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Décisions

CA Versailles, 3e ch., 29 mars 2007, n° 06-00940

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

UFC Que Choisir

Défendeur :

Harry's France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bourquard

Conseillers :

M. Regimbeau, Mme Calot

Avoués :

SCP Tuset-Chouteau, Me Binoche

Avocats :

Mes Frank, Brasier Porterie

TGI Nanterre, 6e ch., du 16 déc. 2005

16 décembre 2005

FAITS ET PROCEDURE

Se prévalant de ce que la publicité diffusée par la SAS Harry's France, pour ses brioches Doo Wap destinées aux enfants faisait état de qualités nutritionnelles que ce produit ne possédait pas, l'association UFC Que Choisir a, par acte du 4 juin 2004, assigné cette société devant le Tribunal de grande instance de Nanterre afin d'obtenir sa condamnation sous astreinte de 1 500 euro par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de la signification du jugement, à cesser cette publicité, la publication d'un extrait de ce jugement dans trois quotidiens nationaux et la condamnation de la SAS Harry's France à lui payer 30 000 euro à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice causé à la collectivité des consommateurs outre 3 500 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par jugement rendu le 16 décembre 2005, le tribunal a débouté l'association Union fédérale des consommateurs Que Choisir de ses demandes et l'a condamnée à verser à la SAS Harry's France une indemnité de 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Appelante de cette décision, l'association UFC Que Choisir conclut en sa réformation sauf en ce qu'elle a retenu que les allégations litigieuses sont exclues du domaine de la gourmandise et en ce qu'elle a débouté la société Harry's France de sa demande reconventionnelle et elle demande, au visa des articles L. 421-1, L. 421-9, L. 121-1 du Code de la consommation et 1382 du Code civil, de :

- dire que les allégations figurant dans la publicité diffusée par la société Harry's France sur l'emballage des brioches " Doo Wap pépites de chocolat " (mai 2004, janvier 2005 et février 2005) qu'elle commercialise sont de nature à induire en erreur le consommateur sur la composition du produit, ses qualités substantielles et les résultats qui pourraient en être attendus,

- ordonner la cessation de ces allégations publicitaires sous astreinte de 1 500 euro par jour de retard à l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la décision à intervenir,

- ordonner la diffusion d'un extrait de la décision à intervenir aux frais de la société Harry's dans trois quotidiens nationaux au choix de l'UFC Que Choisir et dont le coût unitaire ne pourra être inférieur à 10 000 euro chacun,

- condamner la SAS Harry's France à lui payer 30 000 euro à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice causé à la collectivité des consommateurs, outre 3 500 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, l'appelante fait essentiellement valoir qu'elle est recevable à agir en ce qui concerne les allégations transcrites sur les emballages datant de mai 2005 dès lors que sa demande à ce titre tend aux mêmes fins que celles soumises au premier juge ; qu'elle estime qu'au regard des article R. 112-7 et L. 121-1 du Code de la consommation et de la jurisprudence, les allégations contenues sur les emballages version 2004, janvier 2005 et diffusés à partir de février 2005 sont de nature à induire en erreur les consommateurs sur les qualités nutritionnelles du produit promu ;

Qu'elle fait valoir que dès lors que le message publicitaire comporte des allégations nutritionnelles consistant à mette en relation la consommation du produit avec un effet bénéfique pour la santé, il ne peut être considéré comme étant du domaine strict de la gourmandise ;

Qu'elle souligne l'inadéquation entre le message diffusé et la qualité nutritionnelle du produit et estime que le caractère du message est mensonger, au regard de la mention " le bon goûter " compte tenu de la densité énergétique excessive du produit (367 calories au 100 grammes) et de l'allégation selon laquelle le produit aiderait le enfants à grandir en douceur, alors que selon l'avis du docteur Frelut, médecin nutritionniste, la consommation du produit ne peut améliorer l'équilibre alimentaire d'un enfant puisque les glucides dont la qualité serait discutable, sont indissociables, de par la recette, des matières grasses ;

