TUE, 8e ch., 24 mars 2011, n° T-378/06
TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
IMI Plc, IMI Kynoch Ltd, Yorkshire Fittings Ltd, VSH Italia Srl, Comap SA, Simplex Armaturen + Fittings GmbH & Co. KG
Défendeur :
Commission européenne
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Martins Ribeiro
Juges :
MM. Wahl (rapporteur), Dittrich
Avocats :
Mes Struys, Arts, Kinsella, Nordlander
LE TRIBUNAL (huitième chambre),
Antécédents du litige et décision attaquée
1 Par la décision C (2006) 4180, du 20 septembre 2006, relative à une procédure d'application de l'article 81 [CE] et de l'article 53 de l'accord EEE (Affaire COMP/F-1/38.121 ? Raccords) (résumé au JO 2007, L 283, p. 63, ci-après la " décision attaquée "), la Commission des Communautés européennes a constaté que plusieurs entreprises avaient enfreint l'article 81, paragraphe 1, CE et l'article 53 de l'accord sur l'Espace économique européen (EEE) en participant, au cours de différentes périodes comprises entre le 31 décembre 1988 et le 1er avril 2004, à une infraction unique, complexe et continue aux règles communautaires de concurrence revêtant la forme d'un ensemble d'accords anticoncurrentiels et de pratiques concertées sur le marché des raccords en cuivre et en alliage de cuivre, qui couvraient le territoire de l'EEE. L'infraction consistait à fixer les prix, à convenir de listes de prix, de remises et de ristournes et de mécanismes d'application des hausses des prix, à répartir les marchés nationaux et les clients et à échanger d'autres informations commerciales ainsi qu'à participer à des réunions régulières et à entretenir d'autres contacts destinés à faciliter l'infraction.
2 Les requérantes, IMI Plc, IMI Kynoch Ltd, VSH Italia Srl, Yorkshire Fittings Ltd, Comap SA, anciennement Aquatis France SAS (ci-après " Aquatis ") et Simplex Armaturen + Fittings GmbH & Co. KG (ci-après " Simplex "), figurent parmi les destinataires de la décision attaquée.
3 Les requérantes sont, ou étaient à l'époque des faits, des fabricants de raccords en cuivre.
4 En août 2002, les activités de production de raccords du groupe IMI, dont faisaient partie Yorkshire Fittings, VSH Italia, Aquatis et Simplex, ont été vendues à Aalberts Industries NV.
5 Le 9 janvier 2001, Mueller Industries Inc., un autre producteur de raccords en cuivre, a informé la Commission de l'existence d'une entente dans le secteur des raccords, et dans d'autres industries connexes sur le marché des tubes en cuivre, et de sa volonté de coopérer au titre de la communication de la Commission concernant la non-imposition d'amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 1996, C 207, p. 4, ci-après la " communication sur la coopération de 1996 ") (considérant 114 de la décision attaquée).
6 Les 22 et 23 mars 2001, dans le cadre d'une enquête concernant les tubes et les raccords en cuivre, la Commission a effectué, en application de l'article 14, paragraphe 3, du règlement nº 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles [81 CE] et [82 CE] (JO 1962, 13, p. 204), des vérifications inopinées dans les locaux de plusieurs entreprises (considérant 119 de la décision attaquée).
7 À la suite de ces premières vérifications, la Commission a, en avril 2001, scindé son enquête portant sur les tubes en cuivre en trois procédures distinctes, à savoir la procédure relative à l'affaire COMP/E-1/38.069 (Tubes sanitaires en cuivre), celle relative à l'affaire COMP/F-1/38.121 (Raccords) et celle relative à l'affaire COMP/E-1/38.240 (Tubes industriels) (considérant 120 de la décision attaquée).
8 Les 24 et 25 avril 2001, la Commission a effectué d'autres vérifications inopinées dans les locaux de Delta Plc, société à la tête d'un groupe de génie international dont le département " Ingénierie " regroupait plusieurs fabricants de raccords. Ces vérifications portaient uniquement sur les raccords (considérant 121 de la décision attaquée).
9 À partir de février/mars 2002, la Commission a adressé aux parties concernées plusieurs demandes de renseignements en application de l'article 11 du règlement nº 17, puis de l'article 18 du règlement (CE) nº 1-2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1) (considérant 122 de la décision attaquée).
10 En septembre 2003, IMI a présenté une demande visant à bénéficier de la communication sur la coopération de 1996. Cette demande a été suivie par celles du groupe Delta (mars 2004) et de FRA.BO SpA (juillet 2004). La dernière demande de clémence a été présentée en mai 2005 par Advanced Fluid Connections Plc (considérants 115 à 118 de la décision attaquée).
11 Le 22 septembre 2005, la Commission a, dans le cadre de l'affaire COMP/F-1/38.121 (Raccords), engagé une procédure d'infraction et a adopté une communication des griefs, laquelle a notamment été notifiée aux requérantes (considérants 123 et 124 de la décision attaquée).
12 Le 20 septembre 2006, la Commission a adopté la décision attaquée.
13 À l'article 1er de la décision attaquée, la Commission a constaté que les requérantes avaient enfreint les dispositions de l'article 81 CE et de l'article 53 de l'accord EEE pour les périodes suivantes :
- du 31 décembre 1988 au 22 mars 2001, en ce qui concerne IMI, IMI Kynoch et Yorkshire Fittings ;
- du 15 mars 1994 au 22 mars 2001, en ce qui concerne VSH Italia ;
- du 31 janvier 1991 au 22 mars 2001, en tant que membres du groupe IMI, et du 25 juin 2003 au 1er avril 2004, en tant que membres du groupe Aalberts Industries, en ce qui concerne Aquatis et Simplex.
