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Décisions

CA Angers, ch. com., 18 octobre 2011, n° 10-01830

ANGERS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Ormain

Défendeur :

Locam (Sté), Victoriaa (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Delmas-Goyon

Conseillers :

Mme Van Gampelaere, M. Vallee

Avoués :

SCP Chatteleyn, George, SCP Dufourgburg - Guillot

Avocats :

Mes Voltz, Stoppani

T. com. Angers, du 28 avr. 2010

28 avril 2010

Monsieur Laurent Ormain exerce depuis février 2008 sous l'enseigne " Les Meilleurs Artisans.Com " une activité de courtage en travaux et en maîtrise d'œuvre qui consiste à présenter les meilleurs professionnels disponibles pour réaliser leurs travaux.

En 2007, il a créé à cette fin un site internet " Les Meilleurs Artisans.Com ".

Le 30 octobre 2008, Monsieur Ormain a signé, suite à un démarchage à domicile, un bon de commande auprès de la société Victoriaa afin de faire réaliser un site Internet, en enregistrer un nom de domaine " Les Meilleurs Artisans.Com ", réaliser un hébergement du site et un référencement sur les moteurs de recherche francophones.

Ce contrat a été financé par la souscription d'un contrat de location auprès de la société Locam moyennant paiement de 48 loyers mensuels d'un montant de 120 euro HT, soit 143,52 euro TTC. Cette location devait débuter après réception du site par Monsieur Ormain.

Constatant qu'il était sans nouvelles de la société Victoriaa suite à une réunion de travail du 13 novembre 2008 à laquelle il avait pu donner quelques directives quant au développement du site, Monsieur Omain, qui connaissait quelques difficultés financières, a dénoncé sa commande par lettre recommandée avec avis de réception du 19 novembre 2008, informant la société Locam de sa décision par lettre du 5 décembre 2008.

Par lettre du 10 décembre 2008, la société Locam a contesté la possibilité pour Monsieur Ormain de rompre le contrat.

Constatant qu'après réception de la lettre de dénonciation, la société Victoriaa avait mis en ligne une page Internet dans des conditions qui ne paraissaient pas conformes à son engagement, Monsieur Ormain a, par lettre de son Conseil du 15 décembre 2008, mis en demeure la société Victoriaa de lui confirmer la résolution du contrat et, par voie de conséquence, du contrat de location. Le même jour, il a avisé la société Locam du litige l'opposant à la société Victoriaa.

Le 20 décembre 2008, Monsieur Ormain a rejeté la demande de prélèvement de la société Locam.

Par lettre du 16 janvier 2009, la société Locam a mis en demeure Monsieur Ormain de lui régler le loyer de décembre outre une clause pénale et des intérêts de retard pour un montant de 160, 24 euro.

Par lettre de son Conseil du 2 février 2009, la société Locam a adressé un procès verbal de réception du site Internet signé par Monsieur Ormain, signature qu'il a déniée.

Par acte du 16 mars 2009, Monsieur Ormain a assigné la société Victoriaa et la société Locam devant le tribunal de commerce d'Angers aux fins de voir prononcer la nullité du contrat souscrit avec la société Victoriaa, subsidiairement de dire que ce contrat ne pouvait lui être opposé, en toute hypothèse dire que la résolution judiciaire du contrat était justifiée, prononcer cette résolution judiciaire en raison des manquements de la société Victoriaa, subsidiairement constater que la résolution du contrat principal entraîne celle du contrat accessoire, condamner la société Victoriaa à rembourser la société Locam et cesser toute diffusion de la page Web mise en ligne par elle sur l'adresse " les-meilleurs-artisans.eu. "

Par jugement du 28 avril 2010, le Tribunal de commerce d'Angers a débouté Monsieur Ormain de ses demandes, dit l'engagement de Monsieur Laurent Ormain définitif à l'égard des sociétés Victoriaa et Locam par le seul effet de la signature du procès verbal de livraison et de conformité, sans restriction ni réserve, le 17 novembre 2000, dit que c'est à bon droit que la société Locam a prononcé la résiliation du contrat de location au 12 mars 2009 pour défaut de paiement des loyers, condamné Monsieur Laurent Ormain à payer à la société Locam la somme de 6 888, 96 euro en principal outre celle de 688,89 euro à titre de clause pénale et la somme de 500 euro à la société Victoriaa à titre de dommages- intérêts pour procédure abusive outre une indemnité de procédure.