Qu'elle soutient que l'allégation mettant exagérément l'accent sur l'équilibre nutritionnel du produit est trompeuse puisqu'elle fait croire au consommateur que celui-ci possède des qualités particulières alors que tous les produits semblables possèdent les même qualités ; qu'au vu de la proportion de lipides qui se situe dans une fourchette usuelle pour ce genre de produit, selon l'analyse du docteur Frelut, elle fait valoir qu'il est particulièrement trompeur de le présenter comme nutritionnellement bénéfique pour les enfants ; qu'elle affirme, s'agissant de l'emballage version janvier 2005 et postérieur à février 2005, que les mentions relatives aux céréales ne peuvent que conforter le consommateur dans sa croyance à l'équilibre nutritionnel satisfait du produit, qualité substantielle qui lui fait défaut ;

Qu'elle critique l'allégation relative à la présence de lait qui laisse croire faussement que ces brioches sont préparées avec du lait fait et vise à créer un amalgame entre deux produits aux qualités nutritionnelles totalement distinctes ; qu'elle reproche à l'indication " riche en blé " (emballage diffusé depuis février 2005) de ne pas être en conformité avec l'article R. 112-7 du Code de la consommation ;

Qu'elle stigmatise l'inopportunité des mentions relatives aux vitamines B 12 et E en ce qu'elles laissent faussement penser qu'il existerait des carences de ces deux nutriments dans l'alimentation des enfants et encouragent donc la consommation alors qu'il n'est pas fait état de carences de ceux-ci dans l'alimentation des enfants ; que s'agissant de l'allégation relative à la présence de protéines, elle estime notamment que la deuxième place dans la présentation en colonne de l'étiquette valorise un ingrédient en réalité surévalué et de peu d'intérêt pour ce produit ;

Qu'elle soutient que les demandes reconventionnelles de l'intimée sont irrecevables et infondées eu égard au droit de critique inhérent à son rôle de contre-pouvoir en tant qu'association représentant les consommateurs ;

La SAS Harry's France conclut à la confirmation du jugement sauf en ce qu'il a rejeté sa demande reconventionnelle et elle demande, au visa des articles 122 et 564 du NCP, L. 121-1 et R. 122-7 du Code de la consommation, 1382 et suivants du Code civil, du décret n° 93-1130 du 27 septembre 1993 et de l'arrêté du 3 décembre 1993, de :

- déclarer l'UFC Que Choisir [sic] à former une prétention nouvelle au titre des emballages du mois de mai 2005 et la débouter de l'ensemble de ses demandes formées à ce titre,

- constater que l'UFC Que Choisir a manqué à son devoir de prudence et la plus élémentaire en diffusant des propos de nature à dénigrer la marque Doo Wap et l'image de sa société et qu'elle a porté atteinte à la marque Doo Wap,

- condamner l'association UFC Que Choisir à l'indemniser et à lui verser à titre symbolique la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'elle lui a causé et ordonner la publication de la décision à intervenir dans 3 journaux quotidiens nationaux au choix de la société et au frais de l'UFC Que Choisir dont le coût unitaire ne pourra être inférieur à 10 000 euro, ainsi que dans la revue Que Choisir,

- débouter l'UFC Que Choisir de l'ensemble de ses prétentions,

- condamner l'UFC Que Choisir à lui payer 10 000 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

La SAS Harry's France estime que dès lors que l'appelante a eu connaissance des emballages commercialisés en mai 2005 pour les avoir elle-même communiqués en cours de procédure et qu'elle n'a formé aucune demande à ce titre, elle est irrecevable à présenter pour la première fois en cause d'appel une demande à ce titre et ce d'autant qu'il s'agit d'emballages très différents qui doivent être étudiés séparément.

Elle fait valoir que les documents sur lesquels s'appuie l'appelante ne permettent pas, notamment l'analyse du docteur Frelut, d'identifier l'emballage concerné, sont d'ordre médical et subjectifs et ne tiennent pas compte du caractère publicitaire du message.

