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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 16 septembre 2011, n° 09-12720

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Affichage CLG (SARL)

Défendeur :

Ecomax (SAS), Prosperi

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jacomet

Conseillers :

M. Schneider, Mme Saint-Schroeder

Avoués :

SCP Menard-Scelle-Millet, Me Teytaud

Avocats :

Mes Bonfils, Wellhoff, Binder

T. com. Paris, du 11 mai 2009

11 mai 2009

Pour deux campagnes d'affichage du 22 au 28 mars et du 26 mars au 1er avril 2004, la société Ecomax, en qualité d'annonceur, représentée par M. Patrick Prosperi, sous le nom de No Limits Communication, agissant comme mandataire, a commandé à la société Affichage CLG, selon deux bons de commande datés du 9 février 2004 portant sur deux réseaux d'affichage - intitulés Volcan et Etoile - composés pour chacun d'entre eux de 100 panneaux de format 400 X 300 ;

Les factures n'ayant pas été payées, la société Affichage CLG a fait assigner la société Ecomax devant le Tribunal de commerce de Paris, lequel, par jugement prononcé le 11 mai 2009, objet du présent appel, l'a déboutée de toutes ses demandes, l'a condamnée à payer 3 000 euro à titre de dommages-intérêts ainsi que 2000 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Le tribunal a retenu, pour écarter la demande en paiement, qu'au regard des dispositions de la loi Sapin relative à l'achat d'espaces publicitaires, la société Affichage CLG disposait d'une action en paiement contre le mandataire, M. Prosperi, et qu'elle ne démontrait ni qu'elle avait effectué des diligences contre celui-ci aux fins d'obtenir paiement, ni que l'échéancier de paiement qu'elle lui avait accordé n'avait pas été respecté et avait entraîné la déchéance du terme ; que de manière générale, les dispositions légales, notamment en ce qui concerne les remises sur le prix, n'ont pas été respectées ;

Ayant relevé appel de la décision, par dernières conclusions signifiées le 9 octobre 2009, la société Affichage CLG demande, au visa des articles 1134 et 1147 du Code civil, ainsi que de la loi 93-122 du 29 janvier 1993 dite loi Sapin :

- l'annulation de la décision prononcée le 11 mai 2009 par le Tribunal de commerce de Paris,

- la condamnation de la société Ecomax à lui payer les factures d'un montant de 7 377,10 euro X 2 avec intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2004,

- 2 500 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Elle fait valoir que l'intimée a soutenu, à tort, par courrier du 6 décembre 2004 en réponse à la lettre de relance du 1er décembre 2004 qu'elle ne pouvait être tenue à paiement dès lors qu'elle n'avait contracté qu'avec la société No Limits Communication ; qu'au soutien de son appel elle est fondée à dire que :

- il ne saurait lui être reproché, comme le fait le tribunal, de ne pas avoir adressé directement au mandant les factures dont le montant a été, du reste, ramené par des remises régulières correspondant à ses conditions générales de vente à 6 329,63 euro HT,

- en l'absence d'une violation quelconque de la loi Sapin, l'intimée n'est pas fondée à rejeter la demande en paiement,

- le mandat donné à M. Prosperi ne le désigne pas comme mandataire - payeur et M. Prosperi a pris, en réalité, l'initiative de dire qu'il était chargé du règlement des factures,

- par lettres des 24 septembre 2004 et 13 octobre 2004 - mais ce fait n'interdit pas aux créanciers de demander le paiement directement à l'annonceur - elle n'a pas commis de faute en établissant les factures au nom du mandataire ;

Par dernières conclusions signifiées le 29 décembre 2009, la société Ecomax demande la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et la condamnation de l'intimée à lui payer 2 500 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Elle expose que l'opération publicitaire à l'occasion de son 10ème anniversaire pendant une dizaine de jours en mars avril 2004 a été conçue par M. Prosperi sous l'enseigne No Limits Communication moyennant un budget hors taxes de 106 000 euro et qu'elle ne saurait supporter le paiement des factures compte tenu de l'existence d'un tel contrat, dont le prix comprenait le coût de la campagne d'affichage et alors surtout que les bons de commande ont été signés par M. Prosperi, désigné par son enseigne, et qu'il est précisé que les paiements seraient effectués par le mandataire ;

Elle ajoute que jusqu'à la lettre du 1er décembre 2004, ce paiement ne lui a jamais été réclamé directement ;

En ce qui concerne les dispositions de la loi dite Sapin, article 20, elle fait valoir que plusieurs d'entre elles n'ont pas été respectées en ce qui concerne le contrôle des réductions accordées au mandataire lesquelles auraient dû faire l'objet d'une notification au mandant si bien que cette violation de la loi interdit de toute façon à la société Affichage CLG de s'en prévaloir pour solliciter un paiement direct contre elle ; qu' elle ne démontre pas, par ailleurs, que M. Prosperi ne lui a pas réglé le montant des factures et qu'elle n'est donc pas fondée en son assignation dès lors qu'elle ne démontre pas la défaillance de M. Prosperi ;

