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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 29 septembre 2011, n° 10-10002

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Alain Chevallier et Associés (SARL)

Défendeur :

Piquadro Spa (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Perrin

Conseillers :

Mmes Touzery-Champion, Pomonti

Avoué :

SCP Jean Philippe Autier

Avocats :

Mes d'Estienne du Bourguet, Rychner

T. com. Paris, du 14 avr. 2010

14 avril 2010

Faits constants et procédure

La société de droit italien Piquadro Spa (ci-après Piquadro) et la SARL Alain Chevallier & Associés (ci-après société Chevallier) ont conclu un premier contrat d'agent commercial à durée déterminée de 3 ans du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006, pour l'ensemble du territoire métropolitain ainsi que la Principauté de Monaco, auquel il a été mis un terme le 31 décembre 2005.

Le 1er janvier 2006, a été signé entre les parties un second contrat d'agent commercial à durée déterminée venant à échéance le 31 décembre 2007, aux termes duquel la société Chevallier s'est vue confier le mandat de vendre, au nom et pour le compte de la société Piquadro, les produits de maroquinerie et de bagagerie de marque désignés audit contrat.

Le mandat a été confié à la société Chevallier pour 55 départements métropolitains et Monaco, à l'exclusion d'un certain nombre de magasins expressément énumérés au contrat.

Le contrat comportait l'obligation pour la société Chevallier de réaliser des objectifs minimaux de chiffre d'affaires.

Constatant que la société Chevallier n'avait pas réalisé les objectifs minimaux de chiffres d'affaires, la société Piquadro l'a informée par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 mai 2007 du fait qu'elle maintenait le contrat mais qu'elle réduisait la zone géographique qui lui avait été confiée, précisant que cette décision prenait effet le 8 juin 2007.

Considérant qu'à la suite de cette réduction de territoire, les objectifs n'avaient toujours pas été atteints par la société Chevallier, la société Piquadro a résilié le contrat par lettre recommandée AR en date du 26 septembre 2007, la résiliation prenant effet le 15 octobre 2007.

Estimant que cette rupture lui cause un préjudice, la société Chevallier a assigné la société Piquadro par acte en date du 22 août 2008.

Par un jugement du 14 avril 2010, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a :

- condamné la société Piquadro Spa à payer à la société Alain Chevallier & Associés la somme de 22 000 euro à titre d'indemnités de rupture du contrat d'agent commercial, outre les intérêts légaux à compter du 8 juin 207, date de la résiliation du contrat,

- débouté la société Piquadro Spa de sa demande de remboursement de 7 130 euro concernant le matériel promotionnel donné à la société Alain Chevallier & Associés,

- condamné la société Piquadro Spa à verser à la société Alain Chevallier & Associés la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouté les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires.

Vu l'appel interjeté par la SARL Alain Chevallier & Associés le 6 mai 2010.

Vu les dernières conclusions signifiées le 9 juin 2011 par lesquelles la SARL Alain Chevallier & Associés demande à la cour de :

confirmer le jugement en ce qu'il a :

- jugé que la société Piquadro a modifié unilatéralement en date du 8 juin 2007 le contrat d'agent commercial qu'elle a conclu avec la société Alain Chevallier & Associés à effet du 1er janvier 2006, ce qui a entrainé la résiliation dudit contrat à compter du 8 juin 2007,

- jugé que la société Alain Chevallier & Associés n'a commis aucune faute dans l'exécution de son mandat d'agence commerciale et a parfaitement fait diligence dans l'exécution dudit mandat,

- condamné la société Piquadro à payer à la société Alain Chevallier & Associés la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance,

- débouté la société Piquadro Spa de sa demande en paiement d'une somme de

7 130 euro au titre du matériel promotionnel qu'elle a mis gratuitement à la disposition de la société Alain Chevallier & Associés pour lui permettre d'exécuter son mandat,