Elle se réfère à la jurisprudence pour rappeler que le message publicitaire doit être appréhendé au travers de sa lecture globale et non au travers de morceaux de phrases pris isolément. Elle estime que la preuve de l'élément matériel de la publicité trompeuse n'est pas rapportée, au vu de la présentation visuelle recto et verso de l'emballage et de la nature du message publicitaire délivré ; elle affirme que ce message vise à présenter au consommateur un produit savoureux pour le goûter à base d'ingrédients qui sont mis en valeur sur l'emballage pour des raisons objectives, que les nutriments valorisés dans celui-ci existent réellement et satisfont aux seuils recommandés par les organismes sanitaires et l'administration pour exclure toute publicité trompeuse et que le message met en avant, en premier lieu la gourmandise, qu'il est sur ce dernier point, conforme à la charte de déontologie du bureau de vérification de la publicité.

Elle réfute l'allégation trompeuse en ce qui concerne la référence au lait en soulignant que les brioches n'en contiennent habituellement pas et que la signalisation de la présence de ce produit par un bidon ne saurait être assimilée par le consommateur actuel à la présence de lait frais.

Elle estime que les mentions relatives à la présence de vitamines B 12 et E, autorisées par le décret 93-1130 du 27 septembre 1993, sont parfaitement, ainsi qu'elle le démontre, exactes et non constitutives de publicité trompeuse.

S'agissant de la densité énergétique du produit, elle observe que dès lors que celui-ci est exactement mentionné sur l'emballage du produit, cette mention ne saurait être considérée comme trompeuse ; en ce qui concerne la mention relative aux protéines, elle estime que celle-ci est conforme à la réglementation actuelle et que le reproche qui lui est fait à ce sujet par l'appelante procède d'une représentation tronquée de l'emballage.

A titre subsidiaire, sur l'emballage de mai 2005, elle observe que la mention " riche en blé " ne fait pas partie des mentions soumises à restriction, que le produit mis en cause contenant plus de 43 % de blé et se situant au-dessus des seuils garantis, la mention n'est pas trompeuse.

Elle se fonde sur les contrôles réguliers dont elle est l'objet pour dénier tout élément intentionnel et, sur l'absence de preuve de préjudice rapportée par l'appelante pour estimer qu'elle ne peut prétendre à des dommages et intérêts, enfin, sur la modification des emballages incriminés pour souligner l'inopportunité d'ordonner la cessation des agissements prétendument illicites qui lui sont reprochés.

Elle estime que le renfort de publicité donné à l'action de l'UFC Que Choisir lui a causé un préjudice et a porté atteinte à son image commerciale.

MOTIFS ET DECISION

- Sur la recevabilité de la demande relative à la critique d'emballage de produits commercialisés en mai 2005

Considérant qu'il est établi que devant le premier juges, l'association UFC Que Choisir a intenté une action en responsabilité à l'encontre de la SAS Harry's France pour publicité mensongère portant sur un emballage de brioches Doo Wap aux pépites de chocolat au lait, commercialisé en juin 2004 ; qu'en cours de procédure, elle a étendu ses griefs à des emballages du même produit modifiés et commercialisés en février 2005 ; qu'il n'est pas contesté que la demanderesse a versé aux débats dans le cadre de cette instance, un emballage modifié de ce même produit et commercialisé à partir de mai 2005, qu'elle n'a formé aucune demande concernant spécifiquement ce dernier emballage ainsi que cela ressort des pages 6 et 8 la décision soumise à la cour rappelant ses prétentions ; que l'appelante ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 565 du nouveau Code de procédure civile pour justifier de la recevabilité de sa demande dès lors que cette demande porte sur un emballage présentant des caractéristiques différentes, qu'il convient en conséquence, de déclarer irrecevable, par application de l'article 564 du nouveau Code de procédure civile, la demande qu'elle forme pour la première fois en cause d'appel au titre de l'emballage commercialisé en mai 2005 ;

- Sur le fond du litige

Considérant que l'article L. 121-1 du Code de la consommation interdit toute publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations fausses ou de nature à induire en erreur lorsque celles-ci portent sur un ou plusieurs éléments ci-après : existence, nature, composition ou qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce, origine, quantité mode de fabrication, propriétés, prix et conditions de vente du bien " qui font l'objet de la publicité, conditions de leur utilisation, résultats qui peuvent être attendus de leur utilisation " ;

