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Décisions

CA Nîmes, 2e ch. civ. A, 6 décembre 2011, n° 11-00180

NÎMES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Energie Solaire Voltaigo (SARL)

Défendeur :

Puig

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Thomas

Conseillers :

Mmes Michel, Hebrard

Avocats :

SCP Marion Guizard Patricia Servais, SCP Curat Jarricot

TGI Uzès, du 2 déc. 2010

2 décembre 2010

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Selon un acte en date du 23 juillet 2009, intitulé devis n°22109, et accepté le 24 juillet 2009, Monsieur Joseph Puig a passé commande auprès de la société Energie Solaire Voltaico d'un système photovoltaïque en intégration toiture, correspondant à l'achat et à la pose de panneaux solaires, avec le bénéfice d'une garantie de rendement, au prix fixé de 19 500 euro TTC.

Un acompte d'un montant de 5.850 euro était réglé par Monsieur Puig.

Un bon de fin des travaux était signé le 27 octobre 2009 et la société E.S. Voltaico exigeait le paiement de la somme restant due soit 13 650 euro.

Monsieur Puig adressait un règlement complémentaire de 5.850 euro, le 26 novembre 2009, mais précisait à la société Voltaico que l'installation effectuée ne répondait pas à ses attentes.

Le 15 décembre 2009, la société Voltaico mettait en demeure Monsieur Puig de payer la somme de 7 800 euro.

Le 3 février 2010, le tribunal d'instance d'Uzès rendait une ordonnance d'injonction de payer à l'encontre de Monsieur Puig.

Celui-ci formait opposition à ladite ordonnance le 10 mars 2010.

Par jugement en date du 2 décembre 2010, le tribunal d'instance d'Uzès mettait à néant l'ordonnance d'injonction de payer et disait que le contrat de démarchage signé entre Monsieur Puig et la société E.S Voltaico est nul comme ne répondant pas aux exigences des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation.

Le tribunal a dit que la société Voltaico doit rembourser la somme de 11 700 euro à Monsieur Puig et qu'elle devra procéder au démontage du matériel et à la remise en état des lieux à ses frais.

Par une déclaration reçue au greffe de la cour le 12 janvier 2011, la SARL Energie Solaire VOLTAICO a régulièrement relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions signifiées le 3 août 2011, elle conclut selon le dispositif suivant:

- infirmer le jugement rendu par le Tribunal d'instance d'Uzès le 2 décembre 2010,

- débouter Monsieur Puig de l'intégralité de ses demandes,

- déclarer valable et bien-fondée l'injonction de payer délivrée par la SARL Energie Solaire Voltaico,

- condamner Monsieur Puig au paiement de la somme en principal, frais et accessoires de 7 894,53 euro outre les intérêts au taux légal à compter du 1er mars 2010, date de la signification de l'ordonnance,

- condamner Monsieur Puig à payer la somme de 1.000 euro au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société appelante fait valoir qu'elle produit aux débats le contrat en original signé le 24 juillet 2009 intitulé devis n° 22109 sur lequel figure bien au verso les conditions générales applicables et les mentions exigées par le Code de la consommation.

Elle souligne que lors de la signature du contrat entre les parties deux devis comportant un recto et un verso en original ont été établis dont un exemplaire a été remis à Monsieur Puig.

Elle ajoute qu'en tout état de cause la nullité dont se prévaut Monsieur Puig est de jurisprudence constante, une nullité relative qui a été couverte par l'exécution volontaire qui a été faite du contrat.

Elle précise que l'acompte de 5.850 euro n'a pas été remis en violation des dispositions de l'article L. 121-26 du Code de la consommation puisque le chèque de règlement est en date du 31 août 2009 comme le démontre la photocopie produite au débat.

Elle affirme qu'à aucun moment Monsieur Puig n'a indiqué que l'installation réalisée n'était pas conforme aux normes exigées et il ne démontre aucunement le non-respect du rendement prévu et garanti par la société Voltaico en sorte que sa demande présentée sur le fondement de l'article 1184 du Code civil doit être rejetée

Enfin, elle indique que n'ayant commis aucun manquement à ses obligations contractuelles la demande en paiement de dommages-intérêts ne saurait prospérer.

