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Décisions

CA Agen, ch. com., 2 mai 2011, n° 10-00456

AGEN

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Maidat (EURL)

Défendeur :

Alvea (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Muller

Conseillers :

M. Certner, Mme Auber

Avoués :

SCP Teston Llamas, SCP Tandonnet

Avocats :

Mes Vivier, Pierre

T. com. Agen, du 9 déc. 2009

9 décembre 2009

Faits et procédure :

Le 31 juillet 2008, l'EURL Maidat, exploitant d'une station-service située à Lapalme (Aude), a signé avec la SNC Alvea un contrat d'approvisionnement exclusif en carburant, d'une durée de cinq ans à compter du 1er août 2008, renouvelable par tacite reconduction par périodes d'un an.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 12 décembre 2008, la SNC Alvea a notifié à l'EURL Maidat la résiliation du contrat en application de son article 18, compte tenu du non-paiement d'une traite de 37 841,44 euro émise en règlement d'une facture de carburants.

Par acte du 16 décembre 2008, l'EURL Maidat a fait signifier à la SNC Alvea une sommation de procéder aux travaux et aménagements de la station-service, prévus au contrat.

Par acte d'huissier du 24 février 2009, l'EURL Maidat a fait assigner la SNC Alvea pour obtenir le prononcé de la résiliation du contrat et la condamnation de la société Alvea au paiement de dommages et intérêts.

Par jugement du 9 décembre 2009 assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce d'Agen a :

- dit que le contrat d'approvisionnement exclusif en carburants signé entre les parties le 31 juillet 2008 a été résilié aux torts et griefs de l'EURL Maidat,

- débouté l'EURL Maidat de sa demande en paiement de la somme de 129 360 euro à titre de dommages et intérêts pour perte d'exploitation,

- débouté l'EURL Maidat de sa demande en paiement de la somme de 107 228,39 euro au titre d'obligations contractuelles non exécutées,

- rejeté la demande de la SNC Alvea en paiement de la somme de 108 432,45 euro,

- condamné l'EURL Maidat à payer à la SNC Alvea la somme de 10 000 euro à titre de dommages et intérêts,

- dit que la SNC Alvea doit enlever les volucompteurs lui appartenant sous 30 jours,

- dit que si l'EURL Maidat s'y oppose, une astreinte de 100 euro par jour lui sera facturée à partir du 31e jour,

- condamné l'EURL Maidat à payer à la SNC Alvea la somme de 2 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

L'EURL Maidat a relevé appel de cette décision.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 février 2011.

Moyens et prétentions des parties :

Par conclusions récapitulatives signifiées le 2 février 2011, l'EURL Maidat demande à la cour :

- d'infirmer le jugement dont appel,

- de prononcer la résiliation du contrat du 31 juillet 2008,

- de condamner la SNC Alvea à lui payer les sommes de 129 360 euro et 107 228,39 euro à titre de dommages et intérêts,

- de condamner la SNC Alvea à récupérer son matériel dans les deux mois suivant la signification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euro par jour de retard,

- de débouter la SNC Alvea de ses demandes,

- de la condamner à lui payer la somme de 1 500 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Elle soutient que la SNC Alvea ne pouvait rompre le contrat comme elle l'a fait, alors que la traite à échéance au 31 octobre 2008, qui était revenue impayée, a été réglée par la remise le 10 décembre suivant de 3 chèques qui ont été encaissés, que postérieurement au paiement, la société Alvea a résilié la convention, qu'en procédant ainsi, elle n'a pas exécuté le contrat de bonne foi au sens des dispositions de l'article 1134 du Code civil et qu'en acceptant les paiements, elle a nécessairement renoncé à se prévaloir de la cause de résiliation.

Elle précise que la SNC Alvea contrevient aux dispositions de l'article L. 442-6 I°) 5°) du Code de commerce qui prévoit qu'engage la responsabilité de son auteur, le fait pour tout producteur ou commerçant de rompre brutalement une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale du préavis déterminé en référence aux usages du commerce.

Elle souligne qu'en l'espèce, l'impayé avait perdu toute gravité du fait du règlement intervenu le 10 décembre 2008, de sorte que la société Alvea ne pouvait se prévaloir d'une clause de résiliation immédiate, mais qu'elle devait respecter les dispositions de l'article L. 442-6 I°) 5°) du Code de commerce et qu'elle a commis un abus de droit rendant la rupture préjudiciable pour elle-même.

