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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 7, 25 octobre 2011, n° 09-14496

PARIS

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Syndicat National des Fabricants d'isolants en laines minérales manufacturées

Défendeur :

Président de l'Autorité de la concurrence

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Remenieras

Avoué :

Me Teytaud

Avocat :

Mes Ferla

CA Paris n° 09-14496

25 octobre 2011

Vu l'ordonnance du magistrat délégué du 4 janvier 2011, à laquelle il convient de se référer pour plus ample informé sur l'exposé des faits et de la procédure qui, après avoir constaté que le Syndicat National des Fabricants d'isolants en laines minérales manufacturées (le FILMM) n'avait pas "articulé des griefs spécifiques aux conditions de la visite du 11 juin 2009" l'a, en conséquence, invité "à conclure, s'il l'estime utile (...) pour l'audience du 8 mars 2011" ;

Vu les conclusions déposées par le FILMM le 7 janvier 2011, le 23 février 2011, le 11 mars 2011 et le 25 mai 2011 et soutenues à l'audience du 28 juin 2011 ;

Vu les observations de l'Autorité de la concurrence déposées le 27 janvier 2011, le 23 mars 2011, le 20 juin 2011 et soutenues à l'audience du 28 juin 2011 ;

Vu la note en délibéré déposée le 2 septembre 2011 par le FILMM ;

Vu la note en délibéré déposée le 17 octobre 2011 par l'Autorité de la concurrence ;

Vu la nouvelle note en délibéré déposée le 21 octobre 2011 par le FILMM ;

Vu le courrier du 21 octobre 2011 de Mme la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence demandant au magistrat délégué de déclarer cette dernière note irrecevable ;

Vu le courrier en réponse du FILMM du 21 octobre 2011 ;

Sur ce,

Attendu que le FILMM demande au magistrat délégué :

- à titre liminaire, d'ordonner une mesure d'expertise afin de déterminer s'il était possible de procéder à un saisie sélective des messages électroniques contenus dans les messageries électroniques des membres du personnel du FILMM, sans compromettre l'authenticité de ceux-ci, et, à défaut, de surseoir à statuer dans l'attente des expertises ordonnées par ordonnances du 2 novembre 2010 et du 4 janvier 2011 ;

- à titre principal, d'annuler l'ensemble des saisies en ce qu'elles ont été effectuées sans tenir compte des réserves explicites exprimées par l'occupant des lieux sur la présence de documents concernant une procédure judiciaire en cours ainsi que de documents couverts par le secret des échanges avocat-client ;

- à titre subsidiaire, s'agissant en premier lieu de pièces étrangères à l'objet de l'enquête,

* de déclarer irrégulières comme ne relevant pas de l'objet d'une enquête et violant les droits de la défense, et en conséquence d'annuler les saisies de l'ensemble des documents ayant trait au "procès Actis" ;

* de déclarer irrégulières et d'annuler les saisies de l'ensemble des informations et documents contenus dans le scellé n° 14 ne se rapportant pas aux faits recherchés dans le cadre de l'enquête, car relevant soit d'un secteur totalement étranger au secteur de l'isolation thermique défini par l'ordonnance, soit du domaine personnel et privé de la personne concernée par la saisie ;

* à défaut, de constater et prendre acte de l'accord de l'Autorité pour restituer par destruction l'ensemble des informations et documents contenus dans le fichier pst contenus dans le scellé n° 14 ;

- s'agissant en second lieu des pièces couvertes par le secret des échanges avocat-client :

* de déclarer irrégulières et d'annuler les saisies des documents émanant de ou adressés, à titre principal ou en copie, à des avocats conseils du FILMM ainsi que des documents transférant des documents établis par un des avocats du FILMM ou reprenant les propos d'un des avocats du FILMM ;

* à défaut, de constater et prendre acte de l'accord de l'Autorité pour restituer les documents et informations concernés ;

* en tout état de cause, d'ordonner à l'Autorité de la concurrence de lui restituer les originaux éventuels et toutes copies de ces pièces, d'ordonner la suppression de toute référence aux pièces litigieuses et, enfin, de lui interdire toute utilisation ou exploitation subséquente des pièces irrégulièrement obtenues ;

Mais attendu, en premier lieu, sur le grief touchant à la saisie d'informations et de documents étrangers à l'objet de l'enquête, qu'il suffit de constater, concernant tout d'abord la procédure judiciaire opposant le FILMM à la société Actis, qu'alors que le FILMM était suspecté d'entente, l'ordonnance d'autorisation fait seulement état, au titre de l'examen des présomptions de pratiques anticoncurrentielles, des étapes des actions judiciaires engagées par le FILMM à l'encontre de la société Actis devant la juridiction commerciale de Versailles et que les agissements du FILMM ont été examinés à la lumière des comportements des autres acteurs du secteur économique concerné ; que, comme le fait observer l'Autorité dans ses écritures à partir d'une série d'exemples précis - (Scellé 2, cotes 167-170, 185-186, 191-194 ; scellé 4 cote 36, cote 145-149, cote 150-158...) - les documents saisis ne concernaient pas uniquement la procédure judiciaire ; qu'au surplus, il ne peut être reproché à l'Autorité de la concurrence d'avoir procédé à une saisie en bloc des dossiers entiers relatifs à la procédure en cause, qui a duré une dizaine d'années, dès lors, d'une part, que les documents papier contestés se limitent à 270 feuillets formant 58 documents regroupés dans 10 scellés différents et, d'autre part, que, pour la partie informatique, le nombre de fichiers contesté est de 662, chiffre faible au regard des éléments présents sur les deux supports informatiques en cause, alors que chacun d'eux renferme plusieurs dizaines voire plusieurs centaines de milliers de fichiers ;