LA COUR

Vu l'appel formé contre ce jugement par Monsieur Ormain ;

Vu les dernières conclusions du 7 juin 2011, aux termes desquelles Monsieur Ormain, appelant, demande à la Cour, avec une indemnité de procédure, au visa des articles somme 1134, 1147, 1165 et 1184 du Code civil, poursuivant l'infirmation du jugement, de constater que le contrat n'a pas été valablement signé par la société Victoriaa, qu'elle n'est pas contractante et que le contrat ne peut être opposé à Monsieur Ormain et le déclarer nul et de nul effet, subsidiairement prononcer la résolution judiciaire en raison des manquements de la société Victoriaa, constater que la résolution du contrat principal entraîne celle du contrat accessoire, en toute hypothèse condamner la société Victoriaa à garantir Monsieur Ormain de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, et condamner la société Victoriaa à cesser toute diffusion de la page Web mise en ligne par elle sur l'adresse " les-meilleurs-artisans.eu. " ;

Vu les dernières conclusions du 15 février 2011 aux termes desquelles la société Victoriaa, intimée, demande à la Cour, avec une indemnité de procédure, de confirmer le jugement déféré et de condamner l'appelant au paiement d'une amende civile de 1 500 euro pour procédure abusive par application de l'article 31-1 du Code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions du 4 janvier 2011, aux termes desquelles la société Locam, intimée, demande à la Cour, avec une indemnité de procédure, de confirmer le jugement ou à défaut de faire application des dispositions de l'article 18.4 du contrat de location et condamner Monsieur Ormain à régler la somme de 4 421, 83 euro, condamner la société Victoriaa à régler à la société Locam la somme de (6 888, 96 euro + 688, 89 euro) - 4 421, 83 euro = 3 156,02 euro, condamner la SARL Victoriaa à relever et garantir la société Locam de toutes condamnations qui seraient prononcées contre elle au bénéfice de Monsieur Ormain et à lui payer la somme de 6 888, 96 euro en principal outre celle de 688,89 euro à titre de clause pénale ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le contrat principal

I) Sur la nullité du contrat

Monsieur Ormain s'appuie sur le bon de commande qui prévoit que la " validité des présentes est subordonnée à leur signature par le responsable de Victoriaa " pour soulever la nullité du contrat motif pris que ce n'est que le commercial qui l'a démarché qui a signé la convention et non le responsable de la société Victoria.

La société Victoriaa rétorque que la commerciale Madame Langlais avait précisément pour mission de prospecter la clientèle 'en vue de la signature de contrats de vente de conception de sites Internet et de leur mise à jour' et qu'elle n'avait pas besoin d'une délégation de pouvoir pour signer le bon de commande et observe que Monsieur Ormain n'a pas usé de sa faculté de rétractation tirée du Code de la consommation.

L'article L. 121-23 du Code de consommation protège les personnes démarchées dans les conditions prévues à l'article L. 121-21 du même Code. La faculté de renonciation qu'il instaure qui autorise ces personnes, en considération des conditions particulières dans lesquelles elles ont contracté, à rétracter leur engagement, est sans effet sur la faculté dont dispose tout contractant à exciper de la nullité d'une convention par un moyen qu'il juge approprié.

Il est constant que le bon de commande litigieux a été signé d'une part par Monsieur Ormain et d'autre part par Mademoiselle Noella Langlais, commerciale. Il est produit le contrat de travail de l'intéressé qui précise que dans le cadre de ses fonctions, Mademoiselle Langlais devra prospecter la clientèle potentielle de la société en vue de la signature de contrats de vente de conception de sites internet et de leur mise à jour. Cette mission explicite confère à l'intéressée la délégation de signature des bons de commande sans qu'il soit besoin d'y ajouter une délégation spéciale de la société Victoriaa.

Certes, le contrat de travail comporte un article 4 qui impose à l'intéressée d'établir les devis et les commandes et de les soumettre à la Direction pour contrôle et signature avant envoi. Cependant, cette obligation, qui figure à l'article 4 intitulé 'organisation du travail', régit les relations entre l'employée et sa direction afin que celle-ci exerce effectivement sa mission de contrôle de l'activité de sa salariée, notamment en ce qui concerne sa politique commerciale. Cette exigence est stipulée dans le bon de commande et, contrairement à ce que soutient Monsieur Ormain, il ne peut être érigé en cause de nullité de la convention, la clause qui stipule que 'la validité des présentes et leurs annexes est subordonnée à leur signature par le responsable de Victoriaa'. En effet, le libellé même de cette clause, qui s'articule avec l'obligation précitée de la commerciale vis à vis de son employeur, démontre qu'elle est stipulée en la seule faveur de la société afin de permettre à celle-ci d'exercer effectivement son contrôle avant d'être définitivement engagée, ce dont le cocontractant est seulement informé. Il s'ensuit que moyen tiré de la nullité doit être écarté.

