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Décisions

CA Aix-en-Provence, 9e ch. B, 29 mai 2008, n° 06-16584

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Montagnier

Défendeur :

Labelle (SA), Berel (ès qual.), AGS CGEA Rouen, Hess (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Blanc (faisant fonction)

Conseillers :

Mme Berti, M. Ruff

Avocats :

Mes Andrac, Laussucq, Gonçalves, Piquet

Conseil de prud'h. Toulon, du 28 juill. …

28 juillet 2003

Faits et procédure

Monsieur Jean-Bernard Montagnier a été engagé à compter du 1er août 1990, par la société anonyme Labelle, en qualité de VRP exclusif jusqu'au 20 mai 2002, date à laquelle il a pris acte de la rupture du contrat de travail.

Il a saisi le Conseil de prud'hommes de Toulon des demandes tendant à la fixation de ses créances à l'encontre de la société Labelle en redressement judiciaire de la manière suivante:

- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 80 000 euro

- rappel de commissions pour les années 98 à 2002 : 27 069 euro

- congés payés sur rappel de commissions : 2 706 euro

- commissions hiver 2003 : 22 691 euro

- congés payés sur commissions hiver 2003 : 2 269,10 euro

- paiement du bulletin de salaire du 01.10.2002: 1 777,47 euro

- indemnité de clientèle - remboursement de sommes : 78 053 euro

- indemnité de retour sur échantillonnage : 14 480 euro

- congés payés sur indemnité de retour sur échantillonnage : 1 448 euro

- préavis 3 mois : 14 480 euro

- congés payés sur préavis : 1 448 euro

- indemnité de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile: 1 500 euro.

Par jugement en date du 28 juillet 2003, il a été débouté de toutes ses demandes à l'exception des sommes suivantes qui lui ont été allouées:

- 30 038 euro à titre de remboursement des sommes compensées à tort sur les commissions dues,

- 2 397,95 euro à titre de solde de commissions dues sur la collection hiver 2002-2003,

- 239,79 euro à titre de congés payés afférents,

- 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Monsieur Montagnier a régulièrement relevé appel de cette décision et, par arrêt de la cour de céans en date du 16 novembre 2004 le jugement déféré a été réformé, l'appelant étant débouté de ses demandes en paiement de diverses indemnités de rupture, la cour ordonnant cependant une expertise avec mission de:

- déterminer le solde de commissions pouvant être dû à Monsieur Montagnier, au titre des commandes annulées du fait de l'employeur sur la période non prescrite de juin 1997 à juin 2002, au titre de la saison hiver 2002-2003 au titre des retours sur échantillonnage.

Sur pourvoi en cassation de Monsieur Montagnier, la Cour de cassation a, par arrêt en date du 12 juillet 2006, cassé et annulé, sauf en ce qui concerne l'expertise ordonnée, l'arrêt susvisé et renvoyé les parties devant la cour d'appel de céans autrement composée.

Le rapport d'expertise ayant été déposé le 5 août 2005, la cour de céans avait, par arrêt en date du 2 mai 2006 devenu définitif, fixé la créance de Monsieur Montagnier à l'égard de la société Labelle aux sommes suivantes:

- 20 272, 92 euro à titre de solde de commissions et 2 027,29 euro au titre des congés payés afférents.

Par déclaration au greffe de la cour en date du 28 septembre 2006, Monsieur Montagnier a fait procéder à l'enrôlement de l'affaire.

Moyens et prétentions des parties

Monsieur Montagnier demande à la cour de:

- dire et juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Labelle au paiement des sommes suivantes:

- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse: 80 000 euro

- ordonner le paiement des intérêts sur cette somme à compter du jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Toulon;

- au titre de l'indemnité clientèle: 78 000 euro avec intérêt à compter de la demande en justice;

- préavis 3 mois: 14 480 euro;

- congés payés sur préavis: 1 148 euro;

- en [toute] hypothèse ordonner la capitalisation des intérêts de l'intégralité des sommes allouées et dire que ces sommes seront payées par la société Labelle dans le cadre du redressement judiciaire et de la cession intervenue;

- déclarer la créance opposable aux AGS-CGEA de Rouen;

- condamner la société Labelle au paiement de la somme de 3 000 euro ainsi qu'aux dépens.