14 Pour cette infraction, la Commission a, à l'article 2, sous b), de la décision attaquée, infligé aux destinataires de cette dernière les amendes suivantes :
- IMI et IMI Kynoch ont été tenues solidairement responsables d'une amende de 48,30 millions d'euro, pour laquelle elles ont été tenues solidairement responsables avec Yorkshire Fittings pour 9,64 millions d'euro, avec VSH Italia pour 0,42 million d'euro, avec Aquatis pour 48,30 millions d'euro et avec Simplex pour 48,30 millions d'euro ;
- Aquatis et Simplex ont été tenues solidairement responsables d'une amende supplémentaire de 2,04 millions d'euro.
15 Aux fins de fixer le montant de l'amende infligée à chaque entreprise, la Commission a fait application, dans la décision attaquée, de la méthode définie dans les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17 et de l'article 65, paragraphe 5, [CA] (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les " lignes directrices de 1998 ").
16 S'agissant, d'abord, de la fixation du montant de départ de l'amende en fonction de la gravité de l'infraction, la Commission a qualifié l'infraction de très grave, en raison de sa nature même et de sa portée géographique (considérant 755 de la décision attaquée).
17 Estimant qu'il existait une disparité considérable entre les entreprises concernées, la Commission a procédé à un traitement différencié, se fondant à cet effet sur leur importance relative sur le marché en cause déterminée par leurs parts de marché. Sur cette base, elle a réparti les entreprises concernées en six catégories (considérant 758 de la décision attaquée).
18 Les requérantes ont été classées dans la deuxième catégorie, catégorie pour laquelle le montant de départ de l'amende a été fixé à 46 millions d'euro. Aquatis et Simplex se sont vu imposer un deuxième montant de départ de 60 millions d'euro (qui correspond au montant de départ imposé aux entreprises classées dans la première catégorie) en raison de leur implication répétée dans l'infraction sous contrôle d'Aalberts Industries (considérant 765 de la décision attaquée).
19 Du fait de la durée de la participation d'IMI, d'IMI Kynoch et de Yorkshire Fittings à l'infraction (douze ans et deux mois), la Commission a ensuite majoré l'amende de 110 %, à savoir 5 % par an pour les deux premières années et 10 % pour chaque année complète, à compter du 31 janvier 1991, pour les dix années restantes (considérant 775 de la décision attaquée), ce qui a abouti à fixer le montant de base de l'amende à 96,6 millions d'euro (considérant 777 de la décision attaquée). Le montant de départ de l'amende de VSH Italia a été majoré de 70 %, ce qui a abouti à un montant de base de 78,2 millions d'euro. Quant à Aquatis et à Simplex, leur premier montant de départ a été majoré de 100 % (pour une participation de dix ans sous le contrôle d'IMI), donnant lieu à un montant de base de 92 millions d'euro, et leur deuxième montant de départ a quant à lui été majoré de 5 % (pour une participation de neuf mois sous le contrôle d'Aalberts Industries), ce qui a abouti à un montant de base de 63 millions d'euro.
20 Ensuite, au titre des circonstances aggravantes, le deuxième montant de base de l'amende infligée à Aquatis et à Simplex a été majoré de 60 % au motif qu'elles avaient participé à l'infraction après les inspections, ce qui a ainsi abouti à un montant de l'amende de 100,8 millions d'euro. Aucune autre circonstance aggravante ou atténuante n'a été appliquée aux requérantes.
21 Enfin, IMI et IMI Kynoch ont bénéficé d'une réduction de 50 % de l'amende qui leur a été infligée en vertu du titre D, paragraphe 2, premier et deuxième tirets, de la communication sur la coopération de 1996 (considérants 836 à 843 de la décision attaquée).
Procédure et conclusions des parties
22 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 14 décembre 2006, les requérantes ont introduit le présent recours.
23 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale.
24 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l'audience qui s'est tenue le 8 février 2010.
25 Lors de l'audience, les requérantes ont informé le Tribunal qu'elles se désistaient du cinquième moyen, tiré de la violation du principe non bis in idem qui serait résultée de l'imposition de l'amende supplémentaire à Aquatis et à Simplex. Le Tribunal a pris acte de ce désistement partiel.
26 Les requérantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal :
- annuler l'article 2, sous b), points 1 et 2, de la décision attaquée ;
- à titre subsidiaire, réduire le montant des amendes qui leur ont été infligées ;
- condamner la Commission aux dépens.
27 La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :
- rejeter le recours comme non fondé ;
- condamner les requérantes aux dépens.
