sociétés du groupe Veolia environnement (X, Z) se positionnent face à des sortants du groupe Suez environnement par des offres trop chères ou déficientes en termes techniques ; que la société Y du groupe Veolia environnement se positionne sur les DSP qu'elle remporte facilement face à des adversaires peu motivés ; que, dans aucun de ces cas étudiés, les compétiteurs ne se mettent en mesure de contester sérieusement les sortants ; que la Saur, troisième entreprise française du secteur, fait six fois agréer sa candidature mais ne dépose qu'une offre ; que les sociétés Serex et R, opérateurs indépendants, à l'époque des faits, sont respectivement admises à concourir quatre fois mais ne déposent pas d'offres ; que pour les délégations de services publics de distribution d'eau et d'assainissement, les agissements des entreprises candidates paraissent coordonnés ; que l'ensemble de ces comportements laisse en conséquence présumer l'existence de pratiques concertées au sens de l'article L. 420-1 4° du Code de commerce ; qu'ainsi, la portée de nos présomptions est suffisante au regard des qualifications prévues à l'article L. 420-1 du Code de commerce en son point 4 ; que la recherche de la preuve de ces pratiques nous apparaît justifiée ; que par ailleurs l'utilisation des pouvoirs définis à l'article L. 450-3 du Code de commerce ne paraît pas suffisante pour permettre à l'administration de corroborer ses soupçons ; qu'en effet, les actions concertées, conventions ou ententes, qui ont pour objet ou effet de se répartir les marchés sont établies suivant des modalités secrètes, et les documents nécessaires à la preuve des pratiques prohibées, sont vraisemblablement conservés dans des lieux et sous une forme qui facilitent leur dissimulation ou leur destruction en cas de vérification ; que le recours aux pouvoirs de l'article L. 450-4 du Code de commerce constitue le seul moyen d'atteindre les objectifs recherchés ; qu'en outre les opérations de visite et de saisie sollicitées ne sont pas disproportionnées compte tenu de ce que les intérêts des entreprises concernées sont garantis dès lors que les pouvoirs de l'administration sont utilisés sous notre contrôle ; que les documents utiles à la preuve recherchée se trouvent vraisemblablement dans les locaux des entreprises qui ont participé aux consultations étudiées et dont les coordonnées figurent à l'annexe n° 11 et à la première page de la présente ordonnance ; que, dès lors que ces locaux sont situés en des lieux différents, il est nécessaire de permettre aux enquêteurs d'intervenir simultanément dans ceux-ci afin d'éviter la disparition ou la dissimulation d'éléments matériels ;

"1) alors que le juge qui autorise des visites domiciliaires à la requête de la Brigade interrégionale des enquêtes de concurrence (BIEC), doit vérifier concrètement, par l'appréciation des éléments d'information, que cette administration est tenue de lui fournir, que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée ; que le contrôle effectif du juge et sa vérification personnelle, exigés par l'article L. 450-4, alinéa 2, du Code de commerce, sont destinés à assurer la protection des droits fondamentaux reconnus et protégés par les articles 6 et 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme ; que si les motifs et le dispositif de l'ordonnance rendue sur le fondement de l'article L. 450-4 du Code de commerce sont réputés être établis par le juge qui l'a signée, il ne peut en aller ainsi lorsque la preuve contraire ressort des pièces du dossier officiel et notamment des propres mentions de la décision entreprise ; qu'en l'espèce, les sociétés demanderesses faisaient valoir que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ne contenait aucune appréciation critique, reproduisait presque mot pour mot la requête sans apprécier la pertinence des arguments fournis ni les rapprocher des documents cités et annexés ; qu'en considérant que le premier juge, après s'être livré à une analyse minutieuse des pièces annexées à la requête, notamment les pièces relatives aux consultations lancées par diverses communes, avait retenu les éléments énumérés en pages 6 et suivantes de sa décision qui lui ont permis de considérer à bon droit qu'il existait des présomptions de pratiques prohibées au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce, le premier président de la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'effectivité du contrôle exercé par le juge des libertés et de la détention, n'a pas légalement justifié sa décision ;

