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Décisions

Cass. 1re civ., 30 octobre 2007, n° 05-15.744

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bargue

Paris, du 9 mars 2005

9 mars 2005

LA COUR : - Dit n'y avoir lieu à mettre hors de cause Mme X ; - Attendu qu'aux termes d'un acte reçu le 23 avril 1990, par Mme X, notaire, MM. Y et Z, marchands de biens, ont vendu aux sociétés Crédit mutuel Pierre 3, aux droits de laquelle se trouve la société Crédit mutuel Pierre 1, Multimmobilier 1 et Valoripierre 1, celle-ci représentée par sa liquidatrice, la société UFG Immobilier, sociétés civiles de placements immobiliers (les SCPI), des locaux affectés à l'usage de bureaux dans un immeuble en copropriété ; qu'à cet acte étaient rappelées, d'une part, la désignation du lot vendu faite au règlement de copropriété, selon laquelle il s'agissait d'un appartement destiné à l'habitation et, d'autre part, la stipulation dudit règlement suivant laquelle les locaux pouvaient indifféremment être utilisés comme habitation bourgeoise ou encore être occupés à usage professionnel, seuls des bureaux étant autorisés ; qu'il était encore précisé à cet acte de vente que, par une lettre du 7 décembre 1988, dont l'original était annexé à l'acte authentique, la Direction de l'urbanisme de la préfecture de Paris, en réponse à une demande de MM. Y et Z sur le caractère juridique des locaux, leur avait fait savoir que " l'affectation commerciale ne soulève pas d'objection, eu égard à l'application des dispositions de l'article L. 631-7 du Code de la construction et de l'habitation, réglementant les changements d'affectation de locaux. - Toutefois, j'appelle votre attention sur les dispositions des articles L. 520-1 et suivants du Code de l'urbanisme, qui prévoient une redevance, en cas de création de bureaux (...) " ; qu'il était également justifié du paiement par les vendeurs, MM. Y et Z, de cette redevance, justification également annexée à l'acte de vente du 23 avril 1990 ; que, plus de six ans après leur acquisition, les SCPI donnaient à bail les locaux dont s'agit, à usage de bureaux, à la société Audit Gestion Conseil ; que le 19 décembre 1997, la Direction de l'urbanisme de la préfecture de Paris informait les SCPI de ce que la société Audit gestion conseil occupait des locaux à usage professionnel sans autorisation et en infraction aux dispositions de l'article L. 631-7 du Code de la construction de l'habitation, leur donnait un délai de deux mois pour remettre ces locaux à usage d'habitation ; que les SCPI ont alors fait assigner MM. Y et Z en action estimatoire, en soutenant que les locaux étaient affectés d'un vice caché, ainsi que Mme X, en responsabilité professionnelle, pour manquement à son devoir de conseil et à son obligation d'assurer l'efficacité de l'acte de vente ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa seconde branche ; - Vu l'article 1382 du Code civil ; - Attendu que pour débouter les SCPI de leurs demandes dirigées contre Mme X, l'arrêt retient que, si la lettre du 17 décembre 1988 n'emportait pas autorisation, elle attestait de la possibilité de transformer l'affectation des locaux et que le notaire n'avait pas à rechercher si cette autorisation avait été demandée, voire si elle était assortie de conditions pouvant s'imposer à l'acquéreur ; que Mme X a joint à son acte les justificatifs produits et non contestés et n'avait pas de garantie à donner sur la nature juridique ou administrative des locaux objet de la vente et qui étaient décrits comme des bureaux ; qu'à la date de l'acte il n'existait pas de document autre qu'une lettre de l'administration pour attester le changement d'affectation des lieux en bureaux et que rien ne permettait au notaire d'envisager que la préfecture de Paris viendrait, plusieurs années après l'acte qu'il avait reçu, notifier l'obligation de restituer les lieux à leur usage antérieur d'habitation ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors que l'autorisation de changer l'affectation de locaux d'habitation en bureaux n'était, aux termes de l'article L. 631-7 du Code de l'habitation et de la construction dans sa rédaction de la loi du 23 décembre 1986, accordée qu'à titre personnel et qu'elle cessait de produire effet lorsqu'il était mis fin à titre définitif à l'exercice professionnel de son bénéficiaire, sans rechercher s'il appartenait au notaire, pour assurer la pleine efficacité de l'acte qu'il rédigeait, d'attirer l'attention de l'acquéreur sur la nécessité de requérir pareille autorisation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le premier moyen du pourvoi incident de MM. Y et Z, pris en sa première branche, dont l'examen est préalable à celui du second moyen du pourvoi principal : - Vu l'article 1641 du Code civil ; - Attendu que pour déclarer MM. Y et Z responsables du préjudice subi par les SCPI sur le fondement du vice caché, la cour d'appel a retenu que les biens immobiliers vendus étaient affectés d'un vice juridique les rendant impropres à leur destination dès lors que l'administration a mis en demeure tant les propriétaires que le locataire de les restituer à leur usage antérieur d'habitation ;

Qu'en se prononçant ainsi, alors que le vice allégué est consécutif à une absence de démarche administrative de la part des acquéreurs postérieure à la vente, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;

Par ces motifs, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 mars 2005, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; - remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.