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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 18 mai 2011, n° 10-00135

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Fe Industries, (SAS), Flam'N Co (SAS)

Défendeur :

Imbert, Ateliers Dominique Imbert (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pimoulle

Conseillers :

Mmes Chokron, Gaber

Avoués :

SCP Grappotte-Benetreau, Pelit-Jumel, SCP Monin d'Auriac de Brons

Avocats :

Mes Anahory, Chapoullie, Ickowicz

TGI Paris, du 8 déc. 2009

8 décembre 2009

Vu le jugement contradictoire du 8 décembre 2009 rendu par le Tribunal de grande instance de Paris,

Vu l'appel interjeté le 8 janvier 2010 par les sociétés Fe Industries et Flam'N Co,

Vu les dernières conclusions du 3 mars 2011 des appelantes,

Vu les dernières conclusions du 16 février 2011 de Dominique Imbert et de la société Atelier Dominique Imbert (ci-après dite ADI), intimés et incidemment appelants,

Vu l'ordonnance de clôture du 15 mars 2011,

Sur ce, LA COUR,

Considérant que Dominique Imbert crée des cheminées métalliques contemporaines, que la société ADI commercialise sous la marque Focus ; qu'une partie de la conception industrielle et de la fabrication de ces modèles était confiée en dernier lieu à la société FE Industries (ci-après dite FE I), laquelle a décidé de créer des modèles de cheminées en métal sous la marque Flam'N Co, par l'intermédiaire d'une société du même nom ; que la société ADI ayant décidé de modifier sa politique industrielle, un protocole d'accord a été signé entre les sociétés ADI et FE I le 9 février 2006 mettant un terme, à compter du 31 juillet 2007, à leurs relations commerciales de longue date ;

Qu'estimant qu'une gamme de [...] serait contrefaisante et fautivement commercialisée avec une référence orale à la fabrication antérieure de cheminées Focus, Dominique Imbert et la société ADI ont obtenu deux ordonnances présidentielles des 6 septembre et 10 octobre 2007 aux fins de constats d'huissiers de justice, puis fait assigner le 2 novembre 2007 les sociétés FE I et Flam'N Co devant le Tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de droits d'auteur ainsi qu'en concurrence déloyale et parasitaire ; que, reconventionnellement, les sociétés défenderesses ont notamment sollicité le paiement d'une retenue de garantie en exécution de l'article 7 du protocole d'accord ;

Considérant que, selon jugement dont appel, les premiers juges ont, entre autres dispositions :

- déclaré Dominique Imbert recevable en son action en contrefaçon,

- débouté ce dernier et la société ADI de leurs demandes à ce titre pour les modèles de cheminée Gyrofocus, Giafocus, Bathyscafocus, Filiofocus, Edofocus 630 sur pied, Agorafocus 630 sur pied, et Eurofocus 950,

- dit qu'en fabriquant et vendant une gamme de cheminées similaires, inspirée de la gamme de la société ADI, les sociétés FE I et Flam'N Co ont commis des actes de concurrence déloyale, les condamnant à payer 100 000 euro à titre provisionnel en réparation du préjudice subi, ordonnant la communication d'une attestation comptable (sur le nombre de cheminées Habanera, Alegria, Serrena et Perla commercialisées, le chiffre d'affaire réalisé et la marge correspondant à chaque modèle), et prononçant des mesures d'interdiction ainsi que de destruction des stocks,

- condamné la société ADI à payer à la société FE I 5 000 euro au titre du remboursement de la clause pénale telle que fixée par le tribunal ;

Considérant que les sociétés appelantes prétendent principalement que les premiers juges n'ont pas tenu compte du protocole d'accord s'agissant de leurs modèles Alegria et Serrena, que l'originalité des œuvres revendiquées n'est pas établie, et que c'est à tort que des actes de concurrence déloyale et parasitaire ont été retenus, tandis que leurs demandes reconventionnelles ont été partiellement rejetées ; que les intimés contestent la décision déférée essentiellement en ce qu'elle a exclu les actes de contrefaçon reprochés ;

Sur l'accord s'agissant des modèles Alegria et Serrena

Considérant qu'il n'est pas contesté que les modèles Alegria et Serrena étaient commercialisés antérieurement à la signature du protocole d'accord conclu entre les sociétés ADI et FE I, ayant " pour objet de déterminer les conditions selon lesquelles ADI cessera de sous traiter à la société Fe Industries la fabrication des cheminées commercialisées sous la marque Focus " , ni que les sociétés FE I et Flam'N Co n'ont pas, préalablement à l'introduction de l'instance, été formellement mises en demeure d'en cesser la fabrication ou la commercialisation ;

