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Décisions

CA Paris, 25e ch. B, 20 novembre 2009, n° 06-18824

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Cema (SAS)

Défendeur :

Unilever France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jacomet

Conseillers :

MM. Laurent-Atthalin, Schneider

Avoués :

SCP Taze-Bernard-Belfayol-Broquet, SCP Arnaudy-Baechlin

Avocats :

Mes de Brosses, Antoine-Lalance

T. com. Paris, 15e ch., du 29 sept. 2006

29 septembre 2006

L'objet du litige porte principalement sur la demande de la SA Unilever France, dirigée contre la SAS Cema, pour publicité trompeuse et agissements parasitaires, effectués à compter de septembre 2004 dont sont résultés d'importants préjudices d'image du fait de l'entrave apportée au développement des margarines qu'elle commercialisait sous le nom de Proactiv lesquelles étaient enrichies de stéréols/stanols, qui seuls auraient un effet scientifiquement démontré de réduction du cholestérol alimentaire.

La SAS Unilever France, qui a notamment pour activité la fabrication et la commercialisation de corps gras alimentaires d'origine végétale, exploite depuis la fin des années 1960 à cet effet divers produits de la marque Fruit d'or et depuis 1972 une margarine, a lancé en septembre 2000 une nouvelle margarine Fruit d'or Pro Activ, enrichie en esters de stérol végétal dont elle soutient qu'elle réduit significativement le cholestérol dans le cadre d'un régime adapté et qui existe désormais sous trois formes : Pro Activ, Pro Activ Cuisson et Tartine, Pro Activ Tartine demi-sel, chaque conditionnement portant la mention "réduit le cholestérol". Elle a obtenu, par application du Règlement européen 258-97 du 27.01.1997 relatif aux nouveaux aliments et aux nouveaux ingrédients alimentaires, suivant décision de la Commission européenne, le 24.07.2000, l'autorisation de la mise sur le marché de matières grasses à tartiner enrichies de stéréols végétaux puis, le 31.03.2004 sur le marché, de type lait et de produits de type yaourt enrichis de stéréols.

La SAS Cema exploite depuis 1988 sous la marque Primevere différentes huiles et margarines. Elle a été autorisée par la Commission de contrôle de publicité dont elle a obtenu le visa, le 18.08.1988, pour une durée d'un an, à faire figurer sur les barquettes de Primevere Margarine à tartiner la mention "pour le régime en cas d'excès de cholestérol" en remplacement de la mention initiale "utile en cas d'excès de cholestérol", cette autorisation ayant été également donnée pour une diffusion PLV, pour le même produit, le 22.02.1990, pour deux ans ; elle a également obtenu, le 09.01.1992, le visa pour deux ans, pour le produit Primevère Margarine pour l'annonce presse d'un texte comportant les mentions "avec les régimes proposés dans l'excès de cholestérol (...) s'associe aux régimes proposés dans l'excès de cholestérol"

Par une ordonnance de référé du 22.03.2002, le président du Tribunal de commerce de Paris a interdit à la SAS Cema de poursuivre la diffusion du film portant sur le produit Primevère en retenant que la vue de ce film conduit un auditeur d'attention moyenne à penser que ce produit est une solution au problème de l'excès de cholestérol.

Par arrêt du 26.06.2002, la Cour d'appel de Versailles, sur une action entreprise par la SAS Cema, a condamné la SAS Unilever France à mettre sur les emballages des produits Pro Activ les différentes mises en garde à l'intention des femmes enceintes, des enfants et des personnes sous traitement hypocholestéroléniantes.

Par jugement définitif du 20.09.2002, le Tribunal de commerce de Paris a condamné la SAS Cema à payer diverses indemnités à SA Unilever Bestfoods, aux droits de laquelle se trouve la SAS Unilever France, et prononcé des interdictions et mesures de publication pour avoir eu recours à une publicité sur des produits diététiques Primevère susceptibles d'induire en erreur le consommateur et ainsi avoir commis des actes de concurrence déloyale envers cette dernière qui exploite des produits hypocholestéroléniants.

En 2004, la SAS Cema commercialise trois margarines Primevère Double Effet en la déclinant comme Tartine, Spéciale Cuisson et Touche de Sel, associant sur le conditionnement un cœur rouge, le terme Double Effet, la référence cardio-vasculaire et cholestérol avec une flèche en bas, et à une formule oméga 6 et 9 présentée comme contribuant à réduire le cholestérol et à une mention "efficacité testée cliniquement : la consommation Primevère tartine (16 g), cuisson (10 g) pendant 5 semaines dans le cadre d'une alimentation habituelle entraîne une baisse du cholestérol LDL avec une différence de 7 % par rapport à celle d'un corps gras riche en acides gras saturés - formulé avec l'Institut Pasteur de Lille".

A partir du 08.11.2004, la SAS Cema diffusait des messages publicitaires sur les chaînes télévisées constitués d'un dialogue entre un homme et une femme où après que, sur un question du premier, cette dernière a indiqué qu'elle prenait Primevère Double Effet tandis que lui l'ayant interrogé "c'est pour le cholestérol", elle répond "pas seulement, regarde", l'autre d'un petit film, explicitant l'action du produit Primevère Double Effet et qui insiste sur la présence d'oméga 3 et 6, l'action contribuant à réduire le cholestérol, et participant au bon fonctionnement cardio-vasculaire, cette double action étant illustrée par des flèches vertes, inclinées vers le bas, et étant présentée comme certifiée par l'Institut Pasteur de Lille.

Cette campagne était prolongée par une promotion du produit dans les magasins et cabinets médicaux, et sur Internet.

Après avoir saisi le juge des référés qui par ordonnance du 22.11.2004 a dit n'y avoir lieu à référé, la question relevant du juge du fond, la SAS Unilever France a saisi ce dernier, par assignation du 14.03.2005, à l'origine du jugement déféré.

La marque Primevère, déposée le 17.12.2004, pour différents produits dont la margarine des classes 5, 29, 30, 32 à l'INPI a fait l'objet d'un certificat d'enregistrement du 27.05.2005.

A la demande de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments-ASSFFA émettait, le 15.10.2005, l'avis que l'étude clinique dont se prévalait la SAS Cema n'était pas pertinente et que "par conséquent, l'utilisation des allégations "formule aux Oméga 6 et 9 contribue à réduire le cholestérol comparativement à une formule riches en acides gras saturés" et "la consommation du produit A et du produit C pendant 5 semaines dans le cadre d'une alimentation habituelle entraîne une baisse du cholestérol LDL avec une différence de 7 % par rapport à celle d'un corps gras riche en acides gras naturels" pour la promotion des 3 matières grasses n'est pas fondée".

En 2006, est commercialisé sur le marché aux mêmes conditions un fromage et développée sur le même thème une campagne télévisée.

Le tribunal a statué ainsi qu'il suit :

- donne acte de l'intervention volontaire de la SAS Cema aux droits de la société Cema,

- prend acte du désistement d'instance et d'action de la SAS Saint Hubert,

- dit que la SAS Cema a commercialisé depuis octobre 2004 ses différentes margarines Primevère Double Effet et un fromage depuis 2006 sous des présentations et au moyen d'allégations mensongères, à tout le moins, de nature à induire en erreur le consommateur,

- fait interdiction à la SAS Cema de poursuivre toute présentation mensongère sous astreinte provisoire de 1 000 euro par infraction constatée passé le délai de 30 jours après la signification du jugement,

- condamne la SAS Cema à payer à la SA Unilever France la somme de 7 000 000 euro à titre de dommages et intérêts pour publicité mensongère et celle de 10 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonne l'exécution provisoire nonobstant appel et sans constitution de garantie en ce qui concerne les mesures d'interdiction,

- déboute la SAS Cema de ses demandes reconventionnelles,

- déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamne la SAS Cema aux dépens.

Postérieurement au jugement, la SAS Cema a poursuivi la commercialisation des produits litigieux en supprimant d'abord la référence à l'étude clinique et en remplaçant l'expression "formule aux Oméga 6 et 9 qui contribue à réduire le cholestérol comparativement à une formule riche en acide gras saturés" par l'expression "formule aux Oméga 6 et 9 recommandée dans le cadre d'une alimentation visant à limiter l'excès de cholestérol" avant de lancer une nouvelle référence de gamme Primevère Double Effet tandis qu'elle revendique sur son site Internet la réduction du taux de cholestérol à partir des produits Primevère aux Oméga 3, 6, 9.

