Livv
Décisions

Cass. crim., 7 septembre 2011, n° 10-85.310

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Louvel

Rapporteur :

M. Bayet

Avocat général :

M. Boccon-Gibod

Avocats :

SCP Boré, Salve de Bruneton, SCP Monod, Colin

Paris, prés., du 18 févr. 2010

18 février 2010

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par la société X, la société Y, contre l'ordonnance du premier président de la Cour d'appel de Paris, en date du 18 février 2010, qui a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à procéder à des opérations de visite et de saisie de documents en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; - Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 66 de la Constitution, 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, 593 du Code de procédure pénale, violation du droit au respect de la vie privée, du principe de l'inviolabilité du domicile et du principe du respect des droits de la défense, perte de fondement juridique ;

" en ce que l'ordonnance attaquée a confirmé l'ordonnance déférée, en ce qu'elle a autorisé le ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi, pris en la personne du directeur régional chef de la DNECCRF, et le rapporteur au Conseil de la concurrence à procéder aux visites et saisies prévues par l'article L. 460-4 du Code de commerce, dans les locaux des SAS X et Y ;

" alors que les dispositions de l'article L. 460-4 du Code de commerce, dans leur version antérieure à l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008, sont contraires à la Constitution au regard du droit au respect de la vie privée, du principe de l'inviolabilité du domicile, du principe du respect des droits de la défense et de l'article 66 de la Constitution, en ce qu'elles ne prévoient pas que la personne au domicile de laquelle une visite domiciliaire est réalisée est informée des moyens concrets par lesquels elle peut saisir directement, au cours des opérations de visite, le juge qui a autorisé cette mesure et de son droit à l'assistance d'un avocat; que la constatation par le Conseil constitutionnel de l'inconstitutionnalité de ces dispositions dans le cadre de la question prioritaire de constitutionnalité présentée par les sociétés demanderesses dans le cadre du présent pourvoi privera de fondement l'arrêt attaqué " ;

Attendu que, par arrêt du 9 mars 2011, la Chambre criminelle a dit n'y avoir lieu à renvoyer devant le Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité présentée par les demanderesses au pourvoi ; d'où il suit que le moyen est devenu inopérant ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du Code de commerce, 31, 32, 137-1, alinéa 4, et 592, alinéa 2, du Code de procédure pénale ;

" en ce que l'ordonnance attaquée a confirmé l'ordonnance déférée en ce qu'elle a autorisé le ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi, pris en la personne du directeur régional chef de la DNECCRF, et le rapporteur au Conseil de la concurrence à procéder aux visites et saisies prévues par l'article L. 450-4 du Code de commerce, dans les locaux des SAS X et Y;

" aux motifs que les mesures autorisées par l'ordonnance déféré sont prévues par l'article L. 450-4 du Code de commerce, que cet article ne prévoit par l'intervention du Ministère public lors de la délivrance de l'autorisation judiciaire; que, de plus, les ordonnances rendues dans ce cadre par le juge des libertés et de la détention sont de nature civile et seules les dispositions du Code de procédure civile s'appliquent en la matière et, à défaut de prévision de réquisitions écrites ou orales du Ministère public lors de la demande d'autorisation, leur absence n'a aucune incidence sur la validité de la décision rendue ;

" alors qu'à défaut de dispositions spécifiques, la procédure suivie devant le juge des libertés et de la détention pour la délivrance d'une autorisation de visite et saisie sur le fondement de l'article L. 450-4 du Code de commerce est régie par les dispositions générales du Code de procédure pénale qui imposent que la décision prise par ce magistrat soit précédée des réquisitions du Ministère public; qu'en retenant que seules les dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce et, dans le silence de ces dispositions, les règles du Code de procédure civile s 'appliquent à la procédure menée devant le juge des libertés et la détention, de telle sorte que cette dernière ne requiert pas que l'ordonnance autorisant une visite domiciliaire soit précédée des réquisitions du Ministère public, le premier président a violé les textes précités " ;

