CA Limoges, ch. civ., 13 septembre 2011, n° 10-00816
LIMOGES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Metrobus Publicité (SA)
Défendeur :
Comité Régional de Tourisme du Limousin
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
M. Dubois
Conseillers :
MM. Baluze, Soury
Avoués :
SCP Chabaud Durand Marquet, Me Garnerie
Avocats :
Mes Sautelet, Dancie
Faits et procédure
Soutenant avoir conclu, le 23 novembre 2007, un contrat de réservation d'emplacements publicitaires avec le comité régional de tourisme du Limousin (CRTL) par l'intermédiaire du mandataire de ce comité, l'agence MCV communication (l'agence MCV), la société Metrobus publicité (la société Metrobus), qui exploite des espaces publicitaires sur différents réseaux de transport en commun, a assigné celui-ci devant le tribunal de grande instance de Limoges en paiement de sommes au titre de la réservation d'emplacements publicitaires.
Par jugement du 6 mai 2010, le tribunal de grande instance a débouté la société Metrobus de son action après avoir retenu que le CRTL n'était pas valablement engagé par le contrat du 23 novembre 2007.
La société Metrobus a relevé appel de ce jugement.
Moyens et prétentions
La société Metrobus conclut à la condamnation du CRTL à lui payer la somme de 19 778,44 euro en principal, outre les intérêts, au titre de la facture de réservation des emplacements publicitaires et la somme de 4 944,61 euro au titre de la clause pénale. Elle expose que le non-respect par l'agence MCV des limites du mandat qui lui a été donné par le CRTL n'engage que la responsabilité de cette agence et ne permet pas au CRTL de se libérer de ses obligations à son égard.
Le CRTL conclut à la confirmation du jugement en faisant valoir qu'il n'a conclu aucun contrat avec la société Metrobus et qu'il n'existe aucun mandat autorisant l'agence MCV à conclure en son nom et pour son compte un contrat avec cette société. Subsidiairement, il expose qu'il ne peut être valablement engagé à l'égard de la société Metrobus en l'état du non-respect par l'agence MCV des limites de son mandat et il réclame des dommages-intérêts pour procédure abusive. Très subsidiairement, il réclame des dommages-intérêts d'un montant équivalent à sa dette en soutenant que la société Metrobus a engagé sa responsabilité en n'exécutant pas les prestations lui incombant ainsi que la réduction de l'indemnité due au titre de la clause pénale.
Motifs
Attendu que l'article 20 de la loi n° 93-22 du 29 janvier 1993 dispose que tout achat d'espace publicitaire ne peut être réalisé par un intermédiaire que pour le compte d'un annonceur et dans le cadre d'un contrat écrit de mandat ; qu'en l'occurrence, le CRTL conteste avoir donné un tel mandat à l'agence MCV.
Attendu qu'aux termes d'une convention signée le 1er septembre 2005, le CRTL a chargé l'agence MCV de sa communication extérieure pour une durée de trois ans expirant le 31 août 2008 ; que cette agence a ainsi reçu la mission de promouvoir l'image touristique et la notoriété de la région Limousin ; qu'à cette fin, l'agence MCV devait notamment définir et proposer une stratégie annuelle de communication ainsi que le budget correspondant, avec possibilité de faire appel à des prestataires externes ou des sous-traitants, les prestations proposées devant faire l'objet d'un devis soumis au CRTL ; que la convention précise que le CRTL réglera directement "les achats d'espaces publicitaires négociés par MCV"; que cette formulation caractérise l'existence d'un mandat donné par le CRTL à l'agence MCV pour négocier en son nom l'achat d'espaces publicitaires.
Attendu que se présentant en qualité de mandataire du CRTL dans le cadre du mandat précité, l'agence MCV a signé avec la société Metrobus un contrat daté du 23 novembre 2007 aux termes duquel elle a acquis huit emplacements publicitaires dans le métro parisien pour les semaines du 19 février au 3 mars 2008 pour un prix global de 19 455,49 euro HT.
Attendu que la campagne publicitaire objet du contrat du 23 novembre 2007 n'a pas été finalisée, le CRTL n'ayant pas fait parvenir les affiches devant être apposées sur les emplacements réservés ; que pour s'opposer à la demande en paiement du prix des emplacements publicitaires et de la clause pénale contractuelle, le CRTL soutient ne pas être tenu par le contrat du 23 novembre 2007.
Attendu que les conditions générales de ce contrat, après avoir défini le "régisseur" comme le vendeur d'espaces publicitaires (en l'occurrence la société Metrobus) et le "preneur" comme l'annonceur (en l'occurrence le CRTL) ou le mandataire de celui-ci (l'agence MCV), stipulent en leur article 2 relatif à la "prise d'ordre" que: "Au vu des informations fournies par le preneur, le régisseur établit l'ordre de publicité en deux exemplaires qu'il transmet au preneur pour confirmation. Il est établi un ordre de publicité par marque à promouvoir. Après les avoir approuvés et signés, le preneur retourne pour signature par le régisseur les deux exemplaires de son ordre de publicité au plus tard huit jours après réception, accompagnés, le cas échéant, d'une notification de mandat dûment remplie et signée par le preneur, au plus tard trois semaines avant la date d'affichage prévue. S'il est notifié un mandat, celui-ci doit notamment préciser que les tarifs et les présentes conditions générales de vente ont été portées à la connaissance du preneur et que celui-ci déclare les accepter sans réserves"; que ce même article précise que "le régisseur ne sera en aucun cas tenu d'exécuter (...) les ordres de publicité passés par un mandataire dont le mandat n'aura pas été justifié".
Attendu, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal de grande instance, qu'il résulte de cet article 2 des conditions générales du contrat que lorsque le preneur est représenté par un mandataire - comme c'est le cas en l'espèce - , la notification du mandat au régisseur s'impose et que ce mandat doit comporter l'accord express du preneur sur les tarifs appliqués et les conditions générales de vente ; qu'en effet, la réserve résultant des termes "le cas échéant" n'a pas pour effet de rendre cette notification facultative mais signifie seulement que cette formalité ne concerne que l'hypothèse où le preneur est représenté par un mandataire.
Attendu que seule cette notification du mandat donné par le CRTL accompagné de son accord sur le prix et les conditions de vente était de nature à engager celui-ci à l'égard de la société Metrobus, laquelle, en vertu de ses conditions générales de vente, pouvait se dégager de ses obligations si cette formalité n'était pas accomplie.
Attendu que la société Metrobus ne rapporte pas la preuve de l'accomplissement de cette formalité de notification du mandat, ni de l'accord du CRTL sur le prix et les conditions d'achat des emplacements publicitaires négociés par l'agence MCV, alors même que cette agence s'était présentée à elle en qualité de mandataire du CRTL lors de la signature du contrat du 23 novembre 2007 ; qu'en l'état de cette situation, le CRTL est fondé à opposer à la société Metrobus l'article 2 de ses propres conditions générales de vente pour soutenir ne pas être valablement engagé à son égard ; que, par ces motifs substitués à ceux des premiers juges, le jugement rejetant les demande en paiement de la société Metrobus sera confirmé.
Par ces motifs : LA COUR, Statuant par décision contradictoire, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Confirme le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Limoges le 6 mai 2010 ; Condamne la société Metrobus à payer au comité régional de tourisme du Limousin une somme de 1 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne la société Metrobus aux dépens et accorde à Me Garnerie, avoué, le bénéfice de l'article 699 du Code de procédure civile.