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Décisions

TUE, 7e ch., 27 septembre 2011, n° T-199/04

TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Gul Ahmed Textile Mills Ltd

Défendeur :

Conseil de l'Union européenne, Commission européenne

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Forwood

Juges :

MM. Moavero Milanesi, Schwarcz (rapporteur)

Avocats :

Mes Ruessmann, Berrisch

TUE n° T-199/04

27 septembre 2011

LE TRIBUNAL (septième chambre),

Antécédents du litige

1. La requérante, Gul Ahmed Textile Mills Ltd, est une société de droit pakistanais, établie à Karachi (Pakistan). Elle est active, notamment, dans la vente et la commercialisation à l'exportation de linge de lit. La requérante fabrique ce produit au Pakistan et l'exporte dans l'Union européenne. Elle ne vend pas de linge de lit sur le marché intérieur du Pakistan, mais y vend différents produits de base.

2. À la suite d'une plainte, déposée par le Comité de l'industrie du coton et des fibres connexes de la Communauté européenne (ci-après " Eurocoton "), le 30 juillet 1996, et de l'ouverture d'une procédure antidumping, le 13 septembre 1996, des droits antidumping définitifs ont été imposés notamment aux producteurs pakistanais par le règlement (CE) n° 2398-97 du Conseil, du 28 novembre 1997, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de linge de lit en coton originaires d'Égypte, d'Inde et du Pakistan (JO L 332, p. 1, ci-après les " droits antidumping antérieurs "). Conformément à l'article 1er, premier alinéa, dudit règlement, l'institution du droit antidumping définitif concernait des importations de linge de lit en coton, pur ou mélangé avec des fibres synthétiques ou artificielles ou avec du lin (lin non dominant), blanchi, teint ou imprimé, relevant des Codes suivants de la nomenclature combinée : ex 6302 21 00 (Code TARIC 6302 21 00 * 81 et 6302 21 00 * 89), ex 6302 22 90 (Code TARIC 6302 22 90 * 19), ex 6302 31 10 (Code TARIC 6302 31 10 * 90), ex 6302 31 90 (Code TARIC 6302 31 90 * 90) et ex 6302 32 90 (Code TARIC 6302 32 90 * 19).

3. Conformément au protocole d'accord entre la Communauté européenne et la République islamique du Pakistan, concernant les arrangements provisoires dans le domaine de l'accès au marché des produits textiles et d'habillement, paraphé à Bruxelles le 15 octobre 2001 (JO L 345, p. 81), et à la suite de l'adoption du règlement (CE) n° 2501-2001 du Conseil, du 10 décembre 2001, portant application d'un schéma de préférences tarifaires généralisées pour la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 (JO L 346, p. 1), le Pakistan a commencé à bénéficier dudit schéma dans la mesure où celui-ci s'appliquait aux pays luttant contre la production et le trafic de drogues. En conséquence, des produits textiles et d'habillement du Pakistan ont commencé, à partir du 1er janvier 2002, à entrer en franchise de droits dans la Communauté européenne après avoir été soumis à un droit de douane de 12 %. Conformément à l'article 10 du règlement n° 2501-2001, lu en combinaison avec l'annexe IV de celui-ci, les produits exemptés de droits en raison de leur inclusion dans le régime spécial de lutte contre la production et le trafic de drogue incluaient notamment les produits suivants, relevant du chapitre 63 de la nomenclature combinée : " autres articles textiles confectionnés ; assortiments ; friperie et chiffons ".

4. Les droits antidumping antérieurs ont été abolis à partir du 30 janvier 2002, en ce qui concerne les producteurs pakistanais, par le règlement (CE) n° 160-2002 du Conseil, du 28 janvier 2002, modifiant le règlement n° 2398-97 (JO L 26, p. 1).

5. À la suite d'une nouvelle plainte déposée le 4 novembre 2002 par Eurocoton au nom de producteurs représentant une proportion majeure de la production communautaire totale de linge de lit en coton, la Commission des Communautés européennes a ouvert une procédure antidumping concernant les importations dans la Communauté de linge de lit en coton, pur ou mélangé avec des fibres synthétiques ou artificielles ou avec du lin (lin non dominant), blanchi, teint ou imprimé, originaire du Pakistan (ci-après le " produit concerné "), au regards desquelles elle a mentionné, " à titre purement indicatif ", qu'elles relevaient des Codes de la nomenclature combinée " ex 6302 21 00, ex 6302 22 90, ex 6302 31 10, ex 6302 31 90 et ex 6302 32 90 ". L'avis d'ouverture de cette procédure a été publié au Journal officiel des Communautés européennes du 18 décembre 2002 (JO C 316, p. 6).

6. L'enquête relative au dumping et au préjudice en résultant a porté sur la période comprise entre le 1er octobre 2001 et le 30 septembre 2002 (ci-après la " période d'enquête "). L'examen des tendances utiles aux fins de l'évaluation du préjudice a couvert la période allant de 1999 à la fin de la période d'enquête (ci-après la " période considérée ").

7. Compte tenu du nombre élevé de producteurs-exportateurs concernés par la procédure antidumping, la Commission a, conformément à l'article 17 du règlement (CE) n° 384-96 du Conseil, du 22 décembre 1995, relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 1996, L 56, p. 1), tel que modifié, en dernier lieu, à la date des faits, par le règlement (CE) n° 1972-2002 (JO L 305, p. 1) (ci-après le " règlement de base ") [remplacé par le règlement (CE) n° 1225-2009 du Conseil, du 30 novembre 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO L 343, p. 51, rectificatif au JO 2010, L 7, p. 22)], choisi un échantillon de six sociétés, dont la requérante, représentant plus de 32 % du volume des exportations pakistanaises de linge de lit en coton à destination de la Communauté pendant la période d'enquête. Ces sociétés étaient invitées à répondre au questionnaire antidumping.

8. Compte tenu du grand nombre de producteurs communautaires soutenant la plainte et conformément à l'article 17 du règlement de base, la Commission en a également sélectionné un échantillon, composé de cinq sociétés provenant de trois États membres, en fonction du volume de production et de ventes considéré comme étant le plus représentatif de la taille du marché. Par la suite, la Commission a adressé des questionnaires à ces sociétés.

9. Tous les producteurs-exportateurs pakistanais inclus dans l'échantillon ont fourni des réponses au questionnaire, ainsi que les cinq producteurs communautaires à l'origine de la plainte inclus dans l'échantillon. Par ailleurs, des réponses au questionnaire avaient également été fournies par deux importateurs indépendants dans la Communauté, ainsi que par trois producteurs-exportateurs pakistanais non retenus dans l'échantillon et ayant demandé un traitement individuel.

