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Décisions

Cass. com., 24 mai 2011, n° 10-17.844

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Saint bois concept (SAS)

Défendeur :

Catana (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

Mme Michel-Amsellem

Avocat général :

M. Carre-Pierrat

Avocats :

SCP Waquet, Farge, Hazan, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament

T. com. Perpignan, du 17 mars 2009

17 mars 2009

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 23 février 2010), que la société St Bois concept, spécialisée dans la conception et la fabrication de modules destinés à l'équipement d'espaces réduits tels les navires, a fourni pendant plusieurs années des éléments de menuiserie, désignés sous la dénomination de "kits", à la société Catana, constructrice de navires ; que les relations commerciales entre les parties ont été émaillées de nombreuses difficultés, de paiement pour la société Catana, et de livraison pour la société St Bois concept ; qu'à partir du mois de septembre 2007, la société Catana a commandé trente "kits" à la société St Bois concept mais a renoncé à la livraison des six derniers en raison de la survenance de difficultés de paiement au début de l'année 2008 ; que soutenant que cette annulation constituait une faute, la société St Bois concept a assigné la société Catana en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que la société St Bois concept fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen : 1°) qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels ; que les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ; que cette inexécution doit revêtir une certaine gravité, qu'il appartient aux juges de fond de constater, pour justifier une rupture sans préavis ; qu'en se bornant à relever que les relations commerciales ne pouvaient plus se maintenir dans le climat existant entre les parties, sans constater que les manquements reprochés à la société St Bois concept étaient suffisamment graves pour justifier la rupture sans préavis de leurs relations décidée unilatéralement par la société Catana, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et ainsi privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 442-6 du Code de commerce et 1184 du Code civil ; 2°) qu'à défaut de comportement suffisamment grave pour justifier une rupture immédiate, la rupture sans préavis constituait une faute de la société Catana dont elle devait réparation ; que la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ; 3°) que, toute partie victime d'une inexécution contractuelle a droit à la réparation de l'exact préjudice qui en est résulté ; que seule la constatation de préjudices strictement égaux, de nature à entraîner une compensation totale entre les dommages-intérêts auxquels les parties à un contrat peuvent respectivement prétendre en réparation de la rupture de leurs relations contractuelles à laquelle elles ont toutes deux concourues peut justifier qu'elles soient toutes deux déboutées de leur demande d'indemnisation ; qu'en renvoyant les parties "dos à dos" et en les déboutant de leurs demandes d'indemnisation sans les manquements respectifs des parties à leurs obligations auraient causé à chacune d'elles un égal préjudice de nature à entraîner la compensation totale entre les dommages-intérêts auxquels elles pouvaient respectivement prétendre, la cour d'appel a violé les articles 1147 et 1149 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que les relations des parties se sont détériorées au cours du temps, celles-ci se reprochant, pour l'une, des retards de paiement et, pour l'autre, des retards de livraison, l'arrêt précise que ces derniers ne sont pas consécutifs à des difficultés matérielles mais à la volonté de la société St Bois concept de distribuer ses "kits" au gré de sa volonté par mesure de rétorsion à l'égard de la société Catana en retard de paiement ; qu'il observe que la société St Bois concept a opposé une grande rigidité face aux difficultés de la société Catana faisant preuve d'autoritarisme et lui imposant des délais de paiement drastiques et inhabituels dans le secteur concerné ; qu'il ajoute que, par une lettre du 17 septembre 2007, le dirigeant de la société St Bois concept a précisé que c'était lui qui refusait désormais de travailler pour la société Catana et de procéder aux livraisons ; que l'arrêt relève encore que la société Catana a payé la matière première des six derniers "kits" qui, sans l'impatience et l'intransigeance de la société St Bois concept qui avait un excellent client et qui disposait d'une avance pour payer les matières premières, auraient pu être livrés et payés ; qu'en l'état de ces constatations, dont il ressort que le comportement de la société St Bois concept était suffisamment grave pour justifier l'annulation de la commande des six derniers "kits", dont celle-ci demandait réparation, la cour d'appel qui a procédé à la recherche prétendûment omise et qui n'avait pas à rechercher, dès lors, quel était le préjudice qu'elle aurait pu subir, a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.