En droit
Sur la recevabilité
28 La Commission soulève une exception de litispendance à l'encontre du recours en ce qu'il a été formé par Aquatis et Simplex. À cet égard, la Commission fait remarquer qu'Aquatis et Simplex ont attaqué la même décision dans deux recours en annulation différents, à savoir le recours formé dans la présente affaire, qui aurait été déposé le 15 décembre 2006, et celui formé dans l'affaire T-385-06, Aalberts Industries e.a./Commission, qui aurait été déposé le 14 décembre 2006, et que, dans ces deux recours, Aquatis et Simplex demandent, notamment, l'annulation de l'article 2, sous b), point 2, de la décision attaquée. Étant donné que les motifs sur lesquels se fondent les moyens d'annulation dans les deux affaires se recoupent, une violation de l'article 253 CE en ce qui concerne le montant de l'amende supplémentaire de 2,04 millions d'euro qui leur a été infligée étant alléguée dans les deux recours, et que le recours dans la présente affaire serait chronologiquement le second, il devrait dès lors être déclaré irrecevable en ce qui concerne Aquatis et Simplex.
29 Selon une jurisprudence constante, lorsque, entre deux recours introduits successivement, il y a identité de parties, d'objet et de moyens, celui introduit en second doit être rejeté comme irrecevable (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 19 septembre 1985, Hoogovens Groep/Commission, 172-83 et 226-83, Rec. p. 2831, point 9, et du 22 septembre 1988, France/Parlement, 358-85 et 51-86, Rec. p. 4821, point 12).
30 À cet égard, il y a lieu de relever que tant les requérantes dans l'affaire T-385-06 que celles dans la présente affaire reprochent à la Commission d'avoir violé son obligation de motivation au titre de l'article 253 CE en infligeant une amende supplémentaire d'un montant de 2,04 millions d'euro à Aquatis et à Simplex indépendamment des autres amendes pour lesquelles elles ont été tenues solidairement responsables avec IMI et Aalberts Industries.
31 Dès lors, dans la mesure où le recours dans l'affaire T-385-06 et celui dans la présente affaire tendent à l'annulation de la même disposition [à savoir l'article 2, sous b), point 2, de la décision attaquée], où ils opposent les mêmes parties (Aquatis et Simplex à la Commission) et où ils se fondent sur les mêmes moyens (le quatrième moyen dans les deux affaires), il y a litispendance.
32 À cet égard, il convient de préciser que, contrairement à ce que la Commission affirme, les deux recours ont été introduits le 14 décembre 2006 et non à deux dates différentes. Étant donné que le recours dans l'affaire T-385-06 a été déposé en premier au greffe du Tribunal (par télécopie et par courriel), il y a lieu de relever que l'exception de litispendance est fondée. Par ailleurs, le numéro d'affaire a été attribué en fonction de la date de dépôt de l'original de la requête.
Sur le fond
33 À la suite du retrait de leur cinquième moyen lors de l'audience et compte tenu de l'irrecevabilité du quatrième moyen pour cause de litispendance, il n'y a lieu d'examiner que le bien-fondé de trois moyens, tirés, respectivement :
- de la violation des principes de proportionnalité et d'égalité de traitement lors de la fixation du montant de départ de l'amende ;
- d'une erreur manifeste d'appréciation et de la violation du principe de proportionnalité tenant à l'inclusion des ventes de raccords à sertir dans la définition du marché pertinent pour toute la durée de l'entente afin d'apprécier la gravité de l'infraction ;
- d'une erreur manifeste d'appréciation ainsi que de la violation de l'obligation de motivation et du principe d'égalité de traitement s'agissant de l'absence de prise en compte par la Commission, en dehors du champ d'application de la communication sur la coopération de 1996, de leur coopération ayant consisté à fournir des preuves du lien existant entre les arrangements passés sur le marché des raccords du Royaume-Uni et l'entente paneuropéenne.
Sur le premier moyen, tiré de la violation des principes de proportionnalité et d'égalité de traitement lors de la fixation du montant de départ de l'amende
- Arguments des parties
34 Les requérantes soutiennent que la Commission a violé le principe de proportionnalité ainsi que le principe d'égalité de traitement en leur infligeant une amende " excessive " par rapport à leur taille et à la taille du marché pertinent, ainsi que cela ressortirait d'une comparaison avec l'approche adoptée par la Commission dans ses décisions antérieures.
35 À cet égard, les requérantes font observer que la possibilité d'effectuer des comparaisons avec d'autres décisions de la Commission rendues en matière d'amendes a été autorisée par le Tribunal dans son arrêt du 27 septembre 2006, Archer Daniels Midland/Commission (T-59-02, Rec. p. II-3627), en vertu du principe d'égalité de traitement. Selon les requérantes, une telle " analyse comparative " s'avère également justifiée en vertu du principe de proportionnalité afin d'apprécier si le montant de l'amende considéré comme adéquat et dissuasif dans un cas d'espèce correspond aux montants des amendes qui ont été considérés comme adéquats et dissuasifs dans des " affaires contemporaines " dont les circonstances sont comparables.
