Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 8 avril 2011, n° 09-10298

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

John Galliano (SA)

Défendeur :

Seripress (SARL), Senechal (ès qual.), Gay (ès qual.), Scentest (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Girardet

Conseillers :

Mmes Regniez, Nerot

Avoués :

SCP Hardouin, SCP Bommart- Forster-Fromantin, SCP Gerigny Freneaux

Avocats :

Mes Escande, Fournet, Giudice

T. com. Paris, du 3 avr. 2009

3 avril 2009

La société Seripress qui a pour activité la création, l'impression et la commercialisation de sérigraphies se prévaut de la titularité de droits d'auteur sur deux modèles de dessins, créés en 2004 par Corinne Simon, représentant un laçage entrecroisé passant dans des œillets qui se termine par un nœud et de leur commercialisation, depuis cette date, dans ses collections.

Ayant découvert que des sous-vêtements supportant un dessin de laçage similaire aux siens étaient commercialisés dans un magasin de Megève sous la marque John Galliano, elle a fait pratiquer, dûment autorisée, une saisie-contrefaçon dans les locaux de la société John Galliano puis dans ceux de sa licenciée, la société Les Jardins d'Avron, le 19 juin 2007, et enfin au siège social de la société Scentest Creafloc, fournisseur des sérigraphies litigieuses, le 11 juillet 2007, avant d'assigner ces trois sociétés aux fins de les voir condamnées à réparer le préjudice qu'elle déclare avoir subi du fait de leurs actes de contrefaçon de droit d'auteur, de concurrence déloyale et de parasitisme.

Par jugement rendu le 3 avril 2009 le Tribunal de commerce de Paris a, avec exécution provisoire sauf pour les mesures de destruction et de publication:

- dit que les dessins référencés 65614 et 65615 dans la collection de la société Seripress sont originaux et protégeables, qu'en fabriquant et commercialisant des sérigraphies reproduisant les caractéristiques de ces deux dessins, la société Scentest Creafloc s'est rendue coupable d'actes de contrefaçon et qu'en faisant fabriquer puis apposer ces dessins sur des modèles de bustier, de string, de shorty, de soutien-gorge et de caraco et en les commercialisant les sociétés John Galliano et Les Jardins d'Avron se sont également rendues coupables d'actes de contrefaçon,

- interdit à ces trois sociétés de fabriquer, faire fabriquer, importer, distribuer, commercialiser et/ou présenter à la vente tous articles reproduisant " les dessins de la société Seripress " sous astreinte de 1 500 euro par infraction constatée passé le délai de 48 heures à compter de la signification du jugement,

- condamné in solidum les sociétés Les Jardins d'Avron, John Galliano et Scentest Creafloc à payer à la société Seripress la somme indemnitaire de 50 000 euro au titre de la contrefaçon,

- dit que les sociétés Les Jardins d'Avron et Scentest Creafloc se sont rendues coupables d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme et les a condamnées in solidum à payer à la société Seripress la somme de 20 000 euro en réparation du préjudice subi à ce titre,

- dit que la société Scentest Creafloc s'est rendue coupable d'actes de parasitisme et l'a condamnée à verser à la société Seripress la somme de 20 000 euro à titre de dommages-intérêts,

- ordonné la destruction des articles reproduisant les dessins contrefaisant les dessins référencés 65614 et 65615 qui seront trouvés tant au siège de ces trois sociétés qu'au sein de l'ensemble de leurs filiales, établissements secondaires, succursales, usines, sous-traitants, grossistes détaillants et autres revendeurs, ce sous contrôle d'huissier de justice au choix de la société Seripress et à ses frais avancés qui lui seront remboursés par les trois sociétés in solidum sur simple présentation des factures justificatives, passé le délai de 8 jours à compter de la signification du jugement,

- ordonné la publication de l'intégralité du dispositif de la décision dans cinq journaux ou revues au choix de la société Seripress et aux frais des trois sociétés tenues in solidum sans que le coût par insertion ne puisse excéder 5 000 euro ainsi que sur la page d'accueil des sites internet accessibles aux adresses www.scentest.com et www.johngalliano.com, et ce pendant une durée de deux mois passé le délai de 48 heures à compter de la signification du jugement,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes respectives,

- condamné in solidum les sociétés Les Jardins d'Avron, John Galliano et Scentest Creafloc à payer à la société Seripress la somme 15 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens " y compris tous frais de saisie-contrefaçon ".

