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Décisions

Cass. com., 11 décembre 2007, n° 06-13.691

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Avocats :

SCP Piwnica, Molinié, SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, SCP Vuitton

Douai, du 2 févr. 2006

2 février 2006

LA COUR : - Joint les pourvois n° D 06-17.530 et n° F 06-13.691 qui attaquent le même arrêt ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société United biscuits industries (la société United biscuits) a commandé des bobines de ruban adhésif à la société Européenne d'emballages, assurée auprès de la société AGF, qui s'est adressée à la société Supertape France qui s'est elle-même fournie auprès de la société de droit néerlandais Supertape BV ; qu'alléguant qu'un lot de ruban ne présentait pas un pouvoir adhésif suffisant, la société United biscuits a assigné en indemnisation la société Européenne d'emballages, la société AGF, la société Supertape BV et la société Supertape France, cette dernière formant une action en garantie contre la société Supertape BV ;

Sur la recevabilité du pourvoi n° D 06-17.530 contestée par la défense : - Attendu que la société AGF soutient que la société Supertape BV n'aurait pas intérêt à agir ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a jugé irrecevable l'action engagée par la société United biscuits, a privé la société Supertape BV du bénéfice de cette décision en se déclarant incompétente pour connaître de la demande en ce qu'elle était dirigée contre elle ; que le pourvoi est recevable ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° F 06-13.691 : - Attendu que la société United biscuits fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'action engagée par elle sur le fondement de l'article 1604 du Code civil, alors, selon le moyen, que la cour d'appel a constaté que le pouvoir adhésif du ruban litigieux était insuffisant pour permettre un scellement étanche des boîtes métalliques octogonales de 1,3 kilogrammes auxquelles il était destiné ; qu'il en résultait que le ruban, trop " faible ", n'était pas adapté à l'usage auquel il était destiné ; que la cour d'appel n'a en conséquence pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en retenant que le désordre invoqué ne relevait pas d'un défaut de conformité mais de la garantie des vices cachés, en violation des articles 1604 et suivants du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant retenu que la société United biscuits prétendait vainement que la livraison différait en qualité ou en identité d'avec la commande, aucun élément de preuve n'étayant cette affirmation, et que les défauts de la chose vendue, à supposer qu'ils aient existé, n'auraient pas altéré sa nature mais l'auraient rendue impropre à sa destination normale, en l'occurrence le scellement de boîtes de biscuits de forme octogonale, la cour d'appel n'a pas encouru le grief du moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen du même pourvoi : - Attendu que la société United biscuits fait encore grief à l'arrêt d'avoir déclaré tardive son action sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code civil, alors, selon le moyen, que la cour d'appel a énoncé que le point de départ de la prescription était reporté pendant toute la durée des pourparlers, jusqu'à leur achèvement ; qu'en retenant, pour considérer que l'action, introduite le 28 juin 2002, était prescrite, que le délai de prescription avait commencé à courir le 12 mars 2001, date à laquelle le Laboratoire national d'essais avait rendu son analyse, tout en constatant que les pourparlers, pendant lesquels le délai s'était trouvé suspendu, avaient pris fin en novembre 2001, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses observations, en violation de l'article 1648 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant retenu que la société United biscuits avait acquis une exacte connaissance du vice qui affectait le ruban adhésif au plus tard le 12 mars 2001, soit treize mois avant l'assignation en référé, et qu'il n'était pas permis de dire que les parties concernées avaient été amenées à discuter concrètement d'une issue non judiciaire de leur différend, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a décidé que l'action de la société United biscuits sur le fondement de l'article 1641 du Code civil était tardive ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi n° D 06-17.530, pris en sa première branche : - Vu l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; - Attendu que pour déclarer la cour d'appel incompétente pour connaître des demandes dirigées contre la société Supertape BV, l'arrêt retient que seules les juridictions néerlandaises sont compétentes ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la compétence de la juridiction française pour statuer sur l'action de la société United biscuits contre la société Supertape BV n'était pas contestée et que cette dernière ne revendiquait la compétence de la juridiction néerlandaise que pour statuer sur l'appel en garantie dirigé à son encontre par la société Supertape France, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et violé le texte susvisé ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : - Rejette le pourvoi n° F 06-13.691 ; - Et sur le pourvoi n° D 06-17.530 : - Casse et annule, mais seulement en ce qu'il déclare la cour d'appel incompétente pour connaître des demandes dirigées contre la société Supertape BV, l'arrêt rendu le 2 février 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Douai, autrement composée.