II) Sur la résolution du contrat

Monsieur Ormain soutient que le site Internet n'est pas conforme au bon de commande dont l'objet était d'améliorer le site Internet sous le nom de domaine www.les-meilleurs-artisans.com et non pas de rédiger une page unique d'accueil inexploitable et sur une extension " eu " (européenne) non commandée par Monsieur Ormain qui souhaitait une extension en " com ". Il observe que dans la production de la société Victoriaa ne figurent ni le référencement sur les moteurs de recherche francophones ni les pages réalisées ni la réservation du nom de domaine figurant sur le bon de commande.

L'appelant prétend que la société Victoriaa n'a pas respecté les dispositions contractuelles en ce qui concerne le nom domaine (" eu au lieu de com. "). Il réfute toute force probante à la fiche CMG censée justifier le travail de la société et qu'il juge très incomplète et qu'il n'a pas signé. Monsieur Ormain estime que, contrairement à ce que soutient la société Victoriaa, il a normalement collaboré et reproche au contraire à celle-ci de ne pas avoir dressé une liste des informations nécessaires au développement du site. Il fait valoir que, compte tenu de son délai de rétractation, la société Victoriaa n'a disposé que de cinq jours ouvrables pour réaliser le site prétendument reçu le 17 novembre 2008. Au total, Monsieur Ormain fait valoir que le site internet réalisé est inexploitable et enregistré sous un nom de domaine non conforme au bon de commande.

Monsieur Ormain dénie sa signature sur le procès verbal de réception et de livraison conforme du 17 novembre 2008 dont il conteste également la réalité de la date compte tenu de l'incompatibilité de celle-ci avec l'enregistrement le même jour du nom du domaine et la création du site et du fait qu'il estime suspect que la date ait été apposée par la même personne que celle qui l'a démarché. Il observe enfin que le libellé même de la 'réception d'un site Internet montre qu'elle n'est pas conforme au bon de commande et que s'il avait réellement réceptionné le site, il aurait constaté ces non conformités.

La société Victoria soutient avoir reçu Monsieur Ormain le 13 novembre 2008 et avoir rédigé une fiche CMG comportant le tampon de Monsieur Ormain et attestant le travail qu'elle a accompli.

La société Victoriaa observe que le client d'un contrat de conception de site doit participer activement à la conception de celui-ci. Elle ajoute qu'il s'agissait pour elle de créer un nouveau site et non pas une refonte d'un précédent et que si une reprise immédiate de l'ancien nom de domaine devait être effectuée, Monsieur Ormain devait fournir un Code d'authentification ce qu'il n'a pas fait de même que les Codes d'accès en fr. dont il est également propriétaire. La société intimée dénie tout manquement à ses obligations.

S'agissant du procès verbal de livraison et de conformité, la société Victoriaa observe que Monsieur Ormain n'a pas porté plainte pour faux tant en ce qui concerne la signature que la date. Elle rappelle au visa d'une jurisprudence constante que la signature de ce procès verbal de livraison et de conformité a engagé son signataire.

La société Locam fait valoir qu'il ne peut y avoir de résiliation du contrat accessoire s'il ne peut être jugé judiciairement d'une résolution du contrat principal et que Monsieur Ormain a perdu le bénéfice de cette action en raison de la résiliation du contrat par lettre recommandée avec avis de réception du 12 mars 2009 reçue le 14 mars c'est à dire avant son assignation. Elle fait observer que la signature du procès verbal de conformité porte le cachet professionnel de l'intéressé.

Le contrat principal passé entre Monsieur Ormain et la société Victoriaa résulte du seul bon de commande signé le 30 octobre 2008. Il n'y est nullement fait mention de l'existence de la société Locam et de sa qualité de cessionnaire du site Web objet de la convention. Il est simplement précisé dans les conditions générales que le tarif sera payable d'avance et à réception de la facture, soit par le client soit par l'organisme qui aura accepté de financer pour le compte du client les prestations envisagées dans les termes et conditions du contrat signé à cet effet.