- infirmer le jugement en ce qu'il a évalué l'indemnité de rupture à la seule somme de 22 000 euro,

- et statuant à nouveau, condamner la société Piquadro à payer à la société Alain Chevallier & Associés la somme de 112 176 euro représentant deux années de commissions sur la base de la moyenne des commissions perçues sur la période allant du 1er janvier 2005 au 8 juin 2007, outre les intérêts légaux à compter de la résiliation dudit contrat en date du 8 juin 2007,

- condamner également la société Piquadro à payer à la société Alain Chevallier & Associés :

- au titre du préavis : la somme de 11 685 euro à titre d'indemnité compensatrice de préavis, représentant deux mois et demi de commissions sur la base de la moyenne des commissions perçues sur la période allant du 1er janvier 2005 au 8 juin 2007,

- au titre de la rupture anticipée du contrat à durée déterminée : la somme de 6 834 euro représentant sept mois de commissions (juin à décembre 2007) sur la base de la moyenne des commissions perçues sur la période du 1er janvier 2007 au 8 juin 2007,

- à titre du solde de commissions : la somme de 2 675,60 euro,

- au titre de la rupture brutale et déloyale du contrat d'agence commerciale : la somme de 10.000 euro à titre de dommages et intérêts,

- au titre de l'article 700 du Code de procédure civile : la somme de 40 000 euro,

- débouter la société Piquadro de l'ensemble de ses demandes.

La SARL Alain Chevallier & Associés fait valoir qu'elle a exécuté sa mission en faisant preuve d'une diligence particulière, ce qui exclut toute imputation de faute d'une quelconque nature que ce soit à son endroit.

Elle soutient que les raisons de l'insuccès des produits Piquadro en France tiennent à l'attitude fautive de cette dernière à l'égard de son agent, à sa négligence et à sa défaillance, et au fait qu'elle n'a pas accepté de suivre les conseils de la société Alain Chevallier & Associés.

La SARL Alain Chevallier & Associés estime dès lors que les premiers juges ont fait une appréciation inadéquate de la relation des parties et des circonstances de la rupture.

Vu les dernières conclusions signifiées le 8 juin 2011 par lesquelles la société Piquadro demande à la cour de :

- donner acte à la société Chevallier du fait qu'elle ne s'oppose pas à l'audition de Monsieur Batisse,

- dire et juger que la société Piquadro a, à bon droit, réduit la zone de représentation confiée à la société Chevallier au titre du contrat d'agent commercial conclu le 1er janvier 2006 et résilié ce contrat le 26 septembre 2007 aux torts exclusifs de la société Chevallier,

- dire et juger que la société Chevallier a manqué à son devoir de loyauté en représentant les produits concurrents de marque Lupo, ce qui constitue une faute grave, exclusive du versement de l'indemnité de résiliation prévue à l'article L. 134-3 du Code de commerce,

- donner acte à la société Piquadro de ce qu'elle reconnait être débitrice de la somme de 2 675 euro à l'égard de la société Chevallier, somme qui sera compensée avec la somme de 5 199,22 euro dont la société Chevallier se reconnaît redevable envers la société Piquadro,

en conséquence,

- ordonner l'audition de Monsieur Batisse,

- infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 14 avril 2010,

- débouter la société Chevallier de la totalité de ses demandes, fins et conclusions excédant la somme de 2 675 euro,

à titre reconventionnel,

- dire et juger que la société Piquadro est créancière envers la société Chevallier de la somme de 7 130 euro au titre du matériel promotionnel gratuitement mis à sa disposition,

- dire et juger que la société Piquadro est créancière envers la société Chevallier de la somme de 5 199,22 au titre des factures impayées,

en conséquence,

- condamner la société Chevallier à payer la somme de 7 130 euro à la société Piquadro au titre du matériel promotionnel mis gratuitement à sa disposition,

- ordonner la compensation entre la créance de la société Chevallier envers la société Piquadro,

- condamner la société Chevallier à payer à la société Piquadro la somme de 2 524,22 euro,

en toute hypothèse,

- condamner la société Chevallier à verser à la société Piquadro la somme de 45 000 euro en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société Piquadro soutient que la chute dramatique des ventes démontre l'absence totale d'implication de la société Chevallier, et ce alors même que des efforts de promotion très importants avait été engagés par la société Piquadro concomitamment.