Elle fait valoir qu'en revanche, la société Alvea est responsable de la rupture du contrat, qu'elle n'a pas exécuté ses obligations, que la sommation de faire qu'elle lui a fait délivrer le 16 décembre 2008 est restée infructueuse, qu'elle a artificiellement rompu les relations contractuelles alors qu'elle était payée et que le contrat doit donc être résilié à ses torts exclusifs.

Elle conteste les allégations de la société Alvea quant aux dégradations survenues après la résiliation et indiquant que le contrat prévoyait la fourniture de matériel neuf et une station aux couleurs d'Elan, elle précise que la SNC Alvea n'a pas fourni les volucompteurs pour la piste poids lourds, ni fourni les 5 volucompteurs, qu'elle n'a pas effectué la mise aux couleurs et qu'elle n'a pas posé un séparateur d'hydrocarbure.

Elle soutient en conséquence que la société Alvea est responsable de son préjudice, le non-respect de ses engagements contractuels quant aux travaux et aménagements prévus lui ayant fait perdre un chiffre d'affaires conséquent, évalué pour 8 mois d'exploitation à la somme de 129 360 euro, à laquelle s'ajoute celle de 107 228,39 euro correspondant aux obligations contractuelles non exécutées selon devis du 27 janvier 2009.

Par conclusions n° 3 signifiées le 17 janvier 2011, la SNC Alvea demande la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit que le contrat du 31 juillet 2008 doit être résilié aux torts et griefs de l'EURL Maidat et en ce qu'il a débouté l'EURL Maidat de ses demandes en paiement.

Elle conclut à l'infirmation du jugement pour le surplus et, au visa de l'article 1134 du Code civil et des articles 18.3.2 et 18.3.3 du contrat, elle demande à la cour de condamner l'EURL Maidat au paiement :

- de la somme de 108 432,43 euro suivant facture n° FD22001582 du 9/01/2009 avec intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 2009 ;

- de la somme de 10 000 euro à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- des dépens qui comprendront le coût du constat du 16 janvier 2009.

Elle soutient, en ce qui concerne les matériels, qu'elle n'a pu installer les 3 volucompteurs prévus pour la piste des poids lourds car la piste était déjà occupée par des volucompteurs Esso et ceux prévus par elle ont été refusés par la société Maidat, qu'en revanche les cinq volucompteurs Satam SP 98 et SP 95 prévus au contrat ont été installés mais qu'elle a découvert à la lecture du constat qu'ils avaient été détériorés volontairement et que s'agissant de la signalisation des marques et couleurs de la station, c'est l'EURL Maidat qui l'a refusée au motif qu'elle ne convenait pas.

Elle souligne donc que c'est par la faute de la société Maidat qu'elle n'a pu honorer ses engagements pour la mise aux couleurs Elan, les trois volucompteurs gasoil poids lourds et la pose d'un séparateur d'hydrocarbures.

Concernant la fourniture de carburants, elle indique qu'elle a effectué trois livraisons les 25 septembre, 10 octobre et 21 octobre 2008, que l'échéance du 31 octobre 2008 a été impayée pour un montant de 37 841,44 euro, que cet impayé justifiait la résiliation immédiate du contrat aux torts de la société Maidat en application de la clause 18-2.

Elle indique qu'elle a donc fait application des articles 18.3.2 et 18.3.3 pour le calcul du montant des travaux non amortis et des pénalités pour quantités non prises, ce qui a donné lieu à sa facture de 108 432,43 euro adressée par lettre recommandée du 12 janvier 2009 et qu'elle sollicite également la réparation de son préjudice moral et commercial.

Motifs de la décision :

- Sur la résiliation du contrat :

L'article 18.2 de la convention conclue entre l'EURL Maidat et la SNC Alvea, intitulé résiliation immédiate, précise que le contrat pourra être résilié de plein droit sans préavis et sans aucune formalité judiciaire, ni extra judiciaire, sur simple notification de la société Alvea et sous réserve de tous dommages et intérêts, dans plusieurs cas énumérés par cette clause parmi lesquels, est cité en premier lieu, le cas d'impayé.

En l'espèce, la SNC Alvea indique qu'elle a procédé à trois livraisons de carburant les 25 septembre et les 10 et 21 octobre 2008 et qu'une traite de 37 841,44 euro émise en règlement de la livraison du 21 octobre 2008 a été rejetée.

L'EURL Maidat reconnaît dans ses conclusions que cette traite, à échéance du 31 octobre 2008, est effectivement revenue impayée, mais elle souligne qu'elle a été réglée au moyen de trois chèques remis le 10 décembre suivant.

