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Décisions

ADLC, 13 décembre 2011, n° 11-DCC-187

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle exclusif de la société Quartier Français Spiritueux par la Compagnie Financière Européenne de Prise de Participation

ADLC n° 11-DCC-187

13 décembre 2011

L'Autorité de la concurrence (section IB),

Vu le dossier de notification déposé à l'Autorité de la concurrence le 17 mars 2011, relatif à la prise de contrôle exclusif de la société Quartier Français Spiritueux, formalisée par un contrat d'achat et de vente d'action en date du 3 février 2011 ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu la décision de l'Autorité de la concurrence n° 11-DEX-02 du 5 juillet 2011 d'ouverture d'un examen approfondi en application du dernier alinéa du III de l'article L. 430-5 du Code de commerce ; Vu les observations présentées par les représentants la Compagnie Financière Européenne de Prise de Participation ("Cofepp") en date du 10 octobre 2011 ; Vu les décisions de suspension des délais de la rapporteure générale des 28 juillet et 30 août 2011 et du Président de l'Autorité de la concurrence du 15 novembre 2011 en application du II de l'article L. 430-7 du Code de commerce ; Vu les engagements présentés les 29 septembre, 7 octobre, 13 octobre et 2 décembre 2011 par la partie notifiante ; Vu les autres pièces du dossier ; Les rapporteurs, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du Gouvernement, et les représentants de la Cofepp entendus au cours de la séance du 21 octobre 2011 ; Les représentants des groupes Valois, Picard Vins et Spiritueux, Système U et Intermarché entendus sur le fondement des dispositions de l'article L. 430-6, alinéa 3 du Code de commerce ; Adopte la décision suivante :

I. Présentation des parties et de l'opération

1. La Cofepp est une holding familiale à la tête d'un groupe de sociétés produisant et distribuant des spiritueux et, dans une moindre mesure, des vins, sirops et jus de fruits. Le groupe est structuré autour des deux filiales principales, les sociétés La Martiniquaise SVS et Bardinet.

2. La Cofepp détient de nombreuses marques de spiritueux : Negrita, Old Nick, Dillon, Depaz et Saint James (rhum et punchs) ; Label 5, Gold River, Sir Edwards, Glen Turner, Bowmore, Sam Barton et Old Virginia (whiskies) ; L'Héritier Guyot (liqueurs) ; Tiscaz (tequila) ; Cruz (porto) ; Floranis, Duval et Casanis (anisés) ; Gibson's (gin) ; Poliakov (vodka) ; Busnel, Sylvain et Anée (calvados) ; Aveze (amers) ; Dauré, Valauria, Manor, Rapha et Olympio (vins doux naturels) ; Saint-Raphaël et Gancia (apéritifs à base de vins et vermouths) ; et Sport (sirops).

3. La Cofepp, via La Martiniquaise et les sociétés CRNC, Peureux et Slaur, est également active dans la production et la fourniture de diverses boissons spiritueuses et apéritives pour les enseignes de la grande distribution et du hard discount. Elle produit en effet des spiritueux et d'autres boissons apéritives destinés à être commercialisés par les distributeurs sous marque de distributeurs ("MDD"), de hard discounteurs ("MHD") et sous marque dite de premier prix ("MPP"). La Cofepp dispose en France de plusieurs sites de production : La Martiniquaise, situé à Charenton-le-Pont (Val de Marne) produisant différents types de spiritueux, ainsi que des vins doux naturels et des apéritifs sans alcool ; Slaur/Sardet, situé au Havre produisant des spiritueux, des punchs ainsi que des sirops ; Sedra, situé à Belleville-sur-Saône (Rhône), produisant des vins doux naturels et des apéritifs légers ; ainsi que le site de Bardinet, situé à Bordeaux, produisant du rhum, du whisky et des liqueurs. Elle dispose en outre d'un site de production de porto situé au Portugal et d'un site de production de scotch whisky situé en Ecosse. En 2010, la Cofepp a ainsi commercialisé près de [...] millions de bouteilles dont environ [...] millions ont été vendues sur le marché français. Sur les [...] millions de bouteilles vendues en France (représentant un chiffre d'affaires d'environ [...] millions d'euro), environ [...] millions ont été produites pour le compte de distributeurs (soit un chiffre d'affaires d'environ [...] millions d'euro).

4. Quartier Français Spiritueux ("QFS") est contrôlée par la société Groupe Quartier Français, filiale à 100 % de l'Union de coopérative sucrière Tereos (1). QFS est principalement active dans la production et la commercialisation de rhum et punch, d'apéritifs sans alcool ainsi que de divers spiritueux et autres boissons apéritives vendus sous MDD, MHD et MPP. En matière de rhum et punch ainsi que d'apéritifs sans alcool, QFS détient les marques suivantes : Trois Rivières, Rivière du Mât, Charrette, Duquesne, la Mauny et Savanna (rhums et punchs) ; Mister Cocktail/Creole, Palermo, D'Artigny, Venezzio et Blancart (apéritifs sans alcool). Hormis ces marques, QFS ne commercialise en métropole qu'un autre spiritueux sous marque propre, le whisky Hunting Lodge. Par ailleurs, QFS produit pour les enseignes de la grande distribution et de hard discount du rhum, du whisky, de la vodka, de la téquila, du gin, des vins doux naturels et des liqueurs destinés à être vendus sous MDD, MHD et MPP. QFS dispose de deux sites de production en France pour cette activité : celui de Fauconnier, situé à Marconne (Pas-de-Calais), produisant différents types de spiritueux et autres boissons apéritives et celui de Bouguet Pau, situé à Vichy, spécialisé dans la production d'apéritifs sans alcool. En 2010, QFS a ainsi commercialisé environ [...] millions de bouteilles dont environ [...] millions ont été vendues sur le marché français. Sur les [...] millions de bouteilles vendues en France (représentant un chiffre d'affaires d'environ [...] millions d'euro), environ [...] millions ont été produites pour le compte de distributeurs (soit un chiffre d'affaires d'environ [...] millions d'euro).

5. La Cofepp s'est engagée à acquérir la totalité du capital de QFS par un contrat d'achat et de vente d'actions en date du 3 février 2011. En conséquence, la présente opération constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.

6. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 150 millions d'euro (La Cofepp : 810 millions d'euro en 2009 ; QFS : 165,8 millions d'euro pour le même exercice). La Cofepp et QFS réalisent chacune, en France, un chiffre d'affaires supérieur à 50 millions d'euro (La Cofepp : [...] millions d'euro en 2009 ; QFS : [...] millions d'euro pour le même exercice). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce, relatives à la concentration économique.

II. Les marchés concernés

7. Les parties sont principalement actives dans le secteur des spiritueux et autres boissons apéritives. Elles commercialisent également des sirops et du champagne. Toutefois, en matière de sirop, elles ne sont pas présentes dans les mêmes zones géographiques, puisque QFS commercialise des sirops uniquement à La Réunion, où la Cofepp est absente. En matière de champagne, leur activité se limite à la distribution de produits de tiers dans les DOM, QFS étant présente à La Réunion et à la Martinique, tandis que la Cofepp est uniquement présente en Martinique. Toutefois, l'opération n'aura qu'un impact limité sur le marché martiniquais du champagne, compte tenu des parts de marché limitées de QFS (2).

A. MARCHÉS DE PRODUITS

1. SEGMENTATION SELON LE TYPE DE SPIRITUEUX ET DE BOISSONS APÉRITIVES

8. Les autorités de concurrence communautaire (3) et nationale (4) considèrent que chaque type de spiritueux (gin, rhum, vodka, téquila, anisés, amers, liqueurs, cognac/armagnac et autres eaux-de-vie) constitue un marché pertinent en raison de la faible substituabilité entre les alcools due aux différences de goût ainsi qu'à l'existence de caractéristiques propres à chaque spiritueux. La partie notifiante estime qu'une telle segmentation ne reflète pas les comportements des consommateurs mais n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause la pratique décisionnelle antérieure. Il convient donc d'examiner les marchés dans lesquels les parties commercialisent simultanément leurs produits, à savoir les marchés du rhum, des liqueurs, du whisky, du gin, de la téquila, de la vodka (5) et d'autres eaux-de-vie (6). Les parties commercialisent également du punch, des vins doux naturels et des apéritifs sans alcools.

a) Le rhum

9. Le rhum est une eau-de-vie issue de la canne à sucre ou de sous-produits de l'industrie sucrière à base de canne à sucre tels que la mélasse. Le rhum peut se définir comme "la boisson spiritueuse obtenue exclusivement par fermentation alcoolique et distillation soit des mélasses ou des sirops provenant de la fabrication du sucre de canne, soit du jus de la canne à sucre lui-même, distillée à moins de 96 % vol, de telle sorte que le produit de la distillation présente, d'une manière perceptible, les caractères organoleptiques spécifiques du rhum" (7). Son degré alcoométrique minimal est de 37,5 %.

10. Le rhum est fabriqué dans les différentes zones de production de cannes à sucre dans le monde : les Antilles (notamment Cuba, Porto Rico, Martinique, Guadeloupe, Jamaïque, Barbade et République Dominicaine), les îles de l'Océan Indien (Mascareignes avec Réunion et Maurice ainsi qu'à Madagascar), l'Amérique centrale et l'Amérique du Sud (Guyane et Brésil notamment). Toutefois, le rhum vendu en France est à près de 90 % issu des départements d'Outre-Mer ("DOM") de Martinique, Guadeloupe, Guyane française et La Réunion.

11. Il existe deux grands types de rhum sur le marché français, qui diffèrent en termes de matière première utilisée et de processus de production. Le premier type est le rhum agricole (ou "rhum de distillerie"), résultat de la fermentation et de la distillation du jus de canne à sucre (également appelé "vesou"). Le rhum agricole est généralement titré à 40, 50 ou 55°. La réduction du degré d'alcool s'effectue avec de l'eau distillée ou bien avec de l'eau de source. Le rhum agricole peut être blanc (sans vieillissement, seulement un repos de trois mois), paille (vieillissement de 12 à 18 mois en foudres (8) de chêne), ambré (vieillissement de 18 à 24 mois en foudres de chêne) ou vieux (plus de trois ans de vieillissement en fûts de chêne). Le rhum agricole est principalement distillé à la Martinique (qui bénéficie d'une appellation d'origine contrôlée pour son rhum agricole (9)) et en Guadeloupe.

12. Le second type de rhum est dit "non-agricole" (ou "rhum de sucrerie") et est fabriqué par des distilleries à partir des mélasses provenant des sucreries de canne (10). Les mélasses sont mises à fermenter avec des levures. Cette fermentation donne un jus alcoolique qui titre de 5° à 6°. Ensuite, la distillation s'effectue dans des colonnes identiques à celles utilisées pour le rhum agricole. Le rhum de sucrerie peut être consommé jeune ou vieilli en fût.

Le système de contingents de rhum des DOM

13. Les rhums des DOM, qui représentent près de 90 % de la consommation de rhum en France contre 23 % dans l'ensemble de l'Union européenne, bénéficient d'une fiscalité dérogatoire par rapport aux autres spiritueux et aux rhums issus des pays tiers.

14. La décision du Conseil de l'Union Européenne en date du 9 octobre 2007 (11) permet en effet à la France d'accorder au rhum produit dans les DOM et vendu sur le territoire métropolitain un taux réduit d'accise qui ne peut être inférieur de plus de 50 % au taux d'accise national normal sur l'alcool (12). Le taux d'accise réduit applicable au rhum des DOM est de 859,24 euro par hectolitre d'alcool pur (13) contre 1 514,47 euro pour le taux normal applicable aux spiritueux. Ce taux d'accise réduit est accordé dans la limite d'un contingent annuel de 108 000 hectolitres d'alcool pur ("hap") pour l'ensemble des rhums des DOM ("le contingent fiscal"), et pour un rhum dont le degré alcoométrique minimal doit être de 40 % (14). Tous les rhums commercialisés en métropole au-delà du contingent fiscal sont soumis à la fiscalité normale.

15. Ce système dérogatoire a pour objet de soutenir la filière canne-sucre-rhum, qui dégage dans les DOM un volume annuel de chiffre d'affaires de 25 millions d'euro et assure environ 40 000 emplois, dont 22 000 directs, et constitue, avec la banane, la seule activité exportatrice significative des DOM. Compte tenu de la relative étroitesse des marchés locaux et du manque de compétitivité des rhums des DOM sur les marchés mondiaux dû à des coûts de main-d'œuvre et des charges d'exploitation supérieures, les distilleries des DOM ne peuvent maintenir leurs activités que si elles bénéficient d'un accès suffisant au marché de la France métropolitaine, qui constitue le débouché essentiel (plus de 50 %) de leur production rhumière (15).

16. La dérogation est accordée jusqu'au 31 décembre 2012, sous réserve pour la France d'établir un rapport intermédiaire à déposer avant le 30 juin 2010 permettant à la Commission Européenne d'évaluer la persistance des raisons ayant justifié l'octroi du taux réduit et, le cas échéant, la nécessité d'ajuster le contingent compte tenu de l'évolution du marché (16). Le 29 juin 2010, la France a déposé ce rapport dans lequel est intégrée une demande d'augmentation du contingent de 17 000 hap compte tenu de la hausse de la consommation de rhum en métropole (17).

17. Les responsables de la Direction Générale à l'Outre-Mer ("DéGéOM") et de l'administration des douanes ont confirmé que la France était en négociation avec la Commission Européenne afin de reconduire le système des contingents jusqu'au 31 décembre 2013, avec une réduction similaire du taux normal d'accise et pour un contingent fiscal supplémentaire de 12 000 hap (avec effet rétroactif sur 2011). Une décision en ce sens pourrait être adoptée en janvier 2012 (18).

Les modalités d'attribution du contingent fiscal : le contingent économique

18. Les producteurs de rhum des DOM peuvent donc mettre sur le marché un volume de rhum à fiscalité réduite, ce qui explique largement l'importance du rhum des DOM dans la consommation métropolitaine, mais dans la limite d'un contingent annuel à répartir entre les distillateurs. L'attribution des contingents se fait par arrêté interministériel pour une période de deux ou trois ans après consultation des différents opérateurs de la filière (19). En son état actuel, le contingent fiscal de 108 000 hap a été réparti pour une durée de deux ans entre les différents producteurs ("les contingents économiques") en application de trois arrêtés conjoints des ministres du budget, de l'agriculture et de l'outre-mer en date du 3 février 2011. La répartition de ces contingents s'organise selon les modalités suivantes.

19. Un premier arrêté (20) détermine d'abord la répartition du contingent de 108 000 hap entre les quatre DOM producteurs, en fonction principalement du constat des exportations effectives des campagnes précédentes. En 2011, la Martinique s'est vue attribuer 49 037 hap, la Guadeloupe 37 898 hap, La Réunion 20 615 hap et la Guyane 450 hap. En outre, compte tenu de la diversité de la production de rhum en Martinique et à la Guadeloupe, leur contingent respectif est subdivisé en deux catégories ou sous-contingents, l'un pour le rhum agricole et l'autre pour le rhum non-agricole. Le sous-contingent "rhum agricole" est plus important que le sous-contingent "rhum non-agricole" pour la Martinique et inversement pour la Guadeloupe. Le contingent attribué à La Réunion concerne exclusivement du rhum non-agricole et celui attribué à la Guyane exclusivement du rhum agricole.

20. Un deuxième arrêté (21) procède ensuite à la répartition intra-DOM des contingents entre les différents distillateurs, en prenant en compte principalement les références commerciales des producteurs tout en évitant la concentration d'une proportion trop importante des contingents dans les mains d'une minorité d'opérateurs économiques qui, de ce fait, domineraient la filière. Chaque distillerie attributaire d'un contingent doit gérer son contingent de manière indépendante et un contingent ne peut exister que s'il est rattaché à un établissement de distillation. En outre, les distilleries ne peuvent produire que l'une ou l'autre catégorie (rhum agricole ou non-agricole) et ne peuvent exporter vers la métropole au titre du régime contingentaire que ce qu'elles produisent.

21. Un troisième arrêté (22) enfin fixe les modalités de "libération" (mise sur le marché) des contingents et rappelle que, sauf cas de force majeure, une entreprise qui n'exporte pas vers la métropole tout son contingent pendant deux années consécutives voit son contingent diminué du déficit. Celui-ci est dans ce cas reversé par arrêté aux autres opérateurs de la même catégorie, qui en font la demande, au prorata des contingents existants. Il en est de même si une entreprise ne distille pas de rhum pendant deux années consécutives, son contingent étant dans ce cas réparti aux distilleries du département où elle est située et de même catégorie. Par ailleurs, le contingent n'est pas non plus reportable d'une année sur l'autre.

22. En ce qui concerne les modalités de gestion des contingents, l'article 362 du Code général des impôts prévoit que "les quantités réparties en application du présent article [les contingents de rhum] ne sont pas négociables et ne peuvent être l'objet d'aucune transaction". Il est donc interdit à un opérateur de louer, prêter ou vendre les contingents économiques qui lui sont attribués. En revanche, le transfert d'éléments d'actifs incorporels, la fusion, l'absorption, l'achat d'un fonds de commerce ou d'une marque (et d'une distillerie) peuvent entrainer le transfert des contingents économiques qui leur sont attachés par arrêté interministériel.

23. Dans l'hypothèse d'une attribution de nouveaux contingents (intervenue par exemple en 2008 à la suite de l'attribution de 18 000 hap supplémentaires par l'Union européenne), il n'apparaît pas qu'une procédure spécifique soit prévue en-dehors de la délibération du CIRT-DOM durant laquelle chacun des opérateurs exprime ses souhaits en matière d'attribution. Les opérateurs du marché soulignent toutefois que le niveau du contingent déjà détenu est un facteur pris en compte dans la nouvelle répartition (23).

24. Le système de contingents a donc pour effet de fixer un plafond à la production de chaque distillateur de rhum puisqu'au-delà du contingent économique dont sa distillerie dispose, la production est dite "hors contingent" et est donc soumise au régime fiscal normal, beaucoup moins avantageux. Par ailleurs, dans la mesure où l'attribution de nouveaux contingents se fait également en tenant compte des contingents existants, les attributaires actuels ont en théorie la possibilité de bénéficier plus facilement de contingents supplémentaires.

25. La partie notifiante a indiqué à plusieurs reprises que les attributions des contingents n'étaient pas figées mais qu'ils étaient revus annuellement par les pouvoirs publics. L'article 8 de l'arrêté du 3 février 2011 portant organisation de la campagne rhumière et des règles de redistribution du contingent prévoit en effet que "afin de prendre en considération les évolutions du marché rhumier en métropole, une révision de la répartition du contingent d'exportation peut être effectuée de manière anticipée après avis du conseil interprofessionnel du rhum traditionnel des départements d'outre-mer".

Il apparaît toutefois que cette possibilité est théorique dans la mesure où la partie notifiante ne fait pas état de situations dans laquelle elle aurait été utilisée.

26. La partie notifiante a aussi mentionné qu'il existerait, outre l'attribution de contingents, des sources alternatives d'approvisionnement pour des opérateurs désireux de se développer, à savoir acquérir du rhum en vrac auprès de petites distilleries autres que celles des parties à l'opération. Chaque année en effet, certaines petites distilleries de Guadeloupe ou de Martinique connaissent des difficultés qui les empêchent de commercialiser leurs contingents et elles seraient en mesure de mettre à disposition des volumes contingentés aux opérateurs qui souhaiteraient étendre leurs activités, dans le cadre de cessions ponctuelles.

27. Il apparaît cependant qu'en pratique les distilleries qui n'ont pas la possibilité, pour des raisons de force majeure, de vendre la totalité du contingent de rhum qui leur a été attribué, voient les contingents inutilisés reversés aux autres opérateurs au prorata des contingents existants (24). Un tel système avantage les plus grandes distilleries et leurs propriétaires.

28. Il est en revanche exact que même sans cession de contingents au sens propre, des volumes de rhum sont échangés entre opérateurs. Certaines distilleries, en particulier les plus petites, ne commercialisent pas elles-mêmes le rhum issu de leur distillation et vendent le rhum contingenté en vrac à des acteurs, comme la Cofepp et QFS, qui disposent de capacités d'embouteillage et d'une présence commerciale en métropole. Ces volumes sont cédés dans le cadre de contrats de distribution à long terme ou renouvelables.

29. La Cofepp et QFS sont ainsi respectivement à la fois acheteurs (auprès de distilleries tierces et entre eux) et vendeurs (à des acteurs tiers et entre eux) de volumes de rhum contingenté, ce qui leur permet de procéder à des assemblages de rhum issu de diverses origines, en particulier pour les marchés MDD. La société Valois, seul autre fournisseur significatif de rhum pour les marchés MDD, en revanche est seulement acheteuse de volumes de rhum de sucrerie auprès de la Cofepp et de QFS.

Distinction entre rhum contingenté et rhum non contingenté

30. En matière de rhum, la pratique décisionnelle nationale (25) a opéré une distinction entre le rhum contingenté et le rhum non contingenté de toute origine, dans la mesure où l'existence de contingents et la réduction de fiscalité associée conduisent à des différences de prix (26) telles qu'il devient nécessaire de définir des marchés pertinents de rhum des DOM : un marché de production de rhum situé dans les DOM et un marché de distribution au consommateur final situé en métropole. La partie notifiante n'a pas explicitement pris position sur cette éventuelle segmentation.

31. Le test de marché n'a pas entièrement confirmé la pertinence d'une distinction entre rhum contingenté et rhum non contingenté. Si certains acteurs du marché ont effectivement mis en avant les différences de prix, dues à la fiscalité dérogatoire en faveur des rhums contingentés, pour justifier cette distinction, d'autres ont souligné qu'au niveau de la vente au consommateur final, les rhums contingentés étaient en concurrence directe avec les rhums non contingentés (27).

32. En tout état de cause, la question d'une éventuelle segmentation du marché du rhum entre rhum contingenté et rhum non contingenté peut rester ouverte, les conclusions de l'analyse ne s'en trouvant pas substantiellement modifiées. L'analyse portera donc à la fois sur un marché global du rhum et de manière distincte pour le rhum contingenté. A cet égard, il n'apparait pas nécessaire de définir un marché spécifique de la production de rhum situé dans les DOM, l'impact de l'opération en termes de contingents étant envisagé dans le cadre de l'analyse concurrentielle.

Segmentation entre rhum agricole et rhum non-agricole et selon l'âge ou la couleur

33. La pratique décisionnelle communautaire (28) et nationale (29) a longtemps envisagé l'existence d'un marché global du rhum incluant rhum agricole et rhum non-agricole. Plus récemment, dans la décision Cofepp/Boisset précitée, le ministre de l'économie, tout en laissant la question ouverte, a souligné la pertinence d'une distinction entre rhum agricole et rhum non-agricole, dans la mesure où il existe des différences notables de goût, de qualité et de prix entre ces deux catégories de produit. De plus, le ministre a dans la même décision envisagé une segmentation supplémentaire suivant l'âge, auquel correspond une couleur particulière.

34. La partie notifiante ne remet pas en cause cette segmentation et fournit des données de vente et de parts de marché en séparant le rhum agricole du rhum non-agricole.

35. Le test de marché a montré que plusieurs facteurs militent en faveur d'une segmentation entre rhum agricole et rhum non-agricole. En premier lieu, la majorité des concurrents ayant répondu au test de marché ont souligné la forte incidence des différences de matière première et de processus de production sur le goût et les qualités organoleptiques des produits (30). En second lieu, le caractère non substituable du rhum agricole est renforcé par l'appellation d'origine contrôlée dont bénéficie le rhum agricole martiniquais, qui constitue un facteur de distinction particulièrement significatif pour le rhum agricole (31).

36. La plupart des distributeurs clients des parties partagent cet avis et relèvent en particulier que le développement du marché du rhum est justement attribuable à l'arrivée de ces rhums agricoles qui correspondent aux goûts des habitants de métropole originaires des DOM (principalement de la Martinique et de la Guadeloupe, le rhum agricole étant marginal à La Réunion) (32).

37. Tout en reconnaissant les différences de goût et de qualités organoleptiques, certains concurrents relèvent toutefois que les consommateurs ne prêtent pas forcément attention à cette différence (33) et sont surtout attachés au prix et à une marque, d'autant plus que les deux rhums sont en concurrence directe dans les rayonnages des distributeurs (34). Ces concurrents font toutefois également valoir que de nombreux efforts sont mis en œuvre pour sensibiliser les consommateurs aux différences existant entre rhum agricole et rhum non-agricole (35). Par ailleurs, le fait que les produits sont voisins dans les linéaires des distributeurs ne signifie pas pour autant qu'ils appartiennent au même marché de produits. Les différents alcools blancs tels que le gin, la vodka et la tequila sont disposés de manière contigüe dans les rayonnages tout en constituant, selon une pratique décisionnelle constante, des marchés de produits distincts.

