Livv
Décisions

CA Nancy, 2e ch. com., 16 février 2011, n° 10-00962

NANCY

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Produc'Son (SARL)

Défendeur :

Villette (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cunin

Conseillers :

Mme Zecca-Bischoff, M. Bruneau

Avoués :

SCP Leinster Wisniewski, Mouton, SCP Vasseur

Avocat :

Me Decot

T. com. Nancy, du 5 janv. 2010

5 janvier 2010

EXPOSE DU LITIGE

La société Produc'Son a envisagé l'organisation d'un spectacle " Georgian Légend " et, à cette occasion, est entrée en relation avec l'association Prodige Music. Cette association a exposé des frais relatifs à cette manifestation pour un montant de 11 187,30 euro, mais en a réclamé en vain le remboursement à la société Produc'Son.

L'association Prodige Music a fait assigner, par exploit du 28 janvier 2009, la société Produc'Son pour obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 11 187,30 euro outre les intérêts.

Par jugement en date du 5 janvier 2010, le Tribunal de commerce de Nancy a condamné la société Produc'Son à payer à l'association Prodige Music la somme de 10 900,26 euro avec intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2008, outre la somme de 1 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société Produc'Son a relevé appel de ce jugement et demande à la cour de l'infirmer en déboutant l'association Prodige Music de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Subsidiairement, elle demande la compensation avec la créance d'un montant de 5 202,60 euro qu'elle a déclarée au passif de l'association Prodige Music.

Elle fait valoir que l'association Prodige Music ne justifie pas de l'existence d'un contrat, notamment d'un mandat, qui aurait été conclu avec elle. Elle prétend au contraire qu'il s'agissait de coproduire un spectacle à risque financier partagé comme cela s'était fait précédemment. Elle ajoute qu'elle n'a jamais accepté les devis sur la base desquels l'association Prodige Music s'est engagée.

Elle se prévaut des dispositions de l'article 20 de la loi du 29 janvier 1993 pour prétendre qu'à défaut de contrat écrit de mandat pour la campagne publicitaire, l'association n'a droit au paiement d'aucune somme. Elle déclare en outre contester les factures produites.

L'association Prodige Music a été placée en liquidation judiciaire et Maître Villette a été désigné en qualité de liquidateur. Elle demande la confirmation du jugement et la condamnation de la société Produc'Son à lui payer la somme de 1 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle prétend qu'elle n'a pas coproduit le spectacle avec la société Produc'Son, mais qu'elle n'est intervenue qu'en qualité de mandataire, lui soumettant les devis en vue de réaliser les affiches et de publier les annonces pour le compte de celle-ci.

Elle fait observer que dans le cadre de relations entre une association et une société de programmation de spectacle, la loi du 29 janvier 1993 ne trouve pas à s'appliquer. Elle ajoute que la créance de la société Produc'Son, qui se rapporte à l'organisation d'autres manifestations, ne présente pas un lien de connexité suffisant pour permettre la compensation dans le cadre d'une procédure collective.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que l'association Prodige Music verse aux débats une facture en date du 4 avril 2007 d'un montant 11 187,30 euro relative aux frais de promotion pour le spectacle Georgian Légend au Zénith de Nancy et aux Arènes de Metz, qui finalement a été annulé ; que cette facture concerne les frais suivants :

- campagne d'affichage à Metz et à Nancy : 4 953 euro

- impression de 300 affiches : 3 200 euro

- impression de 100 bandeaux : 120 euro

- achat de page publicitaire : 960,93 euro

- affichage vitrine des affiches : 120 euro

Qu'elle produit les factures correspondant à ces postes de dépenses, hormis celles de 120 euro, et des relevés de son compte bancaire établissant qu'elle les a acquittées ;

Attendu que l'association Prodige Music verse encore au dossier des contrats passés avec la société Produc'Son pour des spectacles antérieurs ; qu'elle prétend que, dans le cadre du spectacle Georgian Légend, les parties ont maintenu les mêmes relations contractuelles, mais reconnaît qu'aucun contrat n'a été signé ; qu'elle fonde ses prétentions sur des courriels qui ont été échangés entre les parties ;

Attendu que, dans le cadre de contrats antérieurs, la société Produc'Son s'est présentée comme producteur et l'association Prodige Music comme organisateur de spectacles ; que dans le message du 2 février 2007 ayant pour objet une demande de location de salle, la société Produc'Son déclare qu'elle envisage la production du spectacle Georgian Légend ; que pourtant les contrats antérieurs mettent à la charge de l'organisateur la fourniture du lieu de représentation ;

Attendu qu'il apparaît du message du 10 janvier 2007 que la société Produc'Son a proposé à l'association Prodige Music l'organisation du spectacle Georgian Légend ; que par courrier du 7 février 2007, l'association Prodige Music a transmis le devis à la société Produc'Son pour l'affichage et que, par courriel du 12 février 2007, la société Produc'Son a transmis le visuel de cette affiche ; que la société Produc'Son a précisé dans son message du 16 février 2007 la nécessité d'insérer le logo du sponsor ;

Attendu que, dans les contrats antérieurement souscrits par les parties, il est précisé que l'organisateur s'engage pour la promotion du spectacle, à n'utiliser que les documents fournis par le producteur pour procéder à la communication de la représentation du contrat et que le producteur fournira en temps utile tous les éléments nécessaires à la promotion du spectacle ;

Attendu qu'il résulte des courriels échangés par les parties que c'est dans le cadre de relations contractuelles semblables que la société Produc'Son et l'association Prodige Music ont contracté pour l'organisation du spectacle Georgian Légend ; qu'ainsi les parties étaient liées par un contrat de prestations de publicité en ce qui concernent les factures dont il est demandé le paiement ;

Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article 20 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 que tout achat d'espace publicitaire ou de prestation ayant pour objet l'édition ou la distribution d'imprimés publicitaires ne peut être réalisé par un intermédiaire que pour le compte d'un annonceur et dans le cadre d'un contrat écrit de mandat et que ce contrat fixe les conditions de la rémunération du mandataire en détaillant, s'il y a lieu, les diverses prestations qui seront effectuées dans le cadre de ce contrat de mandat et le montant de leur rémunération respective ;

Attendu que l'association Prodige Music reconnaît qu'aucun contrat écrit n'a été signé par les parties ; qu'ainsi, à défaut de contrat écrit, elle n'est pas fondée à réclamer le payement de factures relatives aux frais de la campagne publicitaire qu'elle a exposés dans l'intérêt de la société Produc'Son ; qu'en effet, contrairement aux affirmations de l'association Prodige Music, la loi du 29 janvier 1993 est applicable en l'espèce,

Attendu que le jugement déféré sera en conséquence infirmé ; qu'en raison de la nature de l'affaire et des relations entre les parties, il n'y a pas lieu à application entre elles des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; que celles-ci seront déboutées du surplus de leurs demandes ; que les dépens d'instance et d'appel seront mis à la charge de Maître Villette, ès qualités de liquidateur de l'association Prodige Music ;

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Infirme le jugement en date du 5 janvier 2010 du Tribunal de commerce de Nancy ; Et statuant à nouveau : Déboute Maître Villette, ès qualités de liquidateur de l'association Prodige Music, de ses demandes ; Déboute les parties du surplus de leurs demandes, notamment de leurs demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne Maître Villette, ès qualités, aux dépens d'instance et d'appel et autorise la SCP Leinster Wisniewski Mouton, avoués associés, à les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.