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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 1 février 2012, n° 09-01753

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Top Soleil (SARL)

Défendeur :

Solisun France (SARL), Selarl Gauthier-Sohm (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Roche

Conseillers :

M. Vert, Mme Luc

Avoués :

SCP Petit Lesenechal, Me Cordeau

Avocats :

Mes Thomas Courcel, Gre

T. com. Créteil, du 20 janv. 2009

20 janvier 2009

LA COUR,

Vu le jugement en date du 20 janvier 2009 par lequel le Tribunal de commerce de Créteil a condamné, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, la société Top Soleil à payer à la société Solisun France la somme de 64 595,44 euro, assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2007, a débouté la société Solisun France du surplus de ses demandes, débouté la société Top Soleil de ses demandes tendant à voir prononcer la nullité et la caducité du contrat de franchise, a constaté la résiliation anticipée du contrat de franchise et ordonné à la société Top Soleil de déposer les enseignes et cesser d'utiliser les marques de Solisun France, condamné la société Top Soleil à payer à la société Solisun France différentes sommes (10 046,40 euro en règlement de la facture 1/57/05 du 17 décembre 2005, assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2007 ; 1 309,62 euro au titre de la facture n° 185707 du 2 février 2007 et 6 153,42 euro au titre de redevances qui auraient dû être perçues de février 2007 à mars 2011), ordonné la capitalisation des intérêts, débouté la société Top Soleil de sa demande de dommages-intérêts, et, enfin, condamné cette société à payer à la société Solisun France la somme de 4 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu l'appel interjeté le 26 janvier 2009 par la société Top Soleil et ses conclusions enregistrées le 25 mai 2009 et tendant à faire infirmer le jugement entrepris, dire et juger nul et caduc le contrat de franchise, constater que la majeure partie de factures produites ne correspondent à aucune prestation, débouter en conséquence la société Solisun France de l'ensemble de ses prétentions, ordonner la mainlevée du nantissement du fonds de commerce, condamner la société Solisun France à lui payer la somme de 50 000 euro à titre de dommages-intérêts et celle de 7 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions de la société Gauthier-Sohm, ès qualités de liquidateur de la société Solisun France, enregistrées le 8 novembre 2011, tendant à faire confirmer le jugement entrepris, y ajoutant, condamner la société Top Soleil à lui payer la somme de 82 431,65 euro, avec intérêts au taux légal à compter du 26 juin 2007, ordonner la capitalisation des intérêts, constater la résiliation anticipée du contrat, faire injonction à la société Top Soleil, sous astreinte de 5 000 euro par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, de tout usage des signes distinctifs Solisun, au besoin, faire constater les infractions par voie d'huissier, à la charge de la société Top Soleil, condamner la société Top Soleil à lui payer, ès qualités, la somme de 6 153,42 euro au titre de l'indemnité contractuelle de l'article 22 du contrat, outre celle de 4 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

SUR CE,

Considérant qu'il résulte de l'instruction les faits suivants :

Dans le cadre de son activité de franchiseur et d'institut de bronzage, la société Solisun France a signé, en mars 2005, avec la société Top Soleil, un devis pour la fourniture d'appareils et produits de bronzage ainsi que des prestations d'installation et travaux d'aménagement d'un institut, pour un montant de 104 253 euro HT. Le 11 décembre 2005, les deux sociétés ont signé un contrat de franchise d'une durée de cinq années concernant un magasin situé dans le centre commercial de Provins, le droit d'entrée du franchisé s'élevant à 8 400 euro HT. Après avoir réglé une somme globale de 57 639,34 euro, la société Top Soleil n'a plus donné suite aux mises en demeure envoyées par la société Solisun France. Celle-ci a résilié le contrat de franchise, par lettre recommandée du 10 septembre 2007, après l'envoi d'une première lettre recommandée du 26 juin 2007 mettant la société Top Soleil en demeure de respecter ses obligations contractuelles. Souhaitant récupérer les sommes dues, la société Solisun France a, par acte du 11 octobre 2007 fait assigner la société Top Soleil devant le Tribunal de commerce de Créteil afin de voir, sous le régime de l'exécution provisoire, condamner cette société au paiement des sommes réclamées. La société Top Soleil conteste certaines factures, exposant que les travaux n'auraient pas été exécutés. Elle prétend également que la société Solisun France ne lui aurait pas communiqué le document d'information précontractuelle (ci-après DIP) et sollicite l'annulation du contrat de franchise.