Elle produit des relevés de son compte faisant apparaître qu'ont été débités un chèque de 25 000 euro ayant pour date de valeur le 13 décembre 2008 et deux chèques de 6 797,43 euro et 6 797 euro ayant pour date de valeur le 10 janvier 2009.

Toutefois, le paiement n'étant pas réalisé par la remise des chèques, mais seulement par leur encaissement, l'EURL Maidat prétend à tort que le 12 décembre 2008, date de la lettre de résiliation de la SNC Alvea, elle était à jour de ses obligations de paiement.

Dès lors, en application du contrat, la SNC Alvea était en droit de se prévaloir de la résiliation immédiate.

L'EURL Maidat soutient cependant que la SNC Alvea devait respecter l'article L. 442-6 I.- 5°) du Code de commerce qui dispose notamment :

"Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel, ou personne immatriculée au registre des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. (...)

Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure" ;

Il convient, pour l'application de ces dispositions, de retenir que les relations commerciales des parties n'ont réellement commencé qu'au mois de septembre 2008 avec la première livraison de carburant de la SNC Alvea et que le défaut de paiement litigieux s'est produit dès le mois d'octobre suivant avec le retour impayé de la traite à échéance du 31 octobre 2008, émise pour le règlement de la troisième livraison intervenue le 21 octobre.

Il peut donc être constaté tout d'abord que la rupture est intervenue alors qu'il n'existait pas encore entre les parties "une relation commerciale établie" inscrite dans une certaine durée et permettant l'instauration de rapports de confiance auxquels la société Alvea aurait brusquement mis un terme.

Il y a lieu par ailleurs de relever qu'en prévoyant à l'article 18.2 du contrat une possibilité de résiliation immédiate en cas d'impayé, les parties avaient nécessairement considéré que ce type de manquement aux obligations du revendeur présenterait un caractère de gravité certain.

En outre, dans la mesure où le défaut de paiement de la traite à échéance du 31 octobre 2008 est intervenu dès le début de l'exécution de la convention, ce manquement était grave en ce qu'il était de nature à inquiéter le fournisseur sur l'aptitude de l'EURL Maidat à respecter ses obligations et sur la possibilité de poursuivre normalement avec elle des relations contractuelles.

De plus, si la traite impayée a été ensuite régularisée par la remise de chèques, cette circonstance ne prive pas de gravité cet incident de paiement dès lors que la régularisation du règlement de la livraison du 21 octobre 2008 n'a été effectuée pour partie que le 13 décembre 2008 et le solde seulement le 10 janvier 2009.

Ainsi, contrairement à ce que soutient l'EURL Maidat, la rupture du contrat n'a pas été brutale : en effet, elle n'était pas imprévisible puisqu'elle était expressément prévue par le contrat en cas d'impayé ; elle ne présentait pas davantage un caractère soudain et violent dès lors que la SNC Alvea n'a pas usé de la clause de résiliation dans les jours qui ont suivi l'échéance de la traite impayée mais qu'elle a attendu le 12 décembre 2008, soit plus d'un mois pour s'en prévaloir et qu'à cette date sa créance n'était pas encore réglée.

Dans ces conditions, la lettre recommandée de résiliation adressée par la SNC Alvea à l'EURL Maidat ne caractérise aucun abus, mais elle est au contraire justifiée.

Pour sa part, l'EURL Maidat impute à la SNC Alvea la responsabilité de la rupture pour manquements à ses obligations contractuelles relatives à la mise à sa disposition des matériels prévus au contrat et elle demande la résiliation de la convention aux torts de cette dernière.

L'annexe 2 du contrat prévoyait que la société Alvea devait mettre à la disposition du revendeur dans son fonds de commerce les matériels suivants :

- 1 mât

- un panneau de prix roseau

- 4 caissons de prix sur mât

- 2 caissons cartes de crédit sur mât

- 1 perche télescopique

- 1 police de chiffres

- 5 volucompteurs Satam T150/3 SP98, SP95, GO, n° de série : 552226, 552227, 552148, 203459, 550650,

- 3 volucompteurs Satam T 150/5 GO n° de série (à définir),

- 1 pupitre ALX PGS ...

Aux termes de l'article 3 de cette annexe, le montant des travaux que la société Alvea s'engageait à réaliser pour la pose d'un séparateur pour hydrocarbures et la mise aux couleurs de la station était fixé à 30 000 euro.

La SNC Alvea admet ne pas avoir honoré ses engagements contractuels pour la mise aux couleurs Elan de la station-service, les trois volucompteurs gasoil poids lourds et la pose d'un séparateur d'hydrocarbures, ce qui est confirmé par un procès-verbal de constat d'huissier dressé le 9 décembre 2008 à la requête de l'EURL Maidat.