38. En revanche, en ce qui concerne une éventuelle segmentation selon la couleur du rhum et donc l'âge, la partie notifiante considère que celle-ci n'est pas pertinente en l'espèce dans la mesure où [90-100] % du rhum non-agricole commercialisé par QFS est du rhum blanc. Il en est de même pour le rhum agricole, où une large proportion des ventes de QFS est réalisée sous forme de rhum blanc. Le test de marché n'a pas à cet égard mis en évidence que la pertinence d'une segmentation des marchés du rhum selon l'âge ou la couleur.

39. En tout état de cause, et eu égard au fait que les parties sont actives à la fois dans le rhum agricole et le rhum non-agricole, la question de cette distinction peut être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse ne s'en trouvant pas substantiellement modifiées. L'analyse sera conduite à la fois sur un marché global du rhum et de manière distincte pour le rhum agricole et pour le rhum non-agricole. Dans la mesure où les contingents de rhum sont ventilés en deux catégories (contingents de rhum agricole et de rhum non-agricole), l'analyse en termes de contingents sera menée selon ces deux catégories. En revanche, il n'apparaît pas justifié de considérer une distinction liée à l'âge ou à la couleur.

b) Les punchs et cocktails

40. Les cocktails sont des mélanges de boissons composés d'au moins un alcool. En France, les punchs, cocktails à base de rhum, sont les cocktails les plus consommés représentant, selon une décision récente, près de 75 % des ventes de cocktails (36). Le ministre a ainsi envisagé d'opérer une segmentation entre les punchs, d'une part, et les autres cocktails, d'autre part. QFS commercialise exclusivement du punch en Martinique et à La Réunion, tandis que la Cofepp commercialise du punch ainsi que d'autres types de cocktails en métropole et en Martinique.

41. La partie notifiante estime qu'il n'est pas pertinent de distinguer les punchs des autres cocktails dans la mesure où "les principaux fournisseurs de punchs et cocktails sont les mêmes opérateurs (les groupes Cofepp et Marie Brizard notamment) et en raison également de la perte de vitesse du segment des punchs au profit du segment plus varié des cocktails" (37). Il ressort toutefois de l'instruction que la production de punchs est souvent étroitement liée à celle de rhum, ce qui n'est pas le cas des autres cocktails. Ainsi des sociétés comme Isautier, Spiridom, QFS et la Cofepp, qui consacrent une part importante de leur activité à la production de rhum produisent également des punchs (mais pas des cocktails) alors que Marie Brizard, absente des marchés du rhum, jouit d'une forte présence sur le marché des cocktails mais est absente du marché des punchs.

42. La partie notifiante a d'ailleurs indiqué qu'en Martinique "les punchs sont un complément de gamme des marques de rhum. A l'exception de la gamme Dormoy, les punchs sont principalement commercialisés sous des noms de marques de rhum" (38). La société Isautier a également relevé le caractère spécifique du marché des punchs à La Réunion (39).

43. En tout état de cause, compte tenu du fait que QFS n'est pas présent en métropole sur le marché des punchs, la question d'une distinction entre punchs et cocktails en métropole peut rester ouverte, les conclusions de l'analyse ne s'en trouvant pas substantiellement modifiées. Il en est de même pour La Réunion où la Cofepp n'est pas active sur le marché des punchs. En revanche à la Martinique, où les activités des parties se chevauchent en ce qui concerne les punchs, une distinction entre punchs et cocktails se justifie compte tenu des liens étroits existant entre production de rhum et du fait que les caractéristiques permettant d'identifier un marché martiniquais du rhum s'appliquent de la même manière au punch. L'analyse sera donc menée sur le seul marché des punchs à la Martinique.

c) Les liqueurs

44. Les liqueurs constituent un ensemble de boissons spiritueuses obtenues par aromatisation d'un alcool, qui peut être d'origine agricole ou issu d'une autre boisson spiritueuse. Différents procédés sont utilisés pour la fabrication de liqueurs, comme la macération et l'infusion de fruits ou de plantes suivie ou non d'une distillation. La Commission européenne (40) considère que chaque type de liqueur peut constituer un marché pertinent, en raison des différences de goût existant entre les liqueurs. La pratique décisionnelle nationale (41) a envisagé l'existence d'une segmentation de ce marché entre les liqueurs traditionnelles (Grand Marnier, Cointreau, etc.), les liqueurs modernes (manzana, cachaca, pessoa) et les crèmes de fruits, chacune de ces catégories pouvant être segmentée plus finement selon le type de liqueur. La partie notifiante ne remet pas en cause ces éventuelles segmentations.

45. En l'espèce, la question d'une segmentation plus fine du marché des liqueurs peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. La Cofepp et QFS commercialisant simultanément des liqueurs de menthe et des crèmes de whisky (42), l'analyse concurrentielle sera menée sur les marchés des liqueurs de menthe et des crèmes de whisky.

d) Le whisky

46. Le whisky est une eau-de-vie distillée à partir d'orge, de seigle et de maïs. La pratique décisionnelle (43) considère que ce marché peut être segmenté selon l'origine du whisky (Ecosse, Irlande, Canada, Etats-Unis, etc.). Les parties commercialisent simultanément du whisky écossais (scotch whisky) ainsi que du whisky américain (bourbon). La partie notifiante estime cependant que cette distinction n'est pas pertinente sur le marché français, dans la mesure où le whisky écossais représente environ 90 % de la consommation totale. Toutefois, la quasi-totalité des répondants au test de marché, qu'il s'agisse de clients ou de concurrents des parties, ont indiqué que l'origine constituait un critère de choix majeur pour un acheteur de whisky, les qualités organoleptiques différant selon l'origine. De surcroît, les conditions d'approvisionnement en scotch whisky et en bourbon sont différentes, ces deux types de whisky n'étant pas produits dans les mêmes pays (Ecosse et Etats-Unis).

47. En l'espèce toutefois, la question d'une segmentation du marché du whisky selon l'origine peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit l'hypothèse retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

48. Au sein du scotch whisky, la partie notifiante a proposé d'isoler un marché du scotch whisky blend (mélange de scotch de plusieurs distilleries écossaises, par opposition au single malt) de moins de 12 ans d'âge, seul type de scotch whisky proposé par la cible. Cette question peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit l'hypothèse retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

49. Les parties produisent également du "blended" whisky, obtenu à partir d'un mélange de whisky de différentes origines géographiques. Cette boisson est uniquement vendue dans les magasins alimentaires. La partie notifiante estime que le blended whisky doit être intégré dans le marché du scotch whisky, dans la mesure où les quantités produites et le positionnement en prix sont, selon la Cofepp, étroitement liés aux marchés du scotch whisky.

50. Cependant, il existe des différences de qualité entre le blended whisky et le scotch whisky, qui se traduisent par d'importantes différences de prix. En effet, en 2010, selon les données transmises par la partie notifiante (44), le prix de vente moyen du blended whisky en GMS (MDF, MDD et MPP confondues) s'est élevé à 11,81 euro, tandis que celui du scotch whisky (MDF, MDD et MPP confondues) s'est élevé à 16,77 euro. Par ailleurs, si plusieurs concurrents et clients interrogés lors du test de marché ont considéré que le blended whisky était substituable au scotch whisky, cette position n'est pas unanime, un des concurrents des parties ayant ainsi estimé que "les blended whiskys et le scotch whisky blend ne sauraient être considérés comme substituables du point de vue du consommateur. L'appellation "scotch" whisky est une véritable marque en soi, vecteur de statut et de légitimité qualitative dans la mesure où seul le whisky distillé et vieilli en Écosse peut bénéficier de cette appellation. Ainsi, il résulte des différences de goût, de positionnement tarifaire et d'image, que les blended whiskys et le scotch whisky ne s'adressent pas à la même catégorie de consommateurs" (45), tandis qu'un des clients des parties, le groupe Système U, a relevé qu'il existait une "grosse différence de prix et qualité" (46) entre ces deux produits.

51. En l'espèce toutefois, la question d'une distinction entre le blended whisky et le scotch whisky peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit l'hypothèse retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. Compte tenu de l'activité des parties, l'analyse concurrentielle sera donc menée sur des marchés du scotch whisky, du bourbon et du blended whisky, ainsi que sur un éventuel marché du scotch whisky blended de moins de 12 ans d'âge.

e) Les autres eaux-de-vie

52. Les eaux-de-vie proviennent de la distillation du jus fermenté des fruits (eau-de-vie naturelle) ou de la distillation de substances alimentaires (céréales, tubercules). La pratique décisionnelle communautaire (47) a envisagé l'existence d'un marché des cognacs/armagnacs et autres eaux-de-vie. Au sein de ce marché, elle a considéré que les cognacs/armagnacs pouvaient constituer un marché distinct, dans la mesure où ce sont des eaux-de-vie de vin, où leurs prix sont relativement proches et où leurs zones de production sont relativement éloignées de celles des autres eaux-de-vie. Cette distinction a été reprise par la pratique décisionnelle nationale (48) qui a par ailleurs envisagé une segmentation entre cognac et armagnac, compte tenu des normes de production spécifiques et de zones de récolte et de fabrication strictement délimitées. Pour les mêmes raisons, la pratique décisionnelle a considéré, tout en laissant la question ouverte, l'existence d'un marché distinct du calvados.

53. La Cofepp produit du cognac, de l'armagnac et du calvados, tandis que QFS produit du calvados et d'autres eaux-de-vie. La partie notifiante propose de retenir l'existence d'un marché global des cognacs/armagnacs et autres eaux-de-vie. Toutefois, il ressort que le calvados présente des caractéristiques propres de sorte que ce produit constitue un marché pertinent.

54. En effet, le calvados est une eau-de-vie normande produite à partir de la distillation du cidre. Le calvados ne peut être produit que sur trois aires de production, qui bénéficient chacune d'une Appellation d'Origine Contrôlée (Calvados Pays d'Auge, Calvados, Calvados Domfrontais). La récolte des pommes, la fabrication du cidre et la distillation ne peuvent ainsi se faire que dans un espace géographique circonscrit. Il n'existe donc pas de substituabilité du point de vue de l'offre entre le calvados et les autres eaux-de-vie.

55. Enfin, ce produit n'apparait pas non plus substituable à d'autres eaux-de-vie du point de vue de la demande. La plupart des répondants au test de marché clients ont ainsi estimé que le calvados n'était pas substituable aux autres eaux-vie de vie compte tenu notamment de son goût typique (49), point de vue partagé par la totalité des concurrents interrogés (50).

56. L'analyse concurrentielle sera ainsi menée sur le marché du calvados.

f) Le gin

57. Le gin est une eau-de-vie de grains et de baies de genévrier. La partie notifiante ne remet pas en cause la pratique des autorités communautaire (51) et nationale (52) de concurrence qui considère que ce spiritueux constitue un marché pertinent.

58. L'analyse concurrentielle sera ainsi menée sur le marché du gin.

g) La téquila

59. La téquila est un spiritueux d'origine mexicaine produit à partir d'une plante, l'agave bleu. La partie notifiante ne remet pas en cause la pratique des autorités communautaire (53) et nationale (54) de concurrence qui considère que ce spiritueux constitue un marché pertinent.

60. L'analyse concurrentielle sera ainsi menée sur le marché de la téquila.

h) La vodka

61. La vodka est une eau-de-vie qui peut être produite à partir de seigle, de blé, de pommes de terre ou de betterave. Le ministre de l'économie reprenant la pratique décisionnelle communautaire a envisagé tout en laissant la question ouverte, une possible segmentation entre les vodkas nature et les vodkas aromatisées (55). Les parties commercialisent uniquement de la vodka nature. De plus, en France, les vodkas aromatisées ne représentent qu'une très faible part de la consommation de vodka (56) contrairement à d'autres pays européens, de sorte que l'intégration ou non de ces produits dans le marché de la vodka ne modifie pas les conclusions de l'analyse concurrentielle.

62. L'analyse concurrentielle sera ainsi menée sur le marché de la vodka incluant les vodkas aromatisées.

i) Les vins doux naturels

63. En France, les vins doux naturels sont des boissons apéritives principalement produites dans la vallée du Rhône et en Languedoc-Roussillon. Ces vins sont obtenus par l'apport d'un supplément d'alcool neutre sur le moût du raisin afin d'arrêter la fermentation et de conserver une partie du sucre. En France, les vins doux naturels regroupent les Muscats (blancs), les Rivesaltes et les Banyuls (rouges, même s'il existe des muscats de Rivesaltes blancs). Le ministre de l'économie a envisagé une segmentation du marché des vins doux naturels entre les vins doux naturels blancs et les vins doux naturels rouges (57).

64. En l'espèce, la question d'une segmentation entre les vins doux naturels rouges et blancs peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. L'analyse concurrentielle sera ainsi menée sur un marché des vins doux naturels ainsi que sur d'éventuels marchés des vins doux naturels blancs, d'une part, et rouges, d'autre part.

j) Les apéritifs sans alcool

65. Les parties produisent des apéritifs sans alcool (ci-après "ASA"). Ces boissons constituent une alternative aux boissons alcoolisées dont elles tendent à se rapprocher gustativement. QFS, via sa filiale Bouguet Pau, propose différentes produits tels que des anisés sans alcool des effervescents sans alcool, un vermouth sans alcool et des cocktails sans alcool. La Cofepp produit uniquement des anisés sans alcool.

66. En l'absence de pratique décisionnelle relative aux apéritifs sans alcool, la partie notifiante a suggéré d'intégrer ces boissons à un marché global des boissons sans alcool, ou aux marchés des boissons rafraîchissantes sans alcool ("BRSA") ou des boissons gazeuses sans alcool ("BGSA"), compte tenu notamment du fait que les ASA seraient présentes dans les mêmes rayons que les BRSA et les BGSA et dépendraient des mêmes acheteurs.

67. Toutefois, les producteurs d'ASA sont essentiellement des producteurs de spiritueux. Parmi ces groupes, on peut notamment citer Pernod Ricard, Marie Brizard, QFS et Picard. Les grands groupes présents dans le secteur des BRSA et des BGSA tels que Coca Cola ou PepsiCo ne commercialisent pas de tels produits. Par ailleurs, il ressort des données transmises par la Cofepp que les ASA sont vendues en GMS à un prix généralement supérieur à 3 euro au litre58, niveau de prix bien supérieur à celui des BRSA et des BGSA. Enfin, ces produits sont généralement situés dans les rayons spiritueux et boissons apéritives et non aux côtés des BRSA et BGSA.

68. Les seuls ASA que les parties commercialisent simultanément sont des anisés sans alcool, alternative non alcoolisée au pastis. Compte tenu de "leur arôme particulier et puissant" (59), l'instruction a mis en évidence que les anisés sans alcool pouvaient constituer un marché pertinent spécifique. La quasi-totalité des répondants au test de marché ont en effet estimé que ces produits étaient distincts des autres apéritifs sans alcool. En outre, du côté de l'offre, il ressort que l'essentiel des fournisseurs d'anisés sans alcool (groupes Pernod Ricard, Picard et Cofepp), hormis QFS, sont également producteurs de pastis, ce qui tend à indiquer que la production d'anisés sans alcool nécessite de maîtriser un savoir-faire se rapprochant davantage de celui de la production de pastis que de celui de la production d'autres apéritifs sans alcool.

69. En l'espèce toutefois, la question de la délimitation précise du marché des ASA peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit l'hypothèse retenue, les conclusions de l'analyse demeureront inchangées. L'analyse concurrentielle sera donc menée uniquement sur un marché des ASA anisés.

2. SEGMENTATION SELON LE CIRCUIT DE DISTRIBUTION

70. En matière de boissons, la pratique décisionnelle communautaire (60) et nationale (61) opère généralement une distinction entre la distribution de boissons destinées à la consommation hors domicile, circuit "on-trade" (boissons vendues dans les cafés, hôtels, restaurants et autres collectivités) et la distribution de boissons destinées à la consommation à domicile, circuit "off-trade" (boissons achetées dans les magasins alimentaires). Cette distinction se fonde sur l'existence de caractéristiques propres à chacun des canaux (conditionnement des bouteilles différencié selon le circuit, forces de ventes dédiées à chacun des circuits, parts de marché des opérateurs pouvant varier substantiellement selon le circuit considéré, etc.).

71. La pertinence d'une telle distinction a été confirmée par les réponses au test de marché qui relèvent le fait que ces deux circuits se caractérisent par des organisations commerciales différentes, les négociations commerciales dans le circuit off-trade s'établissant directement entre les fournisseurs et les GMS alors qu'elles passent généralement par l'intermédiaire de grossistes dans le circuit on-trade. De plus, certaines marques ne sont commercialisées que dans le circuit on-trade.

72. L'analyse concurrentielle sera donc menée sur le circuit off-trade, à l'exception du rhum, produit que les parties commercialisent sur les deux circuits.

3. SEGMENTATION SELON LE POSITIONNEMENT DE PRODUIT

73. Sur le circuit off-trade, la Cofepp et QFS commercialisent leurs boissons spiritueuses et apéritives auprès des GMS ainsi que des enseignes de hard discount (dans le présent développement, le terme "GMS" inclura les enseignes de hard discount) qui les vendent ensuite au consommateur final. La chaîne d'approvisionnement comprend ainsi deux niveaux : un niveau amont sur lequel les parties sont présentes, mettant en relation les fournisseurs et les GMS, et un niveau aval mettant en relation les GMS et le consommateur final.

74. Différents types de spiritueux et boissons apéritives sont proposés au consommateur final : des produits de marque (produits identifiés par une marque de fabricant, ci-après dénommés "MDF"), des produits vendus sous marque de distributeurs ("MDD"), des produits vendus sous marque de hard discounteurs ("MHD") et des produits vendus sous marque de premier prix ("MPP"). La Cofepp propose tant des MDF que des MDD, MPP et MHD, tandis que l'activité de QFS en métropole, hormis concernant le rhum et le whisky, est uniquement tournée vers la production de MDD, MPP et MHD.

75. Les parties n'interviennent qu'au stade de l'approvisionnement des GMS et ne sont pas actives au stade de la vente de leurs produits au détail. Seul le marché amont de l'approvisionnement est donc concerné par l'opération. Or, au niveau amont, l'Autorité de la concurrence (62) a constaté à de nombreuses reprises qu'il convenait de distinguer d'une part, le marché mettant en relation les fournisseurs de MDD, MPP et MHD avec les enseignes de GMS et d'autre part, celui mettant en présence les fabricants de marque et les GMS. De la même manière, il y a lieu de distinguer entre la production et la vente de spiritueux commercialisés sous MDD, MPP et MHD aux GMS et de l'approvisionnement des GMS en spiritueux commercialisés sous MDF, au vu des éléments suivants.

76. En premier lieu, les processus d'approvisionnement des GMS en MDD, MHD et MPP sont différents de ceux des MDF. En l'espèce, les spiritueux vendus sous MDD, MHD et MPP sont généralement produits à partir d'un cahier des charges provenant de l'acheteur et détaillant les caractéristiques attendues du produit. Dans ce cadre, le fournisseur n'intervient qu'en application du cahier des charges et n'a aucun rôle dans la définition des stratégies commerciales de ces marques (décisions de lancement de nouveaux produits, politique de communication, etc.), contrairement aux fournisseurs de MDF. L'identité d'un opérateur qui approvisionne une enseigne pour ses MDD ou MHD et ses MPP n'est ainsi pas connue par le consommateur final. Par ailleurs, les GMS peuvent procéder à leurs achats de MDD, MPP et MHD par la voie d'appels d'offres, contrairement à leurs achats de MDF qui font l'objet d'un contrat de référencement.

77. De plus, malgré la forte substituabilité du côté de l'offre entre la production de spiritueux destinés à être commercialisés sous MDF et sous MDD, MPP et MHD, la majorité des fournisseurs interviennent uniquement dans la fourniture de l'une ou l'autre des catégories de produit, les parties à l'opération faisant figure d'exception à cet égard. Ainsi, l'existence de taux de marge plus importants dans l'approvisionnement des MDF aux GMS explique que les principaux producteurs de spiritueux vendus sous MDF choisissent d'y consacrer la totalité de leur capacité. Les parties sont ainsi les seuls opérateurs du secteur avec une activité significative aussi bien en MDF qu'en MDD, MPP et MHD. Le test de marché et l'analyse ont ainsi également mis en exergue le faible nombre de fournisseurs actifs dans l'approvisionnement de spiritueux en MDD, MPP et MHD.

78. En second lieu, il convient de rappeler que, même si l'analyse de l'opération concerne exclusivement le marché amont de l'approvisionnement, la pression concurrentielle que peuvent éventuellement exercer les producteurs de MDF et de marques de distributeurs les uns sur les autres lorsqu'ils répondent à la demande des distributeurs est étroitement influencée par le comportement des consommateurs sur les marchés aval mettant en relation les GMS avec les clients, et donc la substituabilité, du point de vue des consommateurs, entre les différents produits. Les négociations entre les GMS et leurs fournisseurs prennent place dans un contexte concurrentiel différent selon le degré de différenciation des produits en termes de goût, de qualité ou d'emballage et selon la notoriété des marques de fabricants.

79. Dans leurs réponses au test de marché, les fabricants comme les distributeurs déclarent que les spiritueux sont largement substituables, qu'ils soient vendus sous MDD, MHD, MPP ou sous MDF. La partie notifante a d'ailleurs indiqué que les promotions de spiritueux vendus sous MDF se traduisaient par un recul important des ventes de MDD, dans la mesure notamment où de nombreuses marques de boissons alcoolisées auraient, selon elle, une faible notoriété. Cependant, les statistiques de vente, qui au final reflètent le comportement des consommateurs et les comportements d'approvisionnement des distributeurs, ne confirment pas ces opinions. En effet, si comme pour l'ensemble des produits de grande consommation, la part des MDD, MHD et MPP dans les ventes de spiritueux a progressé au cours des années récentes, elle est variable selon les spiritueux concernés et reste globalement inférieure à ce qui peut être constaté sur d'autres marchés. Ce fait traduit une certaine résistance des marques de fabricants qui peut s'expliquer notamment par l'existence de marques notoires portées par la publicité et la consommation en restauration hors domicile ("RHD"). Le test de marché confirme l'existence, dans ce secteur, de marques notoires, voire incontournables, de nature à limiter sur les marchés amont la substituabilité entre MDD et MDF, les distributeurs étant contraints de proposer ces marques dans leurs linéaires.

80. Il convient dès lors de distinguer le marché amont de l'approvisionnement des GMS en MDD, MHD et MPP de celui de leur approvisionnement en MDF.

81. De plus, il apparaît qu'en l'espèce le marché doit être segmenté plus finement. Il convient tout d'abord d'opérer une distinction entre les MDD/MPP, d'une part, et les MHD, d'autre part (63). La partie notifiante considère que cette segmentation n'est pas pertinente, dans la mesure où l'offre de spiritueux sous MDD/MPP serait substituable à celle de spiritueux sous MHD. Cependant, les acheteurs de MDD et de MHD sont différents et les cahiers des charges ainsi que les prix de vente en gros pour un même type de spiritueux peuvent substantiellement varier entre un produit MDD et un produit MHD. En outre, les parts de marché des opérateurs diffèrent notablement entre les produits MDD et MHD, certains opérateurs étant essentiellement présents sur les MDD, tandis que d'autres, notamment des fournisseurs étrangers, ont une offre essentiellement tournée vers les MHD. Par ailleurs, la Cofepp prétend que certaines enseignes de grande distribution, qui disposent désormais de leurs propres enseignes de hard discount, organiseraient simultanément leurs appels d'offres pour les MDD/MPP et les MHD et répartiraient ensuite les produits en fonction des enseignes. La partie notifiante n'a cependant pu produire qu'un appel d'offres de ce type.

82. La partie notifiante conteste également la pertinence d'une segmentation entre les MDD et les MPP. Cette segmentation a cependant été envisagée dans la décision du ministre relative à l'acquisition d'actifs du groupe Boisset par la Cofepp (64), considérant que "les spiritueux et autres alcools apéritifs vendus sous MPP peuvent ne pas faire l'objet d'un appel d'offres et ne pas être soumis à un cahier des charges précis du distributeur". La Cofepp estime néanmoins que les différences de prix entre les MDD et les MPP seraient limitées et que les distributeurs n'auraient pas tous les mêmes définitions de ce que constituent des MDD ou des MPP. Par ailleurs, tout comme pour les MDD, les références vendues sous MPP seraient généralement dédiées à un seul distributeur et les GMS exigeraient le plus souvent un transfert de la propriété de la marque premier prix ou à tout le moins une licence exclusive, de sorte que la distinction principale avec les MDD (la propriété de marque) tendrait à disparaître. En outre, certains distributeurs majeurs organiseraient des appels d'offres communs pour les MDD et les MPP. Enfin, les opérateurs produisant des MDD et des MPP seraient les mêmes.