Attendu que, pour écarter l'exception de nullité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant l'Administration à procéder à des opérations de visite et de saisie, tirée de l'absence de réquisitions écrites ou orales du Ministère public, préalables à la décision, l'ordonnance attaquée prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'aucune disposition de l'article L. 450-4 du Code de commerce ne prévoit l'audition du Ministère public en ses réquisitions avant que le juge ne statue, le premier président a justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation dos articles L. 450-4 et L 450-6 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'ordonnance attaquée a confirmé l'ordonnance déférée en ce qu'elle a autorisé le ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi, pris en la personne du directeur régional chef de la DNECCRF, et le rapporteur au Conseil de la concurrence à procéder aux visites et saisies prévues par l'article L. 450-4 du Code de commerce, dans les locaux des SAS X et Y;

" aux motifs qu'il ressort des demandes d'enquêtes jointes à la requête que les enquêtes ont pour origine une rapporteuse nommément citée et identifiable, dont le juge de première instance a été informée; qu'il apparaît que la requête présentée l'a été en commun par deux autorités dont le rapporteur général au Conseil de la concurrence; que, sans qu'il soit nécessaire d'examiner la qualité de la seconde autorité, la mention du rapporteur général est suffisante pour qu'il soit constaté que la saisine du juge des libertés et de la détention était régulière;

" 1) alors que l'ordonnance autorisant une visite-domiciliaire doit apporter par elle-même la preuve que le juge des libertés a examiné la recevabilité de la requête au regard, notamment, de la condition tenant à ce que cette requête soit présentée dans le cadre d'une enquête demandée par la Commission européenne, le ministre chargé de l'Economie ou le rapporteur général du Conseil de la concurrence sur proposition du rapporteur; qu'il résulte en l'espèce des mentions critiquées de l'ordonnance délivrée par le juge des libertés et de la détention que ce dernier s'est borné à mentionner la demande d'enquête du rapporteur général du Conseil de la concurrence sans préciser si cette demande avait été présentée sur proposition du rapporteur; qu'en retenant que cette ordonnance est régulière dans la mesure où le juge des libertés et de la détention était informé de l'intervention d'un rapporteur préalablement à l'ouverture des enquêtes, cet élément apparaissant dans les pièces jointes à la requête, cependant qu'il résulte des mentions de cette ordonnance que le juge des libertés ne s'est pas assuré du respect de cette formalité, le premier président a violé les articles précités;

" 2) alors que l'intervention du rapporteur désigné pour l'affaire, préalablement à toute demande d'enquête émanant du rapporteur général, constitue une formalité substantielle dont la méconnaissance entraîne l'irrégularité de la saisine du juge des libertés et de la détention ; qu'en retenant que la saisine du juge des libertés et de la détention est régulière, dès lors qu'elle émane du rapporteur général sans qu'il soit nécessaire pour le juge des libertés et de la détention de s'assurer de l'intervention, préalablement à l'ouverture de l'enquête dans le cadre de laquelle il est saisi, du rapporteur chargé de l'affaire, le premier président a violé les articles L. 450-4 et L. 450-6 du Code de commerce ";

Attendu qu'en constatant comme il l'a fait que les demandes de visite domiciliaire et de saisie critiquées, avaient pour origine des enquêtes sur la proposition d'un rapporteur, le premier président de la cour d'appel a justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, 8 et 13 de la Convention européenne des droits de l'Homme, L. 450-4 et L. 464-2 IV du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale, violation du principe du droit au respect de la vie privée, de l'inviolabilité du domicile, du respect des droits de la défense et du droit à un recours effectif ;

" en ce que l'ordonnance attaquée a confirmé l'ordonnance déférée en ce qu'elle a autorisé le ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi, pris en la personne du directeur régional chef de la DNECCRF, et le rapporteur au Conseil de la concurrence à procéder aux visites et saisies prévues par l'article L. 450-4 du Code de commerce, dans les locaux des SAS X et Y ;