Le contrat de location financière passé entre la société Locam et Monsieur Ormain donne au locataire le mandat d'agir en résolution du contrat passé entre le fournisseur et le loueur pour vices cachés et rédhibitoires. Le fait que cette action soit perdue par une éventuelle résiliation du contrat de location est inopérant puisque ce n'est pas celle-ci qui est introduite au principal par Monsieur Ormain qui agit contre la société Victoriaa en résolution du contrat de prestation de service, action dont la possibilité ne lui est d'ailleurs pas déniée par cette dernière. La clause N7 du contrat passé initialement entre Monsieur Ormain et la société Victoriaa vise un organisme ayant accepté de 'financer pour le compte du client les prestations envisagées' sans d'ailleurs citer la société Locam. Il s'est ainsi opéré un contrat de prestations de service entre Monsieur Ormain et la société Victoriaa. La société Locam intervient certes en qualité de loueur dans le cadre du contrat accessoire de location financière qui précise que le loueur est titulaire des droits de propriété intellectuelle nécessaire à la conclusion du contrat sur l'architecture technique et visuelle du site Web. Cependant, c'est la signature par le locataire du procès verbal de conformité du site Web qui est le fait déclencheur de l'exigibilité des loyers et son acceptation par le fournisseur du transfert des droits de propriété sur l'architecture technique et visuelle du site Web. Il se déduit de ces éléments que la contestation par Monsieur Ormain de la validité du procès verbal de conformité interdit de considérer qu'il n'est plus recevable à agir en résolution du contrat principal au motif d'une résiliation du contrat de location financière au prétexte du non paiement de loyers dont le déclenchement est précisément initié par un procès verbal dont l'appelant conteste la validité.

Monsieur Ormain conteste en effet avoir signé le procès verbal de livraison et de conformité versé aux débats. Ce désaveu de signature impose à la Cour de procéder à la vérification d'écritures prévue à l'article 287 du Code de procédure civile, tout en observant à titre liminaire et au visa de l'article 1323 du Code civil que c'est à la partie qui invoque l'acte dont la signature est déniée ou méconnue d'en établir la sincérité.

Or, bien qu'il soit admis par les parties que l'original du document de question ait été produit en première instance, la société Victoriaa n'a pas versé aux débats cette pièce en appel, alors qu'il est explicitement demandé par Monsieur Ormain une vérification d'écritures qui exige, pour sa fiabilité, une telle production. En outre, l'examen du document en cause permet certes de relever que le cachet de l'entreprise de Monsieur Ormain " les -meilleurs- artisans.com " figure sur ce document mais aussi de constater que la signature à la calligraphie relativement complexe ressemble à celles figurant sur les deux documents de comparaison (le contrat principal et le contrat de location) avec toutefois une différence assez remarquable sur la dernière boucle qui s'interrompt pour contourner le mot " com " figurant sur le cachet, interruption non repérable sur les documents de comparaison. Cette différence, alliée au fait qu'il peut être décelé sur cette photocopie un léger tremblement dans les lignes et que le document ne comporte aucune autre mention écrite par Monsieur Ormain et notamment les termes 'lu et approuvé', impose de considérer qu'en s'abstenant de produire la pièce en original permettant à la Cour de parfaire sa vérification, la société Victoriaa est défaillante dans l'administration de la preuve de la sincérité de la signature de son cocontractant.

Il convient en conséquence de constater que le procès verbal de livraison et de conformité est sans valeur probante quant à la conformité de la livraison avec la commande et d'examiner le bien fondé de la demande en résolution présentée par Monsieur Ormain.

Il est constant que ce dernier a initialement formé sa demande de résiliation du contrat formalisée par lettre recommandée avec avis de réception du 19 novembre 2008 par laquelle il sollicitait l'annulation pure et simple du bon de commande au motif que le projet était financé par des marchés venant d'être annulés avec le risque de mettre l'entreprise dans une situation inquiétante. Cependant, l'envoi de cette lettre deux jours après le procès verbal de réception dont la valeur probante est contestée ne dénie nullement à l'intéressé, même si des raisons économiques ont pu guider son action, le droit de faire valoir les moyens qu'il juge opérants pour obtenir la résolution judiciaire du contrat principal, moyens qu'il a d'ailleurs ébauchés dès le 5 décembre 2008 dans un courrier adressé à la société Locam et que son Conseil a encore exposés pour partie dans un courrier adressé à la société Victoriaa le 15 décembre 2008 aux termes duquel il lui reprochait d'avoir achevé le site en toute hâte après réception de la lettre de dénonciation.

