Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 24 juin 2011, n° 09-17868

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Rivoli Cambon (SAS)

Défendeur :

S. Communications (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jacomet

Conseillers :

M. Schneider, Saint-Schroeder

Avoués :

SCP Petit-Lesenechal, Me Teytaud

Avocats :

Mes Thomas-Courcel, Carbuccia

T. com. Paris, du 25 juin 2009

25 juin 2009

La SARL S. Communications qui déclare exercer une activité de location de panneaux publicitaires notamment sur des parcs de stationnement, dont elle dispose selon contrats conclus avec les exploitants de parcs, a conclu le 21.05.2003 avec la société Rivoli Cambon qui exploite notamment la brasserie chez flottes un ordre de publicité portant sur le parking belle jardinière location d' un panneau à compter du 31 06 2003 puis de deux panneaux à compter du premier décembre 2003, pour un montant de 6 400 euro HT soit 7 654,40 euro TTC dont 400 euro d'affiches pour deux exemplaires à la mise en place, payable pour 3 000 euro au 01.07.2003 et pour le solde le 01.01.2004, le contrat étant conclu pour une durée d'un an à compter du 01.06.2003, renouvelable par tacite reconduction pour deux panneaux sauf dénonciation trois mois avant l'échéance.

L'affiche de la brasserie chez flottes a fait l'objet d'un bon à tirer du 27.05.2003.

Ce contrat a donné lieu à plusieurs factures de la SARL S. Communications :

- le 27.06.2003, pour 3 558 euro TTC portant acompte sur location annuelle et réalisation d'un visuel pour 200 euro inclus,

- le 06.01.2004, pour 3 478, 40 euro TTC portant mise en place du second panneau au 01.12.2003 et solde sur location annuelle sous déduction d'un acompte de 588 euro déjà versé,

- le 15.06.2004, pour un montant de 9 328,80 euro TTC portant location de deux panneaux publicitaires pour la période du 01.06.2004 au 31.05.2005,

- le 15.06.2005, pour des prestations et montant identiques pour la période du 01.06.2005 au 31.05.2006,

- le 15.06.2006, pour des prestations et un montant identiques mais pour la période du 01.06.2006 au 31.05.2007.

Par lettre du 01.06.2005, la SARL S. Communications avait sollicité outre le paiement d'une facture du 23.02.2001 pour 3 646,56 euro ne se rattachant pas au présent contrat, celui de la facture du 15.06.2004 puis réitérait sa demande le 15.06.2006 en se référant à ses factures de 2004 2005 et 2006 en arrêtant le solde restant dû au montant de 22 892,18 euro TTC à parfaire.

Par lettre du 26.10.2006, elle portait sa créance au montant de 28 574,40 euro TTC en mettant en demeure la SARL Rivoli Cambon de payer cette somme se rapportant selon relevé au paiement de ces diverses factures sur lesquelles n'avait été réglées que les sommes de 3 588 euro le 07.10.2003 au titre de la facture du 27.06.2003 et de 3 478 euro au titre de la facture du 05.01.2004, le 28.05.2004.

Est, en outre, produite aux débats une lettre par laquelle la SAS Q Park confirmait en qualité d'exploitant du parc de stationnement belle jardinière, que la SARL S. Communications bénéficie d'une régie publicitaire exclusive du site précité laquelle a pour objet de permettre à cette dernière de louer directement aux annonceurs en son propre nom et pour son propre compte lesdits emplacements publicitaires dudit parc.

Sur une assignation du 20.09.2007 de la SARL S Communications, le tribunal, par le jugement déféré, a condamné la SARL Rivoli Cambon à lui payer la somme de 28 574,40 euro avec intérêts au taux légal à compter du 26.10.2006, celle de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à régler les dépens, le surplus des demandes étant rejeté.