Par le jugement entrepris, le Tribunal de commerce de Créteil a fait droit aux demandes du franchiseur, concernant la majorité des factures, constaté la résiliation du contrat de franchise aux torts du franchisé et rejeté les demandes du franchisé. Par jugement du Tribunal de commerce de Créteil du 22 avril 2009, la société Solisun France a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, la société Gauthier-Sohm ayant été désigné liquidateur.

Considérant qu'il convient de constater la reprise de l'instance par la société Gauthier-Sohm, ès qualités de liquidateur de la société Solisun France ;

Sur la demande en paiement des factures

Considérant que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; que la preuve est libre en droit commercial ;

Considérant en l'espèce que si la société Top Soleil conteste être redevable de toutes les sommes dont le paiement lui est demandé par la société Solisun France, cette dernière verse aux débats un devis n° 13/05 en date du 5 mars 2005, signé par le gérant de la société Top Soleil et d'un montant total de 124 686,58 euro, prévoyant la fourniture de cinq machines à bronzer, des prestations d'installation et de transport de ces machines, d'une centrale de paiement, des prestations d'aménagement intérieur ainsi que des installations électriques ; que la société Solisun produit les factures correspondant aux marchandises et prestations commandées représentant un total de 122 234,78 euro TTC, se décomposant de la manière suivante : facture n° 0118/05 du 26 juin 2005 de 65 732,16 euro pour la fourniture de machines ; facture n°3/57/06 du 1er mars 2006 de 7 774 euro pour les travaux d'électricité ; facture n° 5/57/06 du 4 avril 2006 d'un montant de 20 676,44 euro au titre du central de paiement ; facture n° 6/57/06 du 4 avril 2006 de 28 052,18 euro pour les travaux d'aménagement intérieur ;

Considérant que la société Solisun France ne verse aux débats ni bon de commande ni bon de livraison signé par la société Top Soleil concernant la facture n° 2/57/06 du 1er mars 2006, d'un montant de 3 641,82 euro relative à la fourniture de tubes UV pour machines à bronzer et concernant la facture de mars 2006 relative à des produits cosmétiques d'un montant de 2 838,03 euro ; qu'ainsi, les premiers juges ont à bon droit estimé que, faute de telles preuves de commandes émanant de la société Top Soleil, il n'y avait pas lieu de mettre les sommes correspondantes à sa charge ; qu'ils ont en revanche, par des motifs circonstanciés et minutieux que la cour adopte, jugé les demandes de la société Solisun France, afférentes aux machines à bronzer, aux travaux d'aménagement intérieur et d'électricité et du central de paiement, fondées; qu'en effet, la société Top Soleil qui ne conteste pas avoir reçu les machines à bronzer, ne démontre pas qu'elles n'étaient pas conformes à leur usage ; que le constat, effectué par Maître Di Pieri le 9 octobre 2007 dans les locaux de la société Top Soleil, atteste l'installation effective du terminal de paiement fourni par la société Solisun France ainsi que la réalisation des travaux d'aménagement intérieur et d'électricité, corroborée par l'attestation de M. Deher ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Top Soleil à payer la somme de 64 595,44 euro (soit un total de 122 234,78 euro moins les règlements déjà effectués à hauteur de 57 639,34 euro), ladite somme étant majorée des intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2007, date de la mise en demeure, et en ce qu'il a débouté la société Solisun France du surplus de ses demandes en paiement ; que le jugement sera infirmé en ce qu'il a attribué la somme de 64 595,44 euro à la société Solisun France, à laquelle sera substituée la société Gauthier-Sohm, liquidateur de l'entreprise ;

Sur la demande d'annulation du contrat de franchise pour non-respect de l'obligation précontractuelle d'information

Considérant que si la société Top Soleil prétend que le DIP ne lui aurait pas été remis dans les délais requis, qu'elle aurait été trompée sur la qualité de la société Solisun France, qui ne serait pas à l'origine de la marque, d'origine hongroise, ainsi que sur la taille du réseau, que le savoir-faire du franchiseur n'aurait aucune consistance et enfin qu'elle n'aurait jamais reçu la " bible " du franchisé ni la moindre formation de la part du franchiseur, il ressort des pièces du dossier que le DIP, conforme aux prescriptions de l'article L. 330-3 du Code de commerce, lui a été remis le 15 novembre 2005, selon une attestation versée aux débats ; que quatre salariés de la société Top Soleil ont reçu une formation de la société Thalgo, formateur agréé, selon une attestation de cette société du 21 février 2008 ; que la société Top Soleil ne démontre pas davantage la consistance des autres griefs imputés à la société Solisun France et encore moins en quoi ces griefs, s'ils étaient constitués, auraient pu vicier son consentement ; que le jugement entrepris sera donc également confirmé en ce qu'il a débouté la société appelante de ses demandes d'annulation du contrat de franchise ;