Que, pour autant, il ne peut être admis que le protocole vaut ainsi reconnaissance par les signataires de ce que les modèles en cause dont il n'est pas fait état dans la convention ne constituent pas des copies fautives des modèles Edofocus 630 sur pied, Agorafocus 630 et Eurofocus 950 et que la renonciation à un droit ne saurait se présumer, étant au surplus relevé que Dominique Imbert, qui se prévaut de la qualité d'auteur, n'est pas partie audit contrat ;

Que le moyen, tiré d'une prétendue reconnaissance contractuelle du caractère non illicite de deux des modèles litigieux (Alegria et Serrena), sera en conséquence rejeté ;

Sur l'originalité des modèles revendiqués au titre du droit d'auteur

Considérant que le principe de la protection d'une œuvre, sans formalité, du seul fait de la création d'une forme originale, n'est pas dénié ; que les appelantes font cependant valoir, pour combattre le grief de contrefaçon, que les modèles Gyrofocus, Bathyscafocus,

Giafocus, Edofocus 630, Agorafocus 630 et Eurofocus 950) revendiqués à ce titre, dont ils ne contestent pas les dates de création (savoir respectivement : 1968, 1978, 1987, 1989, 1989 et 1993) sont dénués de l'originalité requise pour prétendre accéder à la protection du droit d'auteur ; qu'ils soutiennent en effet que d'autres modèles, réalisés sur un schéma conceptuel similaire, seraient commercialisés, opposant en particulier les modèles :

- Tatiana pour le modèle Bathyscafocus,

- Aruba Medium, Versus et Ovalie pour le modèle Gyrofocus,

- Thea et Fidji pour les modèles Edofocus 630 et Agorafocus 630,

déjà examinés par les premiers juges,

et un modèle Handol pour le modèle Eurofocus 950 ;

Considérant qu'il sera rappelé que pour conclure à l'originalité de leurs modèles, les intimés prétendent qu'elle procède de la combinaison des éléments caractéristiques suivants : suspension du foyer, forme et ouverture du foyer, rapport de proportion entre le foyer et le conduit, diamètre, forme et hauteur du conduit d'évacuation et choix de la couleur (noire mate) ;

Que si le choix d'un matériau et d'une couleur ne sauraient constituer des caractéristiques de forme protégeables au titre du droit d'auteur, le tribunal a exactement retenu que :

- le modèle Tatiana ne peut être valablement opposé, faute d'établir sa préexistence par rapport au modèle Bathyscafocus créé en 1978,

- les modèles Aruba Medium, Versus et Ovalie largement postérieurs à 1968 sont, au regard de la date certaine de création du modèle Gyrofocus opposé, dénués de pertinence dans le présent litige,

- les modèles Thea et Fidji figurant dans des catalogues de 2006 ne sont pas plus pertinents, dès lors qu'il n'est pas établi qu'ils aient été crées avant les modèle Edofocus 630 et Agorafocus 630 de 1989,

- aucun précédent n'est opposé s'agissant du modèle Giafocus ;

Qu'il sera ajouté que si le modèle Handol diffusé en 1984 présente un conduit cylindrique apparent et un foyer présentant une façade rectangulaire pouvant évoquer celle d'un téléviseur, il s'agit d'une cheminée d'angle ayant une profondeur parfaitement visible (formant un ensemble trapézoïdal à raison des parties supérieures et inférieures inclinées du foyer) inexistante dans le modèle Eurofocus 950, apparaissant à la manière d'un simple écran plat de télévision ou tel un tableau de forme rectangulaire ; que ce dernier modèle ne reprend donc nullement tous les éléments caractérisant le modèle préexistant opposé dans une combinaison identique ;

Qu'en réalité il ressort de l'examen auquel la cour s'est livrée que chacun des 6 modèles de foyers suspendus ou accolés au mur revendiqués se distinguent par la combinaison d'une forme particulière de foyer associé à un conduit cylindrique apparent, que si certains des éléments qui composent chacun de ces modèles sont effectivement connus ou fonctionnels (tuyau d'évacuation cylindrique apparent, présence d'un foyer) et que, pris séparément, ils appartiennent au fonds commun de l'univers de la cheminée métallique décorative moderne, en revanche, la combinaison des lignes de chacun de ces modèles, dès lors que l'appréciation de la cour doit s'effectuer de manière globale, en fonction de l'aspect d'ensemble produit par l'agencement des différents éléments et non par l'examen de chacun d'eux pris individuellement, leur confère une physionomie propre qui les distingue des autres modèles du même genre et qui traduit un parti-pris esthétique empreint de la personnalité de leur auteur ;