Par acte d'huissier délivré le 14 avril 2011, la société Ecomax a dénoncé l'ensemble de la procédure à M. Prosperi selon un acte de signification délivré selon les modalités de l'article 656 du Code de procédure civile aux fins d'obtenir, en cas d'infirmation de la décision, sa garantie ;

M. Prosperi, ainsi assigné en appel provoqué, n'a pas constitué avoué ;

SUR CE

Considérant que l'intimée verse aux débats le bon de commande qu'elle a souscrit le 17 janvier 2004 auprès de la société No Limits Communication, représentée par M. Patrick Prosperi pour la période comprise entre le 31 mars et le 10 avril 2004 d'un montant fixé à 115 010 euro payable en deux fois, 60 000 euro le 22 janvier 2004 et 55 010 euro le 10 avril 2004 ;

Considérant qu'une première facture portant le numéro 1303, établie par la société No Limits Communication, datée du 19 janvier 2004, pour le montant global acquitté ci-dessus, décrit la prestation dans les termes suivants :

- date et lieu,

- description générale du plan média et marketing : affichage 4 X 3 / presse / radio / PLV déco / animation/jeux ;

Considérant qu'une deuxième facture numéro 1306 datée du 22 avril 2004 pour un montant global de 12 650 euro fait état d'un coût d'impression de 110 affiches de 4 M2 d'un montant de 9 500 euro, d'impression d'autres modèles affiche pour 1 000 euro et d'un budget d'animation pour 2 150 euro soit au total 13 725,25 euro ;

Considérant que la société Ecomax verse aux débats une pièce n° 5 faisant état d'une transaction en faveur de la société No Limits Communication de 60 000 euro (le 28 janvier 2004),d'une pièce n° 7 faisant état d'un virement pour le même bénéficiaire de 48 735,25 euro le 18 mai 2004, et d'une pièce n° 6 sous forme d'un chèque libellé au nom de la société No Limits Communication d'un montant de 20 000 euro du 2 avril 2004 ;

Considérant que ces paiements établissent que la rémunération globale du mandataire, M. Prosperi, lui a été versée, cette rémunération étant composée, de fait, du prix de son travail et des frais d'affichage à titre de remboursement ;

Considérant que l'examen des documents produits ne permet pas de relever que la société d'affichage avait été informée d'une façon ou d'une autre du nom de la personne chargée du paiement des factures qu'elle avait délivrées ;

Considérant que les deux bons de commande du 9 février 2004 sur lesquels figure le nom de l'annonceur et celui du mandataire ne précisent pas ce point et que par lettre du 26 mars 2004 adressée à la société Ecomax, la société Affichage CLG ne procède à aucune affirmation puisqu'elle indique :

"Nous vous prions de bien vouloir trouver ci-joint les deux factures en référence établies au nom de votre mandataire, M Prosperi,

La campagne d'affichage a été effectuée suivant les conditions convenues avec votre mandataire.

Nous vous remercions de bien vouloir me préciser qui est chargé d'assurer le règlement de ces factures (...)" ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'aucun élément de fait ou de droit ne permet de retenir que le mandant, en l'absence de toute faute de sa part, se soit engagé directement à s'acquitter des factures alors qu'il n'a jamais été convenu entre les parties que le mandant dans ses relations avec la société Affichage CLG était débiteur du prix ;

Considérant qu'il n'est pas démontré, en outre, que les dispositions de la loi 93-122 du 29 janvier 1993 aient été méconnues et que les parties aient commis une faute telle que le mandant, de ce fait, doive payer lesdites factures ou des dommages-intérêts d'un montant équivalent ; en l'absence de dissimulations du prix facturé et alors que, conformément au dernier alinéa de l'article 20, les factures lui ont bien été communiquées même si les achats d'espaces n'ont pas été effectués par lui ;

Considérant que par sa lettre du 24 septembre 2004 adressée à la société Affichage CLG, M. Prosperi exprime ses regrets pour n'avoir pas payé les deux factures dont on lui demande paiement en exposant qu'il a mal apprécié le coût du contrat passé avec la société Ecomax, qu'à l'égard de cette entreprise, il a dû respecter le cahier des charges et qu'il demande, en conséquence, des délais ; qu'il ne conteste pas ainsi le fait qu'il ait accepté l'ensemble de la prestation pour le prix fixé, et qu'il ne se considère pas comme créancier de l'annonceur dont il est le prestataire ;

Considérant qu'il s'ensuit que la société Affichage CLG ne rapporte pas la preuve que l'intimée soit tenue au paiement des deux factures réclamées alors qu'en l'absence de solidarité entre le mandant et le mandataire, ce co-contractant ne se prévalait d'aucun autre mandat ;

Considérant que, dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de la société Affichage CLG et condamné celle-ci à payer 3 000 euro de dommages-intérêts pour procédure abusive compte tenu du fait qu'elle a engagé une action mal fondée alors qu'elle ne pouvait pas se méprendre sur son issue ;

Considérant que pour des raisons d'équité, il convient de condamner la société Affichage CLG à payer à la société Ecomax une somme de 2 500 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs : Confirme le jugement ; Rejette toutes autres demandes ; Condamne la société Affichage CLG à payer à la société Ecomax une somme de 2 500 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ; La condamne aux dépens. Dit qu'il pourra être fait application de l'article 699 du Code de procédure civile.