10. Le 10 février 2003, les associations représentant les producteurs-exportateurs pakistanais de linge de lit ont soumis à la Commission un document intitulé " Observations sur le préjudice ". Elles y contestaient notamment la légalité de l'ouverture de la procédure antidumping, la matérialité du préjudice subi par l'industrie communautaire ainsi que l'existence d'un lien de causalité entre les exportations pakistanaises et le prétendu préjudice subi par ladite industrie. Le 2 juin 2003, une audition a été organisée par la Commission, en présence, notamment, de producteurs-exportateurs pakistanais, dont la requérante. Les associations représentant les producteurs-exportateurs pakistanais ont ensuite fourni à la Commission un document intitulé " Observations post audition sur le préjudice ", dans lequel elles reprenaient les points abordés lors de cette audition.

11. Conformément à l'article 16 du règlement de base, la Commission a procédé à des vérifications sur place, notamment auprès de deux producteurs-exportateurs pakistanais, afin de vérifier les informations qui lui ont été transmises dans les réponses au questionnaire. Toutefois, alors qu'il était procédé aux vérifications auprès du second producteur-exportateur pakistanais, à savoir la société Al-Abid Silk Mills, établie à Karachi, la Commission a reçu une lettre anonyme adressée personnellement aux fonctionnaires chargés du contrôle, les menaçant de mort. Au regard du caractère spécifique et personnel de cette lettre de menace, la Commission a estimé que les conditions nécessaires n'étaient pas réunies pour effectuer les vérifications et que l'enquête s'en trouvait fortement entravée. Les visites de vérification ont donc été interrompues. Ainsi, seule une vérification complète dans les locaux d'un producteur-exportateur pakistanais, à savoir la requérante, et une vérification partielle dans les locaux d'un autre producteur-exportateur pakistanais ont été effectuées. Les exportations de ces deux sociétés représentaient plus de 50 % de la valeur totale caf (coût, assurance et fret) des exportations vers la Communauté réalisées par les producteurs-exportateurs de l'échantillon. En outre, estimant que les conditions nécessaires n'étaient pas réunies pour procéder à l'enquête sur place au Pakistan, la Commission n'a pas accepté les demandes de traitement individuel présentées par les trois producteurs-exportateurs pakistanais non retenus dans l'échantillon.

12. Le 10 décembre 2003, la Commission a adressé à la requérante un document d'information finale général détaillant les faits et les motifs pour lesquels elle proposait l'adoption des mesures antidumping définitives, ainsi qu'un document d'information finale spécifique pour la requérante (ci-après les " documents d'information finale "). Par lettre du 5 janvier 2004, la requérante a officiellement contesté les conclusions de la Commission, telles qu'exposées dans les documents d'information finale. D'autres informations ont été soumises par la requérante à la Commission par lettres datées du 16 février 2004.

13. Le 17 février 2004, la Commission a répondu à la lettre du 5 janvier 2004. Bien qu'elle ait apporté certaines rectifications à ses calculs, elle a confirmé les conclusions auxquelles elle était parvenue dans les documents d'information finale. Par lettre du 27 février 2004, la requérante a insisté sur les erreurs que la Commission aurait commises dans son analyse.

14. Les 23 février et 1er mars 2004, la requérante avait demandé la tenue d'une nouvelle audition afin d'apporter des éléments qui justifieraient la diminution de la marge de dumping, mais la Commission n'a pas donné une suite favorable à cette demande.

15. Le 2 mars 2004, le Conseil a adopté le règlement (CE) n° 397-2004 instituant un droit antidumping définitif sur les importations de linge de lit en coton originaire du Pakistan (JO L 66, p. 1, ci-après le " règlement attaqué ").

16. Par le règlement attaqué, le Conseil a imposé des droits antidumping de 13,1 % sur les importations de linge de lit en coton, pur ou mélangé avec des fibres synthétiques ou artificielles ou avec du lin (lin non dominant), blanchi, teint ou imprimé, originaire du Pakistan, relevant des Codes de la nomenclature combinée ex 6302 21 00 (Codes TARIC 6302 21 00 81 et 6302 21 00 89), ex 6302 22 90 (Code TARIC 6302 22 90 19), ex 6302 31 10 (Code TARIC 6302 31 10 90), ex 6302 31 90 (Code TARIC 6302 31 90 90) et ex 6302 32 90 (Code TARIC 6302 32 90 19).

17. Par la suite, le règlement attaqué a été modifié, en ce qui concerne la requérante, par le règlement (CE) n° 695-2006 du Conseil, du 5 mai 2006, le modifiant (JO L 121, p. 14). Le règlement modificatif a établi à 5,6 % le taux du droit antidumping définitif applicable aux produits concernés fabriqués par la requérante.

Procédure et conclusions des parties

18. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 mai 2004, la requérante a introduit le présent recours.

19. Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 9 septembre 2004, la requérante a demandé la suspension de la procédure jusqu'au 31 décembre 2004. Après avoir mis le Conseil en mesure de présenter ses observations, le président de la cinquième chambre du Tribunal a, par ordonnance du 15 octobre 2004, fait droit à cette demande.

20. Par acte déposé au greffe du Tribunal le 14 septembre 2004, la Commission a demandé à intervenir au soutien des conclusions du Conseil. Par ordonnance du 15 mars 2005, le président de la cinquième chambre du Tribunal a admis cette intervention.

21. Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 31 décembre 2004, la requérante a demandé à prolonger la suspension de la procédure jusqu'au 30 avril 2005. Dans ses observations, déposées au greffe du Tribunal le 7 mars 2005, le Conseil a estimé qu'il serait, d'un point de vue procédural, plus opportun de suspendre la procédure pour une durée indéterminée, jusqu'à ce que la requérante demande la réouverture de la procédure. Par ordonnance du 31 mars 2005, le président de la cinquième chambre du Tribunal a suspendu la procédure pour une durée indéterminée.

22. Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 23 juin 2006, la requérante a demandé la réouverture de la procédure. Après avoir mis le Conseil et la Commission en mesure de présenter leurs observations, le président de la cinquième chambre du Tribunal a, par ordonnance du 7 septembre 2006, ordonné la reprise de la procédure.

23. Par lettre du 15 janvier 2007, la Commission a informé le Tribunal qu'elle renonçait à déposer un mémoire en intervention, mais qu'elle prendrait part à l'audience.

24. La composition des chambres ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la septième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée. Le juge rapporteur initialement désigné étant empêché de siéger, le président du Tribunal a attribué l'affaire, le 16 octobre 2009, à un autre juge rapporteur.

25. La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :

- annuler le règlement attaqué dans la mesure où il la concerne ;

- condamner le Conseil aux dépens.

26. Le Conseil, soutenu par la Commission, conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :

- rejeter le recours ;

- condamner la requérante aux dépens.

27. La clôture de la procédure écrite a été notifiée aux parties le 14 mai 2007. Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (septième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l'audience du 27 octobre 2010.