Considérant que, par voie de conséquence, les modèles opposés doivent bénéficier de la protection instituée au titre du droit d'auteur et c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu que l'action en contrefaçon était recevable ;

Sur la contrefaçon

Considérant que les appelantes soutiennent que les modèles qu'elles fabriquent ou commercialisent ne reproduisent pas les caractéristiques des modèles revendiqués dont le foyer constitue l'élément central dominant ; que les intimés reprochent au tribunal de n'avoir retenu que l'originalité de ces foyers ;

Considérant que, certes, il convient de comparer les cheminées dans leur mise en forme caractéristique d'ensemble mais l'idée d'associer un conduit cylindrique à un foyer, de créer une cheminée suspendue et pivotante, ou sur un pied de même forme que le conduit d'évacuation, de rendre apparent ce conduit, et plus généralement le concept de cheminées métalliques noires ne saurait être protégé au titre du droit d'auteur ;

Que les premiers juges ont pertinemment retenu que l'impression d'ensemble donnée par les modèles en cause était différente ; qu'ainsi :

- la forme de " ballon de rugby ", qui présente des côtés latéraux nettement marqués à la façon de coins repliés (saillance des arrêtes donnant un effet géométrique angulaire), permettant, selon les versions, des ouvertures latérales, confère au modèle Habanera une physionomie distincte du modèle Gyrofocus, où se trouve mise en valeur la forme ovale très aplatie, de son foyer présentant une ouverture unique étirée évoquant la " gueule d'un batracien " (ou un sourire), et du modèle Giafocus présentant une ouverture ovale dans une version certes moins écrasée mais néanmoins sans aucun angle (impression d'arrondi ou de forme bombée), et ce, nonobstant la présence d'éléments par ailleurs comparables ou de proportions similaires,

- la forme globale de " goutte d'eau " semblant s'écouler du plafond, donnée par l'élargissement progressif du conduit pour former le foyer, du modèle Perla, n'est nullement assimilable à la forme de boule (ou sphère) du foyer, accroché à un conduit rectiligne, du modèle Bathyscafocus, que cette impression est accentuée par une ouverture bien moins haute que l'ovale (élargi vers le haut) du modèle critiqué, conférant une configuration d'ensemble nettement distincte aux deux modèles, étant observé que le fait qu'un client ait pu s'étonner (courriel du 10 juin 2010) que le modèle Perla ne soit pas commercialisé par la société ADI ne permet pas de retenir qu'il confère précisément la même impression que le modèle Bathyscafocus,

- la forme cylindrique allongée sur pied, soulignée par une large ouverture fermée par une unique porte vitrée à la façon d'un four, du modèle Alegria, même combinée de manière semblable à un tuyau comparable, ne donne pas l'impression d'ensemble produite par le modèle Edofocus 630 sur pied où le foyer évoque une sphère et les séparations du vitrage central un scaphandre (ou les facettes d'une boule), et diffère également, même dans sa version centrale, Alegria Vision, comportant deux portes vitrées de part et d'autre du foyer, du modèle Agorafocus 630 sur pied (modèle central non adossé au mur) dont les faces du foyer sont constituées de quatre cadres vitrés (à la façon d'une lanterne sphérique),

- le modèle Serrena présente un conduit (et un pied) à section carrée avec un foyer rappelant la forme d'anciens postes de radio (voire la façade d'un téléviseur ancien) aux contours arrondis avec des côtés (sur la profondeur) tandis que le modèle Eurofocus présente un conduit (et un pied) cylindrique avec un foyer à la forme épurée rectangulaire, apparaissant sans profondeur à la manière d'un tableau encadré (ou d'un écran plat actuel de télévision), chacun de ces modèles renvoyant ainsi à une impression d'ensemble distincte ;

Qu'il s'infère de la comparaison, à laquelle la cour a procédé, des modèles en cause, que les modèles contestés ne constituent pas une reprise, dans la même combinaison, des éléments caractéristiques des modèles invoqués et ne produisent pas une impression de ressemblance caractérisant des actes de contrefaçon ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté de ces chefs de demandes Dominique Imbert, étant relevé que seul celui-ci agit à ce tire ;

Sur la concurrence déloyale et parasitaire

Considérant qu'à titre subsidiaire, les actes de contrefaçon reprochés (dont il est soutenu qu'ils constitueraient pour la société ADI des agissements de concurrence déloyale) n'étant pas retenus, les intimés font valoir que la conception et la commercialisation par les sociétés Flam'N Co et FE I des quatre modèles incriminés créent un risque de confusion, à tout le moins un lien indu, avec les modèles antérieurs de Dominique Imbert, aggravé par un effet de gamme, caractérisant des agissements parasitaires à l'égard de la société ADI qui en réclame réparation ;