Le 28 février 2009, la société Les Jardins d'Avron a fait l'objet d'une transmission universelle de patrimoine au profit de la société John Galliano.

Par dernières conclusions signifiées le 30 avril 2010, la société anonyme John Galliano, (appelante, avec la société par actions simplifiée Les Jardins d'Avron, du jugement) demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et :

- à titre principal, de considérer que les dessins de laçage référencés 65614 et 65615 revendiqués par la société Seripress ne sont pas protégeables par le droit d'auteur, que cette dernière est mal fondée à arguer de ses droits d'auteur sur la base des caractéristiques revendiquées et de la débouter, en conséquence, de l'ensemble de ses prétentions,

- à titre subsidiaire, de dire que les articles incriminés ne contrefont pas les dessins de laçage revendiqués et de débouter, en conséquence, la société Seripress de l'ensemble de ses prétentions,

- en tout état de cause :

* de dire que la société Les Jardins d'Avron n'a pas commis d'actes de concurrence déloyale et parasitaire et, en conséquence, de débouter la société Seripress de ses prétentions,

* de la débouter de ses demandes indemnitaires tant au titre de la contrefaçon qu'au titre de la concurrence déloyale ainsi qu'en ses demandes d'interdiction, de destruction et de publication,

* de débouter la société Scentest Creafloc de sa demande en garantie formulée à l'encontre de la société John Galliano, la société Les Jardins d'Avron n'existant plus en tant que telle,

* de condamner la société Seripress à lui payer la somme de 15 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

La société à responsabilité limitée Seripress, par dernières conclusions signifiées le 6 mai 2010 puis le 1er mars 2011, demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, de dire que les mesures de publication feront mention de l'arrêt à intervenir et de condamner les sociétés John Galliano et Scentest au paiement de la somme complémentaire de 20 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, en supportant les dépens de l'instance, y compris le coût des opérations de saisie-contrefaçon.

Par uniques conclusions de constitution d'intervention volontaire en reprise d'instance et au fond signifiées le 28 février 2011, Maître Francisque Gay, agissant en qualité d'administrateur judiciaire de la société Scentest et désigné par jugement ouvrant une procédure de redressement judiciaire rendu le 2 décembre 2009 par le Tribunal de commerce de Nanterre puis maintenu en cette fonction par jugement de cette juridiction rendu le 31 mars 2010, et la SCP BTSG en la personne de Maître Marc Sénéchal, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Scentest désigné par même jugement, demandent à la cour:

- de déclarer Maître Francisque Gay et la SCP BTSG en la personne de Maître Marc Sénéchal, ès qualités, recevables et fondés en leur intervention volontaire en reprise d'instance et en leur appel incident,

- d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter la société Seripress de ses entières prétentions en mettant la société Scentest hors de cause,

- subsidiairement, de dire que les sociétés John Galliano et Les Jardins d'Avron devront garantir le montant des condamnations éventuellement mises à la charge de la société Scentest,

- en tout état de cause, de condamner la société Seripress et tous succombant à lui verser la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

Sur l'originalité des dessins référencés 65614 et 65615

Considérant que pour en contester l'originalité, la société John Galliano appelante soutient que les deux définitions que donne la société Seripress de ses laçages sont trop larges et ne répondent pas aux conditions d'ouverture de la protection par le droit d'auteur qui nécessite que celui qui invoque des droits d'auteur sur une réalisation détermine les contours de son œuvre ;

Qu'elle fait également valoir qu'au regard de l'art antérieur, les laçages apparaissant sur les deux croquis revendiqués sont exclusifs de tout effort de création et par trop banals pour permettre de revendiquer une quelconque protection au titre de la propriété littéraire et artistique, relevant incidemment que la date de création de ces dessins présente une incertitude

