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ADLC, 5 octobre 2011, n° 11-D-13

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à des pratiques relevées dans les secteurs des travaux d'électrification et d'installation électrique dans les régions Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon, Auvergne et limitrophes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré sur le rapport oral de M. Didier Ferrero, rapporteur, , l’intervention de M. Étienne Pfister, rapporteur général adjoint, par Mme Françoise Aubert, vice-présidente, président de séance, Mme Reine-Claude Mader-Saussaye, MM. Jean-Vincent Boussiquet, Yves Brissy, Noël Diricq, Jean-Bertrand Drummen, membres.

ADLC n° 11-D-13

5 octobre 2011

L'Autorité de la concurrence (section II),

Vu la lettre enregistrée le 15 décembre 2006, sous le numéro 06-0098 F, par laquelle le ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie a saisi le Conseil de la concurrence, de pratiques d'entente observées dans le secteur des travaux d'électrification dans les régions Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon, Auvergne et limitrophes ; Vu les articles 101 et 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie ; Vu le procès-verbal du 15 octobre 2009 par lequel la société Entreprise Régionale de Canalisations et de Travaux Publics (ERCTP) a déclaré ne pas contester le grief qui lui avait été notifié et demandé à bénéficier des dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce ; Vu les décisions de secret des affaires n° 08-DSA-145 du 18 septembre 2008, n° 08-DSA-147 du 22 septembre 2008, n° 10-DSA-131 du 16 juillet 2010, n° 10-DSA-132 du 27 septembre 2010, n° 10-DSA-133 du 27 septembre 2010, n° 10-DSA-1342 du 2 décembre 2009 ; Vu les observations présentées par les sociétés Engelvin Travaux Publics Réseaux (ETPR), ERCTP, Sade, Allez et Cie, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Ineo, ETDE, Aygobère, Mainguy, Darlavoix, SDEL Massif central, Vinci Énergies Sud-Ouest, L'Entreprise Électrique, Spie Sud-Ouest, Spie SA, Ceras, STETC, Sobeca, Cana-Élec, Forclum Quercy-Rouergue-Gévaudan (QRG), Forclum SAS, Cegelec Sud-Ouest, Cegelec SAS, Cegelec Holding, Angel Larren, Elit, Larren Réseaux SLR, Société Languedocienne d'Aménagements (SLA), Chavinier, Mini, Raynal, Électricité Industrielle J.P. Fauché, Flottes Électricité, Met Expansion, Sega, Établissements Marti, Citel et par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général adjoint, le commissaire du Gouvernement, les représentants des sociétés ETPR, ERCTP, Sade, Allez et Cie, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Ineo, ETDE, Aygobère, Mainguy, Darlavoix, SDEL Massif central, Vinci Énergies Sud-2 Ouest, L'Entreprise Électrique, Spie Sud-Ouest, Spie, STETC, Sobeca, Cana-Élec, Forclum QRG, Forclum, Cegelec Sud-Ouest, Cegelec, Cegelec Holding, SLA, Raynal, Mini, Sega, Établissements Marti entendus lors de la séance du 21 juin 2011, les sociétés Ceras, Angel Larren, Elit, Larren Réseaux SLR, Chavinier, Mulero, Électricité Industrielle J.P. Fauché, AGV-Flottes Électricité, Citel, Électrolignes ayant été régulièrement convoquées ; Adopte la décision suivante :

I. CONSTATATIONS

1. Le ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie a dénoncé des pratiques mises en œuvre par 31 entreprises spécialisées en travaux d'électricité pour des pratiques observées lors d'appels d'offres passés entre 2003 et 2005 sur des marchés publics ou privés dans le "secteur des travaux d'électrification dans les régions Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon, Auvergne et limitrophes".

2. La direction départementale de la concurrence, de la consommation, et de la répression des fraudes de l'Aveyron avait examiné certaines anomalies décelées lors de deux consultations passées par le syndicat intercommunal d'électricité du département de l'Aveyron (Sieda) pour l'attribution de deux marchés relatifs au réseau de distribution publique d'électricité dans ce département.

3. Le premier marché passé en 2003 était relatif à des travaux de renforcement et d'aménagement du réseau. En dépit d'une grande stabilité des titulaires sur leurs lots préférentiels, les propositions se situaient à des niveaux de prix bien plus élevés que ceux qu'attendait la collectivité concernée. Un lot de ce marché a nécessité le lancement d'une seconde consultation, car l'entreprise attributaire s'était retirée. Ce lot a pu être attribué à une nouvelle entreprise qui a proposé un rabais très important.

4. Le second marché passé en 2005 concernait des travaux d'extension de réseaux, des opérations ponctuelles et des travaux de dissimulation. En raison d'une actualisation très importante du bordereau de prix, le Sieda a été surpris de constater une stabilité totale des titulaires sur leurs lots préférentiels et des niveaux de prix encore plus élevés.

5. Ces constatations ont été à l'origine de l'enquête réalisée par la DGCCRF, puisque cette situation était susceptible de résulter d'une entente entre les différentes entreprises, mise en œuvre grâce à des échanges d'informations antérieurs aux appels d'offres et accompagnés d'offres de couverture ainsi qu'au moyen d'une politique de réponse des entreprises en groupements.

6. Dans un premier temps, l'enquête a été menée en utilisant les moyens d'investigations prévus par l'article L. 450-4 du Code de commerce auprès de quatorze entreprises ou agences locales représentant onze entités juridiques différentes situées dans les cinq départements de l'Aveyron, du Tarn, de la Lozère, du Cantal et de l'Hérault : Larren Réseaux SLR (Decazeville), Guirande Électricité (Druelle), Cegelec Sud-Ouest (Millau), Établissement Boubal (Concoures), Ineo Réseaux Sud-Ouest (Millau), SDEL Massif central (Millau), Amec Spie Sud-Ouest (Sebazac Concoures), Languedocienne d'aménagement SLA (Salles Curan), Citel (St Sulpice), Engelvin TP Réseaux (ETPR) (Mende), Entreprise Chavinier (Aurillac). Ces entreprises et leurs agences ont fait l'objet de visites et saisies de documents le 20 octobre 2005.

7. Des investigations se sont poursuivies sur le fondement de l'article L. 450-3 du Code de commerce afin de compléter les informations recueillies lors des premières investigations. Les services de la DRCCRF de Bordeaux ont demandé des précisions sur divers marchés passés par d'autres syndicats départementaux d'électrification rurale, par les services EDF-GDF et par d'autres donneurs d'ordre publics ou privés. Il en a été ainsi pour les marchés passés par le syndicat départemental d'électrification et d'équipement de la Lozère (SDEE 48), du syndicat départemental d'énergies de la Dordogne (SDE 24), les marchés passés par EDF-GDF en Aveyron, en Lozère et en Dordogne, les marchés passés par divers donneurs d'ordre en Aveyron.

A. Le secteur concerné

8. Sont concernés, d'une part, la construction de réseaux électriques sur la voie publique et, d'autre part, les travaux d'installation électrique dans tous locaux.

1. La construction de réseaux électriques

a) Les réseaux

9. Le réseau électrique français comprend deux catégories de réseaux distinctes, en premier lieu, le réseau de transport d'électricité constitué des lignes à très haute tension ("THT" de 220 000 et 400 000 volts) et à haute tension ("B" supérieur à 50 000 volts).

10. Ce réseau achemine l'électricité depuis les centres de production d'électricité jusqu'aux zones régionales de consommation et à l'international. Depuis la loi n° 97-1026 du 10 novembre 1997 portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier, il est la propriété d'EDF. Il est géré par Réseau de Transport d'Électricité (RTE), société créée le 1er juillet 2000 et filiale à 100 % d'EDF après sa transformation en société anonyme le 1er septembre 2005.

11. En aval des réseaux de transport, les réseaux de distribution sont constitués par les lignes à haute tension ("A" entre 20 000 et 50 000 volts), les lignes à moyenne tension ("MT" de 1 000 à 20 000 volts) et les lignes à basse tension ("BT" de 230-400 volts). Ils acheminent l'électricité jusqu'au consommateur final (entreprises, abonnés domestiques) et appartiennent depuis 1906 aux collectivités locales. Ils sont gérés soit dans le cadre de contrats de concession par EDF, depuis le 1er janvier 2008 par Électricité Réseau Distribution France (ERDF), soit directement par les collectivités locales (régies), soit par des SICAE (sociétés d'intérêt collectif agricole pour l'électricité) ou des sociétés d'économie mixte locales (SEML).

b) Les travaux d'électrification

12. Il convient de distinguer les travaux d'électrification rurale des travaux demandés par EDF, lorsqu'elle est concessionnaire du régime dit urbain.

Les travaux d'électrification rurale

13. Il s'agit des travaux d'extension, de renforcement et d'enfouissement de réseaux en zone rurale, c'est-à-dire dans les communes de moins de 2 000 habitants ou qui ne font pas partie d'une agglomération intercommunale de plus de 5 000 habitants et dont la maîtrise d'ouvrage est réalisée par les collectivités locales, à savoir les communes, le plus souvent regroupées en syndicats intercommunaux d'électricité ou d'électrification (SIE) eux-mêmes fréquemment regroupés en syndicats départementaux d'électricité ou d'électrification (SDE).

14. Les travaux réalisés dans ce secteur font essentiellement l'objet de marchés publics. Les collectivités ou les syndicats intercommunaux procèdent à des appels d'offres permettant de choisir les entreprises chargées de leur exécution.

15. Regroupant tous les maîtres d'ouvrage, le SDE est chargé d'assurer la mise en place des financements nécessaires et de veiller à l'homogénéité des politiques des divers syndicats au plan économique, financier et environnemental. En matière d'électrification rurale, ces prestations ont trait aux travaux de construction, d'extension, de renforcement ou de remplacement des réseaux existants inscrits dans le programme annuel, mais aussi aux ouvrages réalisés à la demande des particuliers ou des communes. Une grande partie de ces travaux concerne des lignes électriques aériennes, mais la réalisation de travaux souterrains tend à augmenter, dans le cadre d'une politique d'enfouissement des lignes.

16. La procédure suivie est celle des marchés à bons de commande prévue à l'article 273 du Code des marchés publics, laquelle permet à une collectivité locale de passer un marché en ne fixant que le minimum et le maximum des prestations en valeur ou en quantité, susceptibles d'être commandées au cours d'une période déterminée, les quantités des prestations à exécuter étant précisées, pour chaque commande, par la collectivité ou l'établissement contractant en fonction des besoins à satisfaire. Les entreprises sont généralement invitées à proposer des rabais ou des majorations par rapport à un bordereau des prix unitaires (BPU) établi par le maître d'œuvre.

17. Ce sont des marchés discontinus exigeant une disponibilité immédiate, puisqu'ils fonctionnent par voie de commandes successives impromptues qu'il faut pouvoir exécuter dans des délais le plus souvent extrêmement courts et en se déplaçant immédiatement.

18. Ces caractéristiques de la commande publique confèrent un avantage à l'entreprise qui a déjà été attributaire du marché dans le passé :

- grâce à son expérience du terrain, elle en connaît les caractéristiques (réseau existant, nature et configuration, nature du terrain et composition des sols, etc.), de même que les besoins à satisfaire et le volume de travaux prévisibles, donc la rentabilité et l'intérêt du marché ;

- elle connaît également les interlocuteurs locaux (mairies et gestionnaires du réseau notamment) qui, eux-mêmes, sont en rapport avec elle, de sorte que celle-ci peut compter sur une bonne coopération de leur part et sans perte de temps coûteuse, pour toutes les opérations préalables à l'exécution des travaux (organisation de la voirie, de la circulation, des coupures de courant etc.) ;

- enfin, ayant déjà été attributaire du marché, l'entreprise peut chiffrer son offre avec toute la précision voulue à partir des chantiers qu'elle a déjà réalisés dans le passé et des résultats qu'elle a enregistrés pour ces derniers et auxquels il lui suffit d'appliquer le nouveau BPU pour définir son seuil de rentabilité et son coefficient de soumission.

Les marchés de travaux d'EDF-GDF Services puis d'EDF-GDF Distribution

19. À l'époque des faits, EDF et GDF avaient constitué une structure commune dénommée "EDF-GDF Services" jusqu'en 2004, puis "EDF-GDF Distribution".

20. Cette structure commune gérait les relations des deux entreprises publiques avec les particuliers et était également chargée de gérer les besoins des communes en qualité de concessionnaires des réseaux publics de gaz et d'électricité. Elle s'occupait également des équipements et infrastructures des réseaux locaux d'EDF ou de GDF.

21. A ce titre, EDF-GDF Services, puis EDF-GDF Distribution, passait chaque année par l'intermédiaire d'une plateforme d'achat de multiples commandes pour ses différents centres en France, allant du tubage de canalisations aux raccordements éoliens, en passant par des branchements chez des particuliers, des travaux d'alimentation en gaz ou en électricité, l'installation de compteurs de chaleur, etc.

22. Par ailleurs, EDF, qui était à l'époque un établissement public industriel et commercial (EPIC), n'était pas soumise à l'observation du Code des marchés publics (1) pour la passation de ses contrats, mais à une simple obligation de publicité et de mise en concurrence préalable pour les appels d'offres dépassant le seuil de 4 845 000 euro HT.

23. En deçà de ce seuil, ce qui est le cas de tous les marchés EDF-GDF visés par la présente affaire, elle sélectionne librement ses fournisseurs et ses prestataires et négocie librement avec ces derniers dès la date de remise des offres. Le respect des règles de concurrence s'impose également concernant le déroulement des appels d'offres sur ces marchés.

24. Ainsi, dans le cadre des marchés passés par les plateformes locales EDF (EDF-GDF à l'époque des faits en cause) qui peuvent être ponctuels, annuels ou pluriannuels, EDF choisit les entreprises qu'elle souhaite consulter, définit seule les volumes de travaux qu'elle entend allouer et retient les entreprises qui remplissent les critères qu'elle a elle-même définis et qui sont connus d'elle seule.

25. Il convient par ailleurs de relever que les contraintes physiques et les modes de travail qui découlent de ces marchés s'avèrent différents de ceux passés par les collectivités territoriales dans le cadre des travaux d'électrification rurale.

26. En effet, s'agissant des marchés passés par ces dernières, les études préalables aux travaux sont réalisées par les entreprises candidates/attributaires ; les moyens mis en œuvre par les entreprises retenues pour la réalisation desdits travaux sont, en principe, librement déterminés par leurs soins ; les entreprises sélectionnées pour réaliser les travaux doivent s'approvisionner elles-mêmes en matériaux ; les travaux sont à réaliser uniquement en zone rurale.

27. À l'inverse, s'agissant des marchés passés par la plateforme locale EDF, les études préalables ne sont pas réalisées par les entreprises attributaires, mais le sont directement par la plateforme locale EDF ; la plateforme locale EDF fournit l'ensemble des matériaux à utiliser pour réaliser les travaux ainsi que les matériels qui doivent être agréés (poteaux, câbles, isolateurs, ferrures, fils, etc.).

28. Parmi les entreprises soumissionnaires, figurent, d'une part, les filiales des majors du BTP telles qu'ETDE (groupe Bouygues), Vinci Énergies (groupe Vinci) et Forclum (groupe Eiffage) et, d'autre part, des groupes dits "multi-techniques" tels que Spie et Cegelec contrôlés par des fonds d'investissement. GDF-Suez est également présente sur ces marchés avec sa filiale Ineo.

29. Ces acteurs ont choisi de se diversifier par le biais d'opérations de croissance externe, de telles acquisitions leur permettant de proposer un ensemble complet de prestations sur l'ensemble du territoire national. Du fait de ces acquisitions, le nombre d'entreprises présentes sur ce secteur a diminué, passant de 657 en 1999 à 434 en 2006 (source Xerfi). Les très petites entreprises (TPE) conservent toutefois des avantages en raison de leurs faibles charges de structure, notamment sur les marchés de proximité d'EDF.

30. Les entreprises de ce secteur disposent souvent des moyens techniques et des compétences nécessaires pour intervenir sur des secteurs proches (travaux d'installation électrique, génie climatique ou réalisation d'autres réseaux : télécom, gaz, eau).

2. Les travaux d'installation électrique

31. Les travaux d'installation électrique regroupent les nombreuses activités liées à des prestations d'installation électrique dans le cadre de travaux de construction ou de réaménagement réalisés à l'intérieur d'immeubles.

32. Ils diffèrent ainsi des activités d'électrification rurale. Il ne s'agit pas de construire des réseaux extérieurs, mais d'installer un réseau électrique dans des bâtiments majoritairement fermés, pour des tensions bien inférieures à celles des réseaux de transport et de distribution d'électricité (380 volts).

33. À la différence du secteur de la construction de réseaux électriques, le secteur privé constitue le premier donneur d'ordre des entreprises qui réalisent des travaux d'installation électrique.

34. Le secteur des travaux d'installation électrique est marqué par la présence de nombreuses TPE. Les filiales des majors du BTP y sont également présentes, telles Vinci Énergies, ETDE et Forclum.

B. Les entreprises en cause

35. Les 36 entreprises suivantes se sont vu notifier des griefs.

1. Les sociétés du groupe Bouygues : ETDE, Aygobère, Mainguy

ETDE SA

36. ETDE SA est une filiale à 100 % de Bouygues Construction, elle-même filiale à 100 % de Bouygues SA. L'activité de réseaux électriques représente la moitié de l'activité de son pôle de travaux publics de réseaux. Depuis 2002, ETDE a accentué sa stratégie de croissance externe et a multiplié les acquisitions.

37. En 2009, ETDE a réalisé un chiffre d'affaires de plus de 940 millions d'euro. Son chiffre d'affaires consolidé avec Aygobère et Mainguy s'est élevé en 2008 à 1,7 milliard d'euro.

Aygobère

38. Aygobère a réalisé en 2008 un chiffre d'affaires en travaux de génie électrique et thermique et des travaux publics de réseaux de 23,3 millions d'euro. Elle a été rachetée en janvier 2006, puis absorbée le 31 décembre 2008 par ETDE

Mainguy

39. Mainguy a été acquise par ETDE en 2004. Elle est essentiellement active dans le secteur des réseaux. En 2009, son chiffre d'affaires s'est élevé à 63,4 millions d'euro.

40. ETDE consolide ses comptes dans Bouygues Construction qui elle-même consolide les siens dans Bouygues SA, dont le chiffre d'affaires s'est élevé en 2010 à 31,2 milliards d'euro.

2. Les sociétés du Groupe Eiffage : Forclum Sas et Forclum Aveyron (Ex-Guirande) Devenue Forclum Quercy Rouergue Gévaudan (QRG)

Forclum Aveyron (ex-Guirande) devenue Forclum Quercy Rouergue Gévaudan (QRG)

41. Guirande a été acquise par Forclum Aveyron par fusion-absorption le 1er janvier 2002. Cette nouvelle entité a été dénommée Guirande Électricité jusqu'au 28 septembre 2007, puis Forclum Aveyron avant de s'appeler Forclum Quercy Rouergue Gévaudan (QRG) à compter du 3 juin 2009.

42. Le chiffre d'affaires de Forclum QRG en 2009 est de 19,4 millions d'euro. Son premier client est le SDE de l'Aveyron.

Forclum SAS

43. Forclum QRG fait partie du pôle "Travaux électriques et construction de réseaux d'énergie" du groupe Forclum (Eiffage). Forclum maîtrise une gamme complète de compétences : génie électrique, climatique et mécanique. L'activité de génie électrique représente 81 % du chiffre d'affaires consolidé du groupe qui intervient à tous les niveaux : installations électriques, travaux d'équipements électriques, travaux d'infrastructure et d'aménagement du territoire, éclairage public et signalisation. Le groupe réalisait 32 % de son chiffre d'affaires avec le secteur industriel, 27 % dans le tertiaire, 24 % avec les collectivités locales et 17 % avec l'État et EDF. Ce groupe compte plus de 180 implantations régionales.

44. Le chiffre d'affaires de Forclum SAS en 2009 est de 66,36 millions d'euro.

45. Forclum QRG et Forclum SAS consolident leurs comptes au sein du groupe Eiffage. En 2010, le chiffre d'affaires d'Eiffage s'est élevé à 13,5 milliards d'euro.

3. Les sociétés du Groupe Vinci : L'entreprise Électrique, SDEL Massif Central, Darlavoix, Vinci Énergies Sud-Ouest

L'Entreprise Électrique

46. L'Entreprise Électrique appartient au groupe Vinci, leader du secteur en France. C'est une filiale à 100 % de Vinci Énergies Rhône Alpes Auvergne (VERAA). Elle intervient exclusivement dans le secteur des réseaux électriques. Ses principaux clients sont EDF et les SDE.

47. En 2009, son chiffre d'affaires s'est élevé à 22,96 millions d'euro.

SDEL Massif central SAS (Saunier Duval Électricité)

48. Saunier Duval Électricité (SDEL) est contrôlée à 100 % par Vinci Énergies Sud-Ouest, filiale du groupe Vinci Énergies. SDEL possède de nombreuses filiales régionales dont SDEL Massif Central, elle-même ayant acquis le fonds de commerce le 28 février 2002 de Lozère Aveyron Réseaux.

49. En 2009, le chiffre d'affaires de SDEL Massif central s'est élevé à 11,35 millions d'euro.

Darlavoix

50. Darlavoix a été acquise le 1er avril 2005 (2) par Vinci Énergies Sud-Ouest dont elle est devenue une filiale à 100 %. Elle réalise 70 % de son activité dans le département de la Dordogne : elle conçoit et construit des réseaux de distribution d'énergie électrique pour le compte du SDE de la Dordogne (70 %) et de EDF (6 %).

51. En 2009, son chiffre d'affaires s'est élevé à 7,9 millions d'euro.

Vinci Énergies Sud-Ouest

52. Vinci Énergies Sud-Ouest est une société holding. En 2009, son chiffre d'affaires s'est élevé à 6,1 millions d'euro.

4. Les sociétés du Groupe Veolia : Sade et ERCTP

Entreprise Régionale de Canalisations et de Travaux Publics (ERCTP)

53. ERCTP est une société qui réalise essentiellement des travaux de canalisation. Son activité est circonscrite aux départements de la Dordogne, de Charente et de Charente-Maritime. Le capital d'ERCTP est détenu à hauteur de 99,2 % par la société Sade, qui appartient au groupe Veolia Environnement.

54. En 2010, son chiffre d'affaires s'est élevé à 9,2 millions d'euro.

Sade

55. En 2010, le chiffre d'affaires de Sade s'est élevé à 767,9 millions d'euro. En 2010, le chiffre d'affaires consolidé du groupe Sade s'est élevé à 1,33 milliard d'euro.

5. La société filiale de Spie SA : Spie Sud-Ouest SAS

Spie Sud-Ouest SAS

56. Les activités de Spie Sud-Ouest SAS (préalablement dénommée Amec Spie Sud-Ouest) se concentrent, pour l'essentiel, dans le domaine du génie électrique. Spie Sud-Ouest intervient uniquement dans le Sud-Ouest de la France. L'activité de génie électrique représente 60 % de son activité.

57. En 2010, le chiffre d'affaires de Spie Sud-Ouest s'est élevé à 382,7 millions d'euro.

Spie SA

58. Spie Sud-Ouest est une filiale à 100 % de Spie SA, elle-même contrôlée à 100 % par Financières Spie, détenue majoritairement par le fonds d'investissement PAI Partner.

59. En 2010, le chiffre d'affaires de Spie SA s'est élevé à 62,3 millions d'euro.

6. Allez et Cie

60. Allez et Cie est une société familiale de dimension nationale. Elle dispose de nombreuses agences, essentiellement dans l'Ouest et le Sud de la France, et est présente dans quatre secteurs principaux : la construction de réseaux pour la distribution publique d'électricité, de gaz, et de télécommunications ; l'installation électrique pour les secteurs tertiaires et industriels ; le génie climatique industriel ; les travaux et la maintenance d'éclairage public, la mise en lumière des bâtiments, la signalisation routière et le mobilier urbain.