Qu'aux termes de l'article R. 112-7 du même Code, " l'étiquetage et les modalités selon lesquelles il est réalisé ne doivent pas être de nature à créer une confusion dans l'esprit de l'acheteur ou du consommateur, notamment sur les caractéristiques de la denrée alimentaire et plus particulièrement sur la nature, l'identité, les qualités, la composition, la quantité, la durabilité, la conservation, l'origine ou la provenance, le mode de fabrication ou d'obtention. L'étiquetage ne doit comporter aucune mention tendant à faire croire que la denrée alimentaire possède des caractéristiques particulières alors que toutes les autres denrées alimentaires similaires possèdent les mêmes caractéristiques.

Sous réserve des dispositions applicables aux denrées destinées à une alimentation particulière, l'étiquetage d'une denrée alimentaire ne doit pas faire état de propriétés de prévention, de traitement ou de guérison d'une maladie humaine ni évoquer ces propriétés. Les interdictions ou restrictions prévues ci-dessus s'appliquent également à la présentation des denrées alimentaires, notamment à la forme ou à l'aspect donné à celle-ci par leur emballage. " ;

Considérant que l'action fondée sur des agissements de publicité mensongère ou trompeuse devant le juge civil relève des dispositions de l'article 1382 du Code civil ;

Considérant qu'il appartient à la juridiction saisie de prendre en compte le message publicitaire figurant sur le ou les emballages incriminés dans sa lecture globale et de vérifier si les éléments qui y sont contenus ne créent pas une ambiguïté sur la nature exacte du produit commercialisé susceptible d'entraîner en associant les différentes mentions relatives à ses propriétés et caractéristiques, une confusion dans l'esprit d'un consommateur " moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé " ;

Considérant qu'en l'espèce, l'emballage des brioches Doo Wap se présentait de la façon suivante :

S'agissant des emballages commercialisés en juin 2004

* au recto

* au verso

- s'agissant de l'emballage commercialisé à compter du 16 août 2004 et jusqu'en février 2005 * au recto * au verso

Considérant que les mentions " brioches moelleuses ", " mangez du moelleux, ça ira mieux ", " Doo Wap, c'est aussi la gourmandise de délicieuses pépites fondantes de chocolat au lait dans une petite brioche moelleuse et savoureuse " se réfèrent aux qualités gustatives du produit et à son mode agréable de consommation qu'il vante, afin de susciter l'envie de le consommer, message propre à toute publicité ne révélant en soi aucun message à caractère trompeur ;

Que ce message met également l'accent, en face de chaque valeur nutritionnelle moyenne pour une brioche, sur des mentions attractives telles que notamment, " lipides 15 g : donne l'énergie nécessaire pour l'exercice prolongé ", " vitamines E 3,8 mg : pour la protection des cellules ", " vitamines B 12 - 0,20 g : nécessaire à la formation des protéines qui entrent dans la composition des muscles ", " protéines 8 g : participe à la construction de votre organisme " ; que ces mentions relèvent d'allégations nutritionnelles fonctionnelles décrivant le rôle des éléments nutritifs dans les fonctions normales de l'organisme dès lors qu'elles ont pour objet d'informer le consommateur sur le rôle physiologique d'un nutriment ou d'une substance contenue dans une denrée alimentaire lorsque ces éléments disposent d'un apport quotidien recommandé ou d'un rôle fondé scientifiquement et admis par les recommandations diététiques généralement reconnues comme scientifiquement établies ;

Qu'il appartient à l'appelante de démontrer que ces mentions ne sont pas conformes au décret du 27 septembre 1993 relatif aux qualités nutritionnelles alimentaires et sont notamment fausses en attribuant au produit une composition différente de sa composition véritable ou de nature à induire en erreur le consommateur normalement avisé ;