La Selarl FHB représentée par Maître Emmanuel Hess, commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Labelle, Maître Berel, représentant des créanciers et la société anonyme Labelle, en liquidation amiable, prise en la personne de son liquidateur demandent à la cour, au [vu] du rapport d'expertise de Monsieur Duchemin et de l'arrêt définitif de la cour d'appel de céans en date du 2 mai 2006, demandent à la cour de:

- dire que la prise d'acte par Monsieur Montagnier de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'une démission, avec toutes les conséquences de droit qui en résultent,

- débouter Monsieur Montagnier de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- recevoir la société Labelle en sa demande reconventionnelle et la dire bien fondée et condamner Monsieur Montagnier au paiement de la somme de 21 337 euro au titre du rachat de la carte,

- condamner Monsieur Montagnier au paiement de la somme de 10 000 euro à titre de dommages et intérêts ainsi qu'au paiement de la somme de 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Le CGEA de Rouen, délégation Unedic-AGS centre ouest demande à la cour de:

- lui donner acte de ce qu'il a déjà procédé à l'avance des sommes suivantes:

- 3 119,84 euro et 950,62 euro

- dire que la garantie ne pourra intervenir que dans le cadre du plafond 4, la rémunération de l'appelant ayant été librement débattue entre les parties.

En tout état de cause, il demande que les créances soient fixées en quittance ou deniers et de dire que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 143-11-1 et suivants du Code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L. 143-11-7 et L. 143-11-8 du Code du travail, et que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

Motifs de la décision

Vu les conclusions des parties oralement soutenues à l'audience;

Sur la procédure:

Attendu que les parties ne discutent pas la régularité de l'appel; que rien au dossier ne conduit la cour à le faire d'office et qu'il y a lieu de le recevoir;

Sur le fond:

Attendu que Monsieur Montagnier a été engagé en qualité de VRP à carte unique avec un commissionnement de 4,6 % sur les ventes de chaussures réalisées sur son secteur composé des départements de l'Isère, de la Loire et du Rhône;

Qu'il apparaît que l'appelant était dans le même temps animateur de deux sociétés exploitant des fonds de commerce de vente de chaussures dont la gérance était assurée par son épouse;

Qu'il apparaît que ces deux s'étaient rendues débitrices de la société Labelle pour une somme de 365 168,49 F et qu'une reconnaissance de dette a été établie en ces termes:

"Ces sociétés sont débitrices de la société Chaussures Labelle pour une créance totale de 365 168,49 F. Lesdites sociétés sont en liquidation judiciaire et dans l'impossibilité de régler leurs dettes vis-à-vis de la société Labelle.

Le soussigné reconnaît être à ce jour:

- d'une part VRP de la société Labelle pour secteur couvrant les départements de l'Isère, de la Loire, et du Rhône

- et d'autre part intimement et financièrement lié aux sociétés désignées ci-dessus tant au niveau de leur actif que de leur passif

En cette qualité, le soussigné dont l'indemnité de clientèle due en cas de cessation de son activité de VRP pour le compte de la société Labelle a été valorisée au 1er juillet 1996 à 337 000 F,

- accepte de renoncer à cette indemnité le jour où elle lui sera due, en couverture partielle de la créance de la société Labelle sur les sociétés Socs et CGI d'un montant total de 365168,49 F à ce jour.

Le soussigné reconnaît que ladite indemnité tiendra lieu de compensation pour la société Labelle et qu'en sus cette dernière sera en droit de recouvrer le restant dû après compensation, par des prélèvements sur ses commissions et autres indemnités quelconques étalés dans le temps sur un nombre d'années à définir en fonction de la somme restant à couvrir et selon des modalités qui feront l'objet d'un accord entre les parties.

