CA Versailles, 3e ch., 27 octobre 2011, n° 10-02747
VERSAILLES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
SADCS Société commerciale agricole Max Dupont et Cie
Défendeur :
SCEA De Fasserville , Guérin
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Valantin
Conseillers :
Mmes De Martel, Souciet
Avocats :
SCP Gas, SCP Jullien-Lecharny-Rol-Fertier, Mes Rivière, Neouze
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes des bons de commandes n° 13123 et 13124 du 24 octobre 2007, la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie a acheté à :
- Madame Fabienne Guérin, née Barre, 11 X 27 tonnes de blé dur,
- la SCEA De Fasserville, ayant pour gérants Monsieur et Madame Guérin, 8 X 27 tonnes de blé dur et ce, au prix de 410 euro la tonne.
La Société commerciale agricole Max Dupont et Cie a réglé les 30 et 31 janvier 2008 des acomptes de :
- 112.500 euro à Madame Fabienne Guérin née Barre,
- de 81.800 euro à la SCEA De Fasserville.
Le 3 juin 2008, la société de transport Hardy, intervenant pour la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie, a procédé à l'enlèvement de 3 lots de 27 tonnes de blé dur de la ferme de Chenonville, lieu de stockage de la marchandise par Madame Fabienne Guérin, née Barre, et la SCEA De Fasserville après que la société SGS, mandatée par l'acheteur ait procédé à l'agréage de la marchandise.
Par lettre du 3 juin 2008, la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie a :
- avisé Monsieur Serge Guérin du résultat d'analyse effectué sur la marchandise enlevée faisant état d'un poids spécifique loin au-dessous des normes contractuelles, de grains fusariés hors normes, d'un seuil intolérable de mycotoxines, rendant la marchandise impropre à sa consommation,
- rappelé le taux de l'analyse du mois de décembre de 3920 ppb pour une tolérance de 1 500 ppb et reprochait au vendeur de ne pas avoir respecté son engagement de passer la marchandise au séparateur.
Avisée le 13 juin par la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie que le camion qui transportait un lot de 24,550 tonnes de blé dur avait été refusé en raison d'un taux de mycotoxines de 3600 Don, une réfaction de 50 euro par tonne a été accordée par le vendeur.
Les correspondances échangées entre les parties n'ont pas permis de résoudre amiablement le litige.
Faisant valoir que le blé qu'il avait acquis ne correspondait pas à sa commande en raison du taux important de mycotoxines et invoquant soit une erreur sur les qualités substantielles de la marchandise soit un défaut de conformité de la chose livrée, la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie, a fait donner assignation le 12 mars 2009 à Madame Fabienne Guérin, née Barre, et à la SCEA De Fasserville devant le tribunal de grande instance de Chartres aux fins :
- d'annulation des deux contrats de vente et de restitution des acomptes
* soit par la SCEA De Fasserville de 81.800 euro avec intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2007 (en réalité 2008),
* soit par Madame Fabienne Guérin, née Barre, de 103.197,27 euro avec intérêts à compter du 4 juillet 2007 (en réalité 2008),
- de condamnation in solidum des défendeurs aux dépens et au paiement d'une indemnité de 2.000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Madame Fabienne Guérin, née Barre, et la SCEA De Fasserville ont conclu au débouté des réclamations de la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie et ont sollicité :
- à titre principal,
- la confirmation de la validité des contrats passés,
- la condamnation de la partie adverse à enlever les lots de blés encore stockés par elles,
- la condamnation au paiement :
* des soldes de prix de vente pour Madame Fabienne Guérin née Barre 7.974,99 euro et pour la SCEA De Fasserville 6.760 euro avec intérêts à compter du 8 décembre 2009,
* de dommages et intérêts au titre du préjudice dû au stockage de blé de février 2008 jusqu'au mois de juin 2009 (pour Madame Fabienne Guérin, née Barre, 4.204,08 euro et pour la SCEA De Fasserville 3.525,12 euro),
- à titre subsidiaire,
- la condamnation de la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie à leur verser à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance de vendre le blé invendu la somme de 22.267,60 euro pour Madame Fabienne Guérin, née Barre, et celle de 24.212,80 euro pour la SCEA De Fasserville,
- en tout état de cause,
- la condamnation de la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie à verser à chacune d'elles la somme de 7.500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en sus des dépens.
