CA Nîmes, 2e ch. com. B, 27 octobre 2011, n° 09-05207
NÎMES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Grisez
Défendeur :
System Log (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Filhouse
Conseillers :
MM. Bertrand, Gagnaux
Avoués :
SCP Pomies-Richaud-Vajou, SCP Curat Jarricot
Avocats :
SCP Thevenet-Tour-Laville, Me Fabregat
Vu le jugement rendu le 31/01/2007 par le Tribunal de commerce de Montpellier qui a essentiellement dit irrecevable l'agent commercial Eric Grisez pour l'ensemble de ses prétentions contre son ex-employeur la SAS System Log en l'état de la tardiveté de son action.
Vu l'arrêt rendu le 6/05/2008 par la Cour d'appel de Montpellier disant essentiellement l'action de Eric Grisez non tardive et recevable, en invitant en conséquence les parties à s'expliquer ultérieurement au fond.
Vu l'arrêt rendu le 26/09/2009 par la Chambre commerciale de la Cour de cassation ayant cassé l'arrêt de la Cour d'appel de Montpellier.
Vu la saisine sur renvoi de la Cour d'appel de Nîmes par déclaration au greffe en date du 14/12/2009 de Eric Grisez.
Vu les dernières conclusions déposées le 9/04/2010 au greffe de la mise en état par Eric Grisez - appelant - et le bordereau de pièces qui y est annexé en lequel il reprend ses demandes initiales en sollicitant la somme de 50 000 euro de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat d'agent commercial, outre 12 000 euro au titre de l'indemnité de préavis et la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions déposées le 20/05/2010 au greffe de la mise en état par la SAS System Log et le bordereau de pièces qui y est annexé, demandant de débouter Eric Grisez de l'ensemble de ses prétentions et de le condamner à lui payer la somme de 12 000 euro pour procédure abusive et la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 14/01/2011
Sur ce
Attendu qu'il ne ressort pas des pièces de la procédure d'irrecevabilité de la saisine de la cour après l'arrêt rendu par la Cour de cassation qu'elle devrait relever d'office, et les parties n'élèvent aucun discussion sur ce point ;
Attendu qu'il convient de rappeler l'historique du litige
Rappel des faits et de la procédure antérieure
Eric Grisez était lié à la société System Log par un contrat d'agent commercial en date du 1er juillet 2001 qu'il a rompu le 30 mars 2003 ;
Se prétendant salarié, il a saisi le Conseil de prud'hommes de Montpellier d'une demande en paiement d'indemnités et de dommages-intérêts qui a été rejetée par un jugement du 6 juin 2005 au motif que le contentieux relevait de la compétence du tribunal de commerce ;
Le 6 juillet 2006, il a assigné la société System Log devant le Tribunal de commerce de Montpellier qui, constatant que le délai d'un an prévu par l'article L. 134-12 du Code de commerce était expiré, a déclaré la demande irrecevable par jugement du 31 janvier 2007 ;
Par arrêt du 6 mai 2008, la Cour d'appel de Montpellier a infirmé la décision et statuant à nouveau a dit que M. Grisez n'encourait pas la déchéance annuelle de l'article L. 134-12 du Code de commerce, a ordonné la réouverture des débats sur le fond et a invité les parties à démontrer le mode de prospection habituel en vigueur chez la société System Log et à totaliser les commissions perçues par M. Grisez avant son départ.