Cette dernière fait valoir qu'en faisant le choix de réduire la zone géographique d'activité, elle agissait légitimement en vue de préserver ses intérêts, et que face à l'absence persistante et inexplicable de toute amélioration du chiffre d'affaires réalisé par la société Chevallier, elle a pris la décision de résilier le contrat.

La société Piquadro, qui insiste en outre sur la hausse de son chiffre d'affaires depuis la fin de ses relations commerciales avec la société Chevallier, soutient que les carences de son agent commercial sont établies, et qu'elle était bien fondée à résilier le contrat pour violation des dispositions contractuelles.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

Motifs

A titre préalable, il y a lieu d'observer que, contrairement à ce que soutient la société Piquadro, les relations contractuelles entre les parties ont démarré le 1er janvier 2004, lors de la signature et de la prise d'effets du premier contrat d'agent commercial d'une durée déterminée de trois ans.

En effet, la signature par les parties du deuxième contrat du 1er janvier 2006 est accompagnée d'un courrier du 31 décembre 2005, émanant de la société Piquadro et accepté par la SARL Alain Chevallier, et ainsi rédigé :

" Dear Monsieur Chevallier,

Etant exposé que notre société Paquadro Spa s'est rapprochée à vous pour Vous faire part de sa volonté de mettre en place d'autres commerciaux pour la distribution et la commercialisation des produits de la marque Piquadro en France, nous Vous prions de bien vouloir signer le nouveau mandat qui substitue le précédent mandat du 01-01-2004 sans modifier la date d'antériorité des relations contractuelles. "

Il ne peut donc en aucun cas s'agir, comme voudrait le voir juger la société Piquadro, de deux contrats successifs et indépendants l'un de l'autre.

Il s'agit au contraire d'un seul et unique mandat confié par la société Piquadro à la SARL Alain Chevallier depuis le 1er janvier 2004 et auquel elle a mis fin par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 septembre 2007, avec effet au 15 octobre 2007.

Les relations contractuelles entre les parties ont donc duré un peu moins de quatre ans.

L'article L. 134-12 du Code de commerce, qui s'applique également dans le cas d'un contrat d'agence à durée déterminée, ce qui est le cas en l'espèce, dispose qu'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

Cependant, aux termes de l'article L. 134-13 du même Code, cette réparation n'est pas due si la cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial.

Or, la société Piquadro soutient que la SARL Alain Chevallier a manqué à ses obligations de diligence, de bonne foi et de loyauté dans l'exécution de son mandat.

Pourtant, la SARL Alain Chevallier est en mesure de justifier qu'elle s'est investie dans le développement de la marque Piquadro et de produire de nombreuses attestations de boutiques clientes françaises qui soulignent ses diligences résultant de visites régulières et de son insistance pour les convaincre d'acheter les produits Piquadro (pièces n° 9 à 19, 26 à 28, 45 à 50, 52 et 53 produites par la SARL Alain Chevallier).

Le nombre des attestations produites et le fait qu'il s'agisse d'attestations précises et détaillées excluent qu'il puisse s'agir de témoignages de complaisance comme l'affirme la société Piquadro.

La société Piquadro, quant à elle, ne produit que deux courriers de clients français insatisfaits de l'intervention de la SARL Alain Chevallier.

En outre, la SARL Alain Chevallier a produit deux attestations de Monsieur Batisse, également professionnel de la distribution de maroquinerie en France qui contredit la lettre du client Liogier qui affirmait que Monsieur Chevallier se serait présenté au magasin le mardi 29 mai 2007 " les mains dans les poches ". Ces attestations sont suffisamment détaillées et circonstanciées pour qu'il ne soit pas nécessaire de procéder à l'audition de ce témoin comme le réclame la société Piquadro.