Sont produits, notamment, aux débats d'autres études :

- l'avis du groupe scientifique sur les produits diététiques, la nutrition, les allergies (EFSA) du 06.07.2005, selon lequel "la substitution des acides gras saturés dans le régime alimentaire par un égal montant d'acides gras insaturés (les deux mono et poly insaturés) diminue le cholestérol LDL",

- l'avis de l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des aliments (AFSSA) du 14.10.2005 concluant au caractère non fondé de l'allégation selon laquelle une formule aux Oméga 6 et 9 contribue à réduire le cholestérol par rapport à une formule riche en acides gras saturés selon un effet chiffré,

- l'avis de l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des aliments (AFSSA) du 15.05.2007 relativement aux produits Primevère selon lequel "le remplacement dans l'alimentation de matières grasses riches en AGS (acides gras saturés) par des Agami (acides gras mono-insaturés) et des AGPI (acides gras poly-insaturés ) sans recours à un enrichissement en stérols/stanols végétaux contribue à réduire le cholestérol Ldl chez les sujets hyper cholestérolémiques",

- l'avis de l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des aliments (AFSSA) du 20.03.2008 qui confirme à propos d'un autre produit l'avis précédent.

Par ailleurs, en novembre 2005, la SAS Unilever France avait entrepris une campagne publicitaire relative à l'accord de partenariat conclu avec la MAAF aux termes duquel cette dernière offrait une réduction de la cotisation de l'assurance complémentaire santé sur justification de l'acquisition de produits de la gamme Pro Activ.

La SAS Cema, appelante au principal, intimée incidemment, demande à la cour de :

- infirmer le jugement,

- débouter la SA Unilever France de toutes ses demandes,

- dire que la SA Unilever France s'est rendue coupable de publicité illicite et la condamner à lui payer une somme de 1 000 000 euro sauf à parfaire en réparation de son préjudice,

- interdire à la SAS Unilever France de faire référence à un partenariat avec la MAAF dans la présentation de ses produits et tous autres supports et documents sous astreinte de 100 euro par produit à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir par extraits dans les journaux Le Monde, Les Echos, LSA, Le Quotidien du Médecin, Impact Médecin, Prescrire, aux frais avancés par la SAS Unilever France sans que cette insertion dépasse la somme de 30 000 euro,

- condamner la SAS Unilever France à rembourser les sommes reçues en exécution du jugement avec intérêts au taux légal à compter de la date de leur versement,

- condamner la SAS Unilever France à lui payer la somme de 10 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à régler les dépens.

La SAS Unilever France, par dernières conclusions du 15.01.2009, intimée au principal, appelante incidemment, demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a partiellement fait droit à ses demandes et rejeté la demande reconventionnelle de la SAS Cema,

- l'infirmant pour le surplus et y ajoutant,

- dire que la SAS Cema a commercialisé depuis octobre 2004 et jusqu'à aujourd'hui, en dépit de modifications légères alléguées, ses diverses margarines Primevère Double Effet sous une présentation d'ensemble et au moyen d'allégations mensongères à tout le moins de nature à induire en erreur,

- dire que la SAS Cema a diffusé un film publicitaire le Double Effet et différentes variantes depuis 2004 comportant des allégations et présentations mensongères à tout le moins de nature à induire en erreur,

- dire que la SAS Cema a diffusé en janvier 2006 et depuis lors un film publicitaire qui comporte une présentation de nature à induire en erreur le consommateur,

- dire que la SAS Cema a diffusé des parutions presse, posters, brochures et dépliants comportant des allégations mensongères à tout le moins de nature à induire en erreur,

- faire interdiction à la SAS Cema de poursuivre la commercialisation de ses produits Primevère y compris son fromage sous la présentation litigieuse et plus généralement sous toute présentation qui rappelle la présentation interdite à compter du prononcé de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euro par unité de produit vendue et par jour de retard,

- faire interdiction à la SAS Cema de poursuivre la commercialisation des conditionnements objets du constat d'huissier du 02.05.2006 sous astreinte de 100 euro par unité de produit vendue par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir,

- faire interdiction à la SAS Cema de poursuivre la diffusion de son film publicitaire Le Double Effet quel que soit le format et la variante et de son film diffusé depuis janvier 2006 sous astreinte de 15 000 euro par spot diffusé à compter du prononcé de la décision à intervenir et par jour de retard,

- faire interdiction à la SAS Cema de poursuivre la diffusion de ses parutions presse, posters, brochures et dépliants Primevère Double Effet comportant des allégations et présentations mensongères sous astreinte de 1 000 euro par exemplaire diffusé à compter du prononcé de la décision à intervenir et par jour de retard,

- faire interdiction à la SAS Cema de poursuivre ou d'adopter toute présentation qui pourrait rappeler les conditionnements et publicités interdites sous astreinte de 500 euro par infraction constatée à compter de la décision à intervenir,

- condamner la SAS Cema à lui payer la somme de 30 500 000 euro à titre de dommages et intérêts toutes causes confondues,

- ordonner à titre de complément de dommages et intérêts la publication du jugement à intervenir en entier ou par extraits dans le Monde, les Echos, LSA, le Figaro, le Quotidien du Médecin, Impact Médecin, aux frais avancés de la SAS Cema d'un montant de 150 000 euro HT pour l'ensemble des publications selon un texte précisé dans les présentes écritures,

- débouter la SAS Cema de toutes ses demandes contraires en ce compris sa demande de restitution avec intérêts légaux à compter du versement, l'éventuelle créance de restitution ne pouvant naître que de l'arrêt à intervenir,

- condamner la SAS Cema à lui payer la somme de 60 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à régler les entiers dépens qui comprendront les frais de constats des 23 décembre 2005, 16 et 18 janvier 2006, 2 mai 2006, 13 octobre 2006, 6 décembre 2006, et 20 mars 2007.

Sur ce

Considérant, pour critiquer le jugement sur les condamnations prononcées, que la SAS Cema prétend que le reproche qui lui est fait tient désormais à une publicité trompeuse à raison pour les margarines Primevère commercialisées à compter de septembre 2004, d'un effet réducteur du cholestérol lié à la composition même de ces margarines à partir d'une formule aux Oméga 3 et 6 tandis qu'il s'évince des écritures de la SA Unilever France, d'une part, qu'elle n'articule, de fait, que sur l'allégation de réduction du cholestérol en visant, avant le jugement, les faits suivants :

- message sur le conditionnement en septembre 2004, réduction du cholestérol avec baisse de 7 % par rapport à une formule riche en acides gras saturés, et la référence de l'Institut Pasteur de Lille,

- un film publicitaire diffusé à partir du 08.11.2004 étayant cette allégation d'une contribution à la réduction du cholestérol et reprenant la certification de l'Institut Pasteur de Lille ayant connu une première version en 2005 revendiquant une contribution à la réduction du cholestérol, avec effet chiffré, disparu dans celle de 2006 au profit d'une action des omégas 6 et 9 pour le cholestérol,

- un dépliant publicitaire, dans le même temps, comportant cette même allégation et certification,

- un site Internet vantant les mêmes produits Primevère Double Effet,

- un numéro vert "cholestérol info" d'appel pour les consommateurs ;

Considérant que postérieurement à ce jugement, diverses modifications sont intervenues et qu'il importe de relever :

- sur les conditionnements, la suppression de toute référence à une étude clinique, la substitution d'une recommandation d'utilisation du produit dans le cadre d'une alimentation visant à limiter l'effet du cholestérol à l'allégation d'un effet de réduction du cholestérol,

- l'ajout sur son site Internet d'une action sur la santé par la réduction du cholestérol,

- la reprise sur les dépliants des mentions figurant sur les conditionnements,

- la commercialisation d'un fromage pauvre en cholestérol par une filiale luxembourgeoise avec la certification de l'Institut Pasteur de Lille ;

Considérant qu'il n'est pas utilement contredit que le fromage n'a pas été commercialisé par la SAS Cema, que la nouvelle référence commercialisée ne comporte aucune revendication d'une réduction du cholestérol, ni allégations en elles-mêmes inexactes en sorte que, quant à ces produits, le grief de publicité trompeuse n'est pas caractérisé tandis que pour les autres, ce grief consiste en une revendication d'une telle action avec effet chiffré, certifiée par l'Institut Pasteur de Lille, sur les seuls conditionnements de 2004 et les dépliants s'y rapportant ;

Considérant que la SAS Unilever France fonde sa demande sur divers textes ; qu'elle invoque, notamment ;

- les dispositions de l'article 121-1 du Code de la consommation et celles de l'article 1382 du Code civil,

- la directive du 11.05.2005 relative aux pratiques commerciales déloyales entre entreprises sur le marché intérieur,

- la directive du 12.12.2006 relative à la publicité trompeuse et comparative,

- l'article 10 bis de la convention d'Union de Paris relative à la protection effective contre la concurrence déloyale,

- l'article 21 du Code international des pratiques loyales en matière de publicité lequel est édité par la chambre de commerce internationale ;

Considérant que l'article L. 121-1 du Code de la consommation interdit toute publicité sous quelque forme que ce soit, allégations, présentations, indications fausses ou de nature à induire en erreur le consommateur tandis que par application des articles 1382 et suivants, tout fait fautif engage la responsabilité quasi-délictuelle de son auteur ;

Considérant qu'au sens de la directive du 11.05.2005, est déloyale toute pratique contraire aux exigences de la diligence professionnelle ou trompeuse ou consistant à affirmer faussement qu'un produit est de nature à guérir des maladies, des dysfonctionnements ou des malformations ;