61. Allez et Cie a réalisé en 2009 un chiffre d'affaires de 116,8 millions d'euro.

7. Cegelec Sud-Ouest et Boubal

Établissements Boubal

62. Établissements Boubal SARL était une PME indépendante et familiale dirigée par ses deux cogérants. Elle a été absorbée par Cegelec Sud-Ouest le 25 février 2006.

Cegelec Sud-Ouest

63. Cegelec Sud-Ouest est une filiale à 100 % de Cegelec SAS. L'activité électrique représente environ 60 à 70 % de son activité totale.

64. En 2009, Cegelec Sud-Ouest a réalisé un chiffre d'affaires de 262,4 millions d'euro.

65. Le chiffre d'affaires consolidé du groupe Cegelec s'est élevé à 2,85 milliards d'euro en 2009.

8. La société filiale d'Ineo SA : Ineo Réseaux Sud-Ouest (Ex-Ei, Entreprise Industrielle)

Ineo Réseaux Sud-Ouest

66. Ineo Réseaux Sud-Ouest intervient dans les métiers de l'électrification, de l'éclairage public, des réseaux humides, et dans la construction de réseaux de gaz. Son activité principale est la construction de réseaux électriques. Ses deux principaux clients sont EDF et les SDE. Le capital d'Ineo Réseaux Sud-Ouest est détenu à 87 % par Ineo SA (3), qui fait partie du groupe GDF-Suez. En 2010, Ineo Réseaux Sud-Ouest a réalisé un chiffre d'affaires de 61,6 millions d'euro.

Ineo SA

67. Ineo SA est une société holding qui ne détient que des actifs immobiliers et des titres financiers. Elle n'a aucune activité opérationnelle en France, où elle n'a réalisé en 2009 qu'un chiffre d'affaires de 4 millions d'euro, mais a dégagé un bénéfice de 57 millions d'euro, soit 1425 % du chiffre d'affaires.

9. Le groupe Angel Larren : Électricité Larren Industriel et Tertiaire (Elit), Société Larren Réseaux (Slr) Et Angel Larren

68. Le groupe Angel Larren comprend trois sociétés depuis le 1er janvier 2004 : Angel Larren SARL, Société Larren Réseaux (SLR) et Électricité Larren Industriel et Tertiaire (Elit) SARL.

69. Le 1er janvier 2004, Angel Larren SARL a donné en location gérance à :

- Elit la partie de son fonds d'électricité générale. Les parts de cette société sont détenues à 99 % par Angel Larren.

- Larren Réseaux SLR la partie de son fonds lié aux réseaux d'énergie. Les parts de cette société sont détenues à 99 % par Angel Larren.

70. M. Larren est le gérant et actionnaire principal de ces trois sociétés situées à Decazeville, sur le même site. Angel Larren est la holding du groupe. Elit réalise les travaux d'électrification dans les bâtiments tandis que Larren Réseaux SLR a pour client EDF, les SDE et les collectivités locales. Les comptes des trois sociétés ne sont pas consolidés.

Angel Larren

71. En 2009, elle a réalisé un chiffre d'affaires de 848 080 euro.

Elit

72. En 2009, elle a réalisé un chiffre d'affaires d'un peu plus de 2 millions d'euro.

Larren Réseaux SLR

73. En 2009, elle a réalisé un chiffre d'affaires de 2,5 millions d'euro.

10. Engelvin Travaux Publics Réseaux (ETPR)

74. ETPR est une société familiale indépendante qui réalise des travaux de réseaux (électricité, fibre optique, eau, gaz). Les activités relatives aux travaux de réseaux électriques représentent 40 % de son activité totale et constituent sa principale activité. Son premier client est EDF.

75. En 2009, son chiffre d'affaires s'est élevé à 19,2 millions d'euro.

11. Cana-Elec

76. Cana-Elec est une société coopérative contrôlée par ses salariés. Elle est spécialisée dans l'installation de réseaux électriques, de gaz, et de réseaux divers pour le compte de clients comme EDF-GDF, les SDE ainsi que divers promoteurs. Elle intervient dans plusieurs départements : Gironde, Dordogne, Charente, Charente-Maritime et dans les Landes.

77. En 2010, son chiffre d'affaires s'est élevé à 15,6 millions d'euro.

12. Le groupe Fauché : Électricité Industrielle JP Fauché Et AGV Flottes Électricité

Électricité Industrielle JP Fauché

78. Le groupe Fauché est un groupe familial contrôlé majoritairement par M. Fauché. Électricité Industrielle JP Fauché ne réalise des travaux d'électrification ni pour EDF, ni pour les SDE. Sa clientèle est atomisée et ses clients sont composés d'acteurs de l'industrie, de la grande distribution et du tertiaire. En 2010, son chiffre d'affaires s'est élevé à 101,1 millions d'euro.

AGV Flottes Électricité

79. AGV Flottes Électricité a été acquise par Fauché SA en 2003. Elle intervient dans le bâtiment, notamment pour installer des réseaux électriques.

80. Elle a réalisé en 2010 un chiffre d'affaires de 5,3 millions d'euro.

81. Le chiffre d'affaires consolidé du groupe Fauché s'est élevé en 2008 à 164,7 millions d'euro.

13. Société Languedocienne d'Aménagements (SLA)

82. SLA est une société familiale. Elle intervient dans le secteur de la construction de réseaux électriques aériens et souterrains. Ses deux principaux clients sont EDF et les SDE.

83. En 2010, son chiffre d'affaires s'est élevé à 11,1 millions d'euro.

14. Chavinier

84. Chavinier est une société familiale créée en 1933 qui intervient sur les réseaux électriques, l'éclairage public, les réseaux de gaz et de télécommunications. Ses deux principaux clients sont le SDE du Cantal et EDF. Elle n'intervient pas en sous-traitance.

15. Citel Coopérative Industrielle de Travaux Électriques

85. Citel est une société coopérative de production (SCOP) implantée dans le Tarn. Elle réalise des travaux de construction de réseaux électriques et de voirie réseaux divers (VRD). Citel réalise un chiffre d'affaires d'environ 10 millions d'euro, dont 90 % auprès des SDE

16. Sega Société Électricité Générale Aveyronnaise et Met Expansion

Société Électricité Générale Aveyronnaise (Sega)

86. Sega, spécialisée dans les courants faibles, a été acquise par Met Expansion le 2 février 2007 qui ne la contrôle qu'à hauteur de 80 %. Elle n'intervient pas dans le secteur de la construction des réseaux électriques.

87. À l'époque des faits, la société était une entreprise familiale. À la suite de la cession de ses parts par le groupe familial à Met Expansion, Sega a été profondément restructurée pour redresser une situation financière difficile. À ce jour, la restructuration réalisée par le recrutement d'un personnel qualifié et rémunéré en conséquence a permis de placer Sega sur la voie du redressement.

88. En 2010, son chiffre d'affaires s'est élevé à 1,4 million d'euro.

Met Expansion

89. En 2010, le chiffre d'affaires de Met Expansion, spécialisée dans les courants forts, s'est élevé à environ 1 million d'euro. Les comptes du groupe Met Expansion ne sont pas consolidés.

17. Compagnie Électricité de Réseau Aérien et Souterrain (Ceras)

90. Ceras réalise des travaux d'électrification rurale, des travaux d'électrification aériens et souterrains, des travaux d'éclairage public et de canalisation (gaz), ainsi que divers travaux pour France Télécom. Elle est détenue à 99 % par la holding Jean Coto Finances qui ne contrôle que cette société.

91. En 2008, le chiffre d'affaires de Ceras s'est élevé à 4,2 millions d'euro.

18. Mulero et Fils

92. Mulero et Fils est une société familiale qui réalise un chiffre d'affaires d'environ 2,7 millions d'euro. Son principal client est EDF.

19. Mini

93. Mini est une société familiale de 19 salariés. Sa principale activité est la construction de réseaux électriques pour le compte d'ERDF ainsi que de réseaux gaz pour GRDF. Son chiffre d'affaires, clos au 31 mai 2010, s'est élevé à 2,7 millions d'euro.

20. Établissements Marti

94. Établissements Marti est une entreprise familiale de 25 salariés, implantée à Rodez. L'entreprise Marti n'effectue que des prestations d'électricité générale. Marti intervient occasionnellement comme sous-traitant de Cegelec Sud-Ouest.

95. En 2009, son chiffre d'affaires s'est élevé à 1,7 million d'euro.

21. Raynal

96. Raynal est une société familiale. Son principal client est GDF. Elle intervient parfois en sous-traitance de Cegelec.

97. Elle réalise un chiffre d'affaires d'environ 1,8 million d'euro.

22. STETC Société Technique d'Équipement Téléphonique Crouzet

98. STETC a été mise en liquidation judiciaire à la suite du jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bergerac en date du 18 novembre 2005.

99. Par une ordonnance en date du 31 janvier 2006, le juge commissaire a autorisé la cession du fonds de commerce dépendant de l'actif de la société débitrice, au profit de la société Sobeca.

C. Les pratiques relevées

1. Les deux marchés passés en 2003 par EDF-GDF services pour le centre Périgord à Périgueux en Dordogne

100. La plateforme d'achats EDF-GDF Services à Mérignac a passé deux marchés pour des travaux groupés de réseaux publics d'électricité du 1er février 2004 au 31 janvier 2005 pour le centre EDF-GDF Services Périgord à Périgueux en Dordogne. Le premier marché, divisé en quatre lots, concernait des travaux aéro-souterrains. Le deuxième marché, divisé en trois lots, portait sur des travaux souterrains mixtes (gaz et électricité).

101. Les marchés de travaux groupés sont ceux dont la localisation et le montant ne sont pas connus à l'avance mais estimés globalement à l'année.

102. Ces marchés sont passés sur la base de coefficients de prix, que les entreprises reportent sur le bordereau de prix, fourni par EDF. Les entreprises soumissionnaires fournissent des coefficients ou prix du point exprimés en euro HT.

103. Les entreprises doivent scinder leur proposition tarifaire en sous-familles de prix, nommées notamment : X, Y, Z et W qui correspondent respectivement aux travaux en tranchée, matériaux de remblai, réfection bitumineux et sable en distinguant un X gaz et un X électricité pour les souterrains mixtes. EDF-GDF pondère ces coefficients pour choisir l'entreprise attributaire du marché. Les critères de pondération, appliqués par EDF-GDF, ne sont pas transmis aux candidats soumissionnant aux travaux groupés pour préserver l'incertitude dans laquelle toutes les entreprises doivent se trouver placées, relativement au comportement de leurs concurrentes comme l'indique d'ailleurs ETPR :

"Il s'agit bien là d'une simple hypothèse de travail, de réflexions, ne pouvant refléter de façon exacte la réalité, les critères de pondération des offres des candidats, n'étant pas communiqués à ces derniers par EDF [...] les critères de pondération, appliqués par EDF, ne sont pas transmis officiellement aux candidats soumissionnant aux travaux groupés." (cotes 11180, 15214)

104. La date limite de remise des offres pour les deux marchés était fixée au 7 novembre 2003.

a) Description des marchés

Travaux aéro-souterrains

105. Pour le marché de travaux groupés aéro-souterrains, EDF-GDF Services a reçu huit offres.

Les entreprises soumissionnaires ont déposé comme suit leurs offres entre le 4 novembre et le 7 novembre 2003 :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

106. Les entreprises ayant été retenues pour les quatre lots de l'appel d'offres sont :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Travaux souterrains mixtes

107. Pour le marché de travaux groupés souterrains mixtes, EDF-GDF Services a reçu neuf offres, qui ont été déposées comme suit entre le 5 novembre 2003 et le 7 novembre 2003 :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

108. ERCTP, spécialisée dans les canalisations, n'a été sélectionnée par EDF-GDF que pour cet

appel d'offres. Étant classée quatrième sur neuf entreprises soumissionnaires, derrière ETPR,

STETC et Ineo Réseaux Sud-Ouest, elle n'a pas été retenue pour le tour des négociations.

109. Ainsi, les entreprises ayant obtenu un lot sont :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

110. Au total, sept contrats ont été signés avec EDF-GDF Services entre le 6 janvier 2004 et le 21 janvier 2004.

b) Les indices relevés

111. Les indices relevés ont été saisis chez ETPR. Ils sont constitués principalement de deux notes de M. Vincent Engelvin, directeur général. La première note (cote 3232) est datée du 5 novembre 2003, soit deux jours avant la date limite de remise des offres ; y figurent le nom d'un certain nombre d'entreprises, des calculs de coefficients ainsi que les mentions "Gpt Avec ETDE - Sout Mixte - Sous Traitant [...] ETDE répond en couverture sur aéro-souterrain + mixte". La seconde note (cote 3235) est non datée et comprend les indications "I" et "II" avec le nom des mêmes entreprises.

112. En outre, il a été saisi un document extrait de l'agenda du dirigeant M. Michel Engelvin (cote 3540) mentionnant à la date du 5 novembre 2003 : "RDV TG 24 Boulazac à 14h30". Sur un carnet de notes de son fils, M. Vincent Engelvin, il est également indiqué : "EDF Dordogne Réunion à programmer pour niveau de prix + partage" (cote 3220). Enfin, un post-it portant la mention "partage Dordogne" (cote 3434) a été retrouvé sur un carnet de M. Vincent Engelvin.

113. La note cotée 3232 fait apparaître notamment les mentions suivantes :

<EMPLACEMENT GRAPHIQUE>

114. Il ressort de ces indications qu'ETPR, qui envisageait de se grouper avec ETDE pour les travaux souterrains mixtes, voire d'être en sous-traitance avec cette dernière, laisse entendre que sa partenaire a répondu en "couverture" sur les deux marchés de travaux groupés aéro-souterrains et souterrains mixtes.

115. À cet égard, ETDE avait déposé une offre le 4 novembre 2003 pour le marché de travaux aéro-souterrains dont le prix trop élevé l'a exclue de la phase de négociation. En effet, le prix moyen pondéré (ci-après le "PMP") des coefficients de prix remis par ETDE s'élève à 0,1766 contre 0,1703 pour ETPR, soit 3,69 % plus cher (cote 5948).

116. S'agissant de la pondération des coefficients de prix, ETPR a confirmé, par courrier du 29 avril 2011, que, "au moment du dépôt de leurs offres, les entreprises ne sont donc pas en mesure de connaître de façon précise la pondération attachée à leurs offres" (cote 15236).

117. La note cotée 3235 fait quant à elle apparaître notamment les mentions suivantes :

<EMPLACEMENT GRAPHIQUE>

118. Les documents cotés 3232 et 3235 mentionnent des coefficients de pondération qui ont été utilisés par ETPR pour élaborer ses PMP et ceux de ses concurrentes, tant pour le marché des travaux aéro-souterrains que pour celui des travaux souterrains mixtes en fonction des coefficients de prix que les concurrentes ont dû lui communiquer.

<EMPLACEMENT TABLEAU>

119. Le très faible écart portant sur la répartition pour le marché de travaux souterrains mixtes sur les coefficients X gaz et X électricité, dont le montant cumulé s'avère identique à 55 %, entre les sous-pondérations du X gaz et du X électricité (0,25 % pour chacun des deux coefficients) ne modifie en rien les résultats obtenus sur les PMP de ce marché.

120. Selon ETPR elle-même (cote 11183), le document non daté coté 3235 présente les deux marchés de travaux groupés aéro-souterrains "I" et souterrains mixtes "II". Il comprend des noms d'entreprises et des coefficients.

121. S'agissant du marché de travaux aéro-souterrains, il y a lieu de relever qu'ETPR prévoyait de ne pas descendre au-dessous de "0,170 après négociation", ce à quoi elle s'est effectivement tenue en obtenant le premier lot avec un PMP de 0,1708 au 1er tour puis 0,1703 après négociation (cote 5948).

122. De plus, la mention d'un PMP de 0,173 euro lors du 1er tour de l'appel d'offres de travaux aéro-souterrains alors qu'ETPR a remis dans son acte d'engagement du 6 novembre 2003 un PMP différent à 0,1708 confirme que la date du document coté 3235 se situe avant la remise des offres le 7 novembre 2004.

123. Il en va de même de l'indication "Voir", qui évoque une prévision, dans la mention : "TG mixte => Voir ERCT pour Px => 0,180 Pondere 2004". Cela permet également de dater le document coté 3235 avant la remise des offres, puisqu'il s'agissait d'approcher cette concurrente pour qu'elle fixe son PMP à 0,180, ce qu'elle a effectivement fait en remettant des coefficients X électricité, X gaz, Y, Z et W de telle façon que son PMP soit calculé par EDF-GDF à 0,1803, soit 0,180 arrondi au millième.

124. De plus, s'agissant de la liste d'entreprises accompagnées de leur PMP "Ineo 0,174<=>0,171, Spie 0,175<=>0,172, ALLEZ 0,175<=>0,172" (cote 3235), suivant la mention "2e" après la mention "1°tour", ETPR a indiqué par courrier du 9 novembre 2009 que "2e" signifiait "2e tour" (cote 11184). Cette observation sera ensuite réfutée par courrier du 29 avril 2011, la mention "2e Groupe" étant maintenue (cote 15226).

125. En tout état de cause, les résultats des 1er et 2e tours de l'appel d'offres de travaux aéro-souterrains corroborent ces indications de prix (cotes 5947 et 5948), particulièrement en ce qui concerne le tour après négociation qui a conduit à l'attribution d'un lot aux quatre sociétés mises en exergue, à savoir ETPR, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Allez et Cie ainsi qu'Amec Spie Sud-Ouest :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

126. Le tableau ci-dessus montre que les PMP effectifs pour le 2è tour après négociation sont ceux prévus au millième (arrondi) par la note cotée 3235 saisie chez ETPR. Pour le 1er tour, les PMP sont vérifiés au millième (arrondi) pour Ineo Réseaux Sud-Ouest et s'en approchent à un millième près pour Spie Sud-Ouest et Allez et Cie.

127. Par ailleurs, le tableau ci-après met en évidence que les PMP des 1er et 2e tours du marché des travaux groupés aéro-souterrains relevés sur la note 3235 diffèrent de ceux remis lors des appels d'offres précédents du 1er février 2002 au 31 janvier 2003, puis du 1er février 2003 au 31 janvier 2004 (cotes 15950, 15955, 15960 et 15965). À la différence de l'appel d'offres en cause dans la présente affaire, les PMP des deux marchés précédents de travaux aéro-souterrains ont été calculés en prenant en compte les coefficients principaux de la série S 1000, X, Y Z, W, mais aussi ceux B5000Mat et B5000MO. En outre, Allez et Cie n'était pas soumissionnaire à ce dernier appel d'offres.

<EMPLACEMENT TABLEAU>

128. Les PMP des deux marchés précédents n'ont pu inspirer les PMP d'Ineo Réseaux Sud-Ouest, d'Allez et Cie ainsi que de Spie Sud-Ouest prévus par ETPR pour le marché de travaux groupés aéro-souterrains 2003-2004.

129. S'agissant du marché de travaux groupés souterrains mixtes, la mention "TG mixte => Voir ERCT pour Px => 0,180 PONDERE 2004" (cote 3235) est vérifiée au trois dix millièmes près pour ERCTP. Le montant arrondi au millième s'avère exactement le PMP de 0,180 remis par cette concurrente en ce qui concerne le 1er tour au vu des résultats communiqués par EDF-GDF (cote 5981) :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

130. Le tableau ci-après montre que les PMP des 1er et 2e tours du marché de travaux groupés souterrains mixtes relevés sur la note 3235 diffèrent également de ceux remis lors des appels d'offres précédents du 1er février 2002 au 31 janvier 2003, puis du 1er février 2003 au 31 janvier 2004. Seuls les coefficients de la série S 1000, X élec, X gaz, Y, W Z ont été pris en compte pour le calcul du PMP. En outre, ETPR n'était pas soumissionnaire à ce dernier appel d'offres.

<EMPLACEMENT TABLEAU>

131. Ces PMP des deux marchés précédents n'ont pu inspirer le PMP d'ERCTP prévu par ETPR pour le marché de travaux groupés souterrains mixtes 2003-2004.

132. Par ailleurs, une réunion était anticipée dès le 16 octobre 2003 ainsi que cela ressort de l'indication "EDF Dordogne Réunion à programmer pour niveau de prix + partage" figurant dans un carnet de notes du fils du dirigeant d'ETPR (cote 3220).

133. Or, il ressort de l'agenda du dirigeant d'ETPR, M. Michel Engelvin, à la date du 5 novembre 2003, la mention : "14h30 RDV TG 24 BOULAZAC" (cote 3540). Le terme TG 24 correspond à "travaux groupés" et "24" au département de la Dordogne. Le principe d'une réunion était ainsi arrêté à la date du 5 novembre 2003, dans la commune de Boulazac, mais sans indication des participants.

134. Enfin, il convient également de rappeler qu'un post-it portant la mention "partage Dordogne" (cote 3434) a été retrouvé sur un carnet du fils du dirigeant d'ETPR.

135. Les faits cités ci-dessus ont été suivis d'un plein effet, puisque ETPR, Allez et Cie, Ineo Réseaux Sud-Ouest et Amec Spie Sud-Ouest ont obtenu chacune un des quatre lots attribués pour les travaux groupés aéro-souterrains. De même, ETPR a obtenu un des trois lots attribués pour les travaux groupés souterrains mixtes, son offre ayant été meilleure que celle remise par ERCTP.

c) Le grief notifié

136. Grief n° 1 : "Il est fait grief s'agissant du marché pertinent que détermine l'appel d'offres organisé par EDF en Dordogne, aux sociétés ETDE, Mainguy, Darlavoix, Vinci Énergies Sud-Ouest, ERCTP, Sade, Spie Sud-Ouest, Spie SA, Allez, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Ineo SA, ETPR, Ceras, STETC, venant éventuellement aux droits d'autres sociétés, de s'être concertées afin de se répartir le marché et de fixer un niveau artificiellement élevé des prix, cette concertation ayant eu pour objet et pour effet de limiter l'intensité de la concurrence entre les entreprises, de faire obstacle à la libre fixation des prix et, de tromper EDF, quant à la réalité et à l'étendue de la concurrence s'exerçant entre les entreprises soumissionnaires. Faits prohibés et réprimés par les articles L. 420-1 et L. 464-2 du Code de commerce".

2. Les marchés passés en 2003 par 30 syndicats intercommunaux du département de la Dordogne

a) Description des marchés

137. Le syndicat départemental des collectivités publiques électrifiées de la Dordogne (SDCPED) devenu le syndicat départemental d'énergies de la Dordogne assurait la maîtrise d'œuvre pour le compte de 30 syndicats intercommunaux du département qui ont passé, en 2003, 30 marchés à bons de commande pour des travaux d'électrification sur les années 2004-2006. La date limite des offres était fixée pour l'ensemble des marchés au 20 octobre 2003.

138. Les résultats de ces appels d'offres peuvent être synthétisés de la manière suivante :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

139. Les entreprises Allez et Cie, STETC, Mainguy, Spie, Darlavoix, Ineo Réseaux Sud-Ouest, ETDE et Cana-Elec ont toutes obtenu au moins un marché lors de ces appels d'offres.

140. Ainsi, Allez et Cie a été attributaire de 5 marchés, à savoir les marchés n° 3 (Belves), n° 5 (Le Bugue-Ste Alvère), n° 8 (Domme-Carlux), n° 13 (Monpazier-Villefranche) et n° 23 (Sarlat-Salignac). Ineo Réseaux Sud-Ouest a été attributaire du marché n° 12 (Molieres).