Considérant que pour revendiquer le bénéfice de la protection légale sur ses œuvres, la société Seripress présente de la façon suivante la combinaison des éléments les caractérisant :

dessin référencé 65614

- un dessin en trompe-l'œil,

- représentant un laçage passant par des œillets suspendus dans l'espace,

- représentant la texture des lacets de telle façon que l'observateur puisse ressentir la douceur de leur velours,

- représentant des lacets se croisant en passant par des œillets de couleur ocre, dont l'écartement s'amoindrit du haut vers le bas du dessin,

- montrant le plissage de chaque lacet au moment du passage dans chaque œillet,

- sur lequel apparaît en terminaison du laçage un gros nœud dont les boucles sont plus courtes que les extrémités du lacet,

- représentant un tombé des boucles qui résulte d'un choix esthétique évident

dessin référencé 65615

- son originalité réside dans la combinaison des caractéristiques précitées,

- étant précisé que les lacets sont de couleur marron et que le dessin est d'un format plus petit et plus large,

Considérant que si, comme le soutient l'appelante, l'originalité d'une œuvre suppose la démonstration d'un apport créatif, reflet de la personnalité de son auteur, celle-ci doit être appréciée dans la forme que lui a donnée son auteur, résultant de la combinaison des éléments caractéristiques précités en sorte qu'il convient de rechercher, dans les nombreuses pièces que communique l'appelante afin d'en dénier l'originalité, si celle-ci peut être retrouvée dans des combinaisons de laçage divulguées avant le mois de septembre 2004 (date correspondant à une commande d'échantillons, selon facture n° 54112 adressée à la société Les jardins d'Avron-John Galliano, produite en pièce 24), étant rappelé que, pour détruire l'originalité d'une œuvre, il ne suffit pas que soient connus les différents éléments qui la caractérisent, pris isolément ;

Qu'à cet égard, force est de relever qu'aucune des pièces produites par l'appelante - qu'il s'agisse de laçages de corsets apparus depuis plusieurs siècles (pièces 3 et 4), de l'emploi de la couleur rose (pièce 1), de l'ornementation, au moyen de laçages, d'articles de mode, de collants ou chaussettes, de pâtisseries ou encore de mobilier (pièces 2, 3, 24, 19 et 36) - et qui concernent, d'ailleurs, pour partie, des créations postérieures à la date de septembre 2004, ne reprend l'ensemble des caractéristiques dans la combinaison revendiquée ;

Que celle-ci ne résulte pas de la mise en œuvre d'un procédé de fabrication ou d'une nouvelle destination assignée à un objet connu ni ne ressort d'un genre appartenant au domaine public, comme le soutient l'appelante, mais se singularise par la représentation graphique en trompe-l'œil du laçage croisé, à travers deux séries d'œillets obliquement disposés, d'un ruban dont la texture est suggérée par le dessin de son plissé et de ses reflets ainsi que par le choix du nœud simple par lequel il se referme, retombant en bouffant avec de courtes extrémités, dont la combinaison porte l'empreinte de la personnalité de son créateur et atteste d'un effort créatif ;

Que c'est, par conséquent, à juste titre que les premiers juges ont considéré que les deux sérigraphies revendiquées sont éligibles à la protection par le droit d'auteur ;

Sur la contrefaçon

Considérant que l'appelante reproche au tribunal d'avoir retenu l'existence d'une contrefaçon en se référant à des notions étrangères au droit d'auteur, comme le consommateur d'attention moyenne ou l'appréciation globale, et, soulignant la multiplicité des éléments qui différencient les dessins revendiqués et les modèles argués de contrefaçon (couleur, nombre d'œillets et, conséquemment, positionnement de l'extrémité du ruban, inscription " Galliano " sur une boucle, fond de papier-journal constituant un thème récurrent de ses collections), fait valoir que les seuls éléments communs relèvent du domaine public ;

Que Maître Gay et la SCP BTSG, ès qualités, développent de semblables moyens, ajoutant que la société Scentest, simple prestataire convaincue de l'absence d'un quelconque monopole, a agi en toute bonne foi ;

Mais considérant que la contrefaçon s'apprécie par les ressemblances et non par les différences ;

