CA Metz, 1re ch., 30 juin 2011, n° 06-03699
METZ
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Leroy Merlin France (SA)
Défendeur :
GB Bati Center (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mlle Ott
Conseillers :
Mme Cunin-Weber, M. Ruff
Avocats :
Mes Belhamici, Zachayus
Par actes des 10 et 3 octobre 2003, la SARL GB Bati Center a assigné la SA Obi et la SA Leroy Merlin aux fins de les condamner solidairement, sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-6 5° du Code de commerce, au paiement de la somme de 80 000 euro au titre du préjudice subi par la perte de chiffre d'affaires consécutive à la rupture des relations commerciales.
Elle exposait que depuis 1995, pour la distribution de carrelages de différents fabricants qu'elle représente, elle était en relations commerciales avec le groupe Obi à travers le référencement de ses produits dans divers magasins Obi notamment à Vendenheim, Haguenau, et Clermont-Ferrand, ce qui se traduisait par des commandes régulières de la SA Obi en contrepartie desquelles elle-même participait à des opérations publicitaires et implantations. C'est ainsi que la SA Obi lui avait transmis en 1997 ses conditions générales d'achat dont l'application découlait de l'exécution des commandes. Or elle devait apprendre par la rumeur que la SA Obi avait donné en location-gérance la plupart de ses magasins au groupe Leroy Merlin qui manifestement n'entendait pas poursuivre les relations commerciales. La lettre recommandée avec accusé de réception par laquelle le 2 juillet 2003 elle avait interrogé la SA Obi sur la poursuite de leurs relations était restée sans réponse.
Elle assignait en conséquence la SA Obi qui a procédé à une rupture particulièrement brutale de leurs relations, sans la moindre explication ni préavis, ainsi que la SA Leroy Merlin qui gère en location-gérance les magasins qui étaient approvisionnés par elle et qui ne l'a pas davantage tenue informée de l'évolution et de la rupture des relations commerciales. À titre de dommages et intérêts elle réclamait la somme de 80 000 euro représentant l'équivalent d'un an de chiffre d'affaires, en précisant que comme grossiste elle réalisait environ 20 % de son chiffre d'affaires dans les magasins Obi. Elle contestait l'application à son égard de l'usage, limitant la durée du préavis, résultant du Code de bonne conduite des pratiques commerciales entre professionnels du bricolage que lui opposaient les sociétés défenderesses.
Aux termes de ses dernières écritures de première instance, la SARL GB Bati Center dirigeait ses demandes à l'encontre de la SA Leroy Merlin, venant aux droits de la SA Obi, suite à la fusion-absorption en date du 1er septembre 2004.
La SA Leroy Merlin a conclu au débouté en répliquant qu'il n'existait pas entre les sociétés Obi et GB Bati Center de relations commerciales établies au sens de l'article L. 442-6 5° du Code de commerce. Elle a fait valoir qu'il n'y avait en effet aucun contrat-cadre les unissant et qu'il n'y avait pas un référencement au niveau de la SA Obi mais tout au plus quelques commandes ponctuelles et de peu d'importance par les magasins Obi de Vendenheim, Haguenau, et Clermont-Ferrand. Elle a ajouté que la mise en location-gérance a induit une politique d'entreprise différente, les fournisseurs étant systématiquement référencés auprès de la centrale d'achat Leroy Merlin pour apporter à tous les magasins les conditions les plus avantageuses, qu'elle était tenue à la seule reprise des contrats de travail, et que dès lors, en l'absence de tout contrat d'exclusivité transmis dans le cadre de la location-gérance puis de la fusion-absorption, et en l'absence de toute preuve de commandes passées par la SA Leroy Merlin postérieurement au contrat de location-gérance, elle était libre de poursuivre des relations d'affaires avec la SARL GB Bati Center ou de choisir un autre partenaire économique.
La SA Leroy Merlin a contesté tout préjudice subi par la SARL GB Bati Center, préjudice qui en tout état de cause ne peut résulter que du caractère brutal de la rupture et non pas de la rupture proprement-dite qui n'est pas interdite. Elle a invoqué le Code de bonne conduite des pratiques commerciales entre professionnels du bricolage qui au cas de chiffre d'affaires de l'ordre de 20 % limite la durée du préavis de 3 à 4 mois.
