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Décisions

Cass. com., 3 novembre 2009, n° 08-20.933

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Avocats :

Me Le Prado, SCP Boutet

Lyon, du 11 sept. 2008

11 septembre 2008

LA COUR : - Sur les premier, deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens, réunis : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 11 septembre 2008), que la société Colas et la société Colas rail, aux droits de la société Seco rail (les sociétés Colas) ont acheté deux lots d'éthylotests à la société VDI qui les avait elle-même achetés à la société Delatex, leur importateur ; que ces éthylotests ont fait l'objet d'un arrêté ministériel du 23 novembre 2004, qui a suspendu pour un an leur importation ainsi que leur mise sur le marché et ordonné leur retrait en raison de leur dangerosité et de leur non-conformité aux normes françaises ; que n'ayant pu obtenir le remboursement amiable du prix des éthylotests retirés du marché, les sociétés Colas ont assigné en garantie des vices cachés la société VDI qui a appelé en garantie la société Delatex ;

Attendu que la société Delatex fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à relever et garantir la société VDI de toutes les condamnations prononcées à l'encontre de cette dernière à l'égard de la société Colas et de la société Seco rail (les sociétés Colas) alors, selon le moyen : - 1) que l'action estimatoire de l'article 1644 du Code civil n'est pas ouverte à l'acheteur d'une chose faisant l'objet d'un arrêté de suspension de mise sur le marché en application de l'article L. 221-5 du Code de la consommation dès lors que le retrait de la chose est prescrit et que le consommateur dispose de la faculté d'obtenir l'échange ou le remboursement ; qu'en déclarant néanmoins recevable l'action estimatoire des sociétés Colas et Colas rail, la cour d'appel a violé les articles précités, ensemble les articles 2 et 3 de l'arrêté du 23 novembre 2004 portant suspension de la mise sur le marché d'éthylotests électroniques destinés aux usagers de la route ; - 2) que dans sa lettre du 12 mai 2005 adressée à la société Delatex, régulièrement produite aux débats, le conseil de la société VDI rappelait qu'il "faisait suite à un courrier que vous avez bien voulu lui adresser le 1er décembre 2004 consécutivement à l'arrêté du 23 novembre 2004 " ; qu'il en résultait que la société Delatex avait informé son acquéreur des dispositions dudit arrêté et qu'en affirmant qu'elle n'avait pas satisfait à ses obligations, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ; - 3) qu'en l'absence de toute résolution, excluant toute restitution de la chose vendue, le fabricant ou l'importateur ne peut être condamné à garantir le revendeur d'une condamnation à restituer le prix de vente à l'acheteur ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1582, 1583 et 1644 du Code civil ; - 4) que dans le cas des articles 1641 et 1643 du Code civil, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée par expert ; que la cour d'appel a constaté que les sociétés Colas et Colas rail exerçaient l'action estimatoire, de sorte qu'elles n'avaient le droit de se faire rendre qu'une partie du prix, arbitré par expert, quand bien même l'arrêté du 23 novembre 2004, pris en application de l'article L. 221-5 du Code de la consommation, prévoyait que les éthylotests seraient remboursés ou échangés sur demande du consommateur ; qu'en ordonnant dès lors la restitution du prix, la cour d'appel a violé l'article 1644 du Code civil ; - 5) que l'arrêté du 23 novembre 2004, pris en application de l'article L. 221-5 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable, suspendait pour une durée d'un an l'importation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux des éthylotests électroniques mentionnés aux annexes I et II ; qu'une telle mesure provisoire de police administrative n'a pas pour effet de priver de valeur marchande les éthylotests visés, de sorte qu'en statuant comme elle le fait, sans relever l'existence d'une interdiction absolue et définitive de commercialisation desdits éthylotests, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1128 et 1598 du Code civil ; - 6) que tout ce qui est dans le commerce peut être vendu lorsque des lois particulières n'en ont pas prohibé l'aliénation ; qu'il incombe dès lors à celui qui prétend qu'un bien n'est pas dans le commerce, d'en rapporter la preuve et qu'en faisant peser sur la société Delatex, vendeur, la charge de la preuve que les éthylotests litigieux étaient utilisables dans d'autres pays, la cour d'appel a inversé le fardeau de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ; - 7) que le vendeur originaire ne peut être tenu à garantie au-delà de ce qu'il a reçu, sauf à devoir des dommages intérêts en réparation du préjudice causé ; qu'en statuant dès lors comme elle l'a fait quand la société Delatex faisait valoir qu'elle ne pouvait être tenue à garantir la société VDI, son acheteur, au-delà du prix qu'il avait payé, soit 64 500 euro HT, la cour d'appel a violé les articles 1644 et 1645 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la mesure de retrait ordonnée par l'arrêté du 23 novembre 2004, pris en application de l'article L. 221-5 du Code de la consommation, est motivée par le danger grave et immédiat que font courir à la sécurité et à la santé des personnes les éthylotests non conformes aux normes, que son article 3 ouvre au consommateur qui les a achetés la faculté d'obtenir le remboursement de la totalité de leur prix et qu'aucune condition de restitution n'était imposée pour ce remboursement, l'arrêt relève que les sociétés Colas n'ont pu obtenir le remboursement du prix, malgré les dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 23 novembre 2004, que les éthylotests sont inutilisables en raison de leur non-conformité aux normes françaises et qu'ils n'avaient plus aucune valeur marchande et encore que les sociétés Colas ont été dans l'impossibilité, en raison du manquement par la société Delatex à son obligation d'information de restituer les éthylotests ; que la cour d'appel, qui n'a pas dénaturé les termes du litige ni inversé la charge de la preuve, a, à bon droit, accueilli l'action estimatoire de ces derniers ; que le moyen, irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit en ses cinquième et septième branches, n'est pas fondé pour le surplus.

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.