Par ailleurs, la SARL Alain Chevallier justifie avoir investi financièrement pour promouvoir la marque Piquadro, en prenant en location successivement deux show-rooms totalement dédiés à la marque et bien situés dans le 8ème arrondissement (pièces n° 25 et 33).

Il ne saurait lui être reproché d'avoir violé l'obligation de non concurrence à laquelle elle était tenue en application de l'article 6 du contrat aux termes de laquelle l'agent s'interdit, sauf accord préalable et écrit du mandant, dans les départements et territoires visés au contrat, " la commercialisation de marques dont les articles à commercialiser représenteraient dans l'offre générale plus de 30 % de bagages ou plus de 30 % de maroquinerie pour hommes (sacs, cartables, serviettes) ".

Or, il est établi que la marque Lupo, que la SARL Alain Chevallier ne conteste pas avoir commercialisée à partir de l'année 2006, ne fabrique et ne commercialise que de la maroquinerie pour femmes (sacs à main, petite maroquinerie, ceintures...) mais pas de bagages ni de maroquinerie pour hommes (cf pièces n° 55 et 56 de la SARL Alain Chevallier).

Le principal reproche formulé par la société Piquadro à l'encontre de la SARL Alain Chevallier est de ne pas avoir respecté " les objectifs minimums de ventes en chiffre d'affaires (HT) " comme cela était prévu à l'article 5.3 du contrat.

L'annexe B du contrat prévoit un chiffre d'affaires minimum à réaliser de :

- 314 000 euro du 1er janvier au 31 juillet 2006

- 296 000 euro du 1er août au 31 décembre 2006

- 460 000 euro du 1er janvier au 31 juillet 2007

- 430 000 euro du 1er août au 31 décembre 2007

La réalisation de ces objectifs était un élément essentiel du contrat d'agence puisque l'article 9.2 dispose que : " En cas de faute grave, ou à cause de la non réalisation, de la part de l'Agent, d'un ou plus des objectifs minimums de ventes, pendant toute sa durée, le présent contrat pourra être résilié par l'une ou l'autre des parties par lettre recommandée avec accusé de réception, avec un préavis de 15 (quinze) jours. "

Les mêmes termes avaient été utilisés par le précédent contrat du 1er janvier 2004 qui prévoyait les objectifs suivants :

-1ère année :

* 1er quadrimestre 30 000 euro

* 2ème quadrimestre 70 000 euro

* 3ème quadrimestre 100 000 euro

-2ème année :

* 1er quadrimestre 120 000 euro

* 2ème quadrimestre 120 000 euro

* 3ème quadrimestre 150 000 euro

-3ème année :

* 1er quadrimestre 220 000 euro

* 2ème quadrimestre 220 000 euro

* 3ème quadrimestre 290 000 euro

L'année 2004, la SARL Alain Chevallier a réalisé un chiffre d'affaires de 276 022 euro HT, supérieur à l'objectif minimum.

Par contre, l'objectif minimum n'a pas été réalisé pour les années suivantes. La chute a été particulièrement importante en 2006 puisque le chiffre d'affaires réalisé par la SARL Alain Chevallier a été de 332 050 euro et la situation s'est encore aggravée en 2007 avec un chiffre d'affaires réalisé de 54 948 euro pour les six premiers mois.

Cependant, la SARL Alain Chevallier présente des arguments convaincants pour justifier ces résultats non conformes aux objectifs, étant observé que la clause permettant la résiliation du contrat d'agence avec un préavis réduit à 15 jours en cas de non respect des objectifs prévus a été stipulée au bénéfice des deux parties, ce qui démontre que ces objectifs à atteindre représentaient l'intérêt commun du mandant et du mandataire.

