CA Reims, ch. civ. sect. 1, 6 septembre 2011, n° 10-00916
REIMS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Qualidis (SARL)
Défendeur :
Champagne Alain Thienot (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gellé
Conseillers :
Mme Hussenet, M. Ciret
Avoués :
SCP Six-Guillaume-Six, SCP Delvincourt Jacquemet Caulier-Richard
Avocats :
Me Michel, SCP Fournier-Badre-Hyonne-Sens-Salis-Denis
La société Champagne Alain Thienot a pour activité le négoce de vins de champagne. Société par actions simplifiée, elle est majoritairement détenue par la société Thienot SAS, et présidée par Monsieur Alain Thienot.
Depuis 1999, différentes sociétés détenues directement ou indirectement par la société Thienot SAS entretiennent ou ont entretenu des relations commerciales avec la SARL Qualidis, à laquelle elles ont confié mandat commercial de représenter en France et en Italie les différentes marques de champagne leur appartenant.
Pour la commodité des débats, il sera question par la suite du " groupe Thienot ".
Dans le courant de l'année 2006, les relations contractuelles ont été rompues à l'amiable entre les parties, s'agissant de la promotion des marques Joseph Perrier, et Carnard Duchene, et des transactions ont été signées, donnant lieu à chaque fois au paiement d'une indemnité à l'agent commercial Qualidis.
La société Champagne Alain Thienot, désireuse d'accroître les ventes de la marque homonyme sur le marché italien, a par ailleurs passé deux conventions :
- la première, en date du 7 juillet 2006, confiant l'exclusivité de la distribution des produits à la société Première SRL/Montresor, de droit italien,
- la seconde, le 19 juillet 2006, confiant l'assistance et le développement des ventes effectuées par Première SRL, à la société Qualidis, dans le cadre d'un contrat d'agent commercial.
Le 17 janvier 2008, la société Champagne Alain Thienot informait toutefois la société Première SRL de son intention de mettre fin au contrat de distribution.
Elle mettait fin également le 29 janvier 2008 au contrat d'agent commercial passé avec la société Qualidis.
C'est dans ces conditions que par exploit d'huissier régularisé le 9 décembre 2008, la SARL Qualidis a fait assigner la société Champagne Alain Thienot par devant le Tribunal de commerce de Reims, lui demandant de condamner la défenderesse, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à lui payer les sommes de 33 156 euro à titre de dommages et intérêts, 2 643,62 euro au titre de l'indemnité de préavis, et 35 277, 80 euro comme indemnité de cessation de contrat, le tout produisant intérêts au taux légal à compter du 8 février 2009 avec anatocisme. Il était encore sollicité une indemnité de procédure et la condamnation de la partie adverse aux dépens.
La SAS Champagne Alain Thienot s'opposait aux prétentions formées à son encontre, et sollicitait reconventionnellement qu'il fût fait application à son profit des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre la condamnation de la société Qualidis aux dépens de l'instance.
Par jugement rendu le 2 février 2010, revêtu de l'exécution provisoire, le tribunal a :
- Condamné la société Champagne Alain Thienot à payer à la société Qualidis les sommes de 5 173,84 euro au titre de l'indemnité de clientèle et 574,88 euro pour non-respect du préavis ;
- Ordonné à la société Qualidis de procéder à l'établissement d'un avoir sur commissions pour un montant de 1 914,96 euro et de régler cette somme à la société Champagne Alain Thienot,
- Débouté la société Champagne Alain Thienot de sa demande en paiement de la somme de 500 euro,
- Débouté les parties de toutes autres demandes, fins et conclusions,
- Condamné la société Qualidis à verser à la société Champagne Alain Thienot la somme de 500 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Partagé les dépens par moitié entre les sociétés Qualidis et Champagne Alain Thienot.
La SARL Qualidis a relevé appel de cette décision par déclaration du 12 avril 2010.
Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées le 25 mai 2011, auxquelles il sera renvoyé pour un exposé complet de ses prétentions et moyens, en application de l'article 455 du Code de procédure civile, elle poursuit la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SAS Champagne Alain Thienot à lui payer une indemnité de préavis et une indemnité de cessation de contrat, son infirmation pour le surplus, et demande à la cour, statuant à nouveau, de :
- condamner la société Champagne Alain Thienot SAS à lui payer les sommes de, sauf à parfaire :
* 35 771 euro à titre de dommages et intérêts,
* 2 139,14 euro au titre de l'indemnité de préavis,
* 38 061 euro au titre de l'indemnité de cessation de contrat, outre les intérêts au taux légal sur ces sommes, à compter du 8 février 2008 et avec capitalisation par année entière échue,
- débouter la société Champagne Alain Thienot SAS de l'ensemble de ses prétentions,
- condamner la société Champagne Alain Thienot SAS à lui verser la somme de 6 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, avec pour ceux d'appel, droit de recouvrement direct au profit de la SCP d'avoués Six-Guillaume-Six.
Par dernières écritures notifiées le 27 mai 2011, auxquelles il conviendra de même de se reporter, la SAS Champagne Alain Thienot demande à la cour de :
- lui donner acte de ce qu'elle s'est acquittée de la somme de 3 333,76 euro correspondant aux condamnations mises à sa charge par les premiers juges, déduction faite de l'avoir sur commissions à émettre par Qualidis et du montant qui lui a été alloué au titre des frais irrépétibles,
- confirmer le jugement querellé sur le principe de l'indemnité de préavis et celui de l'indemnité de cessation de contrat, à hauteur des sommes sus mentionnées exclusivement,
- déclarer tant irrecevable que mal fondée la société Qualidis en toutes ses autres demandes, tant au principal qu'au titre des intérêts avec capitalisation,
- dire et juger n'y avoir lieu à injonction à l'encontre de la SAS Champagne Alain Thienot d'avoir à produire toutes pièces concernant le lien invoqué par Qualidis entre la dite SAS et une nouvelle société de distribution,
- ajoutant au jugement, condamner la SARL Qualidis au paiement d'une indemnité de procédure complémentaire de 7 500 euro ainsi qu'aux entiers dépens avec pour ceux d'appel, droit de recouvrement direct au profit de la SCP Delvincourt Jacquemet Caulier-Richard, avoués.
Sur ce, LA COUR,
Sur les circonstances de la rupture du contrat :
Attendu qu'au soutien de son appel, la société Qualidis expose que la société Champagne Alain Thienot, mandante, a pris l'initiative de la rupture, alors même qu'elle n'avait aucun grief à formuler à son encontre, et, partant, doit en subir pleinement les conséquences financières ;
Que tout en affirmant qu'elle n'était quant à elle tenue à aucun des objectifs fixés au seul distributeur, et que les deux contrats conservaient un caractère indépendant qui aurait parfaitement permis la survie du mandat d'agent commercial à la résiliation du contrat de distribution, elle observe que, d'une part, lesdits objectifs ont été largement atteints contrairement à ce que prétend la société Champagne Alain Thienot, et que d'autre part cette dernière a de fait manifesté par son comportement qu'elle entendait faire un sort commun aux deux conventions, ce dont il doit résulter que le mandat d'agent commercial, initialement qualifié de mandat à durée indéterminée, doit en réalité être analysé comme un mandat à durée déterminée, avec toutes conséquences de droit ;
Attendu que non sans contradiction, la société Qualidis rappelle les dispositions de l'article 1165 du Code civil fondant le principe de l'effet relatif des contrats pour soutenir dans un premier temps qu'elle n'était pas liée par les quantités de vins de champagne Thienot devant être vendues sur le marché italien par la société Première SRL, tout en revendiquant avoir nécessairement bénéficié d'une convention limitée dans le temps à l'instar du distributeur, et solliciter des indemnisations calculées par référence exclusive aux objectifs fixés à ce dernier ;
Attendu que l'article 1134 du Code civil dispose que " les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. " ;
Que le contrat d'agent commercial signé le 19 juillet 2006 par la SAS Champagne Alain Thienot d'une part, et la société Qualidis d'autre part porte au chapitre I "Convention" : les mentions suivantes :
" le commettant confie à l'agent, qui l'accepte, le mandat de le représenter pour développer les ventes des produits commercialisés par le commettant désigné à l'article 2.
