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Décisions

CA Caen, ch. civ., 17 octobre 2006, n° 05-02483

CAEN

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Fortin (Epoux)

Défendeur :

Piscine Conseils (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Boyer

Conseillers :

Mmes Beuve, Cherbonnel

Avoués :

SCP Mosquet - Mialon - D'Oliveira - Leconte, SCP Parrot - Lechevallier - Rousseau

Avocats :

Mes Bahougne, Le Mercier

TGI Alençon, du 11 juil. 2005

11 juillet 2005

" Début décembre 2003, sur le stand du salon de la piscine à Paris, Monsieur et Madame Fortin ont passé commande n° 012705 auprès de la Société Piscine Conseils, pour l'achat d'un abri de piscine d'un montant de 23 150 euro TTC.

Lors de la signature, ils ont communiqué au vendeur leur numéro de carte bleue, ainsi que sa date de validité, afin que l'acompte, d'un montant de 9 260 euro, soit débité à l'ordre du vendeur.

Par un courrier recommandé avec AR du 9 décembre 2003, ils ont fait connaître à Piscine Conseils leur intention d'annuler leur commande en se rétractant dans le délai de 7 jours.

Ils précisaient également qu'ils avaient informé leur banque de leur décision de rétractation et d'annulation afin qu'elle ne prélève aucun règlement sur leur compte correspondant à la commande signée le 5 décembre 2003. "

SUR QUOI

Attendu que les défauts affectant une convention n'entraînent pas nécessairement sa nullité ; que certaines clauses peuvent éventuellement être réputées non écrites et des garanties légales substituées aux garanties écrites, sans que la convention soit annulée ;

Qu'il faut donc rechercher si les reproches formulés par les époux Fortin sont de nature à entraîner la nullité du contrat ;

Attendu que les époux Fortin reprochent à la société d'avoir antidaté le bon de commande de deux jours ;

Mais qu'ils n'indiquent pas quel effet a pu avoir cette irrégularité alléguée sur leur consentement ; que l'on peut éventuellement retenir que la commande a été passée à la date qu'ils indiquent, mais que cela n'emporte pas de conséquence sur la validité du contrat ;

Attendu qu'ils lui reprochent également d'avoir fait figurer une garantie de dix années dans leur publicité alors que les conditions particulières ne prévoient qu'une garantie d'une année ; qu'ils estiment cette différence constitutive de dol ;

Mais qu'il faudrait que cette manœuvre, si elle est constituée, ait vicié leur consentement ; qu'ils ne prétendent pas avoir conclu en raison de cette garantie ; qu'ils ne prétendent pas non plus avoir demandé que la garantie décennale s'applique ;

Que cette circonstance apparaît indifférente à leur consentement et qu'elle ne vicie pas le contrat ;

Attendu qu'ils reprochent encore à leur venderesse de ne pas avoir mentionné l'obligation d'obtenir un permis de construire ;

Mais qu'ils ne prétendent pas que cette demande se serait heurtée à un refus et ne font état d'aucune difficulté particulière à l'obtenir ;

Que là encore, à supposer ce défaut constitué, aucune conséquence susceptible d'affecter la validité du contrat n'apparaît ;

Attendu qu'ils reprochent encore à la société Piscine Conseils de na pas avoir inséré de clause sur la protection de l'installation aux UV ;

Que la société Piscine Conseils verse au dossier une attestation de conformité dressée par le laboratoire national d'essai qui fait état de la conformité à la norme P 90-309, laquelle comprend un paragraphe sur les UV ; que ce document n'est pas analysé par les époux Fortin ;

Que dans ces conditions, on ne peut pas apprécier les conséquences de cette absence sur leur consentement ou la validité du contrat ;

Attendu surtout que la lettre de rétractation adressée par les époux Fortin le 5 décembre 2003 indique précisément qu'elle intervient 'en application du délai de rétractation de sept jours dont je bénéficie' ;

Qu'aucun vice du consentement n'a alors été allégué ;

Attendu qu'il faut donc rechercher si les époux Fortin bénéficiaient de ce délai de rétractation ;

Attendu que la commande a été passée sur un stand de foire ; que les époux Fortin ne bénéficient donc pas de plein droit de la législation en cas de démarchage à domicile ;

Que cependant, le bon de commande comprenait un formulaire de rétractation ;

Qu'il faut donc rechercher si les époux Fortin pouvaient légitimement croire qu'ils en bénéficiaient ;