Par jugement du 31 mars 2010, le tribunal de grande instance de Chartres, considérant
* que la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie, faute d'établir que la marchandise n'était pas conforme à la date où elle devait être enlevée et ayant pris le risque, en attendant d'en prendre livraison alors qu'elle en était devenue propriétaire, d'une dégradation de la qualité de la marchandise alors même qu'elle souhaitait un haut de gamme, ne démontrait pas l'existence du défaut de conformité alléguée ni l'existence d'un vice de consentement,
* que les contrats litigieux devaient en conséquence être exécutés,
* que les éléments contractuels ne prévoyaient pas un stockage chez les fournisseurs au-delà du mois de janvier 2008, tout en observant l'absence de toute mise en demeure de l'acheteur, a :
- débouté la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie à :
* enlever les lots de blé encore stockés par Madame Fabienne Guérin, née Barre, et par la SCEA De Fasserville,
* payer à la SCEA De Fasserville la somme de 6.760 euro au titre du solde du prix de vente et à Madame Fabienne Guérin, née Barre, celle de 7.974,99 euro, les dites sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter de la décision,
* verser à titre de dommages et intérêts 2.000 euro à la SCEA De Fasserville et 2.500 euro à Madame Fabienne Guérin, née Barre,
* régler à chacun des deux défendeurs la somme de 2.000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
* supporter les entiers dépens.
Le 12 avril 2010, la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie a interjeté appel du jugement du 31 mars 2010.
Le 12 mai 2010, la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin, née Barre, ont constitué avoué.
En application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, résultant de l'article 11 du décret du 28 décembre 1998, il est expressément fait référence pour la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie, appelante, et la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin, née Barre, intimées et appelantes incidentes, à leurs conclusions signifiées les 7 juin et 23 juin 2011 tendant à ce que la Cour :
- pour la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie, appelante
- la déclare recevable et bien fondée en son appel et infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- déboute la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin née Barre de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- statuant à nouveau,
- vu les articles 1110 et suivants et subsidiairement 1 604 du Code civil,
- prononce la nullité des contrats n° 13124 et 13123 conclus entre elle et la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin née Barre,
- à titre subsidiaire,
- à titre liminaire, fasse injonction aux intimés de justifier que les stocks de blé sont toujours entreposés dans leur ferme,
- prononce la résolution judiciaire des dits contrats et en conséquence, remette les parties en l'état antérieur à leur conclusion et condamne :
* la SCEA De Fasserville à lui payer la somme de 80.800 euro avec intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2007,
* Madame Fabienne Guérin, née Barre, à lui payer la somme de 103.197,27 euro avec intérêts au taux légal à compter du 4 juillet 2007, avec capitalisation des intérêts,
- condamne la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin, née Barre, chacune, à lui verser 3.000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les entiers dépens avec faculté de recouvrement direct au profit de la SCP GAS, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
- pour la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin, née Barre, intimées et appelantes incidentes
- Vu les articles 1110, 1134, 1315 et 1184 du Code civil, 9 et 700 du Code de procédure civile,
- déboute la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie de ses demandes, fins et prétentions,
- confirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie à :
* enlever les lots de blé encore stockés par eux,
* à payer à la SCEA De Fasserville la somme de 6.760 euro au titre du solde du prix de vente et à Madame Fabienne Guérin, née Barre, celle de 7.974,99 euro, les dites sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter de la décision,
- réforme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie à verser à titre de dommages et intérêts 2.000 euro à la SCEA De Fasserville et 2.500 euro à Madame Fabienne Guérin, née Barre,
- statuant à nouveau,
- condamne la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie à payer à :
