Livv
Décisions

CA Lyon, 3e ch. civ. A, 16 février 2010, n° 09-01200

LYON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

TNT express national (SNC)

Défendeur :

Topstore (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvet

Conseillers :

Mme Clozel-Truche, M. Maunier

Avoués :

SCP Laffly-Wicky, Me Morel

Avocats :

SCP Deygas Perrachon Bes & Associés, Me Jacob

T. com. Lyon du 22 janv. 2009

22 janvier 2009

Faits, procédure et prétentions des parties

Par contrat du 20 juin 2005, la société Topstore a confié à la société TNT express national le soin d'organiser ses prestations de transport.

Le contrat était conclu pour une durée de 12 mois, renouvelable ensuite par tacite reconduction pour des périodes successives d'une année, sauf dénonciation par l'une des parties trois mois au moins avant l'échéance de chacun des termes.

Le 10 mars 2006, la société Topstore a dénoncé le contrat et a invité la société TNT express à une rencontre pour négocier une nouvelle offre à partir du 28 juin 2006.

Aucun nouveau contrat n'a été signé entre les parties, mais la société Topstore a continué, du 1 juillet au 30 novembre 2006, à remettre des colis à la société TNT express national.

Par acte d'huissier en date du 30 novembre 2007, la société TNT express national a donné assignation à la société Topstore devant le Tribunal de commerce de Lyon pour obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 44 768,94 euros à titre de dornmages-intérêts pour résiliation unilatérale du contrat qui se serait poursuivi jusqu'au 28 juin 2007 et à titre subsidiaire de celle de 22 384,94 euros à titre de dommages-intérêts si le contrat s'est poursuivi à durée indéterminée.

Par jugement en date du 22 janvier 2009, le Tribunal de commerce de Lyon a débouté la société TNT express national de ses demandes et l'a condamnée au paiement de la somme de 2 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le 23 février 2009, la société TNT express national a relevé appel de cette décision.

A titre principal, elle expose que le contrat à durée déterminée s'est poursuivi et que la société Topstore n'a jamais entendu se désengager, maintenant pendant cinq mois les conditions contractuelles antérieures : cela équivaut à une renonciation tacite à la résiliation et les relations postérieures au 20 juin 2006 se rattachent au contrat initial.

La société TNT express national fait valoir que le contrat s'est poursuivi jusqu'au 28 juin 2007, que la résiliation est imputable à la société Topstore qui en a pris l'initiative et qu'elle est redevable de la somme de 44 768,92 euros TTC, correspondant à la moyenne mensuelle des sommes qu'elle aurait perçues entre le 11 décembre 2006 et le mois de juin 2007.

A titre subsidiaire, sur le fondement de l'article L. 442-6-I 5), elle soutient que la société Topstore a commis une rupture brutale des relations commerciales en ne respectant pas un préavis écrit suffisant, qui doit être de trois mois conformément au délai de préavis pratiqué entre commissionnaires de transport et transporteurs, auquel il est possible de se référer.

La société TNT express national demande la condamnation à titre subsidiaire de la société Topstore au paiement de la somme de 22 384,47 euro TTC.

La société TNT express national s'oppose à la demande reconventionnelle de la société Topstore prescrite en application de l'article L. 133-6 du Code de commerce et relève que l'intimée ne peut lui reprocher d'avoir accepté des ordres de transport malgré la dénonciation du contrat, alors qu'elle a elle-même choisi de poursuivre sa relation.

En tout état de cause, la société TNT express national invoque le comportement fautif de la société Topstore en lui laissant croire, en poursuivant les relations contractuelles, que leurs relations allaient se poursuivre et elle sollicite de ce chef l'allocation de la somme de 22 384,47 euros.

Elle fixe à 4 000 euros sa réclamation en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société Topstore réplique qu'il n'a jamais été fait application du contrat-type de sous-traitance entre elles et que le contrat du 20 juin 2005 était un contrat-cadre.

Elle souligne qu'entre la date de dénonciation et la date d'effet du 30 juin 2006, aucune proposition de négociation n'a émané de la société TNT express national et que le contrat initial a été rompu à son initiative en respectant le préavis, que les prestations postérieures ont été traitées en dehors du champ contractuel d'origine aux conditions du contrat-type messagerie et non selon les tarifs du marché, dans l'attente de nouvelles conditions tarifaires à contractualiser.

La société Topstore stigmatise la mauvaise foi de la société TNT express national dans les pourparlers, son intention de ne pas aboutir et de maintenir la tarification antérieure.

Elle indique que si la rupture venait à lui être imputée, elle n'a pas été brutale, la société TNT express national ayant disposé de mars à novembre 2006 pour faire des propositions tarifaires qu'elle n'a pas proposées et pour réorganiser son exploitation.

La société Topstore conteste à titre subsidiaire l'existence de tout préjudice, précise que pour une durée de 6 mois de relations contractuelles le préavis d'usage ne peut être que particulièrement court.

Sur le défaut de conseil, elle reproche à la société TNT express d'avoir poursuivi le contrat pendant plusieurs mois, contribuant à entretenir en raison de son silence malicieux, une situation préjudiciable dont elle est mal venue de demander réparation.