Le bon de commande obligeant la société Victoriaa mentionnait : la réalisation d'un site Internet, la réservation du nom de domaine www.les-meilleurs-artisans.com, l'hébergement du site et le référencement sur les moteurs de recherche francophones.

Il est constant que Monsieur Ormain était déjà titulaire du nom de domaine en " com ". Or, le bon de commande était explicite tant dans la mention ci-dessus rapportée que dans les conditions générales annexées qui stipulent : " le prestataire enregistrera un nom de domaine en " com " dont ce dernier se sera assuré au préalable la disponibilité par rapport aux marques et signes distinctifs déposés ou notoires conformément aux droits des marques applicables. Ce service comprend le dépôt, l'enregistrement et le renouvellement chaque année du nom d'un ou plusieurs noms de domaines additionnels auprès de l'Afnic ou de l'Internic. Le nom en " fr " restera à la charge du client. "

Ainsi, il est acquis que la société Victoriaa s'est formellement engagée à fournir un nom de domaine en " com ", alors qu'en réalité elle a fourni un nom de domaine en " eu ", extension européenne nullement sollicitée. Cette exigence de domaine non satisfaite correspond pourtant à un aspect fondamental de la prestation puisque, ainsi que le souligne à juste titre l'appelant, l'extension en " com " est la plus connue du public, notamment en ce qui concerne les commerçants coutumiers de l'utilisation de celle-ci.

La société Victoriaa ne peut échapper à sa responsabilité en s'appuyant sur l'affirmation au demeurant exacte en son principe qu'en matière de mise en œuvre de site internet le client est tenu de collaborer utilement avec le fournisseur. En effet, cette argumentation ignore le fait que c'est au professionnel d'exiger du client les données nécessaires à la délivrance d'un site conforme à la commande. Or, tout en admettant que Monsieur Ormain a bien fourni le logo de son entreprise, la société Victoriaa prétend que l'intéressé aurait refusé de transmettre les Codes d'authentification sans pour autant justifier d'aucune demande en ce sens de sa part. Sur ce plan, la fiche CMG (créer, modifier, gérer votre site) censée avoir été établie le 13 novembre ne fournit aucun renseignement utile, l'appelant faisant justement observer qu'il s'agit d'un document qu'il n'a ni approuvé ni signé et que son caractère incomplet, en l'absence notamment du nom de domaine à reprendre, démontre le caractère hâtif du développement du site.

Même si la société Victoriaa n'est pas tenue de s'aligner sur les prestations offertes par ses concurrents, les propositions de ceux-ci versées aux débats par Monsieur Ormain conduisent à constater que le développement du site par la société Victoriaa a été opéré sans validation d'un cahier des charges comprenant des objectifs précis. Il a consisté en une page unique pré-formatée ne permettant l'accès à aucune information, ainsi que cela a pu être vérifié par constat d'huissier du 9 septembre 2009. Il n'est pas discuté que les différents onglets proposés ne permettent pas à l'utilisateur d'obtenir une page supplémentaire.

Au total, il ne peut être considéré qu'en créant une seule et unique page d'accueil avec un nom de domaine erroné et sans justifier de la réalisation d'un référencement, la société Victoriaa ait rempli ses obligations contractuelles auxquelles elle au contraire gravement failli. Dans ces conditions, la cour ne peut qu'infirmer la décision des premiers juges et prononcer la résolution du contrat principal aux torts de la société Victoriaa au du 17 novembre 2008, date de la délivrance non conforme.

La demande subséquente de Monsieur Ormain de voir condamner la société Victoriaa à cesser toute diffusion de la page Web mise en ligne par elle sur l'adresse " les-meilleurs-artisans.eu " n'est pas fondée puisque l'intéressé ne justifie d'aucun droit sur ce nom de domaine.

Sur le contrat accessoire de location financière

Monsieur Ormain soutient jurisprudence à l'appui qu'en raison de l'interdépendance entre les contrats de prestations de service et de location souscrits le même jour, la résolution du contrat principal emporte celle de l'accessoire.