83. L'instruction a permis de confirmer la plupart de ces points. Cependant, contrairement aux affirmations de la Cofepp, les écarts de prix entre MDD et MPP sont généralement significatifs, les MPP ayant été créées afin de concurrencer les enseignes de hard discount. A titre d'exemple, il ressort des prix de gros transmis par la Cofepp que la vodka MDD est vendu en moyenne plus de [30-40] % plus cher que la vodka MPP, cet écart s'élevant à [80-90] % entre le gin MDD et le gin MPP. De plus, les contrats de MDD et de MPP n'ont généralement pas la même durée, les contrats relatifs aux MPP étant généralement plus courts (généralement un an) que ceux relatifs aux MDD (pouvant aller jusqu'à trois ou quatre ans quand leur durée est déterminée). Ces différences substantielles en termes de durée des contrats ont un impact sur les délais d'un changement de fournisseur, les délais de préavis étant indexés sur l'ancienneté de la relation commerciale. Par ailleurs, ces produits ne connaissent pas nécessairement la même évolution. Le groupe Intermarché (65) a ainsi précisé dans sa réponse au test de marché qu'en matière de spiritueux, les ventes de MDD continuaient à progresser alors qu'elles régressaient concernant les MPP.

84. Ainsi, bien qu'il existe certains points de convergence entre les MDD et les MPP, les différences de prix, de durée des contrats voire d'évolution des ventes entre ces deux catégories de produits tendent à indiquer qu'il convient en l'espèce de distinguer le marché amont de l'approvisionnement des GMS en MDD de celui de leur approvisionnement en MPP.

85. En l'espèce toutefois, la question d'une segmentation entre l'approvisionnement des GMS en MDD, MPP et en MHD peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit l'hypothèse retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. La partie notifiante n'ayant pas été en mesure de fournir des estimations des parts de marché en opérant une distinction entre les MDD et les MPP, l'analyse concurrentielle sera ainsi menée sur un marché intégrant l'approvisionnement des distributeurs en MDD et les MPP, tout en prenant en compte l'imparfaite substituabilité entre les MDD et les MPP, ainsi que sur un marché de l'approvisionnement des enseignes de hard discount en MHD.

86. Concernant le marché de l'approvisionnement des GMS en MDF, les activités des parties en métropole se chevauchent uniquement en matière de whisky et de rhum.

B. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

87. La pratique décisionnelle communautaire66 et nationale (67) considère de manière générale que les différents marchés des spiritueux et autres boissons apéritives alcoolisées sont de dimension nationale en raison de l'existence d'habitudes de consommation qui diffèrent selon les Etats. L'opération ayant plus spécifiquement des effets sur certains marchés des spiritueux et autres apéritifs vendus sous MDD, MPP et MHD ainsi que du rhum, l'instruction a analysé de manière plus spécifique à quel niveau se jouait la pression concurrentielle entre les fournisseurs sur ces marchés.

88. Concernant les MDD, MPP et MHD, la partie notifiante relève que ses clients distributeurs procèdent de manière croissante à des appels d'offres européens. Il ressort toutefois que les pratiques d'achat varient selon les distributeurs, certains pratiquant uniquement des appels d'offres au niveau national, certains pratiquant des appels d'offres au niveau européen mais uniquement pour des produits particuliers, tandis que certains généralisent le recours aux appels d'offres européens. En tout état de cause, les parts de marchés des fournisseurs étrangers sur les différents marchés de produits préalablement définis demeurent très limitées pour les marchés MDD/MPP et un peu plus élevées pour les MHD (68). Le test de marché a montré que cette faible présence s'explique notamment par l'importance des coûts de transport. L'analyse concurrentielle sera ainsi menée au niveau national concernant les spiritueux vendus sous MDD, MPP et MHD.

89. Concernant plus spécifiquement le rhum, il convient de rappeler que le régime contingentaire appliqué au rhum des DOM distingue le territoire français des autres pays de l'Union européenne en termes de produits disponibles (qui proviennent ainsi majoritairement des DOM, rhums peu courants dans le reste de l'Europe) et de prix pratiqués. Le territoire national constitue donc un marché géographique distinct.

90. Certains répondants du test de marché ont cependant attiré l'attention des services d'instruction s'agissant de la dimension géographique des marchés pertinents du rhum vendu dans ses territoires de production.

91. Tout d'abord, les DOM sont soumis à un environnement règlementaire spécifique s'agissant des rhums par rapport à la métropole (octroi de mer sur les produits importés pour aider les produits locaux, taux d'accise réduits pour le rhum consommé dans les DOM, TVA plus basse voire nulle) qui distinguent l'environnement concurrentiel spécifique des DOM de celui qui existe en métropole

92. En outre, chacun des DOM constitue une zone de débouché naturel, compte tenu du caractère insulaire et de la spécificité de ces produits, pour les rhums fabriqués dans ces territoires. Outre la métropole, les rhums de chacun des DOM sont quasi-exclusivement consommés dans le département où ils ont été produits et ne se trouvent pas en concurrence avec les rhums produits dans d'autres territoires.

93. En conséquence, il apparaît que chacun des DOM constitue un marché géographique pertinent pour la commercialisation des rhums sur son territoire. L'analyse concurrentielle sera donc conduite à la fois sur le territoire métropolitain d'une part et dans chacun des DOM d'autre part. A cet égard, il convient de noter que les activités des parties ne se chevauchent qu'en Martinique. La Cofepp n'est pas présente à La Réunion alors que QFS est absent du marché guadeloupéen, aucune des parties n'étant active en Guyane.

94. Par ailleurs, les parties commercialisent simultanément du punch uniquement en Martinique, QFS étant également présent à La Réunion, tandis que la Cofepp est également présente en métropole. L'existence d'un octroi de mer ainsi que d'habitudes de consommation locales justifient par analogie avec le précédent développement concernant le rhum de considérer que la Martinique constitue un marché géographique pertinent pour la commercialisation du punch. L'analyse concurrentielle sera ainsi réalisée sur le marché martiniquais de la commercialisation de punch.

III. L'analyse concurrentielle

95. L'analyse concurrentielle sera uniquement menée sur les marchés off-trade, QFS n'étant pas présent sur le circuit on-trade, sauf en matière de rhum.

96. L'analyse concurrentielle s'articulera autour de deux parties : une première partie consacrée à l'analyse des effets de l'opération sur les marchés du rhum et des punchs et une deuxième partie portant sur des marchés de spiritueux vendus sous MDD/MPP et sous MHD dans lesquels l'opération entraînera des chevauchements d'activité entre les parties.

97. Pour les besoins de la présente décision, les marchés de l'approvisionnement des GMS et des enseignes de hard discount en spiritueux vendus sous MDD/MPP et sous MHD seront respectivement désignés par "le marché des spiritueux sous MDD/MPP" et "le marché des spiritueux sous MHD".

A. LES MARCHÉS DU RHUM ET DES PUNCHS

98. Avec une consommation globale de 25,2 millions de litres (69), soit 6,7 % des volumes de spiritueux distribués en France, le rhum est le troisième spiritueux le plus consommé en France derrière le whisky (145,2 millions de litres, soit 38,5 % des volumes) et les anisés (107,5 millions de litres, 28,5 % des volumes). Le rhum représente un chiffre d'affaires annuel en France (droits et taxes inclus) de plus de 260 millions d'euro.

99. Dans un marché des spiritueux en France globalement en croissance légère (+0,3 % en 2009, +1,3 % en 2010 en volume), le rhum connaît une augmentation de sa consommation plus importante (+3 % en 2010 et +3,8 % pour le premier semestre 2011 (70)).

100. La production de rhum français, exclusivement réalisée dans les DOM, représente plus de 55 millions de litres par an. Environ 20 % de cette production est consommée sur place dans les DOM, 30 % est exporté (principalement en vrac) dans le reste de l'Europe et dans le monde et 50 % est consommé en métropole (71). 87 % du rhum consommé en métropole est distribué dans le circuit off-trade et 13 % du rhum est consommé dans le circuit on-trade.

1. LE MARCHÉ DU RHUM ON-TRADE

101. D'après les données communiquées par la partie notifiante, le marché global du rhum on-trade en France en 2010 a représenté un volume de 3,6 millions de litres (exclusivement MDF). Sur ce marché, la part de marché cumulée de la nouvelle entité s'élèvera à [40-50] % (Cofepp : [40-50] %, QFS : [0-5] %). Les principaux concurrents des parties seront Pernod Ricard ([20-30] %), Bacardi ([10-20] %) et Damoiseau-Clément ([5-10] %). Le faible poids de QFS ainsi que la présence significative des concurrents de la nouvelle entité permettent d'écarter tout risque d'atteinte à la concurrence sur ce marché.

102. En ce qui concerne plus particulièrement le rhum agricole on-trade, il a représenté en France en 2010 d'après les données communiquées par la partie notifiante un volume de 1,1 million de litres. Sur ce marché, la part de marché cumulée de la nouvelle entité s'élèvera à [40-50] % (Cofepp : [40-50] %, QFS : [5-10] %). Les principaux concurrents des parties seront Damoiseau-Clément ([20-30] %), Lixir ([10-20] %) et Dugas ([5-10] %). QFS n'est pas un acteur majeur sur ce marché et des concurrents de la nouvelle entité tels que Damoiseau-Clément, Lixir et Dugas disposent d'une position bien plus favorable que QFS sur le marché du rhum agricole on-trade. L'élimination d'un opérateur de second rang comme QFS n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur ce marché.

103. Enfin, pour le rhum non-agricole on-trade (qui a représenté en France en 2010 un volume de 2,5 millions de litres) la part de marché cumulée des parties sera de [40-50]% (Cofepp : [40-50] %, QFS : [0-5] %), avec pour concurrents Pernod Ricard ([30-40] %) et Bacardi ([20-30] %). Le chevauchement d'activités entre les parties étant marginal, tout risque d'atteinte à la concurrence peut être écarté.

2. LE MARCHÉ GLOBAL DU RHUM OFF-TRADE

104. D'après les données communiquées par la partie notifiante, le marché global du rhum off-trade en France en 2010 a représenté un volume de 23,5 millions de litres, dont 62,1 % de rhum vendu sous MDF, 25,5 % de rhum vendu sous MDD et MPP et 12,4 % de rhum vendu sous MHD.

105. Les parts de marché des parties et de leurs principaux concurrents sont présentées dans le tableau ci-dessous (72).

<EMPLACEMENT TABLEAU 1>

106. L'opération, qui rapprochera le premier et le deuxième acteur du rhum off-trade, renforcera ainsi la position de leader incontesté de la Cofepp, avec une part de marché combinée de [70-80] %. Aboutissant à une addition de parts de marché significative ([10-20] %), l'opération conférera à la Cofepp une position plus de [...] fois supérieure à celle de son principal concurrent Valois ([10-20] %). Les autres acteurs du marché (des opérateurs globaux de spiritueux comme Bacardi ou Pernod Ricard ou spécialisés dans le rhum comme Spiridom) auront des parts de marché inférieures ou égales à [0-5] %.

107. A l'issue de l'opération, la concentration du marché global du rhum off-trade atteindra 6 224 IHH (75), l'acquisition de QFS par la Cofepp entraînant un delta de 2 160, montants qui excèdent très largement les seuils retenus par les lignes directrices de l'Autorité de la concurrence pour écarter toute probabilité de problèmes horizontaux de concurrence (76).

3. LE MARCHÉ DU RHUM AGRICOLE OFF-TRADE

a) Analyse en termes de parts de marché

Marché du rhum agricole off-trade, tous positionnements confondus (MDF, MDD/MPP et MHD)

108. D'après les données communiquées par la partie notifiante, le marché du rhum agricole off-trade en France en 2010 a représenté un volume de 7,74 millions de litres, dont 77,5 % de rhum vendu sous MDF, 21,1 % de rhum vendu sous MDD/MPP et 1,4 % de rhum vendu sous MHD.

109. Les parts de marché des parties et de leurs principaux concurrents sont présentées dans le tableau ci-dessous.

<EMPLACEMENT TABLEAU 2>

110. La nouvelle entité détiendra donc une part de marché de [60-70] %, largement supérieure à celle de ses principaux concurrents Valois ([20-30] %), Spiridom ([5-10] %) et Lixir ([5-10] %). Pernod Ricard et Bacardi, dont le rhum est originaire de Cuba, ne sont pas présents sur le marché du rhum agricole.

111. A l'issue de l'opération, la concentration du marché du rhum agricole off-trade atteindra 4 596 IHH, l'acquisition de QFS par la Cofepp entraînant un delta de 1 166, niveaux qui excèdent très significativement les seuils retenus par les lignes directrices pour écarter toute probabilité de problèmes horizontaux de concurrence.

112. QFS n'étant pas actif sur les marchés MDD/MPP et MHD du rhum agricole (ou seuls Cofepp et Valois sont présents), l'analyse pour le rhum agricole se limitera au seul marché MDF.

Marché du rhum agricole off-trade vendu sous MDF

113. D'après les données communiquées par la partie notifiante, le marché du rhum agricole off-trade vendu sous MDF en France en 2010 a représenté un volume de 6 millions de litres. La Cofepp est présent sur ce marché avec les marques Dillon et Saint James alors que QFS commercialise la marque La Mauny. Les concurrents des parties sont Valois, qui distribue la marque Habitation Sainte Etienne, Spiridom, avec les marques Damoiseau et Clément, et Lixir, avec la marque Trois Rivières (commercialisée sous licence de QFS).

114. Les parts de marché des parties et de leurs principaux concurrents sont présentées dans le tableau ci-dessous.

<EMPLACEMENT TABLEAU 3>

115. La part de marché cumulée des parties sur le rhum agricole MDF ([80-90] %) sera ainsi encore plus importante que sur le rhum agricole tous positionnements confondus. Aucun des concurrents des parties ne détiendra une part de marché supérieure à [10-20] % (sauf Spiridom avec [10-20] %).

116. A l'issue de l'opération, la concentration du marché du rhum agricole off-trade vendu sous MDF atteindra 6 505 IHH, l'acquisition de QFS par la Cofepp entraînant un delta de 1 848, niveaux qui excèdent très largement les seuils retenus par les lignes directrices pour écarter toute probabilité de problèmes horizontaux de concurrence.

b) Analyse en termes de contingents de rhum agricole

117. L'opération entraînera des additions de contingents de rhum agricole, dans la mesure où les distilleries de rhum agricole de QFS seront transférées à la Cofepp. Après répartition entre les quatre DOM producteurs, le contingent est ensuite distribué entre les distilleries en le subdivisant en deux sous-contingents, un pour le rhum agricole et un pour le rhum non-agricole. Cette subdivision ne concerne que la Martinique et la Guadeloupe, qui sont les seuls DOM à disposer de contingents de rhum agricole et non-agricole. L'analyse portera ainsi sur les additions de contingents de rhum agricole à la Martinique et à la Guadeloupe et globalement (77).

118. En premier lieu, la Martinique dispose d'un contingent de rhum agricole de 38 842 hap, qui se répartit entre sept distilleries. La Cofepp en détient deux : la distillerie Depaz (10 404 hap soit 26,7 % du contingent de rhum agricole martiniquais) et la distillerie Saint James (10 927 hap soit 28,1 % du contingent de rhum agricole martiniquais). La Cofepp est donc directement attributaire de 54,8 % du contingent de rhum agricole martiniquais.

119. Pour sa part QFS possède à la Martinique la distillerie Bellonie et Bourdillon dont le contingent s'élève à 8 572 hap (22,1 % du contingent de rhum agricole martiniquais). La nouvelle entité sera donc directement attributaire de 76,9 % des contingents de rhum agricole à la Martinique. Le reste du contingent martiniquais en rhum agricole est attribué à la distillerie du Simon (6 395 hap soit 16,5 %), maison-mère de la société Valois et à trois autres distilleries de taille plus modeste : 1 794 hap à la distillerie Crassous de Medeuil qui appartient à la société Clément, maison mère de Spiridom, 600 hap à la distillerie Neisson et 150 hap à l'usine de la Favorite.

120. La répartition des contingents de rhum agricole martiniquais est récapitulée dans le tableau suivant.

<EMPLACEMENT TABLEAU 4>

121. En deuxième lieu, la Guadeloupe dispose d'un contingent de rhum agricole de 9 954 hap, qui se répartit entre neuf distilleries. La Cofepp détient la distillerie Bellevue Marie-Galante à Capesterre, dont le contingent s'élève à 2 260 hap (22,7 % du contingent de rhum agricole guadeloupéen). QFS ne détient pas de distilleries de rhum agricole en Guadeloupe.

122. Le reste du contingent de rhum agricole guadeloupéen est détenu par huit autres distilleries dont les plus importantes sont la distillerie Bellevue au Moule (2 893 hap), qui appartient à la société Damoiseau (maison mère de Spiridom) et la distillerie Bologne (1 687 hap). La Cofepp distribue en métropole le rhum de certaines de ces distilleries comme celle de Montebello (756 hap soit 7,6 % du contingent de rhum agricole guadeloupéen) et la distillerie Poisson (400 hap soit 4,1 %). Au total la Cofepp dispose directement et indirectement (par contrat d'approvisionnement) de 34,4 % du contingent de rhum agricole guadeloupéen.

123. La répartition des contingents de rhum agricole guadeloupéen, en tenant compte de ceux dont la Cofepp est directement attributaire et de ceux dont elle assure seulement la commercialisation, est récapitulée dans le tableau suivant :

<EMPLACEMENT TABLEAU 5>

124. L'opération ne modifiera donc pas la structure de détention des contingents de rhum agricole en ce qui concerne la Guadeloupe. Elle entrainera en revanche le regroupement de près de 77 % des contingents de rhum agricole martiniquais chez la nouvelle entité. Or les contingents martiniquais représentent environ 80 % du total de contingents de rhum agricole. Au total, la nouvelle entité disposera, directement et indirectement (par contrat d'approvisionnement), de 68,3 % des contingents de rhum agricole tous DOM confondus, comme l'indique le tableau suivant.

<EMPLACEMENT TABLEAU 6>

c) La proximité concurrentielle des parties sur le marché du rhum agricole

125. Lorsque les marchés concernés par la concentration sont des marchés de produits ou de services différenciés (ce qui est le cas du rhum agricole, qui se caractérise par une certaine diversité de l'offre en termes d'origine, de marque, de degré d'alcool et de couleur), la proximité des offres des parties à l'opération constitue l'un des facteurs susceptibles d'influer sur la probabilité qu'une opération entraîne des effets horizontaux significatifs (78). En effet, dans ce contexte, l'élimination de la concurrence entre les parties à la concentration peut rendre profitable une hausse des prix substantielle (ou une réduction du volume ou de la qualité de sa production) de l'entité issue de l'opération, celle-ci bénéficiant du caractère captif d'une partie importante des clients alors qu'auparavant, une hausse des prix de l'une des parties aurait conduit à un report important vers l'autre partie (79).

126. La quasi-totalité des opérateurs interrogés lors du test de marché ont souligné que QFS était le concurrent le plus proche de la Cofepp en ce qui concerne la fourniture de rhum agricole sur le circuit off-trade (80).

127. Plusieurs facteurs expliquent cette appréciation. Les parties représentent les volumes les plus importants et disposent de la majorité des principales marques du marché. De plus, les principaux concurrents des parties ont un positionnement différent de celui de la Cofepp et de QFS. Ainsi, Valois, à la différence de la Cofepp et de QFS, a choisi de se concentrer sur les marchés de MDD, MPP et MHD du rhum agricole. Spiridom se distingue également de la Cofepp et de QFS, qui ne vendent que du rhum agricole martiniquais, dans la mesure où il écoule une quantité significative de rhum agricole guadeloupéen.

128. En termes de prix, les produits des parties se situent donc dans une même gamme de prix pour les rhums à 40 et 50°, alors que ceux de Spiridom sont vendus à des prix plus élevés. Pour les rhums à 55°, Dillon, la Mauny et Clément sont positionnés dans la même gamme de prix mais Damoiseau est [...] % plus cher.

129. Il apparaît ainsi que les parties sont les concurrents les plus proches sur le marché du rhum agricole. Combinée à des parts de marché élevées, cette proximité de l'offre des parties est un indice de risque d'effets horizontaux en l'absence de facteurs de limitation tels que le contre-pouvoir de la demande.

d) Le caractère incontournable des marques de rhum agricole détenues par les parties

130. Les parties disposent d'un large portefeuille de marques de rhum agricole. La principale marque de rhum agricole sur le marché français est Dillon (Cofepp) qui représente, en 2010, [10-20] % des ventes tous rhums confondus (81) et [30-40] % des ventes de rhum agricole sous MDF. La deuxième marque la plus vendue est Saint James (Cofepp) qui représente [5-10] % des ventes tous rhums confondus et [20-30] % des ventes de rhum agricole sous MDF. Enfin la troisième marque du marché est La Mauny (QFS) qui représente [0-5] % des ventes tous rhums confondus et [10-20] % des ventes de rhum agricole sous MDF.

131. La nouvelle entité disposerait donc des trois principales marques de rhum agricole vendues en France. Tous les distributeurs interrogés lors du test de marché ont cité Dillon comme une marque qu'ils considèrent comme incontournable dans leur assortiment, c'est-à-dire à défaut de laquelle les distributeurs risquent de perdre une part substantielle de leur chiffre d'affaires dans cette catégorie de produit. La majorité d'entre eux a également évoqué Saint James (Cofepp), la Mauny (QFS) et Trois Rivières (QFS) comme marques incontournables. Les autres marques de rhum agricole (Habitation Saint Etienne, Clément, JM, Bologne ou Coeur de Chauffe) sont peu ou pas qualifiées d'incontournables par les distributeurs.

132. Or le fait de détenir des marques essentielles est important sur le marché du rhum agricole car la marque y constitue un facteur de choix de fournisseur très significatif. Cet état de fait a été mis en exergue par les distributeurs interrogés lors du test de marché, même si certains d'entre eux considèrent également que la disponibilité des volumes de rhum contingenté et le niveau de prix sont aussi des facteurs de choix importants.

133. Les concurrents actifs sur le marché du rhum confirment très largement l'importance de la notoriété de la marque dans les choix des distributeurs, en particulier s'agissant du rhum agricole. Le regroupement chez la nouvelle entité des trois premières marques du marché permettra donc à la Cofepp de devenir un partenaire incontournable de l'offre de rhum agricole et renforcera considérablement sa puissance dans les négociations avec les GMS en matière de prix et de référencement.

e) Le faible contre-pouvoir des acheteurs

134. Les lignes directrices de l'Autorité de concurrence en matière de contrôle des concentrations soulignent que "Le pouvoir de marché d'une entreprise peut être efficacement limité par la puissance d'achat ou contre-pouvoir des acheteurs. (...) La concentration des acheteurs, leur taille, la diversité de leurs achats, sont des facteurs susceptibles de leur conférer une puissance d'achat compensatrice (...). Le Conseil de la concurrence a ainsi estimé dans plusieurs avis que la forte concentration de la grande distribution en France et la puissance d'achat qu'elle confère aux enseignes donnent aux distributeurs un fort pouvoir de négociation vis-à-vis des fournisseurs" (82). Dans le cas du rhum agricole sur le circuit off-trade, il n'apparaît pas qu'il existe un contre-pouvoir de la demande suffisant pour prévenir tout risque d'atteinte à la concurrence.

135. L'aptitude des distributeurs à résister à une hausse de prix de la nouvelle entité dépend essentiellement de la capacité des distributeurs à avoir recours, dans un délai raisonnable, à des sources alternatives d'approvisionnement si le fournisseur décide d'augmenter les prix de vente. C'est le cas si le distributeur peut immédiatement changer de fournisseur, menacer de manière crédible de s'intégrer verticalement en amont, ou promouvoir l'expansion ou l'entrée d'un nouveau fournisseur par exemple en lui passant des commandes importantes. Aucune de ces solutions n'est à la portée des distributeurs au cas d'espèce.

136. Les distributeurs ne peuvent changer de fournisseurs que si ces derniers sont en mesure d'augmenter leurs offres afin de fournir des volumes additionnels. Or le système des contingents limite mécaniquement la capacité des opérateurs alternatifs à exporter plus de rhum agricole vers la métropole, ces volumes supplémentaires étant nécessairement hors contingents et donc soumis à la fiscalité normale. Comme le souligne Valois "la distillerie du Simon peut produire davantage mais ne pourra pas expédier plus de volumes vers la métropole que son contingent ne l'autorise. Seule une augmentation du contingent du Simon permettrait une disponibilité supplémentaire sur le marché France" (83).

137. Les GMS n'auront donc pas la possibilité de remplacer les quantités fournies par QFS par des volumes fournis par d'autres opérateurs. Le nouvel ensemble deviendra ainsi incontournable sur les marchés du rhum agricole, ce qui risque de marginaliser les autres opérateurs et de les cantonner à des marchés de niche. Comme le souligne la société Valois, "la grande distribution n'aura pas d'autre choix que de travailler avec Cofepp, au détriment des autres acteurs, pour avoir une offre globale (...)" (84). Les distributeurs n'envisagent pas non plus la possibilité d'avoir recours à des fournisseurs alternatifs car ils notent, comme Carrefour, que "le fournisseur [Cofepp] deviendra incontournable sur les rhums agricoles et de sucrerie" (85).

138. La partie notifiante suggère cependant que des tiers pourraient développer leur offre en acquérant du rhum en vrac auprès de petites distilleries connaissant des difficultés. Cette possibilité ne peut cependant pas constituer une solution viable dans la mesure où les contingents non utilisés sont généralement répartis au prorata des contingents déjà détenus (donc plutôt à la Cofepp et QFS), les contingents n'étant en outre pas cessibles entre opérateurs. En tout état de cause, les volumes évoqués par la partie notifiante ([< 3 000 hap]) seraient loin de compenser la disparition de QFS en tant que fournisseur indépendant (8 572 hap de contingents rien qu'en rhum agricole). De plus, l'acquisition ponctuelle de volumes auprès de tiers qui ne pourraient les utiliser n'offre pas la visibilité nécessaire à une stratégie industrielle et commerciale crédible.

139. Les distributeurs ne sont pas non plus en position de développer leur intégration verticale en amont, ce qui reviendrait à intensifier la présence des MDD sur le rhum agricole. La MDD représente une part relativement limitée des volumes de rhum agricole (27 %), reflétant en cela le poids des marques sur ce marché. Les perspectives de progression des MDD sur le marché du rhum sont relativement faibles dans la mesure où, comme l'indique Spiridom "des arbitrages sont effectués par les opérateurs entre la MDD et les marques de fabricant, le plus souvent au détriment des MDD d'où la progression limitée de ces dernières". En effet, selon Valois "les fabricants qui agissent sur les marchés de MDF et des MDD privilégient leur marque et réduisent les volumes accordés aux MDD puisqu'ils sont obligés d'arbitrer leurs volumes dans un contexte contingenté" (86). De surcroit, il convient de relever que la Cofepp est l'un des principaux fournisseurs actuels de rhum agricole sous MDD et que toute tentative de développement des MDD se heurterait au même problème d'approvisionnement en rhum contingenté.

140. Dans ce contexte, il n'apparait pas non plus que les distributeurs soient en mesure de promouvoir l'entrée ou l'expansion d'un nouveau fournisseur pour les mêmes raisons que celles développées quant à la capacité des détaillants à changer de fournisseur.

141. Le contre-pouvoir de la demande n'apparaît donc pas au cas d'espèce suffisant pour prévenir tout risque d'atteinte à la concurrence sur le marché du rhum agricole.

f) Aucune nouvelle entrée n'est envisageable

142. Les concurrents et les clients ayant répondu au test de marché ne font pas état d'entrées récentes sur le marché du rhum agricole, à l'exception de petites marques dont les volumes sont particulièrement faibles (comme la marque Bologne distribué par Tradeslink) (87). Ils ne s'attendent pas non plus à de nouvelles entrées dans les années à venir.

143. Le marché du rhum agricole se caractérise en effet par des barrières à l'entrée particulièrement élevées. La principale est le système de contingents fixes et non cessibles qui ne permet pas aux opérateurs tiers de réagir par une augmentation de l'offre à d'éventuelles hausses de prix.

144. Comme le souligne Marie Brizard "par sa structuration et son organisation actuelle, le marché du rhum est verrouillé tant au niveau de la production que de la distribution. (...) Aucun opérateur tiers ne peut s'approvisionner sur le rhum contingenté et bénéficier du taux d'accise réduit. (...) L'effet d'éviction résultant du régime fiscal compte tenu d'un taux d'accise réduit confisque le marché au profit des producteurs entre lesquels sont répartis ces contingents" (88).

145. Ainsi, la construction de nouvelles distilleries est inenvisageable sans contingents associés. Seule une augmentation du contingent (et une répartition du contingent additionnel au profit d'opérateurs tiers) ou une nouvelle répartition du contingent existant seraient susceptibles de permettre l'entrée de nouveaux acteurs ou le développement d'opérateurs alternatifs déjà présents, solution peu crédible.

g) Conclusion sur le rhum agricole off-trade

146. En conséquence, l'opération porte atteinte à la concurrence sur le marché du rhum agricole dans le circuit off-trade par le biais d'effets horizontaux. La partie notifiante ne conteste pas cette analyse.

4. LE MARCHÉ DU RHUM NON-AGRICOLE OFF-TRADE

a) Analyse en termes de parts de marché

Marché du rhum non-agricole off-trade, tous positionnements confondus (MDF, MDD/MPP et MHD)

147. D'après les données communiquées par la partie notifiante, le marché du rhum non-agricole off-trade en France en 2010 a représenté un volume de 15,76 millions de litres, dont 54,6 % de rhum vendu sous MDF, 27,7 % de rhum vendu sous MDD/MPP et 17,7 % de rhum vendu sous MHD.

148. Les parts de marché des parties et de leurs principaux concurrents sont présentées dans le tableau ci-dessous.

<EMPLACEMENT TABLEAU 7>

149. La nouvelle entité détiendra donc une part de marché de [80-90] %, très largement supérieure à celle de ses principaux concurrents Valois, Pernod Ricard et Bacardi, dont aucun ne dépasse [10-20] %.

150. A l'issue de l'opération, la concentration du marché du rhum non-agricole off-trade atteindra 7 286 IHH, l'acquisition de QFS par la Cofepp entraînant un delta de 2 688, niveaux qui excèdent très significativement les seuils retenus par les lignes directrices pour écarter toute probabilité de problèmes horizontaux de concurrence.

151. En ce qui concerne le positionnement du produit, l'analyse pour le rhum non-agricole portera sur les marchés MDF, MDD/MPP et MHD, dans la mesure où les parties à l'opération sont présentes sur tous les types de produits.

Marché du rhum non-agricole off-trade vendu sous MDF

152. D'après les données communiquées par la partie notifiante, le marché du rhum non-agricole off-trade vendu sous MDF en France en 2010 a représenté un volume de 8,6 millions de litres. La Cofepp est présente sur ce marché avec les marques Old Nick et Negrita alors que QFS commercialise la marque Charrette. Bacardi distribue la marque Bacardi et Pernod Ricard est présent avec la marque Havana Club.

153. Les parts de marché des parties et de leurs principaux concurrents sont présentées dans le tableau ci-dessous.

<EMPLACEMENT TABLEAU 8>

154. La part de marché cumulée des parties sur le rhum agricole vendu sous MDF sera ainsi équivalente à celle sur le rhum non-agricole tous positionnements confondus. Aucun des concurrents des parties ne détiendra une part de marché supérieure à [10-20] %.

155. A l'issue de l'opération, la concentration du marché du rhum non-agricole sous MDF atteindra 6 253 IHH, l'acquisition de QFS par la Cofepp entraînant un delta de 2 964. De tels niveaux excèdent de manière très importante les seuils retenus par les lignes directrices pour écarter toute probabilité de problèmes horizontaux de concurrence.

Marché du rhum non-agricole off-trade vendu sous MDD/MPP

156. D'après les données communiquées par la partie notifiante, le marché du rhum non-agricole off-trade vendu sous MDD/MPP en France en 2010 a représenté un volume de 4,36 millions de litres. Les parts de marché des parties et de leurs principaux concurrents sont présentées dans le tableau ci-dessous.

<EMPLACEMENT TABLEAU 9>

157. Les parties détiendront donc plus de [70-80] % du marché du rhum non-agricole vendu sous MDD/MPP, obtenant ainsi une position plus de quatre fois supérieure à celle de leur unique concurrent identifié, la société Valois ([10-20] %). L'opération réduira de trois à deux le nombre d'offreurs sur le marché du rhum non-agricole vendu sous MDD/MPP.

158. A l'issue de l'opération, la concentration du marché du rhum non-agricole sous MDD/MPP atteindra 4 630 IHH, l'acquisition de QFS par la Cofepp entraînant un delta de 2 196. De tels niveaux excèdent très largement les seuils retenus par les lignes directrices pour écarter toute probabilité de problèmes horizontaux de concurrence.

Marché du rhum non-agricole off-trade vendu sous MHD

159. D'après les données communiquées par la partie notifiante, le marché du rhum non-agricole off-trade vendu sous MHD en France en 2010 a représenté un volume de 2,8 millions de litres. Les parts de marché des parties et de leurs principaux concurrents sont présentées dans le tableau ci-dessous.

<EMPLACEMENT TABLEAU 10>

160. Les parties détiendront donc [...] % du marché du rhum non-agricole vendu sous MHD, seul Valois étant également offreur sur ce marché, avec une position marginale.

161. A l'issue de l'opération, la concentration du marché du rhum non-agricole sous MHD atteindra 9 041 IHH, l'acquisition de QFS par la Cofepp entraînant un delta de 1 232. De tels niveaux excèdent très significativement les seuils retenus par les lignes directrices pour écarter toute probabilité de problèmes horizontaux de concurrence.

b) Analyse en termes de contingents de rhum non-agricole

162. L'opération entraînera des additions de contingents de rhum non-agricole, dans la mesure où les distilleries de QFS seront transférées à la Cofepp. L'analyse portera donc sur les additions de contingents de rhum non-agricole à la Martinique, à la Guadeloupe et à La Réunion (les parties ne produisent pas de rhum en Guyane) et globalement (89).

163. En premier lieu, à la Martinique, la SAEM du Galion est la seule distillerie de rhum non-agricole attributaire de contingents (10 195 hap). La SAEM du Galion est une société d'économie mixte dans laquelle les collectivités territoriales martiniquaises sont majoritaires (à hauteur de [...] %). La Cofepp détient [...] % du capital de cette distillerie et la distillerie du Simon, dont la société Valois est une filiale, en possède [...] %. La Cofepp dispose de deux sièges sur quatorze au conseil d'administration de la SAEM du Galion, les autres sièges étant occupés par des représentants des collectivités publiques ou des planteurs de cannes à sucre. Selon la partie notifiante, sa participation minoritaire ne permet pas à la Cofepp de disposer d'un pouvoir d'influence particulier sur la distribution du contingent attribué à la SAEM du Galion.

164. Cependant, les contingents attribués à la SAEM du Galion sont "mis à disposition" (90) de la Société de Production et de Commercialisation des Rhums du Galion ("SPCRG") (91). La Cofepp, avec [> 50] % du capital, est actionnaire majoritaire de la SPCRG [Confidentiel] (92). La participation de Valois dans la société ne s'élève qu'à [...] % et celle de la SAEM du Galion qu'à [...] %. Les dispositions du pacte d'actionnaires en vigueur entre la Cofepp et Valois relatif à la SPCRG prévoient les modalités de ventilation du contingent de la SCPRG. La Cofepp accède ainsi à [...] hap des contingents de la SPCRG, soit environ [80-90] % du total et Valois à [...] hap, soit [10-20] %, le pacte précisant que [Confidentiel].

165. La présence de Valois dans l'actionnariat de la SPCRG et le mécanisme dans le pacte d'actionnaire garantissant à cette société l'accès à un volume de rhum contingenté s'expliquent par la volonté de la société et du groupe Holmex de pérenniser son activité dans la fourniture de rhum. Selon les explications de la société Valois, "la prise de participation dans la SPCRG a été décidée (...) il y a 5 ou 6 ans, parce que la société se sentait menacée par le comportement de QFS qui réduisait progressivement les volumes fournis à Valois chaque année à La Réunion. Cette prise de participation visait donc à sécuriser l'approvisionnement de Valois en rhum" (93).

166. Outre l'accès de Valois à des volumes de rhum contingenté de la SAEM du Galion, les dispositions du pacte d'actionnaires prévoient de maintenir "les échanges commerciaux et partenariat existants entre [la Cofepp et Valois] à savoir la vente de [...] hap de SIS [filiale de Cofepp] à Valois de rhum contingenté et les accords industriels de Slaur [filiale de Cofepp] avec Valois pour notamment l'embouteillage et le conditionnement" (94). Sont ainsi pérennisés la fourniture à Valois de volumes de rhum contingentés par une filiale de la Cofepp et l'embouteillage par la Cofepp du rhum MDD/MPP fourni par Valois sur le marché.

167. La répartition des contingents de rhum non-agricole martiniquais est récapitulée dans le tableau suivant.

<EMPLACEMENT TABLEAU 11>

168. En deuxième lieu, la Guadeloupe dispose d'un contingent de rhum non-agricole de 27 944 hap, réparti entre trois distilleries.

169. La Société Industrielle de Sucrerie de Bonne Mère ("SIS"), dont l'intégralité du capital est détenu par la Cofepp (95) est attributaire de 16 133 hap, soit 57,7 % du total de contingents de rhum non-agricole guadeloupéen. Dans la mesure où les dispositions du pacte d'actionnaires relatif à la SPCRG garantissent l'attribution à Valois d'une partie de ces volumes ([...] hap), il est possible de considérer que la Cofepp est directement attributaire de [...] hap des contingents de la SIS et que Valois est indirectement attributaire de [...] hap.

170. La Sucrerie de Gardel est attributaire de 6 098 hap, soit 21,8 % du total de contingents de rhum non-agricole guadeloupéen. La Cofepp est le premier actionnaire de cette distillerie, avec une part de capital de [...] %. Les autres actionnaires sont les entreprises sucrières Saint Louis Sucre ([...] %) et Tereos ([...] %), l'Agence Française de Développement ([...] %) et la Caisse des dépôts et consignations ([...] %). La Cofepp prétend que sa participation minoritaire ne lui permet pas de disposer d'un pouvoir d'influence particulier sur la distribution du contingent attribué à la distillerie. Il apparaît toutefois que la Cofepp, qui est le seul actionnaire de la Sucrerie de Gardel avec une activité industrielle et commerciale dans le rhum, accède contractuellement à l'intégralité des contingents de rhum attribués à la distillerie.

171. Enfin la SA des Sucreries et Rhumeries de Marie-Galante ("SRMG") est attributaire de 5 713 hap, soit 20,5 % des contingents de rhum non-agricole guadeloupéen. La Cofepp est l'actionnaire majoritaire de cette distillerie avec une part de capital de [...] %, les [...] % restants étant détenus par une Société d'Intérêt Collectif Agricole ("SICA") regroupant des planteurs. La Cofepp est ainsi directement attributaire de l'intégralité des contingents de la SRMG.

172. La répartition des contingents de rhum non-agricole guadeloupéen, en tenant compte de ceux dont les distilleries détenues par la Cofepp sont directement attributaires et de ceux dont elle assure seulement la commercialisation, est récapitulée dans le tableau suivant.

<EMPLACEMENT TABLEAU 12>

173. En troisième lieu, La Réunion dispose d'un contingent de rhum non-agricole de 20 615 hap, réparti entre trois distilleries. Les distilleries Rivière du Mât (13 087 hap soit 63,5 % des contingents de rhum non-agricole réunionnais) et de Savanna (5 497 hap soit 26,6 % des contingents) appartiennent à QFS. La distillerie Isautier (2 031 hap soit 9,9 % des contingents) appartient à la société Isautier.

174. Or, la marque réunionnaise Charrette est commercialisée par le GIE Rhums Réunion, dans laquelle QFS est majoritaire ([...] % des parts) et Isautier est minoritaire ([...] %). Cette structure réunit les moyens techniques indispensables aux opérateurs du rhum réunionnais, notamment en termes de maîtrise du foncier et de mutualisation du stockage. Une partie des contingents de la distillerie Isautier ([...] hap) est ainsi utilisée pour la commercialisation de la marque Charrette.

175. QFS détient donc directement 90 % des contingents de rhum non-agricole réunionnais. La répartition des contingents de rhum non-agricole réunionnais, en tenant compte de ceux dont les distilleries détenues par QFS sont directement attributaires et de ceux dont elle assure seulement la commercialisation au-travers de Charrette, est récapitulée dans le tableau suivant.

<EMPLACEMENT TABLEAU 13>

176. En définitive, la nouvelle entité disposera, directement ou indirectement, de [90-100] % des contingents de rhum non-agricole tous DOM confondus, comme l'indique le tableau suivant.

<EMPLACEMENT TABLEAU 14>

c) La dépendance des concurrents des parties pour le rhum non-agricole

177. Les lignes directrices de l'Autorité de concurrence en matière de contrôle des concentrations soulignent que "le nombre, les parts de marché et les atouts concurrentiels des concurrents de l'entité fusionnée sont également des facteurs essentiels dans l'analyse des effets horizontaux d'une concentration. En particulier, l'Autorité évalue la capacité des concurrents actuels à réagir face à la nouvelle situation créée par l'opération. (...) Les possibilités de réaction des concurrents peuvent toutefois être freinées par l'entreprise créée, qui contrôlerait, par exemple, des ressources nécessaires à la production, l'accès à des contenus dans le secteur des médias, des brevets ou des droits de propriété intellectuelle essentiels pour les concurrents, ou encore d'importantes capacités de distribution des biens ou services concernés" (96).

178. Le principal concurrent (et unique opérateur identifié sur les marchés du rhum agricole sous MDD/MPP et sous MHD) des parties sur les marchés du rhum non-agricole est la société Valois. Bien qu'absent du marché du rhum non-agricole vendu sous MDF, Valois détient une part de marché d'environ [10-20] % pour les rhums non-agricoles vendus sous MDD/MPP, et de [0-5] % pour les rhums non-agricoles vendus sous MHD.

179. Valois n'a pas directement accès à des contingents de rhum non-agricole, à l'exception des [...] hap dont elle dispose en raison des participations de la distillerie du Simon dans la SAEM du Galion et la SCPRG en Martinique et des [...] hap annuels de rhum de Guadeloupe en provenance de la SIS de Bonne Mère. Valois se fournit aussi en rhum non-agricole réunionnais auprès de QFS ([...] hap annuels de rhum réunionnais).

180. Comme l'explique la société Valois, cet approvisionnement auprès de ses principaux concurrents a des origines historiques : "Premièrement, en ce qui concerne la Guadeloupe, la SIS était actionnaire de Valois quand elle a été rachetée par la Cofepp au milieu des années 1990. Cette dernière (...) s'est engagée à maintenir sa part dans l'utilisation des contingents acquis par cette opération, ce qui l'a conduit à maintenir des contrats d'approvisionnement en rhum entre la SIS et Valois. Ces contrats sont renégociés tous les ans depuis environ 20 ans. Malgré la durée relativement faible de chacun de ces contrats, la Cofepp, via la SIS, a toujours respecté ses engagements de façon satisfaisante pour la société Valois. Le contrat est renégocié chaque début d'année, et un planning d'approvisionnement souhaité par Valois est établi. Les prix pratiqué par la SIS varient chaque année de 4 à 6 centimes d'euro en fonction de l'évolution des coûts de production. Ces prix sont cependant plus élevés que le coût de cession interne pour La Martiniquaise (groupe Cofepp), et il est très difficile pour Valois de rester compétitif à ce niveau sur le marché" (97).

181. Par ailleurs, l'approvisionnement de Valois en rhum guadeloupéen et réunionnais s'explique par le positionnement commercial de la société sur les marchés de MDD, "dans la mesure où le produit que [Valois] vend est un assemblage des trois rhums différents. Cet assemblage, appelé "rhum traditionnel des DOM", nous permet de maintenir constante la qualité et le goût du produit vendu sous MDD. Le fait de fournir un assemblage a aussi pour avantage de nous prémunir contre un risque d'aléa dans l'approvisionnement d'une des origines" (98).

182. La partie notifiante a confirmé que le rhum non-agricole qu'elle vend sous MDD est également un assemblage de rhum de diverses origines, pour des raisons liées à la qualité organoleptique des produits et aux différences de calendrier de campagnes de ramassage des cannes à sucre (de février à juin aux Antilles et de septembre à janvier à La Réunion), et pour prévenir les risques liés à d'éventuelles calamités naturelles (99). Le rhum de sucrerie vendu par QFS sous MDD/MPP et MHD est également un assemblage pour le rhum ambré (le rhum blanc est quasi exclusivement d'origine réunionnaise) (100).

183. La volonté de procéder à des assemblages de rhum non-agricole issus de diverses origines se reflète également avant l'opération dans les achats de rhum non-agricole entre la Cofepp et QFS. La Cofepp, qui ne détient pas de distilleries à La Réunion, se procure [...] hap par an de rhum non-agricole réunionnais auprès de QFS. QFS pour sa part achète annuellement [...] hap de rhum non-agricole guadeloupéen auprès de la Cofepp en provenance de la SIS de Bonne Mère. Les assemblages de rhum issu des trois origines constituent donc une pratique courante des acteurs du secteur.

184. Il convient toutefois de noter que la détention de distilleries et donc de contingents d'un DOM a une influence non négligeable sur la composition de l'assemblage. La Cofepp, qui détient des distilleries à la Guadeloupe mais pas à la Réunion, indique "[Confidentiel]" (101). QFS, qui possède des distilleries à la Réunion mais pas à la Guadeloupe, souligne que "[Confidentiel]". Valois a un approvisionnement plus diversifié, qui reflète sa volonté de ne pas dépendre d'un seul fournisseur.

185. Ainsi, après l'opération la concurrence sur les marchés du rhum non-agricole sera exclusivement animée par un acteur dont l'approvisionnement en matière première dépendra pour une large part (près de [60-70] %) de la Cofepp, ce qui amoindrira dans une large mesure sa capacité à se poser en rival crédible de la nouvelle entité. Valois est conscient de cette difficulté et souligne que "l'acquisition de QFS par la Cofepp va créer un quasi-monopole sur le marché de la fourniture de rhum" (102). Le problème est d'autant plus aigu que, sur les marchés MDD, "tout volume perdu par Valois à l'achat sera un volume gagné par la Cofepp" (103).

186. La dépendance de Valois à l'égard de la nouvelle entité ne concernera pas seulement son approvisionnement en matières premières mais également l'embouteillage de ses rhums non-agricoles vendus sous MDD, MPP et MHD, qui est effectué par la société Slaur, filiale de la Cofepp, Valois ne disposant pas de capacités d'embouteillage.

187. En conséquence, la capacité pour Valois de mettre les deux parties en concurrence dans le cadre de son approvisionnement en rhum de sucrerie disparaîtra complètement avec cette opération. La Cofepp sera donc en mesure de restreindre la concurrence sur les marchés MDD, MPP et MHD.

d) La proximité concurrentielle des parties sur le marché du rhum non-agricole

188. L'ensemble des concurrents et des clients interrogés lors du test de marché ont souligné que QFS était le concurrent le plus proche de la Cofepp en ce qui concerne la fourniture de rhum non-agricole sur le circuit off-trade. Il apparaît en effet que la Cofepp et QFS sont attributaires de la quasi-totalité des contingents de rhum non-agricole. La Cofepp et QFS disposent également des trois principales marques de rhum agricole, la quatrième et la cinquième étant des marques de rhum cubain (Bacardi et Havana Club) qui ne bénéficient pas de la fiscalité dérogatoire des rhums des DOM.

189. La Cofepp conteste cette analyse et prétend que "pour beaucoup de distributeurs, QFS n'est pas le seul principal concurrent de la Cofepp, position aussi occupée par Pernod-Ricard et Bacardi, avec leurs marques respectives Havana Club et Bacardi, dont la croissance ces dernières années est particulièrement importante, nonobstant un différentiel de prix lié au positionnement "premium" que ces groupes souhaitent défendre pour leurs marques respectives" (104).

190. Cependant, la concurrence d'Havana Club et de Bacardi n'est pas soulignée par les clients de la Cofepp, mais par ses concurrents. En outre, la présence et la "progression" d'Havana Club et de Bacardi sont somme toute modestes puisqu'elles se traduisent par une part de marché respective de [0-5] et [0-5] %. En comparaison, Charrette, principale marque de rhum non agricole de QFS, a quasiment doublé ses volumes entre 2008 et 2010 (de [...] à [...] cols) pour atteindre une part de marché de [10-20] %, [Confidentiel]. Enfin, les prix de vente de Bacardi et Havana Club, qui sont produits en dehors des DOM et ne bénéficient pas du système contingentaire, sont de 30 à 50 % plus élevés que les prix de vente de rhum des parties.

191. Valois, autre acteur du marché du rhum non-agricole, a également un positionnement différent de celui des parties puisqu'il vend l'intégralité de ses volumes sous MDD, MPP et MHD alors que la Cofepp et QFS écoulent respectivement [50-60] % et [40-50] % de leur volume de rhum non-agricole sous MDF.