36 Dans ce contexte, afin de démontrer la violation des principes d'égalité de traitement et de proportionnalité, les requérantes font référence à une série de décisions de la Commission, parmi lesquelles figurent la décision 2006-485-CE, du 3 septembre 2004, relative à une procédure d'application de l'article 81 [CE] et de l'article 53 de l'accord EEE à l'encontre de Boliden AB, Boliden Fabrication AB et Boliden Cuivre & Zinc SA, d'Austria Buntmetall AG et Buntmetall Amstetten GmbH, d'Halcor SA, de HME Nederland BV, d'IMI, IMI Kynoch et IMI Yorkshire Copper Tube Ltd, de KM Europa Metal AG, Tréfimétaux SA et Europa Metalli SpA, de Mueller Industries, WTC Holding Company, Inc., Mueller Europe Ltd, DENO Holding Company, Inc. et DENO Acquisition EURL, d'Outokumpu Oyj et Outokumpu Copper Products OY, ainsi que de Wieland-Werke AG (Affaire C.38.069 - Tubes sanitaires en cuivre) (résumé au JO 2006, L 192, p. 21), la décision 2004-421-CE, du 16 décembre 2003, relative à une procédure d'application de l'article 81 [CE] et de l'article 53 de l'accord EEE à l'encontre de Wieland-Werke, Outokumpu Copper Products, Outokumpu Oyj, KM Europa Metal, Tréfimétaux et d'Europa Metalli (Affaire COMP/E-1/38.240 - Tubes industriels) (résumé au JO 2004, L 125, p. 50), la décision 2005-349-CE, du 10 décembre 2003, relative à une procédure d'application de l'article 81 [CE] et de l'article 53 de l'accord EEE (Affaire COMP/E-2/37.857 - Péroxydes organiques) (résumé au JO 2005, L 110, p. 44), et la décision 2006-460-CE, du 17 décembre 2002, relative à une procédure d'application de l'article 81 [CE] et de l'article 53 de l'accord EEE à l'encontre de SGL Carbon AG, Le Carbone-Lorraine SA, Ibiden Co., Ltd, Tokai Carbon Co., Ltd, Toyo Tanso Co., Ltd, GrafTech International, Ltd, NSCC Techno Carbon Co., Ltd, Nippon Steel Chemical Co., Ltd, Intech EDM BV et Intech EDM AG (Affaire C.37.667 - Graphites spéciaux) (résumé au JO 2006, L 180, p. 20).
37 Les requérantes font valoir que les affaires ayant donné lieu à ces quatre décisions sont comparables du point de vue de la nature et de la durée de l'infraction, de l'impact de cette dernière sur le marché et de la taille du marché géographique concerné. Selon elles, les infractions en cause dans ces affaires ont été, comme celle faisant l'objet de la présente affaire, qualifiées comme comptant parmi " les plus graves " infractions à l'article 81 CE, avaient un objet restrictif de concurrence qui a été mis en œuvre, couvraient l'ensemble du marché commun ou de l'EEE et, à l'exception de celle en cause dans l'affaire dite des " Graphites spéciaux " qui était une infraction d'une durée plus courte, il s'agissait d'infractions de longue durée. De plus, ces infractions auraient concerné, dans une large mesure, la même période. Les requérantes soulignent que l'affaire dite des " Tubes sanitaires en cuivre " offre une comparaison " particulièrement pertinente " avec la présente affaire, car elle aurait fait initialement l'objet de la même enquête que celle qui a été diligentée dans la présente affaire, car elle concernerait plusieurs sociétés qui seraient également impliquées dans la présente affaire, car les produits concernés seraient issus du même secteur d'activité que celui dont seraient issus les produits en cause dans la présente affaire, car le marché géographique en cause serait identique à celui en cause dans la présente affaire, car la période d'infraction correspondrait avec celle constatée dans la présente affaire et elle concernerait une infraction de même nature que celle en cause dans la présente affaire. Les requérantes font observer que le montant de départ de l'amende infligée à un participant classé dans la deuxième catégorie dans l'affaire dite des " Tubes sanitaires en cuivre ", s'agissant d'un chiffre d'affaires sur le marché pertinent deux fois plus élevé que celui dans la présente affaire, ne représente qu'une fraction du montant de départ arrêté dans le cas d'espèce. En outre, le caractère disproportionné des amendes qui ont été infligées dans la présente affaire serait encore plus " frappant " si le niveau des montants de départ était comparé par million de chiffre d'affaires. Une telle comparaison permettrait de relever que le montant de départ par million de chiffre d'affaires est de plus de 75 % plus élevé dans la présente affaire que dans celle dite des " Tubes sanitaires en cuivre ". Selon les requérantes, une comparaison avec le montant de départ des amendes des participants classés dans la deuxième catégorie dans les trois autres affaires conduit à une conclusion analogue.
38 La Commission conclut au rejet du présent moyen.
- Appréciation du Tribunal
39 Dans le cadre du premier moyen, les requérantes reprochent, en substance, à la Commission d'avoir violé les principes de proportionnalité et d'égalité de traitement en leur infligeant une amende " excessive " par rapport à leur taille et à la taille du marché pertinent, ainsi que cela ressortirait d'une comparaison avec l'approche adoptée par la Commission dans ses décisions antérieures, plus particulièrement, son approche concernant le montant de départ des amendes pour les entreprises classées dans la deuxième catégorie. À cet égard, il y a lieu d'observer que, mis à part une référence générale effectuée à l'article 5 CE concernant le principe de proportionnalité, les requérantes fondent uniquement leur argumentation sur une comparaison avec d'autres décisions, sans remettre en cause en elle-même la proportionnalité du montant de l'amende qui leur a été infligée par rapport à l'infraction constatée.
40 S'agissant de la pratique décisionnelle de la Commission, il convient de rappeler que celle-ci ne sert pas de cadre juridique pour la fixation du montant des amendes en matière de concurrence, la Commission disposant dans ce domaine d'un large pouvoir d'appréciation dans l'exercice duquel elle n'est pas liée par les appréciations qu'elle a portées antérieurement (arrêt de la Cour du 24 septembre 2009, Erste Bank der österreichischen Sparkassen/Commission, C-125-07 P, C-133-07 P, C-135-07 P et C-137-07 P, Rec. p. I-8681, point 123).