Attendu que le formulaire mentionnait avant le coupon détachable de rétractation : " désistement (en cas de vente par démarchage à domicile exclusivement), conformément à la loi 72.1137 du 22 décembre 1972, dans les sept jours à compter de la commande ou de l'engagement d'achat, le client démarché à domicile a la faculté de renoncer à sa commande sous réserve d'en avertir le vendeur par lettre recommandée dans ce délai au moyen le cas échéant du bordereau de rétractation figurant ci-dessous. Si vous annulez votre commande, vous pouvez utiliser le formulaire détachable ci-contre. "

Attendu que la stipulation contractuelle est claire et que le lecteur normalement attentif ne peut pas croire que cette clause s'applique en dehors des cas de démarchage à domicile ;

Attendu que l'échelonnement des paiements ne permet pas de contredire cette clause claire ;

Attendu que les époux Fortin font encore valoir l'article 3 du contrat qui permettrait une modification de la commande ; que modification ne signifie pas rétractation ; qu'en outre, la clause est restrictive puis qu'elle indique : " toute modification... ne pourrait, par dérogation, être prise en considération que si elle parvient par écrit au moins sept jours après la date de la commande... passé ce délai, les acomptes versés resteraient acquis à la société Piscine Conseils, sans préjudice de son droit de poursuivre l'exécution forcée de la commande en cas de refus de l'acheteur d'honorer sa commande dans les termes d'origine " ;

Que l'on ne peut pas y lire une faculté de rétractation ;

Attendu que les époux Fortin invoquent l'article 7 du contrat :

" L'article 7 des conditions générales indique que la société Piscine Conseils ne se charge pas normalement ni de la pose, ni de l'installation du matériel fourni mais peut néanmoins mettre le client en rapport avec un professionnel indépendant. La société Piscine Conseils exclut sa responsabilité en ce qui concerne la prestation de ce professionnel et propose d'ajouter au prix de la commande de façon séparée le prix du forfait pose du professionnel.

La Cour relèvera que cette clause n'est pas claire au regard des indications portées sur le bon de commande, la case " livraison et pose " étant cochée.

Il est important de relever qu'un abri de piscine doit être obligatoirement installé par un professionnel dans la mesure où son efficacité dépend de son mode d'ancrage.

Par conséquent les époux Fortin ne pouvaient connaître l'étendue exacte de leur engagement vu qu'il existe une contradiction entre les deux documents.

Monsieur et Madame Fortin ne pouvaient donner un consentement valable sur ce bon de commande ne sachant pas si la Société Piscine Conseils prenait à sa charge la pose ou si de nouveaux frais allaient leur être facturés pour cette prestation. " ;

Que les premiers juges ont justement relevé : " C'est en vain que les époux Fortin soutiennent l'absence de détermination du prix alors qu'il est indiqué clairement sur le contrat, page 1 ; que le prix stipulé s'entend livraison + pose. "

Que les époux Fortin ne prétendent d'ailleurs pas avoir posé une question sur ce point ou reçu de la société Piscine Conseils une information contraire ;

Attendu que les époux Fortin soutiennent encore que l'article 10 du contrat présentait un caractère abusif en ce qu'il limitait la garantie des vices cachés ; mais que là encore, les premiers juges ont justement apprécié que cela ne pouvait entraîner que l'exclusion de la clause alors réputée non écrite ;

Que l'éventualité d'une sanction pénale est indifférente au présent litige ;

Que les époux Fortin argumentent aussi sur la garantie décennale de l'adversaire dont les preuves leur paraissent insuffisantes ;

Mais que cet argument intervenant après la conclusion du contrat et la rétractation, n'a aucune influence sur la conclusion du contrat ; qu'aucune question n'a été posée aux assureurs indiqués ;

Attendu que les époux Fortin font encore valoir que la commande était convenue sous condition de l'acceptation par l'usine ; mais que cette condition étant stipulée en faveur de la venderesse, ils ne peuvent s'en prévaloir ;

Attendu que le tribunal a pu justement considérer que le montant des dommages intérêts dus à la société Piscine Conseils doit correspondre au montant de l'acompte qui était dû à la commande.

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement rendu par le Tribunal de grande instance d'Alençon le 11 juillet 2005. Condamne les époux Fortin à payer à la société Piscine Conseils une indemnité de 2 000 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Les condamne aux dépens dont distraction au profit des avoués de la cause.