En droit

28. À l'appui de sa demande en annulation, la requérante invoque cinq moyens, tirés respectivement :

- de la violation, en ce qui concerne l'ouverture de l'enquête, de l'article 5, paragraphes 7 et 9, du règlement de base, et des articles 5.1 et 5.2 de l'accord sur la mise en œuvre de l'article VI de l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (GATT) (JO L 336, p. 103, ci-après le " Code antidumping de 1994 ") figurant à l'annexe 1 A de l'accord instituant l'Organisation mondiale de commerce (OMC) (JO 1994, L 336, p. 1) ;

- de l'erreur manifeste d'appréciation et de la violation de l'article 2, paragraphes 3 et 5, et de l'article 18, paragraphe 4, du règlement de base, ainsi que de la violation du Code antidumping de 1994, en ce qui concerne le calcul de la valeur normale ;

- de la violation de l'article 2, paragraphe 10, du règlement de base, du Code antidumping de 1994 et de l'obligation de fournir une motivation adéquate, imposée par l'article 253 CE, en ce qui concerne l'ajustement au titre de la ristourne des droits intervenu dans la comparaison entre la valeur normale et le prix à l'exportation ;

- de l'erreur manifeste d'appréciation et de la violation de l'article 3, paragraphes l, 2, 3 et 5, du règlement de base, et de la violation du Code antidumping de 1994, en ce qui concerne la détermination de l'existence d'un préjudice important ;

- de l'erreur manifeste d'appréciation et de la violation de l'article 3, paragraphes 6 et 7, du règlement de base, et du Code antidumping de 1994, en ce qui concerne l'établissement d'un lien de causalité entre les importations faisant prétendument l'objet d'un dumping et le préjudice allégué.

29. Le Tribunal relève que le cinquième moyen se divise en quatre branches. Par la première branche, la requérante reproche au Conseil, en substance, d'avoir commis une erreur manifeste d'appréciation en n'ayant pas correctement apprécié l'effet de la prétendue décision commerciale, que l'industrie communautaire aurait sciemment prise, de détourner sa production et ses ventes du segment à faible valeur pour les réorienter vers le segment à valeur élevée du marché communautaire du linge de lit. Par la deuxième branche, la requérante reproche, en substance, au Conseil d'avoir commis une erreur manifeste d'appréciation en ne concluant pas que les importations du produit concerné en provenance de la Turquie et des États d'Europe centrale et orientale, engendrées par une décision de l'industrie communautaire d'y délocaliser sa fabrication des produits de gamme inférieure, auraient rompu la relation de cause à effet entre les importations pakistanaises et le préjudice causé à l'industrie communautaire. Par la troisième branche, la requérante reproche au Conseil, en substance, d'avoir commis une erreur de droit en n'ayant pas examiné si l'abolition des droits antidumping antérieurs et la mise en place du système généralisé de préférences au début de l'année 2002 au profit du Pakistan avaient pour effet de rompre le lien de causalité entre le préjudice subi par l'industrie communautaire et les importations pakistanaises. Par la quatrième branche, la requérante reproche au Conseil, en substance, d'avoir méconnu l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base et l'article 3.5 de l'accord antidumping, en s'abstenant d'évaluer l'incidence collective des autres facteurs qui causent un préjudice à l'industrie communautaire.

30. Le Tribunal estime opportun de se prononcer, tout d'abord, sur la troisième branche du cinquième moyen.

Arguments des parties

31. La requérante reproche, en substance, au Conseil d'avoir commis une erreur de droit en n'ayant pas examiné si l'abolition des droits antidumping antérieurs et la mise en place du système de préférences tarifaires généralisées au profit du Pakistan en janvier 2002 avaient pour effet de rompre le lien de causalité entre le préjudice prétendument subi par l'industrie communautaire et les importations pakistanaises visées par le règlement attaqué, bien que la conséquence immédiate cumulée de ces deux mesures eut été, selon la requérante, la diminution du coût des importations en provenance du Pakistan d'environ 20 %.

32. Le Conseil admet que les institutions de l'Union n'ont pas évalué l'incidence de la suppression des droits antidumping antérieurs et de l'instauration du système de préférences tarifaires généralisées au profit du Pakistan. Il estime, toutefois, que le règlement de base ne les y obligeait pas.

33. En premier lieu, selon le Conseil, les mesures réglementaires ne constituent pas des " facteurs connus, autres que les importations faisant l'objet d'un dumping, qui, au même moment, causent un préjudice à l'industrie communautaire " au sens de l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base. Les exemples mentionnés dans ledit article démontreraient que lesdits facteurs sont des évolutions ou des comportements relatifs au marché, mais pas des modifications du cadre réglementaire du marché. Le Conseil ajoute que, l'instauration ou la réduction des droits ne s'appliquant qu'aux importations, elles ne peuvent avoir une incidence que sur le volume et sur le prix des importations faisant l'objet d'un dumping, mais pas sur l'industrie communautaire. Par ailleurs, ces indicateurs économiques auraient déjà été pris en considération lors de la détermination de la cause du préjudice.

34. À l'audience, le Conseil a fait valoir, à cet égard, que les modifications du cadre réglementaire ne pouvaient pas, en tant que telles, avoir d'impact direct et immédiat sur les performances des entreprises européennes. Selon lui, ce seraient uniquement les comportements sur le marché, consécutifs auxdites modifications, qu'il conviendrait de prendre en considération pour savoir si le lien de causalité entre le préjudice subi par l'industrie communautaire et les importations du Pakistan faisant l'objet d'un dumping avait été rompu.

35. En deuxième lieu, le Conseil soutient que, même si la suppression des droits antidumping antérieurs et l'instauration du système de préférences tarifaires généralisées au profit du Pakistan pouvaient être considérés comme " des facteurs connus, autres que les importations faisant l'objet d'un dumping, qui, au même moment, causent un préjudice à l'industrie communautaire ", ces facteurs n'étaient pas pertinents en l'espèce, parce qu'ils ne pouvaient pas briser le lien de causalité susvisé.

36. Le Conseil avance, à cet égard, que la clause pertinente du système de préférences tarifaires généralisées n'est entrée en vigueur que le 1er janvier 2002 et que les droits antidumping antérieurs n'ont été supprimés que le 30 janvier 2002. Comme la période d'enquête couvrait la période allant du 1er octobre 2001 au 30 septembre 2002, ces deux mesures ne pouvaient, selon lui, avoir une incidence que sur une partie de la période d'enquête, mais ne pourraient pas expliquer la tendance négative durant la période considérée. En outre, trois des six exportateurs pakistanais de l'échantillon, dont la requérante, n'auraient pas été soumis à des droits antidumping antérieurs. Les importateurs communautaires auraient donc eu, à tout moment, d'importantes sources pakistanaises disponibles, à savoir celles provenant d'entreprises qui n'étaient pas soumises à des droits antidumping. Le Conseil fait également valoir que, à la suite de l'entrée en vigueur du système de préférences tarifaires généralisées au profit du Pakistan et de la suppression des droits antidumping antérieurs, les prix de l'industrie communautaire sont restés stables ou ont augmenté, ce qui démontrerait qu'aucun de ces événements n'a eu d'effet notable.