141. ETPR a retiré des dossiers de soumission pour les marchés n° 3 (Belves), n° 5 (Le Bugue-Ste Alvère), n°8 (Domme-Carlux), n° 9 (Issigeac), n° 12 (Molieres), n° 13 (Monpazier-Villefranche), mais sans remettre d'offre.

b) Les indices relevés

142. Parmi les pièces saisies au sein de la seule entreprise ETPR figure un cahier manuscrit du dirigeant d'ETPR qui révèle un premier document, coté 3214. Cette pièce n'est pas datée, mais se situe dans le cahier avant les documents cotés 3220 et 3221, datés du 16 octobre 2003. Il peut être estimé qu'il est antérieur. On peut y lire les mentions suivantes :

<EMPLACEMENT GRAPHIQUE>

143. Le deuxième document coté 3219, daté du 16 octobre 2003, comprend les éléments suivants :

<EMPLACEMENT GRAPHIQUE>

144. Sur la reproduction carbone de cette pièce figure en haut à droite la mention "Partage Dordogne" (cote 3220). Cette mention a été inscrite sur un post-it déposé à la page précédente et qui a ensuite été déposé à la première page de l'agenda du dirigeant d'ETPR pour l'année 2003 (cote 3434).

145. En cote 3221, un troisième document laisse apparaître les mentions suivantes :

<EMPLACEMENT GRAPHIQUE>

146. Ces documents renvoient à 6 des 30 marchés dont la maîtrise d'œuvre était assurée par le syndicat départemental d'énergies de la Dordogne dans le cadre du programme de travaux d'électrification pour les années 2004-2006 : n° 3 (Belves), n° 5 (Le Bugue-Ste Alvère), n° 8 (Domme-Carlux), n° 13 (Monpazier-Villefranche) et n° 23 (Sarlat-Salignac) obtenus par Allez et Cie et le marché n° 12 (Molieres) attribué à Ineo Réseaux Sud-Ouest.

147. Ces notes, datées du 16 octobre 2003, sont antérieures à la date limite de dépôt des offres pour ces marchés, fixée au 20 octobre 2003.

148. Les mentions relatives aux différents attributaires des marchés qui figurent dans les documents présentés ci-dessus correspondent au résultat des appels d'offres : Allez et Cie a effectivement été attributaire des marchés Belves, Le Bugue-Ste Alvère, Montpazier et Sarlat. Ineo a également été attributaire du marché Molieres.

149. Par ailleurs, ETPR, qui a retiré des dossiers de soumission, n'a pas remis d'offres. ETPR est intervenue sur certains de ces chantiers au moyen d'une sous-traitance avec l'entreprise Allez et Cie ainsi que cela ressort de la mention : "Code 160016 ER Dordogne SS-trait Allez-Recette 94 000 euro-Dépenses 159 966,97" (cote 3735).

150. Allez et Cie, titulaire des marchés de Belves, Le Bugue-Ste Alvère, Domme-Carlux, Montpazier-Villefranche et Sarlat-Salignac, n'a pas informé le maître d'ouvrage qu'un sous-traitant interviendrait sur ses chantiers (cote 4869). En effet, aucune mention ne figure à ce titre dans sa lettre de candidature ou dans son acte d'engagement auprès du SIE Le Bugue/Sainte-Alvère. Interrogé sur cette sous-traitance, le directeur du syndicat départemental d'énergies de la Dordogne, maître d'œuvre des 30 marchés en cause, a indiqué à cet égard n'avoir enregistré aucune sous-traitance déclarée par ETPR à Mende (cote 4869).

151. Les trois documents précités n° 3214, n° 3219 et n° 3211 comprennent pour le premier la mention suivante : "Demander Coef. pour Couverture sur Lot Le Bugue (65)", pour le deuxième une indication de groupement conjoint solidaire : "BUGUE : ETPR 35-40 % Allez 65-60 %, Gpt Allez Mandataire conjoint solidaire" et pour le troisième l'indication suivante : "Solution =>Cotraitant Allez Cie Le Bugue=> 30 à 40 % ETPR = 200 000 euro/an 60 à 70 % Allez". Ces éléments sont de nature à confirmer un possible accord de groupement en cotraitance entre Allez et Cie et ETPR sur le marché n° 5 de Bugue-Ste-Alvère.

152. Lors de son audition le 1er octobre 2008, le président d'ETPR a souligné : "Je précise que nous avons travaillé en sous-traitance avec Allez une seule fois, en 2005 pour un chantier en Dordogne, mais nous n'avons jamais été payés. Nous avons saisi le tribunal [...]" (cote 7438). Par courrier du 26 mai 2011, ETPR confirme être intervenue "une seule et unique fois" en 2005 en sous-traitance dans le cadre du marché passé par le syndicat départemental d'énergies de la Dordogne.

153. Par courrier du 23 novembre 2009, Allez et Cie indique qu'un accord entre les deux sociétés a été conclu le 16 octobre 2003 à l'occasion d'un déplacement à Mende de M. Vincent Sapa, directeur de l'agence Allez et Cie de Sarlat, où il a rencontré M. Engelvin (voir le carnet de vol de M. Vincent Sapa en date du 16 octobre 2003 faisant apparaître le déplacement aller-retour de Sarlat à Mende, cote 13208).

154. Par courrier du 13 mai 2009, Allez et Cie a communiqué les documents concernant la sous-traitance d'ETPR pour le marché n° 5 d'électrification rurale du SIE Le Bugue/Sainte-Alvère. Un contrat a été signé le 30 mai 2005 (cote 7933) entre ces deux entreprises. Il concerne trois chantiers travaux de génie civil pour électrification rurale pour un montant total de 154 613 euro HT exécutés d'avril 2005 à juillet 2006 sur des sites situés à Pezuls et à St-Laurent-les-Bâtons (cotes 7928, 7938 à 7945). Les communes de Pezuls et St-Laurent-les-Bâtons appartiennent au canton de Ste-Alvère. Elles font partie du marché n° 5 Le Bugue-Ste-Alvère.

155. Dix entreprises ont candidaté pour cet appel d'offres du SIE Le Bugue/Sainte-Alvère : ETPR, Allez et Cie, Sobeca, Resea, Mainguy, ETDE, Amec Spie Sud-Ouest, Cegelec Sud-Ouest, Électro France et Ineo Sud-Ouest (cote 5047). Seules deux entreprises ont répondu : Allez et Cie et Ineo Sud-Ouest (cote 4909)

c) Le grief notifié

156. Grief n° 2 : "Il est fait grief aux sociétés ETPR, Allez, STETC, Mainguy, Spie Sud-Ouest, Spie SA, Darlavoix, Vinci Énergies Sud-Ouest, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Ineo SA, ETDE, Cana-Elec, venant éventuellement aux droits d'autres sociétés, s'agissant du marché pertinent que détermine l'appel d'offres du SDE de Dordogne, de s'être concertées afin de se répartir le marché et de fixer un niveau artificiellement élevé des prix, pratique caractérisée en l'espèce, cette concertation ayant eu pour objet et pour effet de limiter l'intensité de la concurrence entre les entreprises, de faire obstacle à la libre fixation des prix et, de tromper le SDE de Dordogne, acheteur public, quant à la réalité et à l'étendue de la concurrence s'exerçant entre les entreprises soumissionnaires. Faits prohibés et réprimés par les articles L. 420-1 et L. 464-2 du Code de commerce".

3. Les marchés passés en 2005 par EDF-GDF Distribution pour le Centre Aveyron Lozère

a) Description des marchés

157. La plateforme d'achats EDF-GDF Distribution (ex EDF-GDF Services) de Mérignac a passé des marchés pour répondre à 44 demandes d'achat du centre EDF-GDF Distribution Aveyron-Lozère pour l'année 2005, notamment les neuf affaires identifiées par les numéros d'unité : 235-05-21 à 27 et 235-05- 29 et 30 (cote 5999).

158. Ces affaires portent sur des commandes ponctuelles de renforcement ou d'enfouissement de lignes HTAS (haute tension souterrain) localisées en Lozère ou en Aveyron et faisant partie de la structure du réseau HTA supérieur ou égal à 20 000 volts à la charge d'EDF.

159. Trois de ces neuf marchés ont été déclarés infructueux. Les six autres ont été attribués comme suit :

1) Renforcement HTAS Départ St Saturnin de Lenne Tronçon n 1 (Aveyron)

Entreprises candidates : ETPR le 30 août 2005 (251 100 euro), Boubal le 31 août 2005 (243 991 euro), Raynal le 31 août 2005 (259 399 euro) et SLA le 30 août 2005 (269 756 euro).

Entreprises n'ayant pas répondu ou excusées : Guirande (non répondu), Ineo Réseaux Sud-Ouest (excusée).

Remise des offres pour le 1er septembre 2005.

Classement des offres : 1er Boubal, 2e ETPR, 3ème Raynal, 4ème SLA.

Marché négocié : Boubal (234 846 euro) et ETPR (247 050 euro).

Marché attribué à Boubal : 234 846 euro HT.

2) Enfouissement HTAS Départ St Saturnin de Lenne Tronçon n 2 (Aveyron)

Entreprises candidates : ETPR le 16 septembre 2005 (202 350 euro), Boubal le 15 septembre 2005 (194 850 euro), Cegelec Sud-Ouest le 15 septembre 2005 (201 176 euro), Ineo Réseaux Sud-Ouest le 16 septembre 2005 (198 110 euro), Raynal le 15 septembre 2005 (190 413 euro) et SLA le 16 septembre 2005 (185 057 euro).

Entreprises n'ayant pas répondu : Guirande et Chavinier.

Remise des offres pour le 19 septembre 2005.

Classement des offres : 1er SLA, 2e Raynal, 3ème Boubal, 4ème Ineo, 5ème Cegelec Sud-Ouest, 6ème ETPR.

Marché négocié : SLA (180 857 euro), Boubal (188 610 euro) et Raynal (187 413 euro).

Marché attribué à SLA : 180 857 euro HT.

3) Renouvellement HTAS Le Monastere Cabrespine Les Mazes Commune Coubisou (Aveyron)

Entreprises candidates : Cegelec Sud-Ouest le 8 septembre 2005 (195 776 euro), ETDE le 9 septembre 2005 (225 570 euro), Guirande le 8 septembre 2005 (210 230 euro), Larren Réseaux SLR le 8 septembre 2005 (214 016 euro) et SDEL MC le 9 septembre 2005 (210 100 euro).

Entreprises excusées : ETPR et Ineo.

Remise des offres pour le 12 septembre 2005.

Classement des offres : 1er Cegelec Sud-Ouest, 2e SDEL, 3ème Guirande, 4ème Larren Réseaux SLR, 5ème ETDE.

Marché attribué à Cegelec Sud-Ouest : 195 776 euro HT.

4) Raccordement Parc éolien du Puech et des Plots Commune Castelnau Peygarols (Aveyron)

Entreprises candidates : ETPR le 9 septembre 2005 (1 011 000 euro), Cegelec Sud-Ouest le 8 septembre 2005 (1 228 000 euro), Chavinier le 14 septembre 2005 (800 000 euro), ETDE le 12 septembre 2005 (1 340 110 euro), Guirande le 13 septembre 2005 (1 218 100 euro), Ineo Réseaux Sud-Ouest le 14 septembre 2005 (1 230 850 euro) et Mini le 13 septembre 2005 (1 233 000 euro).

Entreprises n'ayant pas répondu ou excusées : Raynal, SLA (non répondu), SDEL, Lavigne (excusées).

Remise des offres pour le 15 septembre 2005.

Classement des offres : 1er Chavinier, 2e ETPR, 3ème Guirande, 4ème Cegelec Sud-Ouest, 5ème Ineo, 6ème Mini, 7ème ETDE.

Marché attribué à Chavinier : 800 000 euro HT.

5) Renouvellement HTAS Layolle St Sulpice/Commune de Trèves Nant (Aveyron)

Entreprises candidates : ETPR le 9 septembre 2005 (240 700 euro) et ETDE le 9 septembre 2005 (249 550 euro).

Entreprises n'ayant pas répondu ou excusées : Cegelec Sud-Ouest, Ineo, Raynal, SDEL, SLA et Larren Réseaux SLR.

Remise des offres pour le 12 septembre 2005.

Classement des offres : 1er ETPR, ETDE (réponse incomplète : pas d'offre sur l'aérien).

Marché attribué à ETPR : 199 950 euro HT pour la seule partie souterraine.

6) Renouvellement HTAS Prat Peyrot Monlau "Mont Aigoual" (Lozère-Gard)

Entreprises candidates : ETPR le 8 septembre 2005 (172 282 euro) et Mini le 8 septembre 2005 (207 700 euro).

Entreprises n'ayant pas répondu ou excusées : Amec Spie, Chavinier, Cegelec Sud-Ouest, Guirande, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Raynal et SLA.

Remise des offres pour le 13 septembre 2005.

Classement des offres : 1er ETPR, 2e Mini.

Marché attribué à ETPR : 161 800 euro HT après ré-estimation du prix de référence de 140 000 euro à 255 686 euro par la plate-forme d'achats (cote 6156).

160. Les offres ont toutes été déposées après le 30 août 2005. ETPR, Cegelec Sud-Ouest, SLA et Boubal ont obtenu au moins un marché. ETPR, ETDE, Mini, Cegelec Sud-Ouest, Guirande, Larren Réseaux SLR, SDEL, Chavinier, Ineo, SLA, Boubal et Raynal ont présenté au moins une offre.

161. Les trois marchés non attribués sont : Verlac-les-Mazes Aurelle Verlac, Piscine-Le Camarat Nant et Lozère Les Vignes, les offres étant supérieures aux estimations retenues (cotes 7878 à 7881).

1) Verlac Les Mazes (Aveyron)

Entreprises candidates : Guirande le 8 septembre 2005 (187 752 euro), Cegelec Sud-Ouest le 8 septembre 2005 (195 707 euro), Raynal le 9 septembre 2005 (200 708 euro) et Boubal le 9 septembre 2005 (225 316 euro).

Entreprises n'ayant pas répondu ou excusées : ETPR, Chavinier, SDEL Massif Central.

Classement des offres : 1er Guirande (187 752 euro).

Les offres ont toutes été déposées après le 30 août 2005. Le niveau des prix étant supérieur au prix de référence (80 000 euro), la consultation a été déclarée infructueuse.

2) Piscine Le Camarat à Nant (Aveyron)

Entreprise candidate : SDEL Massif-Central le 8 septembre 2005 (239 150 euro).

Entreprises n'ayant pas répondu ou excusées : ETPR, Cegelec Sud-Ouest, Chavinier, Larren Réseaux SLR, Guirande et SLA.

Classement des offres : 1er SDEL Massif Central (239 150 euro).

L'offre unique a été déposée après le 30 août 2005. Le niveau des prix étant supérieur au prix de référence (200 000 euro), la consultation a été déclarée infructueuse (cote 7880).

3) Lozère Les Vignes (Lozère)

Entreprises candidates : ETPR le 9 septembre 2005, Ineo le 8 septembre 2005 et SLA le 9 septembre 2005.

Entreprises n'ayant pas répondu ou excusées : Chavinier et Guirande.

Classement des offres : 1er Ineo (PMP : 0,1872), 2e ETPR (PMP : 0,1878), 3ème SLA (PMP : 0,1916), 4ème Raynal (PMP : 0,939).

Les offres ont toutes été déposées après le 30 août 2005. Le niveau des prix étant supérieur au prix de référence (PMP : 0,1808), la consultation a été déclarée infructueuse.

b) Les indices relevés

162. Parmi les documents saisis au sein d'ETPR, une note manuscrite de deux pages, cotée 3290 et 3292, mentionne le nom des neuf marchés précités du centre Aveyron-Lozère (six marchés attribués, trois déclarés infructueux). Les deux indications qui n'ont pas été identifiées par EDF (l'Aigoual ou Mt Aigoual et éolienne) ont été reconnues par SLA comme désignant le marché Prat Peyrot Montlau (marché 235 05 22) face à la mention "Mont Aigoual" et le marché du raccordement du parc éolien du Puech et des Plots à Castelnau Peygarols pour la mention "éolienne" (cotes 8826, 8836). La note est datée du 30 août 2005, soit à une date antérieure à la réception des offres. Outre ETPR, les sept sociétés suivantes Boubal, SLA, Cegelec Sud-Ouest, Guirande, Raynal, SDEL et Ineo, sont mentionnées en exergue des marchés litigieux :

<EMPLACEMENT GRAPHIQUES>

163. Lors de son audition le 1er octobre 2008, ETPR a déclaré à propos de cette note :

"[I]l doit s'agir du nom des entreprises qui ont retiré les dossiers, ou de ceux qui ont l'habitude de travailler dans ce secteur." (cote 7438)

164. Les résultats de ces appels d'offres peuvent être comparés aux éléments figurant dans le document saisi dans les locaux d'ETPR :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

165. La première page du document, cotée 3290, saisi chez ETPR révèle que, sur le marché de renforcement HTAS Saint Saturnin tronçon 1 mentionné "St Sat n° 1", il est indiqué qu'ETPR, Ineo, SLA et Raynals font une offre de couverture pour Boubal "couverture Boubal" avec mention d'un prix à majorer "px à majoré". Or, l'attributaire de ce marché a bien été Boubal. ETPR, SLA et Raynal ont déposé des offres les 30 ou 31 août 2005 pour une date butoir fixée au 1er septembre 2005. Sur ce marché, six entreprises ont été consultées et les quatre en cause ont répondu.

166. Sur le marché d'enfouissement HTAS Saint Saturnin tronçon 2 mentionné sur ce même document "St Sat n°2", SLA est présentée comme étant l'attributaire, ce qui a effectivement été le cas. ETPR s'est portée candidate sur ce marché et a déposé une offre le 16 septembre 2005. Sur ce marché, huit entreprises ont été consultées. Six ont répondu entre le 15 et le 16 septembre 2005 pour une date butoir fixée au 19 septembre 2005 : ETPR, Boubal, Cegelec Sud-Ouest, Raynal, SLA et Ineo.

167. Sur le marché de renouvellement HTAS Le Monastère Cabrespine Les Mazes Commune Coubisou, le document coté 3290 comporte la mention "Coubissous Monastère/Cabres-Cegelec/Guirande". Cinq entreprises se sont portées candidates entre le 8 et le 9 septembre 2009 : Cegelec Sud-Ouest, ETDE, Guirande, Larren Réseaux SLR et SDEL Massif central. ETPR s'est excusée. Ce marché a été attribué à Cegelec Sud-Ouest, mais Guirande n'a été classée que 3ème.

168. Sur le marché du parc éolien du Puech à Castelnau, le document coté 3290 mentionne Raynal comme possible attributaire et l'expression "à voir" en face des six entreprises Chavinier, Aygobère, ETDE, Mulero, Mini et ETPR. Sous l'indication "Éolienne" de la page suivante cotée 3292 figure les noms de sept entreprises, à savoir "Sla, Raynals, Chavigier, Sdel, Guirrande, Cegelec, Ineo", accompagnés d'éventuels groupements entre SLA et Guirande ou entre SDEL et Ineo. Sept entreprises se sont portées candidates entre le 9 et le 14 septembre 2009 : ETPR, Cegelec Sud-Ouest, Chavinier, ETDE, Guirande, Ineo Réseaux Sud-Ouest et Mini. Toutefois, ce marché a été attribué à Chavinier et Raynal n'a pas fait de soumission. Ces deux possibilités de groupements n'ont pas été suivis d'effet (cotes 6123 et 6124).

169. Sur le marché de renouvellement HTAS Layolle Saint Sulpice/Trèves Nant, le document coté 3290 comporte la mention "lot 1 et 2 = Trèves ETPR". Toutefois, sur la page suivante cotée 3292, il est indiqué, s'agissant de "Trèves 1 et 2", la mention "à contacter" en regard de six entreprises : SLA, Cegelec Sud-Ouest, Larren, SDEL, Ineo, Raynal. Néanmoins, ce marché a bien été attribué à ETPR dans la partie souterraine, ce qui correspond à la mention figurant dans le document coté 3290. Huit entreprises ont été consultées et deux seulement ont répondu : ETPR et ETDE, alors que six autres entreprises se sont excusées ou non pas répondu : Cegelec Sud-Ouest, Ineo, Raynal, SDEL, SLA et Larren Réseaux SLR. La date de remise des offres était fixée au 12 septembre 2005 et les deux offres ont été déposées le 30 août 2005, date du document.

170. Sur le marché de renouvellement HTAS Prat Peyrot Monlau "Mont Aigoual", le document coté 3290 mentionne "ETPR". Or, ce marché a bien été attribué à cette dernière, en concurrence avec Mini. Sur la page suivante cotée 3292, le nom de cinq concurrentes possibles "Cegelec, SLA, Guirande, Raynal, Ineo" est cité, lesquelles ont été retenues dès le 8 août 2005 par le donneur d'ordre comme entreprises à contacter, avec Chavinier et ETPR (cote 6002).

171. Il convient de relever qu'ETDE ou Larren Réseaux SLR ne sont citées en exergue des marchés litigieux, pour la première, qu'en regard de la mention "à voir" pour le marché à Castelnau (cote 3290) et, pour la seconde, sous la mention "à contacter" pour les marchés de Trèves 1 et 2 (cote 3292).

172. Enfin, pour trois autres marchés déclarés infructueux en raison de prix jugés trop élevés, Verlac les Mazes, Piscine Le Camarat à Nant et Les Vignes, les indications du document coté 3290 sont exactes, puisqu'effectivement :

- Guirande est arrivée 1ère pour Verlac les Mazes. Les entreprises qui se sont portées candidates sont Guirande, Cegelec Sud-Ouest, Boubal et Raynal avec des offres entre le 8 et le 9 septembre 2005. Les entreprises n'ayant pas répondu ou excusées sont : ETPR, Chavinier et SDEL Massif Central ;

- SDEL est arrivée 1ère pour La piscine Le Camarat à Nant, candidature unique du 8 septembre 2005. Les entreprises n'ayant pas répondu ou excusées sont : ETPR, Cegelec Sud-Ouest, Chavinier, Larren, Guirande et SLA ;

- Ineo est arrivée 1ère pour Les Vignes. Les entreprises qui se sont portées candidates sont ETPR, Ineo, SLA et Raynal avec des offres déposées après le 30 août 2005. Les entreprises n'ayant pas répondu ou excusées sont : Chavinier et Guirande.

173. Il ressort de la note manuscrite qu'ETPR connaissait les candidates aux différents marchés et dès le 30 août 2005, soit à une date précédant la remise des plis des soumissionnaires, désignait les attributaires possibles de huit marchés : ETPR elle-même, Boubal, SLA, Cegelec Sud-Ouest, Guirande, SDEL et Ineo Réseaux Sud-Ouest. Elle faisait également état d'une offre de "couverture" pour le marché de Saint Saturnin n°1 émanant d'elle-même ainsi que d'Ineo Réseaux Sud-Ouest, de SLA et de Reynal.

c) Le grief notifié

174. Grief n° 3 : "Il est fait grief aux sociétés Bouygues Construction, ETDE, Aygobère, Forclum, Forclum Aveyron, SDEL Massif central, Vinci Énergies Sud-Ouest, Cegelec Sud-Ouest, Cegelec SAS, Cegelec Holding SAS, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Ineo SA, Angel Larren, Larren Réseaux, ETPR, SLA, Chavinier, Mulero, Mini, Raynals, venant éventuellement aux droits d'autres sociétés, s'agissant des marchés passés par EDF en Aveyron et Lozère, de s'être concertées afin de se répartir les marchés et, de fixer un niveau artificiellement élevé des prix, cette concertation ayant eu pour objet et pour effet de limiter l'intensité de la concurrence entre les entreprises, de faire obstacle à la libre fixation des prix et, de tromper EDF quant à la réalité et à l'étendue de la concurrence s'exerçant entre les entreprises soumissionnaires. Faits prohibés et réprimés par les articles L. 420-1 et L. 464-2 du Code de commerce".

