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Décisions

CA Aix-en-Provence, 5e ch. corr., 7 mai 2008, n° 2008-299

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Salvan

Avocats :

Mes Lipari, Cabri

TGI Toulon, ch. corr., du 8 janv. 2007

8 janvier 2007

RAPPEL DE LA PROCEDURE :

LA PREVENTION :

X est prévenu :

d'avoir à la garde, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, fait souscrire a Madame Valero Raymonde veuve Salvador et Madame Richaud Mathilde un engagement en l'espèce s'acquitter chacune de 850 euro en échange d'un appareillage d'économie et de filtrage d'eau en contractant un crédit auprès de Y par le moyen de visite à domicile, démarchage par téléphone ou télécopie, alors que ces personnes n'étaient pas en mesure d'apprécier la portée des engagements qu'elles prenaient, abusant ainsi de leur faiblesse ou de leur ignorance s'agissant de personnes âgées (79 et 80 ans) souffrant de troubles du comportement et de pertes de mémoire ;

Faits prévus par art L. 122-8, art L. 122-9 du Code de la consommation et réprimés par art L. 122-8 du Code de la consommation.

LE JUGEMENT :

Par jugement contradictoire en date du 8 janvier 2007, le Tribunal correctionnel de Toulon a déclaré X coupable des faits qui lui sont reprochés et l'a condamné à la peine de 6 mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 1 500 euro.

Statuant sur l'action civile, le tribunal :

a reçu Magro Mathilde épouse Richaud en sa constitution de partie civile et a condamné le prévenu à lui payer la somme de 1 000 euro a titre de dommages intérêts toutes causes de préjudices confondus et celle de 400 euro sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

a reçu Salvador Raymonde en sa constitution de partie civile et a condamné le prévenu à lui payer la somme de 1 000 euro a titre de dommages-intérêts toutes causes de préjudices confondus et celle de 400 euro sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

DECISION :

RAPPEL SUCCINCT DES FAITS :

Apres démarchage téléphonique et rendez vous au domicile du client, X, gérant de la société Z, ayant son siège a Toulon, a vendu à Salvador Raymonde ainsi qu'a la voisine de celle-ci Magro Mathilde épouse Richaud, un appareillage de filtration et d'économie de consommation d'eau, pour un montant de 850 euro financé par le recours à un crédit. Le 1er avril 2006, Mesdames Richaud et Salvador se sont présentées à la gendarmerie de Toulon pour y déposer plainte pour abus de faiblesse. Lors de son audition, X a déclaré ne pas s'être aperçu des déficiences visuelles de ses clientes, ni de leur défaut de compréhension et s'est retranché derrière le respect des règles de vente à domicile.

MOYENS DES PARTIES :

Les parties civiles demandent la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a reconnu le délit constitue mais réclament chacune la somme de 5 000 euro a titre de dommages et intérêts et celle de 3 000 euro en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Le ministère public requiert la confirmation de la décision déférée.

Le prévenu fait plaider la relaxe.

MOTIFS DE LA DECISION :

EN LA FORME,

Attendu que X, comparait assisté de son conseil ;

Que Salvador Raymonde et Magro Mathilde épouse Richaud, sont représentées par leur conseil ;

Qu'il sera statué par arrêt contradictoire ;

Attendu que les appels formés par le prévenu et le ministère public sont recevables pour avoir été interjetés dans les formes et délais légaux.

AU FOND,

Sur l'action publique :

1- Sur la culpabilité,

Attendu que les premiers juges, âpres rappel de la prévention et de la procédure jusque la suivie, ont exactement exposé les faits ; que sur ces points, la cour se réfère aux énonciations du jugement déféré ;

Attendu que les premiers juges, pour entrer en voie de condamnation a l'encontre de X, ont exactement retenu que celui-ci avait abuse de l'état de vulnérabilité de deux clientes âgées et invalides, état qui était apparent, en les forçant à acheter un matériel destiné à filtrer et économiser l'eau et a souscrire a cet effet, un engagement à crédit hors de proportion avec leurs ressources et leurs besoins commettant ainsi l'infraction qui lui est reprochée ;

Qu'à juste titre ils ont relevé que l'abus résultait des techniques même de vente telles qu'elles ressortent notamment de l'argumentaire téléphonique joint au dossier, qui consiste à persuader le client de la réalité des économies qu'il va réaliser sur sa consommation d'eau, sans lui indiquer la qualité de l'organisme démarcheur, entretenant en cela la confusion avec un service officiel , et sans lui indiquer la consistance ni le cout du matériel qu'il va acquérir ;

Attendu que le prévenu ne peut sérieusement soutenir avoir ignore l'état de vulnérabilité de personnes atteintes d'une incapacité respective de 83 % et 100 % et âgées de 79 et 80 ans au moment des faits, qui vivaient seules et présentaient une très faible acuité visuelle ; que le fait que ces personnes étaient reconnues invalides depuis de très nombreuses années n'est pas un élément à décharge mais au contraire à charge, leur état d'invalidité n'ayant pu que s'aggraver au fil des années ;

Que le prévenu a néanmoins profité de cet état, pour les conduire à faire l'acquisition, au moyen d'un crédit venant grever leur revenus de retraitées, d'un matériel qui compte tenu de leurs besoins et de leur faible consommation d'eau, s'agissant de personnes sans activité et vivant seules, ne présentait pour elles aucune utilité ;

Que la rapidité avec laquelle a été soutiré leur engagement et installé le matériel, soit dès le huitième jour sans qu'elles aient eu le temps de le refuser est encore un indice de culpabilité ;

Attendu qu'il ne peut être fait grief aux victimes en situation de faiblesse de n'avoir pas congédié le plombier, lequel a jugé comme étant "limités" les pratiques de la société de Monsieur X, ni d'avoir tardé à déposer plainte, ayant, selon leurs propres explications, eu peur "de se faire gronder" en dévoilant les faits a leur entourage ;

Que la décision déférée sera en conséquence confirmée sur la culpabilité ;

2- Sur la peine,

Attendu que le tribunal a prononce une peine proportionnée à la gravite des faits reproches au prévenu et prenant en compte la personnalité de celui-ci ;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions relatives a l'action publique ;

Sur l'action civile :

Attendu que le tribunal a équitablement apprécié le préjudice subi par chacune des parties civiles qui ne sont pas appelantes et ne peuvent solliciter plus qu'il ne leur a été alloué ;

Que sa décision sera également confirmée ;

Attendu que l'équité commande l'application des dispositions de l'article 4754 du Code de procédure pénale au bénéfice de chaque partie civile.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l'égard de X, Magro Mathilde épouse Richaud et Salvador Raymonde, en matière correctionnelle, âpres en avoir délibéré conformément à la loi, En la forme, Reçoit les appels formés par le prévenu et le ministère public. Au fond, Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, tant pénales que civiles, Dit qu'il sera fait sursis à l'exécution de la peine d'emprisonnement dans les conditions des articles 132-29 et suivants du Code pénal, Compte tenu de son absence le Président n'a pu avisé le condamne que, s'il s'acquitte du montant de l'amende dans un délai de 1 mois a compter du prononce de l'arrêt, ce montant sera diminué de 20 % sans que cette diminution puisse excéder 1 500 euro mais que le paiement volontaire de l'amende ne fait pas obstacle a l'exercice des voies de recours (article 707-3 du Code de procédure pénale). Y ajoutant, Condamne X à payer à Magro Mathilde épouse Richaud et Valero Raymonde veuve Salvador la somme de 800 euro, chacune, par application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.