37. Enfin, le Conseil estime que la requérante a omis de soulever ce point au cours de la procédure administrative.

38. La Commission a fait valoir à l'audience, en se référant à des données chiffrées ressortant notamment du considérant 78 du règlement attaqué, qu'elle avait analysé l'incidence des modifications réglementaires en cause dans le cadre de l'évaluation de la valeur caf des produits en question.

39. La requérante répond que la distinction faite par le Conseil dans l'interprétation de la notion de " facteurs connus, autres que les importations faisant l'objet d'un dumping, qui, au même moment, causent un préjudice à l'industrie communautaire " entre, d'une part, des évolutions ou des comportements relatifs au marché, et d'autre part, des modifications du cadre réglementaire du marché, est contestable, puisqu'elle ne trouve aucun support dans la réglementation applicable.

40. En premier lieu, selon la requérante, ni l'énumération faite à l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base ni celle faite à l'article 3.5 du Code antidumping de 1994 ne seraient exhaustives. L'interprétation de l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base avancée par le Conseil irait à l'encontre de l'objectif poursuivi par l'article 3.5 du Code antidumping de 1994, qui serait d'assurer que les effets d'autres facteurs connus qui ont contribué à un préjudice subi par l'industrie européenne ne soient pas attribués aux importations faisant l'objet de l'enquête visant le dumping. Or, les deux modifications du cadre réglementaire, qui sont en cause en l'espèce, auraient manifestement eu une incidence connue et importante sur le prix des importations en provenance du Pakistan, et donc sur le marché commun. La requérante souligne l'importance de cet aspect au vu du considérant 106 du règlement attaqué, faisant valoir qu'au sens de celui-ci, les prix moyens des importations en provenance du Pakistan avaient exercé une pression sur l'industrie communautaire en la contraignant, notamment, à baisser ses prix.

41. En second lieu, la requérante soutient que, bien que ces modifications sur le marché communautaire n'aient eu d'effet, respectivement, qu'à partir du 1er et du 30 janvier 2002, elles auraient néanmoins eu une influence significative sur ce marché, ainsi que sur la production communautaire. Tout d'abord, les contrats d'importation, vers la Communauté, du produit concerné auraient anticipé l'abolition des droits de douane existants, celle-ci étant connue longtemps en avance.

42. Ensuite, s'agissant de l'affirmation du Conseil selon laquelle trois des six exportateurs faisant l'objet de l'échantillon pris en compte en l'espèce n'avaient pas été soumis aux droits antidumpings antérieurs, la requérante rétorque que l'échantillon tout entier ne représentait que le tiers des importations en cause dans la période d'enquête, que le pourcentage des importations non affectées par les droits antidumping serait relativement restreint et que la suppression des droits de douane ordinaires au titre du système de préférences tarifaires généralisées en faveur du Pakistan aurait eu, à elle seule, pour effet une diminution significative du prix des importations de provenance pakistanaise, de l'ordre de 10 %, dont le Conseil ne tiendrait pas compte. En outre, même les plaignants auraient admis, dans leur plainte, les effets de ladite suppression des droits sur l'augmentation subite des importations en provenance du Pakistan.

43. Enfin, la requérante fait valoir que plusieurs indicateurs économiques, avancés par le Conseil au soutien de ses affirmations, dont les prix de l'industrie communautaire, la baisse de son niveau de rentabilité, le volume des ventes et la part de marché des importations visées, montreraient clairement que le préjudice subi par l'industrie communautaire se concentrait entre la fin de l'année 2001 et la fin de la période d'enquête, c'est-à-dire après que le cadre réglementaire applicable au marché communautaire avait déjà changé, cette modification ayant un rapport évident avec l'évolution des paramètres susvisés. La requérante soutient ainsi que le Conseil n'établit pas l'existence d'une " tendance négative ", durant la période considérée, que ne pourrait expliquer la suppression des droits en question. À l'audience, la requérante a mis en avant que la suppression des droits dans une telle proportion avait nécessairement eu des impacts sur le marché pendant toute la période d'enquête.

Appréciation du Tribunal

44. Quant à l'établissement d'un lien de causalité entre les importations faisant objet de dumping et le préjudice subi par l'industrie communautaire, l'article 3, paragraphes 6 et 7, du règlement de base (devenu article 3, paragraphes 6 et 7, du règlement n° 1225-2009) énonce ce qui suit :

" 6. Il doit être démontré à l'aide de tous les éléments de preuve pertinents présentés en relation avec le paragraphe 2 que les importations faisant l'objet d'un dumping causent un préjudice au sens du présent règlement. En l'occurrence, cela implique la démonstration que le volume et/ou les niveaux des prix visés au paragraphe 3 ont un impact sur l'industrie communautaire au sens du paragraphe 5 et que cet impact est tel qu'on puisse le considérer comme important.

7. Les facteurs connus, autres que les importations faisant l'objet d'un dumping, qui, au même moment, causent un préjudice à l'industrie communautaire sont aussi examinés de manière à ce que le préjudice causé par ces autres facteurs ne soit pas attribué aux importations faisant l'objet d'un dumping au sens du paragraphe 6. Les facteurs qui peuvent être considérés comme pertinents à cet égard comprennent, entre autres, le volume et les prix des importations non vendues à des prix de dumping, la contraction de la demande ou les modifications de la configuration de la consommation, les pratiques commerciales restrictives des producteurs de pays tiers et communautaires et la concurrence entre ces mêmes producteurs, l'évolution des techniques, ainsi que les résultats à l'exportation et la productivité de l'industrie communautaire. "

45. En premier lieu, il convient de relever qu'il ressort d'une manière suffisante du dossier que les associations représentant les producteurs-exportateurs pakistanais de linge de lit ont, dès le début de la procédure administrative, dûment attiré l'attention des institutions de l'Union sur le fait que le préjudice qu'aurait prétendument subi l'industrie communautaire ne tirerait, en tout état de cause, pas son origine d'un dumping portant sur les importations de provenance pakistanaise, mais de l'abolition des droits antidumping antérieurs et des droits de douane ordinaires dans le cadre du système de préférences tarifaires généralisées au profit du Pakistan.

46. En effet, premièrement, une référence explicite à cet égard avait été faite aux pages 2 à 4, 23 et 24 de la lettre du 10 février 2003, portant observations des associations représentant les producteurs-exportateurs pakistanais de linge de lit sur le préjudice. Lesdites associations ont notamment soutenu, en référence à l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base, que le prétendu préjudice de l'industrie communautaire causé par l'évolution du marché ne pouvait être attribué aux importations originaires du Pakistan faisant l'objet de la procédure antidumping.