192. Il apparaît ainsi que les parties sont les concurrents les plus proches sur le marché du rhum non-agricole. Combinée à des parts de marché élevées, cette proximité de l'offre des parties est un indice significatif de risque d'effets horizontaux en l'absence de facteurs de limitation tels que le contre-pouvoir de la demande.

e) Le caractère incontournable des marques de rhum non-agricole détenues par les parties

193. Les parties disposent d'un large portefeuille de marques de rhum non-agricole. La principale marque de rhum non-agricole sur le marché français (et de rhum en général) est Old Nick (Cofepp) qui représente, en 2010, [10-20] % des ventes tous rhums confondus (105) et [30-40] % des ventes de rhum non-agricole sous MDF. La deuxième marque la plus vendue est Negrita (Cofepp) qui représente [10-20] % des ventes tous rhums confondus et [20-30] % des ventes de rhum non-agricole sous MDF. Enfin la troisième marque du marché est Charrette (QFS) qui représente [10-20] % des ventes tous rhums confondus) et [20-30] % des ventes de rhum agricole sous MDF. Suivent ensuite Pernod Ricard avec Havana Club ([0-5] % des ventes de rhum) et Bacardi avec la marque éponyme ([0-5] % des ventes de rhum).

194. La nouvelle entité disposera donc des trois principales marques de rhum non-agricole vendues en France. Tous les distributeurs interrogés lors du test de marché ont cité Old Nick comme une marque qu'ils considèrent comme incontournable dans leur assortiment. Une très grande majorité d'entre eux a également qualifié Charrette et Negrita de marques incontournables. Les autres marques de rhum non-agricole, notamment Havana Club et Bacardi, ne sont pas considérées comme incontournables par une majorité de distributeurs.

195. Comme en matière de rhum agricole, la détention de marques essentielles est importante parce que la marque fait partie des critères clé pour le choix d'un fournisseur sur le marché du rhum non-agricole. Les concurrents et les clients ont confirmé dans leurs réponses au test de marché l'importance de la notoriété de la marque dans les choix des distributeurs même si les MDD représentent également des volumes significatifs du rhum non-agricole. Le regroupement au sein de la nouvelle entité des trois premières marques du marché fera donc de la Cofepp un partenaire incontournable pour l'offre de rhum non-agricole et renforcera considérablement sa puissance dans les négociations avec les GMS en matière de prix et de référencement.

f) Le faible contre-pouvoir des acheteurs

196. Comme en matière de rhum agricole, les distributeurs disposeront de peu d'alternatives pour changer de fournisseurs dans un contexte où la nouvelle entité représentera [70-80] % de l'offre de rhum non-agricole et plus de [90-100] % des contingents. Le choix des distributeurs sera d'autant plus contraint que Valois, la principale alternative à la Cofepp à l'issue de l'opération, sera largement alimenté en rhum par la nouvelle entité. Quant aux autres fournisseurs (Bacardi, Pernod Ricard), ils constituent au mieux pour les distributeurs des alternatives de second rang, compte tenu de l'origine de leurs produits (rhum de Cuba et non des DOM), du degré d'alcool de leurs produits (37,5° alors que les rhums des DOM titrent entre 40° et 55°) et de leur prix plus élevé (ne bénéficiant pas de la fiscalité dérogatoire du rhum des DOM). Comme pour le rhum agricole, les acteurs du marché soulignent donc que la nouvelle entité sera un partenaire incontournable de la distribution, en raison de l'absence d'alternatives.

197. Outre les parties, seule la distillerie Isautier dispose de contingents de rhum non-agricole (2 031 hap). Toutefois ces contingents sont utilisés, d'une part pour alimenter la marque Charrette dans laquelle Isautier est actionnaire ([...] hap), ensuite pour alimenter la marque Isautier ([...] hap), faiblement présente en métropole mais bien développée à La Réunion, le solde ([...] hap) étant vendu en vrac à QFS. Les contingents d'Isautier sont donc totalement utilisés et ne suffiraient en tout état de cause pas à compenser la disparition de QFS en tant que fournisseur indépendant.

198. Les distributeurs ne sont pas non plus en position d'augmenter le poids des MDD sur le rhum non-agricole. En effet, ils seraient contraints pour ce faire d'utiliser du rhum de la Cofepp, soit directement (la nouvelle entité représentant plus des [60-70] % de l'offre de rhum non-agricole MDD/MPP), soit indirectement par l'intermédiaire de Valois.

199. Dans ce contexte, il n'apparait pas non plus que les distributeurs soient en mesure de promouvoir l'entrée ou l'expansion d'un nouveau fournisseur pour les mêmes raisons que celles développées quant à la capacité des détaillants à changer de fournisseur.

200. Le contre-pouvoir de la demande n'apparaît donc pas au cas d'espèce suffisant pour prévenir tout risque d'atteinte à la concurrence.

g) Aucune nouvelle entrée n'est envisageable

201. Comme pour le rhum agricole, les concurrents et les clients ayant répondu au test de marché ne font pas état d'entrées récentes sur le marché du rhum non-agricole. La Cofepp fait valoir que Diageo est entrée récemment sur le marché du rhum avec le rhum vénézuélien Pampero en septembre 2011. Outre le fait qu'il est aujourd'hui trop tôt pour juger de l'impact et de la pérennité de cette entrée, la marque Pampero est plutôt destinée à concurrencer les marques Havana Club et Bacardi, avec lesquelles elle partage une origine commune (Amérique latine hispanophone), le même degré d'alcool (37,5°) et un positionnement en prix comparable.

202. Les acteurs du marché ne s'attendent pas non plus à de nouvelles entrées dans les années à venir. Le marché du rhum non-agricole se caractérise en effet par les mêmes barrières à l'entrée que le marché du rhum agricole. La principale est le système de contingents fixes et non cessibles qui ne permet pas aux opérateurs tiers de réagir par une augmentation de l'offre à d'éventuelles hausses de prix introduites par l'entité fusionnée, et qui empêche toute nouvelle entrée. De la même manière, seule une augmentation du contingent au profit d'opérateurs tiers ou une nouvelle répartition du contingent existant seraient susceptibles de permettre l'entrée de nouveaux acteurs ou le développement d'opérateurs alternatifs déjà présents.

h) Conclusion sur le rhum non-agricole off-trade

203. En conséquence, l'opération porte atteinte à la concurrence sur le marché du rhum non-agricole dans le circuit off-trade par le biais d'effets horizontaux. Le risque d'atteinte à la concurrence causé par la concentration concerne aussi bien les marchés MDF que les marchés de vente de rhum non agricole sous MDD, MPP et MHD. Il convient de souligner, à cet égard, qu'à la différence des autres marchés MDD, MPP et MHD de spiritueux qui seront examinés plus loin, le regroupement au sein de la Cofepp de la quasi-totalité des sources d'approvisionnement en rhum non agricole empêche les offreurs présents sur le marché du rhum de compenser la perte de concurrence induite par l'opération et le développement d'offres alternatives. La partie notifiante ne conteste pas cette analyse.

5. IMPACT DE L'OPÉRATION DANS LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE MER

204. La Cofepp n'est actuellement pas présente sur le marché réunionnais de la fourniture de rhum et QFS n'est pas active sur le marché guadeloupéen de la fourniture de rhum. Aucune des parties n'est active en Guyane. L'analyse de l'impact de l'opération dans les DOM portera donc exclusivement sur les marchés off-trade à la Martinique.

205. QFS est le premier fournisseur de rhum à la Martinique avec [20-30] % de parts de marché et trois marques, La Mauny, Trois Rivières et Duquesne. La part de marché de Cofepp est de [10-20] % avec également trois marques, Depaz, Dillon et Bally. La part de marché cumulée des parties est donc de [40-50] %. La principale marque de rhum à la Martinique est Saint James ([10-20] %). Bien qu'appartenant à Cofepp (*), elle est distribuée localement par Roger Albert Distribution, qui se voit donc attribuer sa part de marché. Les autres acteurs du marché martiniquais sont le groupe Bernard Hayot avec ses marques Clément et JM ([10-20] %), Habitation Saint Etienne ([10-20] %) et la société Neisson ([5-10] %).

206. L'opération regroupe donc le premier et le troisième acteur du marché martiniquais du rhum avec une part de marché plus de deux fois supérieure à celle de son principal concurrent. Compte tenu de l'importance des marques des parties, de la proximité de leurs offres et du niveau élevé des barrières à l'entrée (octroi de mer pour les produits importés, taux d'accise réduits pour le rhum consommé dans les DOM, coûts importants pour construire ou agrandir une distillerie), l'impact de l'opération sur le marché martiniquais est significatif. Cette appréciation est partagée par de nombreux acteurs du marché, en particulier Spiridom et de Valois qui craignent que l'opération engendre des effets anticoncurrentiels en agrégeant au sein de la Cofepp des marques martiniquaises fortes.

207. S'agissant du punch, la Cofepp est le premier fournisseur à la Martinique avec une part de marché de [30-40] % et trois marques, Dormoy (la principale), Dillon et Depaz. La part de marché de QFS est de [5-10] % avec deux marques, La Mauny et Duquesne. La part de marché cumulée des parties est donc de [40-50] %. Les autres acteurs du marché martiniquais sont le groupe Bernard Hayot avec sa marque Clément ([20-30] %), Socara avec sa marque Biguine ([10-20] %) et Madras avec la marque éponyme ([5-10] %).

208. L'opération regroupe donc les premier et quatrième acteurs du marché martiniquais avec une part de marché bien supérieure à celle de leur principal concurrent. Compte tenu de l'importance des marques des parties, de la proximité de leurs offres et du niveau élevé des barrières à l'entrée, qui sont similaires à celles présentes sur le marché du rhum et aggravées du fait de la position importante des parties sur le marché du rhum martiniquais, l'impact de l'opération est significatif sur le marché du punch martiniquais.

209. En conséquence, l'opération porte atteinte à la concurrence sur le marché du rhum et du punch en Martinique par le biais d'effets horizontaux.

B. MARCHÉS OFF-TRADE DES SPIRITUEUX VENDUS SOUS MDD/MPP ET SOUS MHD

210. Les parties sont simultanément présentes sur les marchés des spiritueux vendus sous MDD/MPP et sous MHD mentionnés dans le tableau suivant :

<EMPLACEMENT TABLEAU 15>

1. LES VINS DOUX NATURELS

211. Sur le marché des vins doux naturels sous MDD/MPP, la part de marché de la nouvelle entité à l'issue de l'opération s'élèvera à [20-30] % ([10-20] % pour la Cofepp et [0-5] % pour QFS). La nouvelle entité sera notamment confrontée à la concurrence des sociétés Picard et Sivir (respectivement [10-20] % et [10-20] % de parts de marché) ainsi qu'à des coopératives de producteurs qui représentent ensemble un tiers de l'approvisionnement des GMS en vins doux naturels sous MDD/MPP.

212. Sur le marché des vins doux naturels sous MHD, l'opération n'aura qu'un très faible impact, compte tenu de la présence très réduite de QFS sur ce marché ([0-5] % de parts de marché), la part de marché de la nouvelle entité s'élevant à [5-10] % à l'issue de l'opération.

213. Sur un éventuel marché limité aux Rivesaltes, l'opération n'entraînera aucun chevauchement d'activité, QFS ne proposant pas de Rivesaltes vendus sous MDD/MPP et la Cofepp ne proposant pas de Rivesaltes vendus sous MHD. De même, sur un éventuel marché limité aux Muscats, l'opération n'entraînera aucun chevauchement d'activité en matière de MHD, QFS étant absent de ce marché. Concernant les MDD/MPP, la part de marché de la nouvelle entité s'élèverait à [20-30] % ([10-20] % pour la Cofepp et [5-10] % pour QFS) et la nouvelle entité sera confrontée à la concurrence des opérateurs préalablement cités en matière de vins doux naturels et avec des parts de marché du même ordre.

214. L'opération ne porte donc pas atteinte à la concurrence sur le ou les marchés des vins doux naturels sous MDD/MPP.

2. LES LIQUEURS DE MENTHE

215. Sur le marché des liqueurs de menthe sous MDD/MPP, la part de marché de la nouvelle entité demeurera modérée puisqu'elle s'élèvera à [20-30] % ([10-20] % pour la Cofepp et [5-10] % pour QFS). L'opération ne porte donc pas atteinte à la concurrence sur le marché des liqueurs de menthe sous MDD/MPP.

3. LE SCOTCH WHISKY

216. Sur le marché du scotch whisky sous MDF, seul marché de MDF avec le rhum et les punchs sur lequel l'opération entraîne un chevauchement d'activité, l'impact de l'opération serait mineur, compte tenu de la très faible position de QFS sur ce marché ([0-5] %), la nouvelle entité détenant [20-30] % de parts de marché.

217. Sur les marchés du scotch whisky sous MDD/MPP et sous MHD, les parts de marchés de la nouvelle entité demeureront modérées puisqu'elles s'élèveront à [10-20] % en MDD/MPP ([0-5] % pour la Cofepp et [10-20] % pour QFS) et à [5-10] % en MHD ([0-5] % pour la Cofepp et [5-10] % pour QFS).

218. Sur un éventuel marché du scotch whisky de moins de douze ans d'âge sous MDF, l'impact de l'opération sera mineur, compte tenu de la très faible position de QFS ([0-5] %). De même, l'opération entraînera un incrément de [5-10] % de parts de marché dans la vente de ce produit sous MDD/MPP et MHD, la Cofepp représentant [20-30] % du marché à l'issue de l'acquisition.

219. L'opération ne porte donc pas atteinte à la concurrence sur le ou les marchés du scotch whisky sous MDD/MPP, MHD, ou MDF.

4. LE BOURBON

220. La nouvelle entité représentera [50-60] % des ventes de bourbon sous MDD/MPP ([30-40] % pour la Cofepp et [20-30] % pour QFS). La partie notifiante n'a pas été en mesure d'estimer les positions de ses principaux concurrents sur ce marché du bourbon sous MDD/MPP.

221. En dépit de ces parts de marché élevées, les clients interrogés lors du test de marché n'ont pas fait part de préoccupations particulières quant à l'effet de l'opération concernant ce produit. En effet, les ventes de bourbon sous MDD/MPP sont encore très limitées, le lancement de MDD/MPP par les distributeurs étant récent. Les ventes de bourbon sous MDD/MPP et MHD ne représentaient ainsi en 2010 que 15 % des ventes de bourbon sur le circuit off-trade. De surcroît, cette part varie selon les arbitrages opérés par les distributeurs entre MDD, MPP, MHD et MDF et n'augmente pas de manière constante contrairement à ce qui peut être observé pour d'autres spiriteux.

222. De manière générale, le marché du bourbon est dominé par Bacardi avec sa marque Jack Daniel's qui représente près de [50-60] % des ventes de bourbon tout positionnement commercial confondu. Pernod-Ricard est le second acteur avec sa marque Four Roses ([10-20] % des ventes) et l'ensemble Cofepp/QFS occupe la troisième position avec [10-20] % des ventes. Une augmentation des prix des MDD/MPP favoriserait les marques telles que Jack Daniel's, d'ores et déjà incontournables dans les linéaires. La nouvelle entité n'est donc pas incitée à adopter une telle politique qui risquerait d'obérer le développement d'un marché du bourbon sous MDD/MPP encore embryonnaire au profit de marques concurrentes déjà installées. L'opération ne porte donc pas atteinte à la concurrence sur le marché du bourbon sous MDD/MPP.

5. LES CRÈMES DE WHISKY

223. Sur le marché des crèmes de whisky vendues sous MDD/MPP, la nouvelle entité totalisera plus de la moitié des ventes ([50-60] %). La partie notifiante n'a pas été en mesure d'estimer les parts de marché de ses concurrents sur un marché limité aux MDD/MPP. Sur un marché englobant les MDD, MPP et MHD, la Cofepp indique que la société First Ireland Spirit sera son principal concurrent avec une part de marché estimée à [20-30] % et a identifié trois concurrents ayant des parts de marché de l'ordre de [0-5] % (Haus, Pierre Louge et Père Charles). La nouvelle entité sera ainsi confrontée à la concurrence d'un opérateur significatif en matière de MDD/MPP ainsi qu'à une frange concurrentielle.

224. Les clients interrogés lors du test de marché n'ont pas exprimé d'inquiétude particulière quant à l'effet de l'opération sur ce marché. Comme pour le bourbon, le comportement de la nouvelle entité y sera contraint par le fait que sur le circuit off-trade, les ventes de crèmes de whisky sont dominées par les MDF, la marque Bailey's représentant la quasi-totalité des ventes de crèmes de whisky sous MDF et près des trois quarts des ventes totales sur le circuit off-trade (les MDD, MPP et MHD ne représentent que 26,4 % des ventes dans le segment off-trade).

225. L'opération ne porte donc pas atteinte à la concurrence sur le marché des crèmes de whisky sous MDD/MPP.

6. LE CALVADOS

226. Les parts de marché de la nouvelle entité s'élèveront à [60-70] % du marché du calvados vendu sous MDD/MPP ([40-50] % pour la Cofepp et [10-20] % pour QFS) et à [90-100] % en MHD ([70-80] % pour la Cofepp et [20-30] % pour QFS). Sur le marché du calvados sous MDD/MPP, les concurrents de la nouvelle entité seront les groupes Boulard ([10-20] %) et Coquerel ([5-10] %). L'opération aboutira à la disparition du seul concurrent de la Cofepp sur le marché du calvados sous MHD.

227. En dépit de ces parts de marché élevées, les clients n'ont pas exprimé de préoccupations spécifiques relatives au marché du calvados. Il apparait en effet que les ventes de calvados sur le circuit off-trade sont en déclin, ayant diminué de près de [10-20] % entre 2008 et 2010, et représentent désormais des volumes très faibles en particulier sous MHD.

228. Comme pour le bourbon et la crème de whisky, une éventuelle augmentation de prix du calvados sous MDD/MPP introduite par la nouvelle entité inciterait les distributeurs à se tourner vers des marques mieux positionnées. La marque Père Magloire (Debrise Dulac) représente ainsi [50-60] % du marché du calvados sous MDF et Coquerel ([20-30] %). La part de marché de Busnel, principale marque de la Cofepp, est passée entre 2008 et 2010 de [10-20] à [5-10] % avec une baisse de près de [50-60] % de ses ventes. Dans le contexte de la décroissance du marché du calvados, alors même que les ventes de marques concurrentes comme Coquerel sont en augmentation, la nouvelle entité ne risquera pas de voir décliner davantage ses ventes sous MDD en augmentant ses prix alors qu'elle ne contrôle aucune des principales marques du marché.

229. L'opération ne porte donc pas atteinte à la concurrence sur le marché du calvados sous MDD/MPP et sous MHD.

7. LES APÉRITIFS SANS ALCOOL ("ASA")

230. Les activités des parties ne se chevauchent que sur le marché des ASA sous MHD, QFS n'intervenant pas sur les marchés de MDD et MPP (anisés exclusivement). La nouvelle entité disposera ainsi d'une part de marché en 2010 de l'ordre de [80-90] % en MHD à l'issue de l'opération ([60-70] % pour QFS et [10-20] % pour la Cofepp). La Cofepp n'était pas présente sur ce marché en 2009 et n'y représentait que [0-5] % des ventes en 2008. En revanche, la Cofepp est présente de manière constante depuis 2008 sur le marché des ASA sous MDD/MPP avec une part de marché importante ([60-70] %). Il est donc possible pour un opérateur présent sur le marché des ASA sous MDD/MPP de pénétrer le marché des ASA sous MHD.

231. Ainsi, le groupe Picard, également bien implanté sur les marchés de MDD et MPP (environ [20-30] % de parts de marché), notamment en anisés, whisky et vins doux naturels, et d'autres marchés de spiritueux vendus sous MHD, pourra étendre son offre aux ASA sous MHD si la Cofepp décidait d'augmenter ses prix. En outre, il ressort de l'instruction que les enseignes de hard discount pourront également se tourner vers des opérateurs étrangers, possibilité accréditée par un des opérateurs ayant répondu au test de marché.

232. L'opération ne porte donc pas atteinte à la concurrence sur le marché des apéritifs sans alcool sous MHD.

8. LE GIN, LA TEQUILA, LA VODKA ET LE BLENDED WHISKY

233. L'opération entraîne des chevauchements d'activité significatifs en matière de vodka, gin, tequila et blended whisky sous MDD/MPP ainsi qu'en matière de vodka et gin sous MHD.

234. Les parts de marché des parties (en volumes) sont retranscrites dans le tableau suivant :

<EMPLACEMENT TABLEAU 16>

235. Les parts de marché de la nouvelle entité seront donc supérieures à 50 % pour l'ensemble des marchés MDD/MPP, à l'exception du blended whisky pour lequel les parties représenteront néanmoins plus de 40 % du marché.

236. En revanche, les parts de marché de la nouvelle entité seront moins importantes sur les marchés de la vodka et du gin sous MHD et l'opération n'entraînera pas de chevauchement d'activité sur les marchés du blended whisky et de la téquila sous MHD. Compte tenu des parts de marché modérées de la nouvelle entité et de l'existence de sources alternatives d'approvisionnement, les risques d'atteinte à la concurrence sur les marchés du gin et de la vodka sous MHD peuvent être écartés sans qu'il ne soit nécessaire de procéder à un examen plus approfondi du fonctionnement de ces marchés. En effet, la Cofepp restera confrontée en matière de gin à une importante pression concurrentielle émanant de fournisseurs allemands tels que les sociétés Pabst et Eckerts Wacholder Brennen. De même, en ce qui concerne la vodka sous MHD, la nouvelle entité sera confrontée à la concurrence des fournisseurs allemands auprès desquels les enseignes de hard discount s'approvisionnent majoritairement.

237. Il convient donc d'examiner de manière approfondie la situation concurrentielle sur les marchés sur les marchés du gin, de la téquila, de la vodka et du blended whisky sous MDD/MPP.

a) Analyse en termes de parts de marché pour l'année 2010

238. Sur le marché de la vodka sous MDD/MPP, le premier concurrent de la nouvelle entité sera le groupe Picard avec une part de marché plus de [1-5] fois inférieure à celle de la Cofepp à l'issue de l'opération [10-20] % suivi par le groupe Suprex ([10-20] %) et par Grands Chais de France ([0-5] % (106)). L'opération aboutira ainsi au rachat du leader du marché par son premier concurrent et creusera un écart significatif entre la Cofepp et ses concurrents immédiats.

239. Sur le marché de la téquila sous MDD/MPP, le premier concurrent de la nouvelle entité, également le groupe Picard, aura une part de marché près de [1-5] fois inférieure à celle de la Cofepp à l'issue de l'opération ([20-30] %), tandis que le groupe Suprex totalisera [10-20] % des ventes sur ce marché. L'opération renforcera la position de leader de la Cofepp sur ce marché et entraînera une diminution de 4 à 3 du nombre d'opérateurs significatifs sur ce marché. Comme en matière de vodka, la structure de marché à l'issue de l'opération sera caractérisée par une forte asymétrie entre la position de la Cofepp et celle de ses concurrents immédiats.

240. Sur le marché du gin sous MDD/MPP, le premier concurrent de la nouvelle entité sera le groupe Picard qui disposera d'une part de marché [10-15] fois inférieure à celle de la Cofepp à l'issue de l'opération ([0-5] %), les groupes Suprex et Grands Chais de France (ci-après "GCF") détenant des parts de marché de l'ordre de [0-5] % et [0-5] %, tandis que les fournisseurs allemands totalisent ensemble moins de [5-10] % des ventes sur ce marché. L'opération aboutira ainsi à l'élimination du principal concurrent de la Cofepp sur ce marché.

241. Sur le marché du blended whisky sous MDD/MPP, le premier concurrent de la nouvelle entité sera le groupe Picard avec une part de marché inférieure de [10-15] points à celle de la Cofepp à l'issue de l'opération ([20-30] %), suivi par le groupe GCF dont la part de marché est [10-20] %. L'opération placera ainsi la Cofepp en situation de leader sur ce marché et entraînera une diminution de 4 à 3 du nombre d'opérateurs significatifs sur ce marché.

242. En somme, les marchés du gin, de la vodka, de la téquila et du blended whisky sous MDD/MPP sont des marchés concentrés sur chacun desquels tout au plus cinq opérateurs, dont les deux parties à l'opération, ont été identifiés. L'opération aura pour effet de renforcer la position de leader de la Cofepp sur les marchés de la téquila et du gin sous MDD/MPP. Elle fera également de la Cofepp le leader du marché de la vodka sous MDD/MPP avec une position très supérieure à celle des autres fournisseurs ainsi que sur le marché du blended whisky sous MDD/MPP. De plus, l'opération aura pour effet d'éliminer le principal concurrent de la Cofepp sur les marchés du gin et de la vodka sous MDD/MPP.

b) Analyse des appels d'offres

243. Selon la partie notifiante, les contrats de fourniture de spiritueux sous MDD, MPP et MHD sont passés par voie d'appels d'offres, généralement annuels. La partie notifiante estime ainsi que les parts de marché peuvent être substantiellement remises en cause d'une année à l'autre et que des parts de marché élevées des parties sur une année donnée ne sauraient refléter leur position concurrentielle à moyen et long terme.