Aux termes de conclusions signifiées le 27 juin 2011, Monsieur Puig a conclu en principal à la confirmation du jugement déféré.

Il demande à titre subsidiaire à la cour de prononcer la résolution du contrat au visa de l'article 1184 du Code civil et subsidiairement, avant dire droit sur la résiliation, la mise en œuvre d'une mesure d'expertise portant sur la réalisation des travaux.

Il sollicite la condamnation de la société appelante au paiement des sommes de 3.000 euro au titre des désagréments causés par les déficiences du matériel et la perturbation du quotidien du concluant et 3.000 euro en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il soutient que l'exemplaire du contrat qui lui a été remis ne contenait pas les mentions obligatoires stipulées par l'article L. 121-23 du Code de la consommation en sorte que le contrat est nul.

Il affirme qu'il a versé un acompte de 5.850 euro dès la passation de la commande dès avant l'expiration du délai de réflexion de sept jours contrairement aux dispositions de l'article L 121-26 alinéa premier du même Code.

Il souligne que l'installation n'a jamais été achevée et s'avère non- conforme aux normes et que le document intitulé " bon de fin de travaux " est un faux.

Il considère que le contrat est par ailleurs résolu pour inexécution par l'une des parties de ses obligations puisque le matériel n'a jamais fonctionné correctement faute d'installation optimale.

Il précise qu'il est fondé à solliciter des dommages et intérêts en raison des manquements de la société Voltaico à ses obligations.

À titre tout à fait subsidiaire, il sollicite la mise en œuvre d'une mesure d'expertise afin notamment de pouvoir déterminer si les travaux réalisés sont conformes à ceux commandés.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La recevabilité de l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 3 février 2010 n'est pas discutée.

Par ailleurs, il n'est aucunement contesté, en l'espèce, que les dispositions du Code de la consommation relatives au démarchage sont applicables.

Monsieur Puig produit aux débats un devis n° 22109 qui comporte sa signature ainsi que la mention " lu et approuvé " dans le cadre d'une commande et de l'installation d'un système photovoltaïque en intégration toiture.

Ce devis ne comporte pas de verso contenant les mentions obligatoires stipulées par l'article L. 121-23 du Code de la consommation.

La société E.S. Voltaico produit aux débats le même document signé de Monsieur Puig mais qui lui comprend un verso sur lequel figure toutes les mentions prévues par la disposition légale susvisée.

Il apparaît que les deux documents sont des originaux.

Il appartient à la partie qui pratique le démarchage d'établir la régularité du contrat dont elle demande l'exécution.

En l'état du document remis à Monsieur Puig qui ne comporte pas de verso, la société E.S. Voltaico n'établit pas qu'elle a respecté les dispositions de l'article L. 121-23 du Code de la consommation notamment s'agissant de l'information sur le délai de rétractation.

La nullité du contrat est dès lors encourue.

Contrairement à ce qui est affirmé par Monsieur Puig aucun règlement n'a été effectué avant l'expiration du délai de rétractation de sept jours puisque le chèque d'acompte d'un montant de 5 850 euro qu'il a remis à la société E.S Voltaico a été rédigé et signé par lui le 31 août 2009.

Le paiement ainsi effectué est donc intervenu plus d'un mois après la signature du devis de commandes qu'il a accepté le 27 juillet 2009.

Il a donc bénéficié à ce moment-là déjà d'un temps suffisamment long pour réfléchir sur les termes et les conditions de l'engagement qu'il prenait.

Il n'est pas inutile de rappeler que Monsieur Puig avait décidé la pose de panneaux solaires afin de bénéficier en retour d'un rendement financier par leur utilisation.

Le non-respect des dispositions susvisées qui sont des règles formelles d'ordre public est sanctionné par la nullité du contrat de démarchage.

Cependant, ces dispositions du Code de la consommation ont pour objet la protection d'une seule des parties contractantes à savoir la partie qui achète ou commande la marchandise proposée.