Par jugement en date du 19 septembre 2006, le Tribunal de grande instance de Sarreguemines, chambre commerciale, a condamné la SA Leroy Merlin à payer à la SARL GB Bati Center la somme de 80 000 euro à titre de dommages et intérêts contractuels, et celle de 1 500,38 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Le tribunal a ordonné l'exécution provisoire et condamné la SA Leroy Merlinaux dépens.
Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré au vu notamment des bons de commande et factures produits que des relations commerciales s'étaient nouées depuis mai 1995, qui de plutôt ponctuelles en 1995 et 1996, s'étaient ensuite particulièrement développées pour atteindre en 2002 un total de 168 opérations de vente pour un chiffre d'affaires de 82 543,50 euro HT ; que l'existence d'un contrat-cadre n'est pas un élément constitutif exigé ; qu'au vu de divers courriers de la SA Obi il apparaît que l'acheteuse, profitant de sa positon dominante, a imposé à la venderesse d'abord ses conditions générales d'achat puis les produits qu'elle entendait référencer dans les magasins et enfin diverses participations financières.
Le tribunal a retenu que ces relations commerciales ont été rompues de pur fait, par l'absence pure et simple de toute commande nouvelle auprès de GB Bati Center à partir de juin 2003 ; que si du temps de la location-gérance jusqu'en août 2004 la SA Leroy Merlin ne pouvait en tant que tiers être tenue de poursuivre les engagements de la SA Obi, d'une part cette dernière restant commerçante avait l'obligation soit de poursuivre la relation commerciale, soit d'en imposer la poursuite à sa locataire, soit de notifier par écrit la rupture à la SARL GB Bati Center avec un préavis suffisant ; qu'en ne faisant rien de tel, la SA Obi, aux droits de laquelle vient désormais la SA Leroy Merlin, a manqué à son obligation de loyauté, la mise en location-gérance ne pouvant en aucun cas constituer un juste motif de rupture sans préavis de relations commerciales.
Le tribunal a considéré que l'accord professionnel invoqué du 12 janvier 2001 n'est pas applicable, la SARL GB Bati Center n'étant pas un professionnel du bricolage mais du bâtiment ; mais que cet accord en tout état de cause prévoit pour des relations commerciales de plus de 5 ans lors de la rupture un préavis de 6 à 12 mois.
Le tribunal enfin a fixé le préjudice en fonction de la durée des 8 années des relations commerciales, des nombreux efforts financiers sollicités par la SA Obi, du dernier volume d'affaires échangé entre les parties et d'un préavis qui doit être d'un an.
Par déclaration enregistrée au greffe le 18 décembre 2006, la SA Leroy Merlin a régulièrement interjeté appel du dit jugement.
Par ses dernières écritures notifiées le 15 décembre 2008, la SA Leroy Merlin demande à la cour en infirmant le jugement entrepris, vu l'article L. 442-6 5° du Code de commerce, les articles 1134,1165 et 1315 du Code civil, de :
- à titre principal, débouter la SARL GB Bati Center de toutes ses demandes;
- à titre subsidiaire, si la cour estimait les relations commerciales établies au sens de l'article L. 442-6 5° du Code de commerce et que la rupture est brutale, dire qu'en application de l'accord interprofessionnel FMB/Unibal le délai de préavis sera fixé à 2 mois et que l'indemnisation de la SARL GB Bati Center ne saurait être supérieure à la somme de 8 à 10 000 euro, et condamner la SARL GB Bati Center à restituer dans les 8 jours du prononcé de l'arrêt le montant des dommages et intérêts versés par la SA Leroy Merlin au titre de l'exécution provisoire ;
- condamner la SARL GB Bati Center au paiement de la somme de 10 000 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
- condamner la SARL GB Bati Center aux entiers frais et dépens.
Par ses dernières écritures du 27 avril 2009, la SARL GB Bati Center conclut à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et réclame le paiement par la SA Leroy Merlin de la somme de 5 000 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile pour la procédure d'appel.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 janvier 2010.