Le soussigné reconnaît enfin que la société Labelle pourra lui demander tout paiement au titre de la présente reconnaissance de dette sans avoir à poursuivre préalablement les sociétés Socs et CGI ni à exercer quelque poursuite que ce soit à l'encontre de tout tiers qui se serait porté garant des dites sociétés sous quelque forme que ce soit";

Attendu que les mandataires de la société Labelle soutiennent que, dans cet acte, Monsieur Montagnier reconnaît personnellement être débiteur de la somme mentionnée et devoir en supporter seul le paiement dont il est expressément prévu qu'il interviendrait par compensation avec la créance qu'il serait amené à détenir sur la société Labelle au titre de l'indemnité de clientèle;

Qu'il ressort des éléments de la cause, qu'au cours de l'année 1998, l'appelant a souhaité modifier son secteur géographique et prendre en charge un secteur remodelé à partir de deux secteurs de représentation repris par la société Labelle et constitué par les départements des Alpes de Haute Provence, des Hautes-Alpes, des Alpes-Maritimes, des Bouches-du-Rhône et du Var;

Qu'ainsi c'est justement que les intimés font valoir qu'en suite de ce changement, la société a été créancière au titre du prix de la carte de ce deuxième secteur valorisée à 468 413 F et dont la valeur a été ramenée dans un deuxième temps à 352 748 F, Monsieur Montagnier se trouvant redevable de cette somme vis-à-vis de la société Labelle;

Attendu en premier lieu qu'il ressort de la comparaison entre le prix de la carte cédée à la société et celui de la carte reprise en 1998, que c'est faussement que Monsieur Montagnier prétend qu'un prélèvement indu de 139 962 F a été opéré par la société;

Qu'il apparaît en effet que si la société Labelle était redevable d'une indemnité de clientèle tirée de l'exploitation du secteur confié en premier lieu à Monsieur Montagnier, elle a été fixée à 337 000 F mais que la créance tirée de cette indemnité est venue en compensation de la dette reconnue vis-à-vis de cette société Labelle d'un montant de 365 168,49 F ainsi que cela a été constaté ci-avant, l'appelant étant mal fondé à soutenir que la preuve de cette dette n'est pas rapportée et à en invoquer la nullité;

Attendu qu'il ressort des éléments de la cause que Monsieur Montagnier a souhaité modifier son secteur d'intervention et a accepté la charge du secteur repris par la société Labelle et constitué par les départements des Alpes de Haute Provence, des Hautes-Alpes, des Alpes-Maritimes, des Bouches-du-Rhône et du Var, la carte correspondante étant valorisée à 468 413 F, prix dont Monsieur Montagnier devait se libérer entre les mains de la société Labelle;

que, par la suite, la carte a été valorisée à la somme de 352 748,46 F et qu'il était convenu entre les parties que ce prix serait payé par prélèvements mensuels sur les commissions, étalés sur une période de 5 années, délai accompagné d'une franchise d'une année de prélèvements pour l'année 2001 ainsi que cela ressort du courrier en date du 11 décembre 2000;

Attendu que l'appelant ne remet pas en cause le principe de ces prélèvements mais remet en cause leurs montants opérés sans qu'il rapporte la preuve que ces montants n'étaient pas dus;

Que le motif ainsi invoqué n'apparaît pas être un manquement d'une gravité suffisante susceptible de justifier la prise d'acte de rupture;

Attendu, en deuxième lieu, qu'il n'est pas sérieusement contesté qu'au cours de l'année 2001, la dite société Labelle a modifié la périodicité de régularisation des commissions portée à six mois au lieu de trois, cette modification faisant l'objet d'une note diffusée le 26 octobre 2001 avec application dès le début de l'année 2002;

Que le bulletin de salaire de Monsieur Montagnier faisait apparaître au mois d'avril 2002 un solde positif de 1 666,36 euro dont le paiement devait en application de la note du 26 octobre 2001 être différé;

Que, le 6 mai 2002, Monsieur Montagnier a demandé à la société Labelle que ce système ne lui soit pas appliqué et que la société ayant accepté, la somme de 1 666,36 euro lui été adressée ainsi qu'en atteste Madame Tricheur, responsable des ressources humaines, l'appelant ne le contestant pas sérieusement;

Que, par lettre du 20 mai 2002, Monsieur Montagnier prenait acte de la rupture du contrat de travail en invoquant des prélèvements inconsidérés au titre du remboursement de la carte, la modification de la périodicité de paiement résultant de la note du 26 octobre 2001 et des annulations de commandes du fait de la société;

Attendu qu'il apparaît que les VRP de la société bénéficiaient le 15 de chaque mois d'un acompte sur les commissions, calculé en retenant la moyenne des commissions de l'année précédente diminuée de 35 % pour charges et pertes éventuelles;