Considérant que la directive du 12.12.2006 définit la publicité trompeuse comme toute publicité qui, d'une manière quelconque, y compris sa présentation, induit en erreur ou est susceptible d'induire en erreur les personnes auxquelles elle s'adresse ou qu'elle touche et qui, en raison de son caractère trompeur, est susceptible d'affecter leur comportement économique ou qui, pour ces raisons, porte préjudice ou est susceptible de porter préjudice à un concurrent ;

Considérant que selon l'article 10 de la convention d'Union de Paris, constitue un acte de concurrence déloyale tout acte de concurrence contraire aux usages honnêtes en matière industrielle et commerciale et que notamment doivent être interdits : les indications ou allégations dont l'usage dans l'exercice du commerce, est susceptible d'induire le public en erreur sur la nature, le mode de fabrication, les caractéristiques, l'aptitude à l'emploi ou la qualité des marchandises ;

Considérant que l'article 21 du Code international des pratiques loyales en matière de publicité dispose que "toutes descriptions, assertions ou illustrations relatives à des faits vérifiables doivent pouvoir être justifiées. Les annonceurs doivent avoir de pareilles justifications à leur disposition de façon à pouvoir sans délai produire des preuves à l'organisme d'auto-contrôle responsable de l'application du Code" ;

Considérant qu'il importe de relever que tous ces textes vont dans le même sens et que leurs dispositions sont concordantes, que si les directives n'ont été transposées que par la loi du 03.01.2008 en sorte que leurs dispositions ne s'imposent dans les termes de cette loi qu'à compter de l'entrée en vigueur de cette loi, soit le 04.01.2008, d'où il suit que le manquement étant caractérisé par sa divulgation tant qu'elle se poursuit, ces directives et cette loi ne concernent que partie des faits reprochés, il n'en reste pas moins que le juge national doit s'inspirer des principes de ces directives avant même qu'elles soient transposées ;

Considérant qu'au regard de ces textes que la publicité dite trompeuse s'analyse en tout message quelqu'en soit le support, la bonne foi de son auteur étant indifférente, de nature à induire en erreur une personne physique ou morale, fut-elle professionnelle, d'une attention et diligence moyenne, portant notamment sur les caractéristiques du produit et ses effets tels qu'on peut raisonnablement les attendre d'une utilisation normale ; que la publicité produisant ses effets à l'instant où elle est divulguée, la législation et les textes applicables sont ceux en vigueur à cette date tandis que si le message doit être apprécié à la date à laquelle il a été émis, la diffusion d'informations postérieures étant sans effet sur la réalité du message, qu'il s'ensuit que lorsque le caractère exact ou mensonger dépend de l'état de la science ou de la technique, c'est à la date à laquelle a été divulgué le message que doit être apprécié cet état et s'il peut s'en déduire une certitude suffisante excluant toute controverse au moment de la divulgation du message sur les mentions publicitaires reprochées ;

Considérant que sont sans incidence sur le caractère exact ou mensonger les visas et autorisations données sur une publicité donnée par la Commission de contrôle de publicité alors même que ces visas et autorisations sont limités à un support déterminé et à une durée précisée et ont corrigé le message objet de ces demandes d'avis et d'autorisations dès lors, d'une part, que ces visas et autorisations préalables n'ont pas la valeur d'une décision comportant, en l'espèce, appréciation argumentée, des données techniques et scientifiques, mais d'un simple avis, d'autre part, que la saisine préalable de cette commission et le respect des conditions et limites assortissant ces visas et autorisations sont seulement de nature à établir l'éventuelle bonne foi de son auteur, de troisième part, que cette bonne foi est, comme il a été dit, indifférente au manquement reproché et donc insusceptible de le justifier ou de caractériser son inexistence ;

Considérant qu'eu égard à ce qui a été précédemment indiqué, il échet d'examiner les manquements allégués à la date de la divulgation des différents messages relativement aux données à cette date de la science et de la technique ;

Considérant que se rattachent au même grief les messages suivants :

- message sur le conditionnement en septembre 2004 : réduction du cholestérol avec baisse de 7 % par rapport à une formule riche en acides gras saturés et la référence de l'institut Pasteur de Lille,

- un film publicitaire diffusé à partir du 08.11.2004 étayant cette allégation d'une contribution à la réduction du cholestérol et reprenant la certification de l'Institut Pasteur de Lille ayant connu une version en 2005 revendiquant une contribution à la réduction du cholestérol avec effet chiffré qui avait disparu dans celle de 2006 au profit d'une action des Oméga 6 et 9 pour le cholestérol,

- un dépliant publicitaire, dans le même temps, comportant cette même allégation et certification,

- un site Internet vantant les mêmes produits Primevère Double Effet,

- un numéro vert "cholestérol info" d'appel pour les consommateurs,

d'une part, car les quatre derniers ont manifestement pour objet de soutenir à raison tant de leur date que de leur contenu réel ou supposé le lancement de la gamme des produits Primevère à partir de 2004, d'autre part, parce que les divers reproches s'analysent en un seul et même grief consistant dans l'affirmation que le produit avec sa composition aux Oméga 3 et 6, certifié par l'Institut Pasteur de Lille, contribuait à réduire le taux de cholestérol selon un effet chiffré testé cliniquement ;

Considérant que, au vu des pièces produites, les messages, objets de ce grief, ont été divulgués à partir de septembre 2004, par l'offre en magasin soutenue par la distribution concomitante de dépliants, la mise en œuvre d'un site Internet et d'un numéro vert et la diffusion d'un film en novembre 2004 tandis que cette divulgation a cessé en novembre 2005 par l'offre d'un nouveau conditionnement ;

Considérant que, ainsi qu'il a été dit, le message sur le conditionnement soulignait le double effet pour trois margarines Primevère Double Effet déclinées comme Tartine, Spéciale Cuisson et Touche de Sel par une présentation graphique, utilisant l'opposition des couleurs verte (cardio-vasculaire) et rouge (cholestérol) et un encadrement suggérant la tendance à la baisse, associée à diverses expressions évoquant une "formule Oméga 6 et 9" présentée comme contribuant à réduire le cholestérol, et à une mention "efficacité testée cliniquement : la consommation Primevère tartine (16 g), cuisson (10 g) pendant 5 semaines dans le cadre d'une alimentation habituelle entraîne une baisse du cholestérol LDL avec une différence de 7 % par rapport à celle d'un corps gras riche en acides gras saturés formulé avec l'Institut Pasteur de Lille" ;

Considérant que le film publicitaire diffusait des messages publicitaires sur les chaînes télévisées constitués d'un dialogue entre un homme et une femme où après que, sur un question du premier, cette dernière a indiqué qu'elle prenait Primevère Double Effet tandis que lui l'ayant interrogé "c'est pour le cholestérol", elle répond "pas seulement, regarde", et d'un petit film explicitant l'action du produit Primevère Double Effet et qui insiste sur la présence d'oméga 3 et 6, l'action contribuant à réduire le cholestérol et participant au bon fonctionnement cardio-vasculaire, cette double action étant illustrée par des flèches vertes, inclinées vers le bas, et étant présentée comme certifiée par l'Institut Pasteur de Lille ;

Considérant qu'il se dégage de ces messages une impression d'ensemble que peut éprouver un consommateur de diligence et d'attention moyenne, s'agissant au demeurant de l'achat répété d'une denrée de faible durée de conservation pour un prix réduit, de ce que par l'utilisation de ce produit constitué d'une formule aux Oméga 6 et 9 testée cliniquement, il est susceptible d'obtenir au terme d'une durée de 5 semaines un effet chiffré de baisse du taux cholestérol de 7 % par rapport à celle d'un corps gras riche en acides gras saturés ;

Considérant qu'au regard de ce qui vient d'être dit et de la finalité recherchée par la SAS Cema, l'aspect formel et apparent du conditionnement, la similitude alléguée avec celui antérieur de la gamme Pro Activ par l'emploi des mêmes couleurs, la représentation d'un cœur et le recours à des encadrements en forme pointue vers le bas pour exprimer une baisse est sans incidence dès lors, d'une part, que le grief ne porte que sur l'allégation de la baisse du cholestérol et non de l'effet cardio-vasculaire, d'autre part, que le graphisme et les mentions sont en l'espèce indissociables sauf à admettre la prééminence des mentions même chez un consommateur de diligence et d'attention moyenne s'agissant, essentiellement, d'emporter une adhésion intellectuelle au sens et à la portée des mentions ;

Considérant que la publicité trompeuse s'appréciant au regard de l'impression d'ensemble des messages se rapportant à un même produit, il est manifeste que les différents supports tendaient à la même fin et que, nécessairement, les dépliants, le site Internet qui se rapportait au produit Primevère Double Effet évoquant la présence de diététiciennes pouvant répondre aux questions sur le cholestérol et mentionnant un numéro vert "cholestérol info", ce dernier ne faisait que relayer, ce qui n'est pas utilement contredit, les messages figurant sur le conditionnent et dans le film précité ;