Sur ce :
Vu les dernières écritures des parties auxquelles la cour se réfère expressément ; vu les pièces ;
Attendu que conformément à l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce, engage la responsabilité de son auteur, et l'oblige à réparer le préjudice causé, le fait par tout producteur, commerçant ou industriel, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels ;
Sur l'existence d'une relation commerciale :
Attendu que si l'appelante, pour contester l'existence de toute relation commerciale établie au sens des dispositions précitées, prétend qu'il n'y a eu que quelques commandes ponctuelles restant exceptionnelles auprès de GB Bati Center de la part de certains magasins Obi en vertu de la liberté de choix des directeurs locaux, il n'en demeure pas moins que les pièces produites par la SARL GB Bati Center démontrent l'existence d'une relation commerciale établie de 1995, date des premières commandes par Obi, jusqu'à la rupture intervenue de fait en juin 2003 en l'absence de toute nouvelle commande passée auprès de GB Bati ;
Qu'ainsi que l'ont rappelé les premiers juges, l'existence d'un contrat-cadre n'est pas exigée pour caractériser une relation commerciale établie, et il importe peu dès lors qu'en l'espèce aucun contrat-cadre n'ait été signé entre Obi et GB Bati Center;
Que le courant d'affaires s'est développé à partir des premières commandes de 1995 pour atteindre en 1998 un chiffre d'affaires de 91 773,36 euro et en 1999 celui de 111 774,19 euro; que si le chiffre d'affaires réalisé par la SARL GB Bati Center auprès de Obi a montré une certaine stagnation à compter de 2000, passant de 90 223,27 euro en 2000 à 76 799,06 euro en 2002, les relations ont perduré de façon constante dans la continuité pour un volume assez conséquent;
Que l'existence d'une relation commerciale établie se trouve confirmée par l'envoi d'un courrier recommandé du 24 décembre 1996 par la société Obi depuis le siège de Saint-Priest pour attirer l'attention de son partenaire sur les conséquences à tirer de la loi du 1er juillet 1996 dite "Galland", étant observé que Obi y indique que l'article 36 de la loi lui impose désormais de notifier un préavis suffisant en fin de période contractuelle, ce pourquoi Obi demande à la SARL GB Bati Center de considérer ce courrier comme valant préavis et permettant d'amorcer les négociations pour 1997 et ce en lui demandant de communiquer les conditions générales de vente incluant les tarifs, rabais divers et modalités financières ;
Que par courrier recommandé du 19 novembre 1997 la direction marketing-merchandising de la société Obi au siège de Saint-Priest a informé la SARL GB Bati Center de la mise en place d'un suivi strict du taux de service et l'application d'un système de pénalité car "la qualité et la ponctualité de vos livraisons sont essentielles pour la réussite de nos affaires communes" , et lui a simultanément communiqué ses conditions générales d'achat dont il était expressément précisé que leur acceptation résultait non seulement de la signature de ces conditions, mais encore de l'exécution d'une seule commande;
Que par courrier du 3 septembre 1999 la société Obi a adressé à la SARL GB Bati Center son listing de référencement portant sur plus d'une centaine de produits ;
Qu'il est encore justifié par la SARL GB Bati Center qu'elle s'est acquittée pendant cette période de frais de participation publicitaire, qu'elle a participé à des opérations Anniversaire et a contribué à des frais d'implantation le tout en faveur de Obi, ce qui là encore dénote le caractère suivi et non pas simplement ponctuel des relations entre les parties ;
Que même si le magasin de Vendenheim semble l'établissement le plus concerné, il s'agit de relations entre deux sociétés, la SARL GB Bati Center et la société Obi sans que cette dernière ne puisse se retrancher derrière l'autonomie dont pourrait disposer le directeur local d'un site en particulier alors que les documents et factures émanent bien de Obi au siège de Saint-Priest ;
Attendu qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments qu'une relation commerciale s'est inscrite depuis 1995 entre la SARL GB Bati Center et la société Obi dans la durée et la continuité, générant pour la première un volume d'affaires relativement important qui pouvait lui donner confiance dans le maintien des échanges et la reconduction des commandes passées par la seconde ; que sont ainsi caractérisées des relations commerciales établies, au sens de l'article L. 442-6 susvisé du Code de commerce ;
Sur la rupture de la relation commerciale :