4. Les marchés de travaux d'électricité passés entre 2004 et 2006 par divers donneurs d'ordre en Aveyron

175. Des collectivités et divers donneurs d'ordre en Aveyron ont organisé des appels d'offres entre 2004 et 2006 pour attribuer des marchés de travaux d'électricité dans le bâtiment.

a) Description des marchés

176. Douze marchés ont fait l'objet d'appels d'offres de travaux d'électricité dans le bâtiment qui ont été classés par attributaire(s), à savoir Elit (Angel Larren), Sega, Sega/Marti/Cegelec Sud-Ouest, Cegelec Sud-Ouest, Cegelec Sud-Ouest/Guirande et Guirande/Amec Spie Sud-Ouest : le marché d'aménagement d'un espace économique Le Laminoir à Decazeville (1) ; la construction d'un cinéma à Decazeville (2) ; le marché d'aménagement des locaux de la DDPJJ et CAE de Rodez (3 et 3 bis) ; l'extension de l'établissement d'hébergement Les Clarines à Rodez (4) ; la construction d'une maison de retraite à Ceignac (5 et 5 bis) ; des travaux pour le centre hospitalier Ste Marie à Olemps (6, 6 bis, 6 ter) ; la construction d'un foyer de vie Adapeai à Pont-de-Salars (7 et 7 bis) ; la construction du centre nautique du Grand Rodez (8) ; l'extension du foyer des jeunes travailleurs à Onet-le-Château (9) ; la réorganisation des locaux de la trésorerie générale à Rodez (10) ; le marché de travaux du bâtiment Rz 117A de l'usine Bosch (11) ; le marché d'aménagement de bureaux du bâtiment de l'Europe Grand District (12 et 12 bis).

177. Le détail de la procédure d'attribution des marchés relatifs à ces appels d'offres se présente comme suit :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

178. Le tableau ci-dessus montre que, en ce qui concerne ces appels d'offres pour les 12 marchés en cause, les soumissionnaires sont à chaque fois peu nombreux : entre 1 (deux marchés n° 2 bis, n° 11) et au maximum 4 (le marché n° 4 bis). Sur huit marchés, les appels d'offres ont mis en concurrence les sept sociétés mises en cause [marchés n° 4 Sega et Marti, n° 6 ter Cegelec Sud-Ouest et Amec Spie Sud-Ouest, n° 7 et 7 bis Guirande et Amec Spie Sud-Ouest, n° 8 Gpt Guirande/Cegelec Sud-Ouest et Amec Spie Sud-Ouest et Ineo Réseaux Sud-Ouest, n° 10 Amec Spie Sud-Ouest et Elit (Angel Larren), n° 12 Amec Spie Sud-Ouest et Cegelec, Sud-Ouest, n° 12 bis Amec Spie Sud-Ouest, Cegelec Sud-Ouest et Fauché (Flottes)]. Il s'agit d'Elit (Angel Larren), Sega, Marti, Cegelec Sud-Ouest, Guirande, Amec Spie Sud-Ouest et Fauché (Flottes).

179. Les autres soumissionnaires, concurrents des sept mises en cause, étaient : Algans, HTI, Ate, Syres, CMS, Atdi et Adi. Ils ont répondu aux appels d'offres sur les marchés n° 1, 2, 3 et 3 bis, 5 bis, 6 et 6 bis, 7 bis et 9.

180. Par courrier du 26 avril 2011, Elit (Angel Larren), à l'origine des notes saisies, a précisé avoir évoqué avec ses concurrentes des chantiers non seulement déjà "sortis" mais également "à venir", citant le cas ultérieur du cinéma de Decazeville (n° 2), dont elle n'a eu connaissance que le 2 novembre 2004 dans l'avis d'appel public à la concurrence, soit près de deux mois après la réunion du 15 septembre 2004 :

"Au cours de cette réunion qui s'est bien tenue le 15 septembre 2004, il a été effectivement évoqué des chantiers déjà sortis ou à venir.

[...] concernant le "cinéma de Decazeville", l'avis d'appel public à la concurrence a été réalisé le 2 novembre 2004." (cotes 15069 et 15070)

b) Les indices relevés

181. Les indices relevés ont été saisis au siège du groupe Angel Larren. Il s'agit principalement de trois documents cotés 594, 582 et 600, datés chacun du 15 septembre 2004. Ces documents attestent de l'existence d'une réunion qui s'est tenue le mercredi 15 septembre 2004 entre les 7 entreprises suivantes : Elit, filiale d'Angel Larren, Sega, Marti, Cegelec Sud-Ouest,

Guirande (GEI), Amec Spie Sud-Ouest et Fauché (Flottes).

182. Cette dernière société semble toutefois être indiquée comme absente ("Abs Flotte") sur le seul document coté 600, mais un montant lui est attribué : 127 000 euro.

183. Lesdits documents font apparaître une liste de 15 marchés à venir en Aveyron, dont 10 ont été reconnus. En face de chaque marché figurent les noms d'une, de deux ou de trois entreprises ainsi que des volumes d'affaires restés inexpliqués. Sur les trois documents se trouve un récapitulatif de chiffre d'affaires pour chaque entreprise également resté inexpliqué. Rien n'indique qu'il pourrait s'agir des montants prévisionnels des dix marchés en cause.

184. Les dix marchés reconnus sur le document coté 594 se présentent comme suit en référence à l'ordre des numéros de marché indiqués ci-dessus :

- "Maison de retraite Ceignac" n° 5 et 5 bis ;

- "Maison de retraite Les Clarines HLM" n° 4 ;

- "Foyer des jeunes travailleurs HLM" n° 9 ;

- "Salle du laminoir DCZ" n° 1 ;

- "ADAPEI Pont de Salars" n° 7 et 7 bis ;

- "Trésorerie générale" n° 10 ;

- Inconnu ;

- Inconnu ;

- "Salle cinéma DCZ" n° 2 et 2 bis ;

- "Centre natation Piscine Rodez" n° 8 ;

- Inconnu ;

- "Ste Marie sécurité" n° 6, 6 bis, 6 ter ;

- Inconnu ;

- Inconnu ;

- "Maison des jeunes Rodez 2005 ministère de justice" n° 3 et 3 bis.

<EMPLACEMENT GRAPHIQUES>

185. En haut et à droite du document coté 594, le nom de "8 personnes" "présent(es)" à cette réunion est précisé : "Present. Bousquet. Durant. marti. Zaplat. Raymond. Natalie. eric. Larren 8 personnes".

186. Lors de son audition le 8 juin 2006, la pièce cotée 594 a été présentée à M. Czapla, cité dans le tableau sous le nom de "Zaplat", ancien employé d'Amec Spie Sud-Ouest, devenu responsable d'agence de la société Fauché, qui a identifié ces noms comme étant ceux des représentants des sociétés suivantes : Guirande (Bousquet), Cegelec Sud-Ouest (Durant), Marti (Marti Christian), Amec Spie Sud-Ouest (Raymond et Czaplat), Sega (Nathalie Virenque) Fauché/Flottes (Éric Castelnau), Elit/Angel Larren (Larren Julien).

187. L'intéressé a allégué ne pas se souvenir avoir participé à cette réunion et a prétendu ignorer si les personnes qu'il a identifiées y étaient présentes.

188. Il a par ailleurs mentionné l'existence de réunions régulières, "au moins une fois par an pour faire le point sur les affaires en cours", au cours desquelles il s'agissait "d'échanger des informations sur les marchés passés ou en cours" entre les entreprises précédemment citées :

"Vous me présentez un tableau daté du mercredi 15 septembre 2004 que vous avez récupéré à l'occasion d'une enquête de concurrence menée en octobre 2005 (Annexe n° 1). A l'époque j'étais responsable d'affaires dans le secteur tertiaire et plus spécialement affecté sur le Grand Rodez au sein de l'entreprise AMEC Spie Sud-Ouest basée à Sebazac (12).

Les autres personnes citées sur ce document sont :

- Bousquet Jean-Marie de Guirande Électricité à Druelle (12)

- Durant Gilles de Cegelec à Le Monastère (12)

- Marti Christian de Sarl Marti à Onet-le-Château

- Raymond Claude de Amec Spie Sud-Ouest à Sebazac (12), responsable d'affaires pour les secteurs tertiaire et industriel sur le Sud Aveyron en particulier

- Nathalie Virenque de la Sarl SEGA à Rodez

- Castelnau Eric de la Sarl Flottes à Oleps

- Larren Julien de la Sarl Larren à Decazeville

Je ne me souviens pas avoir participé à cette réunion d'autant qu'à cette date j'étais sur le point de quitter l'entreprise Amec Spie.

J'ai indiqué les noms des personnes figurant sur le tableau sans savoir si elles aussi ont participé à cette réunion.

Nous avions l'habitude de nous rencontrer au moins une fois par an pour faire le point sur les affaires en cours. Par rapport aux différents marchés de travaux indiqués sur ce tableau, je peux simplement préciser que le marché du foyer des jeunes travailleurs a bien été attribué à l'entreprise Amec Spie Sud-Ouest mais bien avant le 14 septembre 2004, pour un montant proche ou supérieur à 50 000 euro.

Ce tableau ressemble effectivement à une répartition possible des marchés entre les entreprises du secteur. Or, nos réunions tenues habituellement sur Rodez n'avaient pas cet objectif. Il s'agissait avant tout d'échanger des informations sur les marchés passés ou en cours [...]."

189. Met Expansion, société-mère de Sega, a précisé à cet égard :

"La stratégie commerciale (de Sega) a été fixée par (Mme) Virenque jusqu'en février 2007 sans l'intervention d'aucune entité extérieure" (cote 13880)

190. Elit (Angel Larren) a reconnu par procès-verbal du 30 septembre 2008 la tenue d'une réunion le 15 septembre 2004 avec ses concurrentes : "J'avais convié les concurrents dans nos locaux, pour les informer que nous allions ouvrir une agence sur Rodez. Elle a duré une grosse demi-heure. Ils sont tous venus. Il s'agit des chargés d'affaires [...] J'étais à cette réunion. C'est la seule fois que je me suis réuni avec mes concurrents." (cote 7429).

191. Par courriers du 5 novembre 2009 et du 26 avril 2011, Elit (Angel Larren) a ajouté que les documents précités cotés 594 et 600 ont "bien été établi(s) le jour de la réunion à partir des prospectives faites par les uns et les autres [...]

Au cours de cette réunion qui s'est bien tenue le 15 septembre 2004, il a été effectivement évoqué des chantiers déjà sortis ou à venir." (cotes 8997, 8998, 10232, 10233, 15069 et 15070)

192. Par ailleurs, un troisième document coté 596 met en évidence l'existence d'une autre "réunion lundi 6 juin 05 18 h FIE". Sur ce document, figure une liste de quinze marchés ou affaires en Aveyron. En face de certains marchés apparaît le nom d'une entreprise, qui est parfois suivi d'un montant. Les entreprises Guirande, Cegelec Sud-Ouest et "Marty" sont citées sur ce document en face des marchés "Rodez centre nautique" pour les deux premières, "Rodez Bosch" pour la deuxième et "district bureaux sept oct 2005 100 Meuro" pour la troisième.

<EMPLACEMENT GRAPHIQUE>

193. Par courrier du 5 novembre 2009, Elit (Angel Larren) a déclaré que cette réunion était une réunion strictement interne :

"Il s'agit d'une réunion du 6 juin 2005 des chargés d'affaires de l'entreprise Larren (FIE = fiche information entreprise) au cours de laquelle le dirigeant du groupe informe les chargés d'affaires de l'état de la concurrence concernant les marchés en cours. Il s'agit purement et simplement d'une réunion de suivi commercial." (cote 8998)

194. Lors de cette réunion, outre la confirmation de l'attribution précitée du marché n° 8 bis au groupement Cegelec Sud-Ouest/Guirande, a été évoquée la possible attribution de deux appels d'offres supplémentaires :

1) marché n° 8 bis centre nautique du Grand Rodez : date limite de remise des offres le 28 juillet 2005, attributaires Cegelec Sud-Ouest/Guirande ;

2) marché n° 11 bâtiment Rz 117A à l'usine Bosch de Rodez : date limite de remise des offres le 23 juin 2005, attributaire Cegelec Sud-Ouest ;

3) marchés n° 12 et 12 bis bureaux du bâtiment de l'Europe Grand district à Rodez : date limite de remise des offres le 16 juin 2005, attributaire Amec Spie Sud-Ouest et non "Marty". Une SARL Marty Raymond a obtenu le lot n° 2 portant sur des travaux de menuiseries.

195. La comparaison des attributaires prévus au regard des notes du 15 septembre 2004 et du 6 juin 2005 avec les attributaires effectifs des 12 marchés concernés se présente comme suit :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

196. Ainsi, alors même que les deux réunions en cause, celles du 15 septembre 2004 et du 6 juin 2005, s'avèrent antérieures à la date limite de remise des offres, il existe pour 10 des 12 marchés en cause cités une correspondance avérée entre les attributaires présumés et les attributaires effectifs :

- pour la réunion du 15 septembre 2004 :

1) espace économique Le Laminoir à Decazeville : date limite de remise des offres le 20 septembre 2004, attributaire Elit (Angel Larren) comme prévu ;

2) cinéma Decazeville : date limite de remise des offres le 30 novembre 2004, attributaire Elit (Angel Larren) comme prévu ;

3) aménagement DDPJJ et CAE de Rodez : date limite de remise des offres le 24 septembre 2004, attributaire Sega et non Fauché (Flottes) qui n'a pas remis d'offre ;

4) maison de retraite Les Clarines : date limite de remise des offres le 27 septembre 2004, attributaire Sega comme prévu ;

5) maison de retraite de Ceignac : date limite de remise des offres le 25 octobre 2004, attributaire Marti/ Cegelec Sud-Ouest/Sega comme prévu pour le lot courants faibles mais sans Sega pour le lot courants forts alors qu'elle avait soumissionné en groupement avec Marti/Cegelec Sud-Ouest (cote 6620) ;

6) centre hospitalier Ste Marie à Olemps trois marchés : date limite de remise des offres du premier le 17 mars 2005, le deuxième le 1er juillet 2005, le troisième le 24 mars 2006, attributaire Cegelec Sud-Ouest pour les trois marchés comme prévu ;

7) foyer de vie ADAPEAI à Pont-de-Salars : date limite de remise des offres le 8 octobre 2004, attributaire Guirande/ Amec Spie Sud-Ouest comme prévu, mais sans Fauché (Flottes) qui n'a pas remis d'offre ;

8) centre nautique du Grand Rodez : date limite de remise des offres le 28 juillet 2005, attributaires Cegelec Sud-Ouest/Guirande comme prévu ;

9) foyer des jeunes travailleurs à Onet-le-Château, date limite de remise des offres le 27 septembre 2004, attributaire Amec Spie Sud-Ouest comme prévu ;

10) réorganisation de la trésorerie générale à Rodez : date limite de remise des offres le 4 octobre 2004, attributaire Amec Spie Sud-Ouest comme prévu.

- pour la réunion du 6 juin 2005 :

8bis) centre nautique du Grand Rodez : date limite de remise des offres le 28 juillet 2005, attributaires Cegelec Sud-Ouest/Guirande confirmés comme prévu le 15 septembre 2004 ;

11) bâtiment Rz 117A à l'usine Bosch de Rodez : date limite de remise des offres le 23 juin 2005, attributaire Cegelec Sud-Ouest comme prévu ;

12) bureaux du bâtiment de l'Europe Grand district à Rodez : date limite de remise des offres le 16 juin 2005, attributaire Amec Spie Sud-Ouest et non "Marty". Une SARL Marty Raymond a obtenu le lot n° 2 portant sur des travaux de menuiseries.

c) Le grief notifié

197. Grief n° 4 : "Il est fait grief aux sociétés Forclum, Forclum Aveyron, Spie Sud-Ouest, Spie SA, Cegelec Sud-Ouest, Cegelec SAS, Cegelec holding SAS, Angel Larren, Elit, Électricité Industrielle JP Fauché, Met Expansion, Sega, Marti, venant éventuellement aux droits d'autres sociétés, s'agissant des marchés de "divers donneurs d'ordre en Aveyron", de s'être concertées afin de se répartir les marchés et de fixer un niveau artificiellement élevé des prix, cette concertation ayant eu pour objet et pour effet de limiter l'intensité de la concurrence entre les entreprises, de faire obstacle à la libre fixation des prix et, de tromper les acheteurs (parmi lesquels figurent certains acheteurs publics) quant à la réalité et à l'étendue de la concurrence s'exerçant entre les entreprises soumissionnaires. Faits prohibés et réprimés par les articles L. 420-1 et L. 464-2 du Code de commerce."

5. Le marché passé par le Sieda en 2005 pour des travaux d'extension, d'opérations ponctuelles et de dissimulation des réseaux en Aveyron

a) Description du marché

198. Le syndicat intercommunal d'énergies du département de l'Aveyron (Sieda) est un établissement public de coopération intercommunale, autorité organisatrice de la distribution publique d'électricité sur le territoire d'une concession s'étendant sur 299 communes aveyronnaises.

199. Le Sieda a passé en janvier 2005 un marché à bons de commande sous la forme d'un appel d'offres ouvert pour un programme triennal de travaux d'électrification rurale 2005-2007 d'extension, d'opérations ponctuelles et de dissimulation des réseaux, alloti en 9 lots correspondant à neuf zones géographiques (numérotées A à I).

200. Les offres devaient s'exprimer sous la forme d'un rabais ou d'une majoration par rapport à une série de prix établie par le maître d'ouvrage. La date limite de réception des offres était fixée au 6 janvier 2005.

201. Le même marché, comprenant 9 lots identiques, avait été passé pour la période allant de 2002 à 2004 (cote 47). Le résultat comparé des appels d'offres 2005-2007 et 2002-2004 se présente comme suit :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

202. Le directeur des services techniques du Sieda a procédé à l'actualisation du bordereau de prix de 2002 en le majorant de + 10 %, à l'exception de quelques articles (cote 183). Il s'attendait à recevoir des offres proches de celles qui avaient été proposées en 2002 lors du marché précédent, soit : + 6,76 % en moyenne pour les propositions moins-disantes, sans qu'elles dépassent + 9 %.

203. Il ressort du procès-verbal de la commission d'appels d'offres que le directeur des services techniques avait précisé que "des prix objectifs devraient s'échelonner, selon la difficulté des zones entre environ +6 % et +11 %" (cote 304).

204. Après examen et acceptation de tous les candidats, le résultat de l'ouverture des plis par la commission d'appels d'offres, le 12 janvier 2005, a fait ressortir un taux moyen des propositions moins-disantes de + 13,3 %, compris entre 11,5 % et 16,5 %. Les premières propositions de prix s'avèrent supérieures de +5,3 (zone G) à +7,5 points (zones A, C) par rapport à celles de 2002.

205. Les résultats de cet appel d'offres n'étant pas jugés satisfaisants, le Sieda a déclaré la consultation infructueuse. Il a souhaité négocier avec les mêmes candidats dans un délai le plus court possible. Les entreprises ont été consultées deux fois les 20 et 27 janvier 2005, pour arriver aux résultats visés ci-dessus. Les rabais accordés lors des négociations par les entreprises compris entre 0,8 (lot G) et 3,5 points (lot A) n'ont pas entrainé de changements de titulaires sur les lots du marché.

206. Toutes les entreprises titulaires des lots du marché précédent (2002-2004) se sont ainsi vues reconduites en 2005 après négociation.

b) Les indices relevés

207. Plusieurs éléments ont permis de suspecter qu'un échange d'informations entre les soumissionnaires avait eu lieu en vue de se répartir les différents lots du marché organisé par le Sieda pour son programme 2005-2007.

208. En premier lieu, les réponses des candidats ont conduit au maintien des attributaires pour les mêmes lots lors du renouvellement du marché.

209. En deuxième lieu, les candidats ont proposé des niveaux de prix élevés qui ont conduit le syndicat à déclarer l'appel d'offres infructueux.

210. En troisième lieu, les entreprises ont pu faire des propositions un peu plus compétitives sur les lots qu'elles n'obtenaient pas. Ainsi, Guirande a pu proposer +14 % sur les lots B et I et une offre à +15 % sur les lots C, E, et F, alors que, sur le lot A qu'elle a obtenu et dont elle était déjà attributaire, son offre s'avère moins compétitive à +16,5 %. De même, le groupement Cegelec Sud-Ouest/Boubal est plus compétitif sur le lot I, avec une offre à +12,5 %, que sur les lots B (+13 %) et C (+14 %) qu'il connaissait pourtant déjà, ce qui aurait pu lui permettre de proposer une offre plus compétitive.

211. En quatrième lieu, les résultats des négociations conduites par le Sieda à la suite de l'abandon de la consultation révèlent qu'aucun des rabais accordés n'a amené de changement de titulaires sur les lots.

212. Par ailleurs, des notes manuscrites non datées saisies chez la candidate Larren Réseaux SLR indiquent, en face de chaque zone, les noms des attributaires (cotes 598, 602 et 603).

c) Le grief notifié

213. Grief n° 5 : "Il est fait grief aux sociétés Forclum, Forclum Aveyron, SDEL massif central, Vinci Énergies Sud-Ouest, Spie Sud-Ouest, Spie SA, Cegelec Sud-Ouest, Cegelec SAS, Cegelec holding SAS, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Ineo SA, Angel Larren, Larren Réseaux, SLA, Citel, venant éventuellement aux droits d'autres sociétés, s'agissant du marché pertinent que détermine l'appel d'offres du Sieda, de s'être concertées afin de se répartir les marchés et de fixer un niveau artificiellement élevé des prix, cette concertation ayant eu pour objet et pour effet de limiter l'intensité de la concurrence entre les entreprises, de faire obstacle à la libre fixation des prix et, de tromper le Sieda, acheteur public, quant à la réalité et à l'étendue de la concurrence s'exerçant entre les entreprises soumissionnaires. Faits prohibés et réprimés par les articles L. 420-1 et L. 464-2 du Code de commerce".

6. Les marchés passés en 2003 par le SDEE 48 en Lozère

a) Description des marchés

214. Le syndicat départemental d'électrification et d'équipement de la Lozère (SDEE 48) organise des appels d'offres relatifs aux travaux d'électrification rurale en Lozère : renforcement, extension et aménagement des réseaux électriques existants.

215. En 2003, le SDEE 48 a passé un marché à bons de commande sous la forme d'un appel d'offres ouvert pour une durée d'un an à compter du 1er janvier 2004, avec possibilité de renouvellement par tacite reconduction pour 2 ans de plus, soit 2005 et 2006.

216. Ce marché était alloti, le département étant découpé en sept zones géographiques (lots 1 à 7). Les zones sont restées identiques à celles qui avaient définies lors du marché précédent de 2001 reconduit jusqu'au 31 décembre 2003 (2001-2003).

217. Les offres devaient s'exprimer sous la forme d'une minoration ou d'une majoration applicable à l'ensemble du BPU préétabli.

218. Les plis des différentes entreprises ayant présenté une offre ont été enregistrés entre le 5 et 8 décembre 2003 pour une date limite de réception des offres le 8 décembre 2003 à 16 heures.

219. Le montant total des travaux engagés pour le programme 2004-2006 s'est élevé à 8 856 358 euro, répartis entre les cinq mêmes entreprises que celles qui avaient été attributaires en 2001, étant précisé que Lozère Aveyron Réseaux (LAR) avait été rachetée en 2002 par SDEL Massif central appartenant au même groupe (Vinci) que L'Entreprise Électrique (EE).

220. L'analyse des offres des entreprises soumissionnaires pour les marchés 2001-2003 et 2004-2006 se présente comme suit, les meilleures offres étant en gras (cotes 4663 et 4783) :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

b) Les indices relevés

221. Les réponses des candidats ont conduit au maintien des attributaires pour les mêmes lots lors du renouvellement du marché.

222. Parmi les éléments saisis chez ETPR figure un document intitulé "Synopsis", daté du 3 novembre 2003, portant sur les "Travaux d'électrification rurale Lozère" (cote 3107). On y trouve les numéros de téléphone d'un certain Fabre et celui de Forclum Rodez ainsi que, pour chacun des 7 lots, le nom d'une entreprise accompagné d'un ou de deux coefficients de hausse. Pour chaque lot, il est attribué un coefficient d'augmentation :

<EMPLACEMENT GRAPHIQUES>

223. Il a également été saisi chez ETPR une note manuscrite non datée (cote 3238) sur laquelle apparaît la même énumération, correspondant au résultat de l'appel d'offres : "1. EE, 2. SLA, 3. ETPR, 4. Spie, 5. EI, 6. Spie, 7. EE".