41 Toutefois, il y a lieu de souligner que la Commission est tenue de respecter les principes généraux de droit, parmi lesquels figure le principe d'égalité de traitement, qui implique que la Commission ne peut traiter des situations comparables de manière différente ou des situations différentes de manière identique, à moins qu'un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt de la Cour du 28 juin 1990, Hoche, C-174-89, Rec. p. I-2681, point 25, et la jurisprudence citée).
42 Il convient de relever à cet égard qu'il ressort de la jurisprudence que les comparaisons effectuées avec d'autres décisions de la Commission rendues en matière d'amendes ne peuvent être pertinentes au regard du respect du principe d'égalité de traitement que s'il est démontré que les données circonstancielles des affaires relatives à ces autres décisions, telles que les marchés, les produits, les pays, les entreprises et les périodes concernées, sont comparables avec celles de l'espèce. Il ressort également de la jurisprudence qu'il importe d'invoquer des décisions contemporaines à des fins de comparaison (voir, en ce sens, arrêt Archer Daniels Midland/Commission, point 35 supra, point 317, et la jurisprudence citée).
43 En l'espèce, en faisant référence à d'autres affaires à des fins de comparaison, les requérantes visent à remettre en cause le montant de départ qui a été fixé pour la deuxième catégorie de participants à l'infraction en cause, montant qui serait disproportionné par rapport au montant de départ des entreprises classées dans la deuxième catégorie dans les décisions de la Commission relatives auxdites affaires. À cet égard, il convient de constater qu'il résulte des lignes directrices de 1998 que le calcul du montant de l'amende est effectué selon un certain schéma, dans le cadre duquel sont pris en compte la gravité et la durée de l'infraction ainsi que l'existence d'éventuelles circonstances aggravantes ou atténuantes. Lorsqu'il existe une disparité considérable entre les entreprises concernées, la Commission peut, en ce qui concerne la fixation du montant de départ, procéder à un traitement différencié des participants à l'infraction. Toutefois, cela n'implique pas obligatoirement la fixation d'une amende prédéterminée par catégorie, car cela aurait pour effet de diminuer la marge d'appréciation dont dispose la Commission. En outre, les données sous-jacentes d'un traitement différencié peuvent varier considérablement d'une affaire à l'autre. À cet égard, le fait qu'un destinataire soit classé, aux fins d'une décision donnée, dans la catégorie des destinataires de deuxième catégorie ne signifie pas qu'il doive dès lors être traité de la même manière que les destinataires de deuxième catégorie d'une autre décision ayant des parts de marché différentes sur d'autres marchés.
44 Or, il convient de constater qu'il apparaît que les circonstances de l'entente faisant l'objet de la décision attaquée diffèrent de celles de l'entente ayant fait l'objet de la décision adoptée dans l'affaire dite des " Tubes sanitaires en cuivre " et de celle ayant fait l'objet de la décision adoptée dans l'affaire dite des " Tubes industriels ". En effet, la taille des marchés diffère, de même que les parts de marché des participants à l'infraction. À cet égard, il est à noter que les participants de la deuxième catégorie dans l'affaire dite des " Tubes sanitaires en cuivre " avaient des parts de marché plus faibles, à savoir entre 9 et 10 %, que les participants de deuxième catégorie dans la présente affaire, à savoir entre 19 et 22 %, et qu'ils étaient donc moins susceptibles d'exercer une influence sur le marché que les requérantes. En outre, la part de marché combinée des participants à l'entente dans la présente affaire représente 95 % du marché total, tandis que, dans l'affaire dite des " Tubes sanitaires en cuivre ", la part de marché combinée des participants à l'entente n'était que de 82,5 % et, dans l'affaire dite des " Tubes industriels ", que de 75 %. Compte tenu de ces différences, il y a lieu de conclure que les requérantes n'ont pas démontré que les décisions auxquelles elles font référence avaient été adoptées s'agissant d'affaires dont les circonstances étaient suffisamment semblables à celles entourant la présente affaire pour être utilisées à des fins de comparaison.
45 Il résulte de ce qui précède que ce moyen doit être rejeté.
Sur le deuxième moyen, tiré d'une erreur manifeste d'appréciation et de la violation du principe de proportionnalité tenant à l'inclusion des ventes de raccords à sertir dans la définition du marché pertinent pour toute la durée de l'entente afin de déterminer le montant de l'amende infligée aux requérantes
- Arguments des parties
46 Les requérantes soutiennent, en substance, qu'un type particulier de raccords en cuivre, à savoir les raccords à sertir, n'a fait l'objet de l'infraction qu'à partir des années 1999-2000. Partant, la Commission aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en incluant les ventes de raccords à sertir dans la définition du marché pertinent, rendant ainsi l'amende disproportionnée par rapport à la gravité de l'infraction sanctionnée.