La société Topstore ajoute, à titre subsidiaire, que les conditions générales de la société TNT express sont de véritables contrats d'adhésion, que le donneur d'ordre, entreprise de petite taille, n'est pas admis à négocier et elle soutient qu'il appartenait à l'opérateur d'indiquer à son partenaire l'application éventuelle de l'article L. 442-6-I 5° du Code de commerce dans le cas de poursuites de relations contractuelles et elle fixe à la somme de 44 768,94 euros le préjudice qu'elle a subi de ce chef.

Elle conclut à la confirmation du jugement et à l'allocation de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 3 novembre 2009.

Motifs de la décision

Attendu que le contrat liant la société TNT express national et la société Topstore (offre intégrale) signé le 20 juin 2005, est entré en vigueur à partir du 27 juin 2005 pour une durée de 12 mois et qu'il était ensuite renouvelable par tacite reconduction pour des périodes successives d'une année, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties par lettre recommandée avec accusé de réception trois au moins avant l'échéance de chacun des termes;

Attendu que par courrier en date du 10 mars 2006, la société Topstore a dénoncé le contrat et a fait connaître à la société TNT express national, qu'elle souhaitait la rencontrer pour négocier une nouvelle offre intégrale à partir du 28 juin 2006;

Attendu que le 16 mars 2006, la société TNT express national, accusant réception de la lettre, indique qu'elle aura le plaisir de définir ensemble les nouvelles modalités contractuelles lors d'un rendez-vous à positionner début mai, qui prendront effet au 1 juillet 2006, date de la rupture du contrat;

Attendu que s'il est constant que la société Topstore a continué, au-delà du 28 juin 2006 à confier des colis à la société TNT express national jusqu'à la fin du mois de novembre 2006, il ne résulte d'aucun courrier ni d'aucun élément qu'elle ait entendu revenir sur la cessation des relations commerciales telles qu'exprimées dans la lettre du 10 mars 2006;

Attendu que la société TNT express national considérait, dans sa lettre du 16 mars 2006, que les parties n'étaient plus liées par le contrat du 20 juin 2005 et qu'elle savait - puisqu'elle l'indiquait - que le contrat ne pouvait se poursuivre que selon de nouvelles modalités contractuelles;

Attendu qu'il n'est ni soutenu ni démontré que la société Topstore se soit dérobée à la négociation d'un nouveau contrat et que le seul fait, dans cette attente, de poursuivre sa collaboration avec la société TNT express national, ne manifeste nullement son intention de renoncer à la résiliation du contrat du 20 juin 2005;

Que ce n'est que dans le cadre de la possibilité de négociation d'un nouveau contrat, que les relations contractuelles se sont poursuivies aux conditions tarifaires antérieures, la société TNT express national ne pouvant se méprendre dès lors que la société Topstore avait manifesté son désir d'obtenir de nouvelles modalités d'application d'un autre contrat;

Attendu dès lors, que la lettre du 10 mars 2006, a, sans ambiguïté, mis fin au contrat du 20 juin 2005 en respectant le préavis contractuel et qu'il n'a pas été reconduit tacitement pour une période d'une année, expirant le 28 juin 2007;

Que c'est à juste titre que les Premiers juges ont rejeté la demande de la société TNT express national visant à obtenir la condamnation de la société Topstore au montant de la perte de son chiffre d'affaires pour cette période;

Attendu sur la demande subsidiaire fondée sur l'article L. 442-6-I 5 du Code de commerce, que compte tenu de la rupture du contrat au 28 juin 2006 et de la poursuite des relations, pendant le temps nécessaire à une négociation éventuelle d'un nouveau contrat, la société TNT express national n'a pu se méprendre sur la nature provisoire de la poursuite de relations et que la période du mois de juillet à novembre 2006, ne doit pas, pour apprécier une éventuelle rupture brutale, s'ajouter au contrat expiré;

Que dès lors, eu égard à ces éléments, la poursuite des relations de juillet à novembre 2006 ne peut s'apprécier dans le cadre de relations commerciales établies, que les dispositions de l'article L. 442-6-I 5° ne trouvent pas à s'appliquer;

Attendu enfin, sur le comportement fautif de la société Topstore, que celle-ci avait clairement informé son cocontractant le 10 mars 2006, qu'elle mettait fin au contrat dans les termes de son article 3-4, ce dont avait pris acte la société TNT express national dans son courrier du 16 mars 2006 et que le fait qu'aucune des parties - tout le moins par écrit - n'a entamé de négociations pour la conclusion d'un nouveau contrat fondée sur d'autres modalités que le précédent, n'est pas constitutif d'une faute et n'a pu laisser croire à la société appelante, que par son silence, la société Topstore avait l'intention de revenir sur sa décision explicite de rupture;

Attendu que le jugement est confirmé;

Attendu que l'équité commande d'allouer à la société Topstore la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et de rejeter la demande de ce chef de la société TNT express national;

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Reçoit l'appel comme régulier en la forme, Confirme le jugement, Condamne la société TNT express national à payer à la société Topstore la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette les autres demandes, Condamne la société TNT express national aux dépens, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.