"2) alors que la voie de l'appel exige du premier Président de la cour d'appel saisi par l'effet dévolutif qu'il procède à un véritable examen, en droit et en fait, des éléments de la cause, de sorte qu'en se bornant à porter une appréciation sur la motivation développée par le juge des libertés et de la détention sans se prononcer lui-même sur la demande d'autorisation, le premier Président de la cour d'appel n'a pas offert un recours effectif aux sociétés demanderesses, violant ainsi leur droit à ce recours et, partant, l'article 450-4 du Code de commerce ;

"3) alors que le juge des libertés et de la détention doit vérifier concrètement que les éléments d'information qui lui sont présentés font effectivement présumer les infractions alléguées ; que lorsque la visite tend, non pas à constater une infraction en train de se commettre, mais à apporter la preuve d'infractions déjà commises, l'autorisation ne peut être accordée au vu de simples indices permettant de présumer ces infractions ; que les pratiques imputées aux sociétés demanderesses remontant à 2004, la visite n'avait pas pour objet de constater une infraction en train de se commettre et ne pouvait être autorisée qu'au vu d'éléments d'information susceptibles de caractériser une infraction à l'article L. 420-1 du Code de commerce ; qu' en affirmant que l'existence de simples présomptions suffisant à fonder la décision, le juge des libertés et de la détention avait, à juste titre, autorisé les visites et saisies dès lors qu'il avait considéré que les éléments produits laissaient présumer les pratiques recherchées, le premier président n'a pas légalement justifié sa décision au regard des exigences de l'article L. 450-4 du Code de commerce ;

"4) alors qu'hormis le cas où la visite tend à permettre la constatation d'infractions en train de se commettre, l'autorisation ne peut se fonder sur de simples indices et que le juge doit relever l'existence de présomptions graves et concordantes susceptibles de caractériser la participation active à des activités délictueuses ; qu'en présumant l'existence de pratiques prohibées de la seule et unique constatation de la reconduction des titulaires sortants favorisée par les carences prétendues des autres concurrents et en autorisant les visites et saisies sur la base de cette observation, insusceptible de caractériser à elle seule une présomption d'entente entre les entreprises en cause, le premier Président de la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"5) alors que le juge des libertés doit vérifier concrètement que les éléments d'information qui lui sont présentés font effectivement présumer les infractions alléguées ; qu'en se fondant, pour affirmer qu'il existait des présomptions de pratiques prohibées au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce, sur la seule circonstance que des titulaires sortants étaient reconduits, sans rechercher, comme il y était invité, si la reconduction des entreprises sortantes ne pouvait pas se justifier objectivement, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"6) alors que le juge des libertés doit vérifier concrètement que les éléments d'information qui lui sont présentés font effectivement présumer les infractions alléguées ; qu'en se fondant, pour affirmer qu'il existait des présomptions de pratiques prohibées au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce, sur la seule circonstance que des titulaires sortants étaient reconduits, sans prendre également en considération, comme il y était invité, l'évolution des prix des contrats ainsi renouvelés, qui peut exprimer, aussi bien que le changement de délégataire, le jeu d'une réelle concurrence, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"7) alors que les sociétés appelantes faisaient valoir que les huit " cas " arbitrairement retenus par l'Administration n'étaient pas représentatifs de la situation réelle et établissaient que, pour chacun de ces huit " cas ", la reconduction des sortants faisait suite au jeu normal de la concurrence ; qu'en se fondant exclusivement, pour caractériser les présomptions de pratiques prohibées, sur la reconduction du " sortant ", sans expliquer en quoi cette circonstance était de nature à faire présumer des pratiques anticoncurrentielles, le premier président de la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"8) alors que les visites domiciliaires portent atteinte au droit à la protection du domicile consacré par l'article 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme et que le juge doit exercer un contrôle de proportionnalité sur la nécessité d'une telle atteinte au regard des exigences de l'intérêt général ; qu'en se bornant, pour autoriser l'Administration à effectuer des visites et saisies dans les locaux professionnels des entreprises en cause, à énoncer que c'est à tort que les appelants soutiennent que l'autorisation donnée par le premier juge est disproportionnée par rapport aux éléments apportés par l'Administration car le juge a, à juste titre, autorisé les visites et saisies dès lors qu'il a considéré que les éléments produits laissaient présumer les pratiques recherchées, sans s'assurer personnellement et concrètement de la proportionnalité et de la nécessité de telles mesures de contrainte, le premier Président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"9) alors que les visites et saisies prévues à l'article L. 450-4 du Code de commerce ne peuvent être autorisées qu'à la condition d'être strictement nécessaires à la preuve des infractions suspectées ; que le juge des libertés et de la détention doit vérifier concrètement, au regard des éléments qui lui sont fournis, si la preuve des pratiques anticoncurrentielles présumées ne pourrait pas être obtenue par l'Administration sans recourir à des visites domiciliaires et à des saisies, constitutives d'une ingérence dans la sphère privée des sociétés et de leurs membres ; que les sociétés appelantes faisaient valoir qu'une enquête simple sur la base de l'article L. 450-3 du Code de commerce aurait permis de vérifier l'existence de pratiques prohibées par l'article L. 420-1 du Code de commerce ; qu'en se bornant à affirmer abstraitement que les autres mesures d'enquête évoquées par les appelants consistant à interroger les entreprises attributaires et celles qui n'avaient pas été retenues auraient été vouées à l'échec dès lors qu'étaient recherchées des preuves matérielles d'échanges d'informations occultes entre les soumissionnaires pour favoriser l'un d'entre eux, sans procéder à un examen concret et circonstancié des éléments en sa possession, le premier président de la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 8 de la Convention européenne Droits de l'Homme";

