CA Aix-en-Provence, 8e ch. B, 26 mars 2010, n° 08-02558
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Agence Européenne de Communication (SARL)
Défendeur :
Sodiplan (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Braizat
Conseillers :
Mmes Bourrel, Durand
Avoués :
SCP Liberas-Buvat-Michotey, SCP Bottai-Gereux-Boulan
Avocat :
Mes Donsimoni Fabrice
Par un document du 26 février 2003, à l'entête de la société Agence Européenne de Communication (dite AEC), la société Sodiplan a commandé l'insertion d'espaces publicitaires sur 8 pages dans la revue Transunion.
Le prix, de 47 840 euro TTC, devait être payé en 4 règlements de 11 960 euro l'un, le premier à réception de la facture et les trois autres en début de mois de juin, août et septembre.
La société Sodiplan, qui prétend avoir cru que les 8 pages d'insertion se répartissaient en quatre doubles pages publicitaires d'encart, dans la revue Transunion, pour les parutions du mois de mai au mois de septembre 2003, s'est acquittée des deux premières échéances puis, elle a, par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 mai 2003, demandé à la société AEC d'annuler les publications suivantes afin de réduire ses dépenses publicitaires, compte-tenu des difficultés financières qu'elle rencontrait.
La société AEC a entendu maintenir les échéances d'août et septembre.
Elle a, par acte du 18 mai 2004, assigné la société Sodiplan devant le Tribunal de Commerce d'Aix-en-Provence en paiement de la somme de 23 920 euro TTC outre intérêts, au titre des insertions et de celles de 3 000 euro à titre de dommages et intérêts et de 1 500 euro en application de l'article 700 du CPC.
Par jugement du 11 juillet 2005, la juridiction consulaire a :
- rejeté comme injustifiées toutes les demandes de la société AEC à l'encontre de la société Sodiplan,
- rejeté la demande reconventionnelle formée à titre principal par la société Sodiplan tendant à la nullité de la convention du 26 juin 2003 comme contraire aux dispositions de la loi du 29 janvier 1993 mais a retenu sa demande subsidiaire,
- prononcé aux torts et griefs de la société AEC la résolution de la convention reposant sur la "facture bon de commande n° 86008".
- condamné en conséquence la société AEC à restituer à la société Sodiplan la somme de 23 920 euro TTC versée par cette dernière, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,
- rejeté la demande en dommages et intérêts de la société Sodiplan mais condamné la société AEC à lui payer 300 euro sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux dépens.
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La société AEC a interjeté appel de cette décision le 19 août 2005.
L'affaire a fait l'objet d'un retrait du rôle le 8 février 2008.
Elle a été réenrôlée le 12 février 2008.
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Par ses dernières écritures, déposées et signifiées le 19 décembre 2005, la société AEC demande à la cour de :
"Vu l'article 1147 du Code civil ,
Vu l'article 9 du CPC,
Vu le bon de commande n° 86008,
Vu les pièces versées aux débats,
- Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce d'Aix-en-Provence du 11 juillet 2005,
- Condamner la société Sodiplan à payer à la société AEC les sommes suivantes :
23 920 euro TTC au titre des insertions publicitaires dans la revue "Transunion" avec les intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2003,
3 000 euro à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
4 000 euro au titre de l'article 700 du CPC,
- Condamner la SAS Sodiplan aux entiers dépens.......".