244. L'instruction a montré que le recours aux appels d'offres est effectivement pratiqué sur les marchés précités sans être systématique. Certains groupes ont indiqué recourir peu fréquemment aux appels d'offres pour leurs achats de spiritueux sous MDD/MPP. En outre, la fréquence des appels d'offres, si elle est effectivement annuelle pour la plupart des distributeurs, est plus espacée pour certains distributeurs comme Leclerc (Scamark) ou Provera. La partie notifiante relève elle-même que certains contrats comportent des clauses de renouvellement par tacite reconduction.

245. En tout état de cause, le recours aux appels d'offres restant effectivement une pratique très répandue sur les marchés concernés, une analyse des procédures passées peut contribuer à estimer le degré de concurrence existant préalablement à l'opération entre la Cofepp et ses principaux concurrents lors des appels d'offres. Une telle analyse ne saurait toutefois totalement se substituer à l'analyse préalablement menée en termes de parts de marché en raison notamment du fait que les achats des spiritueux sous MDD/MPP peuvent se faire de gré à gré particulièrement dans les périodes de hausse des coûts de matières premières, comme c'est le cas actuellement.

246. Une telle analyse vise à déterminer, en examinant les appels d'offres passés (107), combien de soumissionnaires crédibles exerçaient une pression concurrentielle sur les parties, quelle était l'intensité de la concurrence entre la Cofepp et QFS ainsi que la pression concurrentielle exercée par les autres opérateurs significatifs sur les parties. De surcroît, l'analyse permet également d'envisager les effets de l'opération sur des marchés limités aux MDD, d'une part, et aux MPP, d'autre part, alors que la partie notifiante n'a pas été en mesure de transmettre des parts de marché distinguant les MDD et les MPP.

247. Le tableau ci-après présente les fréquences de réponse par année des principaux opérateurs des marchés étudiés.

<EMPLACEMENT TABLEAU 17>

248. Les acteurs les plus actifs sont ainsi la Cofepp qui répond à [90-100] % des appels d'offres, QFS ([70-80] %), Picard ([70-80] %) et Pabst (concurrent allemand, [50-60] %). Sorel (concurrent espagnol) et GCF sont moins actifs avec des fréquences de réponse s'élevant respectivement à [30-40] % et [10-20] %. Concernant GCF, il convient de relativiser la faiblesse de son taux de réponse sur la période 2008 à 2011, cet opérateur n'ayant répondu à des appels d'offres qu'à partir de 2010.

249. Toutefois, l'analyse des fréquences de succès, présentée dans le tableau ci-dessous montre qu'au moins deux des six opérateurs identifiés ont actuellement une crédibilité très limitée.

<EMPLACEMENT TABLEAU 18>

250. En effet, Pabst, opérateur allemand, a participé à un appel d'offres sur deux durant la période étudiée [Confidentiel] et Sorel, opérateur espagnol n'a remporté que [...] des 18 appels d'offres auxquels il a participé. Le taux de succès des opérateurs étrangers a ainsi été relativement limité sur la période de 2008 à 2011.

251. Par ailleurs, le taux de succès relativement élevé de GCF ([20-30] %) doit être interprété prudemment, ce groupe n'ayant pour le moment répondu qu'à un faible nombre d'appel d'offres. La crédibilité d'une entrée plus significative de GCF est examinée plus loin dans la décision. En tout état de cause, il n'existe à ce jour que trois opérateurs véritablement implantés sur le marché : QFS, avec un taux de succès de [40-50] %, Cofepp, avec un taux de succès de [30-40] % et Picard, avec un taux de succès de [20-30] %.

252. QFS apparaît comme un concurrent exerçant une pression concurrentielle significative sur la Cofepp. En effet, le taux de succès de la Cofepp est de [70-80] % lorsque QFS ne candidate pas et chute à [20-30] % lorsque ce dernier participe aux appels d'offres. Cette forte pression concurrentielle est également illustrée par le fait que QFS est cité comme étant le second offreur le mieux disant dans [50-60] % des appels d'offres remportés par la Cofepp, Picard étant le second moins disant dans [5-10] % des appels d'offres. De la même manière, la Cofepp apparaît comme étant le concurrent le plus proche de QFS, dans la mesure où la Cofepp est la seconde mieux disante dans [80-90] % des appels d'offres remportés par QFS.

253. La Cofepp apparaît également comme étant le concurrent exerçant la plus forte pression concurrentielle sur Picard puisqu'elle proposait la seconde offre la mieux disante dans [70-80] % des appels d'offres remportés par Picard. Pabst et Sorel sont en revanche très rarement cités comme proposant la seconde offre la moins disante ce qui confirme la faible crédibilité actuelle de leurs candidatures.

254. Enfin, à elles deux, les parties ont remporté [70-80] % des appels d'offres108. Elles étaient en concurrence dans la plupart des appels d'offres (environ [70-80] %) (109) et ont présenté les deux meilleures offres dans [40-50] % des appels d'offres (110).

255. L'analyse des données d'appels d'offres en fonction du positionnement des produits montre que la Cofepp est présente aussi bien sur les marchés des MDD que des MPP, tandis que le taux de participation de QFS varie substantiellement : si QFS a participé à [90-100] % des appels d'offres en MPP, il n'a en revanche participé qu'à [50-60] % des appels d'offres en MDD, se plaçant derrière Picard dont le taux de participation s'élève à [60-70] %.

256. Les fréquences de succès montrent que QFS est l'opérateur le plus compétitif en matière de MPP avec un taux de succès de [40-50] %, devant la Cofepp ([30-40] %) et Picard ([10-20] %). Comme expliqué précédemment, le taux de succès de GCF est assez élevé mais doit être relativisé. En matière de MDD c'est au contraire la Cofepp qui apparaît comme le plus compétitif (taux de succès de [40-50] %), QFS et Picard étant relativement proches (taux de succès légèrement supérieur à [30-40] % pour une [...] de candidatures). Par ailleurs, comme exposé précédemment, Pabst et Sorel semblent peu compétitifs.

257. Enfin, les parties se sont confrontées dans [90-100] % des appels d'offres de MPP et ont présenté les deux meilleures offres dans la majorité des cas ([50-60] %). Elles ne se sont en revanche confrontées que dans [30-40] % des appels d'offres en matière de MDD et n'ont présenté les deux meilleures offres que dans [30-40] % des cas.

258. Lorsque l'on considère les évolutions entre la période 2008-2009, d'une part, et la période 2009-2010, d'autre part, il apparaît que la Cofepp avait le meilleur taux de succès durant la période 2008-2009 ([40-50] % des appels d'offres remportés) et que ce taux a [Confidentiel] baissé durant la période 2010-2011 (-[...] %). En parallèle, QFS est devenu l'opérateur avec le [Confidentiel] taux de succès ([40-50] % en 2010-2011 contre [30-40] % la période précédente, soit une progression de [...] %). Le taux de succès de Picard a doublé passant de moins de [10-20] % durant la période 2008-2009 à [30-40] % durant la période 2010-2011, [Confidentiel]. Picard est ainsi l'opérateur ayant connu la plus forte progression. Enfin GCF connaît un taux de succès significatif malgré son entrée récente sur les marchés concernés.

259. L'analyse en termes d'appel d'offres confirme donc la forte pression concurrentielle exercée actuellement par QFS sur la Cofepp. Cette analyse montre également la progression rapide du groupe Picard, qui exerce désormais une pression concurrentielle sur la Cofepp comparable à celle de QFS, tandis que la Cofepp a vu son taux de succès lors de ses réponses aux appels d'offres fortement diminuer. Elle permet également d'étayer l'entrée dynamique de GCF sur les marchés. L'analyse démontre en revanche que les concurrents étrangers n'exercent actuellement pas de pression concurrentielle significative.

c) Analyse de l'évolution des parts de marché entre 2008 et 2010

260. Le tableau ci-après montre l'évolution des parts de marché des parties et de leurs principaux concurrents entre 2008 et 2010.

<EMPLACEMENT TABLEAU 19>

261. Les parts de marchés de la Cofepp ont considérablement baissé entre 2008 et 2010 sur l'ensemble des marchés concernés, les pertes de parts de marché étant comprises entre -[10-20] % (gin sous MDD/MPP) et -[60-70] % (blended whisky sous MDD/MPP). QFS a également perdu des volumes sur l'ensemble de ces marchés, les pertes étant comprises entre -[10-20] % (gin sous MDD/MPP) et -[30-40] % (téquila sous MDD/MPP), hormis en matière de blended whisky sous MDD/MPP, marché sur lequel QFS a fortement progressé (+ [120-130] % en 2 ans).

262. Le groupe Picard, a en revanche progressé sur l'ensemble de ces marchés. Il a connu une forte augmentation de son activité concernant la téquila sous MDD/MPP (+ [70-80] %) et le blended whisky sous MPP/MPP, se positionnant en deuxième place en termes de volumes vendus pour ce produit alors qu'il n'en proposait pas du tout en 2008. Picard est également parvenu à se positionner sur le marché du gin sous MDD/MPP alors qu'il en était absent en 2008 et ses volumes de vodka sous MDD/MPP ont progressé de [10-20] % entre 2008 et 2010.

263. La présence du groupe GCF est encore limitée, hormis sur le marché du blended whisky sur lequel il totalise [10-20] % des ventes, alors qu'il était absent de ce marché jusqu'en 2010. Enfin, les positions du groupe Suprex sont restées relativement stables.

264. L'analyse de l'évolution des parts de marché entre 2008 et 2010 montre donc que les parts de marché des concurrents des parties, et plus particulièrement celles du groupe Picard, ont effectivement progressé sur l'ensemble des marchés affectés tandis que celles des parties ont baissé sur la plupart de ces marchés.

265. Il n'en demeure pas moins que l'opération entraînera la disparition d'un des opérateurs exerçant la plus forte pression concurrentielle sur la Cofepp ainsi que l'a démontré l'analyse des appels d'offres passés et que le renforcement de la Cofepp au détriment de ses concurrents pourrait être de nature à freiner la progression que connaissent les concurrents des parties, crainte relayée par la pluparts des distributeurs ayant répondu au test de marché.

266. Il convient dès lors d'examiner si les concurrents actuels ou potentiels des parties seront en mesure de contraindre le comportement de la Cofepp à l'issue de l'opération, et si ce comportement pourra être contrebalancé par l'émergence d'une frange concurrentielle nouvelle et par le contrepouvoir des distributeurs.

d) Les possibilités de réaction des concurrents sur les marchés concernés

267. Les lignes directrices de l'Autorité relèvent que "dans la mesure où des parts de marché importantes sont liées à des clients qui considèrent effectivement les deux magasins comme leurs premier et deuxième choix, l'élimination de la concurrence entre les parties à la concentration peut rendre profitable une hausse des prix substantielle (ou une réduction du volume ou de la qualité de sa production) de l'entité issue de l'opération, celle-ci bénéficiant du caractère captif d'une partie importante des clients alors qu'auparavant, une hausse des prix de l'une des parties aurait conduit à un report important vers l'autre partie" (111). Or il découle des éléments constatés aux paragraphes précédents que l'opération conduit à la fois à augmenter significativement les parts de marché que la Cofepp détiendra sur les marchés concernés et à y éliminer la pression concurrentielle qu'exerçait auparavant QFS sur la Cofepp.

268. Les lignes directrices de l'Autorité précisent cependant que "les possibilités de repositionnement de leur offre par les concurrents ou d'entrées de nouveaux offreurs, de nature à contrecarrer ces effets, sont toutefois attentivement examinées par l'Autorité" (112). Il est donc nécessaire d'examiner si, à travers l'analyse de la concurrence exercée par les opérateurs en place, de leur aptitude à utiliser des capacités de production disponibles et de l'éventuelle pression exercée par des concurrents potentiels, le comportement de la Cofepp sera contraint après l'acquisition.

Les concurrents actuels

269. Les analyses en termes de parts de marché et d'appel d'offres ont permis d'identifier trois principaux concurrents des parties : les groupes Picard, GCF et Suprex.

270. Picard est un groupe familial présent dans le secteur des vins et spiritueux, chacune de ces activités représentant environ la moitié de son chiffre d'affaires. La très grande majorité de l'activité spiritueux du groupe Picard se concentre sur les marchés MDD, MPP et MHD, le groupe ayant en outre développé des marques bénéficiant d'un ancrage essentiellement régional. Picard produit de nombreux types de spiritueux et réalise ses ventes les plus importantes en matière d'anisés et de whisky. Le groupe Picard produit actuellement [40-50] millions de cols de spiritueux.

271. Grands Chais de France est un groupe spécialisé dans le négoce de vins et de spiritueux et réalise un chiffre d'affaires de 753 millions d'euro, dont la grande majorité à l'export. L'activité spiritueuse du groupe représente un chiffre d'affaires d'environ [30-50] millions d'euro dont seulement [10-20] % est réalisé en France. GCF a récemment relancé son activité sur les marchés français des spiritueux sous MDD/MPP et produit actuellement [0-5] millions de cols.

272. Suprex est une société qui réalise un chiffre d'affaires de 21 millions d'euro, dont la quasi-totalité dans les spiritueux. Elle est spécialisée dans la production de MDD, MPP et MHD. Elle produit actuellement [...] millions de cols dont [...] millions de cols d'anisés et entre 6 à 7 millions de cols de crème de fruits.

273. A la suite du rachat d'actifs du groupe Boisset par la Cofepp début 2010, la Cofepp a repris la participation de [...] % du capital de Suprex détenu par Boisset, qu'elle a ensuite cédée à la [Confidentiel]. Des liens commerciaux et contractuels étroits demeurent cependant entre la Cofepp et Suprex, [Confidentiel]. Ainsi, même si Suprex se présente comme autonome par rapport à la Cofepp à l'exception de son activité en matière de crème de cassis, elle apparaît néanmoins aux yeux de nombreux clients comme étant liée à la Cofepp. En tout état de cause, la prise en compte de Suprex comme concurrent réel ou non de la nouvelle entité ne modifiant pas substantiellement les conclusions de l'analyse concurrentielle, Suprex sera considéré comme étant un concurrent de la nouvelle entité, hypothèse la plus favorable aux parties.

Les capacités disponibles

274. Les marchés concernés par la présente opération représentent ensemble environ 12,5 millions de litres, soit environ 17,8 millions de cols, la Cofepp vendant environ [...] millions de cols sur ces marchés et QFS [...] millions de litres.

275. La "capacité" des acteurs des marchés concernés résulte du nombre de lignes de production (ou d'"embouteillage") capables d'embouteiller des spiritueux sous MDD, MPP et MHD, leur cadence et l'intensité quotidienne de leur utilisation. Il est ainsi possible de constater l'existence de capacités "disponibles" sur les marchés affectés dans la mesure où le degré d'utilisation actuel des lignes de production est inférieur au rendement total qui leur serait imputable si elles étaient utilisées de manière plus intensive, par exemple en augmentant leur durée quotidienne d'utilisation et le nombre d'équipes qui leur est affecté. L'outil industriel en place est ainsi utilisable de manière plus intense, la possibilité pour un fournisseur d'ajuster l'intensité de la production de ses lignes lui permettant de s'adapter aux éventuelles évolutions de volume qui découlent de ses négociations contractuelles avec les GMS.

276. Il convient ainsi d'analyser les capacités disponibles en prenant en compte l'ensemble des capacités de production d'opérateurs produisant des spiritueux sous MDD, MPP et MHD (113). En effet, les chaînes et les techniques de production utilisées sont globalement les mêmes quel que soit le spiritueux concerné. En revanche, les capacités de production d'opérateurs fournissant uniquement des MDF sont exclues, dans la mesure où ceux-ci ne sont pas susceptibles de produire des MDD, MPP ou MHD à court terme pour les raisons exposées plus bas.

277. Il convient également d'exclure les chaînes d'embouteillage de vin de l'analyse. En effet, les groupes Picard et GCF n'utilisent pas les mêmes chaînes pour embouteiller les vins et les spiritueux, Picard ayant précisé qu'"il n'existe pas de substituabilité entre des lignes d'embouteillage de vin et des lignes d'embouteillage de spiritueux ni entre les cuves à vin et les cuves à spiritueux" (114) et GCF ayant souligné que "les chaînes dédiées au vin sont nécessaires pour couvrir les besoins en termes de vin. De plus, nous estimons pouvoir remplir notre objectif de 10 millions de cols annuels en spiritueux en augmentant la cadence de la chaîne de Petersbach que nous utilisons déjà pour les spiritueux" (115).

278. La partie notifiante, qui produit annuellement environ [...] millions de cols de spiritueux (116) en France, a indiqué disposer de capacités de production excédentaires limitées ([...] millions de cols), soit une capacité de production annuelle totale de [...] millions de cols. QFS, qui produit moins de [...] millions de cols par an ([...] millions) estime être en mesure de produire [...] millions de cols supplémentaires (117). [Confidentiel]. La nouvelle entité disposera donc d'environ [70-80] % des capacités totales de production. En termes de capacités disponibles, elle disposera d'environ [40-50] % de celles-ci contre [50-60] % pour ses concurrents.

L'existence d'avantages concurrentiels pour la Cofepp

279. Pour que les concurrents puissent exercer une pression concurrentielle crédible sur les marchés des spiritueux sous MDD/MPP sur lequel la compétitivité en prix est un facteur clé de succès, il est toutefois nécessaire qu'ils puissent proposer une offre aussi compétitive que celle de la nouvelle entité.

280. Les coûts de production des spiritueux sous MDD/MHD/MPP dépendent essentiellement du prix d'achat des matières premières. En effet, l'activité des producteurs de spiritueux sur les marchés concernés consiste essentiellement à abaisser le degré de l'alcool fort acheté en ajoutant de l'eau, puis à aromatiser et conditionner le produit obtenu. Le processus de production est ainsi décrit par le groupe Marie Brizard : "de façon très schématique, pour un alcool simple (rhum, whisky, vodka), on utilise la base d'alcool fort (entre 60 et 80 %) ; à cette base est ajoutée de l'eau pour ramener l'alcool au degré voulu (37,5, 40, 50 ou 55). (...) Pour finir, une ligne d'embouteillage permet la mise au format voulu (bouteille verre, capsulée et mise en carton" (118).

281. Ainsi, les achats de matières premières représentent entre 70 % et 90 % des coûts de production de la Cofepp pour le gin, la téquila, la vodka et le blended whisky sous MDD et MPP (119). Le groupe GCF a ainsi indiqué qu'"au final, en matière de spiritueux, l'approvisionnement en matières premières en amont est un élément clé de la compétitivité. Or plus les volumes commandés sont importants, plus le prix d'achat est bas" (120). La nécessité de disposer d'un approvisionnement compétitif en matières premières a également été confirmée par les clients des parties.

282. Les éléments réunis au cours de l'instruction semblent indiquer qu'il existe des écarts significatifs dans le prix payé pour plusieurs matières premières par la Cofepp en comparaison de ses deux principaux concurrents à l'issue de l'opération. [Confidentiel]. Les volumes achetés ne seraient donc pas le seul facteur entrant en jeu.

283. De surcroit, même si le groupe Picard dispose de moins bonnes conditions d'achat que la Cofepp, ce groupe a été en mesure de concurrencer fortement la Cofepp au cours des dernières années ainsi que le montre son importante progression notamment sur les marchés du blended whisky et de la téquila sous MDD et MPP. GCF, qui est entré récemment sur certains des marchés concernés, a également réussi à proposer des offres compétitives en termes de prix malgré de moins bonnes conditions d'achat. Le groupe Franprix/Leader Price a ainsi indiqué qu' "un fournisseur peut être compétitif sur un segment de produit, et non sur une gamme complète" (121).

284. Par ailleurs, selon certains des clients et des concurrents des parties, la Cofepp disposerait aux côtés de sa puissance d'achat de deux autres avantages concurrentiels qui rendrait sa position difficilement contestable par ses concurrents : une largeur de gamme de produits et un portefeuille de marques inégalés.

285. Le fait de disposer d'une gamme de produits constituerait un avantage concurrentiel pour la Cofepp dans la mesure où cela lui assure des avantages en termes logistiques puisqu'elle peut massifier le transport de ses produits lorsqu'elle assure elle-même la livraison et ainsi diminuer ses coûts. Inversement, dans les cas où les distributeurs prennent eux-mêmes en charge le transport de leurs achats, ils peuvent regrouper leurs achats auprès de la Cofepp et ainsi réduire leurs coûts, ce qu'ils ne peuvent faire en s'approvisionnant auprès de multiples fournisseurs.

286. Cet avantage n'est toutefois pas déterminant puisque le groupe GCF qui propose uniquement du gin, des blended whisky et de la vodka vendus sous MDD/MPP a réussi à pénétrer le marché français. Le groupe GCF a aussi indiqué son intention de se développer sur le marché français des spiritueux sous MDD/MPP, avec un objectif de ventes annuelles de l'ordre de 10 millions de cols de spiritueux (122).

287. Ensuite, le fait pour la Cofepp de disposer d'un portefeuille de marques lui permettrait, selon certains concurrents, d'opérer une "péréquation" entre ses marques propres et son activité de production de spiritueux sous MDD et MPP en compensant d'éventuels efforts de prix sur ces marchés par des marges plus importantes sur les marchés de MDF. Il n'apparaît cependant pas que les négociations pour l'achat de MDF et celles pour l'achat de MDD soient menées par les mêmes acheteurs. Le test de marché n'a pas non plus permis d'étayer la mise en œuvre d'une telle stratégie de péréquation par la Cofepp.

288. Ainsi, même si la Cofepp disposera de certains avantages concurrentiels par rapport à ses concurrents en raison de sa position sur les marchés concernés, ceux-ci ne constituent pas des obstacles de nature à restreindre la pression exercée par ses principaux concurrents. Les concurrents actuels de la nouvelle entité seront ainsi en mesure de proposer une offre compétitive aux clients de la nouvelle entité, si ces derniers subissaient des hausses de prix de la Cofepp à l'issue de l'opération.

La concurrence potentielle

Les opérateurs étrangers

289. Selon la partie notifiante, le comportement en prix de la Cofepp à l'issue de l'opération serait également contraint par les opérateurs étrangers qui seraient de plus en plus présents sur les marchés français des spiritueux sous MDD/MPP.

290. Sur certains marchés des spiritueux sous MHD, les opérateurs étrangers sont effectivement déjà bien implantés, notamment en matière de vodka et de gin. Ils sont toutefois relativement peu présents sur les marchés affectés qui mettent en relation les GMS avec les fournisseurs de MDD et MPP. La partie notifiante n'a d'ailleurs affecté aucune part de marché aux opérateurs étrangers en ce qui concerne la vodka, la téquila et le blended whisky ; pour le gin leur part de marché reste inférieure à [0-5] %). Les réponses au test de marché des clients ont confirmé la faible pénétration des fournisseurs étrangers sur ces marchés.

291. Selon les clients interrogés lors de l'instruction, différentes raisons expliquent cette situation. La principale raison est le surcoût de transport induit par le recours à des opérateurs étrangers. En effet, hors taxes et accises, les prix de gros du gin, de la vodka, de la téquila et du blended whisky sont compris entre [Confidentiel] ; il s'agit donc de produits peu onéreux pour lesquels recourir à un fournisseur étranger augmenterait substantiellement les prix d'achat. A cet égard le groupe Système U a ainsi indiqué que "les entreprises proches de nos entrepôts ont un avantage concurrentiel immédiat et remportent toujours les appels d'offres. L'offre européenne est trop lointaine pour rester performante" (123). Les groupes Casino et Provera ont déclaré ne pas solliciter actuellement les opérateurs étrangers. De même, le groupe Carrefour a précisé qu'il ne lançait des appels d'offres européens que pour certains produits spécifiques.

292. Certains distributeurs ont également évoqué d'autres difficultés qui limiteraient leur possibilité de travailler avec des fournisseurs étrangers.

293. Premièrement, le fait de traiter avec un fournisseur étranger implique pour un distributeur une organisation logistique plus contraignante que celle mise en place dans le cadre d'achats auprès d'un fournisseur français. L'approvisionnement par un opérateur étranger requiert notamment d'anticiper les commandes plus en amont.

294. Deuxièmement, il existe des variations réglementaires entre les normes d'étiquetage et les régimes fiscaux selon les Etats membres. En France, l'étiquetage doit répondre à des critères spécifiques en termes de typologie et de taille des caractères et certains symboles sont obligatoires. En outre, les formes des bouteilles peuvent être différentes.

295. Troisièmement, les produits proposés par les fournisseurs étrangers ne répondraient pas aisément aux attentes des distributeurs français en termes de goût et de qualité. Toutefois, les enseignes de hard discount Aldi et Lidl ont massivement recours aux opérateurs étrangers même pour l'approvisionnement de leurs magasins établis en France.