Il est entendu que les produits commercialisés par le commettant à l'article 2 sont commercialisés par l'intermédiaire de l'agent auprès du seul et unique client, la société Première SRL, qui bénéficie d'une convention de distribution avec bénéfice d'exclusivité sur l'Italie.
Dans ce contexte, l'agent assurera sur le territoire une triple mission :
1- de représentation des produits commercialisés par le commettant désigné à l'article 2,
2- d'encadrement (formation/motivation/suivi sur le terrain) de " Première SRL ", importateur exclusif des produits commercialisés par le commettant désigné à l'article 2,
3- de développement marketing (relations presse/dégustations/participation à des salons professionnels/visites en Champagne etc...) et ce pour les produits commercialisés par le commettant désigné à l'article 2. " ;
Que le chapitre II "obligations de l'agent" est ainsi rédigé :
" L'agent a pour mission d'assister au développement des ventes assurées par Première SRL. L'agent devra en particulier prospecter et suivre l'activité de Première SRL en accompagnant ses vendeurs. Assurer des missions de formation auprès des vendeurs de Première SRL. Participer aux événements mis en place par Première SRL sur les produits. Participer aux salons professionnels mis en place par Première SRL sur les produits.
L'agent s'engage à promouvoir et à travailler le produit de façon constante et progressive, tant au niveau commercial qu'au niveau du volume ainsi que sur l'ensemble des actions marketing.
L'agent s'engage à suivre la stratégie marketing déterminée par le commettant, à court, moyen, et long terme. ;
(...)
Un objectif de volume et de chiffres d'affaires annuels sera déterminé par les parties.
Cet objectif devra évoluer en fonction de l'évolution des produits offerts par le commettant et de l'état du marché.
Les objectifs sont précisés à l'annexe n° 1. Chaque année, les parties se rencontreront et mettront au point l'objectif de l'année suivante. ";
Qu'au chapitre "rémunération de l'agent", il est par ailleurs prévu une commission de 8 % sur toutes les ventes directes et indirectes, la TVA étant facturée en sus ;
Qu'enfin au chapitre V traitant de la durée du contrat, il est expressément prévu que " le contrat se conclut pour une durée indéterminée qui entrera en vigueur le 19 juillet 2006. La résiliation du contrat ne pourra avoir lieu que moyennant un préavis d'un mois par année commencée, avec au maximum un préavis de trois mois, sauf si cette résiliation est consécutive à une faute des parties, auquel cas il pourra être mis fin au contrat sans préavis. En cas de rupture du présent contrat par le commettant, sauf si l'agent a commis une faute grave justifiant cette rupture, l'agent pourra prétendre à une indemnité de clientèle. Il est convenu que le montant de l'indemnité sera égal aux commissions des trois dernières années perçues, divisées par trois et multipliées par deux. " ;
Attendu qu'est jointe en annexe la liste des objectifs de vente imposés à la société distributrice, savoir au minimum 4 000 bouteilles la première année, 8 000 bouteilles la deuxième et 12 000 la troisième et dernière année du contrat liant la société Première SRL à la société Champagne Alain Thienot ;
Attendu qu'il résulte de ces stipulations que le contrat conclu entre Qualidis et son mandant était bien à durée indéterminée, mais que le seul distributeur sur le territoire italien se trouvant être la société Première SRL, c'est auprès de cette dernière et en collaboration étroite avec elle que le mandat devait s'exécuter ; que nécessairement dans ces conditions, les objectifs à atteindre par le distributeur étaient connus de l'agent commercial, qui se devait d'en permettre la réalisation, sans qu'il puisse en être déduit pour autant que les deux contrats revêtaient un caractère indissociable ;
Attendu en effet que les conventions sont par nature totalement différentes, et qu'il était loisible au mandant, s'il avait tenu pour satisfaisant le travail de l'agent, de poursuivre avec lui la relation contractuelle nonobstant la résiliation anticipée du contrat de distribution, en faisant le choix d'un nouveau distributeur sur proposition, notamment, de Qualidis ;