Elle démontre en effet qu'à la fin de l'année 2004, alors qu'elle avait commencé à bien pénétré le marché, la société Piquadro s'est révélée incapable de livrer une quantité suffisante de produits pour les fêtes de fin d'année, ce sur quoi la SARL Alain Chevallier n'a pas manqué d'attirer son attention (cf courriel du 8 novembre 2004).

La SARL Alain Chevallier relève également fort justement que la société Piquadro s'est abstenue de venir en France pour accompagner Monsieur Chevallier dans un tournée pour comprendre les attentes et les spécificités du marché. Elle ne s'est décidée à faire le déplacement qu'après l'envoi de la lettre du 23 mai 2007, qui réduisait le territoire géographique d'intervention de la SARL Alain Chevallier. Ce déplacement tardif est intervenu alors que la situation était déjà fortement obérée. Cela est confirmé par les très nombreuses attestations de clients et les écrits qu'ils ont adressés à la SARL Alain Chevallier et que celle-ci a fait parvenir à son mandant, produits en annexe.

L'unique pièce en sens contraire produite par la société Piquadro émane de son actuel agent commercial en France et est donc sujette à caution.

La société Piquadro n'a manifestement pas tenu compte des remarques et suggestions formulées par la SARL Alain Chevallier, concernant les attentes des consommateurs français, le service après-vente ou encore la publicité.

S'agissant, plus particulièrement de ce dernier point, s'il n'est pas contestable que la société Piquadro a engagé des dépenses pour la promotion de ses produits en France, cette publicité est intervenue tardivement et n'a pas correctement ciblé le marché français.

Il résulte de l'ensemble des défaillances de la société Piquadro, ci-dessus soulignées, que de nombreux clients ont cessé de travailler avec elle et qu'aujourd'hui seuls quatre magasins sont mentionnés pour toute la France sur son site internet.

En outre, la société Piquadro ne peut valablement tirer argument des performances réalisées postérieurement à la rupture du contrat d'agence avec la SARL Alain Chevallier par ses autres agents commerciaux en France, soit 194 072 euro pour la période du 1er avril 2008 au 31 mars 2009 et 105 529 euro pour la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2010.

En effet, ces chiffres ne démontrent pas des résultats satisfaisants, surtout si on les compare aux exigences à l'égard de la SARL Alain Chevallier résultant des contrats d'agence, soit près de 500 000 euro pour 2005, plus de 600 000 euro pour 2006 et plus de 800 000 euro pour 2007.

De même, les performances françaises globales affichées, toutes sources de commercialisation confondues, sont tout juste au niveau de ce qui était demandé à la SARL Alain Chevallier pour l'année 2007.

En conséquence, outre le fait que ces chiffres ne concernent pas la période pendant laquelle la SARL Alain Chevallier a été l'agent commercial de la société Piquadro et que ce qui a pu se passer après la rupture du contrat est sans intérêt au regard du présent litige, ils ne démontrent pas que la SARL Alain Chevallier a démérité pendant la période contractuelle et prouve, au contraire, que les objectifs fixés n'étaient pas réalistes.

La société Piquadro ne peut pas sérieusement soutenir que la SARL Alain Chevallier ne saurait se plaindre des objectifs fixés dès lors qu'elle a accepté de signer un deuxième contrat d'agent commercial en connaissance de cause alors que cette dernière n'a pas eu d'autre choix que de signer ce deuxième contrat, sauf à voir le premier contrat résilié pour non-atteinte des objectifs alors qu'elle avait investi sur cette marque.

Par contre, la SARL Alain Chevallier peut reprocher à son mandant une attitude déloyale à son égard, pour avoir réduit une première fois son territoire presque de moitié par le contrat de 2006, pour avoir cessé de payer ponctuellement les commissions dues à compter d'avril 2007, pour avoir une deuxième fois réduit le territoire de son agent commercial le 23 mai 2007.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la SARL Alain Chevallier est fondée à réclamer à la société Piquadro une indemnité de rupture de son contrat d'agence.