296. Il semble dès lors que la faible pénétration des opérateurs étrangers s'explique davantage par des questions d'habitude des distributeurs français qui ont établi des relations de longue durée avec des fournisseurs français que par des raisons d'ordre financier ou technique. L'expérience des enseignes Aldi et Lidl montre que le recours à des fournisseurs étrangers est techniquement et économiquement possible. Les distributeurs français pourraient ainsi se tourner vers les opérateurs étrangers à l'issue de l'opération même si cela nécessiterait "un accompagnement par les distributeurs" ainsi que l'a indiqué le groupe Système U. Le groupe Leclerc qui ne travaille actuellement qu'avec des fournisseurs français a d'ailleurs indiqué que "si l'opération de concentration notifiée venait à se finaliser, la Scamark pourrait envisager d'élargir ses appels d'offres au niveau européen (concernant les marchés des MDD et des MPP). Aucune difficulté ne s'oppose à des appels d'offres européens. Il n'existe pas de spécificité française en matière de spiritueux, à l'exception du rhum. Il n'y aurait pas non plus de difficultés en termes de taxes puisque la négociation se fait à partir du prix hors taxes. La seule difficulté éventuelle pourrait être liée au fait que la Scamark a des demandes portant sur des bouteilles de 70 cl, mais également de 1l et de 1,5l, formats de bouteilles que les opérateurs étrangers proposent rarement. La gestion du travail et des relations avec des fournisseurs étrangers ne soulève pas de difficultés compte tenu de l'évolution des technologies actuelles (notamment grâce à des EDI)" (124).

297. Lors de la séance, les représentants du groupe Intermarché ont également indiqué ne pas éprouver de difficultés particulières à trouver des sources alternatives pour leur approvisionnement en spiritueux sous MDD/MPP, notamment en se tournant auprès de fournisseurs étrangers, hormis en matière de rhum, pour lequel l'accès à la matière première est ouvert à un nombre restreint d'opérateurs.

298. Or, les opérateurs étrangers interrogés au cours de l'instruction ont manifesté leur intérêt pour les marchés concernés. En effet, cinq opérateurs situés dans des Etats frontaliers (Allemagne, Belgique et Suisse) ont indiqué être intéressés par le marché français du blended whisky sous MDD/MPP en cas de hausse des prix de 5 à 10 % ; quatre se sont dit intéressés par les marchés français de la vodka et du gin sous MDD/MPP dans les mêmes circonstances ; et deux ont confirmé leur intérêt pour le marché français de la téquila sous MDD/MPP en cas d'une même hausse de prix. Par ailleurs, le recours à des opérateurs étrangers sera facilité par le fait que certains de ces opérateurs répondent déjà aux appels d'offres concernant les marchés concernés, de sorte qu'ils sont facilement identifiables par les distributeurs français.

299. Ainsi, à l'issue de l'opération, les distributeurs pourront, dans l'hypothèse d'une hausse des prix des produits des parties sous MDD/MPP, orienter tout ou partie de leur demande vers les opérateurs étrangers qui ont manifesté leur intérêt pour les marchés français des spiritueux sous MDD/MPP.

Les producteurs de MDF

300. Les groupes Pernod Ricard, Marie Brizard, et Bacardi produisent actuellement de nombreux spiritueux sous MDF mais ne produisent pas de MDD, MPP ou MHD contrairement à la Cofepp. Le groupe Bacardi n'est jamais intervenu sur ces marchés, tandis que les groupes Pernod Ricard et Marie Brizard ont été présents sur certains marchés des spiritueux sous MDD, MPP ou MHD dans les années 1990 mais s'en sont depuis retirés.

301. L'absence des groupes Bacardi et Pernod Ricard sur ces marchés n'est pas due à la saturation de leurs outils de production mais à un positionnement stratégique, ces groupes ayant choisi de concentrer leur activité sur le développement de leurs MDF, une partie d'entre elles ayant un positionnement haut de gamme ou étant incontournables. Le groupe Pernod Ricard a indiqué que sa "stratégie est concentrée sur les produits de marque auxquels il souhaite réserver son savoir-faire industriel ainsi que ses outils de production" (125) et le groupe Bacardi a précisé que sa stratégie "a toujours été de produire et de commercialiser ses propres marques ou des marques d'agence avec un positionnement premium et donc à forte image et valeur ajoutée" (126).

302. Le groupe Marie Brizard, dont la plupart des spiritueux peuvent être considérés comme étant des produits de milieu de gamme, explique son absence essentiellement en raison de l'insuffisance des marges qu'il estime pouvoir réaliser sur les marchés des spiritueux sous MDD, MPP et MHD et au motif que leur production nécessiterait une adaptation de ses chaînes de production, opération jugée coûteuse au regard des bénéfices pouvant être escomptés.

303. Compte tenu du choix des groupes Bacardi et Pernod Ricard de concentrer leur activité sur leurs MDF, ces groupes ont indiqué que même dans l'hypothèse d'une augmentation de 5 à 10 % du prix de gros des spiritueux sous MDD, MPP et MHD, ils n'envisageraient pas d'entrer sur ces marchés (127). A cette même question, le groupe Marie Brizard a en revanche répondu qu'il serait prêt à entrer sur les marchés du gin, de la vodka et du blended whisky sous MDD, MPP et MHD (128). Toutefois, cette entrée est notamment conditionnée à l'obtention de volumes de production excédant les volumes généralement inclus dans les contrats de MDD, MPP et MHD, de sorte qu'une entrée de ce groupe sur les marchés affectés est donc très peu probable à court terme.

304. A l'inverse des concurrents étrangers, notamment allemands et belges, les groupes Pernod Ricard, Bacardi et Marie Brizard ne peuvent donc pas être considérés comme des entrants potentiels sur les marchés affectés.

Le développement d'opérateurs absents des marchés des spiritueux

305. La partie notifiante relève que les barrières à l'entrée sur les marchés affectés sont limitées, la production de spiritueux sous MDD/MPP ne nécessitant aucun savoir-faire particulier puisqu'elle consiste essentielle dans de l'assemblage et de l'embouteillage. Le développement de nouveaux opérateurs sur les marchés concernés serait également facilité par le fait que la commercialisation de spiritueux en MDD, MPP et MHD n'appelle, contrairement aux MDF, aucun investissement de communication promotionnelle de marque.

306. Par ailleurs, l'entrée d'un nouvel opérateur pourrait être soutenue par un ou plusieurs distributeurs souhaitant créer une alternative à la nouvelle entité, ce ou ces derniers consentant dans un premier temps à payer leurs spiritueux à des prix un peu plus élevés et à confier un certain nombre de marchés à cet opérateur afin de lui permettre de disposer de volumes suffisants. Telle a été la stratégie du groupe Système U qui a soutenu l'activité du groupe Picard afin de constituer une alternative à la Cofepp et à QFS, les représentants de l'enseigne ayant expliqué que "Système U a voulu se créer une alternative à la Cofepp et à QFS en faisant émerger un concurrent. Sur certains marchés, Système U consent ainsi à payer des prix d'achat plus élevés que ce qu'il aurait obtenu auprès de la Cofepp ou de QFS" (129).

307. Néanmoins, le niveau d'investissement nécessaire pour entrer sur les marchés affectés est relativement important au regard des faibles marges réalisées sur ce type de produits. Or, les volumes obtenus par un nouvel entrant seraient relativement limités, les distributeurs procédant à des achats spiritueux par spiritueux. De surcroît la pérennité de ces volumes serait très relative puisque la durée des contrats d'approvisionnement est généralement courte. De plus, comme il a été expliqué précédemment, les opérateurs déjà installés disposent de capacités disponibles, ce qui permet aux entreprises déjà présentes d'augmenter rapidement leur production à moindre coût rendant ainsi l'entrée de nouveaux opérateurs plus difficile et plus coûteuse.

308. L'entrée sur ces marchés se heurte ainsi à certaines difficultés, tenant aux faibles marges qu'il est possible d'attendre de cette activité, que seul le soutien de certaines enseignes de distribution semble permettre de surmonter.

e) Le contre-pouvoir de la demande sur les marches affectés

309. La partie notifiante considère que les fortes parts de marché qu'elle détiendra à l'issue de l'opération devaient être relativisées en raison du fort pouvoir de négociation dont disposeraient les GMS. Elle fait valoir, à cet égard, la diminution de ses marges et de ses prix aux GMS, phénomène imputable, selon la Cofepp, à un rapport de force bénéficiant aux distributeurs au détriment des fournisseurs caractéristique des marchés de MDD.

310. La Cofepp appuie ces affirmations sur un rapport récent de la Commission européenne sur les marchés de MDD, et en particulier sur le constat selon lequel "[e]n raison du succès des marques de distributeurs, les distributeurs sont passés de simples intermédiaires dans la distribution de produits aux consommateurs sous la marque du producteur à une situation où ils jouent un rôle central dans la chaîne logistique, contrôlent largement le développement du produit et le processus de commercialisation. Par contraste, les marques de distributeurs permettent de rendre les producteurs anonymes vis-à-vis des consommateurs, en leur laissant un rôle plus subordonné, réduit à un simple rôle d'agent sous-traitant pour le distributeur. Les marques de distributeurs brisent le lien direct entre le producteur et le consommateur (c'est-à-dire la caution apportée par la marque et renforcée par la publicité), et permettent plutôt au distributeur de dicter les caractéristiques du produit (voire potentiellement de déterminer la nature de la production) et de s'arroger la prérogative d'assurer la commercialisation des produits, et par là-même de promouvoir sa propre image de marque de distributeur via les marques de distributeurs détenues (notamment en promouvant son propre nom sur les étiquettes des produits)" (130).

311. Toutefois, la Commission relève également que l'établissement d'une relation commerciale dans laquelle le distributeur est le principal décideur et le fournisseur est l'agent "signifie que les distributeurs peuvent généralement exercer un pouvoir d'achat très significatif parce qu'ils sont en mesure de substituer un producteur à un autre en subissant peu de coûts de changement tout en s'assurant que les producteurs se concurrencent vigoureusement pour obtenir des contrats" (131). L'exercice effectif d'un contre-pouvoir suppose donc l'existence d'alternatives d'approvisionnement suffisantes à la disposition des distributeurs.

312. La Commission européenne relève également le lien entre l'importance de l'activité d'approvisionnement de produits commercialisés sous MDD en tant que débouché pour les fournisseurs et le contre-pouvoir que peuvent exercer les distributeurs. Pour la Commission, "avec des producteurs de MDD dépendant économiquement de détaillants qui sont critiques pour leur survie (s'ils n'ont pas de débouchés alternatifs), il est possible pour les détaillants d'extraire tout le surplus disponible (les profits) de leur relation économique" (132). A contrario, si la fourniture de MDD n'est pas un débouché déterminant pour la viabilité d'un fournisseur, l'existence d'un contre-pouvoir des distributeurs ne peut être présumée. Or en l'espèce, il convient de rappeler que l'activité de fourniture de MDD représente [10-20] % du chiffre d'affaires de la Cofepp et [20-30] % de celui de QFS. De plus, les contrats d'approvisionnement étant établis de manière distincte par chaque enseigne pour chaque spiritueux, l'éventuel contre-pouvoir de chaque enseigne s'exercerait à l'occasion de négociations portant sur des volumes relativement circonscrits et dont l'ampleur ne menace aucunement la viabilité d'un opérateur tel que la Cofepp, y compris avant l'acquisition de QFS.

313. Il convient donc d'examiner si la structure des marchés concernés après l'opération sera de nature à permettre effectivement l'exercice, par les distributeurs, d'un contre-pouvoir suffisant pour contraindre le comportement de la Cofepp.

314. Afin de vérifier empiriquement les affirmations de la Cofepp que les taux de marges sur les marchés MDD et leur évolution reflètent l'exercice d'un fort contre-pouvoir de la demande (133) une triple analyse a été faite sur les taux de marge des parties.

315. La première partie de l'analyse a consisté à calculer les marges des parties pour chacune des marques et des produits MDD afin de comparer, pour les produits MDD et les produits MDF, le niveau de la marge qui revient au producteur puisque l'exercice d'un contre-pouvoir de la demande sur les marchés de MDD devrait ainsi aboutir au constat de marges faibles sur ces marchés et d'un écart de marge marqué avec les MDF.

316. [Confidentiel]. Toutefois, ces taux de marge sont à prendre avec précaution dans la mesure où leur [Confidentiel] niveau les rend très sensibles aux hypothèses faites sur les coûts de production de la Cofepp, lesquels sont difficilement vérifiables. Cependant, ce constat permet de conclure que les GMS sont capables, dans une mesure variable selon les spiritueux concernés, d'exercer une pression sur les marges de leurs fournisseurs de produits destinés à être commercialisés sous MDD.

317. L'analyse a porté en second lieu sur les taux de marges réalisés par les parties en MDD. [Confidentiel].

318. Il ressort donc de ces observations que le contre-pouvoir des distributeurs apparaît d'autant plus faible que la position des parties (en volume de vente) est forte, et inversement. L'opération entraînant un renforcement significatif des parts de marché de la Cofepp dans les marchés affectés, elle est donc susceptible de réduire le contre-pouvoir de la demande.

319. La troisième partie de l'analyse a consisté à examiner l'évolution des marges de gros des parties à l'opération à partir des données communiquées par la Cofepp et QFS pour les années 2008 à 2010. [Confidentiel].

320. [Confidentiel].

321. Compte tenu de la faible durée de la période sur laquelle porte les observations et de la grande sensibilité des résultats aux évaluations par la partie notifiante des coûts de production, difficilement vérifiable, les conclusions qu'il est possible de tirer de ces évolutions sont limitées. Ces données étayent cependant l'hypothèse de l'exercice par la demande d'une pression réelle sur les marges des parties sur les marchés de MDD et MPP.

322. Néanmoins, ces données, constatées dans un environnement concurrentiel où QFS était un concurrent autonome et la principale alternative à la Cofepp sur les marchés de MDD et MPP, ne permettent pas de conclure sur l'exercice d'un éventuel contre-pouvoir de la demande après l'acquisition de QFS par la Cofepp. Or, conformément à l'étude précitée de la Commission européenne, l'exercice d'un contre-pouvoir des distributeurs vis-à-vis de leurs fournisseurs suppose, premièrement qu'ils disposent de sources alternatives d'approvisionnement et, deuxièmement, qu'ils puissent aisément changer de fournisseurs. Le contre-pouvoir de la demande n'existe que dans la mesure où celle-ci est en mesure de menacer de se tourner, dans un délai raisonnable, vers des sources alternatives d'approvisionnement, si le fournisseur décide d'augmenter ses prix (134).

323. Concernant le premier point, il convient de rappeler que l'opération a pour effet de faire disparaître une alternative majeure concernant l'approvisionnement des GMS sur les marchés affectés déjà fortement concentrés préalablement à l'opération. Toutefois, comme cela a été précédemment constaté, les groupes Picard et GCF disposent de capacités suffisantes pour développer leurs offres sur les marchés concernés et constitueront ainsi une alternative immédiate vers laquelle la grande distribution pourra se tourner si elle n'était pas satisfaite des prix pratiqués par la nouvelle. En outre, les distributeurs pourront également orienter leur demande vers des fournisseurs étrangers susceptibles de proposer une offre alternative à la nouvelle entité.

324. La partie notifiante a également indiqué que certains distributeurs pourraient envisager une intégration verticale qui leur permettrait de couvrir en interne leurs besoins en spiritueux sous MDD/MPP et de créer une alternative à la nouvelle entité. Cependant, la production de spiritueux sous MDD/MPP représente un investissement très important sans garantie de rentabilité pour un distributeur, compte tenu de la nécessité de produire des volumes importants pour amortir les coûts fixes. Le groupe Intermarché, qui possède une usine d'embouteillage d'eau et de boissons gazeuses a ainsi estimé que "le volume des spiritueux hors whisky et pastis sont assez limités (30 % du total). L'investissement ne semble donc pas assez rentable. Le marché des spiritueux n'est pas du tout comparable aux marchés de l'eau. Détenir une usine engendre des contraintes en matière de sécurité, de conditionnement, etc. La stratégie de remonter la filière n'est pas à l'ordre du jour chez Intermarché. De surcroît, cela paraît compliqué à mettre en œuvre" (135). L'intégration verticale des distributeurs apparaît donc comme peu probable.

325. Concernant le second point, il ressort de l'instruction que les changements de fournisseurs sont relativement aisés : ils impliquent uniquement le respect d'un préavis légal (de 3 à 6 mois pour les MDD) et n'engendrent pas de surcoûts particuliers. En outre, les possibilités de changement de fournisseurs sont facilitées par le fait que les appels d'offres sont relativement fréquents. Par ailleurs, les produits sous MDD et MPP étant soumis à un cahier de charges précis, un changement de producteur n'a que peu d'impact sur les qualités organoleptiques du produit proposé au client final.

f) Conclusion

326. Bien que l'opération ait pour effet de priver la grande distribution d'une de ses principales alternatives à la Cofepp en matière de vodka, gin, téquila et blended whisky, les GMS disposeront d'alternatives réelles à la nouvelle entité qui rendront crédible la menace d'un changement de fournisseur en cas de hausse de prix pratiquée par la nouvelle entité. Ainsi, alors que les marchés du rhum sous MDD, MPP et MHD sont caractérisés par un accès restreint à la matière première dû notamment au regroupement au sein de la Cofepp de la quasi-totalité des sources d'approvisionnement en rhum non-agricole, l'accès à la matière première pour la production de vodka, gin, téquila et blended whisky n'apparait pas contrainte. Compte tenu des capacités de réaction des concurrents des parties, au premier rang desquels le groupe Picard, et de la possibilité d'émergence de nouveaux opérateurs, notamment étrangers, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur les marchés du gin, de la téquila, de la vodka et du blended whisky sous MDD et MPP.

IV. Les engagements

A. LES MESURES CORRECTIVES PROPOSÉES

327. La partie notifiante a présenté les 29 septembre, 7 octobre, 13 octobre des engagements portant notamment sur la cession de l'ensemble des actifs de production, de distribution et des marques actuellement détenus par QFS à la Martinique, ainsi que sur la cession de la marque Charrette et de volumes de rhum contingentés à La Réunion. Ces engagements ont fait l'objet d'un test de marché auprès de concurrents et de clients de la Cofepp.

328. Au cours de la séance du 21 octobre 2011, les représentants de la Cofepp, en réponse aux remarques du collège, ont envisagé d'améliorer le pan réunionnais des engagements en proposant un remède structurel consistant dans la cession d'une des deux distilleries qui font l'objet de l'acquisition. Cette solution a été testée auprès des concurrents de la Cofepp.

329. Le contenu de l'ensemble des engagements a fait l'objet de discussions, portant à la fois sur leur substance et sur leur forme, avant d'être formulés de manière définitive le 2 décembre 2011. C'est dans cette version qu'ils sont présentés ci-après.

330. A titre liminaire, il convient de relever que le contingent fiscal global attribué à la France augmentera de 12 000 hap à compter du 1er janvier 2012, avec effet rétroactif au 1er janvier 2011. Un projet de répartition de ce contingent a été discuté au sein du CIRT-DOM et validé par les pouvoirs publics même si aucun arrêté de répartition n'a encore été adopté. Dans la mesure où cette nouvelle répartition est strictement proportionnelle à la précédente, elle n'a pas d'impact sur l'analyse concurrentielle. L'Autorité a cependant tenu compte de ces nouvelles attributions de contingents dans l'analyse des engagements, afin de déterminer l'étendue des obligations de fourniture s'imposant à la Cofepp pour l'avenir.

a) Engagements de cessions des actifs martiniquais

331. La Cofepp s'engage à céder l'intégralité des actifs martiniquais actuellement détenus par QFS (les "actifs martiniquais"), à savoir :

- [> 50] % du capital de la société de production et de distribution de rhum Bellonie & Bourdillon Successeurs, ainsi que ses filiales, la Distillerie Agricole de Sainte Luce et la Société Civile d'Exploitation Agricole Trois Rivières ;

- les marques de rhum Duquesne, La Mauny et Trois Rivières, la Cofepp s'engageant également à s'abstenir d'en reprendre la distribution.

b) Engagements de cessions d'actifs réunionnais et de volumes de rhum contingenté

332. La Cofepp s'engage à céder plusieurs actifs actuellement détenus par QFS à La Réunion (les "actifs réunionnais") :

- l'intégralité du capital de la société d'assemblage et de conditionnement de vins, punchs, rhums et sirops SOGIM, ainsi que ses filiales, les sociétés Réunion Boissons, Chais de France et la Réunionnaise de Cafés ;

- la participation de [> 50] % actuellement détenue par QFS dans le GIE Rhums Réunion, cession qui emportera notamment celle de la marque de rhum Charrette, dont la Cofepp s'engage également à ne pas reprendre la distribution, et des capacités de stockage de rhum ;

- la Distillerie de Savanna.

333. La Cofepp s'engage également à compléter le contingent dont disposera le repreneur de ces actifs en lui cédant un volume de rhum contingenté qui, en s'ajoutant au contingent affecté à la distillerie de Savanna, permettra au repreneur de disposer d'un volume total de 8 000 hap.

334. Enfin, la Cofepp s'engage à fournir à tout tiers un volume de rhum contingenté de la distillerie Rivière du Mât, par lots de 1 000 hap et dans la limite d'un volume total annuel de 5 000 hap à un prix de [...] euro le litre d'alcool pur ("lap"), afin de permettre aux repreneurs d'animer la concurrence sur les marchés de MDD métropolitains. Ce prix sera soumis à une formule d'indexation dont les termes sont objectifs et vérifiables. Cet engagement est pris pour aussi longtemps que le régime de taxation préférentielle pour les rhums produits dans les DOM et vendus en métropole sera en vigueur.

c) Le mandataire et la gestion séparée des actifs

335. Les engagements déposés par les parties prévoient la nomination d'un mandataire agréé par l'Autorité de la concurrence. Ce mandataire veillera à l'application des engagements relatifs à la cession des actifs martiniquais et réunionnais, ainsi que de la bonne exécution des engagements de fourniture de volumes de rhum contingenté de la distillerie Rivière du Mât au repreneur de la distillerie de Savanna et à tout tiers intéressé.

336. Enfin, la Cofepp s'engage à préserver la séparation des actifs martiniquais et réunionnais jusqu'à leur cession en désignant le personnel nécessaire au maintien de leur viabilité, leur compétitivité et leur valeur marchande ainsi qu'un gestionnaire chargé d'en garantir la séparation sous le contrôle du mandataire.

B. APPRÉCIATION DES MESURES PROPOSÉES

337. L'opération entraîne une atteinte à la concurrence par le biais d'effets unilatéraux sur le marché du rhum agricole commercialisé sous MDF. L'opération entraîne également une atteinte à la concurrence sur les marchés MDF, MDD/MPP et MHD du rhum non-agricole. Enfin, l'opération soulève des risques d'atteinte à la concurrence sur le marché du punch en Martinique.

a) Mesures relatives au rhum agricole

338. QFS ne détenant des distilleries de rhum agricole qu'à la Martinique, l'intégralité du chevauchement d'activité entre les parties pour le rhum agricole concerne ce DOM. A cet égard, les engagements relatifs aux actifs martiniquais, qui consistent à céder l'intégralité des actifs en rhum agricole martiniquais de QFS (plantation, distillerie et son contingent, marques et société de distribution) éliminent les effets de l'opération en matière de rhum agricole et de punch.

b) Mesures relatives au rhum non-agricole

La nature des engagements proposés

339. Avant d'être formulés de manière définitive, les engagements proposés ont fait l'objet de discussions approfondies et ont substantiellement évolué au cours de la procédure. En effet, la Cofepp envisageait initialement de répondre aux préoccupations relatives au rhum non-agricole en proposant de confier à un distributeur tiers la commercialisation du rhum Charrette en métropole et de céder jusqu'à 3 000 hap de rhum contingenté à des tiers par contrat d'approvisionnement. La première mesure visait à répondre aux préoccupations exprimées sur le marché du rhum sous MDF et la deuxième aux préoccupations exprimées s'agissant des effets de l'opération sur les marchés du rhum sous MDD/MPP.

340. La nature des mesures prévues dans cette première proposition d'engagements ne permettait cependant pas de restaurer une structure compétitive des marchés concernés. En effet, l'opération porte atteinte à la concurrence notamment parce qu'elle fait dépendre le développement de toute concurrence à l'issue de la concentration de la Cofepp, qui contrôlera la quasi-totalité de l'outil de production sur le marché, la quasi-totalité des contingents non-agricoles et l'ensemble des marques incontournables. Dans un contexte où la nouvelle entité représente plus de 90 % des contingents de rhum non agricole tous DOM confondus, il est nécessaire que le repreneur de Charrette et les concurrents de la Cofepp sur le marché MDD disposent d'un accès structurel suffisant au rhum contingenté réunionnais qui leur permettent d'exercer une concurrence réelle vis-à-vis de la Cofepp sur le marché.

