CA Rennes, 1re ch. B, 18 septembre 2008, n° 07-04177
RENNES
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
VGC Distribution (SAS)
Défendeur :
Menguy
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Simonnot
Conseillers :
M. Gimonet, Mme Nivelle
Avocats :
SCP d'Aboville, Demoncuit Saint-Hilaire & Le Callonnec, SCP Gautier-Lhermitte
Par jugement contradictoire du 2 mai 2007, le Tribunal de grande instance de Brest a :
- débouté la société VGC Distribution exerçant sous l'enseigne Vogica de son action en paiement formée contre Madame Menguy et de toutes ses actions subsidiaires dont celle relative à l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, devenu depuis lors Code de procédure civile,
- reçu Madame Menguy en son action en annulation des deux contrats de vente du 4 septembre 2005 en raison des manœuvres dolosives dont ils sont entachés,
- condamné la société VOC Distribution à payer à Madame Menguy :
21 000 euro et 17 600 euro, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2006,
7 596 euro à titre de dommages-intérêts,
2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné la société VGC Distribution aux dépens.
La société VGC Distribution, qui est appelante de ce jugement, aux termes de ses dernières écritures signifiées le 18 février 2008, conclut à son infirmation et demande à la cour de condamner Madame Menguy à lui payer la somme de 44 000 euro et celle de 35 000 euro, soit en tout 79 000 euro, demande acte de ce que, dès règlement, elle procédera à l'exécution de la vente, et sollicite 2000 euro au titre des frais irrépétibles.
Elle expose que, lors de la foire-exposition de Vannes, Madame Menguy lui a passé commande d'une cuisine pour un montant de 44 000 euro et d'une salle de bains pour un montant de 35 000 euro.
Elle indique que les chèques d'acompte de 17 600 euro pour la cuisine et de 21 000 euro pour la salle de bains sont revenus impayés.
Elle considère que la vente est parfaite et que Madame Menguy n'a été victime ni d'une erreur sur l'objet du contrat ni d'un dol.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 15 janvier 2008, Madame Menguy conclut à la confirmation du jugement et sollicite 3 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle expose qu'à la date de la signature des contrats, elle projetait d'acquérir un nouveau logement à l'intérieur duquel des aménagements seraient peut-être à faire et allègue que le vendeur de la société lui avait proposé de faire une estimation du coût de ces aménagements.
Elle soutient que son consentement a été vicié, le vendeur lui ayant fait croire que la commande était en réalité une simple évaluation du prix et que les deux chèques qu'elle avait remis étaient des chèques de caution qui ne seraient pas encaissés.
Elle fait valoir que la société VGC Distribution a manqué à l'obligation d'information pesant sur elle en application de l'article L.111-1 du Code de la consommation.
L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 29 mai 2008.
DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DECISION :
Que, le 4 septembre 2005, sur le stand de la société VGC Distribution à la foire de Vannes, Madame Menguy, retraitée, a passé commande :
- d'une cuisine intégrée moyennant le prix de 44 000 euro représentant le prix d'appareils électroménagers, de meubles de cuisine, d'accessoires et d'aménagements intérieurs de meubles, ainsi que les frais de démontage de l'ancienne cuisine et du plan de travail, les frais de pose et d'installation des appareils électroménagers et des meubles,
- d'une salle de bains aménagée moyennant le prix de 35 000 euro représentant le prix d'éléments sanitaires, de meubles, d'accessoires et d'aménagements intérieurs de meubles, ainsi que les frais de dépose de l'ancienne salle de bains et les frais de pose ;
Que, dans les deux cas, la livraison devait intervenir au plus tard le 31 décembre 2006, le lieu de livraison étant à déterminer ;
Qu'il s'agissait donc d'une commande d'une cuisine et d'une salle de bains dites " intégrées ", les appareils, équipements et meubles devant être adaptés à la configuration des pièces destinées à les recevoir ;
Qu'au jour de la commande, Madame Menguy ne savait pas encore en quel lieu ces appareils et meubles seraient installés ;
Qu'en effet, elle recherchait un nouveau logement dans la région brestoise à l'intérieur duquel des aménagements seraient peut-être à faire, maison dont elle a fait l'acquisition le 30 janvier 2006 ;
Que les affirmations de la société VGC Distribution selon lesquelles Madame Menguy lui aurait remis un plan sont purement gratuites et sont contredites par les énonciations des bons de commande qui mentionnent que le lieu de livraison est à déterminer ;
Qu'aux termes de l'article L. 111-1 du Code de la consommation, tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service ;
Qu'en concluant le 4 septembre 2005 une vente ferme et définitive alors qu'à cette date la configuration des pièces dans lesquelles la cuisine et la salle de bains devaient être installées était inconnue, de sorte que des modifications seraient nécessaires pour réaliser l'aménagement personnalisé objet du contrat la société VGC Distribution a manqué à l'obligation d'information pesant sur elle ;
Que les contrats seront annulés pour non-respect des dispositions de l'article L. 111-l du Code de la consommation ;
Qu'en conséquence, la société VGC Distribution sera condamnée à restituer à Madame Menguy les acomptes de 21 000 euro et de 17600 euro, avec intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2006, date de la première lettre valant mise demeure, la lettre du 23 mars 2006 n'étant pas suffisamment comminatoire ;
Que Madame Fohanno qui accompagnait Madame Menguy a attesté que cette dernière avait dit au vendeur qui sollicitait la remise de chèques d'acompte qu'elle n'était pas solvable pour le moment ce à quoi le vendeur a répondu que les chèques ne seraient pas mis à l'encaissement ;
Qu'en conséquence, la société VGC Distribution doit être condamnée à payer le coût de la pénalité libératoire qui se monte en tout à 5 676 euro (3 080 euro + 2 596 euro) euro à titre de dommages-intérêts réparant son préjudice matériel ;
Que la réalité d'un préjudice moral n'est pas établie ; que la demande de Madame Menguy en paiement de dommages-intérêts pour préjudice moral sera rejetée, le jugement étant infirmé sur ce point ;
Que les dispositions du jugement relatives à l'article 700 du Code de procédure civile étaient justifiées et seront maintenues ;
Qu'en indemnisation des frais irrépétibles exposés devant la cour, il y a lieu d'allouer à Madame Menguy 2000 euro ;
Par ces motifs, LA COUR : -Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, - Infirme le jugement déféré en ses dispositions relatives au point de départ des intérêts légaux sur les sommes de 21 000 euro et de 17 600 euro et en celles relatives aux dommages-intérêts, - Dit que les intérêts sur les sommes de 21 000 euro et de 17 600 euro courent au taux légal à partir du 10 juillet 2006,- Ramène à 5 676 euro le montant des dommages-intérêts revenant à Madame Menguy, - Confirme le jugement pour le surplus.