Par dernières conclusions du 30.11.2009, la SAS Rivoli Cambon, appelante, demande à la cour d'infirmer le jugement, d'annuler le contrat au regard de l'article 20 de la loi du 29.01.1993, - subsidiairement, au visa des articles 1184 et 1993 du Code civil et 23 de la loi précitée, prononcer la résolution du contrat - de débouter la SARL S. Communications de toutes ses demandes, de condamner cette dernière à lui rembourser la somme de 7 066,40 euro versée dans le cadre de l'exécution de ce contrat outre les intérêts au taux légal à compter des dites conclusions, très subsidiairement, au visa des articles 1134 et 2004 du Code civil, condamner la SARL S. Communications à lui payer la somme de 28 574,40 euro à titre de dommages et intérêts, en tout état de cause, condamner la SARL S. Communications à lui payer la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à régler les dépens.

Par dernières conclusions du 22.06.2010, la SARL S. Communications, intimée, demande la confirmation du jugement et la condamnation de la SAS Rivoli Cambon à lui payer la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à régler les entiers dépens.

SUR CE

Considérant que pour critiquer le jugement sur les condamnations prononcées contre elle, la SAS Rivoli Cambon prétend que :

- les dispositions de l'article 20 de la loi du 29.01.1993 dite Sapin, portant que tout achat d'espace publicitaire ou prestation d'édition et de distribution d'imprimés publicitaires ne peut être réalisé par un intermédiaire que pour le compte d'un annonceur dans le cadre d'un contrat de mandat, sont d'ordre public,

- l'affichage relève de cette loi d'autant plus que la SARL S. Communications s'est prévalue d'une régie publicitaire exclusive en sorte qu'en cette qualité, elle a vendu un espace publicitaire et que la SAS Rivoli Cambon a régularisé un ordre de publicité et non un contrat de location allégué seulement pour les besoins de la cause,

- il s'ensuit que le contrat ne peut qu'être annulé avec restitution corrélative par la SARL S. Communications de la somme de 7 066,40 euro perçue au titre de l'exécution du contrat,

- subsidiairement, elle est fondée à obtenir la résolution du contrat tant par application de l'article 1993 du Code civil que de la loi précitée imposant à la SARL S. Communications de rendre compte de sa gestion alors qu'elle n'a assuré aucune prestation autre que l'émission de factures et n'a pas informé sa cliente de la fermeture de la samaritaine et recueilli son avis sur une éventuelle modification de la publicité, ce qui justifie la résolution du contrat avec restitution corrélative de la somme précitée,

- très subsidiairement, elle est encore fondée à rechercher la responsabilité de la SARL S. Communications au titre du manquement à son obligation de conseil et de bonne foi, en stipulant un préavis de dénonciation trois mois avant l'échéance annuelle alors que par l'application de l'article 2004 du Code civil, aucun délai de préavis ne s'imposait à elle, le préjudice étant constitué par la perte de chance de pouvoir résilier le contrat à tout moment, laquelle est évaluée à la somme de 28 574,40 euro correspondant aux prestations postérieures à la première année d'exécution du contrat étant observé que la première année a été dûment payée par elle ;

Considérant que la SARL S. Communications réplique que :

- la loi du 20.01.1993 ne s'applique pas à l'affichage publicitaire ainsi qu'il ressort des travaux préparatoires de cette loi et que l'indique clairement la circulaire d'application du 19.09.1994 qui précise que en sont exclus les affiches tandis qu'elle n'est jamais intervenue comme intermédiaire au sens de l'article 20 de cette loi,

- vainement, la société Rivoli Cambon excipe de l'objet social de la société S. Communications puisque la régie publicitaire tend précisément à prendre des emplacements en concession pour en assurer la location,

- tout aussi vainement, la société Rivoli Cambon prétend qu'elle n'a pas donné son accord sur le bon à tirer et qu'il ne serait pas démontré que les affiches n'ont pas été posées puisque le bon à tirer a été signé par elle et que les premières factures ont été payées,

- sa créance est certaine, liquide et exigible,

- l'argumentation tirée d'une perte de chance pour ne pas avoir été informée de la faculté de résilier le contrat à tout moment est dénuée de portée en présence d'un contrat à durée déterminée,