Une partie des obligations de la SNC Alvea n'a donc pas été exécutée et celle-ci ne démontre pas que, comme elle l'affirme, cette situation résulte du refus de l'EURL Maidat.

Cependant, la clause de résiliation immédiate figurant à l'article 18.2 du contrat, qui vise notamment le cas d'impayé des livraisons de carburants, n'est pas applicable aux manquements éventuels relatifs à l'installation des matériels. Il convient donc de se référer à l'article 18.1 qui stipule que le contrat pourra être résilié de plein droit à la demande de l'une ou l'autre des parties 15 jours après une mise en demeure d'exécuter une obligation légale ou contractuelle demeurée infructueuse.

Or, il y a lieu de relever que l'EURL Maidat n'a fait constater par huissier les manquements reprochés à la SNC Alvea que le 9 décembre 2008. De plus et surtout, elle n'a fait dénoncer ce constat et fait signifier à la SNC Alvea une sommation de procéder aux travaux et aménagements prévus au contrat que par acte du 16 décembre 2008, soit postérieurement à la date de réception (15 décembre 2008) de la lettre recommandée de résiliation du contrat adressée par la SNC Alvea pour défaut de paiement de la traite émise en règlement de la livraison de carburants du 21 octobre 2008.

Ainsi, la société Maidat n'a adressé une mise en demeure à son cocontractant qu'après la résiliation du contrat intervenue de plein droit par application de l'article 18.2 du contrat et, donc, à une époque où elle n'était plus fondée à exiger l'exécution des obligations de la SNC Alvea.

Il apparaît par ailleurs que si les manquements de la SNC Alvea avaient été aussi graves et préjudiciables que l'indique l'EURL Maidat, ils auraient justifié de sa part une réaction plus rapide que sa sommation du 16 décembre 2008.

Il convient à cet égard de relever que les dégradations du matériel décrites dans le constat du 9 décembre 2008 ont pu survenir après la mise à la disposition de l'EURL Maidat et que les attestations produites par les parties ne sont pas pleinement concordantes sur l'état du matériel.

En effet, si Monsieur En Naddam et Monsieur Nakib déclarent que les pompes à essence de marque Elan étaient anciennes, présentaient des traces de choc et que certaines étaient hors service, Monsieur Hernandez atteste seulement que les pompes installées sur le devant de la station étaient " d'anciennes pompes d'un état assez moyen " et Monsieur Denis Gazeu certifie que les volucompteurs fournis par Alvea et posés le 31 juillet 2008 par l'entreprise dont il fait partie n'étaient pas dans l'état de délabrement présenté dans le constat d'huissier, mais que, bien que d'occasion, ils étaient en bon état.

Il découle de ces constatations qu'à l'exception des pompes destinées aux poids lourds qui n'ont pas été installées, la station exploitée par l'EURL Maidat était en état de fonctionnement et ce, même si les matériels n'étaient pas neufs, ce que ne prévoyait pas le contrat.

En conséquence, il apparaît au vu de l'ensemble des éléments de la cause que la demande de résiliation du contrat présentée par l'EURL Maidat n'est pas fondée.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que le contrat signé entre les parties le 31 juillet 2008 a été résilié aux torts de l'EURL Maidat.

- Sur les autres demandes des parties :

La demande de l'EURL Maidat tendant à faire condamner la SNC Alvea à récupérer son matériel apparaît désormais sans objet puisque cette dernière indique que le jugement du tribunal de commerce lui a permis de retrouver ses matériels.

Par ailleurs, la résiliation du contrat étant intervenue aux torts de l'EURL Maidat, celle-ci n'est pas fondée à obtenir l'indemnisation du préjudice dont elle fait état et dont l'existence et l'étendue ne sont, au surplus, pas établies.

La SNC Alvea demande le paiement de la somme de 108 432,43 euro avec intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 2009 et la somme de 10 000 euro à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.

La première de ces sommes correspond, selon ses indications, au montant des travaux non amortis et des pénalités pour quantités non prises, dont l'EURL Maidat serait débitrice en application des articles 18.3.2 et 18.3.3 du contrat.