47. Deuxièmement, à la page 24 de ladite lettre, lesdites associations ont avancé que la plaignante elle-même, c'est-à-dire Eurocoton, avait indiqué que " l'augmentation de l'importation des produits concernés en provenance du Pakistan pendant le premier trimestre de 2002 a été facilitée par une autre concession de la Communauté envers le Pakistan, à savoir, par le bénéfice de l'accès exempt de droits au marché de la Communauté européenne de linge de lit, conformément au régime spécial de lutte contre la fabrication de drogues ". Les associations représentant les producteurs-exportateurs pakistanais en ont conclu qu'il était, dès lors, manifeste que l'augmentation en cause n'était pas une conséquence du dumping, mais de l'abolition des droits antérieurs.

48. Troisièmement, dans leurs observations présentées à la suite de l'audition du 2 juin 2003, aux pages 20 à 22, les associations représentant les producteurs-exportateurs pakistanais ont fait valoir que les producteurs européens ne considéraient pas que les importations en provenance du Pakistan constituaient la cause d'un préjudice subi par l'industrie communautaire et que, selon les producteurs européens, cette industrie devait combattre des bas prix découlant notamment, d'une part, de l'avantage comparatif des " pays en voie de développement ", ainsi que, d'autre part, de l'abolition de droits antérieurs sur les importations en provenance du Pakistan, qu'il s'agisse de droits ordinaires ou de droits antidumping.

49. Dans ces circonstances, il y a lieu de constater que les institutions de l'Union avaient été mises en mesure, par les associations représentant les producteurs-exportateurs pakistanais, d'apprécier les effets que les modifications du cadre réglementaire avaient été susceptibles de produire sur l'industrie communautaire et, par voie de conséquence, sur le lien de causalité entre le préjudice prétendument subi par cette industrie et les importations faisant l'objet de la procédure antidumping, et ce alors même que cette question était absente des observations de la requérante sur les documents d'information finale.

50. En second lieu, il convient de relever que, ainsi que l'a soutenu la requérante, la plainte déposée par Eurocoton signalait les effets négatifs sur l'industrie communautaire de l'abolition des droits antidumping antérieurs et des droits de douane ordinaires dans le cadre du système de préférences tarifaires généralisées au profit du Pakistan. À cet égard, notamment, après avoir informé la Commission, à la page 3 de sa plainte, de ce que le produit concerné bénéficiait de l'exonération de droits à l'importation au titre du système de préférences tarifaires généralisées après avoir été soumis, auparavant, à un droit de 12 % ad valorem, la plaignante a indiqué, à la page 7 de sa plainte, que les droits antidumping antérieurs avaient été abolis avec effet au 30 janvier 2002. À la page 8 de la plainte, la plaignante a avancé la conclusion susvisée, selon laquelle l'augmentation des importations en provenance du Pakistan avait été facilitée par l'exemption de certains droits.

51. En l'occurrence, force est donc de constater que le facteur consistant en des modifications du cadre réglementaire était connu des institutions de l'Union au plus tard à la date du dépôt de la plainte dans l'enquête en cause.

52. Partant, il convient d'apprécier les arguments de la requérante concernant la troisième branche du cinquième moyen.

53. En ce qui concerne, plus particulièrement, les conséquences d'une éventuelle abstention, par les institutions de l'Union chargées de l'enquête antidumping, d'examiner tous les " facteurs connus, autres que les importations faisant l'objet d'un dumping, qui, au même moment, causent un préjudice à l'industrie communautaire " selon l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base, il y a lieu de constater que, si les effets dommageables des importations faisant l'objet d'un dumping ne sont pas correctement dissociés et distingués des effets dommageables de ces autres facteurs, lesdites institutions ne seront pas en mesure de conclure que le dommage qu'elles attribuent aux importations faisant l'objet d'un dumping est effectivement causé par celles-ci, plutôt que par d'autres facteurs. Ainsi, sans cette dissociation et cette distinction des différents effets dommageables, lesdites institutions n'auraient aucune base objective leur permettant de conclure que les importations faisant l'objet d'un dumping causent réellement le dommage qui justifie l'imposition des droits antidumping. Cette dissociation des effets dommageables dus à des facteurs autres que les importations faisant l'objet d'un dumping exige une analyse concrète de la nature et de l'importance des facteurs en cause. En outre, cette analyse ne saurait reposer sur la simple hypothèse que les facteurs autres que les importations faisant l'objet d'un dumping ne causent pas le dommage et ne contribuent pas à celui-ci.

54. À cet égard, tout d'abord, il convient de rappeler que les textes communautaires doivent être interprétés, dans la mesure du possible, à la lumière du droit international, en particulier lorsque de tels textes visent précisément à mettre en œuvre un accord international conclu par la Communauté, comme c'est le cas du règlement de base, qui a été adopté pour satisfaire aux obligations internationales découlant du Code antidumping de 1994 (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 14 juillet 1998, Bettati, C-341-95, Rec. p. I-4355, point 20 ; du 23 novembre 1999, Portugal/Conseil, C-149-96, Rec. p. I-8395, point 49, et du 9 janvier 2003, Petrotub et Republica, C-76-00 P, Rec. p. I-79, points 55 à 57).

55. Ensuite, en ce qui concerne la distinction établie par le Conseil entre, d'une part, des évolutions ou des comportements relatifs au marché, et d'autre part, des modifications du cadre réglementaire du marché, il importe de constater qu'elle ne découle ni de l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base, ni de l'article 3.5 du Code antidumping de 1994. En tout état de cause, la distinction avancée par le Conseil ne peut pas non plus être déduite de quelconques traits communs que présenteraient les facteurs connus expressément énumérés en ces dispositions.

56. En effet, premièrement, ainsi qu'il ressort du libellé même de ces deux dispositions, les énumérations des " facteurs connus, autres que les importations faisant l'objet d'un dumping " qui y sont faites ne sont pas limitatives, mais, au contraire, indicatives, comme le révèle l'utilisation des termes " entre autres " introduisant la liste des facteurs qui peuvent être considérés comme pertinents [voir, par analogie, en ce qui concerne le Code antidumping de 1994, les rapports du groupe spécial établi dans le cadre du GATT, et intitulés " Etats-Unis - Imposition de droits antidumping sur les importations de saumons frais et réfrigérés en provenance de Norvège ", adopté le 27 avril 1994 (ADP/87, paragraphe 550), et " Thaïlande - Droits antidumping sur les profilés en fer ou en aciers non alliés et les poutres en H en provenance de Pologne ", adopté le 28 septembre 2000 (WT/DS122/R, notamment paragraphes 7.274 et 7.275)].