Qu'en l'espèce, est reproduit sur le bustier et le string dont il est débattu un dessin de laçage au moyen d'un ruban de couleur verte qui en suggère la texture, passe par deux séries d'œillets de couleur claire (au nombre de 2 x 11 pour le bustier, de 2 x 3 pour le string) disposées en oblique et se termine par un nœud bouffant dont l'une des extrémités qui sont coupées légèrement au dessous des boucles, supporte le signe " Galliano " en lettres gothiques ;

Que si les dessins ainsi reproduits comportent, certes, les différences recensées par la société Galliano, celles-ci n'apparaissent qu'à la faveur d'un examen attentif et se révèlent mineures et insignifiantes ; qu'elles ne permettent pas d'écarter le grief de contrefaçon qui résulte de la reprise des caractéristiques qui fondent l'originalité des deux dessins revendiqués ;

Que, par motifs substitués, le jugement sera confirmé en ce qu'il a imputé à faute aux sociétés John Galliano et Les Jardins d'Avron ainsi qu'à la société Scentest Creafloc dont l'argumentation tirée de sa bonne foi est inopérante devant la juridiction civile, des actes de contrefaçon;

Sur les actes de concurrence déloyale reprochés à la société Galliano ;

Considérant que la société Galliano (au profit de laquelle l'intégralité du patrimoine de la société Les Jardins d'Avron a été transféré) reproche également au tribunal d'avoir retenu, au titre de la concurrence déloyale, un manquement de cette dernière à la loyauté consistant en la fabrication et la commercialisation d'articles sur lesquels sont reproduites des sérigraphies de la société Seripress et ceci en parfaite connaissance des droits de cette dernière sur ses dessins ;

Qu'elle soutient que l'action en concurrence déloyale n'est pas un succédané de l'action en contrefaçon, qu'est exclu, au cas particulier, tout risque de confusion pour la clientèle entre les modèles et sur leur origine, qu'admettre que l'éventuelle connaissance de produits antérieurs puisse constituer un fait distinct de la contrefaçon reviendrait à reconnaître l'existence d'actes de concurrence déloyale de manière presque systématique, que la société Seripress n'établit les relations commerciales et les rapports de confiance dont elle tire indûment argument que par la seule production d'une commande d'échantillonnage contenant, qui plus est, des incohérences internes et enfin, qu'en tout état de cause, les motifs adressés par la société Les Jardins d'Avron à son sous-traitant, la société Scentest Creafloc, diffèrent du dessin 65614 soumis comme échantillonnage par la société Seripress ;

Mais considérant que la société Seripress n'invoque, à l'encontre de la société John Galliano, qu'un manquement à son obligation de loyauté tiré du fait qu'elle lui a adressé un échantillonnage du dessin référencé 65614 et que la société Les Jardins d'Avron, sans lui en passer commande, les a fait fabriquer par la société Scentest Creafloc et commercialisés en parfaite connaissance de ses droits ;

Qu'outre le fait qu'elle produit, en pièce 24, une commande d'échantillonnage portant sur un échantillon référencé " G0E65614 - ruban lacé rose " attestant, à la date du 09 septembre 2004, de son expédition à la société Les Jardins d'Avron - étant relevé que cette " confirmation de commande " pour le client " GalliJ " comporte une erreur manifeste sur la date de la " commande gratuite " dont l'appelante ne peut valablement tirer argument -, il ressort du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 11 juillet 2007 dans les locaux de la société Scentest Creafloc (pièce 22) que le dessin présenté par la gérante de cette société comme étant " le dessin fourni par Galliano " (annexe 1) est la reproduction servile, sans adjonction d'un nom de marque ni modification du nombre d'œillets (2 x 8), du dessin revendiqué ;

Que Maître Gay et la SCP BTSG, produisent, quant à eux (selon leur pièce n°4) le dessin dont ils déclarent qu'il a été remis par un préposé de la société Jardin d'Avron (Madame Roquette) à la société Scentest, en novembre 2004, après une entrée en relations lors du salon de Lyon qui s'est tenu en septembre 2004 ; qu'il s'avère qu'hormis l'apposition du signe " Galliano " sur le ruban, il reproduit le dessin référencé 65614 ;