" aux motifs qu'est contestée la vérification du caractère licite du recueil des déclarations produites par l'Administration sur lequel s'est fondé le magistrat de première instance pour autoriser l'ordonnance attaquée ; qu'il convient de rappeler que les procès-verbaux des enquêteurs de la direction nationale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes font foi jusqu'à preuve contraire; que le juge des libertés et de la détention a clairement mentionné dans sa motivation que les documents et informations communiqués avaient une origine apparemment licite; qu'à ce stade de la procédure le magistrat n'a à vérifier que cette apparence de licité, que cette seule indication est suffisante pour valider l'ordonnance rendue, le magistrat n'ayant pas à contrôler l'origine des renseignements ayant permis l'obtention des documents présentés; que le juge des libertés et de la détention peut faire état de déclarations anonymes reprises dans des procès-verbaux établis et signés par les enquêteurs, dont il apprécie la teneur, dès lors qu'elles sont corroborées par d'autres éléments soumis à son examen; que dans la présente procédure, seul le nom des déclarants a été maintenu secret, que les déclarations étaient confortées, comme l'a indiqué le magistrat de première instance par d'autres pièces reprenant les déclarations de personnes clairement identifiées; que, ce faisant, les droits de la défense n'ont pas été méconnus, pas plus que leur droit à un recours effectif ;

" 1) alors qu'en l'absence de dispositions légales limitant le droit pour l'administration de la concurrence de recourir aux témoignages anonymes dans les cas où ce procédé est strictement nécessaire et dans des conditions assurant l'intégrité des déclarations du témoin et de contrôle par l'autorité judiciaire du respect de ces conditions, le droit au respect de la vie privée, le principe de l'inviolabilité du domicile ainsi que le principe du respect des droits de la défense et du droit à un recours effectif s'opposent à ce que le juge des libertés et de la détention puisse autoriser l'administration de la concurrence à réaliser une visite domiciliaire en se référant à de tels témoignages, peu important, à cet égard, que ces témoignages soient corroborés par des éléments extérieurs ; qu'en retenant que le juge des libertés peut faire état de déclarations anonymes reprises dans des procès-verbaux établis et signés par les enquêteurs dès lors qu'elles sont corroborées par d'autres éléments soumis à son examen, le premier président a violé les articles L. 450-4 du Code de commerce, 8 et 13 de la Convention européenne des droits de l'Homme, ensemble les principes précités ;

" 2) alors en tout état de cause que le juge des libertés et de la détention ne peut se fonder sur une déclaration anonyme faite oralement aux agents de l'administration de la concurrence qu'après avoir constaté que son auteur ne figure pas parmi les personnes susceptibles de bénéficier d'une exonération totale ou partielle des sanctions pécuniaires en raison de leur contribution à établir la réalité d'une pratique prohibée à laquelle elles ont participé; qu'en se bornant à relever que les déclarations anonymes étalent confortées par d'autres pièces sans tirer les conséquences de l'absence de mention, au sein de l'ordonnance déférée, constatant que l'auteur de ces déclarations ne figure pas parmi les participants susceptibles de bénéficier d'une exonération totale ou partielle de sanction, le premier président a violé les articles L. 450-4 et L. 464-2 IV du Code de commerce, ensemble le principe du droit au recours effectif et du respect des droits de la défense " ;

Attendu que l'ordonnance retient que les pièces produites devant le juge des libertés et de la détention, à l'appui de la requête de l'Administration, ont une origine apparemment licite, que toute contestation au fond sur ce point relève du contentieux dont peuvent être saisies les juridictions éventuellement appelées à statuer sur les résultats de la mesure autorisée; d'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, 8 et 13 de la Convention européenne des droits de l'Homme, L. 420-1, 450-4 et L. 464-2 IV du Code de commerce, 509, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale, violation du principe du droit au respect de la vie privée, de l'inviolabilité du domicile, du respect des droits de la défense et du droit à un recours effectif ;

" en ce que l'ordonnance attaquée a confirmé l'ordonnance déférée en ce qu'elle a autorisé le ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi, pris en la personne du directeur régional chef de la DNECCRF, et le rapporteur au Conseil de la concurrence à procéder aux visites et saisies prévues par l'article L. 450-4 du Code de commerce, dans les locaux des SAS X et Y ;