* Madame Fabienne Guérin, née Barre, la somme de 4.204,08 euro au titre du préjudice dû au stockage du blé de février 2008 jusqu'à la fin du mois de juin 2009, outre les intérêts au taux légal à compter du 8 décembre 2009,
* la SCEA De Fasserville la somme de 3.525,12 euro au titre du préjudice dû au stockage du blé de février 2008 jusqu'à la fin du mois de juin 2009, outre les intérêts au taux légal à compter du 8 décembre 2009,
- à titre subsidiaire, si la Cour prononçait la nullité ou la résolution des contrats,
- constate que la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie a manqué à son devoir de loyauté à l'égard de ses cocontractants et par là même leur a causé un important préjudice,
- condamne en conséquence la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie à payer à :
* Madame Fabienne Guérin, née Barre, la somme de 33.267,60 euro correspondant au préjudice subi au titre de la perte de chance diminué de l'acompte versé par la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie, outre les intérêts au taux légal à compter des conclusions de ce du 23 juin 2011 ,
* la SCEA De Fasserville la somme de 24.212,80 euro correspondant au préjudice subi au titre de la perte de chance diminué de l'acompte versé par la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie, outre les intérêts au taux légal à compter des conclusions de ce du 23 juin 2011 ,
- en tout état de cause,
- condamne la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie à leur verser, à chacun d'eux, la somme de 10.000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les entiers dépens avec faculté de recouvrement direct au profit de la SCP Jullien-Lecharny-Rol-Fertier, avoués à la cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 juin 2011.
L'audience des plaidoiries s'est déroulée le 19 septembre 2011 et le délibéré a été fixé au 27 octobre 2011.
SUR CE,
Attendu que suivants bons de commandes n° 13123 et 13124 du 24 octobre 2007, la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie a acheté à :
- Madame Fabienne Guérin, née Barre, 11 X 27 tonnes de blé dur,
- la SCEA De Fasserville, ayant pour gérants Monsieur et Madame Guérin, 8 X 27 tonnes de blé dur, et ce, au prix de 410 euros la tonne ;
Attendu que les bons de commandes versés aux débats par les parties différent par des mentions supplémentaires qui ont manifestement été portées postérieurement à la signature du 24 octobre 2007 ;
Que les mentions communes aux exemplaires produits visent notamment :
- un blé dur haut de gamme aux normes contractuelles dont notamment un taux de Don Vomitoxine de 1 500 maximum, sain loyal et marchand sans insectes ;
Attendu que la date de paiement a été fixée au 30 janvier 2008, la date de livraison au 01/08.
Attendu qu'il est indiqué de façon manuscrite 'Enlèvement option acheteur' ;
Attendu que c'est avec pertinence que la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie fait valoir que le blé fourni par la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin née Barre devait présenter un taux de Don Vomitoxine maximum de 1 500 ;
Attendu qu'aucune des parties ne verse aux débats d'analyse de taux de mycotoxines antérieur ou concomitant au bon de commande du 24 octobre 2007 pour une marchandise provenant de la récolte de 2007 et qui était donc déjà stockée chez les vendeurs ;
Attendu qu'au vu des pièces figurant dans les dossiers des parties la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie a fait pratiquer des analyses du taux de mycotoxines :
- au mois de décembre 2007 pour un taux de 3920
- le 6 juin 2008 pour un taux de 4310
- le 13 juin 2008 pour un taux de 3 600
- le 19 juin 2008 pour un taux de 5960
- le 24 juin 2008 pour un taux de 5 874
Attendu que la SCEA De Fasserville a, pour sa part, fait effectuer une analyse qui le 16 juillet 2008 a donné un taux de 1990 avec une marge d'erreur en plus ou en moins de 574 ;
Attendu que la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie a versé des acomptes à la SCEA De Fasserville et à Madame Fabienne Guérin née Barre les 30 et 31 janvier 2008 et a procédé en juin 2008 à un enlèvement de marchandise de 3 lots de 27 tonnes du blé commandés en octobre 2007 par l'intermédiaire d'une société de transport ;
- Sur la demande de nullité des contrats n° 13124 et 13123 passés entre la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie et la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin née Barre
Attendu que l'article 1110 du Code civil est ainsi libellé :
" L'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance de la chose qui en est l'objet.