341. Or, de simples remèdes comportementaux tenant dans la conclusion des contrats de distribution et d'approvisionnement envisagés par la Cofepp ne permettaient pas de remédier à ces effets puisqu'ils auraient maintenu une structure de marché dans laquelle la nouvelle entité, en position de quasi-monopole, serait restée en mesure de restreindre la concurrence sur les marchés concernés du fait du rapport de dépendance auquel seraient soumis les concurrents de la Cofepp vis-à-vis de celle-ci pour l'accès au rhum contingenté.

342. La partie notifiante a donc modifié ses engagements. La Cofepp a ainsi proposé de céder la marque Charrette et de fournir au repreneur un volume de rhum contingenté provenant des distilleries de La Réunion dont la Cofepp conserverait le contrôle. La Cofepp prévoyait de fournir ces volumes à un prix de [...] euro par lap, prix auquel, selon la Cofepp, QFS vendait son rhum contingenté aux tiers pour les marchés MDD métropolitains. La Cofepp envisageait également de permettre au repreneur de la marque Charrette de rentrer au capital de ses distilleries réunionnaises, à titre minoritaire ([Confidentiel]). Ce mécanisme, inspiré des dispositions du pacte d'actionnaires relatif à la SPCRG liant la Cofepp à la société Valois et sécurisant les approvisionnements de cette dernière en rhum, visait à garantir l'approvisionnement du repreneur de la marque Charrette. De la même manière, la Cofepp prévoyait également d'ouvrir une portion minoritaire du capital des distilleries pour garantir l'approvisionnement des tiers acquéreurs de volumes de rhum contingenté destinés aux marchés de MDD/MPP. Cet engagement a été soumis à un test de marché le 7 octobre 2011.

343. Les réponses au test de marché ont cependant souligné l'inadéquation du mécanisme proposé. En effet, la cession d'une part minoritaire du capital des distilleries réunionnaises n'aurait conféré aux acquéreurs aucun contrôle sur l'outil industriel tout en exigeant de leur part de consentir un investissement significatif. Par ailleurs, en créant des liens capitalistiques entre concurrents, l'entrée des acquéreurs potentiels au capital de distilleries contrôlées par la Cofepp n'apportait pas de garanties suffisantes quant à l'efficacité concurrentielle des remèdes. Enfin, les répondants au test de marché ont mis en évidence que QFS pratiquait des prix de cession de son rhum contingenté pour les marchés MDD nettement inférieurs au prix de [...] euro le lap proposé par la Cofepp dans le cadre des engagements. Le prix proposé aurait entrainé de ce fait un effet de compression de marge sur le repreneur.

344. La partie notifiante a donc de nouveau amélioré ses engagements avec pour objectif de garantir l'autonomie concurrentielle et la viabilité du repreneur. Elle a ainsi finalement proposé un remède structurel consistant dans la cession de la marque Charrette et de la Distillerie de Savanna (La Réunion). Par ailleurs, pour tenir compte à la fois de la gravité des préoccupations concurrentielles concernant les marchés du rhum sous MDD/MPP et de l'augmentation imminente des contingents affectés aux distilleries réunionnaises, la Cofepp s'est également engagée à porter les cessions de volumes de rhum destinés aux marchés de MDD/MPP à 5 000 hap. Enfin, la Cofepp a proposé que ces volumes soient cédés à un prix de [...] euro le lap.

345. Comme expliqué dans les développements suivants, les modifications ainsi apportées aux engagements permettent de garantir la viabilité et l'autonomie des activités cédées par la Cofepp. Il convient d'examiner successivement l'impact des mesures proposées sur le marché MDF du rhum non-agricole et sur les marchés de MDD, MPP et MHD.

Appréciation des engagements concernant le marché du rhum non-agricole vendu sous MDF

346. Conformément aux lignes directrices de l'Autorité relatives au contrôle des concentrations, pour qu'une cession d'activité puisse efficacement remédier aux atteintes à la concurrence, il est indispensable que l'activité cédée soit viable et compétitive. Pour ce faire, le périmètre de cession doit comprendre tous les actifs et l'ensemble du personnel nécessaires à son bon fonctionnement. Il convient donc d'apprécier l'adéquation du périmètre de cession auquel la Cofepp s'engage, ainsi que la viabilité des actifs retenus.

347. La cession porte principalement sur la marque Charrette et la distillerie de Savanna. Le rhum actuellement utilisé pour la production du rhum Charrette provient des trois distilleries réunionnaises, Isautier, Savanna et Rivière du Mât, qui apportent respectivement des volumes adéquats au GIE Rhums Réunion pour l'embouteillage et la commercialisation des produits Charrette. La cession de la seule distillerie de Savanna, qui dispose actuellement d'un contingent de 5 497 hap, n'équivaut donc pas à la contribution de QFS à la production du rhum Charrette avant l'opération.

348. Les ventes du rhum Charrette en métropole ont représenté [6 000-7 000] hap en 2010. Ce volume est le résultat d'une progression significative des ventes de la marque. La Cofepp s'engage donc, pour compléter le contingent dont le repreneur de la distillerie Savanna sera titulaire, de céder au repreneur un volume de rhum contingenté supplémentaire pour atteindre un total de 8 000 hap. Ce volume correspond aux ventes du rhum Charrette en métropole en 2010 sur le circuit off-trade augmenté de plus de [10-20] % et permet de soutenir les perspectives de développement de la marque.

349. Par ailleurs, la Cofepp a appelé l'attention de l'Autorité sur le fait que la distillerie de Savanna nécessitait des investissements de mise aux normes relatifs au traitement des effluents de la production du rhum, relevant toutefois que ces investissements ne remettent pas en question la viabilité économique de l'actif. Cette affirmation n'a pas été contredite par les contributions au test de marché, y compris de la part d'opérateurs réunionnais à même d'apprécier l'état de la distillerie. Le groupe Tereos, interrogé sur ce point, a versé au dossier un état prévisionnel des investissements requis, attestant ainsi leur faisabilité et leur montant. En tout état de cause, la Cofepp garantit dans ses engagements la viabilité et le caractère opérationnel de la distillerie de Savanna. Toute défaillance à cet égard constituerait donc un manquement dans l'exécution des engagements imputable à la Cofepp au titre des dispositions de l'article L. 430-8 du code de commerce.

350. Par ailleurs, la distillerie de Savanna, qui produit annuellement [...] millions de litres de rhum, est également à même de produire des volumes de rhum suffisants pour alimenter les ventes de rhum Charrette à la Réunion.

351. Dans ces conditions, la cession de la distillerie Savanna et de la marque Charrette élimine les effets de l'opération dans les marchés de la production et de la vente de rhum non-agricole sous MDF et garantit la structure compétitive des marchés concernés en permettant l'émergence d'un concurrent significatif de la nouvelle entité.

Appréciation des engagements concernant le marché du rhum non-agricole vendu sous MDD, MPP et MHD

352. La Cofepp s'engage à fournir un volume annuel de 5 000 hap de rhum contingenté de la distillerie Rivière du Mât à tout tiers qui en ferait la demande, par lots de 1 000 hap et dans la limite de trois (*) lots par demandeur.

353. Ce volume représente environ la moitié du solde du contingent actuellement affecté à la distillerie Rivière du Mât, retranché des volumes que la Cofepp s'engage à fournir au repreneur de la marque Charrette et de la distillerie Savanna et [80-90] % des volumes de rhum contingenté MDD que QFS vendait annuellement sur le marché. Il constituera une source d'approvisionnement d'autant plus significative pour les concurrents de la Cofepp que son prix, fixé dans les engagements et soumis à une formule d'indexation objective et vérifiable, restera stable à long terme puisque cette cession est appelée à perdurer, en application des engagements, tant que le régime fiscal contingentaire au bénéfice des DOM existera.

354. Les volumes vendus feront l'objet de contrats de 3 ans. Cette durée, conforme aux souhaits exprimés lors du test de marché, est suffisamment longue pour donner aux acquéreurs une visibilité de nature à leur permettre de construire une offre aux GMS, sans pour autant figer les positions sur le marché.

355. En offrant aux tiers une opportunité d'approvisionnement en rhum non-agricole de La Réunion inexistante avant l'opération, cet engagement permettra l'émergence d'offres alternatives crédibles aux appels d'offres organisés par les enseignes de la grande distribution

DECIDE

Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 11-038 est autorisée sous réserve des engagements décrits aux paragraphes 327 à 355 ci-dessus et annexés à la présente décision.

Notes :

1 Décision de l'Autorité de la concurrence n° 10-DCC-51 du 28 mai 2010 relative à la prise de contrôle exclusif du Groupe Quartier Français par Tereos.

2 La part de marché de QFS sur le marché martiniquais est inférieure à [5-10] % selon les estimations transmises par la partie notifiante, tandis que celle de la Cofepp s'élève à environ [20-30] %.

3 Décisions de la Commission européenne IV-M.938 Guinness/Grand Metropolitan du 15 octobre 1997, COMP-M.2268 Pernod Ricard/Diageo/Seagram Spirits du 20 mars 2001, COMP-M.3779 Pernod Ricard/Allied Domecq du 24 juin 2005 et COMP-M.5114 Pernod Ricard/V&S du 17 juillet 2008.

4 Lettres du ministre de l'économie n° C2006-26 du 28 mars 2006, aux conseils de la société Saint Louis Sucre, relative à une concentration dans le secteur des spiritueux et n° C2008-76 du 29 décembre 2008, au conseil de la société Cofepp, relative à une concentration dans le secteur de l'alimentation (ci-après, "Cofepp/Boisset").

5 La Cofepp commercialise également des anisés, des amers, des apéritifs légers à base de vin et des portos.

6 Le whisky, la vodka, la tequila, le gin et le rhum sont aussi des eaux-de-vie celles-ci étant définies comme le résultat de la distillation d'un liquide faiblement alcoolisé à base de vin, de fruits, d'herbes ou de grains.

7 Règlement CE n° 110-208 du Parlement et du Conseil du 15 janvier 2008 concernant la définition, la désignation, la présentation, l'étiquetage et la protection des indications géographiques des boissons spiritueuses et abrogeant le règlement(CEE) n° 1576-89 du Conseil, annexe II.

8 La foudre est un tonneau de très grande dimension, équivalent de plusieurs barriques.

9 Décret n° 2009-1350 du 29 octobre 2009 relatif aux appellations d'origine contrôlées dont la Martinique.

10 [Confidentiel].

11 Décision n° 2007-659-CE du Conseil du 9 octobre 2007 autorisant la France à appliquer un taux d'accise réduit sur le rhum "traditionnel" produit dans ses départements d'outre-mer et abrogeant la décision 2002-166-CE.

12 Décision du 9 octobre 2007 précitée, article 3, alinéa 2.

13 1 hectolitre d'alcool pur correspond à 2 hectolitres de rhum à 50° ou à 2,5 hectolitres de rhum à 40°.

14 Décision du 9 octobre 2007 précitée, articles 2 et 3.

15 Id., considérant 4, 6 et 7.

16 Id., articles 4.

17 Voir le procès-verbal de la réunion du conseil d'administration du Conseil Interprofessionnel du Rhum Traditionnel des départements d'outre-mer (CIRT DOM) du 24 février 2011, communiqué par la partie notifiante le 15 avril 2011.

18 Voir la proposition de décision du Conseil du 22 septembre 2011 modifiant la décision 2007-659-CE en ce qui concerne sa période d'application et le contingent annuel pouvant bénéficier d'un taux d'accise réduit.

19 Conseil Interprofessionnel du Rhum Traditionnel des départements d'outre-mer (ou "CIRT DOM").

20 Arrêté du 3 février 2011 portant répartition entre les départements d'outre-mer des contingents d'exportation des rhums traditionnels.

21 Arrêté du 3 février 2011 portant répartition entre les distilleries du contingent d'exportation de rhum traditionnel et relatif à la gestion de ce contingent (le terme "exportation" s'entendant à destination de la métropole.).

22 Arrêté du 3 février 2011 portant organisation de la campagne rhumière, des règles de blocage, d'échelonnement et de redistribution du contingent.

23 Réponses de Spiridom et de Valois au test de marché adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

24 Par exemple, le compte rendu de la réunion du conseil d'administration du CIRT DOM du 28 octobre 2010 fait apparaître que, pour la distillerie guyanaise de Saint Maurice qui n'avait pas expédié tout son contingent, la répartition du solde du contingent de Guyane aux rhums de sucrerie de Martinique, Guadeloupe, et Réunion au prorata du contingent total des trois départements et à l'intérieur de chaque département au prorata des contingents détenus par les distilleries serait demandée par le CIRT DOM à l'administration (procès-verbal de la réunion du Conseil d'administration du CIRT DOM du 28 octobre 2010, transmis par la partie notifiante le 15 avril 2011).

25 Voir lettre du 20 novembre 1998 du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie au président directeur général de la Cofepp relative à une opération de concentration sur le marché de la production de rhum.

26 Par exemple en 2010, les rhums de sucrerie non contingentés ont été vendus en moyenne 14,32 euro la bouteille, contre 7,99 euro pour les rhums contingentés de 40 %, 11,10 euro pour les rhums contingentés de 41 à 49 % et 10,86 euro pour les rhums contingentés de 50 % (source : données IRI transmises par QFS).

27 Réponse de Pernod Ricard au test de marché adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

28 Voir notamment la décision de la Commission européenne COMP-M.5114 précitée.

29 Voir notamment la lettre n° C2006-26 en date du 28 mars 2006 aux conseils de la société Saint-Louis Sucre, relative à une concentration dans le secteur des spiritueux.

30 Voir notamment la réponse d'un concurrent des parties au test de marché adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

31 Voir la réponse de la société Marie Brizard au test de marché adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

32 Réponse d'Auchan et de Carrefour au test de marché adressé aux clients le 12 avril 2011.

33 Réponse de Valois au test de marché adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

34 Réponse de Chatel au test de marché adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

35 Par exemple, le site internet de la Fédération Française des Spiritueux consacré au rhum http://www.toutsurlerhum.fr explique en détail ces différences.

36 Décision du ministre de l'économie C2008-76 précitée.

37 Page 38 de la notification.

38 Réponse de la Cofepp en date du 14 avril 2011.

39 Réponse d'Isautier au test de marché adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

40 Décisions de la Commission européenne IV-M.938, COMP-M.2268 et COMP-M.5114 précitées.

41 Décision du ministre de l'économie C2008-76 précitée.

42 Les parties commercialisent également du triple sec et du curaçao mais elles ne sont pas présentes sur les mêmes circuits de distribution, la Cofepp étant présente sur le circuit on-trade, tandis que QFS est présent sur le circuit off-trade.

43 Décisions du ministre de l'économie C2008-76 précitée et de la Commission européenne IV-M.938, COMP-M.2268, COMP-M.3779 et COMP-M.5114 précitées.

44 Réponse de la Cofepp du 16 août 2011.

45 Réponse d'un concurrent des parties à la question 8 du premier test de marché concurrents.

46 Réponse du groupe Système U à la question 10 du premier test de marché clients.

47 Décisions de la Commission européenne COMP-M.2268 et COMP-M.5514 précitées.

48 Décision du ministre de l'économie C2008-76 précitée.

49 Réponses des clients à la question 10 du premier test de marché clients.

50 Réponses des concurrents à la question 11 du premier test de marché concurrents.

51 Décisions de la Commission européenne IV-M.938, COMP-M.2268 et COMP-M.5114 précitées.

52 Décisions du ministre de l'économie n° C2006-26 et C2008-76 précitées.

53 Décisions de la Commission européenne IV-M.938, COMP-M.2268 et COMP-M.5114 précitées.

54 Décisions du ministre de l'économie C2006-26 et C2008-76 précitées.

55 Décision du ministre de l'économie n° C2008-76 précitée.

56 La Cofepp estime que les vodkas aromatisées représentent environ 1 % du marché de la vente de vodka en vue de la consommation à domicile.

57 Décision du ministre de l'économie n° C2008-76 précitée.

58 Réponse du 5 avril 2011.

59 Réponse du groupe Marie Brizard à la question 10 du premier test de marché concurrents.

60 Concernant plus spécifiquement les spiritueux, voir notamment la décision de la Commission européenne COMP-M.5114.

61 Concernant plus spécifiquement les spiritueux et autres alcools, voir la décision du ministre n° C2008-76 précitée.

62 Voir notamment les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 09-DCC-48 du 22 septembre 2009 relative à l'acquisition par la société LDC Traiteur de la société Marie, n° 09-DCC-67du 23 novembre 2009 relative à l'acquisition de la société Arrivé par la société LDC Volailles, n° 10-DCC-21du 15 mars 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Champiloire SA par la société Bonduelle SA et n° 11-DCC-104 du 4 juillet 2011 en attente de publication.

63 Segmentation envisagée dans la décision du ministre n° C2008-100 précitée.

64 Décision du ministre n° C2008-100 précitée.

65 Réponse du groupe Intermarché à la question 16 du premier test de marché clients.

66 Voir notamment la décision de la Commission européenne COMP-M.5114 précitée.

67 Voir notamment les décisions n° C2006-26 et C2008-76 précitées.

68 La partie notifiante a fourni une estimation de la part de marché des "fournisseurs étrangers" uniquement sur trois types de produits : le scotch whisky, la vodka et le gin. Elle n'a pas identifié cette catégorie pour les autres marchés concernés, ce qui tend à indiquer que leur présence est encore marginale sur ces marchés. La part de marché des fournisseurs étrangers sur le scotch MDD/MPP et MHD est importante (environ [50-60] % en MDD/MPP et [40-50] % en MHD). Toutefois, le scotch est un produit particulier dans la mesure où pour bénéficier de cette appellation le whisky doit être distillé en Ecosse, ce qui explique un recours massif des distributeurs aux importations. L'analyse concurrentielle menée à un niveau national ne posant pas de problème sur ce produit, il n'est pas nécessaire d'envisager un élargissement de ce marché. Concernant le gin et la vodka MDD, la part de marché attribuée aux fournisseurs étrangers est inférieure à [0-5] %. Concernant le gin et la vodka MHD, leur part de marché est plus substantielle dans la mesure où elle s'élève à environ [20-30] % et [40-50] %. Toutefois, ces parts de marché élevées s'expliquent par le recours important d'Aldi et de Lidl à des fournisseurs situés en Allemagne et ne sont pas représentatives de la politique d'approvisionnement des GMS pour les produits MDD/MPP (le recours à des fournisseurs étrangers est plus courant dans le hard-discount).

69 Toutes les données chiffrées sont disponibles sur le site internet de la fédération Française des Spiritueux à l'adresse : http://www.spiritueux.fr/dossiers-p-39.html.

70 "FFS infos spiritueux" étude de la Fédération Française des Spiritueux transmis par la partie notifiante le 22 juillet 2011.

71 Voir http://www.toutsurlerhum.fr, chiffres clés.

72 Source : Notification, les données de volume et de parts de marché ayant été globalement confirmées par le test de marché.

Notes du Tableau 1 :

73 Spiridom est une entreprise commune qui distribue les rhums Damoiseau de Guadeloupe ainsi que Clément et JM de Martinique.

74 Lixir distribue en métropole la marque " Trois Rivières " qui appartient à QFS.

75 Indice d'Hirschmann-Herfindahl.

76 Paragraphe 345.

77 La Guyane dispose d'un faible contingent (450 hap) de rhum agricole qui est attribué à une distillerie tierce indépendante des parties.

78 Lignes directrices de l'Autorité de concurrence en matière de contrôle des concentrations, paragraphe 365.

79 Id., paragraphe 366.

80 Réponses au questionnaire adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

81 Source : données Nielsen 2010.

82 Paragraphes 374 et 375.

83 Voir réponse de Valois au questionnaire adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

84 Réponse de Valois au questionnaire adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

85 Réponse de Carrefour au questionnaire adressé aux clients le 12 avril 2011.

86 Réponses de Valois et de Spiridom au questionnaire adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

87 Réponses aux questionnaires adressés aux concurrents le 12 avril 2011.

88 Voir réponse de Marie Brizard au questionnaire adressé aux concurrents le 12 avril 2011.

89 Comme pour le rhum agricole et pour les mêmes raisons, l'analyse concurrentielle portera sur la répartition contingents telle que prévue par l'arrêté du 3 février 2011. Il sera en revanche tenu compte des nouvelles attributions de contingents dans l'analyse des engagements, afin de déterminer l'étendue des obligations de fourniture s'imposant à la Cofepp pour l'avenir.

90 Pacte d'actionnaires entre la Cofepp et la société Valois concernant la SCPRG, article 3.

91 Id.

92 [Confidentiel].

93 Procès-verbal d'audition de la société Valois, cote 2047.

94 Pacte d'actionnaires précité entre la Cofepp et Valois, article 3-2-2.

95 Voir lettre précitée du 20 novembre 1998 du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie au président directeur général de la Cofepp.

96 Paragraphes 368 et 369.

97 Procès-verbal d'audition précité de la société Valois.

98 Id.

99 Réponse de la partie notifiante en date du 29 juillet 2011 à une demande d'informations des services d'instruction de l'Autorité du 25 juillet 2011.

100 Réponse de QFS en date du 29 juillet 2011 à une demande d'informations des services d'instruction de l'Autorité du 25 juillet 2011.

101 Réponse de la partie notifiante en date du 29 juillet 2011 précitée..

102 Procès-verbal d'audition précité de la société Valois.

103 Id.

104 Observations de la Cofepp en réponse au rapport.

105 Source : données Nielsen 2010.

* Erreur matérielle corrigée.

106 Les parts de marché indiquées dans le présent développement concernant les concurrents (Picard, Grands Chais de France et Suprex) se basent sur les volumes de vente déclarés par ceux-ci dans leur réponse au test de marché.

107 La base de données a été constituée à partir des réponses d'acheteurs des GMS. Elle est basée sur 47 observations concernant des appels d'offres passés entre 2008 et 2011. En raison du faible nombre d'observations par type d'alcool et par année, les données ont été agrégées.

108 [Confidentiel].

109 [Confidentiel].

110 Des données en termes de " second best " ont pu être collectées sur uniquement 37 appels d'offres. Sur ces 37 appels d'offres, [Confidentiel].

111 Lignes directrices de l'Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations, paragraphe 366.

112 Id., paragraphe 366.

113 Cette analyse inclut les chaînes produisant des ASA, dans la mesure où trois des cinq opérateurs faisant l'objet de l'analyse produisent des ASA (Cofepp, QFS et Picard) et où, hormis chez QFS, ces ASA sont produits sur des chaînes servant également à la production de spiritueux.

114 PV d'audition du 19 juillet 2011 du directeur général du groupe Picard.

115 PV d'audition du 10 août 11 du directeur commercial du groupe GCF.

116 Ce chiffre prend en compte la production totale des usines situées en France à laquelle a toutefois été ôtée une production annuelle de [...] millions de cols de sirops. En effet, les sirops sont embouteillés une sur une ligne de conditionnement spécialement dédiées aux bidons métalliques. Il ne prend pas en compte la production des sites situés à l'étranger qui ne produisent aucun des spiritueux affectés.

117 Réponse de QFS en date du 5 août 2011.

118 Réponse à la question 13 du groupe Marie Brizard au premier test de marché concurrents.

119 Réponse de la Cofepp du 26 août 2011 aux questions complémentaires du 19 août 2011.

120 PV d'audition du 10 août 11 du directeur commercial du groupe GCF.

121 Réponse du groupe Franprix/Leader Price au premier test de marché clients.

122 PV d'audition du 10 août 11 du directeur commercial du groupe GCF.

123 Réponse du groupe Système U au premier test de marché clients.

124 PV d'audition du 29 août 2011 des représentants de la Scamark.

125 Réponse du groupe Pernod Ricard à la question 4 du deuxième test de marché clients.

126 Réponse du groupe Bacardi à la question 4 du deuxième test de marché clients.

127 Réponses des groupes Pernod Ricard et Bacardi au deuxième test de marché clients.

128 Réponses du groupe Marie Brizard au deuxième test de marché clients.

129 PV de l'audition des représentants du groupe Système U.

130 Commission européenne, rapport de la DG Entreprise et Industrie, The impact of private labels on the competitiveness of the European food supply chain, janvier 2011, p. 37. Traduit de l'anglais par la partie notifiante.

131 Id., p. 38. Traduit de l'anglais par l'Autorité.

132 Id. Traduit de l'anglais par l'Autorité.

133 [Confidentiel].

134 Lignes directrices de la Commission Européenne sur l'appréciation des concentrations horizontales au regard du Règlement du Conseil, relatif au contrôle des concentrations entre entreprises, 2004-C31-03, 5 février 2004, §65.

135 PV de l'audition du 3 août des représentants du groupe Intermarché.

* Erreur matérielle corrigée.