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Décisions

CA Aix-en-Provence, 8e ch. B, 4 février 2011, n° 09-05746

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Palide

Défendeur :

Palm Riviera Tours (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Leca

Conseillers :

Mmes Bourrel, Durand

Avoués :

SCP de Saint Ferreol-Touboul, SCP Blanc-Cherfils

Avocats :

Mes Maillet, Maria

T. com. Cannes, du 19 févr. 2009

19 février 2009

Faits procédure prétentions des parties

Monsieur Palide exploite une activité de transport routier de voyageurs depuis 2001.

En 2004 un accord non écrit est intervenu entre lui et la société Palm Riviera Tours, créée en juillet 2004 et ayant pour gérant Monsieur Jourdan, ancien salarié de Monsieur Palide, se concrétisant par l'existence d'une relation commerciale entre les parties.

Monsieur Palide faisait assurer par la société Palm Riviera Tours une partie de son activité.

Les parties ne sont pas d'accord sur la qualification juridique des relations ainsi créées, Monsieur Palide estimant avoir agi dans le cadre d'une relation de sous-traitance et la société Palm Riviera Tours, d'une société de fait.

Les relations ont cessé en juillet 2007 à l'instigation de Monsieur Palide qui soutient avoir alors découvert que par le truchement d'une société Premium Riviera Tours, Monsieur Jourdan exerçait de manière déloyale une activité concurrente à la sienne.

Par exploit du 5 octobre 2007 la société Palm Riviera Tours a assigné Monsieur Palide devant le Tribunal de commerce de Cannes en paiement de la somme de 41 815 euro au titre de la perte de chiffre d'affaires, celle de 40 015 euro au titre de la perte de clientèle, se plaignant de la brusque rupture sans préavis de la société de fait ;

Par jugement du 19 février 2009 la juridiction consulaire cannoise a :

Condamné Monsieur Palide au paiement de la somme de 18 000 euro à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de la convention de mise en commun de moyens liant les parties;

Débouté la SARL Palm Riviera Tours de ses autres demandes indemnitaires,

Condamné Franck Palide au paiement de la somme de 1 500 euro au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens.

Le tribunal a dit qu'il n'existait pas de société de fait entre les parties mais une convention de mise en commun de moyens et que la rupture était brutale dans la mesure où elle ne respectait pas un préavis de 60 jours.

Il a considéré que le seul préjudice de la SARL Palm Riviera Tours consistait en une perte de marge pendant 60 jours.

Par acte du 25 mars 2009 Monsieur Palide a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions récapitulatives et responsives déposées et notifiées le 3 novembre 2010 il demande à la cour de :

Vu l'article 1134 du Code civil,

A titre principal,

Confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'existence d'une société de fait,

L'infirmer en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau,

Dire et juger que les parties étaient liées par un contrat à durée indéterminée,

Dire et juger que la société Palm Riviera Tours s'est rendue coupable de parasitisme et de concurrence déloyale,

Dire et juger que la rupture sans préavis des relations contractuelles était fondée,

A titre reconventionnel,

Dire et juger que le comportement et l'action initiée par la société Palm Riviera Tours lui ont causé un préjudice d'image et de réputation,

La condamner au paiement de la somme de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

A titre subsidiaire,

Infirmer le jugement en ses dispositions l'ayant condamnée au paiement de la somme de 18 000 euro,

Statuant à nouveau,

Réduire à 1 022 euro les dommages et intérêts pour rupture abusive,

En tout état de cause,

Condamner la SARL Palm Riviera Tours au paiement de la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par conclusions au fond déposées et notifiées le 27 septembre 2010 la SARL Palm Riviera Tours demande à la cour de :

Débouter Monsieur Palide de ses demandes, fins et conclusions,

Confirmer sur le principe le jugement attaqué,

Vu les articles 110-3, L. 123-23, L. 442-6 I 5° du Code de commerce, 1871-1 et 1873 du Code de commerce,

Vu les articles 1382 et suivants du Code civil,

Constater la brusque rupture imposée par Monsieur Palide le 30 juin 2007 sans respect du moindre préavis,