" aux motifs que les appelantes font valoir une absence de justification aux visites et saisies réalisées, notamment à l'encontre de la SA A; qu'il n'est pas contesté que l'enquête sollicitée portait sur l'existence de pratiques d'entente verticale ou d'abus de position dominante en matière de fixation des prix de revente des produits phytosanitaires et d'une possible entente horizontale entre les fournisseurs de ces produits; qu'il n'est pas plus contesté que certains fournisseurs de produits sanitaires ont cherché à maintenir les prix de revente des distributeurs à un niveau artificiellement élevé, en s'abstenant de faire figurer sur leurs factures certaines remises dites de fin de campagne, alors qu'acquises antérieurement à la vente, elles se devaient d'y apparaître, le seuil de vente à perte étant pour le distributeur déterminé par référence au prix figurant sur la facture; qu'il y a lieu de rappeler que le requérant à l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'a à produire que des éléments formant un ou des indices qui, en cas de pluralité, aboutissent par leur addition, leur rapprochement, leur confrontation et/ou leur combinaison à une présomption de pratiques illicites; que le magistrat de première instance a fondé sa décision sur les liens organisationnel, juridique, économique et capitalistique existant entre les SAS X et Y; qu'il ressort des pièces soumises aux débats que ces différents liens ne sont pas contestés, les deux sociétés ayant leurs sièges à la même adresse postale, la même adresse Internet et le même président; que la première détient 100 % des parts de la seconde et qu'il existe manifestement une imbrication complète constituant une entité fonctionnelle entre les deux sociétés sus-désignées ; que deux des pièces produites mentionnant sans plus de précision ou différenciation " Z " pouvant ainsi faire référence à l'une comme à l'autre société ; que le magistrat de première instance a ainsi valablement retenu les lieux où vraisemblablement des preuves de pratiques illicites pouvaient se trouver en autorisant les visites dans les locaux des appelantes, compte tenu de la proximité des deux sociétés; qu'en ce qui concerne les indices ayant motivé l'acceptation de la requête, qu'il convient d'analyser ceux-ci de manière globale et non pas individuellement comme le suggèrent les appelantes; qu'en l'espèce, les requérants ont produit diverses pièces mentionnant les appelantes ; qu'il ressort de ces éléments, repris dans les conclusions des appelantes, que celles-ci sont des entreprises actives dans le secteur des produits phytosanitaires, que différents négociants en produits phytosanitaires, ont déclaré avoir bénéficié de remises de fin de campagne de la part de leurs fournisseurs, sans plus de précision quant à l'indication ou non de ces remises sur les factures de vente délivré ; que, dans une déclaration anonyme, il est fait état de remises en fin de campagne avec les fournisseurs; que ces éléments, rapprochés de la motivation de l'enquête et des déclarations impliquant d'autres fournisseurs dénonçant l'utilisation des remises de fin de campagne pour fausser le jeu de la concurrence, permettent, sans qu'il soit préjugé de la culpabilité des appelantes à ce stade de la procédure et de qualifier les pratiques dénoncées, de considérer comme réelle l'existence d'un faisceau d'indices permettant de retenir, notamment, des présomptions de pratiques concertées entre entreprises et fournisseur, et entre fournisseur et distributeurs, le magistrat de première instance ayant démontré que le système tarifaire auquel participaient les appelantes constituait une des modalités permettant de réguler le marché en limitant son accès ou le libre exercice de la concurrence notamment quand les seuils de revente à perte sont artificiellement établis par le biais de remises apparemment conditionnelles qui étaient en fait garanties, comme il est suspecté en l'espèce ; qu'il ressort des déclarations produites que les demanderesses remettaient aux distributeurs des prix conseillés décrits comme étant un prix que souhaitait voir appliquer le fabricant au niveau de l'utilisateur final, tel que l'a déclaré le directeur de l'agence sud-ouest B ; que ces pratiques apparaissent répandues dans ce secteur d'activité selon les déclarations produites mettant en cause d'autres fabricants; que ces prix conseillés s'inscrivent dans un contexte particulier de concertation tarifaire entre fournisseurs et distributeurs; que la présente procédure a débuté par la mise en œuvre du droit de communication qui a abouti à la mise à jour de présomptions de pratiques anticoncurrentielles; qu'il est acquis que l'Autorité de la concurrence n'a pas à rendre compte de son choix de recourir à la procédure des visites domiciliaires compte tenu de la complexité des pratiques illicites présumées et de leur caractère secret; que cette procédure respecte parfaitement l'article 8-1 de la Convention européenne des droits de l'Homme en assurant la conciliation du principe de la liberté individuelle et des nécessités de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles, le droit à un procès équitable et à un recours effectif étant garantis; que le magistrat saisi après avoir constaté comme en l'espèce, que des documents se rapportant à la fraude présumée sont susceptibles de se trouver dans tel lieu, peut autoriser des visites et saisies dans celui-ci, même de caractère privé; que la présente procédure concernant une présomption d'entente, il est évident que, dans un souci d'efficacité, des investigations sont nécessaires en plusieurs endroits et de manière simultanée, seule la synchronisation des équipes d'enquêteurs pouvant permettre d'arriver à un résultat ; qu'à ce stade de la procédure, sans présomption de la culpabilité des sociétés mentionnées, l'ensemble de ces éléments permet de considérer que la décision autorisant la visite domiciliaire est fondée sur des indices suffisants permettant de présumer l'existence de pratiques illicites dont la preuve est recherchée ;