Attendu que ces relations ont été rompues brutalement et sans préavis, de fait en l'absence de toute nouvelle commande passée à la SARL GB Bati Center à compter de juin 2003 ;
Attendu que par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 juillet 2003 le conseil de la SARL GB Bati Center a mis en demeure la société Obi en se réservant le droit de demander réparation des préjudices subis du fait de la rupture, en observant qu'aucune lettre n'a été adressée à la société GB Bati Center et que c'est par la rumeur que M. Gross a appris la location-gérance des magasins donnée au Groupe Leroy-Merlin ;
Que si une entreprise tierce, RMC, a pu être avisée en bonne et due forme par un courrier de la société Obi de la mise en location-gérance des magasins, la société appelante ne démontre pas qu'un tel courrier, même sous forme de circulaire, ait été adressé à la SARL GB Bati Center; qu'il ne peut être suppléé à l'obligation, notamment de loyauté, pesant sur la société Obi envers son partenaire commercial par le courrier adressé le 25 août 2003 par Obi en réponse à la mise en demeure du conseil de la SARL GB Bati Center, portant les références "RMC/ Obi -GB Bati Center/Obi";
Qu'en tout état de cause la location-gérance ne constitue pas un juste motif de rupture brutale opérée unilatéralement sans préavis ;
Que si la société Obi restait libre de cesser ses relations avec la SARL GB Bati Center, elle n'en devait pas moins respecter un préavis raisonnable et suffisant ; qu'or le caractère brutal de la rupture des relations commerciales est ici particulièrement caractérisé, dès lors que précisément au vu des courriers adressés les 10 et 17 juin 2003 par Obi à la société RMC sur lesquels insiste tellement l'appelante, la société Obi s'est montrée tout à fait déloyale envers la SARL GB Bati Center à qui elle n'a pas adressé la moindre information et a agi de façon discriminatoire puisqu'elle a pris le soin d'informer d'autres partenaires commerciaux de la mise en location-gérance;
Attendu que la discussion élevée par la SA Leroy Merlin sur la poursuite des contrats par le locataire-gérant est désormais sans emport, dès lors que suite à l'assemblée générale extraordinaire de la SA Leroy Merlin France en date du 1er septembre 2004, selon le procès-verbal produit aux débats, il a été décidé de la fusion-absorption de la société Obi avec apport à titre de fusion par la SA Obi de l'ensemble de ses biens, droits et obligations, à la charge pour la SA Leroy Merlin France de satisfaire à tous les engagements de la SA Obi et de payer son passif ; qu'à ce titre la SA Leroy Merlin est tenue de réparer le préjudice causé par la rupture brutale et sans préavis provoquée par la société Obi de ses relations commerciales avec la SARL GB Bati Center;
Sur le préjudice :
Attendu que certes les premiers juges ne pouvaient écarter purement et simplement l'accord interprofessionnel invoqué à titre subsidiaire par la SA Leroy Merlin;
Qu'en effet le Code de bonne conduite des pratiques commerciales entre professionnels du bricolage, adopté le 25 septembre 2000, entre la Fédération Française des magasins de Bricolage, l'Union Nationale des Industries du Bricolage, du Jardinage et des Activités manuelles de loisir, la Fédération des Industries des Peintures, encres, couleurs, colles et adhésifs, le Syndicat des Industries de l'outillage, le Syndicat Français des colles et adhésifs, et l'Union Nationale des Industries de la Quincaillerie, a vocation à s'appliquer aux fournisseurs de la grande distribution du bricolage, et peut donc être opposé à la SARL GB Bati Center en tant que distributeur de carrelages fournissant la société Obi à enseigne de bricolage ;
Attendu toutefois que l'existence d'un accord interprofessionnel ne dispense pas la juridiction saisie d'examiner de façon concrète si le délai minimal qui y est fixé, à titre indicatif, est en adéquation avec la durée de la relation commerciale et les autres circonstances de l'espèce ;
Que de l'aveu de la SARL GB Bati Center dans ses écritures de première instance, ses relations commerciales avec la société Obi représentaient 20 % de son chiffre d'affaires ; que selon l'annexe I du Code de bonne conduite, pour un tel taux de chiffre d'affaires et s'agissant de relations durant plus de 5 ans, le délai de préavis est de 3 à 4 mois ;
