CA Aix-en-Provence, 5e ch. corr., 3 octobre 2007, n° 2007-556
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Trille
Conseillers :
Mmes Salvan, Michel
Avocats :
Mes Eydoux, Zbrozinski-Czernecki, Pagano, Wolff
LA PREVENTION :
Attendu que X représenté par Y est prévenu :
- d'avoir à Mouans Sartoux le 26 septembre 2002, dans le ressort du Tribunal de grande instance de Grasse, et depuis temps non couvert par la prescription, effectué une publicité comportant sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications, ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur portant sur l'origine et le mode de fabrication de biens, en l'espèce de l'huile d'olive portant la mention "Moulin A" ou "Moulin B" laissant croire que l'huile est fabriquée sur place par le moulin, alors qu'il s'agit d'un produit issu de négoce en provenance d'Italie,
Faits prévus et réprimés par les articles L. 121-1, L. 121 -5, L. 213-6 al. 1, al. 2, L. 213-1 du Code des consommateurs [sic], 121-2, 131-38, 131-39 2°, 3°, 4°, 5°, 6°, 7°, 8°, 9° du Code pénal,
LE JUGEMENT :
Par jugement contradictoire à signifier en date du 7 avril 2006 et non signifié le Tribunal correctionnel de Grasse :
- sur l'action publique :
a déclaré la SARL X, représentée par Y, coupable des faits qui lui sont reprochés et l'a condamnée à une amende délictuelle de 5 000 euro.
- sur l'action civile :
a déclaré Orego, l'UFC Que Choisir, et l'UDCAM recevables en leur constitution de partie civile,
a condamné la SARL X à leur payer chacune les sommes suivantes :
- 500 euro à titre de dommages et intérêts
- 500 euro en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
LES APPELS :
La SARL X a régulièrement interjeté appel de ce jugement, en ses dispositions pénales et civiles, par déclaration au greffe du tribunal, le 21 juin 2006.
Le Ministère public a relevé appel incident, le 22 juin 2006.
DECISION :
EN LA FORME
Attendu que les appels de la prévenue et du ministère public sont recevables pour avoir été interjetés dans les formes et délais légaux ;
Attendu que la SARL X, représentée par Y, a comparu assistée de son conseil; qu'il sera statué par arrêt contradictoire à son égard ;
Attendu que les parties civiles n'ont pas comparu mais était régulièrement représentées par leur conseil ; qu'il sera statué par arrêt contradictoire à l'égard des parties civiles ;
AU FOND,
RAPPEL SUCCINCT DES FAITS :
Les agents de la Direction départementale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes ont procédé à un contrôle, dans les locaux situés [adresse] à Mouans Sartoux, de la SARL X, dont le gérant de droit est Y, fils de YY, responsable commercial et gérant de fait.
Il a été constaté que les produits stockés sur place dans des flacons et bocaux pré-emballés, avant d'être commercialisés, soit des huiles d'olive et condiments, étaient personnalisés par des étiquettes portant en gros caractères la marque "Moulin A" ou "Moulin B" suivie de l'adresse [adresse] à Mouans Sartoux, laissant à penser qu'il s'agissait de produits fabriqués ou élaborés au moulin, alors qu'il s'agit en réalité d'huiles en provenance d'Italie et en provenance de diverses régions pour les préparations.
YY a déclaré aux gendarmes que l'entreprise achetait des olives et des huiles biologiques et non biologiques, qu'elle conditionnait et vendait à divers clients de l'hexagone, qu'il s'agissait d'huiles d'olives artisanales et que les étiquettes étaient conformes car elles portaient des indications de fabrications biologiques pour des produits biologiques. Il a expliqué que la société était contrôlée par Ecocert organisme agréé à qui était fourni la facture d'achat de la matière première.
La SARL X n'a pas comparu devant le tribunal.
La SARL X a déposé des conclusions soutenant que l'infraction n'est pas constituée en son élément matériel, car aucun texte n'impose d'obligation générale d'étiquetage, ni en son élément intentionnel, puisque l'étiquette n'est pas une publicité et que rien n'interdit l'usage du terme "moulin" qui n'est pas une appellation protégée. Elle se considère de bonne foi et a fait plaider sa relaxe.
Le Ministère public requiert la confirmation de la décision déférée.
Chaque partie civile sollicite la confirmation du jugement déféré et réclame en outre la somme de 1 000 euro sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
AU FOND,
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur l'action publique :
Attendu qu'il résulte du procès-verbal de la Direction départementale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes, du 29 octobre 2002, que l'étiquetage "Moulin A" et "Moulin B" suivi de l'adresse: [adresse] à Mouans Sartoux, apposé par la SARL X sur des huiles et condiments pré-emballés en provenance d'Italie et de diverses régions, est de nature à induire en erreur le consommateur sur la provenance réelle des produits et leur fabrication ;
Qu'en effet, même si la SARL X, commercialise après les avoir étiquetés dans ses locaux des produits de qualité, issus de l'agriculture biologique certifiés par un organisme agréé, Ecocert, il demeure que la présentation de ses étiquettes laisse croire au consommateur que lesdits produits ont été fabriqués sur place, et élaborés au moulin, ce qui est mensonger puisqu'il s'agit de denrées en provenance d'Italie et de différentes régions pour les préparations ;
Attendu que sur ses étiquettes la SARL X utilise le terme "moulin" suivi de son adresse à Mouans Sartoux, en toute conscience de l'impact de ces termes évocateurs sur le consommateur qui croit acheter un produit du terroir ;
Qu'ainsi les faits reprochés à la SARL X caractérisent le délit de publicité mensongère tant dans son élément matériel qu'intentionnel ;
Attendu que les circonstances de la cause ont été exactement appréciées par le tribunal dont la décision doit être confirmée dans toutes ses dispositions, la peine prononcée assurant une répression satisfaisante et nullement excessive de l'infraction ;
Sur l'action civile,
Attendu qu'en ce qui concerne l'action civile, le tribunal a équitablement apprécié le préjudice subi par chaque partie civile ;
Que sa décision sera à cet égard également confirmée ;
Attendu que l'équité commande l'application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale en instance d'appel au bénéfice de chaque partie civile ;
Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement par arrêt contradictoire à l'égard de la SARL X, à l'égard de l'Orego, l'UFC Que Choisir et l'UDCAM, en matière correctionnelle, après en avoir délibéré conformément à la loi : En la forme, Reçoit les appels formés par la prévenue, et par le Ministère public, Au fond, Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, tant civiles que pénales. En l'absence du prévenu, le président n'a pas pu l'aviser que, s'il s'acquitte du montant de l'amende dans un délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt, ce montant sera diminué de 20 % sans que cette diminution puisse excéder 1 500 euro mais que le paiement volontaire de l'amende ne fait pas obstacle à l'exercice des voies de recours (article 707-3 du Code de procédure pénale). Y ajoutant, Condamne la SARL X à payer à l'Orego, l'UFC Que Choisir et l'UDCAM, chacune la somme de 300 euro en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de préocédure pénale. Le tout conformément aux articles visés au jugement, au présent arrêt, et aux articles 512 et suivants du Code de préocédure pénale.