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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 23 février 2011, n° 08-01352

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Parfums Ulric de Varens (SAS)

Défendeur :

SCA Produits d'entretien (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Fèvre

Conseillers :

MM. Roche, Vert

Avoués :

Me Teytaud, SCP Grappotte-Benetreau, Pelit-Jumel

Avocats :

Mes Le Calvez, Masker

T. com. Paris, du 19 déc. 2007

19 décembre 2007

LA COUR,

Vu le jugement du 19 décembre 2007 par lequel le Tribunal de commerce de Paris a débouté la société Parfums Ulric de Varens de sa demande indemnitaire dirigée à l'encontre de la société SCA Produits d'entretien au titre d'une rupture estimée abusive des relations commerciales jusqu'alors entretenues et l'a condamnée à verser la somme de 7 000 euro au titre des frais hors dépens ;

Vu l'appel interjeté par la société Parfums Ulric de Varens et ses conclusions du 10 juillet 2008 tendant à faire :

- dire abusive la décision de la société SCA Produits d'entretien de procéder au déréférencement de l'ensemble de ses produits,

- condamner l'intimée à lui payer la somme de 5 205 000 euro en réparation de ses préjudices, outre intérêts au taux légal,

- ordonner la publication - aux frais de la société SCA Produits d'entretien - de l'arrêt à intervenir dans cinq organes de presse économique et spécialisée à concurrence de 10 000 euro par insertion,

- condamner, enfin, la société SCA Produits d'entretien à payer la somme de 7 000 euro du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions de la société SCA Produits d'entretien du 16 juin 2008 et tendant à la confirmation du jugement ainsi qu'à la condamnation de la société Parfums Ulric de Varens au paiement de la somme de 10 000 euro au titre des frais hors dépens;

Considérant qu'il résulte de l'instruction les faits suivants :

La société SCA Produits d'entretien (ci-après désignée SCA), laquelle est une association de commerçants indépendants exerçant en France une activité de distribution au détail sous les enseignes Intermarché et Ecomarché, et la société Parfums Ulric de Varens, dont l'objet social est la production de parfums, étaient liées depuis 1994 par des accords annuels de coopération commerciale. Dans le cadre de ceux-ci la société Parfums Ulric de Varens versait une rémunération à sa cocontractante en contrepartie des actions effectuées par celle-ci aux fins de promouvoir la commercialisation de ses produits.

Toutefois, à partir de 2005, la société a, après l'avoir régulièrement augmenté pendant les années précédentes, réduit le nombre de produits de la société Parfums Ulric de Varens qu'elle référençait. Cette dernière a imputé cette baisse à son refus de participer aux opérations promotionnelles et philanthropiques de la société SCA tandis que celle-ci la justifiait par un souci de rationalisation.

Compte tenu de la détérioration ainsi observée de leurs relations commerciales, la société SCA a, par lettre du 22 mars 2006, informé la société Parfums Ulric de Varens de sa décision de mettre fin à leur partenariat à compter du 31 décembre suivant.

C'est dans ces conditions de fait et de droit que la société Parfums Ulric de Varens a assigné la société SCA devant le Tribunal de commerce de Paris aux fins d'indemnisation du préjudice lié au caractère qu'elle estimait abusif de la rupture intervenue.

Considérant que si l'appelante ne conteste pas que le déréférencement susmentionné de ses produits par la centrale d'achats SCA a été précédé d'un préavis de 9 mois, excluant ainsi toute allégation de brutalité vis-à-vis de la rupture intervenue, elle soutient, néanmoins, que celle-ci serait entachée d'un caractère abusif car fondée en réalité sur son refus de participer à une opération caritative et d'accepter des conditions tarifaires ne correspondant pas à un service effectivement et réellement rendu ;

Considérant, cependant et en premier lieu, qu'aucune pièce du dossier ne permet d'établir un quelconque lien entre la décision de la société Parfums Ulric de Varens telle qu'elle résulte de son courriel du 21 juillet 2005 de ne pas se joindre à l'opération " Enfance et Partage " organisée par l'intimée et la mesure de déréférencement litigieux ; qu'ainsi l'absence des produits de l'appelante sur le catalogue émis lors de l'opération dont s'agit n'est que la conséquence logique du souhait de l'intéressée de ne pas s'y associer et n'a nullement fait obstacle à la présentation ultérieure des ses produits lors de l'opération promotionnelle de Noël de la même année ;

Considérant, en second lieu, que si la société Parfums Ulric de Varens excipe des dispositions de l'article L. 442-6 du Code du commerce sans toutefois indiquer l'alinéa précis de ce texte qu'elle vise et si elle soutient à cet effet que les exigences tarifaires de l'intimée seraient " manifestement disproportionnées par rapport aux prestations effectivement fournies ", ce qui établirait le caractère fautif du déréférencement intervenu à la suite de son refus de se soumettre à de telles conditions tarifaires, il convient de relever que l'appelante, au-delà d'affirmations générales et non corroborées, ne justifie aucunement du caractère prétendument " disproportionné " des " exigences tarifaires " de son partenaire ; qu'à ce sujet si la société Parfums Ulric de Varens prétend qu'une diminution du nombre de produits référencés devrait nécessairement s'accompagner d'une baisse des taux de rémunération applicables à l'activité commerciale, l'intimée rétorque, sans que cet argument puisse être regardé comme entaché d'une quelconque irrationalité économique, que sa rémunération ne saurait être proportionnelle au nombre d'articles référencés mais à la nature et à la qualité des prestations de service mises en œuvre pour améliorer leur commercialisation et propose à cet effet une modulation de ses tarifs en fonction du chiffre d'affaires réalisé ; que, par suite, aucune disproportion manifeste par rapport au service rendu au sens de l'article susmentionné ne saurait être utilement opposé à l'intimée ; que les divergences exprimées par les parties sur les termes de leur relation à venir, et notamment sur le montant de la rémunération due à la société SCA, ne sont que l'expression de la liberté contractuelle manifestée par les intéressées lors de la recherche de la formalisation d'un éventuel nouvel accord de coopération; que dès lors, la persistance d'un désaccord sur l'élément essentiel que constitue le prix du service rendu par l'intimée a pu, sans faute ni abus de la part de cette dernière, la conduire à mettre fin à la relation existante ; qu'en conséquence et sans qu'il soit besoin de rechercher la réalité du préjudice dont fait état l'appelante, il convient de débouter cette dernière des ses prétentions indemnitaires ; qu'aucune circonstance de l'espèce ne justifie davantage le prononcé de la mesure de publicité de l'arrêt également sollicitée par cette dernière ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Sur l'application de l'article700 du Code de procédure civile

Considérant que l'équité commande en l'occurrence de condamner la société Parfums Ulric de Varens à verser à la société SCA la somme de 2 500 euro sur le fondement de l'article susvisé;

Par ces motifs, Confirme le jugement en toutes ses dispositions. Déboute la société Parfums Ulric de Varens de l'ensemble de ses prétentions. La condamne aux dépens d'appel avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile. La condamne également à verser à la société SCA la somme de 2 500 euro au titre des frais hors dépens.