Or attendu qu'en l'espèce précisément aucun préavis n'a été laissé à la SARL GB Bati Center par la société Obi, qui n'a pas même informé clairement son partenaire de la rupture de leurs relations et l'a laissé dans une incertitude particulièrement préjudiciable; qu'en effet il faut relever que c'est la SARL GB Bati Center, qui alertée par la "rumeur", a demandé en juillet 2003 des explications à la société Obi alors que l'obligation de loyauté traduite dans les dispositions légales de l'article L. 442-6 - issues de la loi du 1er juillet 1996 que dans un autre temps la société Obi avait opposée à la SARL GB Bati Center (cf le courrier du 24 décembre 1996 déjà cité) - pèse sur la partie qui provoque la rupture unilatérale ;
Que le caractère particulièrement cavalier avec lequel la société Obi a traité la SARL GB Bati Center à la différence d'autres partenaires commerciaux qui ont eux été avisés, a aggravé la situation de la société intimée qui s'est trouvée désorganisée du fait de la perte brutale d'un client auprès duquel elle réalisait un chiffre d'affaires non négligeable, et a du remettre en cause son mode de fonctionnement et de stockage qu'elle avait adapté pour répondre aux exigences de son client marquées notamment en termes de "qualité et de ponctualité des livraisons" tels que l'avait évoqué la société Obi dans le courrier du 19 novembre 1997 précédemment visé ;
Qu'ainsi, au regard de ces circonstances d'espèce, de la durée des relations suivies sur 8 années entre les parties, du chiffre d'affaires réalisé pendant cette période par la SARL GB Bati Center et de la part que cela représentait sur l'ensemble de son activité, le délai minimal de préavis fixé par l'accord interprofessionnel de 3 à 4 mois n'est pas adapté ; que le délai de préavis, à prendre en compte pour déterminer les dommages et intérêts dus, doit être fixé ici à 8 mois, afin de répondre aux spécificités de la situation de la SARL GB Bati Center et des contraintes pour elle nées de la brutalité de la rupture pour trouver d'autres débouchés commerciaux ;
Attendu que le préjudice de la SARL GB Bati Center doit être apprécié en fonction de la marge bénéficiaire qui sera fixée à 40 % ;
Qu'eu égard au chiffre d'affaires moyen de 80 000 euro par an qui peut être retenu au vu des pièces fournies par la société intimée, le préjudice découlant pour la SARL GB Bati Center de la brutalité de la rupture s'établit à 80 000 x 40 % x 8/12 = 21 333 euro ;
Que le jugement entrepris qui a alloué à la SARL GB Bati Center la somme de 80 000 euro sera donc réformé, et la SA Leroy Merlin condamnée à payer à celle-ci la somme de 21 333 euro à titre de dommages et intérêts ; que la SARL GB Bati Center devra restituer la somme de 80 000 euro versée au titre de l'exécution provisoire dont était assorti le jugement entrepris, et qu'il convient dès lors d'ordonner la compensation entre les créances réciproques;
Sur les dépens :
Attendu que la SA Leroy Merlin, tenue d'indemniser la SARL GB Bati Center des conséquences dommageables de la brutalité de la rupture des relations commerciales, doit être condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel, même si son appel est partiellement bien fondé quant au montant à revenir à la société intimée ;
Attendu que l'équité n'exige pas la mise en œuvre à hauteur de cour des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, le montant de 1 500,38 euro alloué en première instance au titre des frais irrépétibles au bénéfice de la SARL GB Bati Center étant confirmé ;
Par ces motifs: LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire : Déclare l'appel régulier en la forme ; Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la SARL GB Bati Center recevable et partiellement bien fondée en son action, et a condamné la SA Leroy Merlin France à payer à la SARL GB Bati Center la somme de 1 500,38 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; Réforme en ses autres dispositions le jugement du Tribunal de grande instance de Sarreguemines, chambre commerciale, en date du 19 septembre 2006; Statuant à nouveau : Dit que la SA Leroy Merlin France est tenue de réparer les conséquences dommageables causées à la SARL GB Bati Center par la rupture brutale et sans préavis de la relation commerciale établie, par application de l'article L. 442-6-I- 5° du Code de commerce ; Condamne en conséquence la SA Leroy Merlin France à payer à la SARL GB Bati Center la somme de 21 333 euro à titre de dommages et intérêts ; Ordonne à la SARL GB Bati Center de restituer à la SA Leroy Merlin France la somme de 80 000 euro perçue au titre de l'exécution provisoire du jugement entrepris ; Ordonne la compensation entre les créances réciproques ; Déboute les parties de leurs plus amples prétentions ; Condamne la SA Leroy Merlin France aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.