Sur le troisième moyen de cassation proposé par Me Spinosi pour la société W, pris de la violation des articles 6 § 1, 8, 13 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, 1er du premier Protocole additionnel à ladite Convention, L. 450-4 et L. 420-1 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'ordonnance a dit n'y avoir lieu à annulation de l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Marseille, le 3 novembre 2008, ayant autorisé les visites domiciliaires ;

"aux motifs que les appelants soutiennent que, contrairement aux exigences de l'article L. 450-4 du Code de commerce, le premier juge a autorisé les visites et saisies en l'absence de présomption de l'existence des pratiques recherchées et sans analyser le bien-fondé de la requête ; mais que c'est pour des motifs pertinents, qu'il convient d'adopter, que le premier juge, après s'être livré à une analyse minutieuse des pièces annexées à la requête, notamment les pièces relatives aux consultations lancées par diverses communes, a retenu les éléments énumérés en pages 6 et suivantes de sa décision qui lui ont permis de considérer à bon droit qu'il existait des présomptions de pratiques prohibées au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce ; qu'en effet, la reconduction systématique du sortant ", favorisée par les carences des autres entreprises, caractérise celles-ci ; que les moyens invoqués par les appelants tendent à démontrer qu'ils ne se sont pas rendus coupables de pratiques concertées au sens de l'article L. 420-1 alors qu'il incombait seulement au juge des libertés et de la détention, de rechercher des présomptions, en l'espèce établies pour les motifs exposés ci-dessus ; d'autre part, que c'est en vain que les appelants reprochent au juge d'avoir repris les analyses développées dans la requête sans en apprécier la pertinence, en ce que ce fait ne permet pas de présumer qu'il a rendu sa décision sans adopter les motifs qui étaient soumis à son appréciation ; enfin, que c'est également à tort que les appelants soutiennent que l'autorisation donnée par le premier juge est disproportionnée par rapport aux éléments apportés par l'Administration ; qu'en effet, étant rappelé que l'existence de simples présomptions suffit à fonder la décision, le juge des libertés et de la détention, a, à juste titre, autorisé les visites et saisies dès lors qu'il a considéré que les éléments produits laissaient présumer, comme exposé plus haut, les pratiques recherchées ; qu'à l'évidence, les autres mesures d'enquête évoquées par les appelants, consistant à interroger les entreprises attributaires et celles qui n'avaient pas été retenues, auraient été vouées à l'échec dès lors qu'étaient recherchées des preuves matérielles d'échanges d'informations occultes entre les soumissionnaires pour favoriser l'un d'entre eux ;