La société Locam estime au visa de l'article 2.2 du contrat que Monsieur Ormain s'est engagé définitivement vis à vis de la société Locam en signant le procès verbal de conformité et soutient que les deux contrats ont une indépendance juridique. Elle soutient qu'il y a indépendance juridique entre les deux contrats, que sa seule obligation est de payer le prix du matériel au vu du procès verbal de livraison, ce dont il se déduit que ce contrat de location ne peut être affecté par un contentieux postérieur entre locataire et fournisseur. A défaut, elle excipe aussi de l'article 18-4 du contrat de location de site Web qui précise " en cas de résiliation du présent contrat, suite à la résolution du contrat entre le loueur et le fournisseur, le locataire devra verser au loueur une indemnité égale au montant des sommes versées par le loueur au fournisseur pour la conception des droits objet du présent contrat, sans déduction des loyers échus et payés jusqu'au prononcé judiciaire de la résiliation ".

Il est certain que les deux contrats ont été conclus le même jour avec pour objectif la création et l'administration d'un futur site Internet. Le bon de commande incluait d'ailleurs non seulement la description de la prestation de services mais encore la location moyennant un loyer de 120 euro HT pendant la durée de 48 mois. Il en résulte que ces deux contrats sont relatifs à une opération économique commune qui scelle leur interdépendance, étant observé qu'il n'existe aucune clause de divisibilité dans les conventions. En conséquence, la résolution du contrat principal entraîne celle du contrat accessoire à la même date et, infirmant le jugement entrepris, la Cour ne peut que débouter la société Locam de sa demande en paiement de la somme de 6 888,96 euro outre celle de 688,89 euro au titre de la clause pénale, dirigée contre Monsieur Ormain.

En outre la société Locam ne peut utilement exciper de l'article 18-4 du contrat de location qui vise l'hypothèse de la résolution du contrat entre loueur et fournisseur, nullement demandée par les parties, et non pas celle entre locataire et fournisseur ou celle entre bailleur et locataire. Il s'ensuit que la société Locam n'est pas fondée dans sa demande en paiement de la somme de 4 421,83 euro dirigée contre Monsieur Ormain.

Sur la demande de la société Locam dirigée contre la société Victoriaa

La demande fondée sur l'article 18-4 du contrat de location financière étant rejetée, la société Locam n'est pas fondée à obtenir paiement par la société Victoriaa de la somme de 3 156,02 euro représentant le solde du montant total des loyers après paiement par Monsieur Ormain de la somme de 4 421,83 euro, représentant la facture payée par la société Locam à la société Victoriaa suite au transfert à cette dernière au loueur des droits de propriété de l'architecture technique et visuelle du site Web et la clause pénale.

La société Locam ne peut davantage demander à la société Victoriaa à être relevée et garantie puisque aucune condamnation n'est prononcée contre le bailleur.

En revanche, la demande en réparation de son préjudice apparaît fondée. En effet, même si ce fondement n'est pas explicitement formulé, ainsi que le soutient la société Victoriaa, il résulte des éléments factuels ci-dessus exposés et notamment de l'interdépendance des contrats que le manquement de la société Victoriaa à ses obligations a généré pour la société Locam un préjudice qui est à la hauteur du montant total des loyers qu'elle n'a pas pu percevoir, soit la somme de 6 888, 96 euro que devra lui payer la société Victoriaa, la demande supplémentaire relative à la clause pénale devant être rejetée puisque celle-ci sanctionne le seul locataire qui n'est plus ici concerné.

Sur la demande au titre de la procédure abusive

La demande présentée de ce chef par la société Victoriaa ne peut qu'être rejetée puisque Monsieur Ormain a été déclaré bien fondé en ses prétentions.

Sur les frais

L'équité impose de faire supporter par la société Victoriaa les frais irrépétibles d'appel exposés par Monsieur Ormain et la société Locam.

La partie qui succombe doit les dépens.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau, Prononce la résolution du contrat de prestation de service conclu entre Monsieur Ormain et la société Victoriaa à la date du 17 novembre 2008, Constate que la résolution du contrat principal entraîne celle du contrat accessoire de location financière à la même date, Condamne la société Victoriaa à payer à la société Locam la somme de 6 888,96 euro en réparation de son préjudice, Déboute les parties du surplus de leurs demandes, Condamne la société Victoria à payer à Monsieur Ormain la somme de 1 500 euro et à la société Locam la somme de 800 euro au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Victoriaa aux dépens de première instance et aux dépens d'appel recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.