Considérant que, relativement aux données scientifiques et techniques connues lors de la divulgation du produit en septembre 2004 et pendant toute la période durant laquelle l'offre de ce produit a été faite avec cette publicité, il est versé aux débats :

- une attestation de l'Institut Pasteur de Lille certifiant avoir "réalisé en toute indépendance et dans le respect de la réglementation une étude du 03.03.2003 au 31.03.2004 sur 121 patients âgés de 48,5 ans et ayant un cholestérol LDL supérieur à 1,60 G/L, l'étude ayant conclu que chez les personnes en excès de cholestérol, "la consommation de petites quantités de margarines Primevère, comparativement à celle en matières grasses riches en acides gras saturés, sans changement d'alimentation, celle-ci restant riche en lipides, a entraîné une baisse du cholestérol LDL dans le groupe Primevère et une élévation dans l'autre groupe, avec une différence d'évolution de 7 % entre les deux groupes, statistiquement significative (p<0,005). Les mentions reprises au niveau des emballages des margarines Primevère (Cuisson et Tartine) et dans le film publicitaire relatif à ces produits (novembre 2004) reposent sur les éléments de l'étude précitée",

- un rapport de l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (AFFSAPS) édité en mars 2005 actualisant ses précédentes recommandations relatives à la prise en charge thérapeutique du patent dyslipidémique en préconisant des modifications du régime alimentaire par différentes catégories de mesures pouvant éviter une prise en charge médicamenteuse ou une prise en charge thérapeutique plus lourde ;

- la limitation de l'apport d'acides gras saturés au profit d'd'acides gras mono ou poly-insaturés,

- une augmentation de la consommation en acides gras poly-insaturés Oméga 3 (poissons),

- une augmentation de la consommation de fibres et de micro nutriments naturellement présents dans les fruits, légumes et produits céréaliers,

- une limitation du cholestérol alimentaire,

- l'utilisation d'aliments enrichis en stéréols végétaux,

- un avis adopté le 06.07.2005 du groupe scientifique sur les produits diététiques, la nutrition et les allergies (EFSA) à la suite d'une demande de la Commission européenne tendant à examiner le bien-fondé de diverses allégations concernant les allégations nutritionnelles portant sur les acides gras Oméga 3 et sur les graisses mono-insaturées, poly-insaturées et insaturées et à formuler des recommandations quant à leur mention à l'annexe du règlement concernant les allégations nutritionnelles et de santé sur les denrées alimentaires proposé par la Commission en juillet 2003 et concluant notamment sur les deux allégations suivantes "riches en graisse mono-insaturées", d'une part, et, d'autre part, "poly-insaturées", une allégation selon laquelle une denrée alimentaire est riche en de telles graisses ou toute allégation susceptible d'avoir le même sens pour le consommateur ne peut être faite que si le produit contient au moins 45 % d'acides gras dérivés de graisses mono-insaturées ou poly-insaturées et si l'énergie produite par les graisses saturées ne dépasse pas 10 % :

- concernant les graisses mono-insaturées (AGMI) : elles ne sont pas essentielles du point de vue nutritionnel car elles peuvent être synthétisées à partir d'autres acides gras (saturés) et de glucides. La substitution d'acides gras saturés (AGS) dans l'alimentation par une quantité égale d'AGMI réduit le taux de LDL cholestérol (hypoprotéines de faible densité ; un lien de cause à effet à été établi entre un taux plasmatique élevé de LDL-cholestérol et les maladies cardiaques coronariennes (...) la consommation d'APGMI joue un rôle important pour limiter la consommation d'AGS),

- concernant les graisses poly-insaturées (AGPI) : elles peuvent appartenir à la famille n-3 (AAL et AGPI-LC n-3 ...) mais aussi à la famille n-6 (principalement l'acide linoléique. L'acide linoléique est essentiel du point de vue nutritionnel (...) en plus des données recueillies sur l'effet cardio protecteur des AGPI - LC n-3 et de la nécessité des apports nutritionnels d'AAL et d'acide linoléique, la substitution des AGS de l'alimentation par une quantité égale d'AGPI réduit le taux de LDL-cholestérol. Par conséquent, la consommation d'AGPI joue un rôle nutritionnel important pour limiter l'apport d'AGS,

- un avis de l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (AFSSA) du 14.10.2005 saisie par la DGCCRF sur l'allégation "formule aux Oméga 6 et 9 qui contribue à réduire le cholestérol comparativement à une formule riche en acides gras saturés" qui a observé que les revendications alléguées étaient en outre "la consommation du produit A et du produit C pendant 5 semaines dans le cadre d'une alimentation habituelle entraîne une baisse de cholestérol LDL avec une différence de 7 % par rapport à celle d'un corps gras riche en acides gras saturés, aux termes duquel chacune des trois matières grasses, en fonction de la cible visée peut présenter un intérêt nutritionnel en terme d'amélioration des niveaux d'apports en acide gras mono - et poly-insaturés, toutefois, les données de l'étude clinique ne permettent pas d'étayer une réduction cliniquement pertinente du cholestérol LDL suite à la consommation de ces trois matières grasses ; par conséquent, les deux allégations revendiquées ne sont pas fondées ; enfin, en ce qui concerne les interrogations relatives aux liens existant entre le niveau des différents types d'acides gras saturés Oméga 6 et Oméga 9, d'une part, et la cholestéorolémie, d'autre part, elles sont de portée générale et nécessitent, par conséquent, une évaluation spécifique plus approfondie, - des extraits de la revue de la littérature Margarines et Lipides Plasmatiques de J.- M. Lecerf qui est l'auteur de l'étude clinique de l'Institut Pasteur de Lille de 1992 à 1999 mettant en évidence la présence d'acides gras insaturés et que leur substitution à des acides gras saturés entraînerait une diminution du cholestérol,

- d'autres articles qui iraient dans le même sens ce qui n'est pas inutilement contredit mais en langue anglaise et inexploitables par la cour ;

Considérant qu'il est acquis aux débats que les Oméga 6 et 9 appartiennent à la famille des acides gras insaturés ce qu'admettent les deux parties ;

Considérant qu'il ressort de pièces produites que l'allégation selon laquelle une composition riche en Oméga 6 et 9 dans un produit emporterait lorsqu'elle est utilisée dans l'alimentation habituelle sur une période de cinq semaines une réduction du taux de cholestérol pouvant être chiffrée à 7 % par rapport à une composition d'acides gras saturés, impliquait des vérifications préalables et la soumission à une autorité sanitaire indépendante eu égard aux dispositions du règlement européen de 1997 puisqu'il s'agissait d'une allégation nouvelle et de santé relevant de ce règlement ce que confirme l'avis émis le 07.07.2002 précisément sur une telle allégation sur une demande de la Commission européenne tendant à ce qu'elle soit mentionnée à l'annexe du Règlement ;

Considérant qu'il est manifeste que la SAS Cema n'y a pas procédé puisqu'elle ne peut justifier avant la première divulgation de cette publicité que de données bibliographiques et d'une étude clinique de l'Institut Pasteur de Lille dont il importe de souligner qu'il était commercialement lié à cette société ;

Considérant, cependant, que postérieurement à cette première divulgation de septembre 2004, la SAS Cema pourra se prévaloir de l'avis de l'EFSA en faveur de l'effet de réduction du cholestérol lié à la formule de son produit, mais qui sera quelques mois contredit par l'avis émis par l'AFFSA le 14.10.2005, qui mettant en cause le caractère pertinent de l'étude clinique, dira non fondée la double allégation, sur le principe et son effet chiffré ;

Considérant que sont par ailleurs produits :

- un avis du 15.05.2007 sollicité par la DGCCRF au vu d'éléments complémentaires par lequel l'AFFSA se prononçant après consultation du CES "Nutrition humaine" réuni le 28.06.2006, a relevé que les données issues d'études épidémiologiques effectuées en 1992, 1997, 1996, 1998 et 2005 permettent de confirmer une réduction du cholestérol LDL secondaire à une substitution des AGS par une quantité similaire d'AGMI et d'AGPI et d'envisager une réduction du cholestérol - LDL de 5-10 % qui semble liée à une baisse des apports en AGS et /ou une augmentation des apports en AG insaturés, ces données étant à la base des recommandations diététiques formulées pour les sujets hypercholerolémiques de l'OMS (2003) et de l'AFFSAPS (2005) avant d'indiquer "on peut considérer à ce jour que le remplacement dans l'alimentation de matières grasses riches en AGS par des AGMI et des AGPI, sans recours à un enrichissement en stérols/stanols végétaux, contribue à réduire le cholestérol chez des sujets hypercholestéloréiques" mais en ajoutant, après avoir évoqué la nouvelle analyse statistique, que les résultats de l'étude clinique ne permettent pas de quantifier l'effet spécifique de ces margarines sur la diminution de la cholestérolémie en concluant que "l'allégation "formule aux acides gras Oméga 6 et 9 qui contribue à réduire le cholestérol comparativement aux acides gras saturés" est fondée sur la base de données bibliographiques ; l'essai d'intervention nutritionnelle fournie par le pétitionnaire n'apporte pas d'éléments à l'appui de la mention du pourcentage de la réduction du cholestérol - LDL",