"1) alors qu'en jugeant que "les moyens invoqués par les appelants tendent à démontrer qu'ils ne se sont pas rendus coupables de pratiques concertées au sens de l'article L. 420-1 alors qu'il incombait seulement au juge des libertés et de la détention de rechercher des présomptions en l'espèce établies pour les motifs exposés ci-dessus", motifs desquels il résulte que les présomptions justifiant la perquisition sont irréfragables, le Président de la cour d'appel a porté une atteinte disproportionnée à l'exercice des droits de la défense de la société W, en la privant de tout moyen de combattre la présomption d'entente prohibée sur laquelle les perquisitions litigieuses sont fondées ;

"2) alors que l'effet dévolutif de l'appel exige du premier Président qu'il procède à un véritable examen, en droit et en fait, des éléments de la cause ; qu'en se bornant à porter une appréciation sur la motivation développée par le juge des libertés et de la détention, sans procéder lui-même à l'examen des pièces fondant la demande d'autorisation de perquisition, lorsqu'il y était expressément invité, le premier Président de la cour d'appel a privé la société demanderesse d'un recours effectif, tel qu'il est garanti tant par l'article 450-4 du Code de commerce que par les dispositions conventionnelles";

"3) alors qu'en outre il appartient au juge des libertés de vérifier concrètement que les éléments d'information qui lui sont présentés font effectivement présumer les infractions alléguées ; qu'il résulte d'une décision du Conseil de la concurrence (décision n° 05-D-52 du 5 octobre 2005) que le parallélisme de comportement n'est pas un élément suffisant à lui seul pour caractériser l'existence d'une pratique prohibée ; qu'en se fondant, pour affirmer qu'il existait des présomptions de pratiques prohibées au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce, sur la seule circonstance que des titulaires sortants étaient systématiquement reconduits, sans répondre à ce moyen péremptoire de défense ni rechercher, comme il y était expressément invité, si la reconduction des entreprises sortantes ne pouvait pas se justifier objectivement par la réalité du marché, le premier Président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"4) alors qu'au surplus, les visites domiciliaires portant atteinte au droit à la protection du domicile consacré par l'article 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, il appartient au juge d'exercer un contrôle de proportionnalité sur la nécessité d'une telle atteinte au regard des exigences de l'intérêt général ; qu'en se bornant, pour autoriser les visites et saisies dans les locaux professionnels de la W, à énoncer que c'est à tort que les appelants soutiennent que l'autorisation donnée par le premier juge est disproportionnée par rapport aux éléments apportés par l'Administration car le juge a, à juste titre, autorisé les visites et saisies dès lors qu'il a considéré que les éléments produits laissaient présumer les pratiques recherchées, sans s'assurer personnellement et concrètement de la proportionnalité et de la nécessité de telles mesures de contrainte, le premier Président de la cour d'appel a de plus fort privé sa décision de base légale ;

"5) alors qu'enfin, la simple recopie d'une ordonnance préalablement rédigée par l'Administration ne caractérise pas le contrôle concret et effectif que doit opérer le juge des libertés et de la détention lorsqu'il délivre une autorisation de visites et de saisies ; qu'en jugeant que le premier juge, après s'être livré à une analyse minutieuse des pièces annexées à la requête, avait considéré à bon droit qu'il existait des présomptions de pratiques prohibées au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce, lorsque la W faisait valoir que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention reprenait exactement les termes employés dans la requête sans procéder à l'analyse qui lui était proposée, le premier Président de la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'effectivité du contrôle exercé par le juge des libertés et de la détention, n'a pas légalement justifié sa décision";

Les moyens étant réunis ;

Attendu, d'une part, qu'il ressort des énonciations de l'ordonnance attaquée qu'après s'être assuré, en prenant connaissance des pièces annexées à la requête, que celles-ci avaient été minutieusement analysées par le juge des libertés et de la détention ayant autorisé les opérations de visite et de saisie, le juge du second degré, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont il était saisi, a souverainement apprécié l'existence des présomptions d'agissements anticoncurrentiels ayant justifié cette autorisation, sur laquelle il a exercé un contrôle effectif ;

Attendu, d'autre part, que les dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce sur le fondement desquelles les opérations litigieuses ont été autorisées ne contreviennent pas à celles de l'article 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, dès lors qu'elles assurent la conciliation du principe de la liberté individuelle et des nécessités de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles ; d'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;

Rejette les pourvois.