Constater qu'en conservant le numéro de téléphone et en fermant à Monsieur Jourdan l'accès de sa boîte de courrier électronique dépendant sur site Internet commun, a conservé la totalité de la clientèle,

Le condamner à lui payer les sommes de : 40 069 euro au titre de la perte du CA, celle de 1 024 euro au titre du remboursement des dépenses 2007, celle de 40 015 euro au titre de la perte de clientèle,

Le tout avec intérêts à compter de l'assignation et anatocisme en vertu de l'article 1154 du Code civil,

Le condamner au paiement de la somme de 6 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 novembre 2010.

Motifs

Sur la relation commerciale :

Attendu qu'il est constant que les parties étaient en relation d'affaires depuis juin 2004, sans qu'un écrit n'ait concrétisé les conditions de ces relations ;

Attendu que la société Palm Riviera Tours a été créée par Monsieur Jourdan en juin 2004 alors que Monsieur Palide exerçait son activité de transport touristique depuis juillet 2001 ;

Attendu que chacune des parties exerçait son activité avec les véhicules lui appartenant en propre et certains frais pris en charge par Monsieur Palide exerçant sous l'enseigne Provence Riviera Tours, étaient refacturés pour 50 % à la SARL Palm Riviera Tours (téléphone, imprimerie, assurance d'un véhicule...) ;

Attendu cependant que les premiers juges ont retenu à bon droit, par des motifs adoptés par la cour, que n'était pas démontrée l'existence d'une société créée de fait, faute pour la société Palm Riviera Tours d'établir la volonté des deux parties de collaborer à une œuvre commune et d'en partager les bénéfices et les pertes ;

Sur la rupture des relations :

Attendu que la rupture est intervenue à la demande de Monsieur Palide, sans préavis, prenant effet le 30 juin 2004 ;

Attendu que si aucun écrit ne précise les motifs de la rupture, Monsieur Palide ayant répondu à Monsieur Jourdan les lui avoir énoncés lors de leur entretien du 30 juin, il précise que des actes de concurrence déloyale sont à l'origine de sa volonté de mettre fin à leurs relations ;

Attendu qu'il établit par la production aux débats de plusieurs attestations (Monsieur Martin, gérant de la société Med Tour, Madame Kozlova, Madame Plard, réceptionnistes d'hôtel et résidence hôtelière...) que Monsieur Jourdan a créé en janvier 2007 avec Monsieur Brutkiewicz une société Premium Riviera Tours, ayant une activité identique à celle de Monsieur Palide, dont il est associé à 50 % et cogérant, sans en informer Monsieur Palide et qu'il a laissé aux réceptionnistes des hôtels travaillant avec Provence Riviera Tours, ses coordonnées personnelles leur demandant de le contacter directement pour les excursions touristiques et les transferts aux lieu et place de Provence Riviera Tours, et ce dès le début de l'année 2007;

Attendu que cette déloyauté de comportement de la part d'un partenaire commercial ayant toute facilité pour démarcher les clients de la société Provence Riviera Tours connus de lui, justifiait que Monsieur Palide mette fin immédiatement aux relations des parties, sans préavis ;

Attendu en conséquence que le jugement sera réformé en ce qu'il a condamné Monsieur Palide au paiement de la somme de 18 000 euro à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de la convention de mise en commun de moyens liant les parties ;

Attendu que Monsieur Palide, ne démontrant pas le caractère abusif de l'action intentée par la société Palm Riviera Tours, sera débouté de sa demande de dommages et intérêts présentée de ce chef ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Attendu que la SARL Palm Riviera Tours sera condamnée aux entiers dépens ;

Par ces motifs, LA COUR statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière commerciale, Réforme partiellement le jugement attaqué, Statuant à nouveau, Déboute la société Palm Riviera Tours de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive de la convention liant les parties, Déboute Monsieur Palide de son appel incident, Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la SARL Palm Riviera Tours aux entiers dépens, ceux d'appel étant distraits au profit de la SCP de Saint Ferreol Touboul, avoué, sur son affirmation d'en avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.