224. En outre, l'agenda du dirigeant d'ETPR contient d'autres annotations pouvant être en relation avec le marché du SDEE 48 :

- le 10 novembre 2003 : "SLA -10%, Gref -16%, Engelvin/Germ -10%" (cote 3542) ;

- le 18 novembre 2003 : "Guirande 05.65.77.13.00" (cote 3544) ;

- le 28 novembre 2003 : "Guirande Bousquet 06.75.38.04.61" (cote 3547) ;

- le 1er décembre 2003 : "Aygobère 06.07.23.91.37, 18h, RV Guirande aire de Séverac" (cote 3548).

c) Le grief notifié

225. Grief n° 6 : "Il est fait grief aux sociétés l'Entreprise Électrique, Spie Sud-Ouest, Spie SA, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Ineo SA, ETPR, SLA, venant éventuellement aux droits d'autres sociétés, s'agissant du marché pertinent que détermine l'appel d'offres du SDEE, de s'être concertées afin de se répartir les marchés et, de fixer un niveau artificiellement élevé des prix, cette concertation ayant eu pour objet et pour effet de limiter l'intensité de la concurrence entre les entreprises, de faire obstacle à la libre fixation des prix et, de tromper le SDEE, acheteur public, quant à la réalité et à l'étendue de la concurrence s'exerçant entre les entreprises soumissionnaires. Faits prohibés et réprimés par les articles L. 420-1 et L. 464-2 du Code de commerce".

7. Conclusions sur les griefs notifiés

226. Le rapporteur nouvellement désigné pour instruire l'affaire a reçu les observations des parties sur les questions de fond et a renoncé dans son rapport à soutenir les griefs n° 2, n° 5 et n° 6 précédemment notifiés en proposant de ne pas poursuivre la procédure à l'égard des sociétés incriminées.

227. En revanche, il a maintenu les griefs n° 1, n° 3 et n° 4 en les recentrant de la manière suivante :

Grief n° 1

- aux cinq sociétés ETPR, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Allez et Cie, Spie Sud-Ouest et ETDE pour le marché de travaux groupés aéro-souterrains du 7 novembre 2003 ;

- aux deux sociétés ETPR et ERCTP pour le marché de travaux groupés souterrains mixtes du 7 novembre 2003.

Grief n° 3

- aux trois sociétés ETPR, Cegelec Sud-Ouest et SLA pour le marché de renforcement HTAS Saint Saturnin tronçon 1 du 1er septembre 2005 ;

- aux quatre sociétés ETPR, SLA, Cegelec Sud-Ouest et Ineo Réseaux Sud-Ouest pour le marché d'enfouissement HTAS Saint Saturnin tronçon 2 du 19 septembre 2005 ;

- aux cinq sociétés ETPR, Cegelec Sud-Ouest, Guirande devenue Forclum QRG, Forclum et SDEL Massif central pour le marché de renouvellement HTAS du monastère Cabrespine du 12 septembre 2005 ;

- à la société ETPR pour le marché de renouvellement HTAS Layolle St Sulpice/Trèves Nant du 12 septembre 2005 ;

- aux quatre sociétés ETPR, Guirande devenue Forclum QRG, Forclum et Cegelec Sud-Ouest pour le marché de Verlac les Mazes avec des offres entre le 8 et le 9 septembre 2005 ;

- aux deux sociétés ETPR et SDEL Massif central pour le marché de La Piscine Camarat à Nant avec l'offre unique du 9 septembre 2005 ;

- aux trois sociétés ETPR, Ineo Réseaux Sud-Ouest et SLA pour le marché Les Vignes avec des offres déposées entre le 8 et le 9 septembre 2005.

Grief n° 4

Aux huit sociétés Marti, Sega, Elit, Spie Sud-Ouest, Guirande devenue Forclum QRG, Forclum SAS, Cegelec Sud-Ouest et Électricité Industrielle JP Fauché pour les 12 marchés suivants :

1) maison de retraite de Ceignac ;

2) maison de retraite Les Clarines à Rodez ;

3) foyer des jeunes travailleurs à Onet le Château ;

4) espace économique Le Laminoir à Decazeville ;

5) foyer de vie ADAPEAI à Pont-de-Salars ;

6) réorganisation de la trésorerie générale ;

7) cinéma Decazeville ;

8) centre hospitalier Ste Marie à Olemps trois lots ;

9) aménagement DDPJJ et CAE de Rodez ;

10) centre nautique du Grand Rodez ;

11) bureaux du bâtiment de l'Europe Grand district à Rodez ;

12) bâtiment Rz 117A à l'usine Bosch de Rodez.

228. Lors de la séance qui s'est tenue le 21 juin 2011, le rapporteur a proposé l'abandon du grief n° 1 à l'endroit d'ETDE, du grief n° 3 à l'endroit de toutes les sociétés concernées ainsi que du grief n° 4 à l'égard d'Électricité Industrielle JP Fauché.

229. Il a également proposé l'abandon au titre du grief n° 4 des deux derniers lots du marché "centre hospitalier Ste Marie à Olemps" composé de trois lots ainsi que des deux marchés "bâtiment Rz 117A à l'usine Bosch de Rodez" et "bureaux du bâtiment de l'Europe Grand district à Rodez".

D. La mise en œuvre du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce

230. ERCTP a décidé de ne pas contester le grief qui lui avait été notifié, aux termes duquel il lui était reproché de s'être concertée, notamment avec ETPR, afin de se répartir le marché et de fixer un niveau artificiellement élevé des prix lors de l'appel d'offres EDF-GDF pour des travaux groupés souterrains mixtes dont la date limite de remise des offres avait été fixée au 7 novembre 2003. Cette entreprise a donc sollicité le bénéfice des dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce (4) qui prévoient que "lorsqu'un organisme ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés, le rapporteur général peut proposer à l'Autorité de la concurrence, qui entend les parties et le commissaire du Gouvernement sans établissement préalable d'un rapport, de prononcer la sanction pécuniaire prévue au I en tenant compte de l'absence de contestation. Dans ce cas, le montant maximum de la sanction encourue est réduit de moitié".

231. La mise en œuvre de ces dispositions a donné lieu à l'établissement d'un procès-verbal signé le 15 octobre 2009.

232. Pour tenir compte de la non-contestation des griefs, le rapporteur général adjoint a proposé que la sanction éventuellement encourue soit réduite de 10 % du montant qui aurait été normalement infligé.

II. DISCUSSION

233. Seront successivement abordés :

- la procédure ;

- le bien-fondé des griefs ;

- l'imputabilité des pratiques ;

- les sanctions.

A. Sur la procédure

1. Sur le champ de la saisine

234. Les parties font valoir que la saisine du ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie du 15 décembre 2006 portait uniquement sur le secteur des travaux d'électrification. Elles soulignent que l'instruction s'est cependant étendue à un secteur très différent, celui des travaux d'électricité.

235. Il convient tout d'abord de rappeler qu'il est de jurisprudence constante que l'Autorité de la concurrence est saisie in rem de l'ensemble des faits et pratiques affectant le fonctionnement d'un marché ou d'un secteur et qu'elle n'est pas liée par les demandes et qualifications de la partie saisissante (arrêt de la Cour d'appel de Paris du 30 janvier 2007, Le Foll).

236. Contrairement à ce que prétendent les parties, l'instruction de la présente affaire a été circonscrite aux faits visés par la saisine du ministre de l'Economie du 13 décembre 2006, laquelle portait sur des pratiques observées dans le "secteur des travaux d'électrification dans les régions Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon, Auvergne et limitrophes". Les services d'instruction se sont en effet appuyés sur les pièces figurant dans le rapport administratif d'enquête transmis par la DGCCRF pour fonder les six griefs qui ont été notifiés aux mises en cause. Etaient ainsi concernés les faits se rapportant à des travaux de construction ou de maintenance de réseaux électriques pour des zones rurales, à des travaux groupés de réseaux publics aéro-souterrains et souterrains mixtes ainsi qu'à des travaux ponctuels d'enfouissement des lignes à haute tension que les services locaux d'EDF-GDF Distribution engageaient notamment pour des collectivités plus importantes que celles situées en zone rurale. Il en est de même s'agissant des faits se rapportant aux travaux d'installation électrique à l'intérieur de bâtiments.

237. En toute hypothèse, l'Autorité, saisie de pratiques affectant le fonctionnement d'un marché ou d'un secteur, peut retenir dans le cadre de sa saisine les pratiques révélées par les investigations auxquelles il a été procédé à la suite de sa saisine qui présentent le même objet ou le même effet (voir les arrêts de la Cour d'appel de Paris du 22 février 2005, Decaux, et du 30 janvier 2007, Le Foll). En l'espèce, l'ensemble des pratiques examinées ont bien le même objet.

238. Il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce qui est soutenu, l'Autorité pouvait examiner les pratiques mises en œuvre dans le secteur des travaux d'électrification et des travaux d'électricité sans outrepasser le champ de sa saisine.

2. Sur l'utilisation prétendument irrégulière de certaines pièces saisies

239. Les parties considèrent que l'ordonnance d'autorisation des opérations de visite et saisie rendue le 7 octobre 2005 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Rodez (ci-après l'"ordonnance d'autorisation de 2005") ainsi que les opérations de saisie et de visite effectuées en exécution de cette ordonnance doivent être "annulées".

240. Elles estiment en effet que la voie de recours ouverte contre l'ordonnance d'autorisation de 2005 et le déroulement des opérations de visite et saisie prévue à l'article L. 450-4 du Code de commerce dans sa version applicable au moment des faits n'était pas conforme aux exigences de l'article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (ci-après la "CEDH"), puisqu'elle ne garantissait pas le droit à un recours effectif. Elles font également valoir que le recours en contestation ouvert dans le cadre du régime transitoire prévu par l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008 portant modernisation de la régulation de la concurrence ne garantit pas davantage un recours effectif conforme à l'article 6, paragraphe 1, de la CEDH.

241. Les entreprises mises en cause demandent à l'Autorité de la concurrence d'écarter certaines pièces saisies le 20 octobre 2005 au siège d'ETPR et du groupe Angel Larren en exécution de l'ordonnance d'autorisation de 2005. Elles estiment en effet que ces documents ont été utilisés de manière irrégulière pour fonder les griefs n° 1, 2, 3 et 4, puisqu'ils ont été saisis hors du champ de ladite ordonnance. Le champ de l'ordonnance d'autorisation de 2005 serait limité au secteur de l'électrification rurale dans un secteur géographique incluant les seules régions Midi-Pyrénées, Auvergne et Languedoc-Roussillon, soit en l'occurrence les seuls marchés du Sieda en Aveyron et du SDEE en Lozère visés respectivement au titre des griefs n° 5 et 6.

242. Les parties s'appuient, pour formuler une telle demande, sur la décision n° 05-D-38 du 5 juillet 2005 relative à des pratiques mises en œuvre sur le marché du transport public urbain de voyageurs dans laquelle le Conseil de la concurrence a effectué un contrôle de l'utilisation de pièces saisies en dehors du champ de l'autorisation judiciaire d'opérations de visite et saisie.

243. Il convient tout d'abord de rappeler que, aux termes de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (ci-après la "loi NRE") en vigueur au moment des opérations de visite et saisie en cause, "[l]e déroulement des opérations de visite ou saisie peut faire l'objet d'un recours auprès du juge les ayant autorisées dans un délai de deux mois qui court, pour les personnes occupant les lieux où ces opérations se sont déroulées, à compter de la notification de l'ordonnance les ayant autorisées et, pour les autres personnes mises en cause ultérieurement au moyen de pièces saisies au cours de ces opérations, à compter de la date à laquelle elles ont eu connaissance de l'existence de ces opérations et au plus tard à compter de la notification de griefs prévue à l'article L. 463-2. Le juge se prononce sur ce recours par voie d'une ordonnance, qui n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation selon les règles prévues au Code de procédure pénale. Ce pourvoi n'est pas suspensif".

244. Ainsi, les entreprises mises en cause dans la présente affaire étaient en mesure d'introduire un recours contre le déroulement des opérations de visite et saisie effectuées le 20 octobre 2005 devant le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Rodez, et ce dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'ordonnance d'autorisation de 2005 pour celles ayant fait l'objet d'une visite, ou à compter de la date à laquelle elles ont eu connaissance de l'existence de ces opérations et au plus tard de la notification des griefs pour celles n'ayant pas fait l'objet d'une visite mais mises en cause ultérieurement au moyen des pièces saisies.

245. Or, seule la Société Languedocienne d'Aménagements (SLA) a formé un tel recours le 15 décembre 20055. Par ordonnance du 25 avril 2006, le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Rodez a prononcé la nullité des opérations de visite et saisie effectuées dans les locaux de la SLA en raison de la participation d'un enquêteur irrégulièrement désigné et a ordonné la restitution des pièces ainsi saisies.

246. Par ailleurs, en application de l'article L. 450-4, dernier alinéa, du Code de commerce, tel que modifié par l'article 1er, sous j), de l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008 et par l'article 139 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures, les entreprises mises en cause par les pièces saisies, mais n'ayant pas fait l'objet des opérations de visite et saisie le 20 octobre 2005, pouvaient introduire un recours pour contester le déroulement de ces dernières dans un délai de dix jours à compter de la notification des griefs devant le premier président de la cour d'appel dans le ressort du Tribunal de grande instance de Rodez.

247. Or, aucune de ces entreprises n'a formé un tel recours dans le délai imparti.

248. Il résulte de ce qui précède que les entreprises n'ont pas usé de leur faculté d'introduire un recours contre le déroulement des opérations litigieuses devant le juge judiciaire. Elles ne sont donc pas fondées à se prévaloir de la prétendue absence de garantie à un recours effectif.

249. En ce qui concerne l'argumentation tirée de la nullité de l'ordonnance d'autorisation de 2005 et des opérations de visite et saisie effectuées en exécution de cette ordonnance du fait de la non-conformité de l'article L. 450-4 du Code de commerce dans sa version issue de la loi NRE à l'article 6, paragraphe 1, de la CEDH, force est de constater qu'elle est inopérante. Il n'appartient en effet pas à l'Autorité de se prononcer sur la légalité d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant des opérations de visite et saisie, ni sur le déroulement de ces dernières. Seul le juge judiciaire, régulièrement saisi, est compétent pour effectuer un tel contrôle, ainsi que l'a relevé l'Autorité dans sa décision n° 10-D-26 du 28 juillet 2010 relative à des pratiques relevées sur des marchés de travaux groupés de réseaux publics passés par la plate-forme d'achats EDF-GDF Services de Montpellier (point 75) :

"[L]'article L. 450-4, dans sa rédaction postérieure à la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001, ne donne pas compétence au Conseil et désormais à l'Autorité pour apprécier la régularité des opérations effectuées en exécution des ordonnances du juge des libertés et de la détention autorisant les visites et saisies."

250. A cet égard, s'agissant de la décision n° 05-D-38 invoquée par les parties, il convient de souligner qu'elle avait été adoptée par le Conseil de la concurrence à la suite de l'arrêt société Bec Frères rendu par la Cour de cassation le 30 novembre 1999 dans lequel cette dernière avait confié le contrôle du déroulement des opérations de visite et saisie aux autorités appelées à se prononcer sur le fond, c'est-à-dire au Conseil et, en cas de recours, à la Cour d'appel de Paris :

"[la] mission [du juge] prend fin avec les opérations, lors de la remise de la copie du procès-verbal et de l'inventaire à l'occupant des lieux ou à son représentant, et [...] il ne peut être saisi a posteriori d'une éventuelle irrégularité entachant ces opérations, une telle contestation relevant du contentieux dont peuvent être saisies les autorités de décision appelées à statuer sur les poursuites éventuellement engagées sur le fondement des documents ainsi appréhendés." (Cass. com., 30 novembre 1999, pourvoi n° 98-30.005, Bull. IV n°214)

251. Cette solution était motivée par l'absence de disposition législative prévoyant un délai pendant lequel les entreprises pouvaient contester le déroulement des opérations de visite et saisie, de telle sorte qu'il était fréquent que le recours ne soit introduit devant le juge judiciaire qu'après la notification des griefs, le Conseil de la concurrence devant alors attendre la décision du juge avant de se prononcer sur le fond des pratiques.

252. Or, ainsi qu'il a été rappelé au point 243 ci-dessus, la loi NRE a ultérieurement confié le contrôle des opérations de visite et saisie au juge des libertés et de la détention dans le cadre d'un recours pouvant être formé dans un délai deux mois. Partant, la décision n° 05-D-38 ne peut être utilement invoquée en l'espèce.

253. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les différents arguments tirés de l'utilisation prétendument irrégulière des pièces saisies au soutien des griefs n° 1 à 4 ne sauraient être accueillis.

3. Sur les prétendues atteintes portées aux droits de la défense

Sur l'argumentation d'ETPR

254. ETPR estime qu'elle ne dispose pas d'un dossier complet notamment en ce qui concerne le grief n° 1. Selon elle, le CD-Rom mis à sa disposition ne contient pas le règlement de la consultation, le cahier des clauses administratives particulières, les publicités et les actes d'engagement afférents aux marchés précédents de travaux aéro-souterrains ou souterrains mixtes passés par EDF-GDF Distribution.

255. Cependant, les documents cotés 5947 et 5981 communiqués dès le 26 janvier 2006 au service d'enquête de la DGCCRF par EDF-GDF Distribution évoquent les PMP des deux derniers appels d'offres des marchés de travaux groupés aéro-souterrains et souterrains mixtes précédents.

256. De plus, le dossier a été complété par la communication, par les services d'ERDF à Mérignac, des coefficients et des PMP des deux derniers marchés lancés pour les deux périodes précédentes d'une durée d'un an, identique à celle du marché examiné (cotes 15942 à 15973).

257. En outre, l'absence au dossier des pièces énumérées par ETPR portant sur les marchés précédents ne fait pas grief, celles-ci ne présentant pas d'importance pour sa défense, puisque le grief n° 1 repose sur les éléments de prix résultant d'un PMP concernant les deux appels d'offres du 7 novembre 2003 qui sont versés au dossier.

258. ETPR se plaint également de la durée excessive de la procédure, puisque six années se seraient écoulées entre les faits reprochés, qui remontent à l'année 2003, et la date de notification des griefs, le 5 août 2009, auxquelles s'ajoute la phase d'instruction ayant conduit à la notification du rapport le 25 février 2011, soit une année et sept mois supplémentaires.

259. A cet égard, il convient tout d'abord de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le délai raisonnable prescrit par l'article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (ci-après la "CEDH") doit s'apprécier au regard de l'ampleur et de la complexité de la procédure, cette circonstance devant être appréciée concrètement (voir, par exemple, les arrêts de la Cour d'appel de Paris du 29 janvier 2008, Le Goff Confort SAS, et du 24 juin 2008, France Travaux).

260. Par ailleurs, la sanction qui s'attache à la violation par les autorités de concurrence de leur obligation de se prononcer dans un délai raisonnable n'est pas l'annulation de la procédure ou sa réformation, mais la réparation du préjudice résultant éventuellement du délai subi (voir les arrêts de la Cour de cassation du 28 janvier 2003, Domoservices, et du 6 mars 2007, Demathieu et Bard), sous réserve toutefois que la conduite de la procédure n'ait pas causé une atteinte personnelle, effective et irrémédiable aux droits de la défense des entreprises (voir l'arrêt de la Cour de cassation du 23 novembre 2010, ministre de l'Économie, de l'Industrie et de l'Emploi, rendu dans le secteur de la parfumerie de luxe).

261. En l'espèce, il y a tout d'abord lieu de relever que, à partir d'octobre 2005, les services de la DGCCRF ont mené de nombreuses investigations, ainsi qu'il a été rappelé aux points 6 et 7 ci-dessus, investigations qui ont conduit à la saisine du Conseil de la concurrence par le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie le 15 décembre 2006. En outre, il convient de préciser que, à la suite notamment des auditions menées par les services d'instruction auprès d'un grand nombre d'entreprises, six griefs d'entente portant sur 26 marchés d'appels d'offres ont été notifiés à 36 d'entre elles. Le dossier comporte ainsi plus de 16 000 cotes. L'appréciation des pratiques imposait par conséquent de mener des analyses factuelles et juridiques complexes. Par ailleurs, ETPR a disposé, à chaque étape de la procédure, des délais prévus par l'article L. 463-2 du Code de commerce pour faire valoir ses observations en réponse à la notification des griefs et au rapport. Compte tenu de ces différents éléments, la durée de la présente procédure, enquête comprise, n'apparaît pas déraisonnable.

262. En tout état de cause, ETPR n'apporte pas d'éléments précis, individualisés et convaincants permettant de montrer concrètement que les délais de procédure auraient, par leur longueur prétendument excessive, porté une atteinte irrémédiable aux droits de la défense.

Sur l'argumentation de Sade

263. Sade invoque une "violation manifeste des droits de la défense" du fait de la possession, par les services d'instruction de l'Autorité de la concurrence, de l'ensemble de la correspondance échangée avec son avocat concernant la présente affaire, correspondance saisie lors d'une opération menée dans le cadre d'une autre affaire (affaire 07-0067 F) et ayant été autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris du 7 décembre 2009.

264. Sade estime que la restitution, à terme, des documents ainsi couverts par le secret de la correspondance entre l'avocat et son client ne saurait constituer une réparation appropriée de cette violation des droits de la défense et demande, par conséquent, à l'Autorité de prononcer la nullité de la procédure.

265. L'Autorité constate, tout d'abord, que l'opération de visite et saisie dans les locaux de Sade s'est déroulée le 15 décembre 2009, soit postérieurement à la notification des griefs dans la présente affaire. Le déroulement de cette opération a fait l'objet d'un recours devant le Premier Président de la Cour d'appel de Paris visant à obtenir la restitution des pièces. L'Autorité relève ensuite que, bien que ce contentieux soit toujours pendant à ce jour, le délégué du Premier Président de la Cour d'appel de Paris ayant ordonné une expertise avant dire droit, la rapporteure générale de l'Autorité, interrogée à cet égard par la présidente de la formation, a expliqué que, sans en attendre l'issue, elle avait informé Sade à trois reprises, les 3 septembre, 12 octobre 2010 et 17 juin 2011 (6), qu'elle était prête à restituer à l'entreprise les documents dont il serait démontré qu'ils bénéficient effectivement de la protection légale des correspondances avocats/clients, et ce sur la base d'une liste exhaustive établie par Sade. Celle-ci n'a toutefois pas fourni à la rapporteure générale les éléments lui permettant d'examiner, et à plus forte raison de caractériser, une éventuelle méconnaissance de la protection légale accordée, sous certaines conditions, à la correspondance entre l'avocat et son client.

266. Il convient en toute hypothèse de souligner que la correspondance litigieuse n'a pas été versée au dossier de la procédure relative à la présente affaire. Ainsi, ni le rapporteur chargé du dossier, qui n'aurait pas été en droit d'utiliser les pièces effectivement protégées, ni surtout la formation de l'Autorité appelée à statuer sur ce dernier n'en ont eu connaissance, compte tenu de la séparation assurée au sein de l'Autorité entre les fonctions d'instruction et de décision, dans le cadre des procédures pouvant déboucher sur un constat d'infraction aux règles de concurrence. Dans ces conditions, aucune violation des droits de la défense ne peut être constatée.

267. En conséquence, il y a lieu d'écarter les arguments tirés de l'atteinte aux droits de la défense.

B. Sur les pratiques

1. Sur la définition des marchés pertinents

268. Chaque marché passé sur appel d'offres, qu'il s'agisse de marchés publics ou privés, constitue un marché pertinent, résultant de la confrontation concrète d'une demande du donneur d'ordres et des propositions faites par les candidats qui soumissionnent à l'appel d'offres (voir notamment l'arrêt de la Cour de cassation du 13 juillet 2004, DTP Terrassement "Pont de Normandie" ; voir également la décision du Conseil de la concurrence n° 08-D-05 du 27 mars 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des commerces sous douane des aéroports parisiens, point 76, confirmée par l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 2 juillet 2008).