- un document publicitaire non daté mais sur lequel figure un bon valable jusqu'au 20.10.2000 intitulé "Fruit d'or vous aide à prévenir l'excès de cholestérol" dans lequel la SAS Unilever France, après avoir rappelé le caractère essentiel des Oméga 6 et 3 indique "ce sont ceux qui contribuent à réduire activement le taux de cholestérol sanguin" ainsi qu'un autre document intitulé Oméga 3, 6, 9 "Que faut-il retenir'' et diffusé par l'Institut Fruit d'or Proactiv, en 2007 selon Cema, en tout état cause, postérieurement à 2003, date d' une étude de l'AFFSA à laquelle elle se réfère dans lequel la SAS Unilever indique "les Oméga 6 et 9 participent à l'équilibre qualitatif de nos acides gras (...) il faut aussi retenir que le remplacement dans l'alimentation des sources d'acide gras, saturés (beurre, charcuteries) par des sources d'acides gras insaturés (margarines végétales) contribue à la baisse du cholestérol",

- diverses pièces dont s'évince ce qui n'est pas contredit que, à l'étranger (Belgique, Grande-Bretagne) comme en France, la SAS Unilever France commercialisait des margarines sans stéréols, sous la marque Fruit d'or revendiquait pour les omégas 6 un effet de réduction du taux de cholestérol. Ainsi, on peut lire dans l'édition de Modes et Travaux d'octobre 1999 "de plus, sa richesse en acide gras essentiel, Oméga 6 contribue, en réduisant le taux de cholestérol, à la prévention des problèmes associés",

- une nouvelle étude clinique a été effectuée en 2008 à la demande de la SAS Cema par deux centres de recherches, situé l'un à Grenoble, l'autre à Lorient pour tenir compte de l'avis de l'AFFSA dont les conclusions sont les suivantes : "l'objectif étant d'évaluer les conséquences sur le cholestérol LDL de la substitution des matières grasses saturées ajoutées dans l'alimentation par les matières grasses insaturées Primevère conformément aux recommandations méthodologiques de l' AFFSA. Sur 146 patients ayant une élévation modérée du cholestérol inclus dans l'étude, 138 l'ont terminé conformément au protocole ; l'analyse statistique des valeurs obtenues en fin d'essai a montré une réduction significative de 5-7 % du cholestérol LDL chez les sujets ayant reçu Primevère par rapport à ceux ayant reçu du beurre." Commentant ces résultats qu'il transmettait le 05-01-2009, il concluait que cette étude avait mis en évidence une baisse de 6,1 % dans le groupe margarine et confirmait le bien fondé du choix de la composition de la margarine Primevère,

- enfin, le 20.03.2008, se prononçant sur un fromage fabriqué par une autre société avec remplacement des acides gras saturés par des acides gras insaturés, l'AFFSA concluait que l'allégation "aide à réduire le cholestérol" n'était fondée que sur des données bibliographiques et non sur une étude réalisée avec le produit ;

Considérant toutefois qu'il est constant que début 2006, la SAS Cema a modifié ce conditionnement ;

Mais considérant que ces différents avis et études sont sans incidence sur la réalité des manquements reprochés qui à raison de leurs termes sont donc caractérisés puisque, comme précédemment indiqué, c'est à la date de la divulgation des messages que doit être apprécié l'état des connaissances techniques et scientifiques de nature à établir leur exactitude sans qu'il puisse être tenu compte d'éléments postérieurs ;

Considérant que début janvier 2006, la SAS Cema a modifié le conditionnement et la publicité tandis que la SAS Unilever France lui reproche les faits suivants :

- le film diffusé en janvier 2006,

- les publicités presse, dépliants,

- le site Internet,

- le fromage Primevère

- le nouveau conditionnement,

- le film diffusé en 2007 ;

Considérant que les modifications sur ses différents supports consistent en l'abandon d'une allégation de réduction du cholestérol et de tout effet chiffré, la substitution à cette allégation d'une recommandation visant à limiter les excès du cholestérol, une revendication dans les films publicitaires de l'utilisation du produit Primevère pour le cholestérol ;

Considérant qu'un nouveau film publicitaire a été diffusé du 16.01 au 03.02.2006, qu'il se présente comme un dialogue de quelques secondes au cours duquel un homme qui prend un repas avec une femme après l'avoir interpellée sur l'utilisation de Primevère observe : "ah ! c'est pour ton cholestérol", cette dernière évoquant ensuite le double effet par l'action cardiovasculaire qui s'y ajoute, et concluant que Primevère avait été reconnu "saveur de l'année" ; que ce film comportait une incrustation reprenant cette dernière mention, ajoutant une allusion aux Oméga 3, la référence à l'étude Monadia en précisant qu'elle avait été réalisée de mai à juillet 2005 à partir d'un échantillon de 180 consommateurs ayant goûté le produit, se terminant par la citation d'un site Internet suivi des mots "Primevère Double Effet Institut Pasteur de Lille" ;

Considérant que la SAS Unilever France observe que cette incrustation est invisible ;

Considérant que le nouveau conditionnement se présente de manière identique mais ne fait plus aucune référence à la réduction et à sa quantification du cholestérol, l'allégation précédente étant remplacée par la suivante "formule aux omégas 6 et 9 recommandée dans le cadre d'une alimentation visant à limiter l'excès de cholestérol" ;

Considérant que les différentes publicités presse et dépliants comportent notamment le message suivant "cholestérol : pour votre santé, ne faites rien à moitié", édité avec le concours scientifique de l'Institut Pasteur de Lille, que pour le site Internet et les informations diffusées à partir d'autres sites, la SAS Unilever France ne forme pas de critiques précises sauf à évoquer l'article paru dans la revue 60 millions de consommateurs concluant "Primevre revendique un effet sur le cholestérol alors qu'elle est une margarine comme une autre" ;

Considérant que le fromage Primevère lancé en 2006 se présente avec un conditionnement identique à celui des margarines, reprenant le logo de la marque, porte la mention "pauvre en cholestérol" et la référence à l'Institut Pasteur de Lille ;

Considérant que le film publicitaire diffusé en 2007 reprend le thème d'un dialogue entre un homme et une femme autour d'un repas, évoque la double action cardio-vasculaire et sur le cholestérol, fait référence au maximun d'oméga, les 6 et 9 pour son cholestérol, porte la référence de l'Institut Pasteur de Lille, et conclut "ne faites rien à moitié" ;

Considérant qu'il résulte des pièces produites que le fromage lancé en 2006 n'est pas exploité par la SAS Cema mais par une autre société et ne revendique que l'allégation "pauvre en cholestérol", qu'à supposer que cette société appartienne au même groupe, cette société n'a pas été attraite en la cause, que, en admettant, eu égard à la référence aux mentions Primevère et de l'Institut Pasteur de Lille que le manquement allégué puisse être utilement être imputé à la SAS Cema, ce dernier n'est pas caractérisé au regard des seuls termes employés en sorte que les demandes en dérivant, dirigées contre la SAS Cema, sont rejetées ;

Considérant que tous les autres messages précités de la SAS Cema sur les différents supports participent de la poursuite par la SAS Cema de son action commerciale pour diffuser ses produits Primevère, que, toutefois, l'information donnée ne comporte plus aucune référence sur le conditionnement, dans les films publicitaires, dans les documents qu'elle édite ;

Considérant que si l'ensemble des autres messages qui n'étaient pas en eux-mêmes de nature à constituer une publicité trompeuse puisqu'ils ne faisaient aucune allusion à une réduction du cholestérol ont pu perpétuer la publicité trompeuse précédemment évoquée, cette publicité cessait d'avoir un caractère trompeur à compter de l'avis de l'AFFSA du 15.05.2007 ;

Considérant que, quant à ces messages, le grief n'est donc pas caractérisé, que toute autre analyse aurait pour effet d'interdire sans limitation dans le temps l'exploitation d'un produit, reposant sur une publicité licite, au motif d'une publicité antérieure irrégulière alors que la clientèle n'est plus exactement la même en sorte que de tels messages ne peuvent être pris en compte qu'au niveau d'un éventuel préjudice s'il était démontré, ce qui n'est pas le cas, que la régularisation n'avait pu avoir aucun effet sur la clientèle déjà détournée ou susceptible de l'avoir été avant le mois de janvier 2006, date des premières divulgations de ces nouveaux messages ;