57. Deuxièmement, loin d'établir une distinction entre, d'une part, des évolutions ou des comportements relatifs au marché, et d'autre part, des modifications du cadre réglementaire du marché, l'objectif commun de l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base, et de l'article 3.5 du Code antidumping de 1994 est d'assurer que les importations faisant l'objet de l'enquête ne se verront pas attribuer les éventuels effets négatifs d'autres facteurs possibles ayant une incidence sur le préjudice subi respectivement par les industries communautaire ou nationale, afin que lesdites industries ne se voient pas conférer une protection allant au-delà de ce qui est nécessaire (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 3 septembre 2009, Moser Baer India/Conseil, C-535-06 P, Rec. p. I-7051, point 90). C'est d'ailleurs la raison pour laquelle l'article 3.5 du Code antidumping de 1994 met l'accent sur l'obligation d'examiner l'ensemble des facteurs connus pertinents, cet examen devant apparaître dans les documents des institutions compétentes (voir, en ce sens, rapport du groupe spécial établi dans le cadre du GATT, " Thaïlande - Droits antidumping sur les profilés en fer ou en aciers non alliés et les poutres en H en provenance de Pologne ", point 56 ci-dessus, notamment paragraphe 7.275).

58. De plus, si l'accroissement des importations d'un produit assujetti jusqu'alors à des restrictions quantitatives peut, après l'expiration desdites restrictions - qu'il conviendrait, à l'instar des deux mesures litigieuses en l'espèce, de qualifier, selon la distinction proposée par le Conseil, de modification du cadre réglementaire du marché - être pris en compte lors de l'appréciation de l'existence d'un préjudice (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 4 mars 2010, Foshan City Nanhai Golden Step Industrial/Conseil, T-410-06, non encore publié au Recueil, points 133 à 135), bien que l'article 3, paragraphe 5, du règlement de base ne se réfère qu'aux " incidences des importations faisant l'objet d'un dumping sur l'industrie communautaire " et, ensuite, à une liste non exhaustive de facteurs et d'indices économiques pertinents qui influent sur la situation de cette industrie, il ne saurait en être autrement pour l'appréciation de la causalité selon l'article 3, paragraphe 7, du même règlement.

59. Il s'ensuit que l'abolition des droits antidumping antérieurs et des droits de douane ordinaires dans le cadre du système de préférences tarifaires généralisées étaient des facteurs connus, dont les institutions de l'Union devaient tenir compte pour apprécier, dans le cadre de l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base, la réalité du lien de causalité entre le préjudice subi par l'industrie communautaire et les importations pakistanaises du produit concerné, faisant l'objet de l'enquête antidumping. Une conclusion contraire priverait l'obligation qui découle de cet article de son effet utile dans des circonstances telles que celles de l'espèce, où la question relative aux effets des modifications du cadre réglementaire avait été clairement évoquée dans la procédure administrative.

60. Or, le Conseil ne conteste pas qu'il n'a pas pris en compte l'incidence des deux mesures susvisées sur le lien de causalité entre le préjudice subi par l'industrie communautaire et les importations pakistanaises du produit concerné, objets de l'enquête antidumping, et ce bien que le régime juridique modifié se soit appliqué pendant la majeure partie de la période d'enquête. Dans ces conditions, il y a lieu de constater que les institutions de l'Union n'ont pas correctement procédé à la détermination dudit lien de causalité (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 11 juin 1992, Extramet Industrie/Conseil, C-358-89, Rec. p. I-3813, points 15 à 20).

61. Cette conclusion se trouve, par ailleurs, confirmée par le fait qu'il ressort de l'évolution des facteurs économiques présentés dans le règlement attaqué que c'est entre la fin de l'année 2001 et la fin de la période d'enquête que les importations pakistanaises ont marqué le plus leur progression sur le marché communautaire et que l'industrie communautaire a connu une dégradation importante de sa situation. Il n'est donc pas exclu que la prise en compte des effets des deux modifications réglementaires en question aurait pu avoir une incidence significative sur la conclusion des institutions de l'Union quant au lien de causalité susvisé.

62. En ce sens, en premier lieu, s'agissant des importations de provenance pakistanaise, il convient de relever, tout d'abord, qu'il ressort du considérant 76 du règlement attaqué qu'" [a]près être tombées à 31 800 tonnes en 2000, [c]es importations ont rebondi pour atteindre 35 500 tonnes en 2001 " et que, " [e]ntre 2001 et la période d'enquête, elles ont brusquement grimpé de près de 14 000 tonnes, soit de plus d'un tiers de leur volume ". Cette dernière hausse substantielle est confirmée au considérant 104 dudit règlement, relatif à l'analyse des effets des importations faisant l'objet d'un dumping.

63. Ensuite, il ressort du considérant 77 du règlement attaqué que, après s'être élevée à 17, 2 % en 2000, la part du marché européen correspondant auxdites importations a augmenté en 2001 à 18, 9 %, et pendant la période d'enquête à 24, 7 %. Ces mêmes éléments sont repris au considérant 104 dudit règlement.

64. Enfin, s'agissant des prix moyens des importations en provenance du Pakistan, conformément au considérant 78 du règlement attaqué, ils ont, d'abord, augmenté de 1999 à 2000, passant de 5,95 à 6,81 euros/kg, pour diminuer ensuite progressivement au cours des années qui ont suivi, atteignant 6,34 euros/kg en 2001 et 5,93 euros/kg pendant la période d'enquête.

65. En second lieu, s'agissant de la dégradation importante de la situation de l'industrie communautaire, il ressort, tout d'abord, du considérant 87 du règlement attaqué que la part de marché détenue par cette industrie a baissé de 20,8 à 18,9 % pendant la période d'enquête. Alors même qu'elle a fluctué, initialement, aux alentours de 20 % entre 1999 et 2001, c'est " entre 2001 et la période d'enquête " qu'elle a diminué de 1,5 % (en données absolues). Dans ce contexte, l'affirmation faite au considérant 101 dudit règlement, selon laquelle, sur la période considérée, à savoir entre 1999 et la fin de la période d'enquête, la part de marché de l'industrie communautaire a diminué de 9,1 % (en données relatives), ne contredit pas non plus la considération selon laquelle une importante chute des parts de marché de l'industrie communautaire a eu lieu, notamment, durant la période d'enquête.

66. Ensuite, en ce qui concerne la rentabilité des producteurs communautaires de l'échantillon choisi, il est indiqué, au considérant 96 du règlement attaqué, qu'elle a fortement chuté durant la période considérée, passant de 7,7 en 1999 à 4,4 % pendant la période d'enquête, ce qui correspond à une diminution de 42 %.

67. Enfin, selon ce même considérant, le rendement des investissements a suivi la même tendance, diminuant de 44 % en passant de 10,5 en 1999, à 5,9 % pendant la période d'enquête. Par ailleurs, s'agissant des prix moyens au kilo de l'industrie communautaire dans son ensemble, ils ont enregistré, selon le considérant 92 du règlement attaqué, une hausse marginale de 11,3 euros en 1999 à 11,5 euros en 2001, mais sont tombés à 11,1 euros pendant la période d'enquête. Il convient, en outre, de relever que ce sont ces données, relatives aux parts de marché, à la rentabilité, au rendement, et aux prix de ventes moyens de l'industrie communautaire, qui avaient été particulièrement mises en exergue au considérant 101 du règlement attaqué, portant conclusion sur le préjudice subi par ladite industrie.