L'indemnité de rupture due à l'agent commercial doit réparer le préjudice résultant de la perte pour l'avenir des revenus tirés de l'exploitation de la clientèle commune.

Il est d'usage de calculer l'indemnité de cessation du contrat sur la base de la moyenne des trois dernières années d'exercice normal du contrat.

En l'espèce, il convient de rappeler que les relations commerciales ont duré du 1er janvier 2004 au 15 octobre 2007, soit près de quatre ans de sorte que l'indemnité de fin de contrat doit être équitablement fixée à 2 ans de commissions.

La SARL Alain Chevallier justifie d'un total de commissions HT de 69 197 euro pour l'année 2005, de 61 466 euro pour l'année 2006 et de 4 881 euro pour 2007, soit une moyenne de 45 181 euro.

L'indemnité de cessation du contrat s'établit donc à 90 362 euro.

L'indemnité compensatrice de préavis n'est pas due s'agissant d'un contrat à durée déterminée. Par contre, la SARL Alain Chevallier a droit à une indemnité compensant la rupture du contrat à durée déterminée avant son échéance, représentant le montant des commissions que l'agent commercial aurait dû percevoir si le contrat d'agence s'était poursuivi jusqu'à son terme.

Il y a lieu d'allouer à ce titre à la SARL Alain Chevallier la somme qu'elle réclame soit 6 834 euro.

La SARL Alain Chevallier ne caractérise pas les préjudices d'image et moral qu'elle allègue et doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ces titres.

C'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que la société Piquadro, en mettant gratuitement à disposition de la SARL Alain Chevallier du matériel promotionnel, n'a fait que respecter la loi stipulant que le mandant doit mettre l'agent commercial en mesure d'exécuter son mandat.

D'ailleurs, la société Piquadro, qui ne justifie au demeurant pas du montant dont elle réclame paiement, n'avait jamais réclamé la restitution du matériel promotionnel avant l'introduction de la présente procédure.

Il doit être donné acte aux parties de leur accord sur des créances réciproques :

- de 2 675 euro de la SARL Alain Chevallier sur la société Piquadro au titre de commissions

- de 5 199,22 euro de la société Piquadro sur la SARL Alain Chevallier au titre de factures impayées.

En tant que de besoin, chacune d'entre elles doit être condamnée envers l'autre à payer les montants qu'elle lui doit et il convient d'ordonner la compensation à due concurrence entre les montants respectivement dus.

L'équité commande d'allouer à la SARL Alain Chevallier une indemnité de 10.000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le quantum de l'indemnité de rupture, Statuant à nouveau sur ce point, Condamne la société Piquadro Spa à payer à la SARL Alain Chevallier la somme de 90 362 euro au titre de l'indemnité de rupture du contra d'agence, Y ajoutant, Condamne la société Piquadro Spa à payer à la SARL Alain Chevallier la somme de 6 834 euro à titre d'indemnité compensant la rupture du contrat à durée déterminée avant son échéance, Donne acte aux parties de leur accord sur des créances réciproques : - de 2 675 euro de la SARL Alain Chevallier sur la société Piquadro au titre de commissions - de 5 199,22 euro de la société Piquadro sur la SARL Alain Chevallier au titre de factures impayées, En tant que de besoin condamne la société Piquadro Spa à payer à la SARL Alain Chevallier la somme de 2 675 euro et condamne la SARL Alain Chevallier à payer à la société Piquadro Spa la somme de 5 199,22 euro, Ordonne la compensation à due concurrence entre les montants respectivement dus par les parties, Déboute les parties de leurs plus amples demandes, Condamne la société Piquadro Spa à payer à la SARL Alain Chevallier la somme de 10 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Piquadro Spa aux dépens d'appel, Autorise la SCP Autier, avoué, à recouvrer directement les dépens d'appel conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.