Que la régularisation et le paiement du solde des commissions éventuellement dus intervenaient tous les trois mois;

Qu'il est soutenu par les mandataires de justice que ce mode avait pour inconvénient de générer des paies de régularisation très souvent négatives obligeant la société à consentir à ses VRP d'importantes avances de trésorerie;

Qu'il est soutenu qu'à la fin de l'année 2001, cela n'étant pas utilement discuté, la balance tiers était débitrice au titre de la rémunération des représentants de 100 794,51 euro dont 9 146,94 euro pour ce qui concerne Monsieur Montagnier;

Qu'il était alors décidé de modifier la période d'appréciation des commissions réellement acquises sur la base d'une période de référence de six mois ainsi que cela ressort d'une note en date du 26 octobre 2001 dont l'appelant soutient qu'elle constitue une modification du contrat de travail justifiant la prise d'acte de la rupture;

Mais attendu que si la modification du taux de rémunération, la suppression des avances, la modification du secteur constituent des modifications [qui] ne peuvent intervenir sans l'accord du salarié il n'en est pas de même d'une simple modification d'une modalité d'exécution du contrat dès lors qu'elle ne porte pas atteinte aux droits du salarié;

Qu'il apparaît en effet qu'une stipulation du contrat de travail prévoit que les commissions sont payées sous réserve du paiement par le client des commandes et que les avances continuaient à être mensuellement payées et que, dès lors que le salarié a, le 6 mai 2002, demandé que ce système ne lui soit pas appliqué, la société Labelle a accepté de restaurer immédiatement la périodicité trimestrielle initiale et de procéder au règlement de la somme de 1 666,36 euro mentionnée sur le bulletin de paie du mois d'avril 2002;

Qu'ainsi, les faits reprochés à la société n'étaient pas de nature à justifier la prise d'acte de rupture deux semaines après que la société ait accepté la demande du salarié;

Attendu enfin que l'appelant soutient qu'un certain nombre d'annulations prétendues imputables à faute à la société, l'a privé d'un droit à commission et qu'il se fonde pour étayer sa prétention sur l'arrêt rendu par la cour de céans le 2 mai 2006 aux termes duquel la cour a fixé la créance de ce dernier au titre du solde de commissions et des congés payés afférents;

Attendu qu'il est constant que Monsieur Montagnier bénéficiait de commissions décomptées au taux de 4,6 % et que l'article 4 du contrat de travail disposait:

"... Monsieur Jean-Bernard Montagnier devra prendre les ordres auprès de la clientèle de son secteur, conformément aux prix et conditions générales de vente établis par la direction commerciale. Les ordres ne deviennent définitifs qu'à la confirmation de la société. La direction commerciale de la société Labelle se réserve le droit de modifier continuellement les prix et conditions générales de vente.

La société se réserve le droit de ne pas donner suite aux commandes transmises par Monsieur Jean-Bernard Montagnier sans que ce dernier puisse, de ce fait, réclamer une commission ou une indemnité quel que soit le motif de cette décision.

Monsieur Jean-Bernard Montagnier ne pourra consentir des conditions particulières à la clientèle qu'avec l'accord préalable de la direction commerciale sur ces conditions";

Que l'article 5 du contrat précise que les commissions ne seront exigibles que sur les ordres menés à bonne fin par encaissement du prix;

Attendu que cette clause de bonne fin est licite et qu'il ressort des éléments de la cause que, tous les trimestres, la société adressait au VRP un relevé de compte valant arrêté de compte tacitement accepté dès lors qu'il n'était pas contesté ni révisé, le salarié et l'employeur ayant ainsi manifesté leur accord définitif sur le montant des commissions alors qu'il apparaît en l'espèce que Monsieur Montagnier n'a jamais soulevé la moindre observation ni contestation sur ses arrêtés de compte, comprenant les suppressions, les annulations et les avoirs;

Attendu qu'il est soutenu, sans contradiction utile, que les suppressions de modèles ne résultaient pas d'une décision arbitraire de la société Labelle mais procédaient de la constatation non discutée de ventes insuffisantes ayant des résultats négatifs sur la fabrication et la diffusion des modèles;