Attendu ensuite que, s'agissant d'un contrat d'agent commercial à durée indéterminée, il est loisible aux parties d'y mettre un terme à tout moment, par application de l'article L. 134-11 du Code de commerce, sous la seule condition de respecter un préavis, en l'espèce de deux mois, obligation à laquelle la société Champagne Alain Thienot ne conteste pas n'avoir pas satisfait ; qu'il est cependant admis qu'un usage abusif du droit de résiliation unilatérale constitue une faute dommageable que le mandant doit réparer ;
Que c'est cette hypothèse qui est alléguée par la société Qualidis ;
Attendu en effet que l'appelante considère la rupture comme abusive, en ce qu'elle n'aurait été motivée que par la volonté du co-contractant de tirer les bénéfices de son travail en se passant désormais de ses services ; qu'elle lui fait grief d'avoir, avant même la rupture officielle des deux conventions, en janvier 2008, mis en place un distributeur concurrent, entravant sa propre activité ; qu'elle observe encore qu'aucun reproche ne lui avait été fait jusque là et qu'elle demeure agent commercial pour certaines marques du groupe Thienot ;
Attendu qu'aux termes de l'article L. 134-4 du Code de commerce , "les contrats intervenus entre les agents commerciaux et leurs mandants sont conclus dans l'intérêt commun des parties.
Les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d'information.
L'agent commercial doit exécuter son mandat en bon professionnel ; le mandant doit mettre l'agent commercial en mesure d'exécuter son mandat." ;
Attendu que la société Champagne Alain Thienot n'a jamais prétendu que son agent aurait commis une faute lourde justifiant notamment la réduction de ses droits à indemnisation ;
Qu'elle expose en revanche que les objectifs fixés n'ont pas été atteints, et qu'en particulier il n'a été vendu durant le premier exercice que 1 746 bouteilles au lieu des 4 000 escomptées ; que pour les six premiers mois du second exercice, les résultats étaient de même très insatisfaisants, puisque les ventes s'étaient limitées à 2388 bouteilles, ne permettant pas, alors même que la période des fêtes était passée, d'espérer atteindre l'objectif minimum de 8 000 bouteilles en fin d'exercice, tous éléments dont elle justifie par les pièces versées à son dossier de plaidoirie ;
Que la société Première SRL a par ailleurs multiplié les retards de paiement, alors même qu'il entrait dans la mission de l'agent commercial de veiller à la régularité de ceux-ci ;
Attendu par ailleurs qu'il n'est nullement démontré que la société distributrice choisie pour succéder à Première SRL aurait entrepris sa recherche de clientèle avant qu'il fût mis un terme au contrat de son prédécesseur, les résultats affichés concernant la période postérieure à cette rupture, soit à compter de la fin janvier 2008 ;
Que vainement, par suite, Qualidis fait état d'une concurrence déloyale, tout en s'attribuant paradoxalement, tant pour contester sa défaillance que pour le calcul de son indemnisation, les mérites des ventes enregistrées en 2008 ;
Attendu qu'il s'ensuit que la société Champagne Alain Thienot justifie d'un motif légitime à la résiliation du contrat, non seulement avec la société Première SRL, laquelle a du reste acquiescé et transigé, mais également avec l'agent commercial manifestement défaillant dans l'accomplissement de sa mission ; qu'il doit être noté que les coupures de presse produites par Qualidis pour établir la réalité des diligences accomplies ont en réalité pour la plupart trait à la marque Marie Stuart, hors débat, et pour laquelle elle conserve son mandat d'agent commercial, ce qui tend à démontrer que la société Champagne Alain Thienot n'a pas cherché par quelque moyen fallacieux à se passer des services de son co-contractant, auquel elle est toujours liée dans les domaines donnant satisfaction ;
Sur les conséquences de la rupture :
Attendu que la société Qualidis sollicite une triple indemnisation : des dommages et intérêts pour perte de commissions, une indemnité de préavis et une indemnité de cessation du contrat ;
Attendu qu'ainsi qu'il vient d'être dit, aucune faute ne peut être retenue à la charge du mandant de sorte que les conséquences de la rupture ne peuvent excéder les prévisions du contrat et de la loi ;
1°) l'avoir à émettre quant aux commissions :
Attendu que l'article L. 134-10 alinéa 1 du Code de commerce énonce que "le droit à la commission ne peut s'éteindre s'il est établi que le contrat entre le tiers et le mandant ne sera pas exécuté et si l'inexécution n'est pas due à des circonstances imputables au mandant.