Elle n'est point une cause de nullité, lorsqu'elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a l'intention de contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention " ;
Attendu que c'est à juste titre que le premier juge a rappelé que la validité du consentement de l'acheteur doit être appréciée au moment de la formation du contrat ;
Attendu que l'article 1134 du Code civil dispose que " les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur convention mutuelle, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi " ;
Attendu qu'aux termes du bon de commande, la qualité du blé constituait bien un élément essentiel du contrat notamment en ce qui concerne le taux de mycotoxines ;
Attendu que la date de livraison figurant sur le bon de commande est le 1er janvier 2008 et la mention manuscrite " enlèvement option acheteur " n'implique nullement comme l'affirme la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie un choix de date et de délai de livraison au bon vouloir de l'acheteur ;
Attendu que le premier juge a souligné avec raison les problèmes concernant la récolte de blé de 2007 bien connus par les céréaliers de la région et leurs négociants ;
Attendu que les articles techniques sur le taux de mycotoxines relatent l'importance des conditions de stockage du blé sur sa variation ;
Attendu qu'il apparaît que si la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie n'a pas fait procéder à une analyse du taux de mycotoxines lors de la régularisation du bon de commande, cependant elle y a recouru en décembre 2007 et le résultat de 3 920 ne l'a pas empêché de verser des acomptes fort substantiels à ses vendeurs ;
Que si elle affirme avoir demandé certaines diligences dans le cadre de stockage à ses vendeurs, elle n'en rapporte nullement la preuve ;
Attendu que force est de constater également qu'après un rapport de visite du 6 mai 2008 émanant du Centre Gallardonnais d'analyses céréalières concluant à un lot impropre à la consommation, la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie a fait procéder à l'enlèvement de 3 lots de 27 tonnes de blé ;
Attendu que la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie n'a avisé Monsieur Serge Guérin des résultats d'analyses posant problèmes pour la qualité de la marchandise que le 3 juin 2008 jour de l'enlèvement des 27 tonnes de blé et notamment de celui de décembre 2007 ;
Attendu que pour sa part, la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin née Barre produisent une analyse du 16 juillet 2008 faisant état d'un taux de 1990 avec une marge d'erreur en plus ou en moins de 574 ;
Attendu qu'au vu de ces éléments, le premier juge a retenu, à juste titre, que l'acheteur :
- n'apporte pas la preuve que le blé mis à sa disposition à la date prévue de son enlèvement ne présentait pas les qualités spécifiées au contrat,
- que malgré les analyses auxquelles il a fait procéder et qu'il estimait alarmantes,
* il n'en a point avisé ses vendeurs avant de prendre livraison d'une partie de la marchandise et n'a pas fait preuve de diligences pour assurer ou faire assurer de bonnes conditions de stockage ou pour les exiger de ses vendeurs,
* il a pris livraison d'une partie de la marchandise achetée, et qu'ainsi l'erreur alléguée n'était pas démontrée ;
Que le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie en nullité pour vice de consentement sur le fondement de l'article 1110 du Code civil et rejeté la demande en annulation des contrats passés le 24 octobre 2007 suivant bons de commandes n° 13123 et 13124 avec la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin née Barre et de ses demandes accessoires en restitution des sommes versées ;
- Sur la demande de résolution de la vente pour non-conformité
Attendu que l'article 1603 du Code civil dispose que le vendeur " a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend " ;
Que l'article 1604 du Code précité précise que " la délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur " ;
Attendu que comme rappelé précédemment, la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie, est un professionnel en ce domaine du commerce du blé, tout autant que la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin née Barre et était avisée des problèmes affectant la récolte de blé de l'été 2007 ;
Attendu que la première analyse de mycotoxines effectuée en décembre 2007 avec un taux de mycotoxines de 3920 :
- a été suivie quelques jours après de versements substantiels d'acomptes par l'acheteur aux vendeurs,