Qu'elle démontre ainsi que les sociétés Les Jardin d'Avron et Galliano ont, en toute connaissance de cause et au mépris du principe de loyauté qui doit présider aux relations entre des entreprises concurrentes, fait fabriquer et commercialisé des produits en profitant des efforts créatifs de la société Seripress qui lui avait, en toute confiance, adressé gratuitement des échantillonnages de ses collections et en générant un préjudice commercial né du risque de confusion dans l'esprit de la clientèle ;

Que le jugement mérite donc confirmation sur ce point;

Sur les actes de concurrence déloyale et de parasitisme reprochés à la société Scentest Creafloc

Considérant que, déniant la matérialité de ces faits, Maître Gay et la SCP BTSG, ès qualités, reprochent au tribunal d'avoir retenu que la société Scentest Creafloc était cliente de la société Seripress depuis janvier 2003, qu'elle connaissait l'ensemble des collections de ses catalogues et ne pouvait ignorer les droits qu'elle détenait sur le dessin de laçage référencé 63185 dans son catalogue 2003 ; qu'ils estiment que ces motifs ne reposent sur aucun élément et affirment que la société n'a jamais été cliente de Seripress et que, selon le cahier des charges imposé par la société les Jardins d'Avron, elle n'a aucune part active dans la conception du modèle ;

Mais considérant que la société Seripress, produisant une confirmation de commande gratuite n° 27963 du 16 janvier 2003, qui portait sur 22 références d'échantillons de ses collections et qui a été expédiée au siège de la société Creafloc, dans les Yvelines, le lendemain (pièce 25) prouve qu'elle était, dès cette date et dans un climat de confiance, en relation d'affaires avec cette dernière ;

Que si, pour établir que ce sous-traitant a eu un comportement déloyal à son égard en 2004, la société Seripress ne peut tirer argument de la présence, dans sa collection 2003, d'un dessin de laçage référencé 63185 qui ne présente pas les mêmes caractéristiques que celles qui fondent l'originalité des deux dessins litigieux (pièces 27 et 28), c'est, en revanche, à juste titre qu'elle soutient que la société Scentest, qui a " redimensionné " les sérigraphies adressées par la société Les Jardins d'Avron, dont les représentants s'abstiennent de produire le cahier des charges la liant à la société Les Jardins d'Avron invoqué alors que la société Galliano dénie l'existence d'un quelconque document de cette nature, et qui a agi en qualité de professionnelle de la sérigraphie sans s'assurer de la titularité des droits sur les dessins litigieux, a, par des procédés exempts de loyauté, commis des faits de même nature que ceux reprochés à la société John Galliano ;

Que les sociétés Seripress et Scentest Creafloc se trouvant en situation de concurrence, les griefs invoqués par la société Seripress doivent être appréhendés non sur le terrain du parasitisme mais sur celui de la concurrence déloyale, étant de surcroît relevé que la cour a déjà répondu aux moyens tirés du profit réalisé sur les investissements d'autrui et du risque de confusion dans l'esprit de la clientèle qu'elle reprend ;

Que, par motifs substitués, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu l'existence de faits de concurrence déloyale imputables à la société Scentest mais infirmé du chef du parasitisme ;

Sur les mesures réparatrices

Considérant que l'appelante reprend l'argumentation développée en première instance ; qu'elle porte une appréciation critique sur les documents produits au soutien de la demande indemnitaire et mettant en exergue la faible valeur patrimoniale des dessins revendiqués, la faiblesse des gains réalisés sur la vente, en France, des 346 sous-vêtements supportant le graphisme litigieux (soit : 16 492 euro) dont le prix tenait essentiellement à la référence à l'" univers Galliano " et l'absence de démonstration d'une perte de clientèle ;

Qu'elle ne débat pas de la reproduction de ces sérigraphies sur d'autres vêtements, shorty, caraco et soutien-gorge, incidemment évoqués, sans débats, par la société Seripress et par le tribunal, mais entend voir minorer le quantum des condamnations prononcées à son encontre;