- l'exécution du contrat de location par la SARL S. Communications n'a jamais été contestée tandis qu'elle a été partiellement été réglée,

- elle est donc fondée dans sa demande en paiement ;

Considérant que la loi du 20.01.1993 et notamment son article 20 portant l'exigence d'un contrat de mandat écrit ne s'applique qu'à l'intermédiaire qui procède à l'achat d'un espace publicitaire ou à l'exécution d'une prestation d'édition ou de distribution d'imprimés sur un support pour le compte d'un annonceur ;

Considérant qu'il est manifeste que tel n'est pas le cas, en l'espèce, puisque si le document contractuel est intitulé ordre de publicité, il s'évince de ses stipulations que celui-ci ne se rapportait qu'à la location de panneaux publicitaires qui lui avaient été concédés à une société pour qu'elle y appose ses propres affiches en sorte que la SARL S. Communications n'est pas intervenue comme un intermédiaire pour le compte d'un annonceur mais pour son propre compte, ce qui est exclusif d'une relation d'entremise tandis que la prestation qui consiste à la pose d'affiches sur un panneau loué ne s'analyse ni en un achat d'espace publicitaire ni en une prestation d'édition et de distribution d'imprimés publicitaires ;

Considérant qu'il n'y a donc lieu à annulation du contrat dont il convient d'observer la première année qui constituait le terme initial ;

Considérant que, vainement, la SAS Rivoli Cambon excipe de la résolution du contrat pour inexécution par la SARL S. Communications puisque cette dernière n'avait pas d'autres obligations que de mettre à disposition les panneaux d'affichages loués et de réaliser les affiches, qu'il n'est pas utilement contredit que tel a été le cas étant observé que les affiches en cause ont fait l'objet d'un bon à tirer signé de la SAS Rivoli Cambon et que les factures de la première année portant mise en place des panneaux et réalisation d'un visuel et donc de l'affiche ont été payées, que si la fermeture de la samaritaine, le 15.06.2005, a pu entraîner une baisse de fréquentation du parking où se trouvaient les panneaux d'affichage, il n'en est pas pour autant justifié, qu'à la date de cette fermeture, le contrat s'était déjà renouvelé faute de dénonciation pour une nouvelle année déjà entièrement écoulée, sans que la SAS Rivoli Cambon ne s'acquitte des factures correspondantes ;

Considérant qu'est encore dénuée de portée l'argumentation tirée d'une perte de chance pour n'avoir pas été informée de la faculté de dénoncer le contrat à tout moment dès lors, d'une part, que si à l'issue du terme initial, le contrat à durée déterminée qui s'est renouvelé par tacite reconduction s'analyse du point de vue de sa résiliation en un contrat à durée indéterminée en sorte que la résiliation peut intervenir sans motif, elle ne doit pas pour autant être fautive ce qui implique le respect d'un préavis d'une durée suffisante, d'autre part, que s'agissant de deux sociétés commerciales à même d'appréhender les obligations découlant d' un contrat usuel entrant dans le cadre de leur activité normale aucune et notamment le loueur n'était débitrice d'une quelconque obligation d'information sur les conditions d'une résiliation ;

Considérant que la SAS Rivoli Cambon ne discutant pas autrement le montant de la condamnation prononcée contre elle, sur la base des factures produites et précédemment rappelées, le jugement est confirmé de ce chef ;

Considérant que l'équité commande de condamner la SAS Rivoli Cambon à payer à la SARL S. Communications une somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, le jugement étant confirmé sur l'application de cet article ;

Considérant que la SAS Rivoli Cambon est condamnée aux dépens d'appel, le jugement étant confirmé en ses dispositions relatives aux dépens ;

Par ces motifs : Confirme le jugement ; Y ajoutant, Condamne la SAS Rivoli Cambon à payer la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à la SARL S. Communications ; Condamne la SAS Rivoli Cambon aux dépens d'appel ; Admet M° Teytaud au bénéfice de l'article 699 du Code de procédure civile.