Considérant que la SAS Unilever France reproche à la SAS Cema de s'être inscrite dans son sillage et d'avoir ainsi engagé sa responsabilité par des actes de parasitisme en ayant installé délibérément ses produits à partir de 2004 dans les mêmes rayonnages de supermarchés, en diffusant des publicités mensongères tant dans la presse écrite que télévisuelle, en utilisant les mêmes codes de communication et concepts publicitaires que ceux utilisés par elle, ayant pour effet de laisser croire que le produit Primevère avait pour effet comme celui de la gamme Pro Activ ce qui était inexact de réduire le cholestérol, et en la privant ainsi du bénéfice de ses investissements pour vendre un produit deux fois plus cher et en lui faire perdre une clientèle déjà acquise ;

Considérant que la SAS Cema réplique que :

- elle a été la première à communiquer et dès 1988 sur l'utilisation de margarines diététiques pour lutter contre l'excès de cholestérol ce que la SAS Unilever France n'a fait qu'en 2000 par ses produits de la gamme Pro Activ,

- la SAS Unilever France a copié ses codes couleurs, dès lors que :

- dès 1988, la SAS Cema a utilisé les couleurs blanc, orange, vert, que la SAS Unilever, qui à cette date, pour la gamme Fruit d'or, utilisait le jaune, reprendra en 2000,

- en 2004, la SAS Cema pour une margarine demi-sel utilisera les couleurs blanc et bleu tandis que la SAS Unilever France utilisera les mêmes couleurs pour une margarine salée lancée en 2005 et seulement en France,

- la SAS Cema utilise depuis l'origine la couleur rouge pour le cholestérol et depuis des années un cœur rouge ce qu'a également fait plus tard la SAS Unilever France,

- les flèches rouges qui figurent sur les deux types d'emballages des deux sociétés n'ont ni la même forme ni la même signification,

- il n'existe en magasin qu'un seul linéaire pour l'ensemble des margarines, que les produits Primevère s'y trouvaient douze ans avant ceux de la gamme Pro Activ, que dans ses préconisations d' implantation aux distributeurs, la SAS Unilever France suggère de placer au même endroit les margarines Primevère et Proactiv,

- les autres allégations d'actes de parasitisme ne sont étayées d'aucune pièce,

- elle est dans une logique naturelle alors que la SAS Unilever France est dans une logique quasi médicamenteuse renforcée par un partenariat avec la MAAF laissant entendre que les primes d'assurance maladie seraient remboursées en cas d'achats de produits Pro Activ ce qui a effrayé certains consommateurs, que l'innocuité des phytostéréols est remise en cause ce qui constitue une raison supplémentaire de ne pas s'inscrire dans le sillage de la SA Unilever France ;

Considérant qu'il résulte des pièces produites que :

- la SAS Unilever France a exploité une margarine depuis 1972 sous la marque Fruit d'or, créée en 1978, l'Institut Fruit d'or, édité en1979 un guide sur les margarines évoquant largement les caractéristiques nutritionnelles et diététiques, communiqué à partir de 2000 sur la prévention de l'excès de cholestérol en soulignant que les margarines Fruit d'or, naturellement riches en Oméga 6, contribuent à réduire le taux de cholestérol sanguin, exploité diverses margarines comportant des Oméga 6 tels que Fruit d'or en France, Becel en Belgique avec l'allégation "contrôle votre cholestérol", Fiora en Grande-Bretagne avec l'allégation en anglais mais dont la traduction donnée par la SAS Cema n'est pas discutée "dans le cadre d'un régime sain Fiora a la capacité de réduire le cholestérol et aide à maintenir votre cœur et vos artères en bonne santé", que notamment le 26.01.2005 était saisie par huissier une boîte demi-sel Fruit d'or sur laquelle on peut lire "Fruit d'Or est naturellement riche en Oméga 6 qui aident à se protéger du mauvais cholestérol dans le cadre d'une alimentation équilibrée", lancé en 2000 une margarine sans stéréols sous la dénomination Fruit d'or Pro Activ revendiquant une réduction du taux de cholestérol pour laquelle elle avait obtenu, le 24.07.2000, une autorisation de mise sur le marché en application du Règlement Européen de1997,

- la SAS Cema exploite depuis 1988 sous la marque Primevère différentes huiles et margarines. Elle a été autorisée par la commission de contrôle de publicité, dont elle a obtenu le visa, le 18.08.1988, pour une durée d'un an, à faire figurer sur les barquettes de "Primevère Margarine à tartiner" la mention "pour le régime en cas d'excès de cholestérol" en remplacement de la mention initiale "utile en cas d'excès de cholestérol", cette autorisation ayant été également donnée pour une diffusion PLV, pour le même produit, le 22-02-1990 pour deux ans ; qu'elle a également obtenu, le 09.01.1992, le visa pour deux ans pour le produit Primevère Margarine pour l'annonce presse d'un texte comportant les mentions "avec les régimes proposés dans l'excès de cholestérol (...) s'associe aux régimes proposés dans l'excès de cholestérol";

Considérant qu'il s'ensuit que si la SAS Unilever France a développé dès 1979 une information sur les caractéristiques et diététiques des margarines, elle ne justifie pas d'une allégation précise liée au développement des margarines en relation avec le risque de cholestérol avant que la SAS Cema n'obtienne à partir de septembre 1998 des visas successifs pour des supports différents pour des publicités liées au risque alimentaire du cholestérol, que, de plus la SAS Cema a justifié avoir exploité la dénomination Primevère en revendiquant une allégation d' utilisation dans les régimes proposés pour l'excès de cholestérol sans que la SAS Unilever France ait préalablement justifié d'une telle exploitation ;

Considérant qu'il n'est pas utilement contredit que les produits de la gamme Primevère avant que ne soit lancée la gamme Pro Activ étaient fabriqués avec une formule contenant des Oméga 3, 6, 9 en sorte que le produit Primevère Double Effet est un produit de même nature que ceux que SAS Cema exploitait précédemment, qui a été commercialisé à la suite de la mise sur le marché en 2002 des produits de la gamme Proactiv avec un nouveau conditionnement.

Considérant que l'antériorité de l'une ou l'autre des parties s'apprécie par rapport au marché pertinent et aux efforts effectuer par celle qui reproche les actes de parasitisme dont s'agit pour bénéficier de l'action qu'elle a entreprise pour conserver ou augmenter sa clientèle ce dont ces actes l'ont partiellement ou totalement privé ;

Considérant qu'il s'ensuit que le marché pertinent est celui de l'incidence des produits en cause sur une réduction du cholestérol LDL alimentaire en sorte que les produits de la SAS Cema ont une antériorité certaine par rapport à ceux de la SAS Unilever.

Considérant qu'il est manifeste que la SAS Unilever France a repris pour ses produits Pro Activ les couleurs utilisées pour ses produits antérieurement tandis que, comme il a été précédemment indiqué au regard de la publicité trompeuse, le graphisme importe peu, en l'espèce, compte tenu du caractère indissociable de ces mentions s'agissant d'obtenir une adhésion intellectuelle ;

Considérant, enfin, qu'on ne saurait rien déduire quant à l'implantation des produits sur un même rayon pour caractériser contre la SAS Cema une faute contractuelle, la décision relevant des seuls pouvoirs de la direction de l'établissement en cause ;

Considérant que la publicité trompeuse retenue par la cour est en elle-même de nature à engager la responsabilité quasi-délictuelle de la SAS Cema à l'égard de la SAS Unilever France, dès lors qu'il en résulterait un préjudice ;

Considérant que pour caractériser ce préjudice, la SAS Unilever France prétend que :

- sous l'effet de cette publicité trompeuse, la clientèle qui depuis l'année 2000 s'était accoutumée à acquérir un produit plus cher, s'en est, à partir de l'année 2004 progressivement détournée au point que la grande majorité de la clientèle acquise a été perdue au profit de la seule SAS Cema,

- les mensonges publicitaires ont été à l'origine d'une perte de parts de marchés à partir de septembre 2004 interrompant une progression constante depuis 2000, générant des pertes d'exploitation en 2005 et 2006 pour un montant global de 14, 5 millons d'euro, la nécessité de développer une nouvelle action publicitaire pour un montant de 10,2 millions d'euro, un préjudice d'image pour un montant de 5,7 millions d'euro, soit ensemble un montant de 30,5 millions d'euro,

- elle s'est fondée notamment sur l'importance et la longueur de la campagne publicitaire de la SAS Cema, la perte de ses parts de marchés mise en évidence par les "données Nielsen",

- face à ces données objectives, la SAS Unilever France multiplie les contre-vérités puisqu'elle a maintenu son effort publicitaire, que la marge est celle des produits du secteur, que le prix n'a pas augmenté depuis le lancement du produit, que les spécialités laitières ne se développent pas sur le même marché, que l'arrivée de la margarine Saint Hubert n'a pas empêché sa progression, qu'il ne peut être fait abstraction de l'évolution d'ensemble du marché de la margarine, ni de la vanité de ses efforts publicitaires face à une publicité mensongère, qu'elle n'a pas cessé sa communication sur la marque Fruit d'or ni dissimulé les erreurs de communication sur les produits Pro Activ,