47 Les requérantes font valoir qu'elles ne contestent pas que, d'un point de vue technique, les raccords à sertir puissent être substituables à d'autres types de raccords en cuivre, mais que cela ne suffit pas à démontrer que les raccords à sertir sont substituables à ces autres raccords d'un point de vue économique. Selon les requérantes, au considérant 635 de la décision attaquée, la Commission n'a pas expliqué en quoi, étant donné les conditions concurrentielles relatives aux raccords à sertir, les prix des autres types de raccords résultant de l'entente avaient influencé les prix des raccords à sertir avant les années 1999-2000. De plus, la Commission ne tiendrait aucun compte du fait que Viega GmbH & Co. KG a détenu un " monopole de fait " sur le marché des raccords à sertir jusque dans les années 1999-2000. En outre, selon les requérantes, les réponses de Viega et de Sanha Kaimer GmbH & Co. KG lors de l'audition qui s'est tenue les 26 et 27 janvier 2006 dans le cadre de la procédure administrative concernant la question de la substituabilité, portent sur la période postérieure à 1999. Par ailleurs, la déclaration faite par IMI dans sa demande de clémence du 30 septembre 2003, par laquelle elle a décrit l'évolution du secteur des raccords au cours des dix dernières années, aurait été mal interprétée par la Commission. Dans le contexte du caractère substituable des raccords à sertir, les requérantes sont d'avis que le principe issu de l'arrêt de la Cour du 8 juillet 1999, Hüls/Commission (C-199-92 P, Rec. p. I-4287), n'est pas applicable au cas d'espèce et est, en tout état de cause, non pertinent.
48 Étant donné la taille plus limitée du marché couvert par l'entente pendant la période d'infraction initiale de dix ans, soit jusque dans les années 1999-2000, il aurait été plus approprié, comme la Commission l'a fait pour les deux premières années pendant lesquelles l'entente était limitée au Royaume-Uni, de majorer le montant de l'amende, au titre de la durée de l'infraction, de 5 au lieu de 10 % s'agissant de la période d'infraction antérieure aux années 1999-2000.
49 La Commission conclut au rejet du moyen.
- Appréciation du Tribunal
50 Dans le cadre de ce moyen, les requérantes prétendent, en substance, que, lors de la fixation du montant de départ de l'amende, la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation et a violé le principe de proportionnalité en décidant d'inclure les ventes de raccords à sertir dans le marché pertinent.
51 Selon la jurisprudence, le marché visé par une décision de la Commission constatant une infraction à l'article 81 CE est déterminé par les accords et les activités de l'entente (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Tokai Carbon e.a./Commission, T-71-03, T-74-03, T-87-03 et T-91-03, non publié au Recueil, point 90). Or, selon le considérant 634 de la décision attaquée, l'enquête de la Commission a montré que, à différents moments de la période de mise en œuvre de l'entente, tous les types et toutes les tailles de raccords, les raccords à sertir inclus, avaient fait l'objet de discussions anticoncurrentielles.
52 Il est à noter à cet égard que, puisque les marchés et la technologie concernant les produits en cause ont tendance à évoluer avec le temps, il y a lieu de s'attendre, lorsqu'une entente est mise en place, à ce que les produits couverts par l'entente changent également afin de s'adapter aux nouvelles caractéristiques du marché.
53 En l'espèce, il est constant que les raccords à sertir et les raccords traditionnels en cuivre ont la même fonction, à savoir l'assemblage de tubes dans des systèmes de raccords en cuivre et de raccords à sertir. En outre, comme les requérantes le font valoir elles-mêmes, les raccords à sertir ont été développés pour remplacer les raccords en cuivre.
54 Il est également constant que Viega, un autre membre de l'entente portant sur les raccords et qui a participé à celle-ci de 1991 jusqu'aux inspections de la Commission en 2001, a commencé à commercialiser des raccords à sertir en 1995. Elle fut le seul fournisseur de raccords à sertir pendant la période comprise entre les années 1995-1996 et les années 1999-2000, les autres fabricants de raccords n'ayant commencé à commercialiser des raccords à sertir qu'à partir des années 1999-2000. En outre, il ressort du dossier administratif que les raccords à sertir ont fait l'objet de discussions entre les membres de l'entente dès que tous les membres de l'entente avaient commencé à les produire, ce qui n'est pas non plus contesté par les requérantes.
55 S'il est vrai que les raccords à sertir ont fait l'objet de l'entente à un stade tardif de la mise en œuvre de celle-ci, cela ne remet pas en cause le constat selon lequel les raccords à sertir ont fait l'objet de discussions anticoncurrentielles à partir des années 1999-2000. Par ailleurs, les requérantes ne mettent pas en doute le choix de l'année 2000 comme étant l'année de référence pour le calcul du montant de l'amende.
56 Dès lors, la Commission était habilitée à prendre en considération le chiffre d'affaires réalisé en 2000 avec tous les types et toutes les tailles de raccords, y compris les raccords à sertir, lors de la fixation du montant de départ de l'amende, étant donné que ces derniers font partie du marché pertinent. Par conséquent, l'argument tiré de la violation du principe de proportionnalité, tenant à l'inclusion des ventes de raccords à sertir dans la définition du marché pertinent, doit être écarté.