" 1) alors qu'une autorisation de visite ne peut être accordée en raison d'indices d'une pratique qui, à la supposer matériellement établie, ne peut en elle-même caractériser une pratique prohibée; qu'à le supposer avéré, un système de remises faussement conditionnelles conduisant à un seuil de revente à perte artificiellement élevé ne peut caractériser en lui-même une entente verticale anticoncurrentielle prohibée ; que, dès lors, en justifiant l'autorisation de réaliser une visite domiciliaire par la participation des sociétés appelantes à un système tarifaire consistant à élever le seuil de vente à perte par le biais de remises inconditionnelles qui étaient en fait garanties, le premier président a violé l'article L. 450-4 du Code de commerce;

" 2) alors qu'en présumant une entente horizontale entre fournisseurs à partir d'indices qui ne concernent que les relations entre chacun de ces fournisseurs et leurs distributeurs, le premier président n'a pas légalement motivé sa décision ;

" 3) alors qu'il appartient au premier président de la cour d'appel de déterminer lui-même si les indices présentés par la requête permettent de présumer l'existence des pratiques prohibées invoquées par l'Administration; qu'en se bornant à constater que le juge des libertés et de la détention aurait démontré que les pratiques prétendument concertées auraient eu pour effet de limiter l'accès au marché et le libre exercice de la concurrence sans exercer son pouvoir d'appréciation sur ce dernier point, le premier président a violé les articles L. 450-4 du Code de commerce et 509 du Code de procédure pénale;

" 4) alors que l'autorisation de réaliser une visite domiciliaire ne peut être accordée que s'il résulte de la requête des indices permettant de présumer la participation de la personne concernée à la pratique prohibée dont la preuve est recherchée; qu'il résulte des constatations de l'ordonnance attaquée que la pratique concertée dont la preuve était recherchée consistait en la mise en place d'un système tarifaire permettant l'élévation artificielle du seuil de revente à perte par l'octroi de remises de fin de campagne qui n'étalent conditionnelles qu'en apparence ; qu'en déduisant la participation des sociétés appelantes à ce système de la seule circonstance qu'elles sont des entreprises actives dans le secteur concerné et qu'elles pratiquaient elles-mêmes des remises de fin de campagne sans constater le moindre indice permettant de présumer que ces remises n'étaient pas conditionnelles et que leur octroi participait du système tarifaire précité, le premier président n'a pas légalement motivé sa décision;

" 5) alors que ni la motivation de l'enquête dans le cadre de laquelle l'autorisation de réaliser la visite domiciliaire est sollicitée, ni son rapprochement avec la réalisation, par la personne concernée, d'une pratique en elle-même licite, ne peuvent constituer l'indice d'une participation de cette personne à la pratique prohibée dont la preuve est recherchée ; qu'en déduisant la participation des sociétés appelantes à la pratique concertée du seul rapprochement de la pratique de remises de fin de campagne avec la motivation de l'enquête, le premier président a violé l'article L. 450-4 du Code de commerce ;

6) " alors que l'indicatîon de prix de vente conseillés constitue une pratique parfaitement licite qui ne peut caractériser en elle-même un indice de pratiques anticoncurrentielles propre à justifier une autorisation de visites et saisies; qu'en retenant à l'encontre des sociétés appelantes qu'elles auraient remis à leurs distributeurs des prix conseillés, le premier président a violé l'article L. 450-4 du Code de commerce " ;

Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, 8 et 13 de la Convention européenne des droits de l'Homme L. 450-4 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale, violation du principe du droit au respect de la vie privée et de l'inviolabilité du domicile ;