Qu'il n'est en outre pas sérieusement contesté que la société a tenté de proposer un produit de remplacement alors qu'en tout état de cause la clause de bonne fin avait une incidence sur les annulations dont Monsieur Montagnier ne démontre qu'elles résultent d'une faute commise par la société;

Qu'il apparaît que, dans le cadre de l'expertise ordonnée par la cour de céans, Monsieur Montagnier a inclus, dans un premier temps, dans ses calculs, les annulations puis les suppressions alors qu'il n'avait justifié d'aucun rappel dû au titre des avoirs;

Qu'en effet, l'avoir implique que le client a reçu la marchandise et qu'on lui a facturé ou correspond à un retour de marchandise ou à une réduction sur le prix pour garder la marchandise;

Qu'il n'apparaît pas que les retours opérés étaient imputables à la société alors que le salarié recevait avec chaque bulletin de paie un état des avoirs, des annulations et suppressions du mois dont il ressort qu'ils n'ont jamais été contestés et que les annulations et suppressions sur ces décomptes représentent sur l'année plus de la moitié des avoirs;

Attendu que la société a soutenu que, compte tenu de l'absence de contestation de Monsieur Montagnier de ses arrêtés de comptes, elle n'a pas conservé les justificatifs des avoirs alors qu'elle n'a jamais été mise en demeure par le salarié de procéder à quelque régularisation que ce soit avant la prise d'acte de rupture;

Attendu également qu'aux termes de son rapport, l'expert désigné par la cour de céans, a constaté que les réclamations du salarié concernant les suppressions et les annulations n'avaient pas de raison particulière d'être prises en compte, sauf pour la période été 2002, sous réserve que le salarié puisse justifier de sa prétention, ce qu'il n'a pas fait;

Qu'en effet, l'expertise établit que la société, en l'absence de contestation, n'a pas conservé les preuves du bien-fondé des avoirs consentis et que si elle a conclu à la réintégration des avoirs et au paiement des commissions afférents au montant réintégré, cela ne résulte que de l'impossibilité pour la société de justifier du bien-fondé des avoirs et non d'une manœuvre délibérée;

Attendu en dernier lieu qu'il ressort des éléments versés aux débats que les commissions de l'appelant variaient entre 9 336 euro à 29 871 euro par trimestre;

Qu'ainsi c'est justement que les intimés font valoir que le non-paiement ne résultait pas d'une volonté délibérée de la société alors qu'il a fallu une expertise pour interpréter, a posteriori, les raisons des suppressions, annulations et avoirs en tout état de cause non imputables à faute à la société;

Qu'ainsi, il apparaît, alors que les premiers juges ont, par une inexacte appréciation des éléments de la cause, dit que le licenciement était fondé sur une faute grave alors que ce licenciement était sans effet pour avoir été notifié postérieurement à la prise d'acte de rupture, qu'aucun des faits invoqués par l'appelant n'est justifié ou susceptible de constituer un manquement suffisamment grave pour justifier la prise d'acte de rupture;

Qu'en conséquence, le jugement étant réformé, la prise d'acte de rupture doit produire les effets d'une démission et l'appelant sera débouté de ses demandes en paiement de préavis et de congés payés afférents d'indemnité de clientèle, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

Sur l'appel incident:

Attendu que c'est vainement que les intimés réclament à l'appelant le paiement d'une somme de 21 337 euro au titre du rachat de la clientèle mentionnée ci-dessus alors qu'en tout état de cause, ce solde réclamé n'apparaît pas suffisamment justifié et que l'appelant a perdu l'usage de la clientèle pour l'avenir au profit de la société employeur;

Attendu enfin que les intimés, ne justifiant pas d'un préjudice distinct résultant d'un comportement fautif de l'appelant, seront déboutés de leur demande en paiement de dommages et intérêts;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en matière prud'homale, autrement composée sur renvoi après cassation de l'arrêt rendu le 16 novembre 2004 par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Réforme le jugement déféré, et statuant à nouveau, Dit que la prise d'acte de rupture du contrat de travail en date du 20 mai 2002 produit les effets d'une démission, Déboute Monsieur Jean-Bernard Montagnier de l'ensemble de ses demandes; Déboute les intimés du surplus de leurs demandes; Condamne Monsieur Jean-Bernard Montagnier à supporter les entiers dépens.