Les commissions que l'agent commercial a déjà perçues sont remboursées si le droit y afférent est éteint." ;
Qu'à bon droit les premiers juges ont en conséquence considéré que Qualidis devait rembourser au mandant les commissions qu'il aurait indûment perçues ;
Que certaines ventes conclues par Qualidis auprès de Première ne pourront être exécutées dans la mesure où elles ont été annulées par première qui a retourné le stock correspondant, le tout pour une somme totale de 20 014,20 euro soit une commission calculée sur la base des 8 % contractuellement prévue, de 1 601,14 euro HT (8 %) ou 1 914,96 euro TTC, montant effectivement retenu par le tribunal ;
2°) les indemnités dues par la société Champagne Alain Thienot :
* L'indemnité de cessation du contrat :
Attendu que la société Qualidis fonde sa réclamation sur les dispositions de l'article L. 134-12 du Code de commerce, lequel prévoit effectivement une indemnité de cessation du contrat, autrement qualifiée d'indemnité de clientèle dans la convention, qui a pour objet de réparer le préjudice qui comprend la perte de toutes les rémunérations acquises lors de l'activité développée dans l'intérêt commun des parties, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon leur nature ;
Qu'il est d'usage, en l'absence de faute du mandant et de préjudice particulier en résultant, de calculer le montant de l'indemnité de cessation de fonction sur la base de deux années de commissions ; que toutefois lorsque le contrat a eu une durée moindre, la brièveté des relations commerciales doit être prise en compte pour le calcul ;
Attendu que l'article XV du contrat stipulait que le droit à commission de l'agent commercial n'était acquis qu'après acceptation des ordres et livraisons des commandes ;
Que l'article XX, conformément à l'usage rappelé plus haut, a fixé le montant de l'indemnité de fin de contrat à deux années de commissions calculées sur la moyenne des trois dernières années multipliée par deux ;
Que comme le fait valoir la société Champagne Alain Thienot, seules doivent être prises en considération les commissions effectivement perçues, et non celles escomptées dans l'hypothèse où les relations se seraient poursuivies, sur la base des objectifs fixés au distributeur ;
Attendu que la société Qualidis verse elle-même aux débats une attestation de son expert-comptable aux termes de laquelle elle reconnaît n'avoir établi que les factures de commissions suivantes :
- le 29 janvier 2009, une commission de 1 827,51 HT sur ventes à Première
- le 9 juillet 2007, une commission de 1 492,74 euro sur ventes à Montresor
- le 24 octobre 2007, une commission de 3 834,08 euro HT sur ventes à Montresor, soit un total de 7 154,09 euro HT ;
Attendu qu'ainsi que le fait observer l'intimée, la société Qualidis ne forme par ailleurs aucune demande au titre de rappel de commissions ;
Qu'après déduction de l'avoir que Qualidis devra restituer, correspondant aux ventes non effectuées, c'est bien la somme de 5 553,19 euro qui devra lui être versée au titre de l'indemnité de cessation de contrat ; que le jugement entrepris sera réformé de ce chef en ce que par suite d'une erreur de calcul il a retenu une somme de 5 173,84 euro ;
* l'indemnité au titre de la perte de commissions éventuelles (dommages et intérêts) :
Attendu que l'article L. 134-10 du Code de commerce, déjà cité, dispose que le droit à la commission ne peut s'éteindre que s'il est établi que le contrat entre le tiers et le mandant ne sera pas exécuté et si l'inexécution n'est pas due à des circonstances imputables au mandant ;