- l'étude Nielsen démontre que les parts de marché perdues l'on été pour plus de 65 % au profit de la SAS Cema et tient compte de tous les paramètres,

Considérant que la SAS Cema réplique que :

- le préjudice subi ne peut consister que dans la perte de marge brute justifiée par des pièces comptables,

- les pertes d'exploitation qui ne sont qu'une estimation reposent sur un document - source Panel Nielsen - non étayé de pièces comptables qui est une preuve que la SAS Unilever France se fait à elle-même, qu'en réalité, la SAS Cema a tiré profit de son action publicitaire alors que en 2004 et 2005, la SAS Unilever France s'est abstenue de toute campagne publicitaire, que la SAS Unilever France ne produit aucun élément sur ses résultats postérieurs à l'année 2006 et prend en compte le marché de l'ensemble des margarines qui n'est pas le marché pertinent, que si l'on prend l'évolution des margarines santé, il est manifeste que la part de marché de la SAS Unilever France n'a fait que baisser, qu'il y a lieu de tenir compte de l'action et du développement des margarines Saint Hubert qui se plaçait sur le même secteur, que la SAS Unilever ne démontre pas l'impact sur les margarines Fruit d'or,

- les sommes réclamées au titre d'un réinvestissement publicitaire s'analysent en une demande de réparation d'un préjudice futur éventuel dont le chiffrage est invérifiable et qu'en réalité, la SAS Unilever France veut se faire indemniser du budget publicitaire qu'elle entend consacrer à un secteur autre que celui des margarines,

- sous couvert d'une perte d'image, la SAS Unilever France réclame une deuxième fois un préjudice d'exploitation en l'évaluant à un mois de son chiffre d'affaires base qui ne saurait être admise pour un tel préjudice,

- le lien de causalité entre le préjudice subi et les publicités litigieuses n'est pas établi étant observé que depuis le jugement la SAS Unilever France a admis avoir commis des erreurs de communication sur le produit Proactiv, que l'évolution du chiffre d'affaires de la gamme Pro Activ révèle une progression constante, passant de l'ordre de 55 millions d'euro en 2002 à environ 87 millions d'euro en 2005 et la baisse des parts de marché des margarines Pro ACTV ayant commencé bien avant les publicités de la SAS Primevère en 2004, qu'en réalité, la part de marché perdue par la SAS Unilever France sur les margarines Proactiv s'explique par la circonstance qu'elle a consacré son budget publicitaire pour les produits laitiers de cette gamme, étant observé que le budget pour les margarines Pro Activ par rapport au budget cumulé des margarines santé (Pro Activ, Ilo/Cholegram, Primevère, Saint Hubert Oméga 3) qui représentait 37,8 % en 2003, était de 11,8 % en 2004, de 1,3 % en 2005 et de 43,2 % en 2007, que s'est développée la concurrence des produits frais enrichis en stérols/stanols qui concerne le même secteur, la quantité de produits enrichis en stérols/stanols ne devant pas dépasser une certaine dose, que la SAS Unilever France a été confrontée à la concurrence des margarines des Oméga 3 sur laquelle elle s'est elle-même placée avec succès, que le prix de vente des margarines Pro Activ était excessif puisque sur le prix total de ces produits, la SAS Unilever France réalisait une marge de l'ordre de 50 %, qu'une controverse existe sur les effet sanitaires des phytostéréols qui ont conduit les autorités sanitaires à imposer un étiquetage spécifique (réservé aux personnes souffrant d'hypercholestrolémie, déconseillé aux femmes enceintes et allaitantes, aux enfants de moins de cinq ans, consommation sous contrôle médical sans dépasser la dose maximale de 3 grammes), que la SAS Unilever France a admis des erreurs de politique commerciale (absence de continuité de la communication, passage sous la marque Fruit d'or, effet néfaste du partenariat MAAF), que la SAS Unilever France ne démontre pas le lien de causalité entre les publicités litigieuses et l'évolution défavorable de la marque Fruit d'or, laquelle a été confrontée à l'augmentation des parts de marché des margarines vendues sous marque de distributeur, aux effets de l'arrêt de la communication sur cette marque, à la forte progression des margarines Oméga 3, à la baisse de qualité de la margarine Fruit d'or, à l'abandon du graphisme emblématique "fleur de tournesol" Fruit d'or ;

Considérant qu'il importe de relever que le seul manquement caractérisé tient à une publicité irrégulière développée pendant la seule période du mois de septembre 2004 au mois de janvier 2006 sur les seules allégations concernant la réduction et la quantification de cette réduction du cholestérol liées à la consommation du produit Primevère Double Effet ; que si le message affecte nécessairement l'ensemble de ce produit, le préjudice qui en résulte, ne peut être que par rapport à la perte de marge brute découlant de ces seuls messages sur le seul marché pertinent qui est la vente de margarines de nature à réduire le cholestérol alimentaire ;

Considérant que le document dit "Études Nielsen", à supposer qu'il émane en fait de la SAS Unilever France, qui comporte des données comptables n'en demeure pas moins un document admissible et exploitable valant comme élément de preuve, qu'il doit être apprécié en le confrontant aux autres éléments produits ;

Considérant qu'il convient d'observer que ce document ne comporte pas de données spécifiques sur le seul marché pertinent tel que défini par la cour tandis que la SAS Cema, par les documents qu'elle produit, justifie l'évolution du marché des corps gras végetaux qui est celui qui se rapproche le plus du marché pertinent défini par la cour, depuis 2001 jusqu'en 2008 dont s'évince une progression au cours des années 2004, 2005, 2006, et une baisse de part de marché de la gamme Pro Activ, qui avait commencé en 2003 (moins 2,2 %) mais qui diminuera très sensiblement au cours des années 2004, 2005, 2006 (moins 12 %), que cette baisse se poursuivra encore en 2007 et 2008, que de ces éléments ressort un marché de corps gras végétaux de l'ordre de un million d'euro et l'incidence de multiples facteurs d'évolution, que par ailleurs le taux de marge brute avancé de l'ordre de 50 % n'a pas été utilement contredit ;

Considérant, en outre, qu'il convient de tenir compte que durant cette même période, la SAS Unilever France continuait à commercialiser des produits similaires, c'est-à-dire sans stéréols, en affirmant un effet de réduction du cholestérol et donc en soutenant l'allégation qu'elle reproche à la SAS Cema sans toutefois affirmer une quantification ;

Considérant qu'il est, par ailleurs, manifeste que la SAS Unilever France était parvenue à exploiter régulièrement depuis 2000 une margarine avec adjonction de stérols pour laquelle elle avait réduit son action publicitaire en 2004 ce qui n'a pu que favoriser l'impact de l'action publicitaire de la SAS Cema dans le temps même où se développait une forte concurrence sur un secteur industriel en développement rapide depuis le règlement communautaire de 1997 ;

Considérant qu'il est manifeste que d'autres concurrents se sont développés sur le secteur pertinent précédemment défini et que le secteur pertinent et plus spécialement celui des margarines avec adjonction de stérols était soumis dès avant 2004 et pendant la période des messages irréguliers à une forte évolution tirée des contraintes d'étiquetage judiciairement imposées, de l'intervention de concurrents dont certaines de revues de consommateurs souligneront dès 2003 que les produits étaient de qualité équivalente sinon supérieurs à ceux de la gamme Pro Activ, de l'apparition de produits laitiers avec adjonction de stéréols alors qu'il n'est pas utilement contredit que la quantité de stérols pouvant être consommée par jour ne peut dépasser la dose maximale de 3 grammes ;

Considérant que la stagnation du chiffre d'affaires de vente de margarine Pro Activ en 2005, si elle est pour partie liée à l'action publicitaire de la SAS Cema en 2004 et 2005 est la conséquence également des autres facteurs précisés ;

Considérant que le réinvestissement publicitaire entrepris par la SAS Unilever était, en tout état de cause, nécessaire dans le cadre d'une exploitation normale d'un produit nouveau sur un marché en développement fortement concurrentiel relevant, au demeurant, d'une autorisation de mise sur le marché en application d'un règlement communautaire et soumis au contrôle des autorités sanitaires, qu'il s'imposait d'autant plus que, pour ce produit, les parties étaient opposés dans divers litiges depuis 2002 ;

Considérant que, au vu de l'ensemble de ces éléments et au regard des pièces produites, le préjudice d'exploitation se rattachant aux seuls manquements caractérisés qui s'analyse en une perte de chance de réaliser une marge brute sur le gain manqué au cours du dernier trimestre de l'année 2004 et de l'année 2005, est retenu pour un montant de 500 000 euro ;

Considérant que le préjudice d'image allégué n'est pas suffisamment caractérisé eu égard à la présence régulière sur le secteur pertinent dont s'agit de la SAS Cema tant avant qu'après les manquements reprochés ; qu'il ne s'appuie sur aucune plainte précise de consommateurs ;