Que le caractère trompeur de ces mentions doit être également apprécié au regard de l'avis émis par la Cedap publié au BOCCRF du 7 octobre 1997 ; que les allégations doivent être notamment justifiées par la garantie en quantités significatives des substances pour lesquels un effet est revendiqué, qu'elles ne doivent pas être susceptibles de dénigrer l'alimentation ou d'autres denrées alimentaires analogues ou non par comparaison et ne pas laisser entendre qu'une alimentation équilibrée normale ne peut fournir tous les éléments nutritifs en quantité suffisante ;

Considérant qu'à juste titre le premier juge a relevé que le document produit par l'association UFC Que Choisir ne permettait pas de rapporter la preuve scientifique de ses affirmations sur la qualité relative des ingrédients composant le produit litigieux, ses critiques s'appuyant sur un document non signé dont on ne connaissait ni l'origine ni l'auteur et qui comportait le nom "d'essai comparatif" sans opérer la moindre comparaison avec d'autres produits ;

Qu'en cause d'appel, l'association UFC Que Choisir se fonde sur un document non daté, signé du docteur Marie Laure Frelut, pédiatre, intitulé Doo Wap brioches aux pépites de chocolat au lait comportant deux titres, 1 : Analyse des données présentées sur un emballage " Doo Wap, 8 brioches moelleuses pépites de chocolat au lait " de la marque " Harry's " faite le 26 février 2006, 2 : données d'analyse biochimique fournies par l'UFC sur les lots GH M3-1 et GH4 M3-2 ;

Que cette note conclut, " Au total, la brioche Doo Wap est un aliment gras et riche en glucide. Sa consommation ne peut améliorer l'équilibre alimentaire d'un enfant puisque les glucides, dont la qualité serait discutable, sont indissociables de par leur recette, des matières grasses. L'ajout du lait, faible en réalité, ne modifie pas de façon substantielle les propriétés de cet aliment. L'étiquetage et la présentation de l'emballage sont à de nombreux égards faux ou susceptibles d'induire en erreur le consommateur " ;

Considérant que la SAS Harry's France relève que cette note repose sur la comparaison des résultats des analyses effectuées par le laboratoire Eurofins le 22 février 2006 avec des emballages qui ne sont pas identifiés et ne peuvent pas être contemporains des emballages critiqués ;

Considérant que les commentaires du docteur Frelut ne mettent en évidence aucune inexactitude sur la composition du produit telle qu'elle résulte des mentions figurant sur l'emballage par rapport aux analyses effectuées par le laboratoire Eurofins ; qu'ils reposent donc sur une critique d'ordre médical et personnel ;

Qu'en ce qui concerne les mentions incriminées relatives au lait " parce que le lait est indispensable à la croissance de vos enfants et qu'il contribue à leur équilibre alimentaire, les brioches Doo Wap " sont riches en lait pour les aider à grandir en douceur ", conforté par le dessin apparent d'un bidon de lait, qui, selon l'appelante, laisserait faussement croire à la présence de lait frais et serait de nature à créer un amalgame entre deux aliments aux propriétés nutritionnelles totalement distinctes ;

Qu'il convient d'estimer qu'il ne saurait y avoir, du fait de la seule représentation au verso de l'emballage d'un bidon de lait, au demeurant de petite taille, confusion dans l'esprit du consommateur avec la présence de lait frais dans les brioches dès lors que le consommateur dont la décision d'acheter est déterminée par la composition du produit qu'il se propose d'acquérir, lit d'abord la liste des ingrédients dont la mention est obligatoire ; que ces mentions font état de la présence d'un pourcentage de 20 % de lait reconstitué, pourcentage important ; qu'il ne saurait être contesté que le lait n'entre habituellement pas dans la recette de brioche ; qu'il s'ensuit que la mention relative au lait est bien significative de l'élément nutritif en question et ne saurait être considérée comme trompeuse ;

Qu'enfin, le même consommateur " moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé " ne peut raisonnablement faire l'amalgame et opérer une confusion entre les qualités nutritionnelles spécifiques au lait et assimiler celles-ci à des brioches qui contiennent ce nutriment ; que ce grief n'est pas fondé ;