68. Dans la partie suivante dudit règlement, portant sur le lien de causalité, il a été constaté, notamment aux considérants 106 et 107, que c'est essentiellement compte tenu de leur incidence, tant en termes de volume que de prix, sur le marché de la Communauté, que les importations en provenance du Pakistan ont exercé une forte pression à la baisse sur les prix et les volumes de ventes de l'industrie communautaire. Il a été conclu, au considérant 116 du règlement attaqué, que l'augmentation substantielle du volume et de la part de marché des importations en provenance du Pakistan, " surtout entre 2001 et la période d'enquête ", ainsi que la baisse considérable de leurs prix de vente et le niveau de sous-cotation des prix constaté pendant la période d'enquête ont coïncidé avec le préjudice important subi par l'industrie communautaire.

69. Il ressort de l'ensemble des éléments rappelés aux points 62 à 68 ci-dessus que la période du préjudice le plus intense subi par l'industrie communautaire coïncidait avec celle de l'application du régime réglementaire modifié. Or, force est de constater qu'une suspension ou une abolition de droits de douane ou de droits antidumping frappant les importations provenant d'un pays tiers est un élément de nature à influencer les volumes ainsi que les prix de celles-ci, et, par conséquent, la situation de l'industrie communautaire et le préjudice revendiqué. Il en est d'autant plus ainsi, en l'espèce, qu'il a été constaté, au considérant 105 du règlement attaqué, que la concurrence se jouait essentiellement au niveau du prix.

70. S'agissant de l'allégation du Conseil selon laquelle les prix de l'industrie communautaire seraient restés stables ou auraient même augmenté à la suite de l'entrée en vigueur du système de préférences tarifaires généralisées au profit du Pakistan et de la suppression des droits antidumping antérieurs, ce qui démontrerait l'absence d'effets notables desdits événements, il convient de constater que, ainsi qu'il ressort du considérant 92 du règlement attaqué, et comme cela a été rappelé au point 67 ci-dessus, les prix moyens au kilo de l'industrie communautaire prise dans son ensemble sont tombés, pendant la période d'enquête, à 11,1 euros, après s'être élevés à 11,5 euros en 2001.

71. De la même manière, s'agissant des prix moyens au kilo pratiqués par les producteurs communautaires compris dans l'échantillon, qui, seuls, ont augmenté progressivement, passant de 13,3 à 14,2 euros sur la période considérée, il a été constaté, au considérant susvisé du règlement attaqué, que cette évolution avait été liée au fait que " l'industrie communautaire s'[était] vue contrainte d'orienter davantage sa production vers des produits de niche à plus forte valeur, ses ventes de gros volumes destinés au marché de masse ayant souffert des importations à bas prix ". Ainsi, compte tenu dudit considérant, lu en combinaison avec les considérants 105 à 107 et 116 du règlement attaqué, qui portent sur les incidences négatives de la " baisse considérable " des prix de vente des importations en provenance du Pakistan, il convient de considérer que l'allégation susvisée du Conseil, concernant l'absence d'effets notables des modifications du cadre réglementaire en raison du manque d'incidences sur les prix communautaires, n'est pas corroborée par les faits.

72. Il convient, ensuite, de constater que, contrairement aux arguments avancés par le Conseil à l'audience, et conformément au point 53 ci-dessus, il ne saurait pas non plus être présupposé, par voie de simple hypothèse, que l'incidence des modifications réglementaires en cause n'était, en tout état de cause, que retardée, qu'elle ne concernerait qu'une partie négligeable de la période d'enquête ou qu'elle n'expliquerait pas les tendances négatives antérieures.

73. En effet, d'une part, à l'instar de la requérante, il convient de considérer qu'il ne saurait être exclu que les contrats d'importation vers la Communauté du produit concerné ont anticipé la suspension et l'abolition des droits de douane existants et des droits antidumping antérieurs, celles-ci étant connues d'avance ou prévisibles, et, qu'ainsi, au plus tard à la date de l'entrée en vigueur des modifications réglementaires en question, leur impact sur les importations pakistanaises puisse avoir été réel. Par ailleurs, le Conseil n'a pas non plus apporté d'éléments concrets démontrant que les effets desdites modifications sur le marché ne pouvaient être que différés.

74. D'autre part, l'existence de certaines tendances négatives antérieures, à la considérer démontrée, ne saurait être déterminante dans la mesure où, ainsi qu'il a été constaté au point 68 ci-dessus, la période du préjudice le plus intense subi par l'industrie communautaire, qui justifiait, dans le règlement attaqué, l'imposition des droits antidumping, coïncidait avec celle de l'application du régime réglementaire modifié, portant sur la majeure partie de la période d'enquête.

75. Quant à l'argument du Conseil selon lequel la suppression des droits antidumping antérieurs n'a pas pu rompre le lien de causalité entre le préjudice subi par l'industrie communautaire et les importations originaires du Pakistan, puisque la moitié des producteurs-exportateurs retenus dans l'échantillon, y compris la requérante, n'étaient pas assujettis auxdits droits, force est de constater qu'il est dépourvu d'incidence sur la question de savoir si les institutions de l'Union chargées de l'enquête ont ou non manqué à leur obligation d'examiner tous les facteurs connus, conformément à l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base.

76. Tout d'abord, contrairement à la possibilité, prévue à l'article 17, paragraphe 3, du règlement de base, d'établir une marge de dumping individuelle, ledit règlement ne prévoit pas l'établissement d'un lien de causalité individuel en présence d'un nombre important d'exportateurs faisant l'objet de l'enquête antidumping. Selon l'article 3, paragraphe 6, du même règlement, la démonstration du lien de causalité entre les importations faisant l'objet d'un dumping et le préjudice causé à l'industrie communautaire implique la démonstration que le volume et/ou les niveaux des prix visés au paragraphe 3 de ce même article ont un impact important sur cette industrie. Il s'agit donc nécessairement de données économiques globales qui concernent, d'une part, l'ensemble des importations du produit concerné sur le marché communautaire, et d'autre part, l'ensemble de l'industrie communautaire. Le fait que la requérante n'était pas elle-même assujettie aux droits antidumping antérieurs, et qu'il en était de même pour la moitié des producteurs-exportateurs retenus dans l'échantillon en l'espèce, n'est donc pas, en soi, déterminant aux fins de l'appréciation dudit lien de causalité.

77. Ensuite, lorsqu'un échantillonnage est réalisé selon l'article 17 du règlement de base, les institutions de l'Union doivent, en principe, prendre en considération les données relatives aux exportations de toutes les entreprises retenues dans l'échantillon. Il s'ensuit que, en l'espèce, elles auraient dû évaluer si, pour trois entreprises parmi les six retenues dans l'échantillon, il y avait eu, à partir du 30 janvier 2002, une diminution du prix à l'exportation correspondant aux taux des droits antidumping antérieurs auxquels elles étaient assujetties auparavant ou déterminer l'effet sur les prix de la suppression des droits antidumping antérieurs.