269. En l'espèce, les marchés locaux passés sur appels d'offres tels qu'identifiés au titre des griefs n° 1 à 6 constituent les marchés pertinents.

2. Sur le bien-fondé des griefs

270. Aux termes de l'article L. 420-1 du Code de commerce :

"Sont prohibées, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, notamment lorsqu'elles tendent à :

1° - Limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises ;

2° - Faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ;

3° - Limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès technique ;

4° - Répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement".

271. À de nombreuses reprises, le Conseil de la concurrence, puis l'Autorité de la concurrence ont rappelé que, en matière de marchés publics ou privés sur appels d'offres, il est établi que des entreprises ont conclu une entente anticoncurrentielle dès lors que la preuve est rapportée soit qu'elles sont convenues de coordonner leurs offres, soit qu'elles ont échangé des informations antérieurement à la date où le résultat de l'appel d'offres est connu ou peut l'être (voir, notamment, la décision de l'Autorité de la concurrence n° 09-D-34 du 18 novembre 2009 relative à des marchés de travaux publics d'électricité et d'éclairage public en Corse, point 80, confirmée par l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 16 septembre 2010, Raffalli & Cie). Ces pratiques peuvent avoir pour objet de fixer les niveaux de prix auxquels seront faites les soumissions, voire de désigner à l'avance le futur titulaire du marché, en le faisant apparaître comme le moins disant. Mais de simples échanges d'informations portant sur l'existence de compétiteurs, leur nom, leur importance, leur disponibilité en personnel ou en matériel, leur intérêt ou leur absence d'intérêt pour le marché considéré, ou encore les prix qu'ils envisagent de proposer, altèrent également le libre jeu de la concurrence en limitant l'indépendance des offres, condition normale du jeu de la concurrence.

272. Selon une pratique décisionnelle et une jurisprudence constantes, la preuve de l'existence de telles pratiques peut résulter soit de preuves matérielles se suffisant à elles-mêmes, soit d'un faisceau d'indices graves, précis et concordants, constitué par le rapprochement de diverses pièces recueillies au cours de l'instruction, même si chacune des pièces prise isolément n'a pas un caractère suffisamment probant (voir, notamment, la décision de l'Autorité de la concurrence n° 10-D-03 du 20 janvier 2010 relative à des pratiques relevées dans le secteur des marchés publics de profilage des fossés passés par la Communauté Urbaine de Lille, point 160, et l'arrêt Raffalli & Cie, précité), ou par le rapprochement de pièces avec d'autres éléments de preuve tels que des déclarations.

273. Il convient également de rappeler que la participation d'une entreprise à une seule réunion à objet anticoncurrentiel (hors cadre statutaire d'une organisation professionnelle) suffit à démontrer son adhésion à une entente (arrêt de la Cour d'appel de Paris du 19 janvier 2010, AMD Sud-Ouest).

274. Enfin, un échange d'informations peut être prouvé à partir de documents internes à une entreprise. Un document régulièrement saisi, quel que soit le lieu où il l'a été, est opposable à l'entreprise qui l'a rédigé, à celle qui l'a reçu et à celles qui y sont mentionnées et peut être utilisé comme preuve d'une concertation ou d'un échange d'informations entre entreprises, le cas échéant par le rapprochement avec d'autres indices concordants (arrêts de la Cour de cassation du 12 janvier 1993, société Sogea, et de la Cour d'appel de Paris du 8 avril 2009, Éla Médical, et du 18 décembre 2001, SA Bajus Transport). La preuve de l'antériorité de la concertation par rapport au dépôt de l'offre peut être déduite, à défaut de date certaine apposée sur un document, de l'analyse de son contenu et du rapprochement de celui-ci avec des éléments extrinsèques, et notamment avec le résultat des appels d'offres (arrêt de la Cour d'appel de Paris du 2 avril 1996, société Pro Gec SA).

a) Sur les pratiques reprochées au titre des griefs n° 2, 3, 5 et 6

275. Les pratiques reprochées au titre des griefs n° 2, 3, 5 et 6 portent sur des concertations et des échanges d'informations en vue d'une répartition des marchés privés et publics d'appels d'offres organisés respectivement par 30 syndicats intercommunaux du département de la Dordogne, par EDF-GDF Distribution en Aveyron et en Lozère, par le Sieda en Aveyron et par le SDEE en Lozère.

276. Cependant, les éléments examinés ci-dessus relatifs à chacun de ces griefs ne permettent pas, en l'espèce, d'établir l'existence des pratiques anticoncurrentielles en cause.

277. Partant, il convient d'écarter les griefs n° 2, 3, 5 et 6.

b) Sur le grief n° 1 : les pratiques concertées lors des deux marchés passés en 2003 par EDF-GDF Services en Dordogne

278. A titre liminaire, il convient de rappeler qu'ERCTP n'a pas contesté le grief qui lui avait été notifié, et n'a ainsi remis en cause ni la matérialité des faits constatés, ni leur qualification juridique au regard de l'article L. 420-1 du Code de commerce, ni leur imputabilité (voir les points 230 et suivants ainsi que les points 401 et suivants de la présente décision). Cette absence de contestation suffit pour permettre à l'Autorité de considérer que l'infraction reprochée dans le cadre du marché de travaux groupés souterrains mixtes est établie, comme cela résulte également de l'examen des faits décrits aux points 111 et suivants et rappelés ci-après. Partant, seule la question de la participation d'ETPR à cette même infraction doit être discutée (voir, en ce sens, l'arrêt de la Cour de cassation du 29 mars 2011, Manpower France).

279. La procédure de passation des marchés à bons de commande d'EDF-GDF Services induit des échanges entre l'acheteur et les soumissionnaires pendant une période qui débute lors de la remise des offres et qui se prolonge par différents tours de négociation, afin de finaliser l'obtention par EDF-GDF d'un prix conforme à ses souhaits.

280. Les mises en cause considèrent à ce titre que le pouvoir discrétionnaire d'EDF-GDF rend improbable toute concertation entre entreprises concurrentes, notamment une répartition des lots entre elles.

281. Cependant, la procédure propre aux consultations d'EDF-GDF, dont les montants sont inférieurs au seuil communautaire pour les marchés de travaux (7), n'a pas empêché l'Autorité de la concurrence de sanctionner des entreprises candidates à ces marchés pour avoir échangé des informations sur leur prix de soumission (voir notamment la décision n° 09-D-34, précitée).

282. Le grief n° 1 recouvre deux appels d'offres de travaux groupés d'une durée de 12 mois pour des travaux débutant au 1er février 2004. Le premier est relatif au marché de travaux aéro-souterrains, divisé en quatre lots avec une date limite de réception des offres fixée au 7 novembre 2003. Le second a trait à un marché de travaux souterrains mixtes, divisé en trois lots avec une date limite de réception des offres également fixée au 7 novembre 2003.

283. Les candidats ont remis leurs offres entre le 5 et le 7 novembre 2003, à la seule exception d'ETDE qui a fait parvenir son offre le 4 novembre 2003.

284. Les documents cotés 3232 et 3235 saisis chez ETPR, analysés aux points 111 et suivants de la présente décision, contiennent les indices essentiels de l'existence d'un échange d'informations concernant les deux marchés de travaux groupés, aéro-souterrains et souterrains mixtes, et des entreprises qui ont participé à cet échange dont ETPR a été le maître d'œuvre.

285. Ces deux documents ont été conçus par ETPR avant la date de remise des offres fixée au 7 novembre 2003. Le document coté 3232 est daté du 5 novembre 2003 et l'analyse du second document, qui lui n'est pas daté, montre qu'il a été établi avant la remise des offres (voir les points 120 à 123 ci-dessus).

286. En effet, la mention d'un PMP de 0,173 lors du 1er tour d'appel d'offres du marché de travaux aéro-souterrains, alors qu'ETPR remettra dans son acte d'engagement un prix différent, est une première indication de l'antériorité du document. Les mentions par lesquelles ETPR prévoyait, d'une part, de ne pas descendre au-dessous de "0,170 après négociation", ce à quoi elle s'est effectivement tenue, et, d'autre part, d'approcher une de ses concurrentes pour qu'elle fixe son PMP à 0,180 selon la mention "TG mixte => Voir ERCT pour Px => 0,180 Pondere 2004", ce qui a été effectivement fait, sont deux autres indications de l'antériorité du document.

287. D'ailleurs, par courrier du 29 avril 2011, ETPR a elle-même entériné le fait que ce document coté 3235 avait précédé la remise de son offre :

"L'indication 'TG mixte > Voir ERCT' renvoie simplement à l'idée que Monsieur Vincent Engelvin souhaitait solliciter l'entreprise ERCT afin qu'elle lui fournisse un devis pour la réalisation de l'étude des travaux souterrain mixte." (cote 15229)

288. Or, ainsi qu'il a été rappelé au point 274 ci-dessus, "la preuve de l'antériorité de la concertation par rapport au dépôt de l'offre peut être déduite à défaut de date certaine apposée sur un document, de l'analyse de son contenu et du rapprochement de celui-ci avec des éléments extrinsèques et notamment avec le résultat des appels d'offres" (arrêt de la Cour d'appel de Paris du 2 avril 1996, société Pro Gec SA).

289. L'échange d'informations entre ETPR et ses concurrentes est révélé par les mentions relatives aux PMP des 1er et 2e tours de l'appel d'offres concernant le marché des travaux aéro-souterrains et des PMP de l'appel d'offres concernant le marché des travaux groupés souterrains mixtes. Ces prix sont presque identiques aux prix auxquels les lots de ces marchés ont été attribués aux entreprises mises en cause (voir les points 124 et suivants ainsi que les points 129 et suivants ci-dessus).

290. ETPR ne peut avoir eu connaissance des PMP par le donneur d'ordre avant la remise des soumissions, puisque ces offres de prix se sont échelonnées dans un délai très court, entre le 5 et le 7 novembre 2003, soit trois jours. Inéo Réseaux Sud-Ouest et ERCTP ont remis leur offre le 7 novembre 2003, soit le jour même de la remise des offres.

291. L'affirmation de Spie Sud-Ouest selon laquelle "les informations relatives aux attributaires des marchés EDF, ainsi qu'aux prix retenus, étaient généralement rendues disponibles après l'attribution des lots, notamment au sein des locaux EDF" n'est pas pertinente. En effet, elle est tirée de l'exemple du marché de travaux aéro-souterrains 2009-2010 fourni par le service des réseaux Dordogne d'ERDF. Les informations communiquées par ERDF ne portent pas sur les PMP, ni sur les coefficients intermédiaires lors de la remise des prix, puis lors des tours de négociation, mais sur les seuls coefficients finals de prix (cotes 14354, 14435 à 14438).

292. Par ailleurs, il a été démontré aux points 127 et 130 ci-dessus qu'ETPR n'a pas pu s'inspirer des PMP des appels d'offres concernant des marchés de travaux précédents qui ont été calculés sur la base de coefficients différents de ceux utilisés dans les appels d'offres en cause et dont les participants n'étaient pas les mêmes.

293. Les deux documents comportent les différents coefficients de pondération utilisés pour l'élaboration des PMP et qui sont ceux qui ont été appliqués par EDF-GDF sous réserve d'un très faible écart concernant deux coefficients du marché des travaux groupés souterrains mixtes (voir les points 118 et suivants ci-dessus).

294. Cependant, comme il est noté au point 103 de la présente décision, les critères de pondération ne sont pas transmis par EDF-GDF aux soumissionnaires et ETPR a confirmé par courrier du 9 novembre 2009 que les "critères de pondération appliqués par EDF-GDF ne sont pas connus des candidats soumissionnant aux travaux groupés" (cote 11173).

295. Il n'en demeure pas moins qu'ETPR, nécessairement informée par les entreprises de leurs coefficients de prix, a pu sur la base des coefficients de pondération calculer les PMP à remettre par elle et ses trois concurrentes pour le marché de travaux aéro-souterrains et celui à remettre par elle et ERCTP pour l'autre marché dans des conditions optimales concernant la fixation des prix et le classement des offres.

296. Les résultats du 1er et du 2e tour d'appel d'offres du marché des travaux aéro-souterrains (cotes 5947 et 5948) corroborent les indications de prix mentionnés sur le document 3235 après la mention "1er tour" et la mention "2e groupe" qu'ETPR a corrigée en précisant qu'il s'agissait du "2e tour" pour réfuter ensuite cette correction (voir le point 124 ci-dessus), mais qui sans aucun doute concerne le deuxième tour de l'appel d'offres auquel ont participé les trois entreprises citées à côté de la mention et ETPR.

297. Comme le montre le tableau figurant au point 125 ci-dessus, les PMP remis pour le 1er tour de l'appel d'offres sont ceux prévus au millième arrondi pour Ineo Réseaux Sud-Ouest et s'en approchent à un millième près pour Spie Sud-Ouest et Allez et Cie. Les PMP remis pour le 2e tour après négociation sont ceux prévus au millième arrondi sur le document 3235. L'appel d'offres a conduit à l'attribution d'un lot à chacune des quatre entreprises, à savoir ETPR, Ineo Sud-Ouest, Allez et Cie ainsi qu'Amec Spie Sud-Ouest selon les prévisions inscrites sur le document.

298. Les résultats communiqués par EDF-GDF (cote 5981) relatifs au 1er tour de l'appel d'offres s'agissant du marché de travaux groupés souterrains mixtes corroborent, en ce qui concerne le prix remis par ERCTP, au millième arrondi l'indication de prix figurant dans la mention "TG mixte => Voir ERCT pour Px => 0,180 Pondere 2004" sur le document 3235 et, en ce qui concerne le prix remis par ETPR, l'indication de prix "0,178" figurant sur ce même document (voir les points 129 et 130 ci-dessus). ERCTP qui avait été sélectionnée par EDF pour cet appel d'offres et qui est inscrite sous sa véritable dénomination sur le document 3232 n'a pas été retenue pour le tour de négociation à la suite de son offre de PMP et les lots de ce marché ont été attribués à Ineo Réseaux Sud-Ouest, STETC et ETPR qui a été la bénéficiaire de l'échange d'informations.

299. ETPR a, par courrier du 29 avril 2011 ainsi que lors de la séance du 21 juin 2011, contesté que la mention ERCT vise l'entreprise ERCTP et prétendu qu'il existait un bureau d'études dénommé ERCT (Études réalisation coordination de travaux), basé à Bry-sur-Marne en région parisienne (94), qu'elle devait à l'époque des faits en cause approcher dans les circonstances suivantes :

"[L]'entreprise ERCT n'est pas une entreprise de travaux publics, mais un bureau d'étude, dont Monsieur Vincent Engelvin avait entendu parler, et auprès de qui il souhaitait solliciter un devis pour la réalisation d'une étude préalable. En effet, les travaux groupés nécessitent l'établissement d'un tracé et de plans d'exécution, ainsi que de l'obtention d'autorisation de passage, nécessitant l'intervention d'un bureau d'étude spécialisé." (cote 15229)

300. Toutefois, il convient de souligner que les travaux groupés d'EDF-GDF sont considérés comme de simples travaux de main-d'œuvre, qui ne nécessitent pas de recourir à des études préalables effectuées par un bureau d'études spécialisé, les études étant fournies par le donneur d'ordre (voir le point 27 ci-dessus).

301. De surcroît, l'ancien gérant d'ERCT a indiqué par courriel du 27 mai 2011 :

"Suite à votre courrier électronique concernant votre enquête, je vous informe qu'à ma connaissance et sous réserve de recherches ultérieures le bureau d'étude ERCT dont j'étais le gérant ne répondait pas à d'appel d'offre concernant des travaux publics, de VRD, de réseaux en 2003, ERCT était d'ailleurs sous administration judiciaire depuis septembre 2002.

ERCT était un modeste bureau d'étude sans aucun rayonnement national et se dédiait principalement à la réalisation d'études de rénovation de bâtiments et pavillons en travaux de bâtiment tous corps d'états sur la région parisienne." (cote 16146)

302. La mention du document coté 3235 visant "ERCT" renvoie à l'entreprise ERCTP mise en cause en l'espèce pour avoir adopté le PMP de 0,180 figurant sur le document et qui n'a d'ailleurs pas contesté le grief qui lui a été adressé.

303. La participation d'ETDE à l'échange d'informations sur les deux marchés de travaux a été retenue en raison des mentions "ETDE" et "Gpt Avec ETDE - Sout Mixte - Sous Traitant [...] ETDE répond en couverture sur aéro-souterrain + mixte" figurant sur le document 3232. Il s'avère que ces indications sont en grande partie inexactes, puisque ETDE n'a fait aucune offre sur le marché de travaux groupés souterrains mixtes et que ni la constitution d'un groupement, ni la conclusion d'un contrat de sous-traitance ou de cotraitance avec ETPR n'ont été établies.

304. ETDE prétend avoir déposé une offre "carte de visite" pour le marché de travaux aéro-souterrains lui permettant de marquer sa présence sur le secteur auprès d'EDF-GDF afin de s'assurer de continuer à être consultée par la suite. Au regard de la pratique décisionnelle du Conseil de la concurrence, puis de l'Autorité, l'existence d'une entente de couverture avant le dépôt des offres ne peut être retenue sur la base de la seule mention du document ci-dessus cité qui ne stipule aucun prix (voir, notamment, la décision n° 07-D-15 du 9 mai 2007 relative à des pratiques mises en œuvre dans les marchés publics relatifs aux lycées d'Ile de France).

305. ETDE fait valoir en outre ne pas être intéressée de manière générale par les marchés "travaux groupés", ceux-ci ne permettant pas de couvrir ses frais généraux compte tenu des prix très bas exigés par EDF-GDF pour allouer un marché.

306. La preuve d'un échange d'informations entre ETPR et ETDE n'est pas établie à partir des indices évoqués ci-dessus qui sont en grande partie inexacts et ne sont pas complétés par d'autres éléments de sorte qu'ils ne constituent pas un faisceau d'indices précis, graves et concordants.

307. En revanche, les autres mentions des documents analysés ci-dessus qui mettent en évidence les PMP calculés par ETPR qui sont les prix remis par les concurrents lors des appels d'offres constituent un faisceau d'indices suffisants pour prouver l'échange d'informations entre les entreprises sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres documents saisis énumérés au point 112 ci-dessus.

308. Il résulte de ce qui précède que, à l'exception d'ETDE qui doit être mise hors de cause, ETPR, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Allez et Cie et Amec Spie Sud-Ouest (devenue Spie Sud-Ouest) d'une part, et ETPR et ERCTP, d'autre part se sont entendues sur leurs prix préalablement à la passation des marchés de travaux groupés aéro-souterrains pour les quatre premières et de travaux groupés souterrains mixtes pour les deux dernières. Elles ont ainsi obtenu l'attribution des lots du premier marché en éliminant toute concurrence entre elles et ETPR a obtenu un des trois lots attribués dans le cadre du marché de travaux souterrains mixtes, après s'être entendue avec ERCTP dont l'offre n'a pas été retenue pour le 2e tour.

309. ETDE est, en revanche, mise hors de cause.

c) Sur le grief n° 4 : les pratiques concertées lors des marchés de travaux d'électricité de divers donneurs d'ordre en Aveyron passés en 2004 et en 2005

Exclusion de certains marchés

310. En premier lieu, le document "FIE" saisi chez Angel Larren coté 596 révèle la tenue d'une "réunion" le lundi 6 juin 2005 pendant laquelle ont été cités notamment trois marchés, celui de "Rodez centre nautique" (n° 8), déjà visé dans les documents datés du 15 septembre 2004, et ceux de "Rodez Bosch" (n° 11) et du "district bureaux sept oct 2005 100 Meuro" (n° 12 et 12 bis) avec en regard le couple Guirande-Cegelec Sud-Ouest pour le premier marché, Cegelec Sud-Ouest pour le deuxième et "Marty" pour le troisième.

311. Toutefois, ce document ne peut constituer un élément de preuve, car il s'agit vraisemblablement du compte rendu d'une réunion interne comme l'indique son auteur, Elit (Angel Larren) (cote 8998). La mention "Rodez centre Nautique Guirande cegelec" apparaît comme étant une simple confirmation de ce qui avait été arrêté lors de la réunion litigieuse du 15 septembre 2004 et consigné notamment dans le document coté 594.

312. De plus, ce document coté 596 évoque la société "Marty" comme éventuelle attributaire du marché Bureaux du bâtiment de l'Europe Grand district à Rodez (n° 12). Si cette société a bien obtenu le lot n° 2 portant sur des travaux de menuiseries, elle n'est cependant pas concernée par les pratiques retenues au titre du grief n° 4 qui ne portent que sur des travaux d'électricité.

313. Par conséquent, il convient d'écarter du grief n° 4 les deux marchés Bâtiment Rz 117A à l'usine Bosch de Rodez (n° 11) et Bureaux du bâtiment de l'Europe Grand district à Rodez (n° 12 et 12 bis).

314. Par ailleurs, si l'on se reporte aux deux documents datés du 15 septembre 2004, cotés 594 et 582, seul le marché n° 6 de mise en sécurité, 3e tranche, lot 10 est mentionné (sous la dénomination "Ste Marie sécurité") avec la mention "Cegelec".

315. Le marché "Ste Marie St Michel libre" mentionné dans le document interne d'Elit (Angel Larren) du 6 juin 2005 concerne vraisemblablement le marché n° 6 bis "unité de séjour 1 St-Michel/St-Jacques lot 10". Or, le rédacteur de ce document a indiqué le terme "libre" en face de ce marché, ce qui démontre l'absence de toute implication de Cegelec Sud-Ouest qui a remporté ce marché. En outre, l'avis de publication de l'appel d'offres du dernier marché n° 6 ter date du 24 mars 2006, soit après l'opération de visite et saisie du 20 octobre 2005.

316. Par conséquent, il convient d'écarter du grief n° 4 les deux marchés (n° 6 bis et 6 ter) unité de court séjour n° 1 et n° 2 St-Michel du centre hospitalier Ste-Marie à Olemps.

La réunion du 15 septembre 2004

Les participants

317. Le compte rendu de la réunion du 15 septembre 2004, à savoir le document coté 594, mentionne comme étant "présent" un dénommé "eric" qui serait, selon M. Czapla (ancien salarié de l'entreprise Amec Spie Sud-Ouest, puis responsable d'agence de Fauché et directeur de Flottes), M. Éric Castelnau de la société Flottes (appartenant au groupe Fauché).

318. Toutefois, lors de son audition du 8 juin 2006, M. Czapla a indiqué :

"Je ne me souviens pas avoir participé à cette réunion d'autant qu'à cette date j'étais sur le point de quitter l'entreprise Amec Spie. J'ai indiqué les noms des personnes figurant sur le tableau sans savoir si elles aussi ont participé à cette réunion."

319. A cet égard, l'absence de Flottes ressort du document coté 600 sur lequel figure la mention "Flotte ABS".

320. En outre, le compte rendu de la réunion du 15 septembre 2004 au cours de laquelle il avait été envisagé de lui attribuer le marché (n° 3 et 3 bis) Aménagement DDPJJ et CAE de Rodez n'a pas été suivi d'effet. En effet, Électricité Industrielle JP Fauché (Flottes) n'a pas soumissionné, tant pour le lot courants faibles que pour celui des courants forts. Elle n'a pas davantage participé à l'éventuel groupement avec Guirande-Amec Spie Sud-Ouest sur le marché n° 7 et 7 bis Foyer de vie ADAPEAI à Pont-de-Salars tant pour le lot courants faibles que pour celui des courants forts (voir le tableau au point 177 ci-dessus).

321. Fauché (Flottes) n'a d'ailleurs participé à aucun des marchés incriminés. Le seul marché qu'elle visait correspondait au marché n° 12 bis Bureaux du bâtiment de l'Europe Grand District à Rodez, lors de la procédure adaptée, après déclaration de son caractère infructueux (voir également le tableau au point 177 ci-dessus). Cet appel d'offres n'est pas concerné par le grief n° 4, comme il a été exposé ci-dessus.

322. Il n'est donc pas établi que Fauché (Flottes) ait participé à la réunion du 15 septembre 2004. Partant, il convient de ne pas retenir le grief n° 4 à l'encontre de cette dernière.