Considérant que les mentions relatives à la présence de vitamines B 12 " source de vitamines B 12 " et E " riche en vitamines E ", sont conformes aux articles 4 et 9 du décret du 29 septembre 1993 ; que l'exactitude de leur quantité est justifiée par un contrôle ; que les qualificatifs employés ne sont pas trompeurs dès lors que la proportion de ces vitamines est conforme à l'avis de la Commission interministérielle d'étude de produits destinés à une alimentation particulière (Cedap 8 juillet 1998 BOCCRF du 31 août 1999) ; que l'appelante ne justifie nullement en quoi, la référence à ces mentions, exactes et réglementairement admises, serait de nature à laisser faussement penser au consommateur " moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé " qu'il existerait des carences de ces deux nutriments dans l'alimentation des enfants et encouragerait leur consommation alors qu'il n'est fait état de carences de ces deux nutriments chez les enfants ;

Considérant que l'appelante se fonde sur l'avis du docteur Frelut pour critiquer l'allégation relative aux protéines " participe à la construction des os (mai 2004), de ton organisme (janvier 2005) " selon laquelle ce pédiatre considère que " la quantité par brioche correspond aux apports recommandés pour un nourrisson de 3 kg, la quantité des protéines est inconnue et on ne peut spéculer sur leur origine lactée ; les apports protidiques pour enfants sont très largement couverts ; un produit de la catégorie des brioches n'a pas vocation à rechercher un accroissement de cet apport ; la deuxième place dans la présentation en colonne de l'étiquette valorise un ingrédient surévalué et de peu d'intérêt dans le cas de ce produit " ;

Considérant qu'il ne saurait être contesté que l'emballage mentionne la teneur exacte et contrôlée de protéines contenues dans les brioches pour 100 gr et par brioche, que la référence aux termes " participe à la construction des os (mai 2004), de ton organisme (janvier 2005) ", concernant le rôle de ce constituant considéré habituellement comme ayant un rôle dans l'apport énergétique et la croissance des enfants ne peut être qualifiée de comme trompeuse du seul fait de l'affirmation non objectivement étayée de Mme Frelut, de ce que sa quantité par brioche correspondrait à l'alimentation d'un nourrisson et de ce que la place faite à cette référence serait, selon ce pédiatre, surévaluée ;

Considérant que l'appelante reproche également à la brioche incriminée sa trop forte densité énergétique et son pourcentage élevé de lipides en estimant qu'il est particulièrement trompeur de présenter ce produit comme " bon goûter " nutritionnellement bénéfique pour les enfants ; que l'examen du message publicitaire dans son ensemble permet de rattacher sans conteste le qualificatif de bon goûter aux qualités gustatives et au bon goût de celui-ci et non à ses vertus nutritionnelles ; que sa valeur calorique est exactement et clairement indiquée ; que le consommateur en est loyalement avisé et ne peut se méprendre sur la densité énergétique de ce produit ;

Considérant que l'association UFC Que Choisir, qui ne rapporte pas la preuve que les allégations contenues sur les emballages qu'elle critique soient fausses ou de nature à induire en erreur, doit en conséquence être déboutée de l'ensemble de ses prétentions ;

Considérant que la SAS Harry's France ne démontre pas que l'action introduite par l'association UFC Que Choisir, qui a exercé son droit de critique inhérent à son rôle de défense des consommateurs et de " contre-pouvoir " soit constitutif d'un abus de droit ou fautif à son encontre, qu'elle ne justifie pas avoir subi un préjudice spécifiquement lié à la publicité donnée à cette action et doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;

Considérant que l'équité commande d'allouer à la SAS Harry's France une indemnité complémentaire de 5 000 euro en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, que l'appelante qui succombe dans ses prétentions doit supporter les entiers dépens ;

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ; Confirme le jugement rendu le 16 décembre 2005 par le Tribunal de grande instance de Nanterre ; Y ajoutant, condamne l'association UFC Que Choisir à payer à la SAS Harry's France une indemnité de 5 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Rejette toutes autres prétentions des parties ; Condamne l'association UFC Que Choisir aux entiers dépens et autorise Maître Binoche, avoué à les recouvrer comme il est prescrit à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.