Considérant que les demandes d'interdictions telles que visées au dispositif des dernières écritures de la SAS Cema ne peuvent qu'être rejetées dès lors qu'elles se rapportent à des conditionnements et des publicités qui ont cessé ou qui n'ont pas été retenus comme répréhensibles ou sont exprimées en termes trop imprécis ;

Considérant que la demande de publication formée à titre de dommages et intérêts complémentaires ne peut qu'être rejetée eu égard à l'ancienneté des manquements retenus, de l'évolution du secteur pertinent depuis les faits commis et du contexte différent actuel de ce marché en sorte qu'une mesure de publicité ordonnée actuellement aurait un effet disproportionné ;

Considérant que la SA Cema sollicite à titre reconventionnel la condamnation à lui verser différentes sommes à raison de publicité illicite, outre diverses mesures d'interdiction et de publication ;

Considérant que, au soutien de cette demande, elle fait valoir que :

- selon communiqué de presse du 29.11.2005, la SAS Unilever France a annoncé que ses produits Pro Activ feraient l'objet d'un remboursement par une mutuelle sous forme de réduction de cotisation, que ce communiqué s'inscrivait dans le cadre d'un partenariat avec la MAAF, que ce communiqué précisait notamment "pour la première fois, une société d'assurances et une entreprise agroalimentaire s'associent pour placer l'alimentation au cœur de la lutte contre l'excès de cholestérol considéré comme l'un des principaux facteurs de risque cardio-vasculaire", que cette opération lancée en 2006 s'est poursuivie en dépit d'une controverse avec les pouvoirs publics,

- que la décision du TGI de Paris que la cour aurait confirmée, par laquelle il a débouté l'UFC Que Choisir de sa demande dirigée contre la MAAF en cessation de cette publicité ne lui est pas opposable, n'ayant pas été partie à ces instances,

- qu'une telle publicité méconnait les dispositions combinées des articles L. 121-1 et L 121-2 du Code de la consommation et L. 5111-1 du Code de la santé publique,

- par application de ce dernier article, la référence à une posologie, à des vertus thérapeutiques ou préventives ou à des maladies ou à une activité médicale et en offrant un remboursement, la SAS Unilever France crée une confusion entre aliment et médicament,

- existe une confusion sur l'effet contre l'excès de cholestérol et les maladies cardio-vasculaires qui crée un risque pour la santé publique en ne mentionnant pas les contre-indications d'utilisation,

- une telle publicité est une image négative pour l'ensemble des margarines ainsi pénalisées par une initiative regrettable,

- cette initiative a altéré l'image de marque des produits Primevère fondée sur l'équilibre et les qualités nutritionnelles ayant entraîné pour elle une perte de part de marché de l'ordre de 2 % justifiant une indemnité de 500 000 euro sauf à parfaire et d'image pour le même montant, 11 % des personnes interrogées lui en imputant l'initiative alors qu'elle a eu un effet négatif,

- si la qualification donnée est un médicament, il ne peut être vendu en grande surface donc il doit être retiré par application de l' article L. 4223-1 du Code de la santé publique réprimant le monopole pharmaceutique en sorte qu'elle était fondée à solliciter le retrait des margarines Pro Activ faisant référence à ce partenariat de tous les linéaires des lieux de vente autres que les officines de pharmacie, qu'elle est fondée à maintenir cette demande bien que la SAS Unilever France ait déclaré avoir cessé ce partenariat pour éviter que cette dernière décide de nouveau d'y recourir ;

Considérant que la SAS Unilever France réplique que cette demande n'est pas sérieuse dès lors que :

- les produits Pro Activ ont été mis sur le marché dans le cadre d'une procédure spécifique,

- les qualités de ses produits ont été reconnues par de nombreuses études scientifiques et admis par décision du 24.07.2000 de la Commission européenne comme sans danger pour l'homme,

- ces produits ne sont pas des médicaments et ne relèvent pas du Code de la santé publique étant précisé que, selon la décision de la Commission européenne du 24.07.2000, ils sont étiquetés comme margarine en sorte qu'aucune atteinte au monopole pharmaceutique ne peut être alléguée,

- le règlement d'étiquetage prévoit seulement des mentions informatives non à titre de contre-indications mais parce que ces produits s'adressent à un public spécifique,

- ces produits ont fait l'objet d'une communication intense auprès des médecins et des consommateurs en sorte que le public pertinent n'ignore pas que ce sont des aliments vendus, à ce titre, tout à fait librement en grande surface,

- une opération promotionnelle faite avec un opérateur privé sur un produit qui n'est pas nouveau six ans après son lancement ne peut induire en erreur un consommateur sur les qualités du produit s'agissant d'une opération légale n'emportant pas remboursement du produit acheté, mais réduction d'une cotisation annuelle d'une assurance complémentaire dont la souscription n'est pas obligatoire, calculée forfaitairement par rapport au surcoût d'une margarine enrichie de stérols sur une margarine classique,

- le consommateur ne peut se méprendre sur le sens de cette réduction, qu'aucune autorité sanitaire n'a condamnée, étant observé que la Cour d'appel de Paris par une décision définitive a confirmé le jugement par lequel le tribunal avait débouté UFC Que Choisir de sa demande,

- les produits Pro Activ ne comportent aucune posologie tandis que la cour par l'arrêt évoqué a répondu sur le grief tiré d'un effet annoncé, et que la confusion entre la lutte contre l'excès de cholestérol et les maladies cardio-vasculaires repose sur une interprétation totalement erronée de sa communication étant observé que la SAS Unilever France a simplement utilisé l'allégation validée par l'AFFSA sans revendiquer un effet sur les maladies cardio-vasculaires ;

Considérant que la qualification de médicament ne peut être attribuée aux margarines Pro Activ puisque ces dernières qui sont des margarines enrichies de stérols et s'analysent au regard de la réglementation communautaire et notamment du Règlement du 27.01.1997 comme un nouvel ingrédient alimentaire, soumis comme tel à une procédure spécifique d'autorisation de mise sur le marché et que selon une décision de la Commission des Communautés européennes du 24.07.2000, lesdites margarines pouvaient être mises sur le marché communautaire comme nouveaux aliments ou nouveaux ingrédients alimentaires et devaient être étiquetés comme margarines, d'autre part, que, eu égard à l'autorité attachées à ce règlement et à la décision de la Commission Européenne, cette qualification est exclusive de toute qualification de médicament selon la loi française, que, d'ailleurs, il résulte de l'arrêt rendu le 26.06.2002 entre les mêmes parties, relativement aux mêmes produits, en l'espèce, Pro Activ Cuisine et Pro Activ Tartine que ces parties et notamment la SAS Cema n'ont pas discuté cette qualification de nouvel ingrédient alimentaire ;

Considérant que la SAS Cema ne peut pas plus utilement soutenir que la publicité critiquée et le contrat de partenariat allégué aurait eu pour effet de créer une confusion entre aliment et médicament puisque l'offre consistait non en une prise en charge susceptible de s'analyser en un remboursement mais en une réduction forfaitaire de 10, 22, ou 40 euro suivant le nombre de produits achetés 7, 14 ou 21 et plus, ne tenant donc pas compte du prix du produit concerné, sur le montant de la cotisation d'une assurance complémentaire facultative santé ;

Considérant, par suite, que la SAS Cema qui n'a pas démontré le caractère illicite de cette publicité ne peut qu'être déboutée de ses demandes de ce chef, étant observé que des pièces communiquées résulte que l'accord de partenariat pour l'année 2006 n'a pas été renouvelé pour 2007 en raison de l'impact insuffisant sur le chiffre d'affaires de la SAS Unilever France ;

Considérant qu'il y a lieu d'ordonner à la SAS Unilever France de restituer à la SAS Cema les sommes versées au-delà de celles retenues par le présent arrêt dans le cadre de l'exécution du jugement avec intérêts au taux légal à compter non de leur versement mais de la notification du présent arrêt valant mise en demeure de restituer ;

Considérant que les conditions d'application de l'article 700 du Code de procédure civile ne sont pas réunies, le jugement étant confirmé sur l'application de cet article ;

Considérant que chacune des parties supportera ses propres dépens d'appel, le jugement étant confirmé en ses dispositions sur les dépens ;

Par ces motifs : Confirme le jugement sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens ; Le réforme pour le surplus ; Statuant à nouveau et y ajoutant ; Dit que la SAS Cema a effectué une publicité trompeuse pour ses produits Primevère Double Effet en ce qui concerne les seules mentions relatives au cholestérol et pour la seule période de septembre 2004 au mois de janvier 2006 ; Ramène la condamnation prononcée à ce titre contre la SAS Cema au profit de la SAS Unilever France à la somme de 500 000 euro ; Ordonne, en tant que de besoin, la restitution des sommes versées au-delà de ce montant dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement à compter de la notification du présent arrêt ; Rejette le surplus des demandes ; Dit que chaque partie supportera ses propres dépens d'appel ; Admet les avoués chacun en ce qui le concerne au bénéfice de l'article 699 du Code de procédure civile.