57 S'agissant de l'argument selon lequel la Commission aurait dû majorer l'amende de 5 au lieu de 10 % pour la période antérieure aux années 1999-2000, afin de tenir compte de la taille plus réduite du marché des raccords pendant ladite période, il convient de rappeler que la Commission a, conformément aux lignes directrices de 1998, qualifié l'infraction de très grave eu égard à sa nature (notamment la fixation des prix) et à l'importance du marché géographique concerné. À cet égard, la Commission a appliqué le point 1 B des lignes directrices de 1998, qui prévoit que, pour les " infractions de longue durée (en général au-delà de 5 ans) ", le montant peut être fixé " pour chaque année à 10 % du montant retenu pour la gravité de l'infraction ". En outre, il convient de relever que, pour autant que les variations de l'intensité des effets des infractions au cours de la période d'infraction ne modifient pas le classement de l'infraction en fonction de sa gravité, la Commission peut appliquer le même taux de majoration (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, Prym et Prym Consumer/Commission, T-30-05, non publié au Recueil, point 196). En l'espèce, étant donné que l'infraction revêtait un caractère " très grave " pendant toute la période en cause, la Commission était donc en droit d'appliquer le même taux de majoration pour toute la période d'infraction.
58 Le fait que la Commission a appliqué, à titre exceptionnel, un taux réduit pour les deux premières années ne remet pas en cause cette conclusion. À cet égard, il convient de rappeler que la gravité de l'infraction est appréciée en fonction de toute une série de critères, parmi lesquels figure la taille du marché géographique concerné. En l'espèce, afin de tenir compte de la taille plus limitée du marché géographique concerné au début de l'infraction, la Commission a décidé d'appliquer un taux réduit pour cette période. Cette approche n'implique nullement qu'elle soit obligée de faire de même pour une infraction de longue durée ayant une dimension paneuropéenne et pour laquelle les participants ont élargi leur collusion au fil du temps, d'autant plus que l'intégration des raccords à sertir dans le domaine d'application de l'entente ne signifie pas qu'elle était moins grave ou que sa portée était moins étendue pendant les années antérieures à l'année 2000.
59 Il résulte de ce qui précède que ce moyen doit être rejeté comme non fondé.
Sur le troisième moyen, tiré d'une erreur manifeste d'appréciation ainsi que de la violation de l'obligation de motivation et du principe d'égalité de traitement s'agissant de l'absence de prise en compte par la Commission, en dehors du champ d'application de la communication sur la coopération de 1996, de la coopération des requérantes ayant consisté à fournir des preuves du lien existant entre les arrangements passés sur le marché des raccords du Royaume-Uni et l'" entente paneuropéenne "
- Arguments des parties
60 Les requérantes soutiennent qu'elles ont fourni, dans le cadre de la demande de clémence formée par IMI, les informations factuelles concernant le lien existant entre les arrangements passés sur le territoire du Royaume-Uni et l'entente paneuropéenne. Elles ne contestent pas que la Commission était déjà en possession d'informations concernant le volet au Royaume-Uni de l'infraction, mais elles estiment que, sans les informations qu'elles lui ont fournies, la Commission n'aurait pas été en mesure d'établir le lien entre la période pendant laquelle l'entente avait été mise en œuvre à l'échelle du Royaume-Uni et celle où elle l'avait été à l'échelle européenne. Ces informations auraient permis à la Commission de considérer les agissements anticoncurrentiels commis à partir de 1988 comme étant constitutifs d'une seule infraction continue.
61 Les requérantes soutiennent que les preuves qu'elles ont fournies à la Commission et qui auraient permis à celle-ci d'engager des poursuites à l'encontre des arrangements passés sur le territoire du Royaume-Uni comme faisant partie intégrante de l'entente paneuropéenne et, par conséquent, d'élargir sa constatation de la portée de l'infraction, tant sur le plan temporel que géographique, ont été essentielles pour déterminer la gravité et la durée de l'infraction. Dès lors, elles auraient dû bénéficier d'un traitement privilégié en dehors du champ d'application de la communication sur la coopération de 1996.
62 Dans la réplique, les requérantes soulignent que, sans les informations qu'elles ont fournies concernant le lien entre les arrangements passés sur le territoire du Royaume-Uni et l'entente paneuropéenne, la Commission se serait heurtée aux délais de prescription, prévus à l'article 25 du règlement n° 1-2003, et n'aurait pas pu infliger de sanctions pour les infractions commises sur le territoire du Royaume-Uni entre 1988 et 1991.
63 Les requérantes font également valoir une insuffisance de motivation à cet égard. La Commission n'aurait pas, au considérant 827 de la décision attaquée, motivé de manière claire le raisonnement qui l'a amenée à considérer qu'IMI n'avait pas apporté la preuve d'un lien entre les arrangements passés sur le territoire du Royaume-Uni et l'entente paneuropéenne.
64 Enfin, les requérantes estiment avoir été l'objet d'inégalité de traitement par rapport à FRA.BO. À cet égard, les requérantes font observer que cette dernière s'était vu accorder, pour avoir averti la Commission de la poursuite de l'entente pendant la période comprise entre mars 2001 et avril 2004, une réduction du montant de l'amende qui lui avait été infligée pour avoir coopéré en dehors du champ d'application de la communication sur la coopération de 1996. Dans ce contexte, les requérantes soulignent le parallélisme entre leur situation et celle de FRA.BO.
65 La Commission conclut au rejet du présent moyen.
- Appréciation du Tribunal
66 Dans le cadre de ce moyen, les requérantes font valoir, en substance, qu'elles étaient en droit de bénéficier d'une réduction du montant de l'amende qui leur a été infligée en dehors du champ de la communication sur la coopération de 1996 pour avoir fourni à la Commission des éléments de preuve qui ont permis à celle-ci de démontrer l'existence d'un lien entre les arrangements passés sur le territoire du Royaume-Uni et l'entente paneuropéenne.