78. En outre, dans la mesure où les entreprises de l'échantillon non soumises aux droits antidumping antérieurs ne composaient qu'une partie de celui-ci, cet échantillon ne représentant lui-même, dans son ensemble, qu'à peu près 32 % du volume des exportations pakistanaises du produit concerné à destination de la Communauté pendant la période d'enquête, il ne saurait être considéré comme acquis que les importateurs communautaires avaient toujours eu accès à des sources pakistanaises disponibles de produits non soumis aux droits antidumping, en l'absence de toute preuve présentée par le Conseil à cet égard, qui tiendrait notamment compte des capacités de production des entreprises pakistanaises exportatrices. En tout état de cause, rien n'indique que les importateurs communautaires se seraient approvisionnés, par le passé, exclusivement ou de manière prépondérante, chez lesdites entreprises non soumises aux droits antidumping antérieurs.

79. Enfin, il ressort des considérants 104 à 109 du règlement attaqué que, lors de l'établissement du lien de causalité en vertu de l'article 3, paragraphe 6, du règlement de base, les institutions de l'Union se référaient, en ce qui concerne le volume des importations originaires du Pakistan, la part du marché communautaire détenue par ces importations et le prix de celles-ci, à des indicateurs économiques globaux et non aux données propres aux entreprises de l'échantillon.

80. Par conséquent, le fait que trois producteurs exportateurs de l'échantillon, dont la requérante, n'avaient pas été soumis aux droits antidumping antérieurs n'exonérait pas les institutions chargées de l'enquête d'examiner l'incidence de la suppression desdits droits sur le préjudice causé à l'industrie communautaire, et, donc, d'apprécier si le lien de causalité n'avait pas été rompu en raison de cette mesure.

81. Par ailleurs, force est de constater que la seule absence de prise en compte au titre des " facteurs connus, autres que les importations faisant l'objet d'un dumping, qui, au même moment, causent un préjudice à l'industrie communautaire " de l'élimination de barrières douanières de l'ordre de 12 % à la suite de l'instauration au profit du Pakistan du système généralisé de préférences, aurait suffi pour conclure que les institutions chargées de l'enquête n'avaient pas satisfait à toutes leurs obligations découlant de l'article 3, paragraphe 7, du règlement de base. Il en est ainsi, à plus forte raison, dans la mesure où le niveau des droits antidumping fixé par le règlement attaqué était de 13,1 %.

82. Enfin, s'agissant de l'allégation de la Commission présentée à l'audience, selon laquelle elle aurait pris en considération les modifications du cadre réglementaire en question notamment dans son analyse des valeurs caf des produits concernés, il convient de constater que la seule référence faite aux prix des importations, reprises au considérant 78 du règlement attaqué, ou, de manière plus générale, aux volumes, aux parts de marché et aux prix des importations originaires du Pakistan, ne saurait suffire pour démontrer que les incidences des modifications réglementaires sur l'industrie communautaire ont été prises en compte par les institutions chargées de l'enquête.

83. En effet, lesdits indicateurs économiques, dont dépend l'analyse du préjudice subi par l'industrie communautaire puis celle du lien de causalité, analyse forcément diachronique et comparative d'un ensemble d'indices pertinents qui varient dans le temps, doivent être évalués de manière à permettre une différenciation et une distinction entre les diverses causes potentielles du préjudice allégué, conformément à ce qui a été constaté au point 53 ci-dessus. Cela implique que des enseignements relatifs à l'impact des importations faisant l'objet de l'enquête antidumping sur l'industrie communautaire ne peuvent être valablement tirés que si la situation des producteurs communautaires au moment de l'enquête est comparée à celle des années précédentes de manière non biaisée par des éléments rendant cette comparaison incomplète et, partant, erronée.

84. Plus particulièrement, l'analyse à laquelle ont procédé les institutions de l'Union en l'espèce ne fait pas ressortir, et ce pas même sous forme d'une simple estimation, quel aurait été le préjudice subi par l'industrie communautaire en l'absence de tout dumping, c'est-à-dire quel aurait été le préjudice qui résulterait de la seule mise en vigueur du régime de préférences tarifaires généralisées et de l'abolition des droits antidumpings antérieurs, qu'il soit chiffré en termes de perte de parts de marché, de diminution de rentabilité ou de rendement de l'industrie susvisée, de renonciation à des segments inférieurs de marché ou de tout autre indice économique pertinent. Les incidences des mesures en cause auraient dû être analysées d'autant plus qu'il ressort de plusieurs passages du règlement attaqué que la concurrence sur les prix avait été " acharnée ", de sorte qu'une diminution des prix des importations en provenance du Pakistan faisant suite auxdites modifications réglementaires ne pouvait, en toute probabilité, rester sans incidences sur l'état du marché.

85. La troisième branche du cinquième moyen est donc fondée. Dès lors, et compte tenu de ce que, d'une part, il n'appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation en la matière à celle du Conseil, et, d'autre part, il ne saurait être exclu que, en l'absence de l'erreur de droit en cause, le Conseil n'aurait pas conclu à l'existence d'un lien de causalité entre les importations faisant l'objet de la procédure antidumping et le préjudice subi par l'industrie communautaire, il convient d'annuler le règlement attaqué en ce qu'il concerne la requérante, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens et arguments développés par cette dernière.

86. Il convient, par ailleurs, de préciser, s'agissant des effets de l'adoption du règlement modificatif n° 695-2006 (voir point 17 ci-dessus), ramenant le droit antidumping applicable aux produits de la requérante de 13,1 à 5,6 %, sur le présent recours, que ce règlement a été adopté à la suite de l'ouverture d'un réexamen intermédiaire partiel, limité au dumping, des mesures adoptées par le règlement attaqué. Il y a également lieu de relever que ce règlement modificatif ne revient pas sur l'analyse du préjudice et du lien de causalité réalisée par la Commission au cours de la première enquête, comme l'ont, d'ailleurs, souligné les parties lors de l'audience, de telle sorte que ledit règlement est sans incidence dans le cadre du présent litige.

Sur les dépens

87. Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Le Conseil ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

88. Conformément à l'article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs dépens. Par conséquent, la Commission, qui est intervenue au soutien du Conseil, supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

déclare et arrête :

1) Le règlement (CE) n° 397-2004 du Conseil, du 2 mars 2004, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de linge de lit en coton originaire du Pakistan, est annulé, en ce qui concerne Gul Ahmed Textile Mills Ltd.

2) Le Conseil de l'Union européenne supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par Gul Ahmed Textile Mills.

3) La Commission européenne supportera ses propres dépens.