L'article 18.3 précise les conséquences pour le revendeur de la résiliation du contrat :

- Le paragraphe 18.3.2 prévoit : " Il serait redevable à la société (Alvea) d'une somme correspondant au solde, calculé prorata temporis, des travaux non amortis, le montant de ces travaux figurant au point 3 de l'annexe 2. "

Cependant, les travaux visés par le point 3 de l'annexe 2, dont le montant est fixé à 30 000 euro, consistent dans la pose d'un séparateur pour hydrocarbures et la mise aux couleurs de la station. Or la SNC Alvea reconnaît elle-même qu'elle n'a pas réalisé les dits travaux. Elle ne peut donc pas être créancière d'un solde de travaux non amortis.

- Le paragraphe 18.3.3 indique : " Dans le cas d'une résiliation aux torts et griefs du revendeur, la société pourra lui réclamer une pénalité dont le taux est indiqué au point 5 de l'annexe 1 sur les quantités qui lui resteraient à acheter pour atteindre le potentiel d'achat inscrit au point 2 de la même annexe. Ceci n'exclut pas la possibilité pour la société de lui demander des dommages et intérêts afin d'obtenir la réparation complète de son préjudice. "

Cette clause, qui impose le paiement d'un pourcentage des sommes qui auraient été dues en contrepartie des livraisons de carburant si le contrat s'était poursuivi et qui alourdit ainsi la charge financière pesant sur l'EURL Maidat, a été stipulée à la fois comme un moyen de la contraindre à l'exécution du contrat et comme l'évaluation conventionnelle et forfaitaire du préjudice futur du fournisseur de carburant.

Elle constitue ainsi une clause pénale dont l'article 1152 du Code civil permet la modération si elle est manifestement excessive. Son caractère excessif est caractérisé en l'espèce dès lors que la SNC Alvea n'a pas réalisé tous les travaux et aménagements prévus par le contrat en faveur de l'EURL Maidat pour des motifs qui, au vu des pièces du dossier, sont indéterminés, qu'elle a finalement reçu le paiement de toutes les livraisons de carburants effectuées chez le revendeur et qu'elle indique avoir pu récupérer le matériel mis à la disposition de l'EURL Maidat après le jugement du tribunal de commerce. Il y a lieu dans ces conditions de réduire cette pénalité à la somme de 300 euro.

Par ailleurs, la somme de 10 000 euro réclamée par la SNC Alvea à titre de dommages et intérêts est destinée, selon ce qu'elle indique page 7 de ses dernières conclusions, à réparer son préjudice moral et commercial subi au titre des frais exposés pour le démarrage de l'activité.

Il y a lieu de relever d'abord qu'elle présente cette demande sur le fondement de l'article 1382 du Code civil alors que les parties étaient liées par le contrat du 31 juillet 2008 et qu'elle méconnaît ainsi le principe du non-cumul des responsabilité contractuelle et délictuelle.

Ensuite, à supposer que cette demande soit fondée sur la responsabilité contractuelle de l'EURL Maidat, l'article 1134 du Code civil étant visé dans le dispositif de ses conclusions, la SNC Alvea ne justifie en rien d'un préjudice moral. Elle ne démontre pas non plus l'existence et l'étendue du préjudice commercial invoqué. En effet, la lettre qu'elle a adressée à l'EURL Maidat le 29 décembre 2008 ne saurait lui servir de preuve à elle-même et les factures qui l'accompagnent, dont trois sont datées du 12/12/2008, date de la lettre de résiliation du contrat, alors que la quatrième correspond à une commande antérieure au contrat, sont insuffisamment précises, comme les premiers juges l'ont relevé, pour justifier du préjudice résultant des frais exposés pour le démarrage de l'activité. Il y a lieu en conséquence de la débouter de cette demande.

La résiliation du contrat étant intervenue aux torts de l'EURL Maidat, celle-ci doit supporter la charge des dépens. En revanche compte tenu des circonstances de la cause et de la situation respective des parties, il n'y pas lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort, Infirme partiellement le jugement rendu le 9 décembre 2009 par le Tribunal de commerce d'Agen en ses dispositions qui ont condamné l'EURL Maidat à payer à la SNC Alvea la somme de 10 000 euro à titre de dommages et intérêts et la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Et statuant à nouveau, Déboute la SNC Alvea de sa demande de dommages et intérêts, Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile, Confirme le jugement déféré pour le surplus, Y ajoutant, Constate que la demande relative au matériel récupéré par la SNC Alvea est devenue sans objet, Réduit la pénalité stipulée à l'article 18.3.3 du contrat à la somme de 300 euro et condamne l'EURL Maidat à payer cette somme à la SNC Alvea, Rejette toute demande contraire ou plus ample, Condamne l'EURL Maidat aux dépens qui seront recouvrés, pour ceux d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.