Sur pourvoi de la société est intervenu l'arrêt de la Cour de cassation qui a cassé la décision de la Cour d'appel de Montpellier en énonçant essentiellement
" Vu l'article L. 134-12 du Code de commerce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Grisez après cessation le 30 mars 2004 du contrat d'agent commercial qui le liait à la société System Log, l'a assignée le 10 juin 2004 en paiement d'indemnités et dommages-intérêts devant le conseil de prud'hommes ; que sa demande ayant été déclarée irrecevable pour incompétence, il a assigné la société System Log devant le tribunal de commerce ;
Attendu que pour dire que M. Grisez n'encourait pas la déchéance annuelle de l'article L. 134-12 du Code de commerce, l'arrêt retient que ce texte institue une déchéance et non une prescription et n'impose pas la saisine de la juridiction compétente dans le délai d'un an mais uniquement la manifestation non équivoque dans le délai de l'intention de l'agent de réclamer des indemnités ; qu'il retient encore que peu important qu'elle ait été présentée devant une juridiction incompétente sous une qualification erronée, l'assignation devant le conseil de prud'hommes valait notification de cette intention et pouvait être invoquée dans l'instance ultérieure régulièrement introduite devant le tribunal de commerce avant l'expiration du délai de prescription de droit commun ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les demandes, présentées devant le conseil de prud'hommes et fondées sur l'existence d'un prétendu contrat de travail, ne pouvaient valoir notification à la société Système Log de l'intention de M. Grisez de réclamer une indemnisation au titre de la cessation d'un contrat d'agent commercial, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; "
Attendu qu'il convient de rappeler les termes de l'article L. 134-12 du Code de commerce
" En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.
L'agent commercial perd le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits.
Les ayants droit de l'agent commercial bénéficient également du droit à réparation lorsque la cessation du contrat est due au décès de l'agent ".
Attendu que la société System Log s'en tient pour sa part à la thèse de la déchéance prévue à l'article L. 134-12 du Code de commerce, dès lors que les demandes présentées devant le conseil de prud'hommes, et fondées sur l'existence d'un prétendu contrat de travail, ne pouvaient valoir notification à la société System Log de l'intention de M. Grisez de réclamer une indemnisation au titre de la cessation d'un contrat d'agent commercial.
Attendu que Eric Grisez persiste pour sa part à soutenir qu'en saisissant le conseil des prud'hommes le 4/06/2004 (3 mois environ après son licenciement) il a satisfait aux obligations de l'article L. 134-12 précité, d'autant que son contrat de travail n'indiquait pas la juridiction compétente en cas de litige et qu'il ne peut être tenu pour responsable du délai du conseil des prud'hommes avant de rendre la décision ;
Mais attendu qu'en tout état de cause le délai d'un an de l'article L. 134-12 du Code de commerce est un délai de déchéance et non un délai de prescription ; qu'à ce titre il n'est pas susceptible d'interruption ;
Que la saisine par Eric Grisez du conseil des prud'hommes n'était pas interruptif du délai d'autant qu'il a régularisé appel de la décision du Conseil des prud'hommes avant de se désister ce qui a retardé encore surabondamment la saisine de la juridiction utile ;
Attendu que la saisine du Conseil des prud'hommes vaut de toute façon d'autant moins invocation implicite de ses droits comme agent commercial que bien au contraire Eric Grisez avait saisi la juridiction sociale précisément en prétendant ne pas être agent commercial mais avoir la qualité de salarié, sollicitant la requalification en ce sens de son contrat;
Attendu que pour la demande de préavis Eric Grisez reprend sa prétention de 2 mois sur la base de 6 000 euro mois, comme il l'avait fait aussi devant le conseil des prud'hommes, mais sans justifier du principe ni du quantum de cette prétention, dès lorsqu'il est à l'initiative de la rupture du contrat ;
Attendu qu'il y a donc lieu, en confirmant le jugement rendu le 31/01/2007 par le Tribunal de commerce de Montpellier, de le déclarer irrecevable en ses prétentions ;
Attendu que la SAS System Log ne justifie pas de sa demande de dommages et intérêts, étant rappelé notamment que Eric Grisez avait obtenu satisfaction de la Cour d'appel de Montpellier ;
Attendu que par contre mais à seule hauteur de 1 000 euro la SAS System Log est recevable et bien fondée en sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, sur renvoi après cassation, Confirme le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Montpellier déclarant Eric Grisez irrecevable en l'ensemble de ses prétentions ; Déboute la SAS System Log de sa demande de dommages et intérêts, Condamne Eric Grisez aux dépens d'appel qui comprendront ceux de la décision cassée conformément aux dispositions de l'article 639 du Code de procédure civile ; Dit que l'avoué de SAS System Log, la SCP Curat-Jarricot, pourra recouvrer contre la partie ci dessus condamnée ceux des dépens dont il aura fait l'avance sans en recevoir provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.