CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 1 septembre 2011, n° 09-15429
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Admea (SA), Alth (SASU)
Défendeur :
GT Representations (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Perrin
Conseillers :
Mmes Touzery-Champion, Pomonti
Avoués :
SCP Bernabe-Chardin-Cheviller, SCP Monin d'Auriac de Brons
Avocats :
Mes Gonzalez, Dubos
La société Admea est une société spécialisée dans le commerce de gros produits électriques et/ou électroniques à caractère domestique en France ou l'étranger auprès de centrales d'achats, grandes surfaces et autres distributeurs de biens de consommation.
La société GT Représentations (la société GT) est, depuis 30 ans, un agent commercial spécialisé dans le domaine industriel.
Par contrat en date du 14 novembre 2001, renouvelable par tacite reconduction, la société Admea a confié à la société GT la représentation dans 9 départements de la région parisienne des radiateurs électriques de marque " Thermoguard ".
Par un avenant du 20 septembre 2002 à ce contrat, la société GT s'est vu confier la représentation et la vente des produits de marque "Keter" à savoir des outils de fabrication israélienne.
En juillet 2005, la société Admea a crée la société Alth, sa filiale à 100 % spécialisée dans la distribution de produits de traitement de l'air, et notamment les radiateurs électriques de marque "Thermoguard".
La société Admea a alors retiré les produits "Thermoguard" de la gamme des produits représentés par la société GT.
Un nouveau contrat d'agence commerciale a été conclu le 21 mai 2007 entre la société Alth et la société GT.
Puis par courrier en date du 18 février 2008, la société Admea a informé la société GT qu'elle mettait fin au contrat d'agence qui les liait pour les produits de marque " Keter ".
Par courrier en date du 18 février, la société Alth indiquait à son tour à la société GT qu'elle mettait fin au contrat d'agence les unissant.
Par courrier en date du 25 février 2008, la société GT a sollicité de la société Admea le paiement d'une indemnité de préavis d'un montant de 1 471,36 euro, d'une indemnité de fin de contrat de 9 480, 67 euro et une indemnité de remploi de 3 128,68 euro.
Le 2 septembre 2008, à la suite du refus de la société Admea de payer ces indemnités, la société GT a assigné les sociétés Admea et Alth devant le Tribunal de commerce de Paris.
Par un jugement en date du 26 mai 2009, le Tribunal de commerce de Paris :
- condamne in solidum les sociétés SARL Admea et SASU Alth à payer à la société GT Représentations SARL les sommes de 2 591,98 euro à titre d'indemnité de préavis, 18 529,92 euro à titre d'indemnité compensatrice, avec intérêts légaux à compter du 2 septembre 2008, date de l'assignation, ainsi que 3 000 euro au titre de l'article 700 Code de procédure civile,
- ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,
- condamne in solidum les sociétés SARL Admea et Sasu Alth aux dépens.
LA COUR
Vu les conclusions signifiées le 15 avril 2010, par lesquelles les sociétés Admea et Alth demandent à la cour d'infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, de dire et juger irrecevable et à défaut débouter la société GT Représentations de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions et de condamner la société GT Représentations au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Vu les conclusions signifiées le 31 décembre 2009 par lesquelles la société GT Représentations demande à la cour de déclarer recevable en la forme l'appel interjeté par les sociétés appelantes mais de les en débouter au fond, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 26 mai 2009 et de condamner in solidum les sociétés Admea et Alth au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;
Considérant que les sociétés Admea et Alth contestent leur condamnation in solidum en première instance aux motifs que les demandes de la société GT Représentations à l'encontre des sociétés Admea et Alth résultent de la résiliation de contrats distincts portant sur des produits différents pour des prestations facturées séparément par chacune des deux sociétés ;
Que, concernant l'indemnité de préavis, les appelantes font valoir qu'elles en ont assuré l'exécution en mettant à disposition de la société GT Représentation un stock de produits de marque Keter et que la carence de celle-ci à exécuter son préavis ne résulte que de son propre fait ;
Que, concernant l'indemnité de fin de contrat, la société Admea estime bénéficier d'un droit intangible de résilier un contrat d'agence commercial et ce, sans avoir à motiver sa décision, en respectant le préavis légal et qu'en l'espèce, elle n'a fait qu'user de ce droit, la société GT Représentations ayant bénéficié d'un préavis de trois mois ;
Que la société Admea soutient que la société GT Représentations ne rapporte pas la preuve du préjudice subi, que leur relation commerciale est récente car initiée le 14 novembre 2001 et que pour ne pas préjudicier aux intérêts de la société GT Représentations, la société Admea a levé la clause de non-concurrence ;