Attendu, dès lors, que, nonobstant les réserves exprimées par Mlle Lestournelle, les documents relatifs au "procès Actis" n'étant, par nature, ni exclus de l'autorisation judiciaire délivrée par le JLD ni exclus du champ d'application des articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce, la procédure de visite et saisie n'est pas entachée d'irrégularité ;

Attendu que s'agissant ensuite de la saisie d'informations et de documents concernant des activités ne relevant pas du secteur visé par l'enquête, que l'inventaire des fichiers informatiques saisis placé en annexe n° 2 du procès-verbal de visite et saisie suffit à justifier que, contrairement à ce qui est soutenu, aucun fichier intitulé "perso" n'a été saisi sur l'ordinateur de Mlle Lestournelle ; qu'en revanche, a été saisi et inventorié un fichier "Archives.pst", renfermant, une archive de messagerie électronique qui contient, outre des documents professionnels, un sous-dossier intitulé "Perso" ;

Attendu qu'il suffit de constater que, sur ce point, l'Autorité déclare que bien que ce fichier ne puisse être analysé comme ne contenant aucun message en lien avec la certification, la production et la distribution des produits de construction d'isolation thermique, elle ne s'oppose cependant pas à sa restitution par destruction ;

Attendu, en second lieu, sur la saisie d'informations et de documents couverts par le secret professionnel protégeant la correspondance entre un avocat et son client, qu'il convient de constater que l'Autorité déclare qu'elle n'est pas opposée à la restitution d'un document papier (scellé 11, pièce 1-3, compte rendu de réunion chez Maître Meffre du 25 juin 2001) qui constitue manifestement une correspondance avocat-client ; que, par ailleurs, si certaines messageries électroniques saisies contiennent des échanges entre la société Afflelou et ses avocats, force est cependant de constater que cette situation ne procède pas d'une recherche délibérée par les rapporteurs de correspondances étrangères à leur mission, mais constitue seulement le résultat, d'une part, du caractère composite du contenu des fichiers de messagerie qui comportent chacun une multitude de messages et, d'autre part, de la nécessité où se trouvaient les rapporteurs, en l'état actuel des techniques informatiques, après constatation que ces fichiers contenait bien des éléments entrant dans le champ de l'autorisation judiciaire, d'en effectuer une copie en intégralité ;

Qu'au surplus, l'appelante n'allègue, ni que les rapporteurs de l'Autorité de la concurrence auraient mis en œuvre des procédés déloyaux pour intercepter ces correspondances à l'occasion de leurs investigations, ni qu'ils auraient divulgué à des tiers, pendant les opérations critiquées ou postérieurement à celle-ci, des informations soumises au secret professionnel contenues dans les fichiers de messagerie, étant par surcroît observé que l'ordonnance du juge des libertés rappelait que les occupants des lieux ou leurs représentants pouvaient faire appel au conseil de leur choix sans que cela n'entraîne la suspension des opérations de visites et de saisie ;

Attendu, dès lors, qu'en cet état et à ce stade de la procédure, il convient seulement de constater que l'Autorité de la concurrence déclare qu'elle ne s'oppose pas à la restitution par destruction d'une série de messages et de documents dans les conditions qui seront précisées au dispositif ;

Et attendu que le magistrat délégué dispose d'élément suffisants pour statuer sans avoir recours à une mesure d'instruction et qu'a fortiori, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport de l'expert désigné par le magistrat délégué dans le cadre d'autres instances ;

Qu'il résulte de ce qui précède que le FILMM sera débouté de toutes ses demandes ;

Par ces motifs : Constate l'accord de l'Autorité de la concurrence pour procéder à la restitution, par destruction, au Syndicat National des Fabricants d'isolants en laines minérales manufacturées du fichier "Archives.pst" saisi sur l'ordinateur de Mlle Lestournelle et contenu dans le scellé n° 14 ; Constate l'accord de l'Autorité de la concurrence pour opérer : - la restitution des documents et informations listés aux pages 1 à 84 de la pièce n° 5 produite par le FILMM ; - la restitution des documents et informations listés aux pages 85 à 101 de la pièce n° 5 produite par le FILMM, - la restitution des documents et informations listés aux pages 102 à 106 à l'exception de 7 documents (scellés n° 1, cotes 14 et 15 ; scellé n° 1 cotes 165 à 167 ; scellé n° 2, cotes 119 à 128 ; scellé n° 2, cotes 141 à 149 ; scellé n° 2, cotes 191 à 194 ; scellé n° 11 cotes 16 à 19 ; scellé n° 15, fichier "07-12-03_avocat UK actis.pdf") ; Déboute, pour le surplus, le Syndicat National des Fabricants d'isolants en laines minérales manufacturées de toutes ses demandes ; Condamne le Syndicat National des Fabricants d'isolants en laines minérales manufacturées aux dépens.