Qu'elle conteste, par ailleurs, le fait qu'aient été prononcées des condamnations in solidum avec la société Scentest, faisant actuellement l'objet d'une procédure collective, alors que les faits qui leur sont reprochés divergent;

Que Maître Gay et la SCP BTSG affirment, quant à eux, que la société Scentest, n'est, en l'absence de faute, redevable d'aucune indemnité, sollicitant subsidiairement la garantie de la société Galliano de toute éventuelle condamnation prononcée à son encontre;

Mais considérant qu'eu égard aux éléments déjà soumis à l'appréciation des premiers juges, à savoir l'acquisition, par la société Les Jardins d'Avron, de 4 540 transferts fournis par la société Scentest Creafloc, la vente de 432 exemplaires de strings et de 115 exemplaires de bustiers, sous la marque Galliano et sous le nom de " trompe l'œil " (au prix de 348 euro TTC), sur les coûts de création, les investissements et le préjudice commercial de la société Seripress ainsi que sur la banalisation de graphismes litigieux, c'est à juste titre qu'ils ont fixé à la somme de 50 000 euro le montant de la réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon

Que l'évaluation du montant des dommages-intérêts alloués à la société Seripress venant sanctionner le comportement déloyal des sociétés Les jardins d'Avron (dont le patrimoine a été transmis à la société Galliano) et Scentest à son endroit sera également confirmé ;

Que ces deux sociétés, participant aux mêmes faits, seront tenues à réparation in solidum, étant précisé que la dette de la société Scentest, objet d'une procédure collective, ne peut faire l'objet que d'une fixation de créance ;

Que par motifs pertinents que la cour adopte, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de garantie à nouveau formée par les représentants de la société Scentest ;

Qu'il y a lieu, enfin, de confirmer les mesures accessoires prononcées, sauf à ajouter aux mesures de publication ordonnées, ainsi que requis, mention de la chose jugée par le présent arrêt ; que le jugement sera, toutefois, infirmé en ce qu'il a ordonné une mesure de destruction qui ne s'impose pas ;

Sur les mesures accessoires

Considérant que l'équité conduit à condamner la société John Galliano à verser à la société Seripress la somme complémentaire de 5 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile et à rejeter les demandes des autres parties de ce chef ;

Que, s'agissant des dépens, le jugement sera réformé en ce qu'il y a inclus les frais afférents aux saisies-contrefaçon susceptibles de ressortir de frais non compris dans les dépens ;

Que la société John Galliano qui succombe supportera les dépens d'appel ;

Par ces motifs, Confirme le jugement déféré à l'exception de ses dispositions portant sur les actes de parasitisme, les mesures de destruction ordonnées et les dépens, mais seulement en ce qu'y sont inclus les frais de saisie, et, statuant à nouveau en modifiant, pour l'actualiser, le libellé des mesures de publication ordonnées et en y ajoutant ; Déboute la société à responsabilité limitée Seripress de sa demande de condamnation au titre du parasitisme ; Dit n'y avoir lieu à destruction des articles reproduisant les dessins référencés 65614 et 65615 ; Dit que les mesures d'insertion telles qu'ordonnées par le tribunal porteront la mention suivante : " Le Tribunal de commerce de Paris, par jugement rendu le 3 avril 2009 confirmé par arrêt de la Cour d'appel de Paris du 8 avril 2011, a condamné la société anonyme John Galliano (en son nom personnel et en vertu de la transmission universelle du patrimoine de la société Les Jardins d'Avron à son profit) ainsi que la société anonyme Scentest Creafloc, en liquidation judiciaire, pour des faits de contrefaçon des droits d'auteur de la société à responsabilité limitée Seripress sur les dessins référencés 65614 et 65615 de ses collections ainsi que pour des faits de concurrence déloyale " ; Condamne la société anonyme John Galliano à verser à la société Seripress la somme complémentaire de 5 000 euro au titre de ses frais non répétibles ; Déboute la société Seripress de sa demande de condamnation aux frais de saisie-contrefaçon formée au titre des dépens ; Condamne la société John Galliano aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.