67 S'agissant, en premier lieu, de l'allégation de l'insuffisance de la motivation, il importe de relever qu'il est de jurisprudence constante que la motivation d'une décision individuelle doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l'institution, auteur de l'acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d'exercer son contrôle. L'exigence de la motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l'espèce. Il n'est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d'un acte satisfait aux exigences de l'article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l'ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink's France, C-367-95 P, Rec. p. I-1719, point 63, et la jurisprudence citée).
68 En l'espèce, la Commission a indiqué, au considérant 827 de la décision attaquée, que la requérante n'a pas démontré dans ses déclarations le lien existant entre les arrangements passés sur le territoire du Royaume-Uni et l'entente européenne, pas plus qu'elle n'a établi de distinction entre ces arrangements. À cet égard, la Commission renvoie au considérant 132. Il ressort dudit considérant que la requérante a donné les principales caractéristiques de l'entente sans pour autant faire une différence entre la période initiale, limitée au territoire du Royaume-Uni, et la poursuite de l'entente au niveau paneuropéen. Le fait que cette constatation puisse être erronée n'est pas susceptible de remettre en cause le caractère suffisant de la motivation de la décision attaquée, la détermination de l'existence d'une telle erreur relevant du contrôle de la légalité au fond de ladite décision.
69 Il s'ensuit que le grief tiré d'une insuffisance de motivation doit être rejeté.
70 S'agissant, en second lieu, du fond, il y a lieu de relever tout d'abord que la communication sur la coopération de 1996 est applicable en l'espèce. Il est également à noter que cette communication ne prévoit pas de réduction spécifique du montant de l'amende pour l'entreprise qui divulgue des faits relatifs à la gravité ou à la durée d'une entente que la Commission ignorait précédemment. Dans un tel cas, la Commission a la possibilité d'accorder à une entreprise ayant coopéré avec elle au cours d'une procédure d'application des règles de concurrence, une réduction du montant de l'amende en dehors du cadre fixé par la communication sur la coopération de 1996, en application du point 3, sixième tiret, des lignes directrices de 1998, qui prévoit la prise en compte, en tant que circonstance atténuante, de la " collaboration effective de l'entreprise à la procédure, en dehors du champ d'application de la [communication sur la coopération de 1996] ". S'il est vrai que la Commission a récompensé la divulgation de faits en dehors de ladite communication dans sa pratique décisionnelle, elle l'a fait dans des situations exceptionnelles.
71 Or, en l'espèce, il est constant que la Commission possédait déjà des preuves provenant, d'une part, des vérifications inopinées dans les locaux de Delta et d'IMI (voir considérants 183 et 185 de la décision attaquée) et, d'autre part, des informations que lui avait fournies Mueller Industries en 2001 dans le cadre de sa demande de clémence, c'est-à-dire bien avant que les requérantes n'aient soumis leur demande de clémence. En outre, la Commission avait déjà eu connaissance du fait que tant les requérantes que Delta, ainsi que d'autres entreprises, avaient participé à la fois aux arrangements passés sur le territoire du Royaume-Uni et à l'entente paneuropéenne, qui portaient sur le même produit. Elle avait également connaissance du fait que les arrangements passés sur le territoire du Royaume-Uni reposaient sur le même principe de fixation de prix que l'entente paneuropéenne (voir considérant 135 de la décision attaquée). Dès lors, il est exclu que la Commission n'était pas en mesure de prouver le lien existant entre les deux volets de l'infraction en l'absence des informations fournies par les requérantes.
72 Il s'ensuit que la Commission était en droit d'estimer que les requérantes n'avaient divulgué aucun fait relatif à la gravité ou à la durée de l'entente dont elle n'avait déjà connaissance et d'apprécier leur coopération uniquement dans le cadre des dispositions énoncées sous le titre D, paragraphe 2, de la communication sur la coopération de 1996.
73 En ce qui concerne la prétendue inégalité de traitement entre IMI et IMI Kynoch, d'une part, et FRA.BO, d'autre part, il suffit de constater qu'elles ne se trouvaient pas dans une situation comparable, étant donné que, sans les informations fournies par FRA.BO relatives à la poursuite de l'infraction au cours de la période allant de mars 2001 à avril 2004, la Commission n'aurait pas été en mesure de prouver cette période d'infraction, et ce d'autant plus qu'elle n'en avait même pas connaissance. À cet égard, les éléments de preuve fournis par IMI relatifs à la période comprise entre 1988 et 1991 n'ont pas permis d'attirer l'attention de la Commission sur le fonctionnement de l'entente durant cette période. La Commission avait d'ailleurs déjà assez de preuves à sa disposition concernant cette période et a fait le lien entre ladite période et celle ayant débuté en 1991. Dès lors, la Commission n'a pas violé le principe d'égalité de traitement en traitant FRA.BO et les requérantes de manière différente.
74 Il s'ensuit que le troisième moyen doit être rejeté comme non fondé.
75 Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté dans son intégralité.
Sur les dépens
76 En vertu de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé en leurs conclusions, il y a lieu de les condamner aux dépens conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (huitième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) IMI Plc, IMI Kynoch Ltd, Yorkshire Fittings Ltd, VSH Italia Srl, Comap SA et Simplex Armaturen + Fittings GmbH & Co. KG sont condamnées aux dépens.