323. Exception faite du cas Fauché, les trois documents cotés 594, 582 et 600 saisis chez Angel Larren font référence à la réunion du 15 septembre 2004 en présentant les mêmes informations sur les noms des six entreprises concernées ou sur des montants d'affaires.

324. Les noms de responsables commerciaux figurant sur le document coté 594 ont été reconnus et identifiés comme appartenant à différentes entreprises par M. Czapla, lui-même cité sous l'orthographe Zaplat, alors employé d'Amec Spie Sud-Ouest :

- Guirande Électricité à Druelle ;

- Cegelec Sud-Ouest au Monastère ;

- Marti à Onet-le-Château ;

- Amec Spie Sud-Ouest à Sébazac,

- Sega à Rodez ;

- Elit (Angel Larren) à Decazeville (voir le point 148 de la notification de griefs).

325. Elit (Angel Larren) reconnaît également par procès-verbal du 30 septembre 2008 la tenue d'une réunion le 15 septembre 2004 avec ses concurrents : "J'avais convié les concurrents dans nos locaux, pour les informer que nous allions ouvrir une agence sur Rodez. Elle a duré une grosse demi-heure. Ils sont tous venus. Il s'agit des chargés d'affaires [...] J'étais à cette réunion. C'est la seule fois que je me suis réuni avec mes concurrents" (cote 7429).

326. Or, une entreprise doit s'abstenir rigoureusement de participer à des prises de contact directes ou indirectes avec ses concurrents en vue d'échanger sur les politiques commerciales et notamment les prix des biens ou des services qu'elle offre sur le marché. La participation à une seule réunion suffit en effet à conforter le mécanisme de l'entente : d'une part, elle renseigne sur le comportement commercial que les autres acteurs ont décidé d'adopter sur le marché, alors que l'autonomie qu'exige la concurrence entre entreprises suppose que ces dernières restent dans l'incertitude sur la stratégie de leurs compétiteurs, d'autre part, elle permet aux participants plus actifs d'escompter que l'absence d'opposition de l'entreprise ne viendra pas perturber le jeu collusif (voir l'arrêt AMD Sud-Ouest, précité).

327. Il résulte des documents analysés ci-dessus ainsi que des déclarations des entreprises que les six entreprises ont participé à la réunion du 15 septembre 2004 dont il convient de rechercher l'objet anticoncurrentiel.

L'objet anticoncurrentiel

328. Le caractère anticoncurrentiel de la réunion du 15 septembre 2004 est manifeste, puisque les participants à cette réunion ont entendu se répartir les marchés des travaux d'électricité. Cette répartition a porté non seulement sur des marchés dont les appels d'offres étaient déjà publiés, mais également sur des marchés dont les appels d'offres ne l'étaient pas encore.

329. En effet, les dates de publication de quatre des dix appels d'offres mentionnés sur les documents cotés 594 et 582 sont postérieures au 15 septembre 2004 :

- cinéma Decazeville n° 2 : date d'envoi à publication le 27 octobre 2004 ;

- maison de retraite de Ceignac n° 5 et 5 bis : date d'envoi à publication le 25 octobre 2004 ;

- centre hospitalier Ste Marie à Olemps n° 6 : date d'envoi à publication le 15 février 2005 ;

- centre nautique du Grand Rodez n° 8 : date d'envoi à publication le 14 juin 2005.

330. Cependant, les deux documents cotés 594 et 582 mentionnent à l'identique le nom des sept entreprises susvisées en regard notamment des dix marchés en cause comme étant les attributaires de ces derniers.

331. De plus, par courriers du 5 novembre 2009 et du 26 avril 2011, Elit (Angel Larren), au siège de laquelle les trois documents datés du 15 septembre 2004 ont été saisis, a indiqué que les documents cotés 594 et 600 ont "bien été établi(s) le jour de la réunion à partir des prospectives faites par les uns et les autres" (cote 10233) et qu'"au cours de cette réunion qui s'est bien tenue le 15 septembre 2004, il a été effectivement évoqué des chantiers sortis ou à venir" (cote 15069).

332. Ainsi, Elit (Angel Larren) a reconnu avoir évoqué avec ses concurrents les chantiers en cause non seulement déjà "sortis" mais également "à venir".

333. Elle a cité, à cet égard, le cas du cinéma de Decazeville (marché n° 2), pour lequel elle n'a eu connaissance de l'avis d'appel public à la concurrence que le 2 novembre 2004, soit près de deux mois après la réunion du 15 septembre 2004 :

"[...] concernant le "cinéma de Decazeville", l'avis d'appel public à la concurrence a été réalisé le 2 novembre 2004." (cotes 15069 et 15070)

334. Ainsi, les appels d'offres des quatre marchés susmentionnés étaient bien anticipés dès le 15 septembre 2004, même si leurs avis à publication ont été lancés en octobre 2004, en février et en juin 2005.

335. En tout état de cause, tant l'existence des documents cotés 582 et 600 dont les indications correspondent en tous points à celles figurant sur le document coté 594 que les précisions apportées à propos des chantiers déjà "sortis" ou "à venir" ne permettent pas à Elit (Angel Larren) de soutenir que le document coté 594 "n'a pas été rempli le jour de cette réunion. Il a été élaboré et complété au fur et à mesure des informations recueillies par le dirigeant" (cote 10232).

336. D'ailleurs, si ce document avait été complété au fur et à mesure des attributions, on ne voit pas pourquoi le marché n° 3 Aménagement DDPJJ et CAE de Rodez aurait été dévolu à Fauché (Flottes) alors que celle-ci n'a participé à aucun des douze appels d'offres en cause.

337. Ainsi, les six sociétés Elit, Sega, Marti, Cegelec Sud-Ouest, Guirande devenue Forclum QRG, Amec Spie Sud-Ouest devenue Spie Sud-Ouest qui se sont entendues lors de la réunion du 15 septembre 2004 pour répartir entre elles les neuf marchés suivants ainsi que pour avoir évoqué le marché n° 3 et sa possible attribution à Fauché (Flottes) :

1) espace économique Le Laminoir à Decazeville : date limite de remise des offres le 20 septembre 2004, attributaire Elit (Angel Larren) comme prévu ;

2) cinéma Decazeville : date limite de remise des offres le 30 novembre 2004, attributaire Elit (Angel Larren) comme prévu ;

3) aménagement DDPJJ et CAE de Rodez : date limite de remise des offres le 24 septembre 2004, attributaire Sega et non Fauché (Flottes) qui n'a pas remis d'offre ;

4) maison de retraite Les Clarines : date limite de remise des offres le 27 septembre 2004, attributaire Sega comme prévu ;

5) maison de retraite de Ceignac : date limite de remise des offres le 25 octobre 2004, attributaire Marti-Cegelec Sud-Ouest/ Sega comme prévu pour le lot courants faibles mais sans Sega pour le lot courants forts mais elle avait soumissionné en groupement avec Marti-Cegelec Sud-Ouest (cote 6620) ;

6) centre hospitalier Ste Marie à Olemps pour au moins le premier marché : date limite de remise des offres le 17 mars 2005 attributaire Cegelec Sud-Ouest comme prévu ;

7) foyer de vie ADAPEAI à Pont-de-Salars : date limite de remise des offres le 8 octobre 2004, attributaire Guirande-Amec Spie Sud-Ouest comme prévu,mais sans Fauché (Flottes) qui n'a pas remis d'offre ni en groupement avec Guirande-Amec Spie Sud-Ouest, ni à titre individuel ;

8) centre nautique du Grand Rodez : date limite de remise des offres le 28 juillet 2005, attributaires Cegelec Sud-Ouest-Guirande comme prévu ;

9) foyer des jeunes travailleurs à Onet-le-Château, date limite de remise des offres le 27 septembre 2004, attributaire Amec Spie Sud-Ouest comme prévu ;

10) réorganisation de la trésorerie générale à Rodez : date limite de remise des offres le 4 octobre 2004, attributaire Amec Spie Sud-Ouest comme prévu.

338. Les entreprises incriminées ont bien été les attributaires de neuf de ces dix marchés, pour lesquelles leur dévolution avait été prévue soit seules, soit en groupement.

339. En effet, les groupements qui étaient envisagés ont bien été constitués, ce que ne pouvait raisonnablement pas anticiper Elit, auteure des documents datés du 15 septembre 2004.

340. Ainsi, alors que l'existence d'une réunion de concertation entre concurrents suffit pour établir une pratique anticoncurrentielle même si elle n'a pas été suivie d'effets, en l'espèce, la réunion du 15 septembre 2004 a donné lieu à la conclusion d'un accord de répartition des marchés de travaux d'électricité qui s'est appliqué durablement en excluant toute concurrence.

341. Il résulte de ce qui précède qu'est établie la pratique d'entente notifiée au titre du grief n° 4 aux six entreprises suivantes : Elit du groupe Angel Larren, Marti, Cegelec Sud-Ouest, Sega, Amec Spie Sud-Ouest devenue Spie Sud-Ouest et Guirande devenue Forclum QRG, pour les dix marchés de travaux d'électricité de divers donneurs d'ordre en Aveyron passés en 2004 et 2005. Electricité Industrielle JP Fauché est, en revanche, mise hors de cause.

C. Sur l'imputabilité

Sur le droit applicable

342. Il résulte d'une jurisprudence constante que les articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce ainsi que les articles 81 CE et 82 CE (devenus articles 101 TFUE et 102 TFUE) visent les infractions commises par des entreprises, comprises comme désignant des entités exerçant une activité économique.

343. Le juge communautaire a précisé que la notion d'entreprise doit être comprise comme désignant une unité économique, même si, du point de vue juridique, cette unité économique est constituée de plusieurs personnes physiques ou morales (voir les arrêts de la Cour de justice du 14 décembre 2006, Confederación Española de Empresarios de Estaciones de Servicio, C-217-05, Rec. p. I-11987, point 40, ainsi que l'arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, précité, point 55).

344. Il résulte également d'une jurisprudence communautaire constante que c'est cette entité économique qui doit, lorsqu'elle a enfreint le droit de la concurrence, répondre de cette infraction, conformément au principe de la responsabilité personnelle (voir l'arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, précité, point 56), "sur lequel repose le droit de la concurrence de l'Union" (arrêt de la Cour de justice du 20 janvier 2011, General Química e.a./Commission, C-90-09 P, non encore publié au Recueil, point 52).

345. Ainsi, en droit interne comme en droit communautaire, au sein d'un groupe de sociétés, le comportement d'une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu'ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l'essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques.

346. Les juridictions nationales ont, à cet égard, jugé que les pratiques mises en œuvre par une société filiale sont imputables à celle-ci dès lors qu'elle est en mesure de définir sa propre stratégie commerciale, financière et technique, et de s'affranchir du contrôle hiérarchique de la société dont elle dépend (voir notamment l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, Cemex Bétons Sud-Est, du 25 mars 2008, non cassé sur ce point ; voir également, pour un rappel de la pratique décisionnelle de l'Autorité de la concurrence sur ce point, la décision n° 09-D-36 du 9 décembre 2009 relative à des pratiques mises en œuvre par Orange Caraïbe et France Télécom sur différents marchés de services de communications électroniques dans les départements de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane, points 408 et suiv.). A contrario, la Cour d'appel de Paris a jugé que "l'imputation des pratiques d'une filiale à sa société mère, qui ne constitue qu'une faculté, peut intervenir lorsque la filiale ne détermine pas de façon autonome sa ligne d'action sur le marché, mais applique les instructions qui lui sont imparties par la société mère" (arrêt du 28 octobre 2010, Maquet).

347. Les juridictions communautaires ont défini un régime de la preuve spécifique pour apprécier l'autonomie d'une filiale par rapport à sa mère en ce qui concerne son comportement sur le marché. Ainsi, dans le cas particulier où une société mère détient, directement ou indirectement par le biais d'une société interposée, la totalité ou la quasi-totalité du capital de sa filiale auteur d'un comportement infractionnel, il existe une présomption simple selon laquelle la société mère exerce une influence déterminante sur le comportement de sa filiale. Il incombe alors à la société mère de renverser la présomption en apportant des éléments de preuve susceptibles de démontrer que sa filiale détermine de façon autonome sa ligne d'action sur le marché. Si la présomption n'est pas renversée, la Commission sera en mesure de tenir la société mère solidairement responsable pour le paiement de l'amende infligée à sa filiale (arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, précité, points 60 et 61, solution confirmée récemment par l'arrêt General Quìmica e.a./Commission, précité, points 39 et 40).

348. Si les conditions d'application de ce régime de présomption réfragable ne sont pas réunies, le juge impose à la Commission européenne de vérifier que la société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale, et non de se contenter de constater qu'elle est en mesure d'exercer une telle influence (arrêt du Tribunal du 27 octobre 2010, Alliance One International Inc., T-24-05, point 126). Dans un tel cas, afin d'établir si une filiale détermine de façon autonome son comportement sur le marché, il convient de prendre en compte l'ensemble des éléments pertinents propres aux circonstances de l'espèce, relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent la filiale à la société mère (même arrêt, point 171).

349. A cet égard, il n'est pas exigé pour imputer à une société mère les actes commis par sa filiale de prouver que la société mère a été directement impliquée dans, ou a eu connaissance, des comportements incriminés. Ainsi que le relève le juge communautaire, "ce n'est pas une relation d'instigation relative à l'infraction entre la société mère et sa filiale ni, à plus forte raison, une implication de la première dans ladite infraction, mais le fait qu'elles constituent une seule entreprise au sens de l'article 81 CE qui permet à la Commission d'adresser la décision imposant des amendes à la société mère d'un groupe de sociétés" (arrêt Alliance One International Inc, précité, point 169 ; voir également l'arrêt Akzo Nobel e.a./Commission, précité, point 59).

350. Ces principes, et notamment le régime de la preuve institué par la jurisprudence communautaire, s'imposent à l'Autorité de la concurrence lorsqu'elle fait application des articles 81 CE et 82 CE (devenus articles 101 TFUE et 102 TFUE) et des articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce. En effet, la notion d'entreprise et les règles d'imputabilité relèvent des règles matérielles du droit communautaire de la concurrence. L'interprétation qu'en donnent les juridictions communautaires s'impose donc à l'autorité nationale de concurrence lorsqu'elle applique le droit communautaire, ainsi qu'aux juridictions qui la contrôlent.

351. Sans l'exclure, les juridictions nationales n'ont pas fait application à ce jour, lorsqu'elles appliquent le seul droit interne de la concurrence, d'un régime de la preuve reposant sur l'existence d'une présomption simple d'exercice par une société mère d'une influence déterminante sur le comportement de sa filiale dans le cas où elle détient la totalité ou la quasi-totalité du capital de celle-ci (voir l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 23 septembre 2010, Digicel).

352. Pour autant, l'Autorité étant en mesure de se fonder exclusivement sur la présomption simple issue de la jurisprudence établie par la Cour de justice lorsqu'elle applique en parallèle les règles communautaires et les règles internes de concurrence, ce qui rend surabondante toute démonstration de l'imputabilité du comportement en cause à la société mère, il ne serait pas cohérent pour elle de rapporter la preuve de l'imputabilité du comportement de la filiale à sa société mère lorsqu'elle applique les seules règles internes de concurrence. En effet, une telle approche serait artificielle, puisqu'elle ferait varier du tout au tout le standard de preuve retenu en droit interne selon que les règles communautaires sont ou non simultanément appliquées. Il convient donc d'assurer la mise en œuvre homogène des règles d'imputabilité lorsque l'Autorité applique le seul droit interne de la concurrence et lorsqu'elle applique simultanément le droit interne et le droit communautaire.

353. Ainsi, même lorsqu'elle fait application des seules dispositions de droit interne, l'Autorité présume, dans un cas comme celui de l'espèce où une société mère détient la totalité ou la quasi-totalité du capital de sa filiale auteur d'un comportement infractionnel, l'exercice par la société mère d'une influence déterminante sur la politique commerciale de sa filiale et la tient solidairement responsable pour le paiement de la sanction imposée à sa filiale. Cette présomption peut alors être combattue par les entreprises, qui ont à cet effet la possibilité de faire valoir tous les éléments de nature à démontrer que leur filiale se comporte de façon autonome sur le marché.

354. Toutefois, dans la présente affaire, le débat contradictoire ouvert devant les services d'instruction n'a pas pleinement porté sur la question de l'application de la présomption d'exercice par la société mère d'une influence déterminante sur la politique commerciale de sa filiale. Dès lors, compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, il ne sera pas fait application de cette présomption.

355. Dans ces conditions, la possibilité d'imputer les comportements infractionnels des filiales en cause à leur société mère doit être appréciée concrètement au regard des seuls éléments relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent en l'espèce ces sociétés.

Appréciation en l'espèce

356. Les sociétés Ineo SA, Cegelec SAS, Spie SA, Sade et Forclum SAS considèrent que le comportement infractionnel de leurs filiales ne peut leur être imputé, dès lors que leurs filiales disposaient d'une complète autonomie commerciale pour mener leurs activités. Met Expansion fait valoir qu'elle ne peut être tenue pour responsable de l'infraction commise par sa filiale Sega, puisqu'elle n'a acquis cette dernière que postérieurement aux faits en cause.

357. Quant à Angel Larren, par courrier du 5 novembre 2009, elle n'a en revanche pas contesté le fait que les pratiques reprochées à sa filiale Elit au titre du grief n° 4 lui ont été imputées.

358. S'agissant de l'argumentation selon laquelle les filiales en cause dans la présente affaire, à savoir Ineo Réseaux Sud-Ouest, Cegelec Sud-Ouest, Spie Sud-Ouest, ERCTP et Forclum QRG, disposaient d'une complète autonomie pour déterminer leur politique commerciale sur le marché, il ressort du dossier que lesdites filiales étaient effectivement autonomes à l'époque des faits en cause. Il n'y a donc pas lieu d'imputer aux sociétés Ineo SA, Cegelec SAS, Spie SA, Sade et Forclum SAS les pratiques qui ont été notifiées à leurs filiales au titre des griefs n° 1 et n° 4.

359. Quant à Sega, il convient de relever qu'elle n'a été acquise par Met Expansion à hauteur de 80 % de son capital que le 2 février 2007, soit deux ans et demi après les faits litigieux. Partant, les pratiques reprochées à Sega ne peuvent être imputées à sa société mère, Met Expansion.

360. Enfin, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, Angel Larren n'a pas contesté le fait que le comportement infractionnel de sa filiale Elit lui a été imputé. En conséquence, elle doit répondre solidairement des pratiques qui ont été notifiées à sa filiale Elit au titre du grief n° 4.

III. Sur les sanctions

361. A titre liminaire, il convient de souligner, ainsi que cela a été indiqué lors de la séance du 21 juin 2011, que le communiqué de l'Autorité de la concurrence du 16 mai 2011 relatif à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires ne peut être mis en œuvre dans la présente décision. En effet, la séance s'est tenue à une date trop rapprochée de sa publication pour avoir permis au contradictoire de s'être déroulé (voir, à cet égard, les points 17 et 18 du communiqué).

1. Sur le montant maximal des sanctions

362. Le I de l'article L. 464-2 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi NRE, dispose que "[l]e montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante".

363. Aux termes du III de ce même article, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008, précitée, "[l]orsqu'un organisme ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés, le rapporteur général peut proposer à l'Autorité de la concurrence [...] de prononcer la sanction pécuniaire prévue au I en tenant compte de l'absence de contestation. Dans ce cas, le montant maximum de la sanction encourue est réduit de moitié".

2. Sur les critères de détermination des sanctions

364. Le I de l'article L. 464-2 du Code de commerce dispose que "les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné ou du groupe auquel l'entreprise appartient et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées par le présent titre. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction".

365. Seront successivement examinées :

- la gravité des pratiques ;

- l'importance du dommage causé à l'économie ;

- la situation individuelle des entreprises ;

- la réitération éventuelle d'infractions antérieures.

a) Sur la gravité des pratiques

366. Les pratiques en cause retenues au titre des griefs n° 1 et n° 4 ont porté sur des marchés privés et publics d'appels d'offres. Elles ont consisté en des concertations et des échanges d'informations sur les prix proposés par les entreprises avant le dépôt des offres. En ce qui concerne le seul grief n° 4, elles ont également eu pour objet de désigner à l'avance les attributaires des marchés concernés.

367. Or, de telles pratiques sont particulièrement graves par nature, puisqu'elles limitent l'intensité de la pression concurrentielle à laquelle auraient été soumises les entreprises, si elles s'étaient déterminées de manière indépendante.

368. En effet, ainsi que l'a souligné à de nombreuses reprises le Conseil de la concurrence, puis l'Autorité de la concurrence, le fondement même des appels à la concurrence réside dans le secret dont s'entourent les entreprises intéressées pour élaborer leurs offres, chacune d'entre elles devant se trouver dans l'ignorance de la qualité de ses compétiteurs, de leurs capacités financières à proposer la meilleure prestation ou fourniture possible au prix le plus bas. Au contraire, les échanges d'informations entre entreprises, lorsqu'ils sont antérieurs à la remise des plis, libèrent les compétiteurs de l'incertitude de la compétition et leur permettent d'élaborer des offres ne prenant plus en compte seulement leurs données économiques propres, mais celles, normalement confidentielles, de leurs concurrents (voir notamment la décision du Conseil de la concurrence n° 07-D-29 du 26 septembre 2007 relative à des pratiques mises en œuvre dans le cadre de marchés publics d'installation électrique lancés par l'établissement public du musée et du domaine national de Versailles ; voir également les arrêts de la Cour d'appel de Paris du 28 octobre 2010, Maquet SA et du 16 juin 1009, Colas Midi-Méditerranée).

369. S'agissant, en particulier, des appels d'offres lancés dans le cadre de marchés publics, tels les appels d'offres litigieux retenus au titre du grief n° 4, à l'exception de ceux portant sur la maison de retraite de Ceignac (n° 5 et 5 bis), il convient de souligner que le non-respect des règles de concurrence ne garantit plus à l'acheteur public la sincérité de l'appel d'offres et la bonne utilisation de l'argent public.

370. En ce qui concerne le caractère ponctuel ou la faible durée effective de la concertation, une telle circonstance n'est pas un facteur d'atténuation de la gravité d'une pratique d'entente horizontale en matière de marchés publics ou privés, puisqu'un appel d'offres est par nature un marché instantané qui peut être faussé sans recourir à une entente durable. Il y a donc lieu de prendre en compte, pour apprécier la durée de la pratique, celle de l'exécution du marché (voir notamment la décision de l'Autorité de la concurrence n° 11-D-07 du 24 février 2011 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des travaux de peinture d'infrastructures métalliques). En l'espèce, il convient de distinguer les pratiques retenues au titre du grief n° 1 qui portent sur des marchés de travaux groupés d'un an de celles retenues au titre du grief n° 4 qui, si elles portent sur des marchés d'appels d'offres ponctuels, résultent d'une entente de répartition des marchés mise en œuvre pendant plusieurs mois.

371. Par ailleurs, contrairement à ce que soutiennent les parties et sans préjudice de l'appréciation du dommage causé à l'économie, ni la dimension locale des marchés litigieux, ni leur montant relativement peu élevé, ni l'existence d'un pouvoir de marché susceptible d'être exercé par les clients, tel EDF-GDF Services, ne peuvent justifier une pratique d'entente dans le cadre d'appels d'offres ni remettre en question la gravité avérée des pratiques retenues à l'encontre des mises en cause.

372. Enfin, comme l'a souligné l'Autorité de la concurrence dans sa décision n° 10-D-04 du 26 janvier 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des tables d'opération, lorsque des entreprises sont "habituées à répondre à de nombreux appels d'offres publics, de ce fait, elles ne p[euvent] ignorer le caractère prohibé des échanges d'informations entre soumissionnaires se présentant comme concurrents à un appel d'offres, rappelé par de très nombreuses décisions des autorités de concurrence et une jurisprudence constante". Ainsi, la connaissance par l'entreprise du caractère illicite des pratiques qu'elle a commises constitue un facteur aggravant (arrêt de la Cour d'appel de Paris du 30 mars 2004, SAS Novartis Pharma). En l'espèce, les entreprises en cause sont habituées à répondre à de nombreux appels d'offres et ne pouvaient dès lors ignorer le caractère illicite de leurs concertations et échanges d'informations lorsqu'elles ont soumissionné aux appels d'offres litigieux.