Considérant que les premiers juges ont exactement relevé que :

- le modèle Unifocus évoquant un téléviseur à écran plat intégré, dont les intimés admettent qu'il ne constitue pas une œuvre originale, s'éloigne du style caractéristique des autres cheminées Focus, et qu'il n'était pas établi que la reprise de ce modèle (par un modèle Tango des appelantes) soit fautive,

- les sociétés appelantes sont en situation de concurrence avec la société ADI,

- il n'est pas démontré que cette dernière disposait de la connaissance pratique du fabricant de cheminées et qu'elle ne peut ainsi valablement reprocher, à son ancien sous traitant, d'avoir usurpé ce savoir faire,

- la seule production de l'attestation d'une cliente, invitée à une foire, et d'un ancien revendeur est insuffisante pour caractériser une reprise de fichier clients,

- les sociétés appelantes ont fabriqué et commercialisé une gamme de quatre modèles de cheminées contemporaines similaire à celle antérieure constituée par les 6 modèles opposés comme créations originales qui bénéficient d'une certaine notoriété ;

Que, de même, ils ont pu admettre la validité du procès verbal de constat judiciairement autorisé le 11 octobre 2007 sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile, comme seule possibilité d'entendre un argumentaire de vente et d'en rapporter la preuve, la procédure utilisée pouvant légitimement tendre à l'établissement de preuves sur un stand de vente des appelantes et l'ordonnance faisant droit à la requête prévoyant expressément que l'huissier instrumentaire était autorisé à taire sa qualité pendant les opérations de constat et à ne les révéler qu'à leur issue, ce qui a été fait ;

Considérant que s'il ne peut être reproché à un concurrent de commercialiser des produits qui reprennent des éléments techniques ou un concept, il n'en demeure pas moins qu'est de nature à créer une confusion dans l'esprit du public la fabrication et la commercialisation par les appelantes d'une gamme de 4 cheminées associant de manière proche l'idée de mettre en valeur un foyer décoratif dans un ensemble métallique de couleur noire épuré où le conduit est apparent, telle que réalisée dans la gamme des six modèles originaux, qui ont fait la renommée des cheminées Focus, déjà bien implantées sur le marché, et ce, dès 1975 avec le modèle Gyrofocus (récemment élu par les internautes comme plus bel objet du monde en 2009) et en 1993 avec le modèle Eurofocus primé pour son design ; que même si le public peut constater que le réseau de distribution est largement distinct il peut être incité à croire qu'il s'agit d'une gamme dérivée, compte tenu de la proximité d'inspiration ou de présentation de cette gamme avec celle revendiquée, d'autant que la qualité de la société FE I d'ancien sous-traitant de la société ADI était publiquement connue, compte tenu de leur longue collaboration (la société FE I reconnaissant que jusqu'en 2006 elle faisait référence sur son site internet à sa qualité de sous traitant), étant relevé qu'un article de presse de septembre 2008 a pu encore en faire état ;

Que si le constat précité, qui révèle qu'au moins à une reprise il a été fait expressément état pour la vente de produits Flam'N Co de l'ancienne collaboration avec Focus, ne saurait établir qu'il s'agit d'une politique commerciale délibérée il conforte les éléments ci-dessus relevés, tout comme le courriel précédemment d'un client s'étonnant que la société ADI ne commercialise pas un des modèles des appelantes corrobore le lien indu pouvant être opéré par le public entre les deux gammes de produits en cause ;

Qu'en tout état de cause, la seule comparaison de la gamme fabriquée et commercialisée par les appelantes concernant les quatre modèles critiqués établit suffisamment une reprise de l'aspect global de la gamme invoquée de nature à créer, et ce, même si la première est moins onéreuse, un risque de confusion dans l'esprit du consommateur normalement informé et raisonnablement avisé, et génère nécessairement un trouble commercial ; qu'en conséquence c'est à juste titre que le tribunal a retenu que ce choix de commercialisation caractérisait un effet de gamme engageant la responsabilité des appelantes ;

Considérant que ces dernières produisent actuellement les attestations de leur commissaire aux comptes démontrant que 315 cheminées sont en cause et ont permis de générer une marge nette totale de 22 519 euro ; que ces éléments ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation justement faite à titre provisionnel par les premiers juges du préjudice subi à raison des agissements déloyaux retenus ; que ce préjudice sera réparé par l'allocation de la somme de 100 000 euro à titre de dommages et intérêts, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une mesure de publication ;