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Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 12 février 2008, la société Sodiplan demande à la cour de :
"Vu les articles 1134, 1147 et 1184 du Code civil,
Vu la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993,
Vu l'article 9 du nouveau Code de procédure civile,
A titre principal :
Infirmer le jugement rendu en date du 11 juillet 2005 par le Tribunal de Commerce d'Aix-en-Provence en ce qu'il a rejeté l'argument selon lequel la pseudo-convention liant les parties est nulle et non avenue en ce qu'elle contrevient aux dispositions d'ordre public de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 dite loi Sapin,
Constater que la société AEC est une agence conseil en publicité,
Constater que la société AEC se prévaut d'une convention qui ne satisfait pas aux dispositions d'ordre public de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, et ne constitue pas le mandat écrit exigé par la loi précitée,
En conséquence,
Dire et juger que la convention intitulée "Facture bon de commande N° 86008" est nulle et d'une nullité absolue,
Condamner la société AEC à restituer les sommes versées par la société Sodiplan selon les factures n° 03/31/0612 et 03/31/0610, à savoir la somme totale de 23 920,00 euro TTC (11960,00 euro x 2) assortie des intérêts légaux, à compter de la décision à intervenir,
Condamner la société AEC au paiement de la somme de 3 000 euro au titre de dommages et intérêts,
A titre subsidiaire :
Confirmer le jugement rendu en date du 11 juillet 2005 par le Tribunal de Commerce d'Aix-en-Provence en ce qu'il a constaté que la société AEC n'apporte pas la preuve qu'elle a fait procéder aux insertions publicitaires de la société Sodiplan dans la revue Transunion et que la société Sodiplan a bien procédé au versement prévu, à échéance, selon les factures n° 03/31/0612 et 03/31/0610, de la somme totale de 23 920,00 euro TTC (11 960,00 x 2),
En conséquence,
Prononcer la résolution du contrat intitulée "Facture bon de commande N° 86008" aux torts exclusifs de la société AEC,
Condamner la société AEC à restituer sans délai à la société Sodiplan les versements que celle-ci a déjà effectués en vertu du contrat, à savoir la somme totale de 23 920,00 euro TTC (11 960,00 x 2) assortie des intérêts légaux,
Condamner la société AEC au paiement de la somme de 3 000 euro à titre de dommages et intérêts,
A titre infiniment subsidiaire :
Prononcer la nullité de la convention des parties dénommée "Facture bon de commande N° 86008" pour erreur de consentement de la société Sodiplan,
Ordonner la restitution de la somme de 23 960 euro par la société AEC à la société Sodiplan,
En tout état de cause :
Débouter la société AEC de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,
Condamner la société AEC sur les fondements des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, au paiement de la somme de 4 000 euro,
Condamner la société AEC aux entiers dépens........".
Motifs de la décision :
Sur l'application de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 :
Attendu que selon l'extrait d'inscription au registre du commerce, la société AEC a pour activité la publicité, l'impression, la relation publique toutes activités de communication et d'édition ;
Attendu qu'il résulte du contrat d'édition et de régie publicitaire qu'elle a passé le 20 janvier 1994 avec le syndicat CGT Transports et de la "facture bon de commande n° 86008" litigieuse que la société AEC n'a pas agi comme intermédiaire dans l'achat d'espaces publicitaires mais a vendu directement de tels espaces ;
Qu'elle n'est donc pas soumise aux dispositions de la loi du 29 janvier 1993 ;
Que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point ;
Sur le respect de ses obligations par la société AEC :
Attendu que la "Facture bon de commande n° 86008" mentionne notamment "Insertion : 8 pages revue Transunion" et, en ce qui concerne le prix, de 47 840 euro TTC : "règlements échéances :
1) 11 960 euro dès réception de facture,
2° 11 960 euro juin (début de mois),
3) 11 960 euro août (début de mois),
4) 11 960 euro septembre (début de mois)".
Attendu qu'il résulte de ces indications que le contrat ne concerne qu'une seule insertion de 8 pages dont le prix est payable en 4 échéances ;
Que rien ne permet à la société Sodiplan d'affirmer que les 8 pages d'insertion devaient être réalisées par 4 doubles pages publicitaires d'encart dans la revue Transunion pour les parutions du mois de mai au mois de septembre 2003 et que l'échéancier concernait les différentes parutions ;
Que dans ces conditions, la société Sodiplan ne saurait prétendre qu'elle a pu se méprendre sur les modalités du contrat ;
Attendu que ces affirmations sont d'autant moins fondées que d'une part, le journal Transunion parait annuellement, ainsi que l'a attesté le 8 février 2005 le secrétaire général du Syndicat Général CGT des Travailleurs des Transports et activités auxiliaires qui édite cette revue et que d'autre part, et surtout, les 8 pages de publicité commandées ont bien été insérées dans cette revue qui a été versée aux débats (pièce n° 11) ;
Attendu en conséquence, que la société AEC ayant rempli ses obligations contractuelles, la société Sodiplan doit s'acquitter du prix des insertions publicitaires ;
Qu'elle sera donc condamnée à payer à la société AEC la somme de 23 920 euro, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 30 septembre 2003 ;
Que le jugement entrepris sera en conséquence infirmé de ces chefs ;
Sur la résistance abusive, l'article 700 du CPC et les dépens :
Attendu que la société AEC, qui ne démontre pas que la société Sodiplan a résisté abusivement, sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts ; qu'il est équitable en revanche de faire application à son profit des dispositions de l'article 700 du CPC ;
Attendu que partie perdante, la société Sodiplan sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ;
Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort. Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a dit que la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 est inapplicable en l'espèce. Statuant à nouveau : Condamne la SAS Sodiplan à payer à la SARL Agence Européenne de Communication (AEC) la somme de 23 920 euro avec intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2003. La condamne en outre à lui verser la somme de 2 000 euro en application de l'article 700 du CPC. Rejette toute autre demande.
Condamne la SAS Sodiplan aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC .