CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 24 février 2011, n° 07-17613
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Rent a Car (SA)
Défendeur :
Locatio (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Perrin
Conseillers :
Mmes Touzery-Champion, Pomonti
Avoués :
SCP Gaultier-Kistner, SCP Oudinot Flauraud
Avocats :
Mes Privat, Rabary Njaka, Bezard Falgas
Le 24 juin 2003 la société Locatio a conclu avec la société Rent a Car un contrat de franchise pour l'exploitation d'une agence de location de véhicules sous la dénomination Rent a Car à Niort. Le franchisé pouvait commander les véhicules auprès des constructeurs de son choix ou de constructeurs ayant passé des accords avec son franchiseur.
Au vu de l'ensemble des commandes passées par ses franchisés, la société Rent a Car bénéficiait d'une prime de volume versée par le constructeur.
Le contrat de franchise prévoyait le versement d'une prime de réalisation correspondant à la prime de volume versée par le constructeur.
La société Locatio a revendiqué le paiement par son franchiseur de cette prime et, à ce titre, a établi deux factures pour un montant total de 51 446,69 euro correspondant à ses achats de véhicules de la marque Renault en 2003 et 2004.
La société Rent a Car n'a pas réglé ces factures et a invoqué des manquements de la société Locatio à ses obligations contractuelles et la résiliation du contrat de franchise intervenu en février 2004.
C'est dans ces conditions que le 21/12/2005, la société Locatio a assigné la société Rent a Car devant le Tribunal de commerce de Paris.
Par jugement du 27 janvier 2006 le Tribunal de commerce de Paris a condamné la société Rent a Car à payer à la société Locatio la somme de 51 446,69 euro augmentée des intérêts au taux légal et à 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
LA COUR,
Vu l'appel interjeté le 18 octobre 2007 par la société Rent a Car.
Vu les conclusions signifiées le 31 mai 2010 par lesquelles la société Rent a Car demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de débouter la société Locatio de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 12 000 euro à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu les conclusions signifiées le 31 août 2010 par lesquelles la société Location conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de la société Rent a Car à lui payer la somme de 6 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Sur ce,
Considérant que la société Rent a Car expose qu'elle a passé des accords avec les constructeurs auxquels le franchisé n'est pas partie ; que ces accords permettent aux franchisés qui le souhaitent de bénéficier de conditions financières préférentielles en contrepartie d'une affectation des véhicules achetés à la seule location de courte durée ; qu'elle bénéficie d'une prime de volume en fonction du volume des achats de l'ensemble du réseau et qu'elle verse à ses franchisés une prime de réalisation dite prime de volume une fois l'opération validée par le constructeur ; que la société Locatio ne peut prétendre à cette prime dans la mesure où elle n'a jamais exercé une activité de location, et où elle n'a pas respecté les conditions de durée fixées par le constructeur ce qui a conduit à la résiliation du contrat le 25 février 2004 ;
Que de plus Locatio réclame des primes de volume pour des véhicules acquis postérieurement à la résiliation du contrat de franchise ;
Considérant que la société Locatio fait valoir que la société Renault lui a livré de façon continue des véhicules, que la société Rent a Car ne s'y est jamais opposée et a bénéficié du versement de la prime de volume correspondante ;
Que si la prime de volume résultait d'un accord franchiseur-constructeur auquel le franchisé n'était pas partie, la société Rent a Car reconnaît qu'il avait été prévu le versement au franchisé d'une prime de volume liée à l'achat de véhicules dans le cadre du référencement et qui constituait une incitation à fidéliser l'ensemble du réseau du franchiseur vis-à-vis d'un constructeur déterminé ; qu'elle ne conteste pas que celle-ci correspond à la prime de volume accordée par le constructeur ;
Considérant que les statuts de la société Locatio visent l'exercice des activités de location, achat et vente de véhicules de toute nature ;
Que celle-ci affirme avoir effectivement exercé son activité de franchisé, loueur de véhicules à Niort ; qu'elle a réglé la facture de Rent a Car au titre de la redevance sur le chiffre d'affaire pour la période d'avril à octobre 2003 ;
Que si le chiffre d'affaire réalisé par Locatio au titre de la location de véhicules apparaît faible voire nul pour certains mois au regard du nombre de véhicules achetés, il convient de relever que les premiers achats sont intervenus en 2003 alors que le franchisé débutait son activité et devait constituer sa flotte de véhicules ; que la société Locatio justifie par ailleurs de difficultés particulières ayant marqué son début d'activité notamment la démission de son responsable d'agence ce qui est de nature à expliquer la faiblesse du chiffre d'affaires ; qu'il n'est en revanche pas démontré qu'elle n'a pas exercé l'activité de loueur de véhicules courte durée ;
Qu'il ne lui était pas fait interdiction de revendre les véhicules achetés sauf à respecter un délai propre aux différents constructeurs ; que la preuve n'est pas rapportée qu'elle ne l'a pas respecté ;
Considérant que les protocoles d'accord conclus par le franchiseur avec Renault, Opel, Iveco et Peugeot distinguent d'une part des remises correspondant aux accords conclus entre le franchisé et le concessionnaire et des primes de volume variables selon le type de véhicule allant de 0 à 5 %, avec pour Opel un objectif de 2 000 véhicules, pour Peugeot une prime de volume de 160 euro sous condition de l'achat par le franchisé de plus de 5 véhicules et de plus de 100 par le réseau au cours de l'année 2003, pour Iveco des primes fixes variables selon les modèles et à partir de 100 véhicules, qu'en revanche aucune condition de volume n'apparaît sur le protocole avec Renault ; que dès lors pour les achats auprès de ce constructeur, la prime de volume pouvait être calculée au fur et à mesure des achats référencés ;
Considérant que les factures produites ne concernent que des véhicules Renault et retiennent un taux conforme aux dits protocoles ;
Considérant que le franchiseur ne conteste pas avoir été avisé des achats réalisés par son franchisé ; qu'il n'est pas davantage contesté que ces véhicules ont été régulièrement payés par Locatio ; que Rent a Car ne justifie d'aucun grief formulé par le constructeur pour ne pas régler cette prime ; qu'elle ne démontre pas davantage que le franchisé aurait procédé à des reventes sans observer les délais imposés par le constructeur et visés dans le contrat de franchise ;
Considérant que la société Locatio a établi 7 factures au titre des véhicules de la marque Renault livrés en 2003 et jusqu'en juin 2004 ; qu'il y a lieu de se placer au moment de la commande ; que si Locatio verse des bons de commande postérieurs au 25 février 2004, date de la lettre de lettre de résiliation versée par Rent a Car, elle ne rapporte pas la preuve de sa réception par la société Locatio et Rent a Car ne peut se prévaloir de son envoi comme fixant la date de résiliation ;
Considérant que c'est à juste titre que les premiers juges ont condamné la société Rent a Car à payer la somme de 51 446,69 euro ;
Considérant que l'action de la société Locatio est légitime ; qu'il y a lieu de confirmer la décision entreprise qui a rejeté la demande de la société Rent a Car en dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Et considérant que la société Locatio a engagé des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge ; qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif et de rejeter la demande de la société Rent a Car à ce titre ;
Par ces motifs, Confirme le jugement entrepris, Rejette toute autre demande, fin ou conclusions, Condamne la société Rent a Car à payer à la société Locatio la somme de 4 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et rejette la demande de la société Rent a Car à ce titre, Condamne la société Rent a Car aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.