Qu'il a été jugé que le contrat liant les parties était un contrat à durée indéterminée, ce qui interdit de considérer qu'il aurait dû avoir une durée de vie de trois ans d'une part, que d'autre part il pouvait y être mis fin à tout moment, contrairement à ce qui est la règle pour les contrats à durée déterminée, sous la réserve de ne pas commettre d'abus, ce qui fut le cas en l'espèce ;
Qu'aucune indemnisation ne peut dès lors être sollicitée au titre des commissions éventuelles et qu'à bon droit le tribunal a rejeté ce chef de demande purement et simplement ;
* l'indemnité au titre du non-respect du préavis :
Attendu qu'aux termes de l'article L. 134-11 du Code de commerce rappelés dans l'article XVIII du contrat liant les parties, la société mandante se devait de respecter un délai de préavis de deux mois, ce qu'elle ne conteste pas avoir omis ;
Que là encore toutefois, la somme allouée doit être calculée sur la base des commissions effectivement perçues, et non escomptées en cas de poursuite de la convention ; que les commissions perçues durant les 18 mois d'effectivité du contrat correspondent à une moyenne mensuelle de 308,51 euro d'où un total pour deux mois de 617,02 euro, montant qu'il conviendra de même de rectifier ;
Sur la capitalisation des intérêts :
Attendu que rien ne s'oppose à ce qu'il soit fait droit dans le principe à la demande de capitalisation des intérêts par année entière sur les sommes que la société Champagne Alain Thienot est condamnée à payer, la circonstance que les versements ordonnés en première instance ont déjà été effectués au titre de l'exécution provisoire ayant seulement pour conséquence que lesdits intérêts ne sont plus exigibles à compter de la perception par Qualidis des fonds dont s'agit ; que la disposition du jugement relative à l'application de l'article 1154 du Code civil doit en conséquence être maintenue ;
Sur les frais et dépens :
Attendu que le jugement dont appel sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais et dépens de première instance ;
Que la société Qualidis, qui succombe au principal, supportera la charge des dépens d'appel, et sera tenue de verser à la SAS Champagne Alain Thienot la somme complémentaire de 2 000 euro au titre des frais irrépétibles d'appel, ne pouvant elle-même prétendre à une telle indemnité ;
Par ces motifs, Statuant publiquement et contradictoirement, Confirme le jugement rendu le 2 février 2010 par le Tribunal de commerce de Reims sauf à rectifier le montant des condamnations mises à la charge de la société Champagne Alain Thienot au titre : - de l'indemnité de cessation du contrat, qui sera portée à 5 553,19 euro au lieu de 5 173,84 euro ; - de l'indemnité de préavis, qui sera portée à 617,02 euro au lieu de 574,88 euro ; Donne acte à la société Champagne Alain Thienot de ce qu'elle s'est d'ores et déjà acquittée, dans le cadre de l'exécution provisoire du dit jugement, de la somme totale de 3 333,76 euro ; Condamne la SARL Qualidis à payer à la SAS Champagne Alain Thienot la somme complémentaire de 2 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile et rejette sa propre demande du même chef, Condamne la SARL Qualidis aux dépens d'appel et admet la SCP Delvincourt Jacquemet Caulier-Richard, avoués, au bénéfice de l'article 699 du Code précité.