Ainsi la nullité de la vente est donc seulement relative et est susceptible d'être prescrite ou couverte par l'acheteur lui-même.

La Cour de Cassation a d'ailleurs affirmé dans un arrêt en date du 28 novembre 1995 que la méconnaissance des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation est sanctionnée par une nullité relative.

Or, la nullité relative à la différence de la nullité absolue est susceptible de pouvoir être confirmée par la personne qui aurait pu l'invoquer en sorte qu'elle peut être couverte tacitement par l'exécution volontaire du contrat en application de l'article 1338 alinéa 2 du Code civil.

Ainsi, le juge peut-il retenir que le seul fait d'avoir laissé le contrat s'exécuter pendant plusieurs mois sans engager d'action en nullité et d'avoir attendu la signification d'une ordonnance d'injonction de payer pour engager une procédure impliquait la volonté de ce cocontractant de confirmer la commande passée.

En l'espèce, l'examen des correspondances échangées entre les parties à l'occasion de l'exécution du contrat et de l'installation des panneaux solaires permet de retenir que Monsieur Puig n'a jamais à aucun moment émis le souhait de mettre fin au contrat passé.

Il a certes contesté à plusieurs reprises les conditions d'exécution des travaux d'installation des panneaux solaires mais il n'a jamais émis la volonté de vouloir renoncer à la poursuite du contrat.

Il a ainsi adressé un nouveau règlement à la société E.S Voltaico d'un montant de 5 850 euro le 26 novembre 2009 ce qui démontre encore une fois sa volonté de poursuivre l'exécution du contrat.

Il ne résulte aucunement des pièces produites aux débats par Monsieur Puig la démonstration que l'installation effectuée ne serait pas à ce jour achevée, serait non-conforme aux normes ou connaîtrait à ce jour des défauts de fonctionnement.

Il a signé le 23 novembre 2009 un bon de fin des travaux et il ne produit aux débats aucun élément permettant de pouvoir considérer que ce document serait susceptible d'être un faux.

La partie appelante verse elle aux débats un courrier en date du 20 janvier 2010 adressé par la société SPIE à Monsieur Puig laquelle l'informe qu'elle se rendra à son domicile le mardi 2 février 2010 pour procéder au raccordement des travaux photovoltaïques.

Monsieur Puig ne précise aucunement que ce raccordement n'a pas eu lieu et qu'à ce jour l'installation n'est pas en mesure de fonctionner et donc de donner satisfaction.

Il convient en conséquence d'écarter l'application des dispositions de l'article 1184 du Code civil, la demande de résolution du contrat n'étant pas fondée.

Dans la mesure où la cour ne fait pas droit aux actions en nullité et en résolution du contrat la demande de dommages et intérêts présentée par Monsieur Puig ne peut être que rejetée.

En conséquence, il convient d'infirmer la décision déférée, de déclarer valable et fondée l'ordonnance d'injonction de payer rendue par le Tribunal d'instance d'Uzès le 3 février 2010 et dès lors de condamner Monsieur Puig au paiement de la somme en principal, frais et accessoires de 7 800,00 euro outre les intérêts au taux légal à compter du jugement du tribunal d'instance du 2 décembre 2010, l'appelant ne produisant pas aux débats l'acte de signification de l'ordonnance d'injonction de payer.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les dépens en ce compris ceux de la procédure d'injonction de payer et celle devant le tribunal d'instance sur opposition et ceux d'appel sont mis à la charge de Monsieur Puig en l'état de sa condamnation au paiement de sommes.

Par ces motifs - LA COUR, - Après en avoir délibéré conformément à la loi, - Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile en dernier ressort, - Infirme le jugement déféré, - Déboute Monsieur Joseph Puig de son opposition à l'ordonnance d'injonction de payer en date du 3 février 2010, - Condamne en conséquence Monsieur Joseph Puig à payer à la société Energie Solaire Voltaico la somme de 7 800 euro avec intérêts au taux légal à compter du 2 décembre 2010.