" en ce que l'ordonnance attaquée a confirmé l'ordonnance déférée en ce qu'elle a autorisé le ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi, pris en la personne du directeur régional chef de la DNECCRF, et le rapporteur au conseil de la concurrence, à procéder aux visites et saisies prévues par l'article L. 450-4 du Code de commerce, dans les locaux des SAS X et Y;

" aux motifs que la présente procédure a débuté par la mise en œuvre du droit de communication qui a abouti à la mise à jour de présomptions de pratiques anticoncurrentielles; qu'il est acquis que l'Autorité de la concurrence n'a pas à rendre compte de son choix de recourir à la procédure des visites domiciliaires compte tenu de la complexité des pratiques illicites présumées et de leur caractère secret; que cette procédure respecte parfaitement l'article 8-1 de la Convention européenne des droits de l'Homme en assurant la conciliation du principe de la liberté individuelle et des nécessités de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles, le droit à un procès équitable et à un recours effectif étant garantis; que le magistrat saisi après avoir constaté, comme en l'espèce, que des documents se rapportant à la fraude présumée sont susceptibles de se trouver dans tel lieu, peut autoriser des visites et saisies dans celui-ci, même de caractère privé ; que la présente procédure concernant une présomption d'entente, il est évident que, dans un souci d'efficacité, des investigations sont nécessaires en plusieurs endroits et de manière simultanée, seule la synchronisation des équipes d'enquêteurs pouvant permettre d'arriver à un résultat ;

" alors qu'il appartient à l'autorité judiciaire, lorsqu'elle autorise les visites domiciliaires comme lorsqu'elle examine le bien-fondé de cette autorisation, d'apprécier la nécessité, pour l'Administration, de procéder à de telles visites ; qu'en refusant d'exercer cet office, le premier président a violé les articles L. 450-4 du Code de commerce, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme " ;

Les moyens étant réunis ; - Attendu que le juge d'appel s'étant référé, en les analysant, aux éléments d'information fournis par l'Administration, a souverainement apprécié l'existence des présomptions de pratiques anticoncurrentielles justifiant la mesure autorisée ; que les moyens qui ne tendent qu'à remettre en cause la valeur des éléments que le juge a retenus comme présomption d'agissements visés par la loi, ne sauraient être accueillis;

Sur le septième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, 8 et 13 de la Convention européenne des droits de l'Homme, L. 450-4 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale;

" en ce que l'ordonnance attaquée a confirmé l'ordonnance déférée en ce qu'elle a autorisé le ministère de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi, pris en la personne du directeur régional chef de la DNECCRF, et le rapporteur au Conseil de la concurrence, à procéder aux visites et saisies prévues par l'article L. 450-4 du Code de commerce, dans les locaux des SAS X et Y ;

" alors que le contrôle en fait et en droit de la régularité et du bien-fondé de la décision ayant prescrit une visite domiciliaire doit fournir dans un délai raisonnable un redressement approprié à une éventuelle violation du droit au respect de l'intimité de la vie privée et de l'intégrité du domicile; qu'en l'espèce, la faculté d'interjeter appel devant le premier président de la cour d'appel n'a été ouverte, avec l'entrée en vigueur des dispositions transitoires de l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008, que vingt-trois mois après la décision du juge des libertés et de la détention en date du 19 décembre 2006 et n'a donné lieu à un contrôle de cette décision que quatorze mois plus tard, le 18 février 2010, par le premier président saisi à cet effet; que la décision du juge des libertés n'ayant pu, à la date de l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 13 novembre 2008, faire l'objet d'un recours permettent un contrôle en droit et en fait dans un délai raisonnable de l'autorisation de pratiquer les visites domiciliaires, et cette ordonnance n'ayant pu fournir un redressement approprié à cette absence de recours, l'ordonnance attaquée a été rendue en violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme " ;

Attendu que le moyen en ce qu'il invoque, pour la première fois devant la Cour de cassation, la méconnaissance du non-respect du délai raisonnable selon les dispositions du texte conventionnel invoqué, entre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention et celle du premier président de la cour d'appel, est nouveau et comme tel irrecevable;

Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;

Rejette le pourvoi.