Que la mesure d'interdiction prononcée en première instance, justifiée dans son principe et pertinente dans ses modalités au regard de la nécessité de faire cesser les actes illicites et de prévenir leur renouvellement, sera purement et simplement confirmée, sans qu'il y ait lieu en outre à mesure de destruction sous contrôle d'huissier de justice et sous astreinte ;

Sur les demandes reconventionnelles

Considérant que la décision entreprise ne peut qu'être approuvée en ce qu'elle a déclaré sans objet la demande de réparation du préjudice commercial invoqué par les sociétés appelantes pour perte de commandes des modèles argués de contrefaçon, alors qu'il est établi que la commercialisation de ces modèles est fautive sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ;

Considérant que les appelantes qui succombent partiellement en leurs prétentions ont de même été justement déboutées de leur demande pour procédure abusive, dès lors qu'il n'est pas établi que l'action des intimés a revêtu un caractère malin et en conséquence abusif qui ouvrirait droit à indemnité compensatoire ;

Considérant que, s'agissant de l'application de l'article 7 du protocole d'accord il convient de rappeler que celui-ci prévoit que la société FE I cède à la société ADI 20 dossiers d'études et de méthodes de fabrication (dont les modèles Agorafocus 630, Bathyscafocus, Edofocus 630, Eurofocus 950 et Gyrofocus), des outillages de 13 de ces 20 dossiers (dont les modèles Agora 630, Edofocus 630 et Eurofocus 950) pour un prix global de 75 000 euro HT, ce prix comprenant également une prestation d'assistance de la société FE I au profit de ADI afin de permettre le transfert du savoir faire modèle par modèle, les facturations de chaque dossier ne se faisant qu'à la livraison des plans (et outillages pour 13 références) et n'étant exigible qu'à hauteur de 60 000 euro sous un délai de 90 jours ; qu'il était convenu dans ces conditions qu'une retenue de garantie du solde du prix, soit 15 000 euros HT, " sera opérée sur la transaction et libérable le 31 décembre 2007 si Fe Industries a respecté les obligations mises à sa charge par l'article 6 " de l'accord ; que ces obligations consistaient à garantir la bonne exécution des fabrications, le respect des délais en usage de livraison dans un délai maximum de 5 semaines à compter de la commande, le maintien des prix et le service après vente des foyers pendant 12 mois après livraison ;

Que le tribunal a retenu que la société FE I a reconnu l'inexécution de ses obligations quant aux délais de livraison et de qualité qu'elle impute à l'absence de respect du planning de la société ADI, sans toutefois en rapporter la preuve, faute de produire les commandes en cause ; qu'il a estimé qu'en réalité le retard résultait de la priorité donnée à la gamme créée par la société Flam'N Co ;

Que les appelantes contestent cette appréciation, faisant valoir que les motifs invoqués par la société ADI pour se soustraire à ses obligations ne sont pas fondés, tandis que les intimés demandent de réduire à 1 euro la somme due ;

Que la seule annexion par la société FE I, à son courrier du 27 mars 2007 par lequel elle manifeste son désaccord, d'un bilan non certifié d'heures pour l'année 2006 ne saurait suffire à justifier les retards de livraison par un nombre d'heures de travail confiées qui excéderaient les limites prévues par l'article 3 du protocole, étant par ailleurs relevé que la société FE I ne peut valablement reprocher à la société ADI de tenir compte de la date des commandes comme point de départ de son obligation de livraison alors que celle-ci est expressément visée dans le protocole d'accord ;

Qu'en conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que la société FE I n'avait pas totalement exécuté les obligations mise à sa charge et c'est avec pertinence qu'ils ont évalué à 5 000 euro, à proportion de l'exécution partielle effectivement procurée à la société ADI ( nonobstant les fautes commises), la somme due par cette dernière au titre de la retenue de garantie convenue (ayant la nature de clause pénale) ;

Par ces motifs, Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a fixé à titre provisionnel la réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et ordonné une mesure de destruction de stocks ; Et statuant à nouveau de ces chefs, Constate qu'il a été déféré à l'injonction de communication de pièces faite en première instance ; Condamne solidairement les sociétés Fe Industries et Flam'N Co à payer à la société Atelier Dominique Imbert la somme de 100 000 euro à titre de réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale commis à son encontre ; Dit n'y avoir lieu d'ordonner une mesure de destruction ; Rejette toutes autres demandes des parties contraires à la motivation ; Condamne les sociétés Fe Industries et Flam'N Co aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par la SCP Monin, d'Auriac De Brons, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile , et dit n'y avoir lieu à nouvelle application de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel.