CA Lyon, 3e ch. A, 28 janvier 2011, n° 09-002651
LYON
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Ain Agences (SARL)
Défendeur :
Fontaine
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Cuny
Conseillers :
M. Maunier, Mme Clozel-Truche
Avoués :
SCP Laffly-Wicky, SCP Baufume-Sourbe
Avocats :
Me Pacaut, SCP Rousseau-Lefebvre
Faits et procédure
Le 24/11/2003, la société Ain Agences et Olga Fontaine ont signé un contrat d'agent commercial, qui d'un commun accord a pris fin le 31/08/2007.
Par assignation délivrée le 27/02/2009, Madame Fontaine a poursuivi en justice la condamnation sous astreinte de la société Ain Agences à lui communiquer tous éléments utiles, notamment comptables, pour lui permettre de vérifier les commissions lui étant dues pour la période du 01/10/2006 au 31/08/2007, et à lui verser la somme de 12 800 euro au titre des commissions dues sur les ventes Duroux-Pinel/Chabanne et Helios/Guettet, ainsi que des dommages-intérêts pour résistance abusive et une indemnité pour frais d'instance.
Par jugement du 05/02/2010, le Tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse a :
- condamné la société Ain Agences à payer à Madame Fontaine la somme de 6 500 euro TTC, outre intérêt au taux légal à compter de l'assignation au titre des commissions lui revenant
- la somme de 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ailleurs selon l'énoncé des motifs, sans que cela soit repris dans le dispositif du jugement, les premiers juges ont débouté Madame Fontaine de sa demande tendant à la communication des renseignements concernant les affaires apportées par elle.
La société Ain Agences a interjeté appel le 06/04/2010.
Aux termes de ses uniques conclusions signifiées le 15/06/2010, elle sollicite l'infirmation du jugement du 05/02/2010 en ce qu'il a fait droit aux demandes de Madame Fontaine au titre du reliquat de commissions et sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, mais à sa confirmation en ce qu'il l'a déboutée de sa demande relative à la communication des éléments concernant les affaires traitées par elle. Elle demande l'application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en sa faveur.
Sur les commissions, elle expose que :
Aux termes de l'article 9 du contrat "En cas de rupture du présent contrat, et quelle qu'en soit la cause, l'agent commercial aura droit aux honoraires ... sur toutes les affaires qui seront définitivement conclues dans le délai de trois mois suivant la date de la rupture définitive et qui seront la suite du travail de prospection effectué par lui pendant l'exécution de son contrat" ;
Le contrat ayant pris fin le 31/08/2007, Madame Fontaine n'a aucun droit à commission sur les ventes litigieuses, qui n'ont été réitérées devant notaire qu'après l'expiration du délai de 3 mois suivant la rupture de son contrat, et précisément la vente Thevenet Chabanne le 20/12/2007 ;
Il importe peu que les compromis aient été signés avant l'expiration du délai de 3 mois, dès lors qu'ils étaient assortis de conditions suspensives ;
Admettre l'interprétation adverse priverait d'effet la clause limitant dans le temps le droit de suite de l'agent.
Sur la communication des éléments d'information, elle fait valoir qu'il appartenait à Madame Fontaine, comme l'ont retenu les premiers juges, de justifier a minima de la réalité de ses diligences, ce qu'elle n'a pas fait.
Aux termes de ses uniques conclusions, signifiées le 14/09/2010, Madame Fontaine sollicite la confirmation du jugement du 05/02/2010 en ce qu'il a fait droit à ses demandes au titre des commissions restant dues à hauteur de 6 500 euro, et fait application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en sa faveur, mais à son infirmation en ce qu'il l'a déboutée de sa réclamation aux fins de communication de tous renseignements utiles concernant les affaires apportées par elle, et dont les compromis de vente auraient été régularisés par une tierce personne, pour la période du 01/10/2006 au 31/08/2007, et ce sous astreinte de 100 euro par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir. Elle forme une demande d'indemnité complémentaire sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Sur le droit de suite, elle fait valoir que les ventes Helios Guettet et Thevenet qu'elle a apportées ont fait l'objet de compromis de vente signés dans le délai de trois mois suivant son départ, et, le compromis valant vente définitive, peu importe que leur réitération par acte notarié soit intervenue au-delà de ce délai.
Sur la communication des renseignements, elle se prévaut des dispositions de l'article R. 134-3, alinéa 2, du Code de commerce aux termes duquel : "L'agent commercial a le droit d'exiger de son mandant qu'il lui fournisse toutes les informations, en particulier un extrait des documents comptables nécessaires pour vérifier le montant des commissions qui lui sont dues", et en conséquence soutient qu'elle n'a pas à apporter préalablement la preuve des diligences qu'elle aurait accomplies.
Elle insiste sur la gêne financière dans laquelle l'a mise la résistance de la société Ain Agences.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 05/10/2010.
Sur ce
Sur la demande relative aux commissions
En application des dispositions de l'article L. 134-7 du Code de commerce :
"Pour toute opération conclue après la cessation du contrat d'agence, l'agent commercial a droit à la commission, soit lorsque la vente est principalement due à son activité au cours du contrat d'agence et a été conclue dans un délai raisonnable à compter de la cessation du contrat, soit lorsque, dans les conditions prévues à l'article L. 134-6, l'ordre du tiers a été reçu par le mandant ou par l'agent commercial avant la cessation du contrat d'agence".
En l'espèce, aux termes de l'article 9 du contrat "En cas de rupture du présent contrat, et quelle qu'en soit la cause, l'agent commercial aura droit aux honoraires ... sur toutes les affaires qui seront définitivement conclues dans le délai de trois mois suivant la date de la rupture définitive et qui seront la suite du travail de prospection effectué par lui pendant l'exécution de son contrat".
Le délai de trois mois prévu dans le dit article peut être considéré comme raisonnable au sens de l'article L. 134-7 du Code de commerce.
Il est constant que le contrat de Madame Fontaine a pris fin le 31/08/2007, et que les ventes litigieuses ont été définitivement conclues plus de trois mois après la fin du contrat le 30/11/2007, et précisément la vente Thevenet-Chabanne le 20/12/2007, et la vente SCI Le Devos (Helios) - Guettet le 14/01/2008.
En application des dispositions de l'article 9 du contrat, elles n'ouvrent pas droit à commission au bénéfice de Madame Fontaine.
La signature des compromis dans le délai de trois mois n'ouvrait pas droit à commission dès lors que, selon les éléments non contestés du dossier, ils ont été signés sous condition suspensive.
Sur la demande de communication des renseignements en vue de la vérification des commissions dues
En application des dispositions de l'article R. 134-3, alinéa 2, du Code de commerce "L'agent commercial a le droit d'exiger de son mandant qu'il lui fournisse toutes les informations, en particulier un extrait des documents comptables nécessaires pour vérifier le montant des commissions qui lui sont dues".
Il ressort de ce texte que le droit de communication est ouvert à l'agent commercial afin de vérifier le montant des commissions qui lui sont dues, mais encore faut-il que celui-ci fournisse préalablement un minimum d'éléments qui permettent de penser que ce droit à commission existe : identité du mandant, indication de l'immeuble, relevés de visite, copie d'agenda, ... ou à tout le moins les indique.
En conséquence, en l'espèce, Madame Fontaine ne fournit aucune indication, ni aucun élément relatif à un dossier, ou à un client, qu'elle aurait apportés à l'Agence et pour lesquels elle pourrait avoir droit à commission. Sa demande aux fins de communication des éléments comptables ne peut qu'être rejetée.
En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a fait droit à la demande au titre du reliquat de commissions, mais confirmé en ce qu'il a rejeté la demande aux fins de communication des éléments comptables sous astreinte.
Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties.
Les dépens de première instance et d'appel seront supportés par Madame Fontaine.
Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame Fontaine de sa demande aux fins de communication d'informations et de communication des documents comptables. L'infirme pour le surplus. Statuant à nouveau, Déboute Madame Fontaine de sa demande au titre des commissions sur les ventes Duroux-Pinel/Chabanne et SCI Le Devos/Guettet. Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile. Condamne Madame Fontaine aux dépens de première instance et d'appel, et dit que ces derniers seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.