373. Il résulte de ce qui précède que les pratiques en cause, et notamment les pratiques retenues au titre du grief n° 4 qui ont été mises en œuvre à l'occasion de marchés publics d'appels d'offres (à l'exception de ceux portant sur la maison de retraite de Ceignac), sont particulièrement graves.

b) Sur l'importance du dommage causé à l'économie

374. Il convient tout d'abord de rappeler que l'Autorité de la concurrence peut procéder à une appréciation globale de l'importance du dommage causé à l'économie par chaque pratique, dès lors qu'elle tient compte, de manière individualisée, de la situation de chaque entreprise et de sa contribution personnelle aux pratiques (voir notamment l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 17 septembre 2008, Coopérative agricole l'Ardéchoise).

375. Afin de mesurer l'importance du dommage causé à l'économie par les ententes portant sur des marchés d'appels d'offres, l'Autorité de la concurrence tient notamment compte de la mise en œuvre effective ou non des pratiques retenues, de leur durée, de la taille et de la position des entreprises concernées sur le secteur ainsi que du montant des marchés attribués sur lesquels ont porté les pratiques (voir, notamment, les décisions n° 08-D-15 du 2 juillet 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de rénovation de chaufferies en Saône-et-Loire et n° 09-D-10 du 27 février 2009 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du transport maritime entre la Corse et le continent).

376. Il y a toutefois lieu de préciser que, selon une jurisprudence constante de la Cour d'appel de Paris, le dommage à l'économie est indépendant du dommage souffert par le maître d'ouvrage en raison de la collusion entre plusieurs entreprises soumissionnaires et s'apprécie en fonction de l'entrave directe portée au libre jeu de la concurrence. En effet, des pratiques telles que celles en cause affectent le principe même de l'appel d'offres, qui repose sur la loyauté des participants et constituent, en soi, une tromperie sur la réalité de la concurrence dont elles faussent le libre jeu (voir notamment l'arrêt Maquet SA, précité).

377. Ainsi, dans un arrêt du 8 octobre 2008, rendu dans le cadre d'un recours formé contre la décision du Conseil de la concurrence n° 07-D-29 du 26 septembre 2007 relative à des pratiques mises en œuvre dans le cadre de marchés publics d'installation électrique lancés par l'établissement public du musée et du domaine national de Versailles, la Cour d'appel de Paris a confirmé la décision du Conseil par laquelle celui-ci avait infligé à une entreprise qui s'était concertée avec une autre pour répondre à un appel d'offres une sanction pécuniaire nettement supérieure au montant du marché, alors même que ce dernier avait été attribué à une entreprise tierce ayant proposé un prix inférieur à celui proposé par l'entreprise sanctionnée.

378. Enfin, l'Autorité n'est pas tenue de chiffrer précisément l'importance du dommage à l'économie (voir les arrêts de la Cour d'appel de Paris du 26 janvier 2010, Adecco France SAS et du 28 janvier 2009, Epsé Joué Club)

379. En l'espèce, les ententes ont été suivies d'effets, puisque les marchés visés par les griefs n° 1 et n° 4, lorsqu'ils ont été attribués, ont tous été dévolus aux entreprises mises en cause.

380. Pour chacune des pratiques retenues sur les marchés en cause qui représentent un montant total de 5 030 024 euro HT, l'importance du dommage à l'économie doit être appréciée en tenant notamment compte des éléments figurant dans le tableau suivant :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

381. Les chiffres d'affaires réalisés en France par les mises en cause lors de la commission des pratiques (chiffres d'affaires 2003 pour le grief n° 1 et 2004 pour le grief n° 4) mis en regard de celui réalisé lors du dernier exercice connu (2009 ou 2010) se présentent comme suit :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

382. Enfin, si la dimension locale des marchés concernés et, en ce qui concerne les marchés retenus au titre du grief n° 1, le pouvoir de négociation d'EDF-GDF Services tendent à atténuer le dommage causé à l'économie par les pratiques en cause, il convient toutefois de prendre en compte comme facteur d'aggravation, ainsi qu'il a été rappelé au point 376 de la présente décision, l'entrave directe portée au libre jeu de la concurrence du fait notamment du risque de banalisation et d'entraînement qui peut résulter de telles pratiques.

c) Sur la situation individuelle des entreprises

Sur le rôle joué dans les pratiques en cause

383. Spie Sud-Ouest fait valoir qu'elle ne peut être considérée "dans le cadre des pratiques alléguées que comme un suiveur", voire comme un "franc-tireur". Par ailleurs, certaines parties, dont Ineo Réseaux Sud-Ouest et ERCTP, invoquent une participation limitée aux pratiques qui leur sont reprochées, eu égard au faible montant des marchés auxquels elles ont soumissionné, qui représentent une part négligeable du montant total des marchés concernés.

384. En premier lieu, il y a lieu de rappeler que, si le rôle de meneur d'une entreprise constitue une circonstance aggravante pour l'individualisation de la sanction (arrêt de la Cour de cassation, 18 février 2004, OCP Répartition), la circonstance qu'une entreprise ait manifesté des réticences ou ait adopté une position de suiveur ne saurait à l'inverse être prise en compte comme une circonstance atténuante, dès lors que cette entreprise n'a pas fait l'objet d'une contrainte irrésistible, qu'elle a approuvé et mis en œuvre les pratiques en cause.

385. Seule pourrait être prise en compte au titre des circonstances atténuantes la démonstration par l'entreprise que sa participation à l'infraction était substantiellement réduite notamment parce qu'elle s'est effectivement soustraite à la mise en œuvre des pratiques en cause en adoptant un comportement concurrentiel sur le marché (franc tireur).

386. Or, en l'espèce, il ressort des développements précédents que Spie Sud-Ouest ne peut être considérée comme ayant adopté un tel comportement concurrentiel.

387. En second lieu, ainsi qu'il a été rappelé au point 374 de la présente décision, il sera tenu compte de la contribution personnelle des parties aux pratiques en cause pour l'appréciation du montant de la sanction individuelle qui leur sera infligée.

Sur l'appartenance à un groupe d'envergure nationale

388. Il convient de relever que, comme le prévoit le Code de commerce, le fait de proportionner la sanction à la situation individuelle de l'entreprise ou, lorsqu'il y en a un, au groupe auquel elle appartient peut conduire à ce que la sanction soit, en considération d'une infraction donnée, plus élevée dans le cas d'une entreprise puissante ou intégrée à un groupe d'envergure nationale que dans celui d'une petite ou moyenne entreprise, ou d'une entreprise non intégrée à un tel groupe.

389. En l'occurrence, l'appartenance d'ERCTP, d'Ineo Réseaux Sud-Ouest, de Spie Sud-Ouest, de Cegelec Sud-Ouest et de Forclum QRG à un groupe dont le chiffre d'affaires est particulièrement important sera prise en compte dans la détermination de la sanction qui leur sera infligée.

Sur l'absence d'infraction antérieure

390. Sega fait valoir qu'elle n'a antérieurement jamais été reconnue coupable d'infractions aux règles de la concurrence.

391. A cet égard, si l'Autorité de la concurrence doit prendre en compte la réitération de pratiques anticoncurrentielles au titre des circonstances aggravantes, l'absence d'infraction antérieure constitue un comportement normal que l'Autorité n'a pas à regarder comme une circonstance atténuante (voir, en ce sens, les décisions n° 08-D-12 du 21 mai 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la production du contreplaqué et n° 10-D-39, précitée).

392. Il s'ensuit que cette circonstance n'est pas de nature à influencer à la baisse le montant de la sanction infligée à Sega.

Sur l'absence de profit retiré des pratiques

393. ETPR invoque une chute de sa rentabilité entre 2003 et 2005, du fait notamment d'une baisse des prix pratiqués dans le cadre des marchés organisés par EDF. De même, Ineo Réseaux Sud-Ouest fait valoir que, sur la même période, sa rentabilité en marchés de travaux pour EDF-GDF était négative.

394. Toutefois, à supposer même que la perte ainsi invoquée soit, au moins en partie, directement liée aux marchés en cause au titre du grief n° 1, l'absence de profit retiré d'une pratique restrictive de concurrence, voire une perte, ne saurait être prise en compte comme une circonstance atténuante, dans la mesure où elle ne minore en rien le dommage à l'économie établi précédemment.

d) Sur la réitération

395. La réitération est une circonstance aggravante dont la loi prévoit, compte tenu de son importance particulière, qu'elle doit faire l'objet d'une prise en compte autonome, de manière à permettre à l'Autorité de la concurrence d'apporter une réponse proportionnée, en termes de répression et de dissuasion, à la propension de l'entreprise ou de l'organisme concerné à s'affranchir des règles de concurrence. L'existence même d'une situation de réitération démontre en effet que le précédent constat d'infraction et la sanction pécuniaire dont il a pu être assorti n'ont pas suffi à conduire l'intéressé à respecter les règles de concurrence.

396. Pour apprécier l'existence d'une réitération, l'Autorité tient compte de quatre éléments cumulatifs :

- une précédente infraction au droit de la concurrence doit avoir été constatée avant la commission de la nouvelle pratique ;

- la nouvelle pratique doit être identique ou similaire, par son objet ou ses effets, à celle ayant donné lieu au précédent constat d'infraction ;

- ce dernier doit être devenu définitif à la date à laquelle l'Autorité statue sur la nouvelle pratique ;

- le délai écoulé entre le précédent constat d'infraction et la commission des nouvelles pratiques doit être pris en compte pour appeler une réponse proportionnée à la propension de l'entreprise à s'affranchir des règles de concurrence.

397. En l'espèce, dans la mesure où Ineo SA, Cegelec SAS, Spie SA et Forclum SAS ne se sont pas vu imputer le comportement infractionnel de leur filiale, aucune situation de réitération ne peut être retenue à leur encontre.

398. Partant, seule l'existence d'une éventuelle réitération de la part de Cegelec Sud-Ouest appelle un examen de la part de l'Autorité.

399. A cet égard, il ressort des éléments figurant au dossier que la condition tenant à l'existence d'une précédente infraction constatée avant la commission de la nouvelle pratique n'est pas remplie en ce qui concerne Cegelec Sud-Ouest.

400. En effet, il apparaît que la continuité juridique des sociétés précédemment sanctionnées par le Conseil de la concurrence dans les décisions citées par la rapporteure dans la notification des griefs au titre de la réitération, à savoir les décisions n° 88-D-10 du 1er mars 1988, n° 89-D-42 du 12 décembre 1989, n° 92-D-63 du 24 novembre 1992 et n° 99-D-11 du 9 février 1999 (8), n'est pas assurée par la société Cegelec Sud-Ouest. Par conséquent, aucune situation de réitération ne peut être retenue à l'encontre de Cegelec Sud-Ouest.

3. Sur la non-contestation des griefs

401. Ainsi qu'il a été précisé au point 230 ci-dessus, ERCTP a demandé à bénéficier de la procédure prévue par les dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce. La mise en œuvre de ces dispositions a donné lieu à l'établissement d'un procès-verbal signé le 15 octobre 2009, dans lequel le rapporteur général adjoint a proposé que la sanction éventuellement encourue soit réduite dans une proportion de 10 % du montant qui aurait été normalement infligé.

402. Dans son mémoire en réponse du 21 avril 2011, ERCTP a fait observer que, lorsqu'elle a décidé, pour des raisons qui lui étaient propres, de ne pas contester le grief qui lui avait été notifié, elle ne pouvait absolument pas envisager que le dépôt d'une offre de couverture lui serait reproché au stade du rapport, dans la mesure où le grief n° 1, tel qu'il était rédigé dans la notification des griefs, ne portait que sur la concertation avec les autres entreprises en vue d'une répartition des marchés et de la fixation des prix.

403. Selon ERCTP, la procédure de non-contestation des griefs est "viciée", puisqu'elle n'a pas été en mesure de prendre une décision éclairée de ne pas se défendre au fond, les allégations relatives à une offre de couverture ne figurant aucunement dans la notification de griefs. Elle a par conséquent développé une argumentation à titre subsidiaire visant à contester la réalité de la pratique qui lui était reprochée dans le rapport.

404. Lors de la séance du 21 juin 2011, ERCTP s'est cependant bornée à critiquer le point de vue exprimé par le rapporteur dans le rapport à propos de l'offre de couverture en précisant qu'elle n'entendait pas contester le grief tel qu'il lui avait été notifié le 5 août 2009.

405. Dans ces conditions, l'Autorité décide de maintenir à son égard le bénéfice de la procédure de non-contestation des griefs. Conformément à la proposition formulée par le rapporteur général adjoint, il lui est accordé une réduction de 10 % du montant de la sanction infligée.

4. Sur le montant des sanctions

a) Sur la méthode de détermination des sanctions

406. Conformément à la pratique décisionnelle récente de l'Autorité (voir, à cet égard, la décision n° 10-D-39 du 22 décembre 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la signalisation routière verticale), le chiffre d'affaires réalisé en France au cours de l'année pendant laquelle ont eu lieu les pratiques retenues à l'encontre de chacune des parties mises en cause sera retenu comme base pour déterminer le montant des sanctions, soit le chiffre d'affaires réalisé en 2003 pour les pratiques sanctionnées au titre du grief n° 1 et celui réalisé en 2004 pour les pratiques sanctionnées au titre du grief n° 4.

407. Le montant de chaque sanction sera ainsi déterminé, à partir du chiffre d'affaires qui vient d'être défini, en fonction de la gravité des pratiques retenues à l'encontre des parties ainsi que de l'importance du dommage à l'économie telles qu'elles ont été analysées aux points 366 et suivants de la présente décision. Il sera ensuite tenu compte des éléments d'individualisation retenus aux points 383 et suivants.

408. Le montant de la sanction sera alors écrêté s'il y a lieu afin de ne pas excéder le montant maximal de la sanction applicable pour chacune des mises en cause. Il intégrera ensuite la réduction accordée, le cas échéant, au titre de la non-contestation des griefs. Enfin, lorsque des entreprises ont invoqué l'existence de difficultés financières particulières et soumis les éléments nécessaires pour en permettre la vérification par l'Autorité, le montant définitif de la sanction individuelle sera ajusté.

b) Sur les sanctions individuelles

ETPR

409. Le chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé connu réalisé par ETPR est de 19 244 665 euro en 2009. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 1 924 467 euro.

410. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus au titre des pratiques retenues dans le cadre du grief n° 1 et, d'autre part, au chiffre d'affaires de 14 548 065 euro qu'ETPR a réalisé en France en 2003, le montant de la sanction qui lui est infligée s'élève à 130 900 euro.

ERCTP

411. Les comptes d'ERCTP sont consolidés au sein de ceux du groupe Sade. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé a atteint 1 345 400 000 euro en 2008. Du fait de la mise en œuvre de la procédure de non-contestation des griefs, le montant maximal de la sanction s'élève donc à 67 270 000 euro.

412. Compte tenu, d'une part, des éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus au titre des pratiques retenues dans le cadre du grief n° 1 et, d'autre part, du chiffre d'affaires de 6 688 330 euro qu'ERCTP a réalisé en France en 2003, le montant de la sanction s'élève à 66 214 euro. Toutefois, il y a lieu de réduire ce montant de 10 % afin de tenir compte de la réduction accordée au titre de l'absence de contestation des griefs. Le montant de la sanction qui est infligée à ERCTP s'élève donc à 59 500 euro.

Allez et Cie

413. Le chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé connu réalisé par Allez et Cie est de 120 210 223 euro en 2008. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 12 021 022 euro.

414. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus au titre des pratiques retenues dans le cadre du grief n° 1 et, d'autre part, au chiffre d'affaires de 78 606 000 euro qu'Allez et Cie a réalisé en France en 2003, le montant de la sanction qui lui est infligée s'élève à 707 400 euro.

Ineo Réseaux Sud-Ouest

415. Le chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé connu réalisé par Ineo Réseaux Sud-Ouest est de 66 890 155 euro en 2007 (9). Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 6 689 016 euro.

416. Compte tenu, d'une part, des éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus au titre des pratiques retenues dans le cadre du grief n° 1 et, d'autre part, du chiffre d'affaires de 55 697 126 euro qu'Ineo Réseaux Sud-Ouest a réalisé en France en 2003, le montant de la sanction qui lui est infligée s'élève à 551 400 euro.

417. Dans son mémoire en réponse du 22 avril 2011, Ineo Réseaux Sud-Ouest a indiqué qu'elle avait enregistré une baisse sensible de son chiffre d'affaires et de sa profitabilité depuis 2008. Cependant, les éléments qu'elle a fournis ne permettent pas de conclure à l'existence de difficultés particulières, affectant sa capacité contributive.

Spie Sud-Ouest

418. Les comptes de Spie Sud-Ouest sont consolidés au sein de ceux du groupe Spie. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé a atteint 3 814 351 000 euro en 2009. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 381 435 100 euro.

419. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus au titre des pratiques retenues dans le cadre des griefs n° 1 et 4 et, d'autre part, aux chiffres d'affaires de 203 161 708 euro et de 216 330 550 que Spie Sud-Ouest a réalisés en France respectivement en 2003 et en 2004, le montant de la sanction qui lui est infligée s'élève à 5 104 800 euro.

Cegelec Sud-Ouest

420. Les comptes de Cegelec Sud-Ouest sont consolidés au sein de ceux du groupe Cegelec. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé a atteint 3 037 863 000 euro en 2007. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 303 786 300 euro.

421. Compte tenu, d'une part, des éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus au titre des pratiques retenues dans le cadre du grief n° 4 et, d'autre part, du chiffre d'affaires de 182 688 723 euro que Cegelec Sud-Ouest a réalisé en France en 2004, le montant de la sanction qui lui est infligée s'élève à 2 612 400 euro.

Forclum QRG

422. Les comptes de Forclum QRG sont consolidés au sein de ceux du groupe Eiffage. Le chiffre d'affaires mondial consolidé hors taxes le plus élevé a atteint 13 673 000 000 euro en 2008. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 1 367 300 000 euro.

423. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus au titre des pratiques retenues dans le cadre du grief n° 4 et, d'autre part, au chiffre d'affaires de 12 956 359 euro que Forclum QRG a réalisé en France en 2004, le montant de la sanction qui lui est infligée s'élève à 185 200 euro.

Elit et Angel Larren

424. Le chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé connu réalisé par Elit est de 2 013 797 euro en 2009 (10). Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 201 380 euro.

425. Compte tenu, d'une part, des éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus au titre des pratiques retenues dans le cadre du grief n° 4 et, d'autre part, du chiffre d'affaires de 1 460 097 euro qu'Elit a réalisé en France en 2004, le montant de la sanction qui lui est infligée solidairement avec sa société mère Angel Larren s'élève à 18 900 euro.

Sega

426. Le chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé connu réalisé par Sega est de 1 423 363 euro en 2010 (11). Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 142 336 euro.

427. Eu égard, d'une part, aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus au titre des pratiques retenues dans le cadre du grief n° 4 et, d'autre part, au chiffre d'affaires de 767 148 euro que Sega a réalisé en France en 2004, le montant de la sanction qui lui est infligée s'élève à 9 900 euro.

Établissements Marti

428. Le chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé connu réalisé par Marti est de 3 093 721 euro en 2007. Le montant maximal de la sanction s'élève donc à 309 372 euro.

429. Compte tenu, d'une part, des éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus au titre des pratiques retenues dans le cadre du grief n° 4 et, d'autre part, du chiffre d'affaires de 1 973 905 euro que Marti a réalisé en France en 2004, le montant de la sanction qui lui est infligée s'élève à 21 700 euro.

Décision

Article 1er :

Il est établi que les sociétés Engelvin Travaux Publics Réseaux (ETPR), Entreprise Régionale Canalisations Travaux Publics (ERCTP), Allez et Cie, Ineo Réseaux Sud-Ouest, Spie Sud-Ouest, Forclum Quercy-Rouergue-Gévaudan (QRG), Cegelec Sud-Ouest, Angel Larren, Elit, Sega et Établissements Marti ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.

Article 2 : Il n'est pas établi que les sociétés Sade, Ineo SA, ETDE, Aygobère, Mainguy, Darlavoix, SDEL Massif central, Vinci Énergies Sud-Ouest, L'Entreprise Électrique, Spie SA, Ceras, STETC, Cana-Élec, Forclum SAS, Cegelec SAS, Cegelec Holding, Larren Réseaux SLR, Société Languedocienne d'Aménagements, Chavinier, Mini, Raynal, Mulero, Électricité Industrielle J.P. Fauché, Met Expansion et Citel ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.

Article 3 : Sont infligées, au titre des pratiques visées à l'article 1er, les sanctions pécuniaires suivantes :

- à SAS Engelvin TP Réseaux (ETPR), une sanction de 130 900 euro ;

- à SA Entreprise régionale Canalisations TP (ERCTP), une sanction de 59 500 euro ;

- à SAS Allez et Cie, une sanction de 707 400 euro ;

- à SNC Ineo Réseaux Sud-Ouest, une sanction de 551 400 euro ;

- à SAS Spie Sud-Ouest, une sanction de 5 104 800 euro ;

- à SA Cegelec Sud-Ouest, une sanction de 2 612 400 euro ;

- à SAS Forclum Quercy Rouergue Gevaudan (QRG), une sanction de 185 200 euro ;

- à SARL Elit et à SARL Angel Larren, solidairement une sanction de 18 900 euro ;

- à SA Sega, une sanction de 9 900 euro ;

- à SARL Établissements Marti, une sanction de 21 700 euro.

Notes :

1 Le Code des marchés publics prévoit notamment que les marchés sont encadrés par des règles strictes de publicité, de mise en concurrence, de transparence et d'égalité de traitement des candidats ; les règles de choix des attributaires sont définies à l'avance et contrôlables ; la violation de ces dispositions emporte l'application de sanctions spécifiques (nullité des contrats passés, sanctions pénales, etc.).

2 Soit postérieurement aux faits reprochés.

3 Et non à 100 % contrairement à ce qu'avait indiqué le directeur délégué d'Ineo RSO lors de son audition par les services d'instruction le 28 octobre 2008 (cotes 7512 et 7513).

4 Dans sa version en vigueur issue de l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008.

5 Le 25 octobre 2005, Cegelec Sud-Ouest a formé un pourvoi en cassation contre l'ordonnance d'autorisation de 2005 (cotes 464 et suivantes).

6 Dans ce dernier courrier, la rapporteure générale a précisé qu'il revenait à Sade de formuler une demande de restitution des documents litigieux au Premier Président de la Cour d'appel de Paris en application de l'article 956 du Code de procédure civile.

7 En vertu de l'article 16 de la directive 2004-17-CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux (JO L 134, p. 1), le seuil pour les marchés de travaux est de 4 845 000 euro HT.

8 Décision n° 88-D-10 du 1er mars 1988 relative à des pratiques relevées dans le secteur de l'appareillage électrique de moyenne tension ; décision n° 89-D-42 du 12 décembre 1989 relative à des pratiques d'entente relevées dans le secteur de l'équipement électrique ; décision n° 92-D-63 du 24 novembre 1992, relative à des pratiques relevées lors d'un appel d'offres lancé en 1990 par la commune de Venarey-les-Laumes en Cotes d'Or et décision n° 99-D-11 du 9 février 1999, relative à des pratiques relevées à l'occasion de travaux d'assainissement sur les communes de Toulouse et Lamasquière.

9 Les données relatives aux comptes consolidés du groupe n'ont pas été communiquées. Le chiffre d'affaires d'Ineo Réseaux Sud-Ouest est donc retenu afin de calculer le montant maximal de la sanction.

10 Les comptes du groupe Angel Larren ne sont pas consolidés.

11 Les comptes du groupe Met Expansion ne sont pas consolidés.