Sur la clause de caducité

Considérant que si la société Top Soleil prétend que la clause prévue à l'article 2 du contrat, selon laquelle " le franchisé s'engage à ouvrir son institut de bronzage à l'enseigne Solisun au plus tard dans un délai maximal de 2 mois à compter de la signature (du contrat) et ce après avoir impérativement suivi la formation initiale telle qu'indiquée ci-après. Passée cette date, le présent contrat sera caduc, nul et non avenu, et ceci, sans indemnité ", doit être appliquée, le magasin ayant ouvert en juin 2006 et le contrat ayant été signé en décembre 2005, plusieurs attestations régulières versées aux débats émanant de clients de la société Top Soleil ou de la société Comser témoignent de l'ouverture du magasin dès février 2006 ; qu'ainsi, sans avoir besoin d'apprécier le jeu de cette clause, il y a lieu de l'écarter, le moyen manquant en fait ;

Sur la résiliation du contrat de franchise et les sommes dues

Considérant que la société Solisun France a résilié le contrat le 10 septembre 2007 à cause du manquement du franchisé à son obligation d'approvisionnement exclusif prévue aux articles 12 et suivants du contrat ; que l'article 22 stipule qu'à la suite d'une mise en demeure restée infructueuse pendant trente jours, la résiliation anticipée du contrat peut être prononcée par lettre recommandée avec accusé de réception ; que la société Solisun France a respecté ces formalités, ayant adressé la mise en demeure à la société Top Soleil le 26 juin 2007 et résilié le contrat le 10 septembre 2007 par lettres recommandées avec accusé de réception ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Top Soleil à payer la somme de 10 046,40 euro au titre du droit d'entrée prévu à l'article 15.1 du contrat, dont la société Solisun France atteste l'absence de paiement de la part de la société Top Soleil, ladite somme étant assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2007, outre celle de 6 153, 42 euro au titre de l'indemnité contractuelle prévue à l'article 22 du contrat (redevances dues de février 2007 à mars 2011, terme du contrat) et enfin celle de 1 309,62 euro au titre d'arriérés de redevances de mars 2006 à janvier 2007 ; que le jugement sera infirmé en ce qu'il a attribué ces sommes à la société Solisun France, à laquelle sera substituée la société Gauthier-Sohm, liquidateur de l'entreprise ;

Sur la demande d'injonction de ne plus utiliser les marques et signes distinctifs

Considérant qu'aucun élément versé aux débats n'atteste que la société Top Soleil persisterait à exploiter le fonds de commerce sous l'enseigne Solisun France, celle-ci ayant été enlevée le 17 novembre 2007, ou utiliserait les signes distinctifs du franchiseur; qu'ainsi, il n'y a plus lieu d'enjoindre à cette société de cesser cette exploitation ainsi que toute publicité ou inscription indiquant sa qualité de franchisé de la marque Solisun, ces demandes étant devenues sans objet ; que le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point;

Sur la demande en mainlevée du nantissement

Considérant qu'il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Top Soleil de sa demande de mainlevée du nantissement du fonds de commerce, aucune preuve du paiement des sommes litigieuses n'étant versée aux débats, malgré l'exécution provisoire ordonnée en première instance ;

Sur la demande de dommages intérêts de la société Top Soleil

Considérant que la société Top Soleil succombant, elle sera déboutée de sa demande de dommages intérêts ;

Par ces motifs, Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a enjoint à la société Top Soleil de cesser d'utiliser l'enseigne Solisun et d'utiliser cette marque et signes distinctifs et en ce qu'il a condamné la société Top Soleil à payer les sommes ci-dessus rappelées à la société Solisun France, L'infirme sur ces points, et statuant à nouveau, Condamne la société Top Soleil à payer les sommes de 64 595,44 euro, 10 046,40 euro, 6 153,42 euro et 1 309, 82 euro, lesdites sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2007, à la SARL Gauthier-Sohm, ès qualités de liquidateur de la société Solisun, France, les intérêts échus étant capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du Code civil, y ajoutant, Déboute les parties du surplus de leurs prétentions respectives, Condamne la société Top Soleil aux dépens exposés en appel avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile, condamne la société Top Soleil à payer à la société Gauthier-Sohm, ès qualités de liquidateur de la société Solisun France, la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.