Que concernant la société Alth, cette dernière ajoute que la relation commerciale avec GT Représentation n'a débuté qu'en 2007, que Alth a levé la clause de non-concurrence et que GT Représentation n'a engagé aucun investissement ou frais spécifiques pour l'exécution de son mandat;
Considérant que la société GT Représentations expose que ne sauraient être confondues la solidarité contractuelle et l'obligation in solidum délictuelle, cette dernière ayant vocation à s'appliquer en l'espèce en raison de faute distincte et d'une confusion des patrimoines de la société mère et de sa filiale ;
Que la société GT Représentations fait valoir qu'elle n'a pas été mise en mesure d'exécuter son préavis dès lors qu'aucune mesure n'avait été prise pour lui permettre d'écouler les produits Keter à un prix concurrentiel dès lors que le fabricant procédait à des ventes directes ;
Qu'elle rappelle que l'article L. 134-12 du Code de commerce donne droit, au bénéfice de l'agent commercial, à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi du fait de la cessation des relations avec le mandant et que l'usage est de fixer celle-ci à deux années de commissions ;
Considérant que les sociétés Admea et Alth n'ont présenté en appel aucun moyen nouveau de droit ou de fait qui justifie de remettre en cause le jugement attaqué lequel repose sur des motifs pertinents, non contraires à l'ordre public, résultant d'une analyse correcte des éléments de la procédure et la juste application de la loi et des principes régissant la matière ;
Considérant qu'en apportant la vente de radiateurs à la société Alth, la société Admea a vidé de toute sa substance le contrat initial en date du 14 novembre 2001; que par courrier du 17 février 2006, la société Admea a écrit à la société GT Représentation pour lui proposer le rachat de " la partie chauffage de l'ancien périmètre d'Adméa " ; que malgré trois courriers de relance Admea n'a donné aucune suite à ce courrier ; que le 20 mars 2008, les sociétés Admea et Alth ont fait des propositions d'indemnité compensatrice ;
Que par courrier recommandé Admea proposait à son agent à titre d'indemnisation à la suite de la "rupture du contrat d'agent commercial avec la société Admea et la société Alth" la somme globale de 10 820 euro soit :
- 6 020 euro HT au titre des commissions versées sur le CA des produits Alth
- 4 800 euro HT au titre des commissions versées sur le CA des produits Keter ;
Qu'est ainsi établie une confusion entre les deux sociétés à l'occasion de la gestion du contrat d'agent commercial de la société GT Représentation, la société mère Admea le vidant dans un premier temps de sa substance, puis s'immisçant dans la résiliation du nouveau contrat conclu par sa filiale ;
Considérant que c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu cette confusion et retenu in solidum les deux sociétés ;
Considérant que si la société Admea a confirmé à son agent dans un courrier en date du 20 mars 2008 être en possession d'un stock d'une valeur de 70 000 euro qu'il convenait d'apurer pendant le délai de préavis, elle n'a apporté aucune précision sur la consistance de ce stock, ni sur les prix pratiqués alors même qu'elle expliquait la rupture par la vente directe du fabricant ce qui, au regard de sa propre marge, faisait perdre toute attractivité à leur vente par son agent commercial, d'autant que ces ventes étaient réalisées auprès de professionnels de la distribution et excluaient, contrairement à ce que prétendait Admea, que le contrat puisse "continuer à s'exécuter normalement" ; qu'elle admettait qu'il s'agissait pour elle d'assurer la liquidation d'un stock ; qu'il lui appartenait de réaliser cette opération loyalement avec son agent qui s'agissant de l'apurement d'un stock résiduel, ne pouvait l'assurer dans les mêmes conditions de prix que celles fixées jusqu'alors ;
Considérant qu'aucune mesure n'ayant été prise en ce sens, il est évident que l'agent commercial n'était pas en mesure d'exécuter son préavis ce qui a été, à juste titre, retenu par les premiers juges ;
Considérant que l'article L. 134-12 du Code de commerce dispose "en cas de cessation de ses relations commerciales, l'agent commercial a droit une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi" ;
Que la société GT Représentations n'a commis aucune faute dans l'exécution de son mandat ; que c'est à bon droit du fait de la durée de ce mandat que les premiers juges ont estimé à deux ans de commissions le montant de cette indemnité et ont retenu un montant de 18 529,92 euro ;
Et considérant que la société GT Représentation a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge, qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif et de rejeter les demandes des sociétés Admea et Alth à ce titre.
Par ces motifs : Confirme le jugement entrepris, Condamne in solidum les sociétés Admea et Alth à payer à la société GT Représentations la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et rejette la demande de la société Abonnement Plus à ce titre, Condamne in solidum les sociétés Admea et Alth aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 de Code de procédure civile.