- son résultant n'a été porté, comme mentionné précédemment, à la connaissance des vendeurs par l'acheteur que le 3 juin 2008, jour même de sa prise de livraison de 3 lots de 27 tonnes de blé dur ;
Attendu que la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie ne démontre pas que le blé dur mis à sa disposition en janvier 2008, date de livraison contractuellement prévue, ne remplissait pas les qualités visées sur les bons de commandes ;
Que l'éventuelle dégradation avec le temps, sous l'effet de l'humidité et de la chaleur entre la date de livraison de janvier 2008 et le mois de juin 2008 trouve son origine dans le délai pris par l'acheteur pour prendre livraison de sa marchandise au-delà de la date contractuellement prévue et ce, sans prendre aucune précaution de son bien et sans en aviser les vendeurs ;
Que dès lors le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie de sa demande en résolution des contrats de vente sur le fondement des articles 1603 et 1604 du Code civil et de ses demandes accessoires en découlant ;
- Sur la demande d'exécution des deux contrats
Attendu que Monsieur Laurent Leprince, expert-comptable de Madame Fabienne Guérin née Barre, et Monsieur André Templier, expert-comptable de la SCEA De Fasserville, ont établi des attestations les 4 et 6 juin 2011 faisant état de la présence d'un stock de blé de 280 tonnes environ dans les inventaires depuis décembre 2007 ;
Que trois constats d'huissier du 3 juin 2011 relatent un stockage de 160 m3 de blé dur sur le site de Villars (28), de 105 m3 sur celui de Sandarville (28) et de 298 m3 sur celui de Viabon (28) ;
Attendu que les demandes de nullité et de résolution des contrats de vente étant rejetées, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a considéré que la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie devait honorer ses obligations consistant en l'enlèvement chez les vendeurs de la marchandise qu'elle lui a achetée et à en régler les soldes soit :
- 6.760 euro à la SCEA De Fasserville,
- 7.974,99 euro à Madame Fabienne Guérin née Barre ;
Que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris comme sollicité par les vendeurs ;
- Sur la demande de remboursement de frais de stockage
Attendu que les parties ont fait preuve de beaucoup de légèreté dans la rédaction des bons de commande ;
Attendu qu'ainsi aucune sanction n'a été prévue en cas de non-respect de la date de livraison impartie ;
Attendu que c'est avec pertinence que la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie fait valoir que ni Madame Fabienne Guérin née Barre ni la SCEA De Fasserville ne lui ont délivré à un moment quelconque une mise en demeure de prendre livraison de la marchandise une fois la date prévue contractuellement passée ;
Attendu que la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin née Barre ne produisent aucun élément justifiant de la gêne apportée du fait du stockage de la marchandise acquise par la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie et ont ainsi fait preuve de beaucoup de légèreté dans leurs rapports contractuels avec leur acheteur dont ils doivent assumer les conséquences ;
Que dès lors, la demande de la SCEA De Fasserville et de Madame Fabienne Guérin née Barre tendant à la réparation du préjudice subi du fait de l'absence d'enlèvement de la marchandise dans les délais stipulés doit être rejetée ;
- Sur l'article 700 du Code de procédure civile
Attendu qu'au regard des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elle a exposés tant en première instance qu'en appel ;
- Sur les dépens
Attendu que la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie supportera les entiers dépens de première instance et d'appel avec pour ceux d'appel faculté de recouvrement direct au profit de la SCP Jullien-Lecharny-Rol-Fertier, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, en dernier ressort, Confirme le jugement du 31 mars 2010 rendu par le tribunal de grande instance de Chartres à l'exception des dispositions relatives aux frais de stockage et aux frais irrépétibles, Réformant le jugement de ces chefs et statuant à nouveau, Déboute la SCEA De Fasserville et Madame Fabienne Guérin née Barre de leurs demandes au titre du préjudice de stockage, Déboute les parties de leurs réclamations sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en première instance, Y ajoutant, Déboute les parties de leurs demandes en cause d'appel en application de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la Société commerciale agricole Max Dupont et Cie aux entiers dépens d'appel avec faculté de recouvrement direct au profit de la SCP Jullien-Lecharny-Rol-Fertier, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.